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Elevage Pastoral en Ariège : Vulnérabilité des animaux au pâturage, évolutions des systèmes d'élevage, adaptations aux mesures d'accompagnement du plan du réintroduction et de conservation de l'ours brun (Ursus artos) dans les Pyrénées françaises 2006-2009.

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par Eric Duplex ZOUKEKANG
INPT/ENSAT/ENFA - Master AgroBioSciences: The Agro Food Chain 2008
  

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http://www.ensat.fr/

http://www.toulouseagricampus.fr/

MEMOIRE DE FIN D'ETUDES
Présenté pour l'obtention du diplôme de Master AGROBIOSCIENCES

Spécialisation : The Agro Food Chain
Option : Productions Territories and Sustainable Development

Elevage Pastoral en Ariège : Vulnérabilité des animaux au pâturage, évolutions des systèmes
d'élevage, adaptations aux mesures d'accompagnement du plan du réintroduction et de
conservation de l'ours brun (Ursus artos) dans les Pyrénées françaises 2006-2009.

Par :

Eric Duplex ZOUKEKANG

Année de soutenance : 2008

 
 

http://www.ensat.fr/

http://www.toulouseagricampus.fr/

MEMOIRE DE FIN D'ETUDES
Présenté pour l'obtention du diplôme de Master AGROBIOSCIENCES

Spécialisation : The Agro Food Chain
Option : Productions Territories and Sustainable Development

Elevage Pastoral en Ariège : Vulnérabilité des animaux au pâturage, évolutions
des systèmes d'élevage, adaptations aux mesures d'accompagnement du plan du
réintroduction et de conservation de l'ours brun (Ursus artos) dans les Pyrénées
françaises 2006-2009.

Par :

Eric Duplex ZOUKEKANG

Mémoire préparé sous la direction de : TERRIEUX Agnès

Présenté le : 27/06/2008

devant le Jury : Maîtres de Stage :

CHERVIN Christian HEMPTINNE Jean-Louis

ALLAIRE Gilles BESCHE-COMMENGE Bruno

Abstract

New social requirements for environmental concerns lead human to put into reserve of biodiversity lands of low economic interest. Historically, national governments are often hostile to pastoralists. In Ariège, History and social structure bring a certain resistance to sudden political changes. Here, livestock usually and it has become naturally leave the farm area to summer pastures in early to mid June and returns from mid September to early October. Individual holdings are of low flock seize, weak perspectives and alternatives, economic precariousness. Summer farming is the spearhead of the system not only as a tradition but due to its economic, sanitation, feedstuff constitution importance. Workforce, working conditions and economy are the most important factors explaining the resistance to change in this production system. The system practiced brings about a certain capacity of adaptation, but the devotion to allegation of a certain professional "pride" is a stumbling block for the implementation of bear subsidies. Farmers can practice husbandry in another way but, this way should come from them. Make the best possible use of grass on rangeland to feed its flock and produce beautiful lambs, minimizing trough feeding is the farmer's criterion of technical excellence. With bear project, breeders want to know what future, rural projects, and societal choices decisionmakers recommend for Pyrenees. They are pessimistic on their future because life and human dynamics in Ariège are now strongly dependent to pastoralism and they do not know if these constitutive criteria of sustainable development have been taken into consideration in the «wilding» approach.

In the economic context of pastoralism today, additional charges are hardly appreciable. Since accompaniment measures provide only 50% subsidy for the shepherd's charge when all the measures are not used and 80% when they are all implemented, near to 99% of farmers for the pastoral cohabitation investigated are just opportunists. They were using Patou dogs and «tightguarding» practices before the beginning of Bear project. They have joined parks to their functioning mode to have 80% compensation when taking shepherd. For all farmers, accompaniment measures are applicable neither everywhere nor at full-time, nor in all weathers; the pair Shepherd - Patou dog reduces predation but it should not be presented as panacea. In order to make a progress in the cohabitation process, authorities should come back, remove frustration and conflicts of interest and put the price. We have to divide by 200 the number of sheep that summer to know the number of shepherds, cabins, parks and Patou dogs necessary for effective herd protection.

Keywords : Pastoralism, stocking system, Mountain Summer Pasture, Bear, Biodiversity, Preservation, Environment, Sustainable Development.

i

Résumé

Les nouvelles exigences de la société en matière de sécurité environnementale ont conduit l'homme à mettre sous forme de réserves de biodiversité les espaces à faibles intérêts économiques. Historiquement, les gouvernements ont souvent été hostiles aux pastoralistes. En Ariège, l'histoire et la structure sociale offrent une certaine capacité de résistance à de brusques changements politiques. Ici, le cheptel a pris l'habitude (ce qui est devenu naturel) de quitter la ferme pour les pâturages d'été du début à la mi-Juin pour redescendre de la mi-Septembre à début Octobre. Les exploitations individuelles ont des effectifs réduits, les perspectives et alternatives économiques sont faibles et l'économie reste précaire. L'estivage est le fer de lance de ces exploitations, non seulement comme une tradition, mais en raison de son fort intérêt économique, sanitaire, stratégique et technique. La main-d'oeuvre, les conditions de travail et l'économie sont les principaux facteurs expliquant la résistance au changement dans ce système de production. Le système pratiqué procure une certaine capacité d'adaptation, mais l'attachement à une certaine fierté professionnelle est une pierre d'achoppement pour la mise en application des mesures d'accompagnements préconisées par le plan ours. Les éleveurs peuvent élever autrement, mais cette nouvelle façon doit absolument venir d'eux. Faire le meilleur usage possible de l'herbe des pâturages pour nourrir son troupeau et, produire de beaux agneaux en réduisant l'alimentation en bergerie est un critère d'excellence technique ici. Avec le plan ours, les éleveurs veulent savoir quel avenir, quels projets ruraux et choix de société les décideurs veulent pour les Pyrénées. Ils sont pessimistes sur leur avenir parce que la vie et la dynamique humaine dans l'Ariège sont maintenant fortement dépendantes de l'élevage et qu'ils ne savent pas si ces critères constitutifs du développement durable ont été pris en compte dans le projet d'ensauvagement.

Dans le contexte économique du pastoralisme aujourd'hui, les charges supplémentaires sont difficilement appréciables. Puisque les mesures d'accompagnement ne garantissent que 50% de subvention pour la prise en charge du berger lorsqu'elles ne sont pas toutes appliquées et 80% si toutes, près de 99% d'éleveurs favorables à la cohabitation enquêtés ne sont que des opportunistes ; ils pratiquaient déjà garde serrée avec un chien Patou avant le lancement du plan ours. Ils ont joint les parcs à leur mode de fonctionnement pour bénéficier de la subvention maximale. Pour tous les agriculteurs, les mesures d'accompagnement ne sont applicables ni partout, ni à plein temps, ni par tous les temps. La paire Berger - Chien Patou réduit la prédation mais ne devrait pas être présentée comme une panacée. Afin de faire un progrès dans le processus de cohabitation, les autorités devraient repartir de loin, ôter la frustration et les conflits d'intérêts et mettre le prix. Il faut diviser le nombre de moutons estivant par 200 pour avoir le nombre d'unités pastorales nécessaire pour une protection efficace du troupeau.

Mots-clés : Pastoralisme, système d'élevage, Estive, Ours, Biodiversité, Préservation, Environnement, Développement Durable.

ii

Table des matières

Abstract i

Résumé ii

Table des matières Erreur ! Signet non défini.

Liste des tableaux et figures Erreur ! Signet non défini.

Liste de abréviations et des acronymes Erreur ! Signet non défini.

Remerciements Erreur ! Signet non défini.

Introduction Erreur ! Signet non défini.

Chapitre 1 : Présentation générale de l'étude Erreur ! Signet non défini.

1.1 Contexte Erreur ! Signet non défini.

1.1.1 Le milieu naturel des Pyrénées Erreur ! Signet non défini.

1.1.2 Le milieu naturel de l'Ariège Erreur ! Signet non défini.

1.1.3 Le milieu culturel et humain de l'Ariège Erreur ! Signet non défini.

1.1.4 Le milieu Agricole de l'Ariège Erreur ! Signet non défini.

1.1.4.1 Une gestion collective des ressources Erreur ! Signet non défini.

1.1.4.2 Un intérêt patrimonial reconnu Erreur ! Signet non défini.

1.1.5 Rôle et objectifs du système d'élevage Erreur ! Signet non défini.

1.1.5.1 Quelques définitions Erreur ! Signet non défini.

1.1.5.2 Elevage pastoral : Historique et évolutions Erreur ! Signet non défini.

1.1.5.3 Rôle et objectifs du pastoralisme Erreur ! Signet non défini.

1.1.6 L'élevage des herbivores valorise les parcours : enjeux et difficultés autour des parcours
Erreur ! Signet non défini.

1.1.6.1 Menaces biophysiques sur les terres de pâture Erreur ! Signet non défini.

1.1.6.2 Elevage, biodiversité, qualité des produits et services des écosystèmesErreur ! Signet non défini.

1.1.6.3 Intensité du pâturage, fertilité des sols et réactions des plantesErreur ! Signet non défini.

1.1.6.4 L'impact social sur le comportement des herbivores au pâturageErreur ! Signet non défini.

1.1.6.5 Utilisation de la zone de pâture en fonction du savoir-faire du berger, de la physiologie, du comportement de l'animal, de la topographie et de la physiologie des plantesErreur ! Signet non défini.

1.1.6.6 Les menaces sociales et économiques sur les terres de parcoursErreur ! Signet non défini.

1.1.7 Moyens de production, mode de conduite, produits, considérations sociales, techniques et

spatiales Erreur ! Signet non défini.

1.1.7.1 Etude des systèmes d'élevage : exploitations, hommes et troupeaux en montagne Erreur ! Signet non défini.

1.1.7.2 Etude du système de pâturage Erreur ! Signet non défini.

1.1.8 Le contexte de la prédation par L'ours brun Erreur ! Signet non défini.

1.1.8.1 Considérations générales Erreur ! Signet non défini.

1.1.8.2 Ecologie de l'ours brun Erreur ! Signet non défini.

1.1.8.3 Structure sociale de l'ours Erreur ! Signet non défini.

1.1.8.4 Cycle de vie de l'ours Erreur ! Signet non défini.

1.1.8.5 Reproduction de l'ours Erreur ! Signet non défini.

1.1.8.6 Ration alimentaire de l'ours Erreur ! Signet non défini.

1.1.8.7 Conflit Homme - Ours ou Homme - Prédateur Erreur ! Signet non défini.

1.1.8.8 Dynamique de l'expansion de l'ours dans les zones d'élevageErreur ! Signet non défini.

1.1.8.9 Etendue des dommages liés à l'ours Erreur ! Signet non défini.

1.2 Problématique Erreur ! Signet non défini.

1.2.1 Question de recherche Erreur ! Signet non défini.

1.2.2 Hypothèses de recherche Erreur ! Signet non défini.

1.2.3 Objectifs d'étude Erreur ! Signet non défini.

Chapitre 2 : Terrain d'étude et collecte de données Erreur ! Signet non défini.

2.1 Terrain d'étude Erreur ! Signet non défini.

2.1.1 Ariège-Pyrénées Erreur ! Signet non défini.

2.1.2 ASPAP Erreur ! Signet non défini.

2.2 Collecte des données Erreur ! Signet non défini.

2.2.1 Une approche bibliographique pour définir l'état des travaux sur le sujetErreur ! Signet
non défini.

2.2.2 Enquêtes de terrain Erreur ! Signet non défini.

2.2.3 Analyse des structures et des systèmes d'élevage Erreur ! Signet non défini.

Chapitre 3 : Résultats et discussion Erreur ! Signet non défini.

3.1 Résultats Erreur ! Signet non défini.

3.1.1 Caractéristiques générales de l'élevage pastoral en Ariège. . . Erreur ! Signet non défini.

3.1.2 Typologies du système d'élevage Erreur ! Signet non défini.
3.1.2.1 Systèmes de production en fonction de la mobilité du troupeauErreur ! Signet non défini.

3.1.2.2 Systèmes de production en fonction de la localisation géographique de l'exploitation Erreur ! Signet non défini.

3.1.2.3 Systèmes de production en fonction de la diversification.Erreur ! Signet non défini.
3.1.3 Qu'est ce que l'estive en Ariège ? Erreur ! Signet non défini.

3.1.4 Comment l'ours intervient-il dans ce milieu rural et professionnel ?Erreur ! Signet non
défini.

3.1.5 Quels sont les dommages de l'ours sur le pastoralisme ? Erreur ! Signet non défini.

3.1.6 Comment l'écologie est-elle perçue dans cette polémique ours ?Erreur ! Signet non
défini.

3.1.7 Dans ce contexte, l'ours est-il une espèce parapluie ou une espèce emblématique ?

Erreur ! Signet non défini.

3.1.8 Quel est le coût de la réintroduction de l'ours brun ? Erreur ! Signet non défini.

Conclusion Erreur ! Signet non défini.

Références Bibliographiques Erreur ! Signet non défini.

Liste des tableaux et figures

Liste des figures Pages

Figure 1 : Cadre Macro-théorique du Pastoralisme a

Figure 2 : Valeurs qui délimitent l'espace des bonnes pratiques a

Figure 3 : Dispersion géographique des éleveurs enquêtés b

Figure 4 : Gestion du troupeau au cours d'une campagne de production c

Figure 5 : Scénarios des relations entre Eleveurs, Eleveurs-Bergers, Bergers et GPs 41

Liste des tableaux Pages

Tableau 1 : Argumentaire entre Pro Ours et opposants d

Liste de abréviations et des acronymes

AFP : Association Foncière Pastorale

ASPAP : Association pour la Sauvegarde du Patrimoine d'Ariège-Pyrénées

CBD : Convention pour la Diversité Biologique

CNPN : Comité National pour la Protection de la Nature

DDAF : Direction Départementale de l'Agriculture et de la Forêt

DIREN : Direction Régionale de l'Environnement

FAO (Food and Agricultural Organisation) : Organisation des Nations Unies pour l'Alimentation et l'Agriculture

GP : Groupement Pastorale

GPL : Groupe Professionnel Local

MAE : Mesures Agro Environnementales ONF : Office National des Forêts

PAC : Politique Agricole Commune

PHAE : Primes Herbagères Agri Environnementales

SAU : Surface Agricole Utile

SIG : Système d'Information Géographique SSF : Surface Spécifique des Feuilles

STA : Surface Toujours en Herbe

TMSF : Taux en Matière Sèche des Feuilles UGB : Unité Gros Bétail

UICN : Union Mondiale pour la Nature ou Union Internationale pour la Conservation de la Nature

UP : Unité Pastorale

UTA : Unité du Travail Annuel

WWF (World Wide Fund for Nature): Fond Mondial pour la Conservation de la Nature

ZI : Zone Intermédiaire

ZICO : Zone Importante pour la Conservation des Oiseaux

ZNIEFF : Zone Naturelle d'Intérêt Ecologique pour la Flore et la Faune

Remerciements

Ce travail est le fruit des emprunts aux différents travaux effectués sur ce sujet, de l'accueil bénéficié de l'ASPAP, de la volonté d'éleveurs, de bergers et de gestionnaires de groupements pastoraux à répondre à mes nombreuses questions malgré le manque de temps, des conseils et discussions avec des scientifiques de renom dans ce domaine et enfin de l'encadrement académique reçue. Respectant le dicton : « A tout Seigneur tout honneur », je trouve l'occasion ici de dire de vive voix merci à tout ceux/celles dont l'action à contribuer à finaliser ceci. Qu'ils trouvent ici, le fruit de leurs efforts. Je veux ainsi dire un grand merci à :

Madame TERRIEUX Agnès pour tous les efforts consentis à l'encadrement de ce travail et à la lecture et correction d'innombrables essais.

Messieurs LACUBE Philippe, CARRIERE Claude, RALU Olivier, BESCHE-COMMENGE Bruno et Madame BONIFACE Magali, pour leur chaleureux accueil et orientations pour ce travail.

Messieurs ACAP Charles, DUBUC Gérard, MIROUZE Jean-Pierre, FERRE Jean-Claude, BONCOURT Fabien, CHEVILLON Francis, GUILLET Gilbert et toutes les autres personnes qui ont bien pu sacrifier de leur temps de travail pour les entretiens.

Messieurs GARDE Laurent, LASSEUR Jacques, BOURBOUZE Alain, HUGUENIN Johann, et Madame GIBON Annick pour les orientations bibliographiques et leurs conseils pour la construction de ce travail.

Mes collègues avec qui on s'est régalé au courant de l'année.

Les estives, les brebis, l'ours, le ministère de l'écologie et du développement durable, qui ont su m'inspirer pour la construction de ce sujet.

Ma famille entière sans qui je ne suis rien et avec je suis tout.

La source de mon espérance et de la vie.

Introduction

Au cours des années 70 à 90, le nombre d'exploitations agricoles, celui des animaux par troupeau, une intensification fourragère, a augmenté de manière significative ainsi que le développement des cultures de contre saison. L'évolution des conditions du marché de la viande a également joué un rôle important dans les options prises. Les années 80 rouvrent le marché français de la viande aux importations à bas prix qui affectent fortement l'élevage. Suite à la réforme de la Politique Agricole Commune (PAC) en 1992, la spécialisation géographique et l'augmentation croissante d'animaux par troupeau a été intensifiée. Entre 1988 et 2000, la filière d'élevage a entamé un processus de réduction du nombre d'exploitations agricoles (perte de 62% des éleveurs de moutons et 1/3 brebis nourrices) et d'augmentation de plus en plus important du nombre d'animaux par troupeau (Lasseur et Garde, 2007). Dans la zone centrale des Pyrénées, les modifications de la gestion du troupeau ont été organisées conformément à de nombreuses tendances : amélioration des performances de reproduction, abandon de la mixité dans les exploitations, diminution de la main d'oeuvre, introduction de races à viande, spécialisation des produits et restriction des périodes de vente1 (Gibon, 1996).

Tradition oblige ou en raison de la considération actuelle : zone à "handicap naturel" (altitude, pente, géomorphologie, couche de neige, type de sol, humidité, etc.), le système d'élevage transhumant reste la principale utilisation des terres et le moyen de subsistance en zone de montagne ariégeoise. C'est probablement la manière la plus efficace économiquement d'exploiter ces pâturages saisonniers. L'estive a été et est encore un élément de l'agriculture en Ariège, ceci est avant tout en rapport à la production de viande. L'estive a été réglementée par les lois depuis des temps immémoriaux. Selon l'ancienne loi pastorale, lorsqu'un agriculteur ne tenait pas son troupeau en estive, il était accusé pour pâturage illégal "vol d'herbe" et payait une taxe. C'est dans les estives que la multitude des traditions de la petite transformation laitière a survécu. L'Estive a aussi une longue tradition dans le secteur du tourisme en Ariège ainsi que de nombreuses opportunités de

1 Ces phénomènes, et plus récemment l'essor de la vente d'agneaux légers sur l'Espagne ont poussé à rechercher des mises bas d'automne précoces et très groupées. Le marché des bovins s'est lui aussi spécialisé. Les possibilités de vente de veaux de boucherie ou de gros bovins auprès des bouchers locaux se sont petit à petit érodées. En dehors de la vente de broutards, seule est restée la possibilité de valoriser quelques jeunes veaux très bien conformés (culards en particulier) auprès des maquignons et des groupements. Une caractéristique commune aux diverses évolutions évoquées est d'aboutir à une perte de souplesse des systèmes d'élevage. En outre, parmi les éleveurs qui se sont engagés le plus loin dans le processus d'intensification, certains n'ont pas pu ou n'ont pas su maîtriser les innovations adoptées, ce qui s'est traduit par une perte de cohérence interne de leurs systèmes d'élevage (Gibon, 1996).

loisirs pour les milliers de visiteurs qui passent d'innombrables heures chaque année dans le calme des milieux ouverts des prairies (B. Besche-Commenge, 2008).

Le territoire de l'estive est très diversifié. Dans ces domaines, le bétail paît sur une mosaïque de végétation de qualité très variable. Il est donc essentiel de déterminer le bon moment pour le déplacer à des sites spécifiques et adaptés durant tout l'été. En raison de la menace pour l'environnement des activités à forte consommation d'énergie, les relations entre agriculture et environnement sont généralement abordées sous l'angle de la limitation des effets négatifs des pratiques agricoles, notamment concernant la diffusion de polluants (Gibon, 1997). Ceci ne devrait concerner que les exploitations en intensif/industriel à forte connotation mécanique, phytosanitaire et autres ingrédients de la rentabilité à outrance. Dans la région méditerranéenne française, ce sont surtout les aspects positifs des activités agricoles qui sont mis en relief, comme le maintien de la biodiversité des parcours à travers le pâturage. Les questions environnementales dans ces domaines et les stratégies agricoles sont maintenant axées sur la préservation de la biodiversité2 (Clergue et al., 2005; Gibon, 1997).

La perte de la biodiversité est une question de dimension sociale, économique, culturelle et écologique complexe. Y faire face exige des solutions également complexes. Bien que ce soit une politique globale de développement, les choix pour la gestion de cette crise, requièrent une bonne compréhension du pourquoi et comment la biodiversité est en train de changer, et une intégration des connaissances de différentes disciplines. C'est une tâche difficile, et pour le moment, les exemples d'une recherche réussie ayant intégré pleinement plusieurs disciplines sont rares. La perte de la biodiversité peut affecter les fonctions et services des écosystèmes. Les fonctions d'un écosystème montrent en général une relation positive asymptotique avec l'augmentation de la biodiversité, ce qui suggère que certaines espèces sont redondantes. Cependant, les écosystèmes sont gérés et conservés pour des fonctions multiples, qui nécessiteraient une plus grande biodiversité (Hector et Bagchi, 2007).

L'agriculture ariégeoise est essentiellement le pastoralisme mobile dont la technique, la pratique, le fonctionnement, le rendement... s'excluent de la « norme » scientifique documentée. Ce n'est pas pour autant une pratique « occulte » mais un ensemble de pratiques dont la formulation arrêtée d'une « norme technique » ne décrirait pas la campagne. On est loin de la sagesse scientifique selon

2 Beaucoup de travail reste à faire dans la caractérisation des habitats des différentes espèces présentes et leur rôle dans le fonctionnement de l'écosystème pour justifier la préservation d'espèces en compétition ou conflit avec l'activité humaine notamment le pastoralisme.

laquelle : « ce qui se conçoit bien s'énonce clairement et les mots pour le dire arrivent aisément » ; peut-être valable quand le troupeau est au siège de l'exploitation, mais totalement invraisemblable quand il estive. On se retrouve donc souvent tenté de se conformer à la science et de vouloir résumer la technique d'élevage pastoral en Ariège à sa conduite sur l'exploitation. Mais comment décrirait-on le fonctionnement du tube digestif si la température interne n'était pas 37°C ? Il faut bien tenir compte de l'estive qui représente chaque année 3 mois de la vie d'une brebis et parfois jusqu'à 5 chez la vache. Comment détacher leurs interactions sur la suite du processus ? Peut-être on peut, en modélisant, arriver à normaliser l'élevage pastoral en Ariège. Mais il faudra que les bêtes réagissent tout le temps comme dans le modèle, que randonneurs et autres facteurs nouveaux (sangliers, vautours, marmottes...) ne s'y invitent pas de temps à autre et que le berger puisse... non seulement pouvoir intégrer la norme, mais se rendre compte que ça marche ! Sinon la réaction du chien de Pavlov devient inattendue.

Cette étude s'inscrit dans une formation orientée gestion du territoire pour une production durable. Ici, le pastoralisme fonctionne depuis des lustres sans qu'officiellement, on est eu vent de ses externalités négatives sur l'environnement puisque, contrairement à ce qui se pratique ailleurs, peu de mécanisation voire pas à certains endroits, peu de chimio-pratiques... Néanmoins connaissant la phrase « magique » de la chaîne trophique : « mange celui qui précède et est mangé par celui qui suit » ; tout le monde trouvant de quoi manger signifiant : milieu équilibré et fonctionnant normalement, on peut se dire qu'introduire un prédateur dans un tel milieu nous indiquerait la stabilité de son écosystème. Au nom du développement durable quel pré-requis faudrait-il pour que le social, l'économique ou l'environnemental ne se sente pas déshérité ? Quelle démarche mettre en place pour trouver la coopération des acteurs locaux indispensable au développement durable ?

Le but de ce travail n'est pas de répondre à des questions sur la durabilité de la réintroduction de l'ours dans les Pyrénées ou de prendre position à propos de la polémique ours. Mais il s'agit ici de souligner ce qui s'est pratiqué jusqu'à présent comme technique pastorale en Ariège et ce qui pourrait techniquement être une pierre d'achoppement pour la mise en oeuvre des mesures d'accompagnement du plan ours et donc de compromettre la cohabitation pastorale. Pour traiter ce sujet j'ai choisi de garder à l'esprit les questions suivantes : Jusqu'à présent, le pastoralisme étant sur des équilibres et économies instables et fragiles; comment les nouvelles données (mesures d'accompagnement du plan ours) pourront-elles améliorer ce statut ? Quels dommages le pastoralisme traditionnel a créé ou crée à l'environnement au sujet de la biodiversité ? Quelle est la valeur de la biodiversité apportée par le pastoralisme "moderne" proposé ? Quelles sont les fonctions supplémentaires des écosystèmes montagnards avec les nouvelles données et procédures ?

Chapitre 1 : Présentation générale de l'étude

1.1 Contexte

Le processus de spécialisation que connaît le monde aujourd'hui a entraîné une diminution du cheptel ovin français depuis 25 ans. Cette diminution qui se poursuit affectant toutefois, davantage le cheptel ovin allaitant que laitier n'est pas sans conséquences sur la société, l'économie et l'environnement. Ainsi, en 2005, le solde du commerce extérieur français s'exprimait en valeur par un déficit de 455 millions d'euros pour la seule filière ovine. La comparaison des données économiques entre les exploitations ovines européennes spécialisées avec un cheptel ovin allaitant, confirme, en valeur moyenne, l'image que donne l'exploitation française : une exploitation familiale avec des frais généraux et des amortissements élevés, ce qui conduit à un revenu plus faible que celui de ses principaux partenaires européens malgré des prix de vente élevés et des charges spécifiques mesurées. L'analyse des données françaises indique que le repli du cheptel ovin sur les prairies naturelles, notamment les moins productives et les plus défavorisées, s'inscrit dans un mouvement plus large (SIMON, 2007). L'élevage ovin allaitant compte des faiblesses ou des handicaps :

- une image dévalorisée au sein de la profession elle-même

- de très fortes exigences en travail

- une concurrence pour les surfaces disponibles et une forte vulnérabilité aux grands prédateurs

- une très grande dépendance aux aides

- une inadéquation croissante entre les besoins d'abattages et les zones de production - une absence de valorisation élaborée des carcasses et un marché non segmenté

- une organisation insuffisante de la filière.

Mais cette production ne manque pas d'atouts :

- une plus faible mobilisation des capitaux que d'autres productions

- une consommation de viande ovine qui reste soutenue

- une réelle capacité à s'adapter à des situations très variées

- une grande richesse de son patrimoine génétique

- une production économiquement viable lorsque les conditions de production sont rationnelles

- une bonne image auprès du public.

Afin de rendre plus compréhensifs les résultats de cette étude, je présenterai dans les paragraphes
qui suivent, le milieu naturel de l'Ariège, le système d'élevage, son rôle et ses objectifs, ses moyens

de production, les considérations sociales, techniques et spatiales, enfin, le contexte de la prédation par l'ours brun.

1.1.1 Le milieu naturel des Pyrénées

Dans le sud-ouest de l'Europe, les Pyrénées sont un massif frontalier entre la France et l'Espagne. Le centre de cette chaîne correspond à la partie montagneuse des trois départements français (Hautes-Pyrénées, Haute-Garonne et Ariège). Située à mi-chemin entre l'Atlantique et la Méditerranée, la région Midi-Pyrénées connaît des tendances climatiques contrastées dont l'influence sur la flore et la faune n'est pas négligeable. La végétation de type atlantico-montagnard sur une grande partie, prend des caractéristiques plus méditerranéennes sur la frange orientale de l'Ariège. Prairies, forêts de hêtres et sapins en versant nord, de pins en versant sud, landes, pelouses alpines, se succèdent en fonction de l'altitude. Les riches sols de fond de vallées et les flancs de montagne bien exposés ont donné lieu à l'agriculture intensive tandis que les énormes prairies d'estives ont toujours été exploitées par un pastoralisme divagant. Comme la majorité des massifs, celui des Pyrénées se caractérise par un héritage diversifié de conditions naturelles, économiques, socio-culturelles, et démographiques (Buffière et Gibon, 1996).

1.1.2 Le milieu naturel de l'Ariège

Au Sud de Toulouse, l'Ariège3, terre de plaines, de montagnes et de lacs, s'étend de la Garonne aux Pyrénées (4 890 km2). D'après un paradoxe pyrénéen, "la douceur est au Nord". De la Basse-Ariège, tout au Nord, aux neiges d'Espagne et d'Andorre tout au Sud, on passe des hivers doux et des étés chauds et secs à un climat rude, froid, aux précipitations abondantes en parcourant tout un éventail selon l'altitude et l'exposition4. La nature est superbe, secrète, sauvage et l'ensoleillement généreux. La diversité des paysages et l'authenticité de ses habitants font de l'Ariège l'un des coins de France les plus pittoresques où les découvertes ne manquent pas : grottes, villages, flore et faune préservées. Les deux vallées du Couserans et de la Haute Ariège correspondent à des zones de montagne du département fortement marquées par la déprise agricole. L'orientation principale des exploitations est l'élevage allaitant, bovin ou ovin, conduit de façon extensive.

1.1.3 Le milieu culturel et humain de l'Ariège

La population de l'Ariège est certes faible et décroissante5 (137.205 habitants en 1999) du fait de
l'exode rural massif (28 hab/km2), mais, a une bonne structuration comparée aux autres
départements (20% âgés de moins de 19ans, 49% âgés de 20 à 59 ans et 31% âgés de 60 ans et

3 http://www.rfi.fr/lffr/articles/072/article_348.asp

4 http://www.departementsdefrance.fr/ariege/departement-ariege.html

5 http://www.departementsdefrance.fr/ariege/departement-ariege.html

plus6). De ces chiffres, il se dégage clairement un réel potentiel de relève, reste que la motivation accompagne cette jeunesse nombreuse. Les nombreuses fêtes et foires calées au calendrier pastoral (la grande foire de Tarascon en Mai, les nombreuses foires à bétail avant et après l'estive, la fête de la transhumance en début Juin, et tous les rassemblement le long des chemins de passage des troupeaux à la montée et la descente de l'estive) témoignent de l'intérêt porté à l'agriculture dans le département. Ainsi, l'Ariège comme toute la chaîne pyrénéenne a été occupée depuis très longtemps par l'homme dont les activités agricoles ont façonné les habitudes, les paysages et la culture pendant des millénaires7 (depuis le néolithique).

1.1.4 Le milieu Agricole de l'Ariège

Avec une production d'environ 140 millions d'euros en 2003, l'Ariège participe pour 3,7% à la

production agricole de la région Midi-Pyrénées (4,1% pour les produits animaux ; 3,2% pour les produits végétaux). Il compte aujourd'hui un peu moins de 3.000 exploitations agricoles, soit environ 5,2% du total régional. Le résultat agricole moyen rapporté au nombre d'UTA8 s'est élevé en 2003 à 14.300 € contre 15.300 € pour la région. L'élevage prédomine, avec une taille de troupeaux, nettement supérieure à la moyenne régionale en bovins viande, et nettement inférieure en ovins (DDAF de l'Ariège, 2004). Tiraillés entre une logique économique posée par des filières de production animale peu concernées par les contraintes de mise en valeur du milieu et une logique fondée sur l'utilisation maximale des ressources pastorales, les éleveurs pyrénéens ont développé des systèmes d'élevage diversifiés en fonction des particularités locales de leur environnement économique et social (Gibon, 1997).

1.1.4.1 Une gestion collective des ressources

Plus de 50% des unités pastorales (UP) sont gérées collectivement par le biais de : groupement

pastoral (GP), Association Foncière Pastorale (AFP) et les syndicats. Ainsi, 19.000 Unités Gros Bétail (UGB9) constituées de 12.000 bovins, 40.000 ovins, 1.000 équins, pâturent 75.000 ha pendant trois à cinq mois de l'année. Elles sont gérées par 900 éleveurs (près de 40% de tous les éleveurs de l'Ariège), 40 bergers, 191 UP et 66 GP (SIG-Pyrénées, 2008).

1.1.4.2 Un intérêt patrimonial reconnu

En plus de leurs intérêts techniques et économiques, les estives représentent un patrimoine

paysager, environnemental et architectural important. Presque tous les pâturages d'altitude du
territoire, recensés au cours des inventaires sur le patrimoine naturel (ZNIEFF10, ZICO11, etc.), avec

6 SIG-Pyrénées, 2008

7 http://www.chambres-junac.info/faune_flore_pyrenees/faune_flore_pyerenees.htm

8 UTA = unité de travail annuel (équivalent temps complet)

9 1 UGB = 1 bovin = 7 ovins

10 Zone Naturelle d'Intérêt Ecologique pour la Flore et la Faune

un fort intérêt écologique, reçoivent 90% (16.500 UGB) du bétail divagant de l'Ariège (SIGPyrénées, 2008).

1.1.5 Rôle et objectifs du système d'élevage

Nous ne saurons parler proprement des rôles et objectifs ici sans rappeler quelques concepts essentiels qui les leurs confèrent ou les renforcent.

1.1.5.1 Quelques définitions

La notion de développement durable est apparue officiellement dans les discours politiques lors de la publication du rapport Brundtland en 1987, préparé à la demande des Nations Unies, en préalable de la Conférence de Rio de Janeiro en 1992 : « le développement durable est un développement qui répond aux besoins du présent sans compromettre la capacité des générations futures de répondre à leurs propres besoins ». Cette notion a depuis été appliquée à un grand nombre d'activités, en particulier à l'agriculture et à l'élevage. Pour ce qui nous concerne ici, La durabilité de l'élevage confère la préservation de l'intégrité fonctionnelle des systèmes socio-techniques. D'après Thompson (1997), il existe deux grands types d'approches de la durabilité du développement : l'approche « préservation des ressources » (resource sufficiency) et l'approche « intégrité fonctionnelle » (functionnal integrity). Bien sûr, la durabilité de l'élevage en montagne exige en premier lieu que ses ressources soient renouvelées, c'est-à-dire que les prairies pâturées et les prés de fauche, principale ressource de l'élevage pastoral, soient conservés en quantité et qualité et donc ne s'enfrichent pas. Mais cette condition est à considérer en réalité dans le cadre du renouvellement plus global des systèmes d'élevage, au sens de la régénération de leur capacité productive et de leurs autres fonctions dans leur environnement. Il faut donc assurer avant tout le renouvellement des facteurs de production : terre, travail et capital. Au-delà de la prise en compte des trois dimensions de la durabilité (écologique, sociale et économique), il faut également s'intéresser à la cohérence du système, assurer le renouvellement des relations, des interactions entre les différents composants des systèmes d'élevage (Mottet, 2005).

L'Espace est à la fois facteur et produit des activités agricoles (Deffontaines et Lardon, 1990). Il existe donc une relation étroite entre la durabilité des activités agricoles et celle des ressources naturelles qu'elles utilisent ainsi que les paysages associés. La durabilité de l'élevage en montagne relève donc à la fois de la durabilité économique et sociale des exploitations et de la durabilité écologique des ressources et des paysages.

11 Zone Importante pour la Conservation des Oiseaux

Le pastoralisme est l'utilisation du pâturage extensif des parcours pour la production ; c'est l'un des principaux systèmes de production de terres inhospitalières dans le monde (Lasseur et Garde, 2007). C'est un système d'élevage tout à fait original qui n'existe que par une étroite relation et respect entre Hommes, Terres et Troupeaux. Il est aussi très dépendant de variations climatiques. Il représente une forme irremplaçable, économe en énergie fossile, pour le développement et la gestion du milieu naturel. Selon la FAO (2002), le pastoralisme n'est pas une relique, mais une activité moderne qui s'intègre dans le contexte actuel de l'économie. Il a une fonction socio- économique tout en maintenant une forme d'activité dans des régions difficiles et en contribuant à des productions.

Un parcours est d'abord un endroit où le troupeau peut se déplacer relativement librement, même sans aucune contrainte autre que la distance nécessaire à son abreuvement12 (les animaux peuvent être totalement libre dans un secteur vaste, bergerie ou non).

Est considérée comme pastorale (selon la définition statistique de l'exploitation), une ferme utilisant les pâturages collectifs (équivaut généralement à la transhumance et l'utilisation des estives), si non, la densité animale est inférieure à 2 (somme de UGB/ha SAU13), et la portion de la Surface Toujours en Herbe (STH) moins productive devrait atteindre 50% de la SAU, et la ferme devrait appartenir à l'une des orientations suivantes : vache allaitante ou laitière ou les deux, ovin/caprin, polyculture - élevage ou culture intensive - élevage pastoral (Eychenne, 2003b et 2006).

La diversité biologique signifie la variabilité des organismes vivants de toute origine y compris, entre autres, les écosystèmes terrestres, marins et autres écosystèmes aquatiques et les complexes écologiques dont ils font partie. Cela comprend la diversité au sein des espèces et entre espèces ainsi que celle des écosystèmes (CBD, 1992). On sait qu'il existe peu de données sur la répartition géographique de la biodiversité, des ressources limitées et le temps d'acquérir suffisamment de données. Ainsi, il est nécessaire de faire des priorités avec les données disponibles ou facilement collectables. Ainsi, différents substituts pour la biodiversité ont été utilisées/proposé pour fournir un raccourci pour l'identification des zones importantes pour la conservation de la biodiversité ( http://www.ige.ch/faq/f1 2f. shtm).

12 Mémento de l'Agronome, 2002

13 Surface Agricole Utile

Écosystème : Concept défini par Tansley en 1935. Pour lui, il doit "tenir compte de facteurs biotiques et en particulier de l'Homme". Une pâture peut détruire un écosystème, mais elle favorise en même temps l'émergence d'un nouvel écosystème (écosystème pâturé), qui, le plus souvent doit être entretenu ou conservé par l'intervention de l'homme, contre les plantes nocives ou différents prédateurs. Même si contrairement à Tansley, l'écosystème a souvent été saisie dans un sens strictement naturaliste (Hubert, 2002 et 2004) aujourd'hui, il devrait être considérée par une lecture topocentrique et non géométrique.

1.1.5.2 Elevage pastoral : Historique et évolutions

L'élevage pastoral s'appuie sur un groupe d'itinéraires variable, en fonction de l'année, résultat de distribution spatiale et temporelle d'une ressource fourragère diversifiée et le plus souvent spontanée. La complexité de l'activité de production est le résultat de l'existence et de l'interaction des différents objectifs entre le gestionnaire (éleveur, berger), la végétation et les animaux (Landais et Balent, 1995 ; Hubert et al., 1993). Cet élevage évolue de la forme sédentaire au nomadisme via la transhumance La transhumance en Ariège implique la délocalisation de l'élevage (vaches, moutons et chevaux) en haute montagne pour les mois d'été. Ceci, non seulement parce que les fermes dans les plaines sont trop petites pour supporter le troupeau toute l'année, mais aussi, pour fumer les parcelles, entretenir les clôtures, constituer les stocks de fourrage, faire le vide sanitaire des parcelles et des bergeries ou des étables, et enfin, permettre à l'éleveur de souffler. L'estivage débute fin Mai/début Juin, et se termine début Octobre. Selon les études anthropologiques, ce système date d'avant 1400 (Besche-Commenge, 2008). Jusque dans les années 1970 la transhumance concernait principalement les vaches laitières, et la fabrication du fromage était une activité importante. Dans certaines régions, jusqu'à ce siècle, presque tous les membres d'une famille décampaient en haute montagne avec leurs vaches, vivant dans des cabanes rudimentaires faites de pierres. Ce système, qui a évolué au Moyen Age, a duré dans le 20ème siècle, mais a échoué sous la pression de l'industrialisation concomitante avec le dépeuplement des campagnes (B.Besche-Commenge, 2008 ; Fédération pastorale, 2007).

1.1.5.3 Rôle et objectifs du pastoralisme

L'élevage contribue, à travers le pâturage, à la dynamique des territoires par le maintien des milieux ouverts, intégrés dans une mosaïque associant zones forestières cultivées. Cette contribution doit être conciliée avec une dynamique de l'élevage permettant le maintien de ses cohérences propres et sa durabilité comme système d'élevage (Lasseur et Garde, 2007). Les parcours exploités par les pasteurs ne peuvent le plus souvent, pas être utilisés par l'agriculture conventionnelle. Ces terres offrent peu d'autres options que l'élevage mobile pour leur utilisation efficace et durable. Néanmoins, malgré sa longue histoire, sa réputation a été peu flatteuse, ses praticiens marginalisés par les cultivateurs sédentaires et les citadins (Roger Blench, 2001). Dans certains secteurs de la

zone de montagne ariégeoise, c'est l'unique façon de valoriser la terre. De nombreux auteurs ont mentionné l'importance du pastoralisme dans la conservation de la nature, la production de la biodiversité des espaces, l'entretien des plantes herbacées, des milieux ouverts et des paysages, la prévention des risques naturels, la gestion des sols et des effluents, la préservation du patrimoine culturel, la limitation de l'exode rural, la multifonctionnalité et de nombreuses externalités positives (Castro et al., 2004 ; Huyghe et Lemaire, 2002; Hervieu, 2002 ; Lasseur et Garde, 2007, Janet C., 2007; Hubert, 2002 ; Léger 1999). Tous sont tout aussi conscients du double rôle de l'agriculture en montagne : production alimentaire et externalités positives, sans que la fonction proprement agricole doive se plier aux réquisitions de l'autre. Toutefois, l'analyse de l'impact14 de l'élevage sur les terres de parcours et donc sur le milieu ou l'environnement n'est pas aisée. Cette analyse devrait s'articuler autour des grands "thèmes d'impact" que sont l'occupation des sols, l'alimentation, l'abreuvement, les déplacements, la fertilité, les productions animales, la conduite et l'exploitation, et les politiques d'élevage. Ces thèmes interagissent, sont interdépendants et dépendent d'autres thèmes extérieurs à l'élevage (Toutain et Carrière, 1995).

L'occupation des sols par les activités d'élevage peut conduire à des impacts positifs (de type socio- économique, et écologique), des impacts négatifs (dégradation des terres de parcours, déforestation, perte de biodiversité15). L'alimentation des herbivores domestiques repose sur le prélèvement de matières végétales ; cet acte élémentaire peut conduire à des effets positifs sur l'environnement, lorsque le couvert végétal est jugé "indésirable" (prévention des incendies, lutte contre l'embroussaillement, dynamique des espèces sous l'effet de la pâture, dissémination des semences par les herbivores domestiques). Ce même prélèvement devient un impact négatif lorsque son intensité remet en cause les potentialités de renouvellement du couvert végétal : soit directement en modifiant la composition, la structure ou la productivité des peuplements végétaux ou en influençant leur dynamique ; soit indirectement en agissant sur les facteurs de la production primaire que sont l'eau, le sol et l'air, ou encore par interaction passive avec les autres consommateurs primaires. En ce qui concerne l'abreuvement, il est certain que l'aménagement hydraulique du territoire, dans les zones sèches, a eu d'importantes conséquences sur l'environnement sanitaire, social et économique des populations humaines concernées (Toutain et

14 Cependant, on ne peut juger du caractère positif ou négatif d'un impact sans faire référence à un point de vue précis ou à un objectif. Un naturaliste, attaché à la protection des espèces sauvages, aura une appréciation d'un impact différente de celui de l'agronome, cherchant à optimiser un système de production agricole.

15 A la suite de l'ouverture, pour l'élevage, des zones à trypanosomoses en Afrique par exemple. Ici, contrairement à la réintroduction de l'ours dans les Pyrénées où l'ours vient récupérer une partie du territoire dévolue à l'élevage, c'est l'élevage qui récupère le territoire de la tsé-tsé en tentant de l'exterminer.

Carrière, 1995). Dans de nombreux cas, les points d'eau modernes, à vocation pastorale, sont récupérés, au bout d'un certain temps, comme bases initiales d'implantation humaine, qui bénéficient alors de ressources en eau de qualité. Par contre, d'après Nicholson (1985) cité par Toutain et Carrière (1995), les activités d'élevage polluent les ressources en eau de surface par eutrophisation des mares temporaires ou permanentes, pollution chimique, pollution microbienne ou parasitaire par des agents pathogènes. Les impacts indirects envisagés ici portent sur : la dégradation des sites d'abreuvement, les conséquences de l'utilisation des sites d'abreuvement sur la flore et la faune inféodées aux milieux humides ou aquatiques.

Quant aux déplacements, le piétinement favorise : le tallage des graminées, la dissémination de nombreuses plantes par fragmentation des souches ou des rhizomes, la dispersion des semences (par adhésion sur le pelage ou sous les sabots) et leur germination (par rupture des téguments pour les graines dures), l'incorporation de la matière organique au sol, par fragmentation. A contrario, le piétinement réduit : la biomasse sur pied en brisant les chaumes desséchées, ce qui augmente la surface de sol dénudé et favorise l'érosion, la photosynthèse des plantes en déchirant et en écrasant les tissus foliaires, les stocks semenciers des sols, par concassage des graines. Toutefois, la mobilité des troupeaux est exploitée pour la commercialisation des produits de l'élevage dans certains pays et constitue un facteur de gestion et de conservation des parcours (Toutain et Carrière, op. cit.). Concernant le transit des matières végétales par le tube digestif des herbivores domestiques, il joue un rôle important sur le cycle du carbone et des éléments trophiques, en créant un "circuit court" pour le recyclage de ces éléments dans le sol (Gachon et al., 1979 cités par Toutain et Carrière, op. cit.). La fragmentation opérée par la mastication des aliments est complétée par la fermentation microbienne dont l'intensité est nettement plus élevée que celle qui intervient au niveau du sol (Landais et al., 1990). Les effets du pâturage nocturne, en dehors des conséquences positives qu'il peut avoir sur la production animale (Joblin, 1960 ; King, 1983 cités par Toutain et Carrière, op. cit.), du fait de la diminution des dépenses énergétiques liées à la thermorégulation, de la plus grande teneur en eau des plantes pendant la nuit, et de l'accroissement de la durée totale d'ingestion ne sont pas précisément connues.

1.1.6 L'élevage des herbivores valorise les parcours : enjeux et difficultés autour des parcours

L'article « La tragédie des communs », écrit par Garret Hardin en 1968, procure un cadre théorique dans un discours déjà expérimenté par des hommes politiques, des universitaires et des acteurs du développement. Cette théorie souligne dans une façon malthusienne, l'irrationalité économique du pastoralisme. Celui-ci ne serait qu'une lutte pour les ressources et un pillage de l'environnement. L'argument est qu'il est sans intérêt pour un agriculteur de limiter la croissance de son troupeau sur

des pâturages où d'autres agriculteurs pourraient le faire à sa place. De nombreux pays ont des politiques de sédentarisation qui découlent tant sur des considérations d'ordre politique qu'au sujet du bien être de ceux qu'ils souhaitent installer. Toutefois, les gouvernements nationaux sont souvent hostiles aux pasteurs (Nori, 2006).

Dans les zones de Causses ou de montagne et dans certaines zones de coteaux, les cheptels ovin et bovin constituent un des meilleurs atouts de valorisation de ces zones difficiles, voire le seul. A ce titre, le maintien de l'élevage et des hommes sur la majeure partie du territoire est essentiel pour conserver une activité économique structurante du milieu rural. Mais, sous l'effet combiné de la démographie, de la politique agricole commune et des conditions de travail difficiles, le nombre d'éleveurs diminue, les cheptels s'agrandissent, le besoin de nouvelles surfaces et la volonté d'abaisser les coûts de production poussent à une « reconquête des parcours », disponibles et peu onéreux. Les années 90 voient ensuite le développement de nouveaux enjeux du pâturage des parcours liés à leurs contributions environnementales et socio-territoriale : entretien du paysage, maintien de la biodiversité, action de défense contre les incendies, faible consommation d'intrants... (Léger, 1999; Loiseau et al., 1998; Dumont et Farruggia, 2007).

1.1.6.1 Menaces biophysiques sur les terres de pâture

Les éleveurs reconnaissent la nécessité d'équilibrer l'augmentation de la productivité en station avec les conditions des ressources naturelles. Cela implique la connaissance des types de pâturages, la compréhension de la distribution de la ressource et les modalités de pâturage, la gestion du niveau de la réserve se basant sur les seuils de constitution de réserves avant la destruction, la production fourragère et la capacité de charge. Les éleveurs travaillent sur la base d'un temps variable au jour le jour. Toutefois, le changement climatique est susceptible de poser un défi à long terme pour le secteur pastoral (Robertson, 2002). Par conséquent, les ressources pastorales sont hétérogènes et dispersées dans l'espace (fragmentées), liées aux saisons (temporaires), différentes dans le temps (variables) et soumises au climat irrégulier (imprévisibles). Globalement la productivité nette des parcours est faible. Les populations animales et végétales qu'ils peuvent soutenir fluctuent de manière imprévisible. Ces facteurs bio-physiques affectent l'hétérogénéité spatiale et la variabilité temporelle des ressources. L'accès aux différents écosystèmes pâturables dans la même région permet la consommation des ressources entre les habitats écologiques complémentaires et est donc vital pour assurer la continuité de la productivité de l'élevage (Nori, 2006 ; Garde, et al., 2007).

1.1.6.2 Elevage, biodiversité, qualité des produits et services des écosystèmes

Malgré l'absence de justification scientifique absolue, la préservation de la biodiversité est devenue
une préoccupation majeure de la société (Bornard et al., 2004). La gestion de la biodiversité est
d'un enjeu majeur pour les exploitations agricoles et surtout pastorales du fait de l'ignorance sur les

valeurs bromatologiques des différentes espèces consommées et leurs rôles dans la satisfaction des besoins de l'animal (entretien et production). Elle est de plus en plus considérée non seulement comme un résultat de la gestion parcellaire, mais également vis-à-vis des services qu'elle fournit à l'activité d'élevage (Clergue et al., 2005) : qualité des produits, valeur nutritive des fourrages, adaptabilité d'utilisation des prairies, etc. Sa préservation est maintenant explicitement prise en compte dans l'attribution de la nouvelle Prime Herbagère Agro-Environnement (PHAE 2).

Dans les systèmes herbagers, de plus en plus de travaux s'intéressent aux services rendus à l'élevage par la diversité biologique, tant à l'échelle de la parcelle qu'à celle de la totalité de l'exploitation (Swift et al., 2004). Même si un bon niveau de diversité floristique est incompatible avec une forte productivité à l'échelle de la parcelle (Plantureux et al., 2005), les prairies diversifiées présenteraient une plus grande stabilité de leur valeur nutritive sur l'ensemble de la saison de pâturage que les prairies peu diversifiées en raison de l'étalement des stades phénologiques des espèces (Gibon et al., 1997). Par ailleurs, différents travaux ont montré que la diversité végétale stimulait l'ingestion des animaux au pâturage (Meuret et Bruchou, 1994 ; Cortes et al., 2006). Enfin, la diversité entre les parcelles est considérée comme un atout à l'échelle de l'exploitation car elle offre plus de souplesse, en particulier face aux aléas climatiques (Schlapfer et al., 2002 ; Papy, 1999 et 2004 ; Perrot et Landais, 1993). L'action du pâturage des herbivores sur la structure et la biodiversité des prairies est le plus souvent liée à leur consommation. En sélectionnant les espèces les plus appétibles, les animaux exercent différentes pressions de défoliation sur les espèces, qui pourrait menacer la survie de certains. Toutefois, ils limitent aussi le développement des espèces très compétitives pour la lumière et les éléments nutritifs, ce qui permet la coexistence d'un plus grand nombre d'espèces. De par leur piétinement, ils donnent aussi une structure aux communautés végétales en créant des ouvertures qui peuvent être peuplées par de nouvelles espèces. Enfin, ils jouent un rôle dans la diffusion des semences de certaines espèces (Fischer et al., 1996).

Les agneaux norvégiens sont généralement abattus directement après avoir été conduits dans des alpages naturels et la viande est donc considérée comme un produit biologique. De nombreux consommateurs croient également que les agneaux provenant de certaines zones sont supérieurs à d'autres types d'agneaux. En montagne, les agneaux parcourent de longues distances et leur conformation corporelle pourrait être différentes de celles des agneaux confinés en cages dans les vallées. On ne sait pas si les facteurs mentionnés affectent la qualité et la saveur de la viande. Des expériences menées en Australie, Islande, Grèce, Italie, Nouvelle-Zélande et Royaume-Uni ont fourni peu de documents à ce sujet mais, témoigné d'effets significatifs du type de pâturage et de la complémentation sur la qualité, y compris la saveur de l'agneau (Adnoy T. et al., 2005). La nature

des fourrages pourrait intervenir directement sur la qualité du produit grâce à des molécules présentes dans les plantes aromatiques (terpènes, Sesquiterpenes), qu'on retrouve dans le fromage (Viallon et al. 1999).

Il est important de protéger les valeurs naturelles des parcours en élevage pastoral afin de maintenir les principaux services fournis par les écosystèmes, tels que la santé du sol et de la végétation, la fourniture d'habitat, le captage de l'eau et la filtration, la séquestration du carbone, les paysages... La protection insuffisante de ces services fournis par les écosystèmes ne garantira pas un pastoralisme productif (Robertson, 2002).

1.1.6.3 Intensité du pâturage, fertilité des sols et réactions des plantes

Dans les alpages, il est difficile de distinguer gradients de nutriments et intensité de pâturage, les alpages les plus fertiles étant aussi les plus pâturés (Gaucherand, 2005). Dans les environnements « stressants » les limitations en eau ou en nutriments sélectionnent les stratégies conservatrices (faible Surface Spécifique des Feuilles (SSF) et Teneur en Matière Sèche des Feuilles (TMSF), élevée) associées à une faible appétence pour les animaux du fait de la résistance des feuilles et de leur faible valeur nutritive. A l'opposé, ce sont les stratégies exploitatrices (forte SSF et TMSF élevée) qui sont favorisées dans les environnements riches en nutriments. Cependant ces traits sont contrôlés par la fertilité du sol et ne correspondent pas à une stratégie particulière des espèces vis à vis du pâturage. L'interaction entre intensité de pâturage et productivité du site gêne l'identification des traits de réponse au broutage (Landsberg et al., 1999 ; Pakeman, 2004 ; cités par Gaucherand, 2005). Certains traits ressortent cependant de différentes études (Díaz et al., 2001 ; McIntyre et Lavorel, 2001 ; cités par Gaucherand, 2005) notamment des traits permettant aux espèces d'éviter le broutage (port en rosette, petite taille, petites feuilles, phénologie décalée) ou de le supporter (stratégie rudérale, forme de vie annuelle ou, dans les milieux productifs, des feuilles fines et une SSF élevée indiquant une vitesse de croissance élevée). L'identification de traits ou de syndromes spécifiquement liés au pâturage reste cependant difficile car il existe de multiples stratégies d'évitement reposant sur des combinaisons de traits différentes. En outre, d'autres facteurs comme la fertilité, mais aussi la sécheresse ou la compétition par exemple, peuvent s'avérer plus importants que la résistance au pâturage pour la survie de la plante et de ce fait, des traits liés aux conditions de milieu peuvent être favorisés même s'ils sont considérés défavorables à la plante en ce qui concerne strictement sa résistance au pâturage (Briske 1999 ; cité par Gaucherand, 2005).

1.1.6.4 L'impact social sur le comportement des herbivores au pâturage

Les herbivores se caractérisent entre autres par leur grégarisme, qui est l'une des principales raisons
de leur domestication (Lécrivain, 2004). Chez les ongulés domestiques, le regroupement social
influence fortement le comportement au pâturage. Les relations sociales au sein d'un groupe

influencent les stratégies individuelles pour les choix alimentaires, l'exploitation des sites d'alimentation et la distribution spatiale sur les parcours. La vie en groupe donne aux jeunes animaux les modèles sociaux ; en premier lieu sa mère puis ses pairs et les autres membres du groupe, ce qui contribue à apprendre les préférences alimentaires suffisantes et les aversions. Cette facilitation sociale est plus efficace que l'apprentissage individuel par essai-erreur. La vie en groupe est également considérée avantageuse pour les animaux, car ils peuvent utiliser les sites d'alimentation découverts par les autres membres du groupe. La vie en groupe chez les herbivores est une véritable stratégie contre la prédation. Jarman (1974); cité par Dumont et Boissy (1999). La structure sociale régule les relations qu'entretiennent les animaux entre eux et assure le fonctionnement du groupe, la reproduction et l'élevage des jeunes (Bouissou, 1992 ; cité par Dumont et Boissy, op. cit.). A contrario, elle accroît la concurrence alimentaire en raison de la diminution rapide de la disponibilité de la ressource, affectant le plus les animaux affaiblis. Pacager en groupe peut aussi forcer les individus à abandonner des sites qu'ils estiment être de bonne qualité tout simplement parce que tous les autres membres du groupe quittent ces sites. Arnold et Dudzinski (1978) cités par Dumont et Boissy (1999), indiquent que des troupeaux d'ovins et de bovins sont divisés en plusieurs sous-unités quand la ressource disponible est faible.

1.1.6.5 Utilisation de la zone de pâture en fonction du savoir-faire du berger, de la physiologie,

du comportement de l'animal, de la topographie et de la physiologie des plantes

Parce qu'un régime alimentaire est constitué lentement sur parcours, il est essentiel de prévoir un temps plus long de pâturage. De 6 à 8 h sur les prairies ou les bons pâturages, il atteint 8 à 12 h, sur les parcours et les pâturages de montagne (Garde et al., 2006). Ce temps varie selon la saison, les conditions météorologiques, le type de milieu, l'état des animaux. Ce temps est divisé en séquences de consommation aussi nombreuses que le milieu est pauvre et que les animaux doivent changer très souvent le lieu où ils peuvent chômer (Agreil et al., 2002 et 2004). Sur des journées chaudes d'été, le temps de pâturage est décalé à la nuit et la rumination dans la journée. Ceci ne signifie pas outre mesure que les bêtes ne doivent pas être contraintes ou qu'elles ne le sont pas en système de garde lâche. D'après Landais et Deffontaines (1988), les bergers prévoient des circuits, observent, analysent les situations et adaptent leurs déroulements de façon à satisfaire au mieux les besoins du troupeau en exploitant au mieux, de leur point de vue, les ressources pastorales sur parcours16. Ils

16 Tu vois ces bêtes là tout au fond de la dépression ; les premières isolées ? On pari que ce sont les bêtes à G. en gros avec quelques unes de F. quand tu les envoie ici chaque année c'est les mêmes qui y sont à ce rythme ! Moi, ma gestion de la journée, à peu près à cette heure si quand le temps est comme ça il ne faut pas que les bêtes aient dépassé cette dépression et allé de l'autre côté ; là bas, ça tire dans le bois et les y ramasser il faut y arriver parce que là on ne sait pas ce qu'elles y cherchent mais elles veulent bien y être même si elles y marchent plus qu'elles n'y mangent. Donc à mon goût la journée n'a pas été bien gérée et ça c'est quelques minutes de retard de ce matin ; elles ont pris l'avance sur nous (Conversation avec un berger sur son estive, Juin, 2008).

sont bien conscients de la gestion du milieu pour éviter l'enfrichement des zones délaissées ou non fréquemment fréquentées par leurs troupeaux. Concernant le pâturage libre, Balent (1987), a montré qu'il freine l'enfrichement des parcours de demie saison, mais ne l'empêche pas, en raison des particularités du comportement des animaux en pâture libre, qui concentrent leurs activités sur les zones les plus favorables et délaissent les autres.

Les besoins alimentaires des animaux varient en fonction de leur état physiologique. Ils sont évalués sur une séquence de pâturage. Quand le type de végétation d'un parc est connu, et par conséquent la pousse de l'herbe caractérisée, l'étalement de la production et la capacité de maintien sur pied, l'éleveur décide des saisons d'utilisation, de la charge, de niveaux de valorisation et d'intensités de pâturage (Garde et al., 2006). Les comportements des ovins au pâturage sont propres à leur espèce, liés à leur biologie, mais aussi à leur contexte d'élevage, à leur expérience, au relief, à la structure et la nature de la végétation et de la configuration du terrain (Lécrivain, op. cit.). Sur le parcours en général, les choix sont guidés par la morphologie des plantes : les vaches préfèrent les feuilles que les tiges, les organes jeunes et verts que les sénescents, durcis, lignifiés ou même jaunes Garde, op. cit.). C'est pourquoi on constate une assez grande variabilité des réponses comportementales. Néanmoins, il existe des comportements typiques qui s'expriment spontanément et régulièrement, y compris dans des situations différentes. Ce sont ces comportements que les bergers connaissent, prennent en compte et sur lesquels ils s'appuient pour conduire leur troupeau quand ils gardent17. Ce sont des attitudes individuelles des brebis, des rythmes, des comportements collectifs du troupeau vis-à-vis des éléments du milieu ou des congénères qui s'érigent en principes de base pour conduire un troupeau (Lécrivain, op. cit.). L'ajustement de ces composantes animales, végétales et du milieu forme le calendrier de pâturage. Ce calendrier peut être envisagé comme un enchaînement de séquences, et la séquence comme une suite de parcs. Face aux aléas climatiques, l'éleveur prévoit des sécurités par séquence ; elles donnent de la souplesse dans l'exploitation des surfaces (Garde, op. cit.).

On confond trop souvent le gardiennage d'un troupeau et sa surveillance. Or le premier remplit une
fonction d'alimentation des troupeaux, et le deuxième une fonction de protection. Le gardiennage
requiert la compétence du berger18. Contrairement à ce que l'on peut imaginer, le travail de berger

17 Quand tu fais la virée comme et quand il faut, tu remontes à la cabane et ne redescends que de temps en temps voir si rien n'a perturbé l'orientation. Sinon tu peux être tranquille qu'elles repassent par la cabane en fin de journée pour coucher sur la crête en dessus de nous (Conversation avec un berger sur son estive, Juin, 2008).

18 passionné, savoir « lire » un territoire dédié au pâturage, avoir la sympathie pour les brebis, la ponctualité pour sortir
régulièrement le troupeau, le calme pour le conduire sans stress, la patience pour le faire manger au mieux à sa faim et à

n'est ni facile, ni tranquille, il communique de manière subtile avec les brebis (Lécrivain, 2004). La surveillance ne nécessite pas de savoir-faire particulier. La pratique du gardiennage permet de valoriser un milieu complexe et hétérogène tout en assurant une alimentation complète aux animaux, par la réalisation de chaque circuit quotidien et l'enchaînement des circuits tout au long d'une séquence de pâturage. Il n'existe pas de « pratiques/techniques » de garde, mais une variété de moyens pour guider les animaux sur la base de critères comme le type de ressources disponibles, les formes de relief, la capacité des animaux à explorer un milieu plus ou moins boisé ou embroussaillé, la visibilité aussi bien pour le berger que pour le chien de protection, l'état physiologique des animaux, l'initiation des animaux, les niveaux d'état corporel attendus par l'éleveur à la descente de l'estive, le respect des contraintes liées à d'autres utilisateurs... (Garde et al., 2006 ; Meuret, 1995 ; Garde et al., 2007). Selon Landais et Deffontaines (1988), les bergers possèdent de nombreuses connaissances relatives au comportement des ovins dans différents contextes de pâturage, qu'ils mobilisent sans cesse au cours de chaque circuit de pâturage. Grâce à ce savoir-faire acquis, ils valorisent des espaces peu productifs, souvent embroussaillés, marqués par une topographie complexe et difficile à clôturer. C'est sans doute dans ce contexte que Lécrivain (op. cit.) stipule que, puisque les pratiques de gardes sont adaptées aux caractéristiques particulières des différents types de milieu, rares sont les jeunes bergers qui s'aventurent sans chercher à recevoir un maximum de conseils auprès d'autres bergers expérimentés. Ces savoirs sont basés sur une connaissance affinée du territoire et des animaux qu'ils géreront19, savoirs acquis le plus généralement de manière empirique.

son rythme en tenant compte de la composition du troupeau et de l'expérience des animaux, et pour éduquer un chien pour la garde, l'attention et la vigilance, l'observation, l'écoute, l'analyse et une capacité de synthèse, la curiosité, le courage, l'aptitude à adapter les circuits de garde face aux changements.

19 Tu vois ces bêtes là tout au fond de la dépression ; les premières isolées ? On pari que ce sont les bêtes à G. en gros avec quelques unes de F. quand tu les envoie ici chaque année c'est les mêmes qui y sont à ce rythme ! (...) Moi, ma gestion de la journée, à peu près à cette heure si, quand le temps est comme ça, il ne faut pas que les bêtes aient dépassé cette dépression et allé de l'autre côté ; (...). On attend encore trois quarts d'heure ou un heure et elles seront là où il faut appliquer la virée (...). Ma gestion des bêtes, de la montagne et de l'estive si tu veux, c'est qu'après avoir passé trois semaines à un mois ici (bas de la montagne), que je monte en moyenne montagne avec les bêtes bien soignées (pas de boiterie, pas d'abcès, pas de plaies, pas trop de maigres...) car un peu plus haut la garde commence à être un peu plus lâche et il ne faut pas qu'il y ait un facteur qui perturbe le comportement et le fonctionnement naturel habituel des bêtes. Plus on monte, plus le troupeau éclate et chaque escabot se constitue jusqu'à ce que tout en haut (les rassembler toutes devienne vraiment une nécessité d'intervention). Là haut il faut connaître le comportement de chaque escabot par coeur pour arriver à les contrôler toutes (Conversation avec un berger sur son estive. Juin, 2008).

1.1.6.6 Les menaces sociales et économiques sur les terres de parcours

Les parcours sont continuellement en mutation rapide ce qui affecte de nombreux pasteurs et

communautés locales. Le manque d'une population permanente dans les zones pastorales conduit le plus souvent à la réduction du nombre de services issus de l'élevage. Certaines terres pastorales ne sont pas d'une taille suffisante et n'ont pas une capacité de charge satisfaisante ou l'infrastructure nécessaire pour une entreprise rentable. Les évolutions macro-économiques récentes, le développement de résidences secondaires, et les nouvelles formes de propriété foncière individuelle rendent difficile l'utilisation de zones de pâturage pour les agriculteurs (Anonyme, 2007b). Le problème majeur qui concerne tous les groupes pastoraux est lié à leurs droits de propriété foncière et l'influence croissante des groupes non-pastoraux et d'intérêt externes sur les ressources (Nori, 2006 ; Garde, et al., 2007). La fragmentation de la propriété rend difficile l'accès à la terre. Les conventions multi-annuelles de pâturage et les accords verbaux entre agriculteurs et propriétaires ne garantissent pas la durabilité de l'exploitation nécessaire à l'installation de clôtures et équipements pastoraux coûteux (Anonyme, 2007a). En outre, les relations avec d'autres utilisateurs (chasseurs, randonneurs, motos...) sont parfois des relations très conflictuelles générant des actes de vandalisme (destruction de clôtures, vols...).

1.1.7 Moyens de production, mode de conduite, produits, considérations sociales, techniques et spatiales

La principale composante des parcours : l'herbe, existe pour être pâturée, et au fil du temps elle

s'adapte avec, à la fois l'intensité et la qualité du pâturage. Les conditions agro-écologiques et les caractéristiques de la ressource pastorale sont variables et imprévisibles. Ceci est déterminant dans la constitution des moyens socio-économiques d'aide aux communautés pastorales20. L'histoire évolutive à long terme des écosystèmes prairiaux ainsi que l'histoire des derniers siècles sont donc essentielles pour la compréhension de sa réponse à la fois à la gestion et à de nouvelles pressions sur elle. Les pasteurs traditionnels considèrent largement les pâturages et les pluies comme un acquis et adaptent leur système social et d'élevage pour tirer le meilleur profit possible. Ceci ne saurait cependant être considéré comme une exploitation minière du fait qu'ils sont conscients qu'il s'agit de leur profession et qu'ils sont soucieux de transmettre ce patrimoine à leur progéniture.

Parmi les 5 grandes zones de production d'herbivores de France, la région Midi-Pyrénées se place largement en tête avec 856.000 ovins ; 1,4 millions de bovins ; 37.930 chevaux. Pour l'année 2000, le bétail pâturant du massif des Pyrénées a été constitué par 60% des exploitations (plus de 6.000 exploitations pastorales21) et le total des surfaces fourragères, plus de 80% de la SAU individuelle.

20 http://www.landcoalition.org/pdf/pol_pastoral_dftf.pdf

21 Eychenne, 2006

Concernant le pastoralisme, 575.000 ha (un tiers de la superficie du massif) ont été utilisés pour des estives collectives et individuelles. Pour ces exploitations, les races locales sont les plus utilisées. Chez les bovins, la Gasconne ; race rustique prédomine (Gibon, 1999), ajoutée à quelques vaches de race Casta ; l'usage de l'insémination artificielle (IA) est rare. Certains élevages continuent de fonctionner sans taureau, comme il était courant dans le passé. Dans certains cas, l'accouplement a lieu uniquement pendant l'estivage dans le troupeau collectif avec taureau. Le calendrier de mise bas oppose le vêlage de printemps (Mars ou Avril), classique dans la région, au vêlage précoce (début Janvier à mi-Février). Un premier objectif est de situer les saillies à une période où la pousse de l'herbe permet aux vaches de récupérer du poids au pâturage après un hivernage qui a souvent tiré sur leurs réserves corporelles, ce qui améliorera les résultats de fertilité. II s'agit également d'obtenir des vêlages suffisamment précoces pour pouvoir envoyer toutes les bêtes à l'estive dès le mois de Juin (Gibon, op. cit.). Ainsi, dans la continuité des bovins, l'utilisation de deux races locales ovines (Castillonnaise et Tarasconnaise), de deux races équines (Mérens et Castillonnais) et du porc de race Gascon respecte la Charte du Bureau des Ressources Génétiques (BRG) dont l'un des objectifs est de maintenir in situ l'exploitation et l'utilisation des races locales pour préserver le potentiel génétique et les conditions dans lesquelles il a été créé.

En fonction de divers critères, l'élevage de montagne est constitué de plusieurs sous-systèmes ainsi que de nombreux produits. Le "Broutard" reste le principal mode de gestion et de vente d'animaux jeunes. Ceci est la résultante de différents objectifs : économiser la ressource, réduire les charges de travail... En raison de "l'économie" et de "l'autonomie", la gestion du troupeau dans les années 70 était basée sur l'utilisation maximale des atouts environnementaux. L'estive conditionne le fonctionnement de l'exploitation de montagne parce qu'il fournit toute la ration alimentaire pendant au moins trois mois de l'année. Le modèle de gestion de l'estive est celui de l'agro-système qui exporte des éléments à travers la production animale (viande, lait) et transfert d'autres par les déjections.

En ce qui concerne la garde du troupeau, il y a schématiquement, le gardiennage serré (également appelé « bâton planté ») qui consiste à tenir le troupeau regroupé sur des reliefs favorables (concaves ou plats) en s'appuyant sur l'action des chiens de conduite (Garde et al., 2006). Ceci permet de fractionner le pâturage dans un espace précis afin de le rationner, de conduire le troupeau avec un chargement instantané élevé (Lécrivain, 2004). L'action plus impérative du berger en gardiennage serré peut par exemple être, pousser le troupeau à mieux consommer une ressource abondante non encore pâturée, fine ou grossière en début d'été, si le relief s'y prête, aux moments favorables de la journée (Garde et al., 2006). Le gardiennage lâche consiste, le berger étant présent,

à laisser plus d'espace de déploiement au troupeau afin qu'il se constitue une ration complète sur un espace plus difficile, par son embroussaillement, son relief irrégulier, ou son faible recouvrement herbacé ; la priorité du berger est alors de conserver l'unité du troupeau, même dispersé, et d'éviter qu'il « se coupe ». C'est par exemple la conduite la plus adaptée en fin d'été, sur une ressource dégradée par la période sèche estivale (Garde, op. cit.). Ces résultats complètent ceux de Lécrivain (op. cit.) pour qui le travail du berger en gardiennage lâche consiste à donner une orientation au troupeau, puis à le laisser choisir son « biais » et en acceptant, dans une certaine mesure, les orientations prises par le troupeau. Avec l'aide de son chien le berger contrôle seulement les limites qu'il juge nécessaire de ne pas dépasser. Les limites de l'espace prévu pour un circuit sont donc souples. En pratiquant ainsi, le berger contrôle la localisation de l'impact du pâturage non pas à l'échelle de la journée mais à l'échelle de plusieurs journées de pâturage ou de plusieurs circuits. Il y a des avantages et des inconvénients à cette pratique : inconvénients puisque les bêtes peuvent ne pas être là où l'on voudrait qu'elles soient ; avantages car elles acquièrent une forte autonomie. A l'inverse de ce système éclaté, un récent bilan scientifique des modes de garde regroupés qui accompagnent le plan loup, semblables à ceux du plan ours, vient de montrer combien le regroupement du bétail pouvait être néfaste pour ces même milieux : piétinement excessif d'un troupeau trop important en un même secteur, érosion des zones de passage; à l'inverse, perte d'entretien de certains quartiers escarpés, difficiles, où la légèreté des petits escabots se faufile sans peine mais ou l'armée lourde du troupeau ne le peut pas : trop de risques (Besche-Commenge, 2008). Enfin, le gardiennage lâché-dirigé consiste à orienter le troupeau, lui donner le « biais », ensuite le laisser dérouler son circuit de pâturage sur un espace que les animaux connaissent bien. Le berger retourne voir son troupeau en fin de journée et l'oriente vers une couchade libre ou clôturée. Ce type de gardiennage est pratiqué sur des quartiers favorables (ceux où « les bêtes se gardent toutes seules »), lorsqu'il n'y a pas de risque de mélange de troupeau ou d'incursion des animaux dans des champs, et préférentiellement en automne, saison où les bêtes tendent spontanément à descendre et non pas à monter.

Du fait d'un gardiennage permanent déjà assez généralisé, la surcharge de travail que liée à la garde de tous les lots représenterait un accroissement de travail moyen de 4,5 mois par an et par exploitation pour un total moyen de 16 lots-mois au pâturage. C'est tout de même un tiers temps à l'année à mobiliser en plus à production constante, et à cumuler avec l'accroissement de travail nécessaire pour rentrer les bêtes la nuit. Cette surcharge est très inégale selon les exploitations, entre 2 et 12 mois par an (Garde, et al., 2006).

Animal

L'Homme, l'Animal et le Milieu
Biophysique interagissent pour
créer un écosystème pâturé.

L'Homme, gère le milieu Abiotique, le milieu Biotique et la Ressource Naturelle pour maintenir ou entretenir cet écosystème pâturé en fonction des exigences sociales, environnementales, politiques et économiques.

Ecosystème Pâturé

Ressources
Naturelles

Environnement
Biotique

Eleveur/ Berger

Environnement
Abiotique

Pour les éleveurs et Bergers, sont considérées comme bonnes pratiques, celles qui permettent au troupeau de pâturer au maximum tout en assurant la durabilité de la ressource Naturelle et en produisant de « Beaux » Broutards.

Laisser le
troupeau pâturer
au maximum

Espace des
bonnes pratiques

Produire de beaux
agneaux /veaux
Broutards

Assurer la durabilité
de la ressource

Figure 1. Cadre Macro-théorique du Pastoralisme

Figure 2. Valeurs qui délimitent l'espace des bonnes pratiques (Lasseur et al., 2007)

Lorsqu'on pose à un habitant et agriculteur de l'Ariège la question : quels sont vos moyens de production ? La réponse est le plus souvent : les bêtes, l'estive, le GP, l'AFP, moi et quelques machines. Cela souligne le mélange de la gestion individuelle et collective des unités de production, et leur relation ou dépendance à l'estive. En effet le système pastoral ariégeois se distingue par, son lien culturel et socio-économique à l'estive. Ces estives s'échelonnent de 1.200 à près de 3.200m d'altitude et couvrent environ 140.000 ha, le plus souvent de mauvaise qualité. Ce sont des terrains de parcours avec relativement peu d'équipements et de modalités techniques de gestion, comparées aux Alpes et au Massif central par exemple. La gestion de la zone intermédiaire22 est aujourd'hui, de plus en plus rare et difficile en raison de l'invasion par des arbustes. La montée pour l'estivage est courante du 20 Mai au 15 Juin et la descente du 1er au 30 Octobre ; les bovins montant plus tôt et descendant plus tard que les ovins du fait de leur faible vulnérabilité à la prédation. Toutefois, en raison des techniques de gestion individuelle, qui favorisent les montées précoces et les descentes tardives, il n'est pas étonnant de voir que le bétail quitte l'aire de l'exploitation début Mai pour ne redescendre qu'aux premières chutes de neige. Les deux vallées de l'Ariège : le Couserans et la Haute Ariège, correspondent aux zones de montagne les plus touchées par la déprise agricole. Ici, la principale orientation des exploitations est l'élevage allaitant, bovine ou ovine, conduits en extensif. En résumé, selon la fédération pastorale de l'Ariège (2007), le pastoralisme en 2003-2004 concernait : 57 AFP (24.000 ha; 53.000 propriétaires fonciers; 55.000 parcelles), 75 GP (280 unités pastorales; 124.000 ha; 853 éleveurs transhumants (387 éleveurs de vaches, 270 moutonniers, 185 éleveurs de chevaux et 11 chevriers avec 17.325 ; 50.681 ; 1.976 et 158 bêtes respectivement), 50 bergers, 23 missions d'héliportage (30 tonnes de biens), 11 opérations de transport par bâts (5 tonnes).

1.1.7.1 Etude des systèmes d'élevage : exploitations, hommes et troupeaux en montagne

Le pastoralisme, système de production par lequel l'homme, le bétail et le territoire interagissent (Eychenne, 2006 ; Landais et Balent, 1995), produit un éco-agrosystème complexe (voir schémas 1 et 2 ci-contre) où, savoir-faire traditionnel, considérations économiques, techniques et sociopolitiques, sont conjointement mis en jeu. Comme nous l'avons mentionné plus haut, c'est une production originale mais dont la complexité résulte de l'interaction et de l'existence de différents objectifs de gestion entre : le gestionnaire (berger, éleveur, communauté rurale qui réglemente la forme d'utilisation des terres communales et privées); la végétation et les animaux (Landais et Balent, op. cit.). Ici, la gestion et l'exploitation raisonnée des ressources génétiques dans leur milieu naturel oblige souvent à dépasser le seul cadre de l'espèce et de prendre en compte le contexte /.../

22 Précédemment prés de fauche ou terrain de pâture de fin de saison, aujourd'hui rassemblement de plusieurs propriétés privées pour la pâture collective, elle permet l'extension de la période d'estive

au sein des systèmes agricoles et environnementaux (Besche-Commenge, 2008 ; Balent et al., 1998). C'est dans ce sens que Lasseur (2008) considère la culture technique locale, et notamment sa déclinaison en termes de bétail (système d'élevage local) comme un « filtre » qui a conduit les agriculteurs à interpréter les changements dans les conditions de production définies au niveau macro-économique. Cette interprétation permet de définir de nouvelles pratiques que ces agriculteurs seront prêts à mettre en oeuvre. Le pâturage pour être compris et utilisé pour la gestion de l'environnement, doit être pris en compte dans des échelles spatiales et temporelles inhabituelles pour les disciplines de l'agriculture et de l'élevage (Besche-Commenge, 2008 ; Balent op. cit.).

La gestion d'un troupeau tout au long d'une campagne est décryptée par l'analyse fonctionnelle développée par Guérin et Bellon (1990) qui repose sur quatre principes : adopter le point de vue de l'éleveur, découper la campagne en périodes (fonctions ou séquences) et identifier la hiérarchie entre les périodes, expliquer le projet de l'éleveur, comprendre le point de vue fonctionnel des ressources fourragères (prélèvement, report sur pied, gestion de la ressource, complémentarité entre ressources hétérogènes, saisons-pratiques...). Ces périodes sont interdépendantes à cause des relations causales dues au déroulement des processus biologiques ou des pratiques, des relations de gestion, qui étoffent une campagne. La particularité des systèmes d'exploitations en Ariège est cette généralisation du pastoralisme mobile tant pour les ovins/caprins que pour les bovins et équins. Ce système est en partie le résultat du peu d'alternatives offertes par le milieu montagnard dans lequel la majorité de ces exploitations ont leur siège. Aussi, l'héritage culturel et l'orientation des nombreux projets d'appui à l'activité montagnarde (PHAE et autres MAE) ont conforté les exploitants dans les techniques ancestrales courantes. Il y faut une connaissance fine de la réalité, et des pratiques qui savent s'adapter. C'est tout simplement « l'intelligence du milieu ». En officialisant les accords de voisinage, en permettant au bétail une liberté surveillée sur des terrains où juridiquement il n'avait aucun droit à l'herbe, les chartes anciennes tenaient compte de cette nécessaire souplesse dans la gestion du territoire et la conduite de troupeaux non pas regroupés, mais dans l'individualisation de petits escabots, troupeau commun ou garde individuelle (BescheCommenge, 2008). Les pratiques pastorales ne sont pas restées insensibles aux diverses modifications sociales, techniques, économiques et politiques. Le Gardiennage était autrefois général, les troupeaux avaient moins de bêtes, beaucoup d'éleveurs pratiquaient la traite en estive...

1.1.7.2 Etude du système de pâturage

En montagne, l'excès de rochers, de petites crêtes, et d'escarpements interrompt le pâturage continu. Les brebis sont dispersées parce que c'est ainsi qu'elles trouvent l'herbe qu'elles préfèrent. Sur ces petits récifs, il semble que rien ne pousse alors que de très appétantes herbes sont abondantes. Nous ne pouvons plus les voir toutes, et c'est à ce moment-là qu'elles profitent!

(Entretien 1, 7 et 8, Mai 2008). Techniquement, il y a une distance entre le berger et l'animal qui "permet" à l'animal de s'arrêter. Donc, si le berger adresse au troupeau, toute la journée le message : « allez de l'avant! » Il y aura piétinement sans véritable consommation, mais celui-ci s'épuise pour un travail négatif. En outre, l'animal au parcours rumine dès que sa panse est pleine et ne peut consommer plus que sa capacité d'ingestion. Pour Agreil et al. (2004) une brebis est correctement nourrie sur parcours quand elle mélange les ligneux et les herbacées dans sa ration ; ça c'est une brebis qui "organise son temps avec sérénité". Une brebis inquiète ou agitée en raison d'un sentiment d'insécurité et qui interrompt fréquemment sa consommation afin de vérifier l'absence de prédateurs n'est pas bien nourrie. Pas bien du point de vu nutritionnel car elle se concentrera sur les espèces faciles à couper. Pas bien aussi du point de vue de la gestion écologique, car il y aura donc un impact disproportionné du pâturage (Garde et al., 2006). Ces résultats confirment ceux de Lécrivain (2004) qui souligne que les attitudes de crainte conduisent les brebis à cesser de pâturer. Si cette situation se reproduit plusieurs fois au cours d'un circuit, la durée de pâturage journalière est considérablement réduite car il faut un long moment pour que les brebis reprennent calmement et efficacement leur pâturage. Les brebis ont une horloge interne qui rythme leurs activités ; elles expriment leur sensibilité à la régularité des horaires. En résumé, un troupeau agité se limiterait aux milieux éclairés avec surpâturage. A l'inverse, un troupeau calme se disperse facilement, les animaux consommant une large gamme de plantes.

1.1.8 Le contexte de la prédation par L'ours brun

L'inaccessibilité des terres marginales a permis la survie d'espèces éliminées en zone de forte densité agricole. Par conséquent, il y a une pression sur les gouvernements de déclarer ces régions comme zones protégées, à la fois en raison de la pression du lobby de conservation et les potentiels « revenus du tourisme ». Ces zones, qui étaient jusqu'à lors les domaines des pasteurs sont de plus en plus transformées en réserves de biodiversité. Ajouté à ce désir de reconquête de la nature, les incertitudes sur l'occupation des terres par l'activité pastorale rendent inefficaces les revendications des éleveurs. Dans l'ère pré-moderne, la prédation sur les troupeaux a été une préoccupation majeure de la quasi-totalité des éleveurs et une demande constante de la main d'oeuvre en élevage. L'expansion de l'agriculture et la propagation des armes modernes au début du XXe siècle ont largement éliminé les prédateurs dans l'ensemble des écosystèmes. Toutefois, des modifications extérieures ont des répercussions sur la perception de la prédation et donc les attitudes à l'égard de l'élimination des gros prédateurs. De nombreuses espèces, comme les loups, les ours et le léopard des neiges, sont maintenant considérées comme menacées et, par conséquent, font l'objet des efforts de conservation plutôt que comme une nuisance à éliminer (Göbel, 1997).

1.1.8.1 Considérations générales

Les grands prédateurs (Ours, Loups et Lynx) sont aujourd'hui totalement protégés. Concernant l'ours, la convention sur la diversité biologique (CBD), l'UICN, la Directive « Habitats », la Convention de Berne, la Convention de Washington, les résolutions du parlement européen (A2- 339/88, ABL C 69/201, 20.3.1989 ; A2-0154/94, ABL C 128/427, 09.05.1994, les Recommandations du conseil de l'Europe (Recommandation n° 10, 1988 ; Recommandation n° 43, 1995), la Réglementation nationale (CNPN) interdisent toute activité pouvant mettre en danger la vie de cette espèce (Ministère de l'écologie, 2006). Du fait de ce statut de protégé, les éleveurs ne peuvent que réclamer des expertises pour que les dégâts sur leur exploitation (animal mort ou blessé) soient imputés à l'ours. La difficulté de résolution du « problème » ours en montagne vient du fait que celui-ci est considéré comme espèce parapluie et espèce emblématique (générateur de revenus à travers le tourisme). Ceci veut dire que si avéré, l'ours garantirait le plein fonctionnement des écosystèmes de montagne et serait donc bénéfique à la fois au pastoralisme et à la population riveraine. En d'autres termes, l'ours améliorerait la biodiversité et la multifonctionnalité des territoires de montagne donc s'associerait au pastoralisme pour rendre la montagne plus productive et assurer une production plus durable. Sauf que dans le contexte des Pyrénées, les éleveurs, ne voyant pas immédiatement le bien fondé de l'ours mais son contraire, de part ses interventions négatives sur leur survie, la méthode essai-erreur ne peut les rassurer car c'est de leur avenir dont il est question. Aussi, ils acceptent mal que les externalités négatives sur l'environnement de l'agriculture intensive soient « ignorées » et eux, avec une activité multifonctionnelle et productrice d'externalité positives indexés.

La propriété de l'Etat sur laquelle est fondée une certaine spécificité ariégeoise est grevée de droits d'usage au profit des éleveurs des communes usagères. Ces droits sont tout à la fois individuels (chaque exploitant de la commune) et collectifs (l'ensemble des exploitants de la commune). Ils équivalaient dans l'esprit de leurs prétendants à un véritable droit de propriété. Par ailleurs, ces vacants domaniaux ont été considérés de tous temps comme des dépendances de la forêt de l'Etat, et, à ce titre, sont soumis au régime forestier. C'est ainsi que les prescriptions du Code Forestier relatives aux droits d'usage dans les bois de l'Etat leur sont appliquées. Cette divergence de point de vue entre le régime juridique et la nature physique de ces biens est certainement à l'origine de nombreux conflits dans l'usage de ces fonds. Cela a engendré depuis le XIIIe siècle un climat d'opposition plus ou moins systématique entre l'Administration des Eaux et Forêts d'une part, les éleveurs et les élus d'autre part.

L'ours renforcerait la multifonctionnalité des territoires de montagne, il génèrerait une activité touristique, il produirait plus de biodiversité et donc améliorerait les fonctions des écosystèmes de montagne et par ricochet les services rendus au pastoralisme (à démontrer). Le pastoralisme confère un statut multifonctionnel aux territoires de montagne, il génère une activité touristique (création des merveilleux paysages, ouverture des milieux...), il produit la biodiversité et donc améliore les fonctions des écosystèmes de montagne et par ricochet les services rendus à l'ours. Ours et pastoralisme amélioreraient simultanément leur existence si ces considérations étaient avérées pour l'ours. Dans ce sens une cohabitation Ours - Pastoralisme serait très productive !

La réintroduction de l'ours brun dans les Pyrénées françaises (1996, 2006) modifie la perception d'un élevage globalement favorable à l'environnement. La place que l'on souhaite attribuer à cet élevage dans la protection des espaces naturels est l'objet de prises de positions très contrastées et la présence de l'ours engendre des modifications de pratiques d'élevage susceptibles de remettre en cause la contribution de l'élevage à la gestion des espaces « naturels ». Les scientifiques concernés savent bien que les pertes sur les troupeaux peuvent être beaucoup plus importantes. Mais sur le terrain, on s'aperçoit que la tendance est de considérer que c'est plutôt exceptionnellement. Implicitement, tout se passe comme s'il y avait un objectif « d'innocenter » le prédateur, en mettant en avant les chiens errants, et en cause les pratiques de l'éleveur, voire sa bonne foi. Le risque d'attaque pèse sur le troupeau jour et nuit, tout au long de la présence en estive. Les questions des pertes indirectes et encore plus celles des animaux non retrouvés sont cruciales (Garde, 2001). Se rapportant aux travaux de Garde (2006) sur le loup, si l'ours n'est vraiment que le bouc émissaire des autres difficultés de la profession ovine, c'est une perte de temps que de travailler à la protection des troupeaux ; si à l'inverse, l'ours est une question technique nouvelle appelant de gros efforts d'adaptation de la part des éleveurs et des bergers, c'est une perte de temps que de vouloir expliquer l'opposition des éleveurs par des considérations historiques, psychologiques, voire mythiques. Au début des années 1990, le dernier ours des Pyrénées centrales disparaissait laissant seulement 7 à 8 individus du noyau occidental. En 2005, la population d'ours brun des Pyrénées était de 14 à 18 individus. Ce nombre, insuffisant pour sauver l'espèce, un nouveau programme de renforcement a été mis en oeuvre et 5 ours relâchés dans les Pyrénées centrales en 2006 (Ferrus, 2007). Pour le Ministère de l'écologie (2006) et Ferrus (2007), l'ours n'est pas seulement considéré dans ce programme comme une espèce emblématique, mais aussi une espèce parapluie qui offre de nombreuses retombées économiques (tourisme) et écologiques (conservation de la biodiversité).

1.1.8.2 Ecologie de l'ours brun

L'Ours bruns se trouve dans de nombreux biotopes, de la périphérie des déserts à des forêts de
montagne et zones de glace. En Europe, l'ours brun est le plus souvent trouvé dans les forêts de

montagne, en Sibérie, il réside principalement dans les forêts tandis qu'en Amérique du Nord, ils préfèrent la toundra, les prairies alpines et les côtes. Les principales exigences de cette espèce sont des zones à forte densité de couvert dans lequel ils peuvent s'abriter le jour (Ministère de l'écologie, 2006).

1.1.8.3 Structure sociale de l'ours

Bien que le plus souvent solitaires, les ours se regroupent parfois sur une zone importante de leur

ressource alimentaire et forment un groupe familial de « pâture ». Dans ces cas, une hiérarchie de dominance impliquant l'agression est établie. Même si c'est le mâle adulte le plus costaud qui est le plus respecté, les animaux les plus agressifs sont les femelles allaitantes.

1.1.8.4 Cycle de vie de l'ours

Les ours naissent vulnérables, étant aveugles, nus et avec un poids de 340 à 680 grammes

seulement. Les oursons croissent rapidement pour atteindre 25 kg à 6 mois, et continuent à téter pendant 18 à 30 mois en mangeant une variété d'aliments. Les Oursons restent généralement avec la mère jusqu'à la troisième ou quatrième année de leur vie. Dans la nature, l'ours brun peut atteindre 20 à 30 ans (Ministère de l'écologie, op. cit.).

1.1.8.5 Reproduction de l'ours

Parfois, les mâles luttent avec les femmes avant l'accouplement, et une fois qu'ils ont dominé, ils

ont tendance à les protéger de 1 à 3 semaines. L'Ours brun s'accouple de Mai à Juillet, et l'ourse a une gestation de 180 à 266 jours. Les naissances ont lieu de Janvier à Mars, alors que généralement la femelle est encore en hibernation. Elle met bat généralement deux à trois oursons avec un intervalle entre mises bas de 2 à 4 ans.

1.1.8.6 Ration alimentaire de l'ours

L'ours brun est omnivore et son régime alimentaire varie avec la saison : de l'herbe et des pousses

au printemps aux baies et petits fruits en été, noix et prunes en automne. Toute l'année il mange les racines, les insectes, les mammifères, des reptiles, et bien sûr, le miel et le bétail.

1.1.8.7 Conflit Homme - Ours ou Homme - Prédateur

L'ours est un problème par l'angoisse qu'il génère, les menaces concrètes qu'il fait peser sur les

troupeaux, mais aussi pour une raison plus profonde : l'ours est devenu le moyen, pour les « institutions et écologistes », de s'approprier la gestion d'un espace en lieu et place de ceux qui y maintiennent une biodiversité agricole et ordinaire très riche, à partir de races rustiques et de pratiques pastorales adaptées. C'est effectivement d'un choix de civilisation23 qu'il s'agit : continuer, en l'adaptant au nouveau millénaire, cette très ancienne civilisation pastorale qui a construit à la fois des hommes, des cheptels, des milieux.

23 Nous voulons savoir réellement quels choix de société sont effectués avec l'ensauvagement de la montagne (LACUBE Philippe, Entretien. Mai, 2008)

Les ours sont parfois connus pour leurs attaques sur le bétail et les canalisations d'eau, leur incursion dans les vergers et les ruchers, la fouille des poubelles et à l'occasion des entrepôts de nourriture. L'homme est naturellement effrayé par ces grands prédateurs et la première réaction est de les attaquer ou les tirer. Toutefois, les attaques sur l'homme ne semblent pas être le résultat d'un comportement prédateur, mais plutôt un résultat de défense de ses petits ou d'une carcasse contre l'homme. La présence d'un ours blessé est la situation la plus dangereuse (Ministère de l'écologie, 2006 ; Ferrus et WWF, 200824).

L'histoire de l'irréversible décadence d'un peuple ougandais, les Iks, anéantis par la décision prise en 1962 par I'Etat colonial de consacrer leur territoire à la « protection de la nature » en l'érigeant en parc national sans que la gestion de ces ressources en ait été améliorée. Le destin des Iks illustrait jusqu'à l`absurde la problématique élémentaire des effets sociaux d'une politique de préservation du milieu naturel décidée par un pouvoir central sociologiquement et culturellement extérieur à la société locale (Constantin, 2008).

L'analyse des conflits Homme - Prédateur est encombrée par un ensemble de mythes entretenant une approche émotionnelle dans toute une partie de l`opinion publique, en particulier l`opinion euro-américaine invitée à faire pression sur les décideurs nationaux et internationaux. Cette mythologie mêle souvenirs d'enfance et quête du paradis perdu, de l'harmonie oubliée entre l'Homme et la Nature, harmonie que romantisme et aventurisme ont cru trouver dans ces confins du monde connu sur lesquels surfe aujourd'hui avec talent Nicolas Hulot. L'honnête et sincère téléspectateur euro-américain qui applaudit l'interdiction de chasser l'éléphant après le bébé phoque est aussi bouleversé devant le corps sans âge d'adolescents sous-alimentés (...). En tout état de cause, imposer aux indésirables les mesures indispensables pour rétablir et entretenir les équilibres naturels définis à Washington, Paris ou Gland (Suisse), (...), peut consister à obtenir leur déguerpissement ; la politique de gestion des ressources naturelles a aussi ses intégristes, inspirés par les grands humanistes dont les « solutions finales » s'appuient sur des certitudes scientifiques (Constantin, op. cit.).

1.1.8.8 Dynamique de l'expansion de l'ours dans les zones d'élevage

Si les territoires occupés par le loup sont précisément les mêmes que ceux mis en valeur par le pastoralisme méditerranéen montagnard, et en particulier concernant les ovins (Garde, 2002), ceux occupés par l'ours devraient être beaucoup plus étendus en raison de leur alimentation et leur aire de vie.

24 http://www.panda.org/about wwf/what we do/species/problems/human animal conflict/human bears wolves conflict.cfm

1.1.8.9 Etendue des dommages liés à l'ours

La prédation sur le bétail produit des dommages directs et indirects à l'exploitation et augmente la charge de travail du berger ou de l'éleveur. Ainsi, la présence de l'ours est censée mettre en cause la durabilité du pastoralisme et la présence des troupeaux en montagne. Ceci parce que la logique actuelle de l'exploitation pastorale exige de plus en plus d'animaux par troupeau (cours de viande en baisse constante), la limitation des charges supplémentaires et la vente aux périodes ciblées. L'ensemble des situations concernées par la prédation sur le bétail donne lieu à une crise sociale aiguë (MAUZ, 2002) liées aux difficultés techniques ainsi qu'aux stratégies de déni du rôle des prédateurs dans ces difficultés, véhiculées par ses défenseurs (Garde, 2000). Malgré les efforts des éleveurs de se défendre contre l'arrivée des prédateurs, les systèmes de protection classiques ont de nombreuses limites, et ne sauraient constituer une solution durable pour la cohabitation. Les contraintes de la prédation, en plus des faibles revenus de l'élevage, découragent l'installation des jeunes agriculteurs (Anonyme, 2007a).

La conséquence ultérieure de la présence de grands prédateurs est l'abandon des activités d'élevage, en montagne comme en fond de vallée. Sont concernés, en premier lieu, les petits propriétaires d'exploitations agropastorales familiales de montagne. Ils se sentent dans l'impossibilité et l'incapacité totales de gérer cette situation nouvelle et difficile, qui compromet le maintien d'une double activité (en montagne comme en fond de vallée). De plus, cela met en péril tout le travail de soutien aux éleveurs. Les effets concomitants de toutes les modifications de la conduite des troupeaux sont de nature à provoquer l'apparition d'un transfert dangereux de fertilité depuis les secteurs les plus éloignés jusqu'aux parcs de nuit de protection placés à côté des bergeries, ainsi qu'un appauvrissement progressif des sommets des aires pâturables à proximité des cols et des crêtes (Dubost, 1981 ; Sato, 1982 ; Cugno, 2002 ; Garde et al., 2006). La totalité des déjections animales déchargées pendant la nuit sera alors accumulée de façon excessive à l'intérieur des enclos, créant ainsi une situation difficile à gérer, aux répercussions négatives, aussi bien du point de vue écologique qu'agronomique (Lombardi, 1997 cité par Cugno, 2002 ; Garde et al., 2006).

En péril, la nature et la vie sur Terre sont actuellement victimes d'un mode de société. Le système capitaliste, largement dominant dans le monde occidental, connaît une extension planétaire : la mondialisation. L'agriculture intensive a généré trop d 'externalités négatives à l'environnement. Aujourd'hui, la « fabrique » d'une nouvelle agriculture qui a débouché sur le concept de multifonctionnalité des exploitations est beaucoup plus portée par des systèmes extensifs. Les grands prédateurs (loup, ours...) espèces parapluie et/ou clé de voûte de la majorité des écosystèmes du nord de la planète, mettent-ils en lumière ce rejet de la nature (Moriamé, 2004) ou sont-ils victimes de la « perfection des moyens et la confusion des fins » de ce siècle ? Aujourd'hui,

ce n'est peut-être plus la peur qui pousse à éliminer le prédateur. L'intérêt économique qui accompagne l'élevage, le profit et, plus généralement, la croissance économique, sont devenus les objectifs majeurs de l'humanité. Aux dépens de la nature, malheureusement, et de l'homme, finalement. Tout devient marchandise, ce qui n'est pas nécessairement scandaleux : tout travail mérite salaire et créer la beauté d'un paysage ou d'un bâtiment est un même travail ... restent à déterminer les valeurs et les équivalences! Pour la valeur paysage, c'est presque mission impossible à lire les travaux des économistes : comment fixer un équivalent monétaire aux paysages, quelle cotation, quel CAC 40, quels actionnaires, quelle loi de l'offre et de la demande ?

1.1 Problématique

Les arguments d'ordre techniques et économiques actuels de l'élevage pastoral, la représentation que les éleveurs pastoraux ont de leur savoir-faire et de l'estive, n'offrent pas une sécurité pour la cohabitation pastorale. Par conséquent, du fait de la vulnérabilité des animaux au pâturage liée à la prédation par l'ours dans un système d'élevage en équilibre instable et fragile, l'anxiété pour l'avenir entraîne des considérations uniquement négatives du prédateur et menace sa survie. Dans ce contexte, parler de maximisation de la production, de durabilité et de biodiversité en rapport au prédateur génère beaucoup de malentendus. Aussi, les acteurs ruraux ne retrouvant pas la préservation des « acquis » culturels, sociaux et techniques de leur élevage pastoral acceptent mal la préservation de l'ours brun en l'installant confortablement dans « leurs » estives et zones de montagne.

Nous avons réalisé une étude sur la compatibilité de l'application des mesures d'accompagnement du plan ours avec les configurations techniques, sociales, culturelles et économiques du système pastoral en Ariège et principalement sa répercussion sur la conduite dans les estives et donc la perturbation du fonctionnement général. Nous présenterons les principaux enjeux des relations élevage - environnement et ours - environnement, les transformations des élevages en lien à la présence de l'ours dans les résultats. Nous discuterons ensuite si possible les conséquences de ces modifications et l'accompagnement des transformations de ces élevages pour assurer leur pérennité et leur contribution à la gestion des espaces.

1.1.1 Question de recherche

Pour ce travail, considérant les aspects biophysiques, biologiques et physiologiques liés au milieu, à la ressource et au bétail, les aspects socio-professionnels et technico-culturels liés au pastoralisme et enfin les aspects pratiques préconisées par le plan ours lié à la conservation, notre recherche s'est articulée autour de la question suivante : L'usage fait des estives en Ariège est-il compatible avec la mise en pratique des mesures d'accompagnement du plan de réintroduction de l'ours brun dans les

Pyrénées françaises ? Pour répondre à cette question, nous avons formulé des hypothèses pour l'orientation de nos investigations.

1.1.2 Hypothèses de recherche

Trois hypothèses majeures découlent de nos objectifs pour répondre à la question formulée. Il s'agit de :

1. La présence de l'ours brun induit des réorganisations du système d'exploitation non rentable pour l'élevage pastoral.

2. Le système pratiqué permet une certaine capacité d'adaptation.

3. La diversification des exploitations est une réponse à leur sensibilité et une mesure alternative.

1.1.3 Objectifs d'étude

Nous avions voulu initialement traiter de la vulnérabilité de tous les animaux au pâturage mais en nous rendant compte à la suite des entretiens que les bovins, équins et caprins25 étaient moins concernés, nous avons trouvé plus judicieux de recentrer nos propos sur les ovins principalement. L'objectif de ce travail est de s'informer et de comprendre le fonctionnement du système agraire en Ariège, d'analyser le système d'élevage d'un point de vue zootechnique, économique et socioculturel et d'interpréter comment l'ours brun et ses mesures d'accompagnement influencent tout cela. Cela permettra de vérifier si toute modification sans tenir compte de ces historiques sociotechniques et, des données topographiques est de nature zoohygiénique et préjudiciable pour la durabilité du système ou non. Enfin, ce travail vise à déterminer les alternatives et les perspectives de l'élevage pastoral en Ariège dans ce contexte particulier.

25 L'élevage caprin ici étant pour la production de fromage, la conduite est moins extensive et moins dépendante de l'estive ou tout au moins, la garde est plus serrée ; les animaux devant être traits en fin de journée.

Chapitre 2 : Terrain d'étude et collecte de

données

2.1 Terrain d'étude

2.1.1 Ariège-Pyrénées

Le choix du département de l'Ariège pour traiter de cette question élevage - grand prédateur n'est pas fortuit. De toute la chaîne des Pyrénées, c'est le département le plus touché par la prédation sur les troupeaux et où, s'est installée la majorité des ours du massif ( http://www.pyreneespireneus.com/Ours_des_Pyrenees.htm). C'est donc en Ariège qu'on recense le plus d'opposants à la réintroduction. Peut-être de par leur souvenir au succès lors de la « guerre des demoiselles26 », mais, surtout par leur tradition pastorale dont le véritable produit reste le broutard, fruit d'une bonne estive. Le slogan du département a été longtemps "Terre Courage". La nature sauvage de l'Ariège dans les Pyrénées centrales a influé sur ses habitants. Pour les randonneurs et les touristes, le département offre une grande variété de paysages, la flore et la faune sont très riches. L'Ariège est un département plutôt rural avec de nombreux villages et hameaux et de petites villes. Les communes d'estive où l'ours a déjà sévi et celles voisines ont été choisies pour l'enquête de terrain en priorisant les exploitations ovines, plus vulnérables à la prédation.

2.1.2 ASPAP

Une observation n'étant faite qu'à partir d'un point préalablement choisi, je me suis fait
« protecteur » du troupeau d'où le choix de l'ASPAP comme porte d'entrée. Ceci est dû en partie à
ma formation de zootechnicien dont la fonction première est la production de nourriture (viande).

26 Nous sommes en 1829, la population de l'Ariège ne cesse d'augmenter et les paysans s'appauvrissent. Ignorant de ces réalités et soucieux de reconstituer la forêt dévastée par des siècles d'exploitation, Charles X décide de reprendre aux communes le sol domanial en instaurant une nouvelle administration forestière. Depuis le Moyen-Age, le Couserans et les hautes vallées de l'Ariège, reculés, vivent en quasi autarcie. La forêt, ce qu'elle offre, assure la survie de la population qui la considère comme son bien propre. Les paysans des vallées de la Bellongue, de Bethmale, du Biros mais aussi de Massat, s'insurgent et "les Demoiselles" font leur apparition. Déguisés en femmes avec de longue chemises blanches, des foulards ou des perruques, le visage noirci ou caché, les hommes attaquent, souvent la nuit, les grands propriétaires, les gardes forestiers et gendarmes, les maîtres de forges et les charbonniers. Inorganisés et sans conscience politique, les paysans conduisent cette "guerre" avec peu d'armes. Pourtant sous l'aspect "carnavalesque" de cet événement, "les Demoiselles" vont installer une atmosphère de peur qui inclinera le pouvoir à instaurer des mesures d'amnistie et assouplir les lois de cette administration forestière. Ce conflit, intense de 1829 à 1832, s'étendra jusqu'en 1872 ( http://www.ariege.com/histoire/gdd.html).

Aussi, je me suis dit que 95% d'exploitants ne peuvent pas être contre la réintroduction juste pour qu'on sache qu'ils existent mais qu'il y a probablement une logique dans leurs réclamations.

L'association pour la Sauvegarde du Patrimoine d'Ariège-Pyrénées (ASPAP) a été créée le 12 Janvier 2006, en rapport au plan de réintroduction de l'ours brun 2006-2009. Après sa création, l'association est rapidement devenue le porte-parole des éleveurs contre la réintroduction (au moins 90% des éleveurs en Ariège). Parce que 2006 a été l'année du lancement du plan ours, l'ASPAP a connu un ordre du jour très chargé : 10 Mars, manifestation publique à Toulouse, 1er Avril, premier lâcher et manifestation devant la mairie d'Arbas, 28 Avril, 2e lâcher, 4 Mai, suspension temporaire (48 h) des lâchers, 6 Mai, manifestation publique à Luchon, 13 Mai, manifestation publique à Bagnères de Bigorre et à Arbas. Depuis l'interruption des lâchers, l'association est en train d'évaluer le plan et ses dommages au pastoralisme, d'informer ses adhérents (près de 2.000 membres) au sujet de comment se comporter dans des situations très diverses.

2.2 Collecte des données

Une trame d'enquête sur la gestion technico-économique et socio-culturelle de l'exploitation a été conçue à la suite bibliographique. Bien que n'adaptée en partie aux éleveurs pro-ours, elle a inspiré les entretiens avec ces derniers. Voulant éviter les réponses du genre : Je n'ai pas encore été prédaté et ne sais quels dommages l'ours crée au système ; Je n'ai pas encore réfléchi sur les alternatives au contraintes liées à l'ours ; Je ne saurai mettre en application les mesures de protection alors que mon troupeau ne souffre pas de prédation..., j'ai réalisé un premier entretien avec les responsables de l'ASPAP pour cibler les communes à fort enjeu lié à la prédation ainsi que les éleveurs qui ont subi les dégâts d'ours sur leurs exploitations et ceux avoisinants. Ceci m'a permis de choisir mes interlocuteurs compte tenu des aspects matériels et temporels de ce stage.

2.2.1 Une approche bibliographique pour définir l'état des travaux sur le sujet

La documentation sur le système d'élevage pastoral est aussi « difficile » à trouver que le système est complexe à gérer. Il est fréquemment rencontré des données sur le nomadisme et la transhumance en milieux tropicaux, et dans d'autres pays du Sud où la logique de fonctionnement de l'exploitation n'est pas tout à fait la même que dans les pays du Nord. La plupart du temps, le système tel qu'il est présenté fait allusion à la technique d'il y a 500 à 600 ans. Concernant le pastoralisme dans les Pyrénées, les archives montrent que, dans les années 1400 à 1500, le rassemblement des animaux se faisait seulement à la maison le soir. Elles montrent, cependant quoi éviter dans ce système : les bergers envahi avaient légalement le droit de saisir le bétail jusqu'à paiement d'une pénalité. Ce système a demeuré en « escabot » entre l'an 1500 et 1900, pas de véritables troupeaux, moins de 150 animaux à la charge d'un berger. C'est une forme de pâturage, à

la fois fragmenté mais couvrant l'ensemble du territoire, très ancienne (plus d'un demi-millénaire), qui a véritablement "créé" l'éco-agrosystème que sont les montagnes Pyrénéennes et la richesse de leur végétation jusqu'à haute altitude. Introduire des changements, par d'autres moyens de garder les bêtes détruirait la façon dont cet environnement a été établi et maintenu (...) voire détruirait cet environnement (B. Besche-Commenge, 2008). Toutefois, s'il s'avérait nécessaire de changer les pratiques pour favoriser la cohabitation pastorale, il faudrait au préalable former et accompagner les exploitants sur cette nouvelle façon sous peine de transformer cohabitation pastorale en exclusion pastorale.

2.2.2 Enquêtes de terrain

L'Ariège étant divisé en trois arrondissements et, seuls deux véritablement concernés par les problématiques ours (Foix et Saint-Girons), j 'ai sélectionné quelques exploitants de ces arrondissements en plus de quelques éleveurs des communes de Melles (commune de la Haute Garonne ayant mis en place les mesures d'accompagnement suite à la prédation excessive) et d'Arbas (commune de la Haute Garonne théâtre du premier lâcher). Du fait de la limitation du temps et des moyens, les entretiens semi conversationnels se sont déroulés par téléphone, au domicile de l'exploitant ou sur l'exploitation. Lors de ces entretiens, le fait de ne pas prendre parti a dû limiter les réponses des exploitants au point où j 'ai dû prendre le même parti que celui enquêté à chaque fois pour que celui-ci soit plus confiant. Ceci a ses avantages et ses inconvénients. L'avantage étant que l'exploitant se « lâche » complètement dans les réponses qui confortent sa position. L'inconvénient est qu'une question ou remarque à l'opposé de leurs champs d'intérêts génère le plus souvent une réponse très courte, avec des propos du genre : vous-même vous savez que... et là vous êtes impuissant de dire je n'en sais rien (pour rester cohérent).

Les approches compréhensives des pratiques développées dans le domaine de la socioanthropologie montrent que le sens de ces pratiques est ambigu et non donné a priori. La collecte d'informations directement ou par l'intermédiaire d'enquêtes sur la réalisation physique d'une pratique (ici l'élevage) ne conduit pas à identifier la signification des choses. Mais il est possible d'obtenir le sens, à travers l'analyse de ce que les pratiquants disent. Cette signification peut être déduite de la description des agriculteurs, car en eux, « ils ne disent pas la vérité des choses, mais la vérité de leur relation aux choses » (Darré, 1999). Ainsi, afin de caractériser le sens de la diversité et la transformation des pratiques paysannes, il est important de recenser les concepts dans leurs actions/mouvements et de ne pas isoler les concepts d'un agriculteur dans sa position sociale (...). Afin d'avoir des points de vue, des alternatives aux contraintes et des perspectives de production diversifiés, j'ai interrogé les éleveurs de plateau, de montagne, de haute montagne, de coteaux, ceux pour et ceux contre la cohabitation pastorale avec la préférence à l'élevage ovin qui est plus sensible

St Girons

Soueix

Note: Pas d'Estive dans les villes soulignées

= Le Pays Couserans

= Le Pays des Pyrénées Cathares

= Le Pays des Portes d'Ariège-Pyrénées = Le Pays de Foix Haute Ariège

+ = Sor

++ = Barjac

= Larcat = Verdun

= Ascou

= Les Cabannes

Figure 3 Dispersion géographique des éleveurs enquêtés

(adapté de la carte des villages de l'Ariège. Préfecture de l'Ariège)

à la prédation. Même si dans la réalité, plus de 90% des éleveurs sont opposés à la cohabitation, j'ai interrogé 7 éleveurs contre la cohabitation, 6 éleveurs en faveur, 2 bergers et 2 gestionnaires de GP.

2.2.3 Analyse des structures et des systèmes d'élevage

J'ai pensé que le statut juridique de l'exploitation aurait une certaine influence sur les systèmes de

production et par conséquent amoindrir la vulnérabilité des troupeaux. J'ai ensuite recueilli des informations sur l'agriculture, l'élevage, la reproduction et le système fourrager. Afin d'avoir un large spectre de situations, j'ai enquêté avec un échantillon dispersé les éleveurs des deux arrondissements concernés directement par la prédation (voir figure 3 ci-contre).

Chapitre 3 : Résultats et discussion

3.1 Résultats

3.1.1 Caractéristiques générales de l'élevage pastoral en Ariège

En Ariège, l'élevage pastoral est la combinaison de pratiques individuelles et collectives, les pratiques collectives étant le centre de prise de décision. Ceci est en accord avec les travaux de Darré (1999) qui stipulent que, dans le domaine de la socio-anthropologie, les pratiques sont considérées comme des construits sociaux. Ainsi, un groupe professionnel local27 (GPL), met au point un ensemble de références orientant comment chacun des membres de ce groupe voit la réalité et considère ses actions. Ici, en raison des "handicaps naturels28", les éleveurs ont des troupeaux de petite taille et ont diversifié leurs exploitations. Ils pratiquent la transhumance29, la monte et le pâturage libres, investissent moins, avec pour produit le "Broutard" et les agneaux "légers et inachevés". En raison de l'hiver et sa couche de neige, ils doivent constituer des réserves fourragères pour au moins trois mois de l'année pour l'alimentation à l'auge. Contrairement à la tradition ancestrale selon laquelle la gestion individuelle était la règle, et 100 bêtes par troupeau d'un même éleveur une exception, aujourd'hui, l'exception de l'effectif a été multipliée par 10 et la gestion collective est devenue la règle. Ceci est dû au vieillissement de la population, à l'exode rural et donc la baisse de la main d'oeuvre, à la stabilisation des prix des produits depuis une trentaine d'année mais l'augmentation des intrants, à la nécessité de se réunir pour être à la fois une force de revendication et de propositions. Néanmoins, les bêtes sont toujours en liberté soit dans les parcs près de l'exploitation ou dans des quartiers de la zone intermédiaire ou de l'estive. L'activité d'élevage est sous le contrôle du syndicat d'éleveurs, du GP, des AFP, de la fédération pastorale, du conseil général et de la commune/mairie. Même si, pour des agronomes et zootechniciens, l'ensemble des références du pastoralisme sont non standard, le résultat de ce système de production est satisfaisant compte tenu du ratio input/output. Quoi qu'il en soit, si le système n'était pas durable, il n'aurait pas intéressé autant de personnes et de civilisation dans tout ce "monde économique". En Ariège, la manière dont les agriculteurs organisent leur travail agricole sur une

27 Groupe d'individus engagés dans la même activité, dans un milieu proche.

28 Ceci est une conception actuelle par ce que dans le passé, quand l'agriculture était encore traditionnelle, les terres de plaines et de plateau étaient moins fertiles que celles de montagne. Grâce à la mécanisation et les fertilisants, la montagne est aujourd'hui considérée comme handicapée (B. Besche-Commenge, 2008. communication personnelle).

29 C'est une contrainte par définition, toutefois nous sommes totalement libres et avons le libre arbitre pour gérer cette contrainte et au demeurant la gérons même parfaitement. Mais la présence de l'ours est une contrainte permanente et imprévisible (Madeleine Maylin, 2006. manifestation publique à Arbas)

 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 

Vente de Broutards

 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 

Vente agn. Légers

 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 

Janvier

Février

Mars

Avril Mai

Juin

Jullet

Août Septembre

Octobre

Novembre

Décembre

 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 

Agnelage

 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 

Agnelage de

rattrap.

 

Phases Physiologiques

LACTATION + ENTRETIEN ENTRETIEN + GESTATION + LACTATION

ENTRETIEN + LACTATION

 
 
 
 
 

Périodes de

 
 
 
 
 
 
 
 
 
 

Lutte

lutte et sevrage

 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 

Lutte

 
 
 

Sevrage

 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 

Lieux

Bergerie + Parcours

 
 

Parccours

 
 
 
 
 
 

Zone interm.

 
 
 
 
 

Zone intermediaire

 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 

Ration

 
 
 
 
 

PRES DE FAUCHE OU

 
 
 
 

PRES DE FAUCHE OU

 
 

Essentielle FOIN A VOLONTE OU PARCOURS ESTIVE

 
 
 
 
 
 
 

PARCOURS

 
 
 
 

PARCOURS

 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 

Figure 4 Gestion du troupeau au cours d'une campagne de production

base quotidienne prend en compte les caractéristiques du climat. Les connaissances locales sur le climat et ses variations dans le temps et l'espace, et les techniques de prévision sont des éléments essentiels pour la survie de ces éleveurs. La valeur « liberté » du troupeau se réfère à une valeur économique, technique et une logique sanitaire mesurées. En bref, dans cet élevage « libre » les fondamentaux de la zoohygiène semblent être respectés et la rentabilité assurée. Faire autrement nécessite une étude approfondie et comparative du système actuel d'avec celui préconisé à court, moyen et long terme.

En résumé, l'élevage pastoral est conduit par des chefs d'exploitation âgés de 45 à 60 ans, beaucoup d'entre eux ignorent s'il y aura une succession par leur progéniture même s'ils le souhaitent. Ils élèvent des races locales (Tarasconnais et Castillonnais pour les ovins, Gascon pour les bovins et les porcs, Mérens pour les chevaux). Ils gardent peu d'animaux par troupeau (150 à 500 ovins, 50 à 150 bovins) parce que, même si l'herbe est abondante en estive, ils tiennent compte de la capacité de charge des surfaces de leur exploitation et leur niveau d'autonomie fourragère. Ils pratiquent un système de gestion collective sur les estives et/ou sur les zones intermédiaires qui dictent les pratiques sur « l'exploitation » individuelle. Ils sont dans une situation de précarité économique (leur revenu constitué de 50 à 80% des subventions) et de déprise humaine (moins de 15% certitude pour la succession) et ont des exploitations diversifiées. L'activité d'élevage, influencée par les règles30 du GP, alterne entre le siège de l'exploitation, la zone intermédiaire et l'estive avec une lutte et un pâturage libres. Pour l'agnelage d'automne, les agneaux sont sevrés au bout de deux mois d'allaitement et vendus comme des "agneaux légers" ou engraissés pour être des "agneaux finis" par les agriculteurs de coteaux. Pour l'agnelage de printemps, les agneaux se sèvrent naturellement et sont vendus comme "Broutard" à la descente de l'estive (voir le schéma 3 ci-contre). Les agriculteurs considèrent le fumier, le travail animal, les agneaux, les veaux, la laine, le paysage et la biodiversité31 comme produits de leur activité. Dans ce système, les performances de reproduction observées sont : 0,95-1 agneau sevré par brebis par an et 1 veau par vache et par an ; 100-120% prolificité ; âge au premier agnelage 15-18 mois et 3 ans pour le premier vêlage; l'âge à la réforme 6 ans pour les brebis et plus de 13 ans pour les vaches. Ces performances sont bonnes, compte tenu du rapport investissement/produits d'autres systèmes de production. En bref, il peut être considéré comme avantage de ce système : la qualité des produits, le rendement (même si la fécondité et la prolificité sont faibles), l'installation facile de l'exploitation et la qualité environnementale des

30 Quand on ne monte pas de mâle sur une estive, il y a généralement deux périodes de lutte ciblées printemps et automne ; quand le mâle monte la lutte dure de Mai à Octobre voire décembre pour certains.

31 A noter qu'ici la biodiversité est vue sous l'angle de l'intérêt de celui qui l'évoque

pratiques. En revanche, les faiblesses du système sont : la fragilité et l'instabilité (pas de flexibilité, pas d'alternatives ou moins), beaucoup de temps de travail.

3.1.2 Typologies du système d'élevage

Avant les enquêtes, j'ai pensé à la situation géographique et le statut de prédation comme principaux

facteurs de diversification. Faisant les enquêtes je me suis rendu compte que l'origine de l'éleveur, le statut juridique de l'exploitation, le nombre d'activités et de produits et la présence d'AFP étaient d'autres potentiels facteurs de diversification. Enfin, les enquêtes ont révélé que, où que la ferme soit située, quel que soit son statut juridique, quelle que soit l'origine de l'éleveur (étranger, néoruraux ou non), le milieu et le système de gestion collective32 faisaient évoluer rapidement les pensées et agissements. En définitive, la présence d'AFP et le nombre d'activités et produits de l'exploitation ont été les seuls facteurs de diversification. Le statut de prédation (avoir subi des prédations ou non) régule les comportements en rapport à la cohabitation pastorale.

3.1.2.1 Systèmes de production en fonction de la mobilité du troupeau

L'itinéraire du troupeau au cours d'une campagne a donné lieu à un certain nombre de sous-

systèmes. Nous avons noté que, pour les agriculteurs sans zone intermédiaire ni AFP à proximité de leur exploitation, le troupeau se déplace comme suit : Exploitation - estive - exploitation. Cela renforce leur opposition à la cohabitation et réduit leurs alternatives de production et perspectives. En plus de cela, l'absence de diversification est renforcée par l'état civil de l'exploitant (les célibataires ayant les exploitations les moins diversifiées), les quotas et le nombre d'agriculteurs dans le village. Pour les éleveurs bénéficiant d'une zone intermédiaire ou ayant une AFP, le mouvement du troupeau est : Exploitation - ZI - estive - ZI - exploitation, avec la ZI fournissant jusqu'à 1/4 du total de temps de pâturage de l'année. Cette ZI donne relativement droit à un certain niveau d'alternatives et de perspectives, même si les terres de montagne sont la plupart du temps non adaptées pour la mécanisation. En résumé, en fonction de la mobilité, on distingue les exploitations sans ZI ni AFP, celles avec AFP et sans ZI, celles sans AFP et avec ZI et enfin celles avec AFP et ZI.

3.1.2.2 Systèmes de production en fonction de la localisation géographique de l'exploitation

En raison des différentes pentes en plateau, coteaux et montagne, il y a relativement plus de

parcelles mécanisées ou mécanisables sur les coteaux et plateaux que dans les exploitations de montagne. Cela donne lieu à une diversification de produits ("agneaux légers", "agneaux finis", veaux et boeuf, foie gras, saucisse de porc, jambon) et de productions (ovins, bovins, volaille, porcins) pour l'exploitation. Donc en fonction de la topographie, les exploitations de plateau, les

32 Ceci est considéré ici comme la seule bonne façon de gérer l'exploitation et garder les bêtes et la plus durale

exploitations de coteaux et les exploitations de montagne (avec haute montagne, moyenne montagne et montagne comme sous variations) se distinguent par leurs différences d'alternatives.

3.1.2.3 Systèmes de production en fonction de la diversification

Pour Perrot et Landais, (1993), la diversification des exploitations agricoles était autrefois vue comme un obstacle au développement de l'agriculture selon le modèle productiviste de l'après guerre. Elle est aujourd'hui considérée comme une richesse garante d'une capacité d'adaptation et parfois même un réel objectif à atteindre. Conformément aux conclusions faites par Eychenne (2003a) à travers l'analyse de l'évolution de l'agriculture des trente dernières années (AGRESTE, RA, 2000) pour qui, en grande difficulté, l'agriculture ne peut survivre que grâce aux subventions et le développement de la multi-activité, près de 99% des exploitations agricoles de la zone de montagne de l'Ariège sont diversifiées. Cela est dû à l'extrême précarité économique et l'équilibre fragile de ces exploitations33. En plus d'autres contraintes biophysiques, la contrainte administrative est une contrainte qui est souvent négligée (Entretien 1, 3, Mai, 2008). En raison des quotas, qui donnent droit à la PHAE, certaines exploitations ne peuvent pas garder plusieurs espèces en particulier les exploitations ovines34. En règle générale, nous avons remarqué que les exploitations ovines se diversifient avec la production bovine, porcine et équine ; font des gîtes d'étapes, des activités forestières, d'agro-tourisme et ont des activités salariales.

3.1.3 Qu'est ce que l'estive en Ariège ?

La réponse à cette question n'est ni une phrase, ni un court métrage, ni un moyen métrage mais, un long métrage qui met en scène, de nombreux acteurs parmi lesquels les animaux (bétail et chiens). Dans l'ensemble de la chaîne des Pyrénées, l'estive est une culture, une tradition/coutume (foires à bétail, fête de la transhumance), le joyau ou la représentation d'une identité professionnelle. L'estive est également une période de l'année (de Juin à Septembre) au cours de laquelle les bergers sont en activité, les entreprises d'héliportage et de transport par bâts sont prestataires de services aux exploitations agricoles. Elle est aussi un milieu géographique : de la montagne (au moins 1200m d'altitude) à la haute montagne (jusqu'à 3200m d'altitude) avec des conditions environnementales spéciales (flore et faune). L'estive est plus encore, une phase dans le cycle de production qui permet le vide sanitaire de l'exploitation (le seul possible dans l'année), constitue une phase d'alimentation particulière (la moins chère, la plus riche et spéciale), permet la constitution des réserves alimentaires pour l'année, l'entretien des clôture et diverses maintenances et réparations. Pour la plupart des éleveurs, l'estive demeure un maillon essentiel de la chaîne fourragère et s'inscrit dans le

33 Ici, nous sommes bien sûre sur des équilibres, mais des équilibres très fragiles qui peuvent être rompus très rapidement. Suite à un problème de santé, une épidémie, tout peut basculer très vite voire chavirer (Entretien 1. Mai 2008)

34 Avec un quota ovin de 350 et plus, il est difficile d'y associer les bovins (Entretien 3. Mai 2008)

prolongement de l'exploitation. Etant donné qu'il s'agit de la terre de toute façon, c'est une propriété domaniale, communale ou privée où les éleveurs ont le droit de faire paître gratuitement leur bétail ou avec des frais d'admissions variables. Pour certains agriculteurs, c'est d'abord et avant tout pour les vacances35 et le « repos ou la détente » de leurs bêtes. Pour d'autres, l'estive n'est ni seulement l'extension de leur ferme, ni un lieu de pâturage temporaire mais, une portion ou parcelle de leur exploitation qui respecte le modèle de pâturage tournant du système Ariégeois. En résumé, l'estive est tout ce qui vient d'être élucidé en même temps, c'est un tout au milieu duquel il y a une certaine richesse (et je dirai même une richesse tout court), le mouvement, la vie, mais surtout la perte de vie pour certains animaux, des troubles de fonctionnement, de la frustration, l'anxiété et la peur36. Les éleveurs semblent ainsi définir l'estive de façon unanime dans leurs langages, mais quand on examine plus en profondeur les considérations, on voit des contradictions. Pour tous, l'estive est obligatoire parce que c'est économique, il permet « d'atteindre » l'autonomie alimentaire et de faire un produit : le "Broutard". Le nombre d'utilisateurs est actuellement en baisse parce que les éleveurs ne sont pas nombreux et certains sont à la retraite. Certaines contradictions comme : Nous pouvons arrêter l'estivage à cause de l'ours et de la prédation ; Produire le "Broutard" nécessite que l'animal soit "tranquille" ; Avec l'ours, nous perdons une partie de la montagne et les animaux descendent en mauvais état corporel ; En montagne les animaux ne font qu'à leur tête... sont quelques-unes des points de divergences entre pro-ours et opposants à la cohabitation.

3.1.4 Comment l'ours intervient-il dans ce milieu rural et professionnel ?

La psychose ours en milieu rural n'est pas seulement présente chez ceux dont les animaux sont attaqués par cet animal sauvage. Parce que l'activité d'élevage ou le pastoralisme précisément crée un environnement ouvert et de merveilleux paysages, maintient la vie de nombreuses familles, beaucoup de groupes professionnels et non professionnels, sont engagés dans cette situation soit par l'effet des médias, soit par des expériences vécues ou par les conflits d'intérêt.

En examinant les dires de ceux concernés par le problème ours il semble que pour soutenir leur position par rapport à l'ours, les éleveurs usent de plus d'arguments non techniques (la coutume, le patrimoine, la frustration...) que d'arguments techniques (la mortalité, la reproduction, le vide sanitaire...). Dans chaque situation, les exploitants réclament avec force la biodiversité, l'état

35 Nous envoyons les bêtes là haut pour qu'elles prennent leurs vacances et non pour les mettre en prison. Par ce que quand elles ne sont pas gênées ou stressées, c'est alors qu'elles profitent, elles s'engraissent par ce que là haut, il y a une flore spéciale et seules les bêtes savent où la trouver (Entretien 1 et 6. Mai 2008).

36 L'estive est aussi l'ours, cette chose dont la présence nous a été imposée par ceux qui pensent que l'élevage en montagne marche comme du papier à music. A l'approche de l'estive, on n'arrête plus de penser à comment sera le résultat à la descente (Entretien 1 et 3. Mai 2008).

Tableau 1. Argumentaire entre Pro Ours et opposants

Possessione l

Emotionel

Pro ours

Chacun doit trouver une place

Nous n'avons aucun stress car nos bêtes sont protégées; nous sommes préent et très proches d'eux. Nous avons une très forte relation aux bêtes.

Opposants à l'ours

l'estive est notre patrimoine, notre territoire; l'ours d'oit être cantonné.

la présence de l'ours induit beaucoup de stress. bientôt nous n'allons plus monter et il n'y aura plus d'estivage si ça continue ainsi. Nous avons une forte relation aux bêtes et ne tolérons pas les voir étranglées par l'ours.

Frustration

Econom ique

Aucune frustration car le savoir-faire du berger est valorisé. Nous devons nous interroger sur certaines pratiques.

Les subventions sont onnes. C'est vrai que nous vivons une certaine précarité économique mais elle n'est pas justifiée par la prédation qui existait déjà et aujourd'hui avec les chiens errants.

Nous avons été mis devant les faits accomplis; notre savoir-faire est renié; ils pensent qu'ils doivent nous donner des leçons sur comment faire notre métier.

les mesures d'accompagnement sont onéreuses à mettre en place. Nous ne supportons pas les charges supplémentaire non profitables dans notre contexte de précarité économique; nous vivotons déjà.

Social

L'ours n'est pas partout; il y a toujours moyens de faire des randonnées. Avec l'ours, les bergers sont biens traités et payés.

Nous ne sommes plus en sécurité à la montagne. Avec cette situation, nous avons perdu l'espoir de succession. Avec l'ours, les conditions de travail du berger sont très dures.

Environnemental

Sanitaire

L'ours améliore la biodiversité

Les bêtes sont bien soignées, moins de problèmes sanitaires et de mortalités.

L'ours détruit la biodiversité.

Avec la contention et les parcs de nuit les animaux développent le pietrin et la mortalité s'accroit.

Reproduction

C'est vrai que quand l'ours intervient, on peut se soucier de la reproduction suite aux avortements mais ce n'est pas le cas.

ous avons beaucoup d'avortement embryonnaires donc perte de proctions. Certaines bêtes sont entretenues pour rien.

Alimentation

Mesures d'Accompagnement

Puisque les bêtes sont bien traitées, elles sont en bon état corporel à la descente de l'estive.

Les parcs de contention et de nuit ne limitent pas la prédation sans le Berger et le Patou mais permettent une meilleure gestion du pâturage. Clôtures électriques plus Patou limittent et même éliminent la prédation. Le Berger élimine la prédation quand il est présent et voir de loin. Ramasser les animaux pour la compensation ne pose aucun problème.

L'ours perturbe le calendrier de pâture du berger, le comportement des bêtes et l'exploitation du pâturage.

Les parcs de contention et de nuit exposent les bêtes sans limiter la prédation. Ils empêchent l'exploitation raisonnée des parcours par les animaux. Les parcs électriques, le chien Patou sont d'une influence sinon nulle mais du moins moindre sur la prédation. Le ramassage des bêtes pour la compensation le travail du berger et de l'éleveur et stresse l'animal.

corporel des animaux, leur santé, la perte et leur avenir (voir tableau 1 ci-contre). Quelle que soit la position, la raison est plus socio-économique que environnementale. Même si la gestion d'un territoire ne peut être satisfaite par de simples mécanismes de régulation (Beuret, 1998), le conflit actuel pour et avec l'ours est due aux autorités qui ont oublié que la prise de décision suit deux rationalités : une rationalité substantive (intelligence motivée par l'intérêt personnel pour l'optimisation) et la rationalité procédurale (intelligence systémique). En effet, l'examen de la définition des fonctions et des compétences, la délimitation du système et les modes de considération, est essentiel pour éviter les incompréhensions. Dans ce travail, il apparaît que pour les éleveurs, produire est leur fonction fondamentale et non gardien des terres. Parallèlement, bien garder les bêtes est leur impératif moral et non travailler la terre. De même, les droits d'utilisation (pas toujours gratuit) et les droits de propriété fournissent une plus grande légitimité que celle du prédateur. Enfin, un bon travail avec une certaine qualité de vie et de produits, en plus du libre arbitre et de l'indépendance37, sont les modes de considérations supérieures. Par conséquent, la réconciliation suppose d'avoir un accord sur un principe équivalent permettant de comparer les points de vue de chacun, qui devrait servir comme principe supérieur commun. Dans le cas présent, les contrats territoriaux entre les agriculteurs et la collectivité mettent en scène les actions des acteurs utilisant différents principes de légitimité sur leur avenir professionnel et la biodiversité. Pour ces deux produits non commercialisables, la biodiversité produit des interactions entre "offreurs" et "demandeurs" et entre "offreurs" d'un côté et "demandeurs" de l'autre.

Dans le but d'évaluer les évolutions du projet de réintroduction de l'ours ou du pastoralisme, il est nécessaire de répondre aux questions suivantes : Comment les éleveurs intègrent ou ont intégré la présence de l'ours dans leur système d'élevage ? Quelles sont les évolutions depuis le lancement du plan ours ? Les mesures d'accompagnement induisent-elles des évolutions de pratiques ou rémunèrent-elles ce que les éleveurs avaient l'habitude de faire ? Connaissant les opposants dans ce domaine du patrimoine et du territoire, nous pouvons également rechercher une réponse aux questions suivantes : Quels sont les principes supérieurs communs ici ? Un terrain d'entente peut-il être trouvé sur la base du choix consensuel de l'un de ces principes ou par le biais d'un arbitrage ? Considérant que l'avenir professionnel, la culture d'estivage, l'autonomie alimentaire, la tranquillité des bêtes et leur état corporel, la frustration et la précarité économique sont des préoccupations, que la biodiversité fait allusion ici à la seule notion de l'espèce pour les acteurs, je propose :

37 L'Indépendance : une autonomie réclamée vis-à-vis de l'environnement local, naturel et humain, mais une subordination acceptée vis-à-vis des partenaires professionnels ; valeur dont la modernisation a restreint le pouvoir de décision des agriculteurs et qui ne s'applique aux même choses (Beuret, 1998).

> Un rétablissement impératif de la confiance des éleveurs qui conduira à des contrats et règlementations ;

> Une Mise sur pied du processus d'information pour informer les acteurs de ce qu'est la biodiversité dans le sens le plus large du mot et pourquoi et comment la préserver, les services rendus par elle en retour ;

> Une définition des conventions :

V' Convention professionnelle ou convention de qualification pour fixer les normes sociotechniques

V' Convention d'effort ou de sacrifice pour fixer le point de référence

V' Convention d'aide pour encourager résultats

V' Convention de Produits pour évaluer les résultats

> Une conception de la méthode d'évaluation afin de maximiser la cohérence interne et externe des conventions.

Si nous pouvons schématiser les scénarios qui conduisent à la prise de décision de ceux qui sont engagés dans cette polémique ours, il est plus difficile de faire la différence entre la vraie justification et le conflit d'intérêts. Néanmoins, l'ours a, à la fois divisé et réuni les pyrénéens sur tout le massif. En règle générale, on estime que le pastoralisme concerne ou compose avec, d'un côté les éleveurs et de l'autre les bergers. Cette étude a révélé que, entre éleveurs et bergers il y a un groupe spécial38 connu sous le nom d'éleveurs-bergers39. A l'issu des enquêtes réalisées pour ce travail, les éleveurs-bergers ont été les plus nombreux à réclamer la cohabitation pastorale. Cela peut être dû au faible effectif de leurs troupeaux ou de leur souvenir douloureux40 en tant que bergers. Ici le point de vue du berger a été très proche41 de celui de son employeur (GP). Cependant, cela ne signifie pas qu'un éleveur, un éleveur-berger ou un berger travaillerons toujours avec des

38 A cause de leur point de vue sur la cohabitation pastorale et les raisons de leurs choix (ils sont beaucoup plus pro- ours). Toutefois, en examinant leur effectif et les conditions qu'ils suggèrent être nécessaires pour l'efficacité de la cohabitation pastorale, on rapproche un peu leur propos à ceux d'éleveurs Africains concernant le conflit gros et petits éleveurs autour du droit d'usage des puits pastoraux. En effet comment justifier que l'on reconnaisse que cohabitation efficace signifie petits troupeaux, beaucoup de bergers, gros investissements (Patou, parc électrique et parcs de nuit), que le bétail se vend au prix d'il y a trente ans, que le prix des intrants par contre ait été multiplié par 5 si ce n'est plus, que la valeur ajoutée du produit labellisé ours ne permette pas de sortir de la précarité économique... et que l'on évoque qu'une cohabitation efficace est possible dans les conditions de mise en route du plan ours ?

39 Eleveur ayant généralement un troupeau de petite taille et qui garde les bêtes de tous ou partie des éleveurs de son GP pendant l'estive sous forme de travail salarial.

40 Travail sans contrat, sans règlementation salariale, conditions de travail rudes...

41 Avec 5% de GP pro-ours, beaucoup de bergers se réclament plutôt protecteurs de bêtes et donc opposants à l'ours de peur de manquer du travail les prochaines saisons s'ils arrêtaient de travailler pour le GP pro.

structures du même point de vue même s'il aimerait que ce soit ainsi. Parce que, dans l'ensemble du massif des Pyrénées, plus de 90% des agriculteurs sont des opposants et l'ours n'est pas présent partout, les scénarios des relations entre éleveurs, éleveurs-bergers, bergers et GP en fonction du point de vue de chacun sont représentés par le schéma 4 ci-dessous.

= Travail sous condition qu'aucun GP opposant ne se situe à proximité (presque impossible)

= Travail sous condition qu'aucun GP opposant ne se situe à proximité pas de présence d'ours dans l'estive

3

4

= Travail sous condition qu'aucun GP opposant ne se situe à proximité (presque impossible)

2

1

GP pro

= Travail sans aucune condition ni hésitation

= Travail sous condition qu'aucun GP opposant ne se situe à proximité

2

1

3

Eleveurs pro

Eleveurs opposants Eleveurs-Bergers pro Eleveurs-Bergers opposants

Bergers pro

Bergers opposants

4

4

GP
opposant

Figure 5 Scénarios des relations entre Eleveurs, Eleveurs-Bergers, Bergers et GPs

Avec les résultats de ce travail, le problème ours, est sans surprise assez similaire à celui du loup (Canis lupus) dans les Alpes comme l'ont mentionné Benhammou et Salvador (2003). Selon eux, les positions au sein de chaque groupe ne sont pas monolithiques. Il n'y a pas d'un côté un monde agricole contre la cohabitation avec les prédateurs et de l'autre les écologistes idéalisant prenant l'ours comme le symbole suprême de biodiversité. Même si on peut constater que le fait que tous les éleveurs ne s'opposent pas frontalement à l'ours (ils veulent juste qu'il ne leur cause pas de dégâts, et ne veulent pas vivre dans la crainte qu'il apparaisse à tout moment), donne espoir à la cohabitation, il ne faut pas se voiler les yeux; la présence de l'ours est totalement négative pour l'élevage traditionnel. Il mettra fin à cet élevage extensif des races autochtones tel que pratiqué actuellement puisqu'il oblige à enfermer les bêtes dans des parcs, et fait perdre tout espoir à la jeunesse. Ceci peut toutefois être remédié puisqu'en Afrique le pastoralisme plus mobile et divagant cohabite avec lions, panthères et autres fauves bien plus costauds! Mais sans diaboliser ni sacraliser le prédateur, il faut situer chaque chose dans sont contexte social, culturel, technique, économique, politique, anthropologique et ethnologique.

Au sein de la profession agricole, certains agriculteurs et professionnels dont l'activité est en lien avec l'agriculture luttent pour améliorer le statut de l'éleveur établissant un partenariat avec les acteurs de l'environnement motivés par la cohabitation. Rejoignant l'idée de Benhammou et Salvador (op. cit.) selon laquelle, les éleveurs devraient être conscient que le problème du prédateur pourrait s'amplifier s'ils s'enferment sur des discours radicaux et techniquement sans valeur pour la

situation présente, je pense que les professionnels agricoles ne devraient plus trop attendre pour définir « leurs » conditions de cohabitation. Dans ce sens, la recherche de solutions techniques sans conforter l'ours dans son fauteuil de prédateur protégé, ni sans oublier qu'une espèce parapluie améliore les services d'un écosystème, devrait être mise en place par les organismes porte paroles de la profession. En revanche il est clair que les « solutions techniques » proposées par les institutions pour la cohabitation n'ont jamais été testées auparavant et n'incluent pas une assistance à la fois face à la frustration sociale, qu'aux situations inattendues. Le ministère de l'agriculture est presque absent et même hésitent et réticent à fournir des efforts aux questions délicates. La communication des autorités pour ce sujet ours dans les Pyrénées montre plus une stratégie de communication inefficace que l'opacité volontaire.

3.1.5 Quels sont les dommages de l'ours sur le pastoralisme ?

Les dommages liés à l'ours sont à la fois d'ordre social (psychologique, peur, haine et intolérance), économique (perte d'animaux, baisse de fertilité, plus de traitements...) technique (perte d'espace, modification des circuits de pâturage, mauvaise constitution des réserves ...). La situation sociale du pastoralisme en Ariège aujourd'hui est la peur des jeunes pour l'installation et par conséquent la déprise humaine. Les agriculteurs sont menacés par téléphone ou des lettres anonymes, certains se sont installés ailleurs. Concernant l'économie, le profit d'une campagne étant lié à un bon estivage, une mauvaise saison d'été équivaut à une perte d'argent. Cela est compréhensible parce que moins de ventes, moins de rentrées. En outre, plus de prédation, plus de stress et moins d'engraissement42 et donc des performances de reproduction médiocres ou faibles. Aussi, plus de prédation, implique plus de présence d'éleveurs en montagne et moins de travail sur l'exploitation (entretien des clôtures, fauche), plus de « ramassage » de bêtes et plus de problèmes de santé à la descente de l'estive. Le plus gros problème de la prédation est technique. Ceci n'est pas à prendre pour argent comptant puisque les éleveurs laitiers rassemblent fréquemment tout leur effectif sans pour autant crier à la parasitologie ni à la perturbation de leurs circuits de pâturage. C'est jusque que l'application des mesures du plan ours n'est pas généralisable et qu'il faut encore un peu de temps pour que le système pastoral tel que pratiqué actuellement puisse s'adapter à elles. Lorsque beaucoup de bêtes meurent, ceci est nuisible pour l'auto renouvellement du troupeau, car pour les remplacer, l'éleveur doit acheter les agnelles qui ne peuvent pas produire immédiatement et qui lui coûteront pour leur entretien; certaines mourraient même avant l'agnelage. Ceci est coûteux en terme de gestion parce que les nouveaux arrivants vont la plupart du temps se constituer en un sous- troupeau jusqu'à ce qu'ils aient confiance en leur nouvelle famille. C'est à la fin un problème sur le comportement animal (mouvement, modes de pâturage, temps de repos). Malgré les déclarations

42 Parfois l'agneau est tellement maigre qu'il est conservé pour la prochaine estive

des moutonniers concernant les dégâts et difficultés de leur profession liés à l'ours on peut se demander pourquoi ils se maintiennent dans cette production ciblée. Mais Lasseur et Garde (2007) mentionnent dans leurs travaux que ce maintien résulte d'un défaut d'alternatives de reconversion.

3.1.6 Comment l'écologie est-elle perçue dans cette polémique ours ?

Il apparaît ici que ni le ministère de l'écologie à travers la Direction Régionale de l'Environnement (DIREN), ni les scientifiques impliqués dans ce projet n'évoquent l'écologie dans son sens large, du moins en rapport à ce qui est mentionné dans les documents d'étude du projet de ce plan. Cela peut être la raison pour laquelle les agriculteurs ne parlent que d'espèces comme gain ou perte de biodiversité liée au plan ours. Pourtant, il semble que le plan de réintroduction de l'ours ait été initié pour des préoccupations environnementales. Cependant, les indicateurs environnementaux parmi lesquels les indicateurs écologiques utilisés pour communiquer les informations sur les écosystèmes et l'impact des activités humaines à des groupes tels que le public ou les décideurs politiques ne figurent pas dans les documents du projet. Il est vrai que cela est plus facile à penser qu'à mettre en oeuvre comme le démontrent Giradin et al., (1999) pour qui il est souvent difficile et même impossible de caractériser le fonctionnement d'un système complexe, comme un éco-agrosystème, au moyen de mesures directes. La taille du système, la complexité des interactions existantes, ou la difficulté et le coût des mesures nécessaires sont souvent écrasant. Mais pour ceux qui ont pris l'habitude de vivre « dans le respect de leur environnement », il est nécessaire de savoir ce qui est attendu et ce qui leur est reproché. Comment les pratiques agricoles actuelles affectent la valeur de la biodiversité et étendent cet effet négatif sur des habitats non agricoles ? Comment peuvent être atténuées les effets préjudiciables ? Comment leurs actions passées ont été et qu'est ce qui pourrait donner de meilleurs résultats ? Quels sont les intérêts écologiques mis en reliefs ? Quels sont les indicateurs et l'échelle d'applicabilité ? Quel est le rôle de la biodiversité dans le maintien des fonctions spécifiques de l'écosystème (par exemple les cycles biogéochimiques) ? Quels sont les processus de développement et de suivi afin de déterminer si les problèmes s'aggravent, si une action est souhaitable ou nécessaire ? Comment mesurer les besoins et les performances des programmes et politiques publiques ? Comment quantifier les services des écosystèmes et quels éléments de l'écosystème sont indispensables pour offrir des services de qualité ? Quels sont les coûts, les avantages, la répartition et le rapport coût/efficacité ? Quels sont les avantages de la réintroduction de l'ours brun pour la biodiversité comparés au maintien du pastoralisme traditionnel ? Quels critères devraient être utilisés pour déterminer le moment d'intervenir pour faire face à la polémique ours ? Quelles sont les conséquences écologiques de "l'ensauvagement" comme stratégie de conservation à long terme ? Ni le mécanisme opératoire du projet ours, ni la connaissance scientifique à jour ne peuvent fournir des réponses à ces questions.

3.1.7 Dans ce contexte, l'ours est-il une espèce parapluie ou une espèce emblématique ?

Une espèce parapluie est une espèce qui est considérée comme en voie de disparition ou menacée ; grande et exige un vaste habitat. Sa biologie est bien connue, elle est facilement observée/observable ou échantillonnée ; migratrice et a une longue durée de vie (Cluff et Paquet, 2003). Ainsi, par la protection de sa zone de vie (très vaste), d'autres espèces sont par ricochet protégées.

L'ours a en général besoin de beaucoup d'espaces boisés afin de prospérer. Vous pouvez donc imaginer qu'il existe plusieurs espèces sous le « parapluie » de l'ours brun dans les Pyrénées. Donc, en protégeant l'ours brun dans les Pyrénées, ces autres espèces sous son « parapluie », seront également protégées. Sauf qu'en date d'aujourd'hui, nous ne savons pas quelles sont ces espèces ? Quelles sont les caractéristiques de leurs différents habitats et leurs fonctions sur le fonctionnement des écosystèmes pyrénéens ? Quelle a été l'évolution de ces espèces avec le pastoralisme seul ? Quelle sera leur évolution avec la cohabitation pastorale ? Ainsi, se penchant sur la définition et le contexte des Pyrénées, l'ours brun n'est pas considérée de façon appropriée comme espèce parapluie sur la chaîne pyrénéenne, même si son régime alimentaire et ses habitudes migratoires poussent à penser qu'il aurait un impact significatif sur la structure des communautés végétales à travers la dispersion des fruits par exemple, ou la préservation/protection de certaines espèces par l'exclusion du pastoralisme. Le vrai problème ici semble être que les décideurs trouvent plus de services rendus à « l'environnement » par les écosystèmes forestiers que les écosystèmes prairiaux. Mais quel est le coût de la restructuration sociale inhérente à l'abandon du pastoralisme en Ariège et à la reconversion ? La population locale est-elle préparée ou du moins consentante ? Y aura-t-il durabilité dans ce processus ? En effet, le plan Mansholt43 (1980), stipule que la moitié de tous les chefs d'exploitations agricoles n'ont souvent pas la formation leur permettant de s'adapter facilement aux conditions sociales et économiques changeantes. De même, leurs exploitations ont un faible potentiel de production et une absence, dans de nombreux cas, d'alternatives ou d'activités économiques d'appoint. En outre, la gestion d'une espèce parapluie ne fonctionne pas toujours comme les scientifiques le pensent. A titre d'exemple, en Californie, un certain insecte, espèce parapluie vivait très bien. Mais après le lancement d'un programme de protection de cet insecte il a diminué en nombre. Ce qui s'est passé, c'est que certains développements ont été autorisés dans le milieu de vie de cette espèce, en gardant uniquement à l'esprit de la protéger. Il est donc souvent mieux de préserver les terres plutôt qu'une espèce en particulier44. Si effectivement l'ours peut

43 http://www.ena.lu/mce.cfm

44 http://www.ecofloridamag.com/askeditor umbrella species.htm

produire une manne touristique capable de faire oublier « économiquement » (puisque c'est de ça qu'il est question) le pastoralisme en Ariège, l'affluence des touristes ne veut-elle pas dire structures d'accueil et désenclavement ? On reproduira probablement tout simplement l'hospice de France dans sa configuration actuelle en Ariège. Lambeck R. (1996) estime qu'il est difficile de justifier la concentration sur une espèce dans un écosystème sans savoir son rôle dans le fonctionnement dudit écosystème. Des doutes subsistent quant à l'étendue de la protection accordée à l'espèce dans le cadre de son "parapluie" qui est difficile à évaluer et supposé plutôt que prouvé. L'approche basée sur une seule espèce est souvent critiquée en raison de l'immense coût de la conservation. De toutes les façons, comme le précise Janet C. (2007) la légitimité du choix d'une espèce retenue, la relation entre la préservation de cette espèce et la capacité à agir sur la biodiversité en général sont en question. Dans le cas particulier de la restauration et de la préservation de l'ours et des relations entre cette préservation et les activités d'élevage pastoral, le niveau d'incomplétude des connaissances rend la question difficile à traiter.

3.1.8 Quel est le coût de la réintroduction de l'ours brun ?

Pour 2006, le budget global prévisionnel du plan ours a été de 2,26 millions d'euros avec 580.000 € pour les indemnisations et les subventions aux éleveurs. Dans ce budget, il n'est mentionné nulle part la valeur d'un ours acheté en Slovénie, ni les charges relatives à la transaction (frais de mission, entretien véhicules...), sauf si ce coût est compris dans les 384.000 € de dépenses engagées la rubrique dépenses des Opérations techniques et scientifiques spécifiques au renforcement. Cela peut vouloir montrer que pour 2,26 millions d'euros engagés par le contribuable européen, seulement 384.000 € a été consacré à l'ours qu'on prétend défendre et 580.000 € au pastoralisme qu'on veut forcer à accepter l'ours. En d'autres termes, moins de la moitié pour les véritables concernés et le reste... on se précipiterait à conclure que dans cette polémique, Ours et Pastoralisme sont tous victimes ; de qui ? Pour 2006, ce montant a-t-il été suffisant ? Ce que l'on sait, c'est qu'en 2007, il y a eu 79 expertises suite aux situations incriminant l'ours avec 350/361 dommages imputés à l'ours parmi lesquels : 295 pour les ovins, 25 pour les bovins, 9 pour les chevaux, 23 pour les ruches et 2 classés autres (ASPAP, 2008). Si nous considérons que seulement dans l'Ariège 346.000 ha sont concernés par le pastoralisme et que, pour protéger les animaux et les ruches quatre fils électriques sont nécessaires, même si seulement un fil et deux sont utilisés pour garder les chevaux et les bovins respectivement. Partant, il est légitime de se demander quels sont/seront les bénéfices du plan ours et leurs externalités positives à long terme sur la biodiversité comparés à ce que le pastoralisme produit aujourd'hui ? Comment les partager ? Quel est le coût de la formation des agriculteurs à faire autre chose que l'élevage ou d'élever autrement ? Quel est le coût de cette restructuration sociale ? Parce que la réponse à ces questions ne peut être trouvée par les résultats de

ce travail, ces questions sont donc les sujets de réflexion et les axes de travail pour progresser dans ce projet en faveur de la cohabitation à l'avenir.

Ces multiples questions ne sont pas de nature ou n'ont pas pour but de fermer la réflexion sur la cohabitation pastorale. Bien au contraire, prenant en compte les travaux de Aubin (1991), selon qui Un organisme vivant modifie le milieu dans lequel il vit, et s'adapte aux modifications exogènes de ce milieu, suivant ainsi un « sentier de viabilité » le long duquel il n'y a ni équilibre, ni optimum, autres qu'instantanés nous espérons plutôt que les conditions nécessaires pour une cohabitation durable soient trouvées. Les travaux actuels sur la dynamique des systèmes tendant à montrer que l'équilibre est un concept ancré dans les esprits mais qu'il n'existe guère d'équilibre qu'instantané dans la nature comme dans l'économie, nous nous alignons à la suite de Weber et al. (1990) et Pavé (1994) pour penser qu'un développement viable à long terme (durable) revient à envisager de gérer au mieux, sur la base d'objectifs de très long terme, des interactions entre des sources différentes de variabilité, économique, naturelle et sociale.

Il ressort de ces entretiens avec quelques acteurs du milieu rural que ce n'est pas tant l'ours (l'animal en lui-même) qui fait problème45 en montagne, mais le statut qu'on lui a attribué et les considérations des personnes et autorités extérieures concernant l'activité pastorale. Cela confirme les conclusions du plan Mansholt (1980) qui stipulent que dans un ensemble très complexe de problèmes sociaux, financiers et économiques, auxquels s'ajoutent des problèmes humains très délicats où interviennent de nombreux facteurs psychologiques, on ne saurait aboutir à des résultats par quelques recettes simplistes. Plutôt que de s'appuyer sur des dispositions législatives et réglementaires rigides, il faut, au contraire offrir aux acteurs un large éventail de possibilités nouvelles leur permettant de déterminer librement leur propre initiative pour leur avenir.

45 Si décroissance générale, oui à l'ours sinon, non ! (Entretien 8. Mai, 2008) propos qui suit l'idée de Daniel Bensaïd

(2003), selon qui la Terre souffre avant tout des « conséquences de l'économie de profit et de la croissance à tout prix et à court terme» . ; on se plaint qu l'élevage ne vit que des subventions comme si avec l'ours on a l'intention de réduire les dépenses des contribuables pourtant avec toutes ces subventions, je gagne moins que le SMIG tandis que qu'un viticulteur de Bordeaux se paye une maison à Toulouse et un agriculteur un jet privé où est l'équité et la logique ? (Entretien 7 et 11. Mai, 2008) ; on pouvait vivre sans trop de soucis avec l'ours si on avait le droit de se défendre. A partir du moment où il protégé et que ses actes sont applaudis et nos pratiques reniées, il devient lourd à supporter (Entretien 5, 14. Mai, 2008)

Conclusion

L'estive n'est pas seulement symbolique dans le fonctionnement des élevages de montagne mais le poumon (économique, assainissement, reproduction) de leur existence, qui contribue à maintenir un tissu rural vivant ; c'est l'identité territoriale du berger. Pour les éleveurs ariégeois, la mobilité pastorale n'est pas simplement une technique avec laquelle ils s'approprient les ressources ; c'est la source même de leur succès dans le contexte agricole actuel. Les animaux et les hommes ont progressivement pris l'habitude de leur environnement et du rythme de vie pratiqué à cet égard. Ici, la logique de garde est l'adaptation du savoir-faire du berger aux habitudes animales et à leurs comportements spontanés, aux conditions biophysiques du milieu, aux objectifs des éleveurs. Elle est aussi fonction du point de vue du berger à propos de l'entretien de l'espace, de l'optimisation et de la maximisation de l'utilisation de la ressource naturelle... Donc, il n'existe pas de norme absolue pour le choix d'un bon parcours. Ce qui rend le bétail des éleveurs de certaines régions prospérer pourrait être préjudiciable à celui des éleveurs d'autres régions. Ainsi, le choix doit toujours être fait, conformément à ce dont les animaux sont devenus habitués. En définitive, les bergers ont une connaissance intime sur les régions qui leur sont familiers. Aujourd'hui, il est très difficile de distinguer clairement le savoir-faire de la connaissance. En Ariège les éleveurs et les bergers ont le plus souvent une formation agricole de base, mais les conditions du milieu les obligent à utiliser seulement leur savoir-faire dans la pratique de leur travail. Par conséquent introduire de nouvelles données techniques suppose qu'une réhabilitation ait été faite en amont. Par ailleurs, la façon dont les moutonniers envisagent les pratiques qu'ils mettent en oeuvre en référence à l'idée qu'ils ont de leur travail, dépend de leur expérience et des interactions sociales au sein des groupes professionnels locaux. Pour que les éleveurs soient plus coopérants aux résolutions liées aux questions environnementales par un changement de leurs pratiques, la transformation de leurs connaissances et savoir-faire doit s'opérer au sein des associations locales en rapport aux attentes et aux conditions du milieu.

Dans le contexte économique du pastoralisme aujourd'hui, des frais supplémentaires sont difficilement supportables. Puisque les mesures d'accompagnements préconisent seulement 50% de subvention pour la prise en charge du berger lorsque toutes les mesures ne sont pas mises en place et 80% quand elles le sont toutes, près de 99% des éleveurs pro-ours enquêtés sont juste des

opportunistes46 parce qu'ils utilisaient déjà chien Patou et garde serrée dans leur pratique. Ils y ont inclus les parcs pour bénéficier au maximum de la subvention lors de l'engagement d'un berger. Pour tous les éleveurs, les mesures d'accompagnement ne sont applicables ni partout, ni à plein temps, ni par tous les temps. Le couple Berger - chien Patou réduit la prédation, mais il ne devrait pas être présenté comme une panacée pour les problèmes du pastoralisme. Rien n'a changé dans les exploitations et les systèmes, même la diversification des exploitations était courante avant le lancement du plan ours. Afin d'avancer dans le processus de cohabitation, les autorités devraient revenir en arrière, éliminer la frustration et les conflits d'intérêts et mettre le prix47. Pour que le projet soit efficace, il faille diviser par 200 le nombre de moutons qui estivent pour avoir le nombre de bergers, de cabanes, des parcs et chiens Patou nécessaires. Le système pratiqué aujourd'hui a fortement évolué s'adaptant aux évolutions socio-économiques et techniques. De plus, le milieu offre une certaine capacité d'adaptation, mais l'allégation à une certaine fierté professionnelle est une pierre d'achoppement pour la mise en oeuvre des mesures d'accompagnement même si le plan ours présente le pastoralisme et ses problèmes en tranches de saucisson. Les agriculteurs peuvent élever autrement, mais ils doivent y penser et le concevoir eux-mêmes.

Il a peut-être été pensé qu'avec le retour de l'ours, les éleveurs devraient passer d'un raisonnement quantitatif à un raisonnement qualitatif. Cela vaut-il la peine dans le contexte actuel où la variation du prix du marché des intrants est à l'opposé de celui des produits ? Certains éleveurs ont fait un produit labellisé, mais son prix a très vite atteint un prix plafond alors qu'ils étaient encore économiquement très précaires, gagnant la plus part de temps moins que le salaire minimum garanti (SMIG). Aujourd'hui, les propos sont assez unanimes chez les éleveurs : J'aimerais que ça continue après moi, j'aimerais transmettre mais ne conseille pas ma progéniture de s'installer. Il semble exister peu d'alternatives aux contraintes actuelles. Certains éleveurs souhaitent actuellement faire connaître leur travail et les conditions de sa pratique, afin que toutes les décisions à leur sujet prennent en compte les contextes du milieu. Peu ou pas d'éleveurs pensent agrandir l'exploitation. Un certain nombre d'entre eux pensent qu'ils devraient d'abord rendre stable l'exploitation et la maintenir à son état de fonctionnement actuel. Pour les éleveurs ovins, la fromagerie, l'élevage

46 Q : Etant une minorité pro-ours dans une zone fortement opposante reconnaissez-vous avoir raison dans votre choix et vous sentez-vous en sécurité ? R : Il ne faut pas mélanger les choses, j'applique les mesures d'accompagnements mais ne me définis pas pro-ours ; ça c'est autre chose. Je pense d'abord à mes bêtes ; j'espère encore pouvoir arriver à les garder et arriver à transmettre (Entretien 8, 11, 14. Mai, 2008).

Q : Avec l'ours qu'est ce qui a changé dans votre système de conduite ? R : Peut-être les parcs quoique... l'ours n'est pas chez moi donc je ne les ai vraiment pas testé même s'ils existent (Entretien 7, 8, 9. Mai, 2008)

47 Protéger l'environnement coûte cher. Ne rien faire coûtera beaucoup plus cher (Kofi Annan).

bovin, les cultures céréalières48 (coup dur pour l'environnement!) et l'abandon sont leurs seules perspectives imaginables. Ils sont d'accords aux modèles conceptuels mais avec les composantes locales et des partenariats. Ils exigent de s'informer auprès des leaders et gestionnaires en observant voire reconnaissant les succès de leurs pratiques et actions présentes. Ils sont farouchement opposés aux modèles préconçus (contrats kit clés en main) prédisant le comportement du système.

Peut-être la réintroduction de l'ours sera à court terme bénéfique à la biodiversité et le pastoralisme, mais pour le moment, il est difficile de suggérer quoi que ce soit. Seuls les bergers ont bénéficié de quelque chose de ce projet ; était-ce là l'objectif ? L'avenir du pastoralisme dépendra fortement des décisions politiques prises par les gouvernements. Il est improbable de voir une extension significative des pâturages fermés, les conditions d'existence des pastoralistes deviendront de plus en plus difficiles puisque agriculteurs et lobbys de conservation exproprient les terres de pâture. Travailler avec les pasteurs, et comprendre de façon plus sympathique leurs systèmes de production, pourrait servir à la fois à protéger leurs modes de vie et renforcer leur capacité de production sur des terres marginales et à favoriser la cohabitation d'avec l'ours. L'introduction de la variabilité, de l'incertitude et de l'irréversibilité dans les dynamiques des systèmes, conduit à poser la question du développement en termes de gestion des interactions entre des variabilités économiques et sociales et des variabilités naturelles, tant dans l'espace que dans le temps.

48 Pour ceux dont l'âge permet encore d'aller s'installer ailleurs et pour qui l'agriculture demeure une passion et offre une certaine qualité de vie.

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