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Diagnostic agraire du Bajo Andarax, Almería (Agriculture intensive sous serre et travail des immigrés)

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par Sarah Dauvergne
AgroParisTech - DAA 2007
  

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b. Le début des années 1960 : changement radical et première vague de colonisation

(i) Colonisation et changement de système

Cette période voit de grands changements intervenir en Espagne : fin du rationnement alimentaire et de la politique ultra interventionniste de Franco, libéralisation des marchés et changements des habitudes alimentaires... Le gouvernement va, tout en protégeant officiellement les latifundistes qui soutiennent le régime, mener une politique de colonisation dans quelques zones d'Andalousie encourageant l'agriculture minifundiste à devenir productive. Almería attire l'attention par la situation désastreuse où elle se trouve, Franco s'y rend plusieurs fois. De nouvelles politiques sont mises en place pour favoriser l'installation de colons : l'octroi de crédit pour la construction d'infrastructures d'irrigation (puits et canaux) et la menace d'expropriation pour les propriétaires s'ils ne font pas les installations nécessaires et s'ils n'installent pas de métayers sur les terres irrigables (voir partie I.B.2.f).

Ces changements attirent de nombreux colons qui viennent de l'arrière pays de la province d'Almeria ou des zones montagneuses de provinces voisines, notamment Grenade. Les colons s'installent surtout sur les anciennes terres de parcours alors que les autochtones restent sur les anciennes terres irriguées. La colonisation des terres à l'est et au nord des anciennes terres irriguées n'a pas cessé jusqu'à aujourd'hui.

(ii) Les nouvelles techniques

Les migrants viennent avec une nouvelle technique : la culture dans le sable. Cette technique était utilisée dans l'arrière-pays. Le sable, qui est très drainant, permet de conserver l'eau dans la terre et évite la formation d'une croute de sel. Il crée aussi un milieu chaud au niveau des racines qui favorise une production précoce. De plus, peu d'adventices peuvent pousser dans le sable. Les autochtones vont imiter les migrants et transformer peu à peu leur système de production en augmentant la place de l'horticulture et diminuant la céréaliculture et l'élevage. La région d'Almeria possède un avantage en termes de climat, qui permet une production de printemps précoce et une production d'automne tardive, qui va être mis à profit par les migrants.

Le travail est essentiellement manuel, le désherbage se fait à la main, le travail attelé consiste désormais à ouvrir le sable pour pouvoir épandre le fumier tous les 4 ou 5 ans.

Les semences sont récupérées sur les fruits des plants les plus beaux, on les fait germer, puis on les plante dans une pépinière de terre et lorsqu'elles ont atteint une dizaine de centimètres, on les plante dans le sable.

Les parcelles sont protégées par des haies de cafia et la cafia et d'autres plantes spontanées servent aussi à fabriquer des setillos, des petites haies qui ne dépassent pas 50 cm de hauteur, qu'on utilise sur chaque rang pour protéger les cultures du vent pendant les campagnes de printemps. Les haies sont orientées nord - sud pour protéger des vents principaux qui viennent de l'est et de l'ouest (levante et poniente), ce qui présente aussi l'avantage d'être bien orienté par rapport à la lumière qui vient du sud. Les setillos sont eux orientés est - ouest, ils ne sont utilisés qu'au printemps lorsque le vent du nord peut provoquer des gelées. Ils sont légèrement inclinés de façon à laisser le soleil entrer vers le sud et à protéger du vent qui vient du nord. La cafia sert aussi de tuteur pour les tomates. L'installation et la rénovation (tous les 3 mois) des haies est un travail important.

Setos de carias et autres
plantes spontanées

Vent du nord

sable

Sud

Figure 17 : rôle des setillos dans la protection contre le vent

 

Figure 18 : la caia est plantée au bord des canaux de sable ou de terre pour les renforcer

31

Sarah Dauvergne Analyse Diagnostic du Bajo Andarax, Almería

setos

Sud

Canal d'irrigation

Parcelle

h = 3 -4 m

1 m

Rangs plantés

L = 8 -10 m

2xh

Levante (été)

Poniente (hiver)

setos

Murets de sable reconstruit à chaque saison, ouverts ou fermés selon les besois en eau

Canal secondaire d'irrigation

Figure 15 : schéma d'une parcelle cultivée à l'air libre dans les années 1960

Figure 16 : rôle des haies dans la protection contre le vent

Mouvement de l'air

Vent

INA-PG, DAA Développement Agricole mars-aout 2007

Les investissements nécessaires pour l'aménagement des parcelles sont le creusement de puits et/ou de canaux ouverts permettant l'utilisation de l'eau de la source de Viator, le nettoyage et l'aplanissement des terrains, il faut parfois amener la terre d'autres sites pour former un sol d'environ 50 cm, puis installer une couche de fumier de 5 cm et une couche de sable d'une quinzaine de centimètres, l'installation de haies autour de chaque parcelle et sur chaque rang de culture pour les protéger du vent. Des murets séparent les parcelles qui ne sont pas tout à fait à la même hauteur mais plutôt en escalier.

L'aménagement de la parcelle est assez peu couteux mais nécessite beaucoup de travail, notamment l'entretien des haies. Les investissements concernant les infrastructures d'irrigation sont faits par les propriétaires et par les migrants disposant d'un petit capital après la vente de leur terre et/ou de leur troupeau dans leur région d'origine.

L'action de l'INC se concentre sur les terres non irriguées sur lesquelles sont effectuées des installations, c'est-à-dire sur les terres occupées par les colons. Les autochtones investissent plus lentement car leur système de production est tourné vers l'autoconsommation et ne permet pas de gros investissements, à part les propriétaires moyens autochtones qui peuvent investir rapidement. Les grands propriétaires, poussés par la menace d'expropriation toute proche, se concentrent sur l'aménagement de nouvelles terres et investissent peu sur les terres données en métayage de la vega. L'avance prise par les colons ou les autochtones ayant les moyens d'investir rapidement dans l'aménagement de parcelles pour l'horticulture intensive est décisive et elle explique en partie les actuelles différenciations sociales.

Les variétés de tomates sont des variétés locales sélectionnées par les producteurs, à cycle court, il y a deux campagnes de 2 ou 3 mois par an, l'une d'aout à décembre et l'autre de janvier à juin, ou une campagne de tomates suivie d'une autre culture. Les rotations peuvent être Tomates/Tomates, Tomates/Poivrons, Concombres/Tomates, Concombres ou Tomates/Pastèques, Pastèques/Pois ou Courgette/Tomates de printemps ou Pastèques... L'hiver est trop froid pour permettre la culture de tomate sur une seule campagne qui dure d'aout à juin (comme c'est le cas actuellement).

Juil.

Nov. Dec.

Janv. Fev.

Mars Avril

Mai Juin

Oct.

Aout Sept.

Production

Production

Figure 19 : période de production de la tomate dans les systèmes de culture à l'air libre

Le rendement de tomates est d'environ 3 kg/m2 avec une densité de plantation plus importante qu'aujourd'hui. Pour faire une comparaison, en prix courant, en 1960, 1 kg de tomates valait 25 pesetas et un travailleur était payé 50 pesetas par jour de travail, aujourd'hui 1 kg de tomates vaut approximativement 90 pesetas (0,50 €) et un travailleur gagne 7000 (42 €) pesetas par jour. Le produit brut d'1 m2 de tomates était donc d'environ 75 pesetas. Si on considère que l'indice des prix à la consommation est de 2000% entre les années 1960 et aujourd'hui (source : INE), cela représente 1.500 pesetas, ou 9 € de 2006. Aujourd'hui le

produit brut est du même ordre, avec un rendement beaucoup plus important (entre 3 et 6 fois supérieur) et les charges étaient beaucoup plus faibles qu'aujourd'hui.

(iii) L 'eau

L'irrigation se fait par submersion toutes les deux semaines, sur des parcelles légèrement inclinées. L'Etat est intervenu pour briser le monopole de sociétés privées sur l'eau et répartir l'accès à l'eau. Les propriétaires des terres vont également installer des puits. La conséquence est que dans presque toutes les exploitations de la vega, il y a un puits. Il existe également des puits communautaires.

(iv) La commercialisation

Au début, ce sont des sociétés de commercialisation qui se chargent de la vente des produits. Les premiers commerçants à s'intéresser au nouveau secteur sont valenciens et murciens. Peu à peu les coopératives montés par les agriculteurs, incitant les producteurs à calibrer les produits et utilisant un système de vente aux enchères à la baisse ont pris de l'importance et ont concurrencé les sociétés de commercialisation, qui ont disparu. La première coopérative agricole, la Coopérative Agricole de San Isidro (CASI), existe depuis 1944, elle se développe à partir de 1965. La production est alors destinée au marché espagnol. Des réglementations limitent l'exportation vers les pays de la CEE jusqu'en 1990.

(v) Les nouvelles différenciations sociales

Les années 1960 sont des années de transition entre les anciens et les nouveaux systèmes. L'élevage continue d'exister jusque dans les années 1980 (année de la fermeture de la centrale laitière) mais cesse d'être prédominant avec l'arrivée de colons qui s'installent pour pratiquer l'horticulture. Les produits sont encore très divers : tomate, concombre, poivron, pastèque, melon, pomme de terre, petit pois et fève. Il y a souvent un petit élevage, mais les colons peuvent s'installer directement sans élevage. On peut différencier les agriculteurs selon la taille des exploitations, le mode de faire-valoir et l'utilisation ou non de main d'oeuvre salariée. La main d'oeuvre familiale reste largement majoritaire.

Les journaliers travaillent dans les exploitations patronales ou capitalistes. Ils peuvent être originaires de la région ou être arrivés de région voisine sans capital.

Les métayers autochtones sur 1 ou 2 hectares continuent à pratiquer un petit élevage associé à la culture de céréales, de luzerne et de pomme de terre. Ils donnent de plus en plus d'importance à l'horticulture.

Les métayers autochtones sur 3 ou 4 hectares continuent de pratiquer l'élevage et donnent de plus en plus d'importance à l'horticulture.

Les métayers colons sur 1 ou 2 hectares pratiquent l'horticulture et un petit élevage (2 ou 3 porcs ou chèvres). La main d'oeuvre est familiale. Ils ne s'installent pas sur des surfaces supérieures à 2 hectares car au-delà de cette surface, il est nécessaire de faire appel à de la main d'oeuvre extérieure. La priorité est d'acheter les terres, pas d'agrandir les surfaces louées en métayage. Les travailleurs doivent parvenir à une relation de confiance avec le propriétaire pour accéder au métayage.

Les petits propriétaires autochtones sur 1 ou 2 hectares continuent à pratiquer l'élevage et accentue l'horticulture. La main d'oeuvre est familiale.

Les petits propriétaires colons sur 1 ou 2 hectares ne font que des produits horticoles. Ils sont en général arrivés avec un petit capital qui leur a permis d'accéder rapidement à la propriété. Ils ont parfois besoin d'un apport très ponctuel en main d'oeuvre salariée mais l'essentiel de la main d'oeuvre est familiale.

Les propriétaires moyens sur 4 à 10 hectares pratiquent l'horticulture. Ils transforment très vite leur système de production car ils ont les moyens d'aménager les parcelles (installation d'une couche de sable, de haies...) et ils cultivaient déjà des produits horticoles pour la vente. La main d'oeuvre est familiale et salariée. Ils peuvent louer une partie des terres à des métayers.

Les grands propriétaires installent des colons en métayage et pratiquent une agriculture capitaliste. Ils ne font que des produits horticoles.

Beaucoup de familles passent par des phases transitoires, avec parfois très peu de terres (3000 - 5000 m2) pendant une ou deux années ou associent pendant quelques temps des terres en métayage et des terres en propriété cultivées plus intensivement. Les exploitations capitalistes vont se morceler progressivement en très petits lots, être cultivées en métayage et être rachetées petit à petit par les agriculteurs familiaux.

Les prêts, surtout des prêts de campagne, qui sont en fait des prêts à la consommation permettant de passer les mauvaises années, sont assurées par les commerçants avec des taux d'intérêts très importants.

(vi) Evolution dans la répartition de la propriété

De manière générale, la nouvelle manière de cultiver est très rentable, et les métayers peuvent accumuler du capital pour racheter les terres. Le nombre d'exploitation agricole double entre 1960 et 1975. La surface moyenne des exploitations a tendance a diminué avec le passage de l'agriculture d'autoconsommation à l'horticulture beaucoup plus intensive en travail et qui peut permettre à une famille de vivre même avec des très petites surfaces (à partie de 3000 m2).

(vii) Le devenir des principales classes sociales

 

Les paysans sans terre

- accès au métayage

- changement d'activité

 

1 à 2 hectares à media, autochtones

- spécialisation dans l'horticulture - achat 1 à 2 ha

 

1 à 2 hectares à media, colons

- achat 1 à 2 ha

 

3 à 4 hectares à media, autochtones

- spécialisation dans l'horticulture - achat 1 à 2 ha

 

1 à 2 hectares en propriété, autochtones

- spécialisation dans l'horticulture

 

1 à 3 hectares en propriété, colons

- agrandissement et spécialisation dans la culture de tomates

 

5 à 10 hectares en propriété

- spécialisation dans la culture de tomates

 

Les grands propriétaires

- installation de métayers

- vente

Figure 20 : évolution des différentes catégories sociales entre 1960 et 1975

(viii) Une nouvelle occupation de l'espace

Les nouveaux arrivants vont s'installer surtout dans la vega de allâ, car la vega de acâ (à l'ouest du fleuve) est limitée par la ville d'Almeria qui s'approche.

Figure 21 : L'occupation de l'espace en 1975

(ix) Conclusion

Les années 1960 sont l'époque de la spécialisation vers l'horticulture à l'air libre. Les politiques de colonisation ont permis d'améliorer très significativement le niveau de vie des habitants de la province d'Almeria. Les deux éléments les plus importants sont la nouvelle répartition des terres, avec l'augmentation de la surface de terres irrigués et son parcellement en lot de colonisation et les changements techniques, notamment un accès renforcé à l'eau et la culture sur sable.

Il y a une sorte de hiérarchie traditionnelle entre le travailleur salarié, le métayer, l'agriculteur propriétaire familiale, patronal et capitaliste. L'âge d'or qui débute dans les années 1960 et se poursuit jusque dans les années 1990 est marquée par une ascension sociale, les salariés deviennent des métayers et les métayers qui pratiquent l'horticulture de manière intensive ont les moyens de devenir propriétaires, de même les colons qui accèdent à la propriété vont s'agrandir et devenir des petits patronaux alors que les agriculteurs autochtones, qui ne bénéficie pas forcément des nouvelles infrastructures et qui doivent investir eux-mêmes vont aller plus lentement. Limités dans l'agrandissement car ils sont « bloqués » dans la vega et ne souhaitent pas forcément, ni vendre leur terrain ni disperser leur parcelles, ils forment encore aujourd'hui des exploitations familiales, à part pour les plus grands (ceux qui possédaient déjà 5-6 ha) qui vont racheter des terres et s'agrandir. Les rares exploitations capitalistes que l'on trouve aujourd'hui sont de nouvelles exploitations, créées récemment par des personnes attirées par le succès de la culture de tomates et par l'accès facile à la nouvelle main-d'oeuvre immigrées.

c. De 1975 à auiourd'hui : La culture sous serre

2000

Plan d'enterrement des canalisations

Recyclage des eaux urbaines

Premiers systèmes d'irrigation équipés d'ordinateur

Obligation de fermer les serres et fin de la culture sans serre (virus)

Premières serres à toit incliné

Premières vagues d'immigration venant

du Maroc

Début du développement de l'activité des

semenciers

Début d'urbanisation sur les terres
agricoles
Début des exportations

Premières variétés "améliorées" à cycle long

Premières variétés hybrides

1990

1980

Début du développement de l'activité bancaire (taux d'intérêts autour de 20 %)

Premiers systèmes d'irrigation au goutte à goutte Premières canalisations enterrées

Premières serres ouvertes et planes

1970

Figure 22 : résumé de l'histoire récente (depuis 1970)

(i) 1975 : Premières serres : allongement de la période de production

Le mouvement de colonisation ne faiblit pas, les migrants venant des zones montagneuses innovent avec la culture sous serre à partir de 1975. Les serres sont en fait des bâches de plastique recouvrant les cultures et ouvertes sur les côtés. On les appelle « parral » car elles sont inspirées de ce qui se fait dans la sierra dans les régions productrices de raisin où on installe des bâches sur les pieds de vigne pour protéger les cultures du vent et avancer ou retarder la période de production.

Les premières serres font environ 3 mètres de hauteur et sont constitué de bois (puis de fer) et de plastique (qu'il faut changer tous les ans). Des trous sont percés sur le toit pour laisser passer l'eau. Il n'y a donc pas de contrôle ni sur l'eau, ni sur le vent. L'apport en eau douce peut être avantageux mais est très aléatoire : si l'humidité augmente à l'intérieur de la serre et que la ventilation est insuffisante, la production pourrit. La serre ne peut pas protéger les cultures des maladies mais elle protège les cultures du vent, jouant le rôle anciennement dévolu aux haies et permet d'augmenter la durée de la période de production en augmentant artificiellement la température au niveau des cultures.

 

Figure 23 : serre de type parral vue de l'intérieur

Cette transformation s'accompagne de la colonisation de nouvelles terres, avec un effet auto-entrainant : la technique de la culture sous serre est largement inspirée des pratiques amenées par les migrants et la migration est encouragée par le succès de ces nouvelles pratiques.

Les variétés de tomates sont des variétés à cycle court, il y a encore deux campagnes par an. La période de production se rapproche de la période hivernale, moment où les prix montent car les pays d'Europe du nord arrêtent de produire. Cela permet aux producteurs d'accumuler du capital et d'investir et aux métayers de racheter les terres.

L'irrigation se fait encore par submersion. L'eau provient des puits et de la source de Viator par l'intermédiaire de canaux ouverts. Les aménagements sont des aménagements privés, dans le cas du métayage, c'est le propriétaire de la terre qui a à charge de fournir l'eau.

Dans le même temps, les agriculteurs spécialisent les productions, d'abord vers deux cultures, la tomate et le poivron et finalement vers la tomate. Les premiers à se spécialiser sont les exploitations patronales, les exploitations familiales cherchant à optimiser l'utilisation de la main d'oeuvre en produisant d'autres cultures qui nécessitent moins de travail. Cette spécialisation vers la tomate s'explique par deux éléments : le fait que c'est une des cultures à plus haute valeur ajoutée, qui nécessite beaucoup de travail et ce travail est apporté par le réservoir de main d'oeuvre issue des migrations, et la salinisation progressive de l'eau, due à une surexploitation des aquifères.

On a donc à cette période les nouveaux colons et les agriculteurs qui en ont les moyens, tout d'abord les moyens et grands propriétaires, qui vont commencer à cultiver sous serres alors que beaucoup d'autres continuent à cultiver à l'air libre. Dans le cas du métayage, c'est le propriétaire qui installe les serres.

Juil.

Nov. Déc..

Janv. Fév..

Mars Avril

Mai Juin

Oct.

Aout Sept.

sous serres sous serres

à l'air libre à l'air libre

Figure 24 : période de production sous les premières serres

(ii) 1980 . le système d'irrigation au goutte à goutte

Dans les années 1980, la culture sous serre se généralise, les propriétaires des terres louées en métayage investissent pour la plupart dans les serres même s'il reste des parcelles cultivées à l'air libre par certains métayers ou petits propriétaires jusqu'en 1995, ensuite il n'est plus possible de cultiver à l'air libre à cause des épidémies. En 1980, la fermeture de la centrale laitière marque l'arrêt total de la production de lait, qui avait déjà presque disparu.

La nouvelle innovation technique, qui permet d'augmenter l'efficacité de la culture sous serres et explique sa généralisation, est le système d'irrigation au goutte à goutte qui remplace l'irrigation par submersion. L'irrigation au goutte à goutte permet un meilleur contrôle de l'eau, évite le stress hydrique, permet d'économiser les produits chimiques et nécessite moins de travail. Les premières canalisations enterrées sont installées grâce à des initiatives privées car elles permettent d'économiser l'eau. On ferme les serres pour pouvoir contrôler davantage l'humidité et on installe des ouvertures latérales pour laisser entrer le vent. Les nappes phréatiques commencent à baisser et à se saliniser.

L'irrigation au goutte à goutte, qui évite le stress hydrique en permettant un apport continu en eau permet l'utilisation de nouvelles variétés plus sensibles. Le rendement sous une serre fermée avec un système d'irrigation au goutte à goutte et les nouvelles variétés hybrides est d'environ 6 kg/m2, soit le double du rendement obtenu avec la culture à l'air libre.

Les nouvelles variétés hybrides à croissance indéterminée qui permettent de rallonger la durée des campagnes mais ne permettent pas encore de faire un seul cycle de culture par an. L'avantage de ces variétés est de rapprocher la période de production de la période hivernale où les prix montent et de compenser les fluctuations de prix intraannuelles grâce à une longue campagne. Les prix élevés permettent aux producteurs d'accumuler du capital et de racheter les terres.

Avec un prix de vente de 50 pesetas, le produit brut d'un m2 de tomates est de 300 pesetas. L'indice des prix à la consommation entre 1980 et aujourd'hui est de 350% (source : INE), 300 pesetas de 1980 équivalent en terne de pouvoir d'achat à environ 1000 pesetas de 2006, ou 6 € de 2006. A l'époque, construire un invernaderos coûte environ 250 pesetas par m2, le produit brut d'une année permet donc de rembourser la serre, les consommations intermédiaires et la main d'oeuvre ont un prix inférieur à celui d'aujourd'hui.

Les faible couts de production, notamment en main d'oeuvre (et ceci malgré l'importance des syndicats d'ouvriers agricoles en Andalousie) permettent d'être plus compétitifs que les pays d'Europe du Nord (par exemple que les producteurs français). A partir de l'entrée de l'Espagne dans l'Union Européenne, le développement économique offre d'autres possibilités d'emploi aux journaliers andalous dont le nombre est en baisse, ils sont remplacés par des travailleurs clandestins venant du Maroc dont l''immigration massive dans les années 1990 aura une grande influence sur la région.

En même temps, le développement de l'activité bancaire facilite l'installation des jeunes sans passer par l'étape préalable du métayage. Les taux d'intérêts sont de 20 % environ. La commercialisation est désormais le domaine exclusif des coopératives agricoles et se fait systématiquement par un système d'enchère à la baisse. La production est de plus en plus destinée au marché européen même si une grande partie est encore vendue sur le marché espagnol.

La plupart des coopératives agricoles incitent les producteurs à conditionner eux- mêmes leur production. Le conditionnement consiste à trier les tomates en fonction de leur taille, ou de la taille du rameau, de leur couleur, de leur forme..., à les laver et à les présenter dans de petites caisses fournies par la coopérative. La manipulation des tomates occupe une grande partie du temps de travail (la moitié du travail en période de production). Des machines peuvent être utilisées pour faciliter le tri des tomates et leur conditionnement, ce sont des calibreuses qui trient les tomates en fonction de leur poids et les laveuses. C'est la seule forme de mécanisation du travail, qui reste essentiellement manuel. Ces calibreuses ne sont utilisées que dans les grandes exploitations. Le conditionnement et la présentation des produits vont prendre de plus en plus d'importance.

C'est également dans les années 1980 que la ville d'Almeria commence à empiéter sur les terres agricoles, cela provoque une baisse des investissements dans les zones les plus proches de la ville et une migration des jeunes agriculteurs vers de nouvelles terres colonisées.

En parallèle, l'importance des grands propriétaires diminue désormais très vite, notamment du fait de l'urbanisation, qui crée un nouveau secteur économique très important, la construction. Cette activité et le tourisme représentent des débouchés rentables pour les capitaux et ont un effet de concurrence sur le capital avec l'activité agricole dont se désintéresse la petite bourgeoisie propriétaire des terres, ce qui facilite le rachat des terres pas les métayers.

(iii) 1990 : un nouveau paquet technique et l'arrivée des travailleurs marocains

Dans les années 1990, on expérimente de nouvelles serres à toit incliné qui ne laissent pas rentrer l'eau et qui vont se répandre chez les agriculteurs aisés. Ces serres sont plus hautes et possèdent des fenêtres dont on peut contrôler l'ouverture. Cela permet un meilleur contrôle de l'humidité à l'intérieur de la serre et diminue les pertes par pourriture. L'eau de pluie peut être récupéré et remontée vers le bassin grâce à de petites pompes. Ces serres représentent un coût deux fois plus important que les serres planes, Ce sont les premiers colons propriétaires et les propriétaires autochtones moyens qui ont les moyens de renouveler leurs serres. Les producteurs préfèrent utiliser une nouvelle sorte de plastique qui se change une fois tous les trois ans.

L'irrigation au goutte à goutte se généralise. Des aménagements privés permettent d'augmenter le nombre de canalisations enterrées.

De nouvelles variétés, à croissance indéterminée, permettent la culture sans interruption d'octobre à mai, que ce soit sous les anciennes serres planes ou sous les nouvelles serres. Ces variétés sont utilisées de façon optimale grâce à la culture sous serre : la période de production se situe en l'hiver, moment où les prix montent car les pays d'Europe du Nord (France et Hollande) arrêtent de produire. Tous les producteurs peuvent profiter de ces bons prix, ce qui va permettre au plus grand nombre de racheter les terres, ou s'ils sont déjà propriétaires, de s'agrandir et d'investir dans de nouveaux équipements. La rentabilité de ce nouveau système attire les banques, qui vont jouer un rôle de plus en plus important (crédit pour l'installation, l'achat d'équipement ou l'agrandissement, prêt de campagne). Les taux d'intérêts baissent, sous l'influence de l'Union Européenne et de la Junta de Andalusia, de 20 % à 5 %.

Comme avec les nouvelles variétés, les plants de tomates peuvent atteindre jusqu'à 9 mètres de long lors d'une campagne, il faut un matériel qui servent de tuteur. Il existe deux techniques : la première consiste à installer un réseau de fil à deux ou trois mètres de hauteur. Pendant la première partie de la campagne, tant que la plante n'a pas atteint cette hauteur, on l'enroule dans le fil lui même rattaché au réseau afin qu'elle ait toujours la tête vers le haut. Lorsque la plante atteint la hauteur des fils, on la fixe à l'aide d'un clip et on fait passer la tête de la plante de l'autre coté du fil et la plante pousse alors vers le bas. Si la campagne dure longtemps et que le plant a poussé vite, la tête peut alors descendre jusqu'à presque toucher le sol, on recommence alors la même opération à l'aide de fil de façon à ce que la tête se retrouve de nouveau vers le haut.

Une autre façon de faire nécessite l'installation de perches, qui sont moins fréquentes, surtout dans les serres planes. Les perches sont accrochées au réseau de fils et peuvent glisser le long du fil. La campagne commence de la même façon, la tête de la tomate est maintenue vers le haut grâce à un fil. A partir du moment où elle arrive à la hauteur des fils, on fait régulièrement glisser la perche de façon à ce que la plante ne touche jamais le sol (car dans ce cas la plante pourrit). La tête reste toujours vers le haut. Ce système permet d'obtenir un meilleur rendement et une production de meilleure qualité mais oblige à un soin constant : la tomate produit sans cesse des talles qu'il faut couper pour que l'énergie de la plante se concentre sur la production des fruits. Avec les perches, la tige se trouve dans une position horizontale très proche du sol, il est obligatoire de couper les talles produites régulièrement par la tige car s'ils touchent le sol la plante pourrit, alors que sans perches, la tige est verticale et les talles ne peuvent pas toucher le sol.

L'activité de semencier se développe très largement, en plus de la transformation des graines en plantule, il peut également greffer les plants sur des pieds plus solides résistants aux maladies du sol. La pollinisation qui était avant effectuée à la main par l'application d'une hormone sur chaque fleur est désormais assurée par des bourdons, cette technique ouvre la voie à la lutte intégrée.

En 1995 une épidémie détruit les cultures, c'est la fin de la culture à l'air libre et des serres ouvertes, les serres ont désormais la fonction de protéger les cultures des maladies malgré l'absence de rotation. Les fenêtres sont équipées de voile très fin qui ne laisse pas passer les insectes. La monoculture de tomate est généralisée, il est devenu impossible de cultiver autre chose à cause de la forte teneur en sel dans l'eau des puits.

Le rendement sous serre plane avec les nouvelles variétés va de 10 à 12 kg/m2 en fonction des variétés, le rendement sous serres à toit incliné qui permet un meilleur contrôle de l'humidité va de 11 à 13 kg/m2. Avec les perches, les rendements vont de 12 à 14 kg/m2. Le rendement double par rapport à la période des premières serres et la conquête de la période hivernale permet de profiter de prix très élevés.

Aout

 

Sept. Oct.

Nov.

Dec. Janv.

Fev. Mars

Avril Mai

 

Juin Juil.

 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 

Production

 
 
 

Figure 25 : Période de production avec les nouvelles variétés

C'est autour de 1985 qu'ont lieu les premières vagues d'immigration importantes venant du Maroc. La main d'oeuvre andalouse a très largement diminué puisque beaucoup de journaliers ont réussi à avoir accès à la propriété des terres ou ont quitté l'activité agricole, profitant des opportunités existant dans la province d'Almeria, par exemple la construction, dans d'autres régions d'Espagne ou dans d'autres pays européens. Elle est remplacée par les travailleurs clandestins arrivant massivement du Maroc, qui représente une main d'oeuvre très flexibles, plus abondante et plus précaire que les journaliers andalous du fait des discriminations, du manque d'organisations syndicales et de la faible intégration des immigrés qui viennent d'arriver sur le territoire espagnol.

L'arrivée des cette main-d'oeuvre transforme le système : jusque là la main d'oeuvre est essentiellement familiale, mais après les vagues d'immigration venant du Maroc, on va assister à deux phénomènes : un agrandissement relatif des terres, qui permet de doubler la surface cultivée grâce à l'appel à un petit nombre de salariés par les agriculteurs familiaux qui en ont les moyens (généralement d'anciens colons), et un très fort agrandissement avec l'utilisation d'un très grand nombre de salariés pour ceux qui ont les moyens d'acheter de grandes surfaces, c'est-à-dire ceux qui utilisaient déjà de la main d'oeuvre salariée, les propriétaires moyens des années 1950, les colons qui ont accédé à la propriété très rapidement et qui se sont agrandis. Les petits agriculteurs autochtones n'ont pas les moyens de s'agrandir et restent familiaux.

L'urbanisation recouvre toutes les terres agricoles à l'ouest du fleuve. Les jeunes agriculteurs vendent les terres urbanisables et rachètent des surfaces plus importantes, soit dans la zone d'expansion des serres, soit à Nijar où il y a encore des terres en abondance et où ils cultivent la tomate.

(iv) 2000 : l'informatique

Dans les années 2000 on expérimente l'agriculture assistée par ordinateur, la nouveauté la plus importante est un programmateur lié au système d'irrigation qui permet de mesurer les caractéristiques de l'eau afin de calculer la quantité nécessaire d'intrants. Ce système permet d'optimiser l'utilisation de l'eau et d'augmenter encore les rendements (de 11 à 13 kg/m2 sous serres planes, de 12 à 14 kg/m2 sous serres à toit incliné, de 13 à 15 kg/m2 lorsqu'il y a des perches), il peut être installé dans des serres planes ou à toit incliné et il se répand chez les producteurs qui en ont les moyens.

D'autres nouveaux équipements sont expérimentés mais ne se généralise pas aussi rapidement. Les serres en arc sont beaucoup plus hautes et permettent un meilleur contrôle sur la ventilation. Elles sont en général accompagnées d'un arsenal technologique comme la ventilation automatique ou d'un système de chauffage (dans les zones plus froides, comme à Nijar). La ventilation automatique ouvre et ferme des fenêtres en fonction de mesure de la température et de l'humidité. Elle permet en théorie d'être moins présent mais la plupart des agriculteurs font assez peu confiance dans ce système.

D'autres équipements sont testés : les substrats de cultures qui permettent une production totalement hors-sol, les calibreuses à systèmes optiques permettant le tri des tomates en fonction de leur couleur... Ils restent extrêmement minoritaires, la stratégie de production à Almería étant de se servir des avantages comparatifs dus au climat pour produire à faible cout et supporter la concurrence des systèmes hollandais et français beaucoup plus techniques.

Une communauté d'irrigants met en place une dépureuse qui recycle les eaux urbaines et permet d'avoir un accès à de l'eau non salée, presque toute la zone est desservie par les eaux recyclées et le territoire irrigué s'agrandit. Cela constitue une réponse aux besoins croissants en eau, avec l'augmentation des surfaces cultivées, et aux problèmes de salinisation et de baisse du niveau d'eau dans les nappes phréatiques. D'un autre côté, les communautés d'irrigants de la source de Viator et de la dépureuse installent de nouvelles pompes pour pouvoir monter l'eau en amont de la source. A partir de 1996, l'Union Européenne finance 40 % de la construction de nouvelles canalisations enterrées et en 2007, 85 % des canalisations sont enterrées (100 % pour le réseau qui concerne la dépureuse).

Le recours à la main d'oeuvre immigrée est devenu très fréquent, on assiste alors à une nouvelle forme de différenciation sociale entre les espagnols qui ont accès aux crédits et à la propriété et les immigrés, qui viennent du Maroc, d'Afrique subsaharienne et d'Europe de l'Est. La concurrence avec les pays méditerranéens comme le Maroc et la Turquie, qui bénéficient de la même précocité de production, est très forte, d'autant que ces pays ont des couts de production plus faible, surtout la main d'oeuvre, qui a un cout 5 à 10 fois inférieur à celui en Espagne.

Les variétés évoluent très vite, de nouvelles variétés apparaissent tous les 5 ans environ. Les producteurs se trouvent alors dans une situation de dépendance vis-à-vis des producteurs de semences et les variétés sont très fragiles, leur utilisation s'accompagne de l'emploi de produits phytosanitaires en grande quantité, ce qui augmente les couts de production.

Le processus d'urbanisation commence à gagner les terres de la vega de allâ, c'est-à- dire les anciennes terres irriguées à l'est du fleuve. Les nouveaux migrants, ainsi que les agriculteurs les plus aisés des zones urbanisées ou ceux qui veulent agrandir leur exploitation, s'installent sur les terres non exploitées du piémont. En 2007, il y a environ 2500

Figure 26 : Occupation de l'espace en 2000

exploitations agricoles, le nombre d'exploitations a plus que doublé par rapport à 1975 et a quintuplé par rapport à 1960, il est en constante augmentation, les exploitations qui disparaissent sont généralement situées sur les terres urbanisables, quelques exploitations peuvent disparaître également si l'endettement est très important et que les prix. Les exploitations qui ont atteint une taille déjà importante peuvent emprunter sans risque (car ils ont la possibilité de rembourser les crédits sur un terme très court) et s'agrandissent encore plus.

Il y a un gradient dans le paysage entre les anciennes terres irriguées, et les zones colonisées qui ont bénéficié d'une avance dès les années 1960 et qui servent de zones d'extension à ceux qui ont les moyens d'investir. Les colons s'installent en général avec des équipements plus modernes grâce au crédit. L'appui étatique à l'installation des colons s'atténue à la mort de Franco, en 1976, avec le remplacement de l'INC par l'Institut de Réforme et de Développement Agraire (IRYDA) et en 1984 avec la création de l'Institut Andalous de Réforme Agraire. Les producteurs ayant une surface importante investissent beaucoup, s'agrandissent et renouvèlent très vite leur équipement alors que les petits agriculteurs déjà en place transforment petit à petit leur système, et investissent dans de nouveaux équipements mais plus lentement pour éviter un endettement excessif.

d. Conclusion

L'histoire d'Almeria est l'histoire du développement exceptionnelle de la province la plus pauvre d'Espagne, grâce aux transformations qui ont eu lieu dans l'agriculture. Alors que le reste de la province d'Almeria, de l'Andalousie et de l'Espagne se vident à cause de l'émigration, les zones aujourd'hui connues comme El Ejido, Nijar, el Bajo Andarax voient leur population augmenter et la mise en culture de terres abandonnées depuis des siècles.

Ce n'est pas à la fin des années 1970, avec l'arrivée de la culture sous serres, que qu'a commencé la transformation si spectaculaire de l'agriculture d'Almeria. C'est en fait dans les années 1960 que l'on passe d'une agriculture « traditionnelle » à une agriculture intensive, notamment avec la technique de la culture dans le sable. Les facteurs qui ont déclenché cette transformation sont le développement des infrastructures d'irrigation par le gouvernement, la libéralisation des marchés, qui a permis à l'horticulture de prendre de l'importance, et une politique de colonisation favorisant l'agriculture familiale.

Dans le Bajo Andarax, l'histoire de colonisation a donné naissance à 4 zones, de la plus ancienne à la plus jeune : la vega de acâ qui a presque complètement disparu aujourd'hui sous l'urbanisation, la vega de allâ où se trouve les terres les plus facilement irrigables et les plus fertiles, et los llanos de la Cafiada et de Alquian qui correspondent aux terres de parcours colonisées, ce sont ces quatre zones qui donnent le nom de « quatros vegas », auxquelles on peut rajouter les terres colonisées ces dernières années à la limite de la sierra, parfois dans l'illégalité.

Le succès de cette agriculture s'est accompagné d'une ascension sociale très importante. Il y a eu un élan très important d'achat des terres par les agriculteurs, spécialement dans les années 1980-1990, qui représente un âge d'or. La culture de la tomate est alors très rentable, soutenue par un bon prix grâce aux nouveaux marchés d'Europe du nord et à la production hivernale et les coûts de production sont faibles (plus faible que dans les pays concurrents comme la France ou la Hollande). Cela va permettre une généralisation de la propriété.

L'organisation des agriculteurs en coopératives qui fournissent les intrants et commercialisent les produits, et qui permettent un suivi technique poussé, est également un élément important et a permis la mise en place d'un réseau de commercialisation particulièrement efficace.

A la fin des années 1990, les conditions changent avec l'apparition de maladies, la nouvelle concurrence des pays méditerranéens qui passent des accords de libre-échange avec l'UE et l'augmentation des coûts de production. Cela coïncide avec la période d'arrivée des travailleurs immigrés. Les conditions ont alors quelque peu changé par rapport aux années 1960, les terres ne sont plus aussi abondantes, le gouvernement refuse la mise en culture de nouvelles terres, et donc l'installation de nouvelles structures d'irrigation, et les possibilités de travail ne peuvent pas absorber l'énorme masse de travailleurs, ce qui tire les salaires à la baisse et fragilise la situation des immigrés. On est donc sorti de cette dynamique qui permettait aux travailleurs d'avoir accès à la terre, et l'utilisation systématique de salariés fragilise l'agriculture familiale.

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"L'ignorant affirme, le savant doute, le sage réfléchit"   Aristote