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L'émergence d'une culture des droits de l'homme au Cameroun

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par Cyrille APALA MOIFFO
Université de Nantes - Diplôme d'Université de 3è cycle en Droits Fondamentaux 2005
  

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    « Campus Ouvert Droit, Ethique et Société »

    UNIVERSITE DE NANTES - UNIVERSITE PARIS II PANTHEON ASSAS - UNIVERSITE PARIS X NANTERRE -

    UNIVERSITE PARIS XII VAL DE MARNE - AGENCE UNIVERSITAIRE DE LA FRANCOPHONIE

    __________________________

    ANNEE UNIVERSITAIRE 2005-2006

    L'ÉMERGENCE D'UNE CULTURE DES DROITS DE L'HOMME AU CAMEROUN

    MEMOIRE DE RECHERCHE

    POUR L'OBTENTION DU DIPLOME D'UNIVERSITÉ DE 3e CYCLE

    "DROITS FONDAMENTAUX"

    Présenté par :

    Cyrille APALA MOIFFO

    Tuteur :

    Michel MAHOUVE

    Magistrat, Directeur des Droits de l'Homme et de la Coopération Internationale au Ministère camerounais de la Justice,

    Docteur en droit de l'Université Panthéon Assas (Paris II)DEDICACE

    A

    Mes parents Benoît APALA et Marie Hélène SANGUE ;

    Ma femme, Clarisse Julienne NENZEKO KAGHO ;

    Notre fille, Joëlle Ilona APALA NENZEKO.

    REMERCIEMENTS

    La réalisation du présent mémoire est le résultat de l'action conjuguée de plusieurs personnes à qui j'exprime ma reconnaissance. Toute ma gratitude va particulièrement à l'endroit des personnes suivantes :

    - Monsieur Michel MAHOUVE, mon tuteur de recherche, pour sa disponibilité, sa patience, ses conseils, ainsi que pour la documentation mise à ma disposition et qui m'a été d'un précieux apport dans la rédaction de ce mémoire ;

    - Monsieur Jacques FAME NDONGO, Ministre de l'Enseignement supérieur, pour ses encouragements et pour le soutien qu'il m'a apporté dans le cadre de cette formation ;

    - Mes supérieurs hiérarchiques du Ministère de l'Enseignement supérieur, les professeurs René Joly ASSAKO ASSAKO, Jean Jacques ESSONO, Messieurs Claude Rigobert KAMENI et Zaccheus MBOME, pour leur compréhension, leurs conseils et leur soutien constant, qui ont contribué à me mettre dans de conditions idéales pour mener mes recherches ;

    - Madame KONDO, Chargée de protection à la Commission nationale des droits de l'homme et des libertés, pour son accueil et pour les informations et la documentation qu'elle m'a données ;

    - Mademoiselle Aline Mathilde BILOA MBIA ma condisciple, pour sa disponibilité à partager avec moi sa documentation, et pour les échanges fructueux que nous avons eus tout au long de la formation en DUDF.

    - Mon frère, Cyrille TSAPZANG, pour ses encouragements et l'appui financier qu'il n'a pas hésité à m'apporter pour mes études.

    SOMMAIRE

    INTRODUCTION GENERALE 1

    PREMIERE PARTIE : LES DROITS DE L'HOMME AU CAMEROUN : DES DROITS EMERGENTS................................................................................................................................ 4

    CHAPITRE I : LES FACTEURS DECLENCHEURS DE LA NECESSITE DU RESPECT DES DROITS DE L'HOMME 5

    SECTION 1 : LES FACTEURS EXOGENES 5

    SECTION 2 : LES FACTEURS ENDOGENES ..... 11

    CHAPITRE II : LES MANIFESTATIONS DE L'EMERGENCE DE LA CULTURE DES DROITS DE L'HOMME 16

    SECTION 1 : L'ACTION DES POUVOIRS PUBLICS 16

    SECTION 2 : L'ACTION DE LA SOCIETE CIVILE 40

    DEUXIEME PARTIE : LES DROITS DE L'HOMME AU CAMEROUN : DES DROITS A CONSOLIDER 51

    CHAPITRE I : LES DIFFICULTES DE MISE EN OEUVRE DE LA PROTECTION DES DROITS DE L'HOMME 52

    SECTION 1 : LES OBSTACLES AU RESPECT ET A LA PROTECTION DES DROITS DE L'HOMME 52

    SECTION 2 : L'INFLUENCE DES POUVOIRS PUBLICS SUR LES INSTITUTIONS INTERVENANT DANS LE CHAMP DES DROITS DE L'HOMME 63

    CHAPITRE II : LES PERSPECTIVES 68

    SECTION 1 : LE RENFORCEMENT DE L'ETAT DE DROIT ET DE LA DEMOCRATIE 68

    SECTION 2 : UNE MEILLEURE ORGANISATION DE LA SOCIETE CIVILE 72

    CONCLUSION GENERALE 78

    BIBLIOGRAPHIE 80

    ANNEXES 84

    TABLE DES MATIERES 85

    LISTE DES SIGLES ET ABREVIATIONS

    Al :

    Alinéa

    APDHAC :

    Association pour la promotion des droits de l'homme en Afrique centrale

    C.A :

    Cour d'Appel

    CNDHL :

    Commission nationale des droits de l'homme et des libertés

    CNC :

    Conseil national de la communication

    CPP :

    Code de procédure pénale

    CRTV :

    Cameroon Radio Television

    CCS :

    Commission Communale de Suivi

    CDS :

    Commission Départementale de Suivi

    C.S :

    Cour Suprême

    DUDF :

    Diplôme universitaire en Droits Fondamentaux

    FIDH :

    Fédération internationale des ligues des droits de l'homme

    FMI :

    Fonds Monétaire International

    OIF :

    Organisation Internationale de la Francophonie

    ONEL :

    Observatoire national des élections

    ONG :

    Organisation non gouvernementale

    ONU :

    Organisation des Nations unies

    OUA :

    Organisation de l'unité africaine

    PNG :

    Programme national de gouvernance

    RDPC :

    Rassemblement démocratique du peuple camerounais

    SDN :

    Société des Nations

    TGI :

    Tribunal de grande instance

    TIC :

    Technologies de l'information et de la communication

    TPI :

    Tribunal de première instance

    UCAC :

    Université catholique d'Afrique centrale

    URSS :

    Union des républiques socialistes soviétiques

    INTRODUCTION GENERALE

    A son indépendance en 1960, le Cameroun hérite des institutions mises en place par le colonisateur ainsi que de la législation instituée par ce dernier.

    La nécessité d'organiser la vie politique et sociale amène dès lors les nouvelles autorités "indigènes" à remplacer progressivement les lois du "colonisateur" par des lois nationales fortement inspirées de la métropole, mais en tenant compte des spécificités locales.

    Si à cette période les droits de l'homme étaient déjà intégrés dans les sociétés occidentales et faisaient même l'objet de codifications au plan international, telle ne semblait pas être la préoccupation des Etats africains nouvellement indépendants.

    En effet, les nouveaux dirigeants africains dont le souci était d'affirmer leur autorité et de contenir toute critique ou mouvement d'humeur tendant à s'élever contre leur gestion des affaires publiques, n'ont pas hésité à restreindre considérablement l'exercice des droits et libertés des populations en adoptant des lois "liberticides". Aussi le pas des violations graves des droits de l'homme était-il très souvent franchi.

    Le Cameroun, dans ses constitutions successives avait généralement proclamé son attachement aux droits de l'homme ainsi qu'aux instruments internationaux y relatifs, même si la référence à cette notion n'était incarnée que de façon médiocre dans la pratique.

    Pendant ce temps, la communauté internationale, sous l'égide des Nations unies, continuait son action de codification des droits de l'homme et d'enrichissement des notions et concepts y relatifs.

    C'est ainsi que les années 1990 constituent dans le monde un saut qualitatif en matière de droits de l'homme. Les propos de M. Boutros Boutros-Ghali à l'ouverture de la Conférence mondiale sur les droits de l'homme à Vienne en juin 1993, l'illustrent de fort belle manière, lorsqu'il déclare que : « la fin de notre siècle voit se répandre partout une nouvelle culture qui est la culture des droits de l'homme ». Cette situation est essentiellement due à une conjonction de facteurs qui n'ont pas épargné le continent africain.

    En effet, une « fièvre démocratique » s'est emparée de la plupart des Etats africains, et a été suivie d'une adhésion aux principes de l'Etat de droit, entraînant de part et d'autres des réformes constitutionnelles, législatives et même l'appropriation d'une éthique orientée vers le respect de la dignité humaine. Ce contexte nouveau a amené les gouvernants à desserrer l'étau des contraintes qui pesaient jusque là sur l'exercice et la jouissance des droits et libertés, appuyés en cela par l'éruption sur la scène africaine de nouveaux acteurs dans le champ de la protection et de la défense des droits de l'homme.

    Il s'agit là du printemps des libertés et de l'initiation aux habitudes démocratiques, qui amorce l'ère de l'émergence d'une culture des droits de l'homme au Cameroun. C'est-à-dire de l'acquisition par les citoyens, mais surtout par les gouvernants, des habitudes et attitudes favorables au respect de ces droits. Les droits de l'homme pouvant être définis comme un ensemble de principes et de normes qui reconnaissent et garantissent à tout individu des prérogatives, des attributions ou des facultés du fait de son appartenance à la communauté humaine.

    Etant donné que le Cameroun n'a pas échappé à cette mouvance, on se pose la question de savoir quelles sont les avancées faites en matière de respect des droits de l'homme ? En fait, qu'a fait le Cameroun pour se mettre au diapason des instruments internationaux portant sur ces droits ? En d'autres termes, quelles sont les actions menées pour promouvoir les droits de l'homme auprès des différents acteurs sociaux et pour en assurer une meilleure protection ? Comment apprécier leur efficacité ?

    Au regard du champ très vaste que couvrent les droits de l'homme, notre étude s'appesantira davantage sur les aspects propres aux droits civils et politiques. Ces droits semblent être l'orientation des gouvernants et reflètent les aspirations profondes des populations, et leur respect à notre sens conditionne la pleine jouissance des droits économiques et sociaux, lesquels supposent quand même un certain niveau de développement économique.

    Une esquisse de réponse à ces différentes questions nous conduit à constater que l'appropriation de la culture des droits de l'homme au Cameroun est un processus émergent (Première partie), mais qui reste à consolider compte tenu des nombreux obstacles qui jonchent le processus d'enracinement de ces droits (Deuxième partie).

    PREMIERE PARTIE :

    LES DROITS DE L'HOMME AU CAMEROUN :

    DES DROITS EMERGENTS

    L'évocation des droits de l'homme et des garanties permettant d'assurer leur respect est longtemps restée un sujet tabou au Cameroun. Pour la majorité de la population, traumatisée par la dureté du régime politique en place depuis l'indépendance, et par la répression brutale de certaines revendications y relatives, parler des droits de l'homme n'avait aucun rapport avec les préoccupations quotidiennes de leur existence. Leur ignorance, indifférence, scepticisme ou simple résignation, couplée à l'absence de pratique démocratique par les gouvernants, créait un environnement caractérisé par des abus de toutes sortes, l'arbitraire et de nombreuses atteintes à la dignité humaine, sous le regard presque indifférent de la communauté internationale.

    A la faveur d'un changement de régime en 1982, mais davantage à la suite des bouleversements1(*) qu'a connus le monde, le Cameroun, comme la plupart des Etats d'Afrique centrale, s'est engagé dans « une aventure de la civilité politique et de l'organisation des relations sociales plus soucieuses de l'épanouissement des individus »2(*), de la considération qui leur est due en tant qu'êtres doués de raison et de conscience, mais surtout titulaires de droits et libertés dont ils doivent pouvoir jouir.

    Cette révolution qui est toujours d'actualité s'est opérée avec le concours de plusieurs facteurs qui ont déclenché la nécessité du respect des droits de l'homme (Chapitre I). Aussi importe t-il de savoir quelles sont les manifestations de l'émergence de cette culture (Chapitre II).

    CHAPITRE I :

    LES FACTEURS DECLENCHEURS DE LA NECESSITE DU RESPECT DES DROITS DE L'HOMME

    La fin de la décennie 1980 a vu se développer en Afrique des revendications démocratiques et des pressions de toutes parts, pour la mise en place de l'Etat de droit et la culture du respect des droits humains.

    Loin d'être des notions antagonistes, Etat de droit et démocratie sont complémentaires par leurs contenus en ce sens qu'elles sont les fondations de toute entreprise engagée au service de la dignité de la personne humaine.

    En effet, selon MENGUE ME ENGOUANG, « la démocratie (...) repose sur un certain nombre de principes qui sont entre autres : l'institutionnalisation du pouvoir, le respect des droits de l'homme et la reconnaissance des libertés publiques »3(*). L'Etat de droit quant à lui, a pour exigences la protection des droits fondamentaux, la garantie de la séparation des pouvoirs et l'harmonisation de la réglementation par la protection de l'ordre juridique4(*).

    Cette dynamique à laquelle le Cameroun n'a pas échappé est la résultante de facteurs aussi bien exogènes (Section 1), qu'endogènes (Section 2).

    SECTION 1 : LES FACTEURS EXOGENES

    Les exigences quant aux droits de l'homme venues de l'extérieur n'ont pas laissé indifférents les dirigeants des pays africains, compte tenu des attentes que ces derniers nourrissent vis-à-vis des partenaires bilatéraux, multilatéraux ainsi que des Institutions internationales.

    Globalement, les facteurs ayant favorisé l'émergence des droits de l'homme au Cameroun, comme d'ailleurs dans de nombreux Etats africains, tournent autour de l'instauration et de la consolidation de l'Etat de droit ainsi que de l'établissement des régimes démocratiques.

    Ce mouvement qui va finalement s'enclencher est la conséquence de la fin de la guerre froide (Paragraphe 1), mais aussi de l'action des organisations internationales (Paragraphe 2).

    Paragraphe 1 : La fin de la guerre froide

    Tout le temps qu'a duré la guerre froide, les Etats occidentaux n'ont pas trouvé à redire sur les dictatures africaines et se sont même accommodés des multiples violations des droits de l'homme sur le continent. En raison de la division du monde en deux blocs idéologiques (le socialisme et le capitalisme d'inspiration libérale), les Etats occidentaux préfèrent garder un mutisme face aux nombreuses dérives autoritaires des dirigeants africains, afin de conserver sur eux toute leur influence et éviter ainsi le basculement vers le camp adverse.

    La chute du mur de Berlin en novembre 1989 scelle définitivement le sort du socialisme dont la décadence a commencé avec la « perestroïka » prônée par GORBATCHEV5(*), et ouvre une nouvelle ère marquée par la fin de la guerre froide entre l'ex-URSS et les Etats-Unis.

    Ce bouleversement radical dans la marche du monde a pour effet de changer les conceptions occidentales à l'égard des régimes africains, qui devront désormais se mettre à l'école de la démocratie occidentale et du capitalisme érigés en système mondial.

    Ce processus est la résultante du vent de démocratisation venu de l'Est (A) relayé par le discours de La Baule (B).

    A- Le vent de démocratisation venu de l'Est

    La vague libérale dans l'ex-Union soviétique6(*) diffusée dans ses satellites de l'Europe centrale et orientale au cours de l'année 1989, s'introduit en Afrique d'abord sous la forme de l'effondrement des régimes qui lui sont alliés7(*) et exerce ensuite un effet d'entraînement partout ailleurs en incitant au démantèlement des dictatures.

    C'est donc à la faveur du « vent d'Est » qui a soufflé sur les dictatures que les pays de l'Afrique sub-saharienne, dont le Cameroun, ont pris le chemin de la libéralisation politique au début des années 1990.

    Même si le discours officiel au Cameroun à ce sujet soutient avec insistance que la démocratisation avait été amorcée bien avant cette date et en dehors de toute contrainte extérieure ou interne, force est de constater que huit ans après le retrait du président AHIDJO8(*), le monolithisme politique était toujours maintenu, les droits et libertés des citoyens étroitement encadrés et la séparation des pouvoirs un mythe.

    Il faut donc attendre les années 1990 pour voir l'étau liberticide se desserrer, le multipartisme réhabilité et la démocratie9(*) s'installer, conformément aux recommandations du Sommet de La Baule.

    B- Le discours de La Baule

    Le positionnement du capitalisme et du libéralisme dans un monde désormais unipolaire amène les Etats du Nord à donner une nouvelle orientation à leur coopération avec ceux du Sud. C'est notamment le cas de la France vis-à-vis des pays francophones d'Afrique, dont le président MITTERRAND énonçait les principes lors du 16ème Sommet franco-africain de La Baule (20-21 juin 1990).

    A cette occasion il déclare que « l'augmentation de l'aide aux pays africains dépendra en grande partie des progrès dans le domaine de la démocratisation » et poursuit en disant que l'aide française sera plus « tiède face aux régimes qui se comporteraient de façon autoritaire », tandis qu'elle sera plus « enthousiaste envers ceux qui franchiront avec courage le pas de la démocratisation »10(*). Le Président MITERRAND poursuit en disant que la démocratie, « c'est un principe universel qui vient d'apparaître aux peuples de l'Europe centrale comme une évidence absolue au point qu'en l'espace de quelques semaines, les régimes considérés comme les plus forts ont été bouleversés ».

    Ce ton ferme du sommet de La Baule, bien qu'ayant suscité inquiétudes et angoisses chez les dirigeants africains11(*), a été un facteur déterminant pour leur engagement sur la voie de l'instauration des Etats de droit. Selon ABDOU DIOUF, en effet, « il n'y a pas trente six chemins vers la démocratie. Il faut un Etat, il faut le développement et il faut l'apprentissage des libertés »12(*).

    De toute évidence, en tant que membre de la communauté des Etats francophones d'Afrique, le Cameroun a lui aussi été marqué par les stigmates de cette nouvelle ère, qui oblige désormais les gouvernants à composer avec les citoyens, en mettant un accent sur la participation de ces derniers à la vie publique et sur le nécessaire respect de leurs droits et libertés fondamentaux.

    Il importe aussi de souligner l'apport des organisations internationales à la réalisation de cet objectif.

    Paragraphe 2 : L'action des organisations internationales

    L'action des organisations internationales en faveur de la promotion et de la protection des droits de l'homme, à travers l'instauration de l'Etat de droit et l'adhésion aux principes démocratiques, est aussi le fait des institutions financières internationales et de la coopération (A), relayées par l'Organisation Internationale de la Francophonie (OIF) et le « Commonwealth » dont fait partie le Cameroun (B).

    A- Les institutions financières et la coopération

    Les institutions financières internationales, notamment le FMI, et la Banque mondiale, mais aussi des pays avec lesquels le Cameroun entretient des relations dans le cadre de la coopération bilatérale et multilatérale (France, Etats-Unis, Allemagne, Grande Bretagne...), ont oeuvré pour l'instauration d'une culture des droits de l'homme.

    En effet, dès la fin des années 1980, le système du libéralisme économique et le vent de démocratie qui gagnent le monde, amènent ces institutions et pays à imposer aux Etats du Sud des conditions liées à l'instauration de l'Etat de droit et au respect des droits de l'homme, pour pouvoir bénéficier de l'aide13(*) au développement. Le couple aide et démocratisation s'établit ainsi comme une nouvelle règle dans les relations entre Etats du Nord et ceux du Sud, et la crise économique qui frappe de plein fouet ces derniers dont le Cameroun, ne leur laisse aucun choix face à ces exigences. Ce mouvement en faveur du respect des droits de l'homme a également été impulsé dans le cadre de l'Organisation Internationale de la Francophonie et du « Commonwealth 14(*)».

    B- L'influence de l' OIF et du « Commonwealth »

    Le Cameroun est membre de ces deux organisations depuis respectivement 1991 pour la Francophonie15(*), et 1995 pour le « Commonwealth ». Cette double appartenance est le fait de l'héritage colonial16(*).

    Les Etats regroupés au sein des organisations telles que l'OIF et le « Commonwealth », sous l'impulsion respective de la France et de la Grande-Bretagne, ont fait du respect des droits et libertés de la personne une préoccupation principale de leurs textes fondateurs. C'est ainsi que la Charte de la Francophonie consacre comme objectifs prioritaires l'aide à l'instauration et au développement de la démocratie, la prévention des conflits et le soutien à l'Etat de droit et aux droits de l'homme.

    A l'occasion de plusieurs sommets de la Francophonie, les chefs d'Etat et de gouvernement n'ont pas manqué de réaffirmer leur attachement aux idéaux des droits de l'homme en précisant que : « Francophonie et droits de l'homme sont indissociables »« qu'il n'existe pas de développement sans liberté, ni de liberté durable sans développement véritable »17(*).

    Des actions en vue d'accompagner les pays membres dans la mise en place d'un cadre juridique propice à l'éclosion et au renforcement d'une culture démocratique et des droits de l'homme ont suivi la tenue des différents sommets de la Francophonie et du « Commonwealth ». Il s'agit, en ce qui concerne l'OIF, de la tenue des réunions thématiques18(*) et des conférences19(*), mais surtout du Symposium international sur le « bilan des pratiques de la démocratie, des droits et des libertés dans l'espace francophone » en novembre 2000 à Bamako au Mali.

    Ce symposium qui s'est achevé sur une déclaration dite « Déclaration de Bamako » était l'occasion pour les ministres et chefs de délégation des Etats et gouvernements membres, de proclamer que « La démocratie pour les citoyens se juge avant tout à l'aune du respect scrupuleux et de la pleine jouissance de leurs droits...assortis de mécanismes de garanties ».

    Les Etats membres du « Commonwealth » ont pour leur part réaffirmé leur engagement pour la cause des droits de l'homme lors de leur rencontre de Harare (Zimbabwe) dans une déclaration qui a sanctionné la rencontre de leurs chefs d'Etats et de gouvernement (déclaration de Harare du 20 octobre 1991).

    En marge de l'influence exercée par ces deux organisations, le Cameroun a très souvent bénéficié de l'apport de leurs experts dans le cadre de la mise en place et du suivi du processus démocratique. Toutefois, il faut admettre qu'à ces facteurs externes se sont joints des facteurs internes qui ont contribué à la maturité des populations, dont l'impact sur le changement d'attitude des gouvernants n'a pas été des moindres.

    SECTION 2 : LES FACTEURS ENDOGENES

    La dynamique qui entoure la prise de conscience du respect de la dignité humaine en Afrique en général et au Cameroun en particulier ne s'est pas seulement limitée à l'influence des facteurs exogènes précédemment analysés. Elle a également été relayée au plan interne, par les revendications des acteurs sociaux en faveur de plus de justice et de l'instauration d'un environnement propice à l'éclosion des droits et libertés.

    Le contexte socio-politique tendu (Paragraphe 1) et les pressions sur les gouvernants (Paragraphe 2) qui s'en sont suivies ont contribué à finalement infléchir les relents conservateurs de ces derniers.

    Paragraphe 1 : Le contexte socio-politique tendu

    Dans les années 1990, le contexte socio-politique est marqué par des revendications en faveur de davantage de démocratie et de libertés.

    En réalité, au-delà des luttes essentiellement politiques visant une ouverture démocratique à travers l'instauration du multipartisme, le « mouvement insurrectionnel pro-démocratique des années 1991-1992 est d'abord pour le commun des citoyens, une demande et une revendication de libertés »20(*).

    La précision des causes du mécontentement des populations (A) nous permettra d'en évoquer les formes d'expression (B).

    A- Les causes du mécontentement des populations

    Les causes immédiates qui déclenchent le mécontentement des populations et partant la revendication pour le changement démocratique, s'expliquent par la réaction de ces dernières à l'avilissement dont ils étaient l'objet.

    Il s'agit de l'accumulation des arriérés de salaire, du non paiement et de la suppression des bourses aux étudiants, des baisses consécutives des salaires dans la fonction publique, de la faillite dans la gestion des affaires de l'Etat aggravée par une crise économique aiguë, de la confusion des pouvoirs dans l'appareil étatique, du règne du parti unique, de la répression sévère de toute critique à l'encontre des gouvernants et des violations des droits de l'homme.

    Cette situation a favorisé la précarisation des conditions de vie, aggravé la misère sociale au profit de la classe dirigeante et ouvert la porte à diverses revendications.

    B- L'expression des revendications

    C'est dans un tel contexte que des troubles ont commencé à se manifester, orientant les demandes vers l'instauration du multipartisme et la mise en place des mécanismes institutionnels démocratiques.

    Toutes les composantes de la population se sentaient concernées (syndicalistes, religieux, politiques, défenseurs des droits de l'homme) et invitaient à se prononcer contre l'intolérance, l'incompréhension et la volonté du pouvoir en place à maintenir le « statu quo ».

    Le 26 mai 1990 constitue une date mémorable dans le processus de recomposition politique ainsi engagé. Ce jour en effet, se tenait à Bamenda dans la province du Nord-Ouest, un regroupement politique à l'initiative du Front Social Démocratique (SDF), un parti politique n'ayant pas encore de reconnaissance légale et qui avait décidé de rompre avec le parti unique. La manifestation, violemment réprimée par les forces de l'ordre s'était soldée par de nombreuses victimes. Mais, elle ouvrait ainsi la porte à une vague de contestations dont le dénouement interviendra quelques mois plus tard avec l'avènement de la législation sur les partis politiques21(*), accompagnée d'une série d'autres textes législatifs d'inspiration libérale.

    Mais le résultat ainsi obtenu ne s'est pas fait sans pressions sur les pouvoirs publics.

    Paragraphe 2 : Les pressions diverses sur les gouvernants

    A côté des revendications qui caractérisent le climat socio-politique tendu, les gouvernants ont eu à faire face à des pressions internes sur les plans économique (A) et politique (B).

    A- Les pressions économiques

    Dans un environnement économique déjà précaire du fait de la crise économique, les leaders politiques de l'opposition ont mis au point des moyens de pression visant à faire plier les gouvernants à leurs exigences22(*).

    C'est ainsi qu'on abouti à l'opération dite « villes mortes » caractérisée par l'incitation à l'arrêt des activités économiques dans les villes du pays. Une stratégie de désobéissance civile est également mise sur pied, marquée par l'appel des opérateurs économiques à l'incivisme fiscal.

    Ces pressions ont contribué à mettre en difficulté les pouvoirs publics dont l'autorité était bafouée et qui de ce fait, avaient de plus en plus du mal à honorer leurs engagements au plan interne et vis-à-vis des institutions financières internationales23(*).

    Aux effets des pressions économiques, il faut également ajouter les pressions politiques qui ont contribué à l'instauration d'un environnement démocratique et respectueux des libertés.

    B- Les pressions politiques

    Elles étaient surtout exercées par les militants du parti unique24(*)secoué par un courant dit « progressiste », favorable à l'avènement de la concurrence politique et soucieux de l'instauration des réformes au sein du parti. Il s'agit là d'une action qui a révolutionné le fonctionnement interne du RDPC et qui a abouti en son sein à la compétition électorale aussi bien pour la désignation des responsables à tous les niveaux, que pour la détermination des candidats aux élections municipales et législatives de mars 1992, rompant ainsi avec la pratique de leur cooptation par les instances dirigeantes.

    Ce courant réformateur impulsé au sein du parti au pouvoir25(*) a influencé l'attitude des gouvernants qui ont de ce fait engagé des réformes favorables à l'instauration d'un environnement politique plus libéral et par conséquent, enclin à la tolérance, au dialogue et au respect des citoyens.

    La nécessité du respect des droits de l'homme au Cameroun se situe dans un contexte général d'éveil des consciences, par rapport au respect qui est dû à la personne humaine, quelles que soient ses origines, sa condition sociale. Cette situation justifie sans doute la conjonction de facteurs et d'évènements qui, dès la fin des années 1980, ont contraint de nombreux dirigeants des pays du Sud, à se mettre à l'école de la construction progressive de l'Etat de droit et de l'acquisition de la culture des droits de l'homme.

    Aussi importe t-il en ce qui concerne le Cameroun, de décrire et d'analyser les manifestations de cette émergence des droits de l'homme.

    CHAPITRE II :

    LES MANIFESTATIONS DE L'EMERGENCE DE LA CULTURE DES DROITS DE L'HOMME

    La fin du 20ème siècle est caractérisée par le phénomène d'internationalisation des droits de l'homme. En effet, sous l'impulsion de l'ONU, une importante oeuvre de codification de ces droits a été menée dans le cadre du droit international (conventionnel), les Etats étant constamment rappelés à leur devoir de s'y rallier.

    Aussi a-t-il été réaffirmé lors de la deuxième conférence mondiale sur les droits de l'homme tenue à Vienne en 1993, qu' « il est du devoir des Etats quel qu'en soit le système politique, économique et culturel, de promouvoir et de protéger tous les droits de l'homme et toutes les libertés fondamentales ».

    Cette mouvance dans laquelle le Cameroun s'est engagé se matérialise à travers l'action des pouvoirs publics (Section 1) et l'action de la société civile (Section 2).

    SECTION 1 : L'ACTION DES POUVOIRS PUBLICS

    Dans son acception contemporaine, l'Etat a pour mission non seulement d'assurer la sécurité juridique des rapports politiques et sociaux, mais aussi et surtout de promouvoir et de garantir les droits et libertés fondamentaux des citoyens.

    La constitutionnalisation des droits de l'homme (Paragraphe 1), l'action du législateur (Paragraphe 2) qui à travers les lois en fixe le cadre d'exercice et de jouissance par les citoyens, ainsi que la création des cadres de promotion26(*) et de protection de ces droits (Paragraphe 3) constituent les axes majeurs de l'action des autorités étatiques en faveur de leur effectivité.

    Paragraphe 1 : La constitutionnalisation des droits de l'homme

    En tant que norme suprême, loi fondamentale de l'Etat, la constitution est le cadre privilégié dans lequel ces droits sont proclamés, énumérés et garantis. C'est ainsi que les constitutions successives du Cameroun27(*) ont toujours comporté des dispositions relatives aux droits de l'homme.

    Sans avoir besoin de revenir sur chacune de ces constitutions, les droits proclamés de façon générale sont classiques (A), auxquels il faut ajouter les droits nouvellement consacrés par la Constitution camerounaise du 18 janvier 1996 (B).

    Toutefois, avant de se pencher sur les dispositions constitutionnelles y relatives, il convient d'observer que les différentes étapes qui ont marqué la vie politique et sociale du Cameroun ont fortement influencé la perception de l'éthique des droits de l'homme. Cette situation s'est elle-même matérialisée par une importante oeuvre de codification de ces droits qui a atteint une vitesse de croisière dès 1990. A cet égard, leur inscription dans le droit positif est la manifestation concrète de l'émergence des droits de l'homme au Cameroun, ainsi que le témoigne la constitution de 1996.

    A- Les droits classiques

    La constitution de 1996, comme d'ailleurs les précédentes, proclame dans son préambule que « l'être humain possède des droits inaliénables et sacrés, sans aucune discrimination ». Elle affirme son « attachement aux libertés fondamentales inscrites dans tous les instruments internationaux relatifs aux droits de l'homme auxquels le Cameroun est partie, notamment la Déclaration universelle des droits de l'homme, la Charte des Nations Unies, la Charte africaine des droits de l'homme et des peuples... »

    Comme droits et libertés classiques, le texte constitutionnel pose les principes ci-après :

    - l'égalité de tous en droits et en devoirs ;

    - la garantie de la liberté et de la sécurité à chaque individu ;

    - le droit de s'établir en tout lieu du territoire ainsi que la liberté d'aller et venir ;

    - l'inviolabilité du domicile et de la correspondance, le principe de la légalité des infractions et des peines ainsi que la non rétroactivité de la loi ;

    - le libre accès à la justice ;

    - la liberté d'opinion, de croyance, de conscience et du culte ;

    - la liberté d'expression, de presse, de réunion et d'association, la liberté syndicale ;

    - la protection de la famille ;

    - le droit de propriété, le droit à l'instruction et le droit de travailler.

    Il faut cependant souligner que les principes ainsi énumérés dont la garantie incombe à l'Etat, doivent pour la plupart s'exercer soit dans le cadre de restrictions relatives au respect des droits d'autrui, soit sous réserve des prescriptions légales. En réalité, « Les droits de chacun n'ont de réalité que s'ils découlent de l'ordre juridique en vigueur, et si leur exercice s'arrête là où commencent les droits d'autrui et les exigences de la vie en société, conformément aux règles dictées par l'intérêt général, sans distinction aucune »28(*).

    Mais la constitution de 1996 fait preuve d'originalité par rapport à ses devancières lorsqu'elle consacre de nouveaux droits.

    B- Les nouveaux droits consacrés par la constitution

    La loi constitutionnelle du 18 janvier 1996 portant révision de la constitution du 02 juin 197229(*) opère une avancée significative dans la garantie des droits de l'homme au Cameroun30(*), ceci à travers l'énonciation dans son corpus, de principes novateurs.

    C'est ainsi qu'à côté des droits habituellement reconnus et énumérés ci-dessus, on retrouve pour la première fois dans l'univers constitutionnel :

    - La reconnaissance du droit à la vie et ses diverses implications. Il s'agit là d'une marque d'attention particulière pour l'intégrité physique et morale de la personne, qui n'avait que trop tardé à être formellement reconnue par la loi fondamentale.

    - L'énonciation de la présomption d'innocence. « Tout prévenu est présumé innocent jusqu'à ce que sa culpabilité soit établie au cours d'un procès conduit dans le strict respect des droits de la défense ». La proclamation de ce droit constitue indubitablement la constitutionnalisation des exigences relatives au droit à un procès équitable.

    Des préoccupations contemporaines y sont également intégrées et débouchent sur la diversification des garanties en fonction des personnes ou des groupes identitaires. Ce sont là des droits à coloration sociale qui sont énoncés en terme de protection non seulement de la famille, mais aussi de la femme, des jeunes, des personnes âgées et des personnes handicapées. Cette protection qui leur est reconnue constitue en réalité une prise de conscience de la vulnérabilité de ces différents groupes sociaux.

    L'une des innovations de la constitution de 1996 réside également dans la formule « l'Etat assure la protection des minorités et préserve les droits des populations autochtones conformément à la loi »31(*). Par ailleurs, le paragraphe 2 de l'article 1er dispose que l'Etat « reconnaît et protège les valeurs traditionnelles conformes aux principes démocratiques, aux droits de l'homme et à la loi ». Cette disposition s'analyse en fait comme le droit pour ceux des citoyens qui y sont attachés, à ce que les valeurs traditionnelles ne soient pas a priori interdites32(*).

    Aux droits sociaux garantis, se greffent le droit de grève à côté de la liberté syndicale33(*), la liberté de la communication qui est une extension de la liberté d'expression, et le droit à l'instruction avec l'enseignement primaire qui est désormais obligatoire.

    Enfin, il convient de relever l'entrée dans le bloc des droits constitutionnels, du droit à un environnement sain, dont l'implication immédiate est le devoir pour tous de protéger l'environnement.

    Comme on peut le constater, aussi bien par son contenu que par sa valeur juridique constitutionnellement consacrée34(*), le préambule du texte constitutionnel actuellement en vigueur au Cameroun réalise une avancée significative dans la voie de la construction d'un Etat de droit. C'est pour certains juristes, « la consécration d'une rupture, du passage d'un ordre juridique globalement liberticide à un ordre juridique résolu à se montrer protecteur des libertés »35(*). D'ailleurs, l'incorporation du préambule à la constitution assigne une valeur constitutionnelle et une force contraignante incontestable aux droits et devoirs qui y sont énoncés.

    Si la constitution de 1996 constitue un tournant décisif pour la promotion et la protection des droits de l'homme au Cameroun, il ne faut cependant pas perdre de vue que les droits ainsi consacrés sont le fruit d'une longue et patiente construction du législateur camerounais dans le but de leur assurer un encadrement et une garantie effectifs. Aussi peut-on dire que l'émergence d'une culture des droits de l'homme est plus palpable à travers l'action normative du législateur et les nombreuses réformes législatives entreprises depuis lors.

    Paragraphe 2 : L'encadrement législatif des droits et libertés

    La constitution confie au pouvoir législatif le soin de règlementer les droits et libertés, même si l'exécutif peut intervenir en la matière, en application d'autres dispositions constitutionnelles. Cette prérogative du législateur est l'expression même de la séparation des pouvoirs, seul gage de la garantie fondamentale des droits de l'homme. C'est ainsi que selon l'alinéa 2 de l'article 26 de la constitution, sont du domaine de la loi « les droits, garanties et obligations fondamentaux du citoyen, le statut des personnes et le régime des biens». De nombreux droits qui y sont énoncés renvoient alors expressément à la loi pour leur réglementation.

    Fort de cette attribution constitutionnelle, le législateur camerounais a entrepris une vaste oeuvre d'encadrement des droits de l'homme qui concerne les lois sur les libertés (A), la législation sur les droits des catégories spécifiques (B), et la réforme de la procédure pénale (C).

    A- Les lois sur les libertés et les autres domaines relatifs aux droits de l'homme

    La décennie 1990 constitue une période forte de l'émergence des droits de homme au Cameroun. En effet, suite aux revendications et pressions en faveur de davantage de démocratie et de libertés, le concept des droits de l'homme est apparu en tête des préoccupations du législateur, et ceci sous l'impulsion du pouvoir politique.

    Aussi l'année 1990 constitue t-elle une date historique dans l'affirmation de ces droits en ce sens que, le 19 décembre, l'Assemblée nationale adopte une série de lois, ce qui marque une réelle volonté politique de doter le pays de lois libérales et d'en faire un véritable Etat de droit. La législation s'enrichit désormais de textes qui affirment et renforcent aussi bien les droits et libertés individuels et collectifs, que les droits civils, politiques, économiques, sociaux et culturels.

    Sans être exhaustifs, quelques lois nous permettront d'illustrer les avancées opérées en matière des droits de l'homme. Ce sont : la loi sur la liberté d'association (1), la loi relative à la communication sociale (2), la loi portant code du travail (3) et quelques autres textes législatifs (4).

    1- La loi n°90/53 du 19 décembre 1990 portant liberté d'association

    Jusqu'à cette date, la liberté d'association était régie par la loi n°67/LF/19 du 12 juin 1967 qui visait plus à verrouiller cette liberté jugée à l'époque dangereuse, qu'à en garantir le libre exercice36(*).

    La loi de 1990 qui abroge celle de 1967 consacre enfin un régime juridique plus approprié à la liberté d'association qu'elle définit dans ses dispositions générales comme « la faculté reconnue à toute personne physique ou morale de créer une association, d'y adhérer ou de ne pas y adhérer ». Elle précise le cadre juridique de son exercice37(*) et en définit les modalités de contrôle38(*), ce qui nous amène à affirmer au regard de la pratique qui en découle, que la liberté d'association au Cameroun est désormais une réalité concrète qui reste néanmoins toujours sous contrôle administratif et judiciaire, dans le but de préserver l'ordre public et les bonnes moeurs.

    2- La loi n°90/52 relative à la liberté de la communication sociale

    La loi relative à la liberté de la communication sociale fixe le cadre d'exercice de la liberté d'expression, de presse, qui est énoncée dans la constitution.

    Cette loi remplace celle n°66/LF/18 du 21 décembre 1966 sur la presse dont le caractère libéral était de plus en plus contesté eu égard à l'environnement sociopolitique qui l'avait inspiré. En effet, la loi de 1966 était intervenue dans un contexte de terrorisme et de subversion qui a suivi « les indépendances », et la peur de la sécession ou de la déstabilisation du régime au pouvoir n'incitait pas le législateur de l'époque à libéraliser l'instrument de la propagation des « idées qui dérangent »39(*).

    Avec le « printemps camerounais des libertés »40(*), la loi de 1990 modifiée et complétée par celle n°96/04 du 4 janvier 1996 régit non plus seulement la presse, mais toutes les formes et tous les modes de communication sociale, notamment : l'imprimerie, la librairie, les organes de presse, les entreprises éditrices, de distribution et de communication audiovisuelle, l'affichage, ainsi que la profession de journaliste41(*).

    Il s'agit d'une véritable révolution dont les traits caractéristiques sont :

    - L'instauration d'un régime de déclaration préalable pour les organes de presse au détriment de l'autorisation préalable (article 2);

    - La liberté d'imprimerie et de librairie (article 3) ; 

    - La liberté de publication et de distribution des organes de presse (article 8) ;

    - La liberté de la communication audiovisuelle (article 36) ;

    - La suppression de la censure administrative préalable (article 14 nouveau, loi de 1996) ;

    - L'interdiction de toute perquisition dans les lieux d'élaboration de fabrication, d'impression et de conservation documentaire des organes de communication sociale... (article 51 nouveau, loi de 1996) ;

    - L'aménagement d'un recours juridictionnel à procédure spécifique contre les mesures de saisie ou d'interdiction des organes de presse (article 17 nouveau, loi de 1996).

    Le nouveau cadre légal ainsi mis en place a largement contribué à l'éclosion de nombreux organes de presse au Cameroun, au développement des entreprises de communication audiovisuelle et de publicité42(*).

    L'une des conséquences directes du renforcement de la liberté d'expression, de la libéralisation de la presse et du paysage audiovisuel, est la dépénalisation de la subversion par la loi n°90/46 du 19 décembre 1990, abrogeant l'ordonnance n°62/OF/18 du 12 mars 1962 portant répression de la subversion.

    3- La loi n°92/007 du 14 août 1992 portant code du travail

    L'adoption de cette loi rentre dans le cadre de la matérialisation du droit au travail qui selon les termes de son article 2, est « reconnu à chaque citoyen comme un droit fondamental. L'Etat doit tout mettre en oeuvre pour l'aider à trouver un emploi et à le conserver lorsqu'il l'a obtenu ».

    Cette loi exclut de son champ d'application les personnels de l'Etat et intervient pour régir les rapports de travail entre les travailleurs et les employeurs (du secteur privé essentiellement) ainsi qu'entre ces derniers et les apprentis placés sous leur autorité.

    La loi de 1992 qui abroge celle du 27 novembre 197443(*) comporte de nombreuses innovations qui vont dans le sens du respect des droits des travailleurs44(*), notamment :

    - le droit de fonder des syndicats et de s'y affilier45(*). L'article 3 énonce en effet que : « la loi reconnaît aux travailleurs et aux employeurs, sans restriction d'aucune sorte et sans autorisation préalable, le droit de créer librement des syndicats professionnels ayant pour objet l'étude, la défense, le développement et la promotion de leurs intérêts (...) ainsi que le progrès social, économique, culturel et moral de leurs membres ».

    - le droit de grève (article 157), lorsqu'il est exercé dans les conditions fixées par la loi c'est-à-dire, après épuisement et échec des procédures de conciliation et d'arbitrage. Dans son paragraphe 4, l'article 157 définit la grève comme « le refus collectif et concerté par tout ou partie des travailleurs d'un établissement de respecter les règles normales de travail en vue d'amener l'employeur à satisfaire leurs réclamations ou revendications ».

    Le souci constant du législateur d'innover et d'améliorer l'exercice des droits et libertés l'a amené à voter au fil des ans, de nombreuses lois dans divers domaines y relatifs.

    4- Les autres textes législatifs

    La révolution juridique orchestrée par l'Assemblée nationale en 1990 lors des travaux de sa session baptisée « session des libertés » s'est étendue à plusieurs autres domaines concernant les droits de l'homme. C'est notamment le cas des lois du 19 décembre 1990 :

    - La loi n°90/43 relative aux conditions d'entrée, de séjour et de sortie du territoire camerounais46(*), qui organise le droit de circuler librement. La liberté d'aller et de venir est de ce fait garantie par la loi, et ne peut subir de restrictions que dans le cadre d'une situation d'exception dont la proclamation est strictement réglementée. Cependant, l'innovation majeure de cette loi est la suppression de l'exigence d'une autorisation maritale, pour permettre aux conjointes de sortir du territoire camerounais.

    - La loi n°90/54 relative au maintien de l'ordre, la loi n°90/55 portant régime des réunions et des manifestations publiques, la loi n°90/56 relative aux partis politiques.

    En ce qui concerne les droits politiques, tant qu'il n'est pas frappé d'une incapacité prévue par la loi, tout citoyen camerounais remplissant les conditions d'âge et de moralité a le droit de participer aux élections comme candidat ou comme électeur suivant un système de suffrage universel et égal. (Loi n° 91/020 du 16 décembre 1991 portant conditions d'élection des députés à l'Assemblée nationale, modifiée par la loi du 19 mars 1997, loi n°92/002 du 14 août 1992 sur les conditions d'élection des conseillers municipaux et la loi n°92/10 du 17 décembre 1992 fixant les conditions d'élection et de suppléance à la Présidence de la République).

    On peut aussi signaler entre autres :

    - La loi n°97/009 du 10 janvier 1997 qui intègre dans le code pénal47(*) la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants du 10 décembre 1984. En effet, l'article 132 (bis) qui y a été inséré reproduit la définition conventionnelle de la torture et prévoit également les peines encourues par les auteurs de tels actes. Cet article dispose que :

    « 1. Est puni de l'emprisonnement à vie, celui qui, par la torture, cause involontairement la mort d'autrui.

    2. La peine est un emprisonnement de 10 à 20 ans lorsque la torture cause à la victime la privation permanente de l'usage de tout ou partie d'un membre, d'un organe ou d'un sens.

    3. La peine est un emprisonnement de 5 à 10 ans et une amende de 100.000 à 1.000.000 de francs lorsque la torture cause à la victime une maladie ou une incapacité de travail supérieure à 30 jours.

    4. La peine est un emprisonnement de 2 à 5 ans et une amende de 50.000 à 200.000 francs lorsque la torture cause à la victime soit une maladie soit une incapacité de travail égale ou inférieure à 30 jours, soit des douleurs ou des souffrances mentales ou morales. »

    - La loi n°99/014 du 22 décembre 1999 régissant les organisations non gouvernementales, qui est en réalité une excroissance de la loi sur la liberté d'association qui n'offrait pas à ces dernières une reconnaissance juridique.

    En vertu des dispositions constitutionnelles, le législateur a également étendu son action normative des droits de l'homme à la protection de certaines catégories spécifiques.

    B- La législation sur les catégories spécifiques

    Bien que le principe de la protection de certaines catégories spécifiques de citoyens soit énoncé dans le texte constitutionnel, on constate qu'en la matière, le législateur n'a pas encore pris toute la mesure de la question. Aussi, la législation sur la protection des minorités et les droits des populations autochtones48(*), sur la protection de la famille, des jeunes et des personnes âgées reste t-elle toujours attendue.

    Néanmoins, il ne serait pas convenable d'occulter l'existence de lois relatives à la protection des personnes handicapées (1) et au statut des réfugiés (2).

    1- La loi n°83/013 du 21 juillet 1983 relative à la protection des personnes handicapées

    La loi n° 83/013 définit le handicapé comme « toute personne qui, frappée d'une déficience physique ou mentale, congénitale ou accidentelle, éprouve des difficultés à s'acquitter des fonctions normales à toute personne valide »49(*). Son contenu aborde les aspects liés à la scolarisation et à la formation professionnelle des personnes handicapées, enfants déficients auditifs, visuels et mentaux, à leur intégration socioéconomique et enfin à l'aide sociale dont ils peuvent bénéficier.

    On retient de cette loi qui n'a malheureusement vu intervenir son décret d'application que sept années après50(*), que « la prévention et le dépistage des handicaps, les soins, l'éducation, la formation et l'orientation professionnelle, l'emploi, l'accès aux sports spécialisés ou aux loisirs constituent une obligation de solidarité nationale »51(*) pour laquelle l'Etat contribue par l'octroi des aides individuelles52(*). De même, en ce qui concerne le droit au travail, la loi encourage l'Etat et les entreprises privées à recruter les personnes handicapées chaque fois qu'elles sont aptes à exercer l'emploi postulé53(*).

    Le statut des réfugiés a également fait l'objet d'une attention particulière.

    2- La loi n°2005/006 du 27 juillet 2005 portant statut des réfugiés

    La loi n°2005/006 du 27 juillet 2005 portant statut des réfugiés concerne la réception et la matérialisation dans l'ordre juridique interne, des textes internationaux qui régissent les réfugiés, notamment : la Convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés et son protocole du 31 janvier 1967, ainsi que la Convention de l'OUA54(*) du 10 septembre 1969 régissant les aspects propres aux problèmes des réfugiés en Afrique.

    L'article 6, paragraphe 1 de la loi camerounaise énonce qu'elle « s'applique à tout demandeur d'asile et réfugié sans discrimination au regard de son genre, de sa religion, de sa race ou de sa nationalité ». Une protection leur est accordée dans certaines circonstances55(*) et des droits et obligations leur sont reconnus. Ainsi, tout réfugié régulièrement installé au Cameroun, aux termes de l'article 9 de la loi, bénéficie :

    - De la non discrimination ;

    - du droit de pratiquer sa religion librement ;

    - du droit à la propriété ;

    - de la liberté d'association, de circulation ;

    - du droit d'ester en justice, du droit au travail, à l'éducation, au logement, à l'assistance sociale et publique ;

    - du droit d'obtenir une carte de réfugié et des documents de voyage ;

    - du droit au transfert des avoirs et enfin du droit à la naturalisation.

    Il est bien entendu que l'exercice de ces différents droits comme pour ceux accordés aux nationaux est subordonné au respect des exigences de la réglementation en vigueur.

    Au regard de la place et du rôle important que tient le juge dans la garantie des droits et libertés fondamentaux, il convient aussi de signaler la libéralisation qui caractérise la procédure pénale camerounaise dont la réforme du 27 juillet 2005 est l'expression.

    C - La reforme de la procédure pénale

    Avec l'adoption le 27 juillet 2005 de la loi n°2005/007 portant code de procédure pénale, le Cameroun engage une phase importante de la modernisation et de la mise à niveau de sa législation par rapport aux normes internationales de protection des droits et de la dignité humaine.

    Ce nouveau code qui constitue une véritable révolution dans le cadre juridique et surtout dans l'administration de la justice56(*) au Cameroun, vient reformer et harmoniser les règles de procédure sur l'ensemble du territoire.

    En effet, du fait de son héritage colonial, le Cameroun a depuis longtemps évolué dans une espèce de dualité judiciaire57(*) caractérisée par la coexistence de deux textes dans le domaine de la procédure pénale. Cette situation contribuait à réserver un traitement différent au justiciable, selon qu'il se trouvait dans la partie francophone ou anglophone du pays58(*). Dans la partie francophone, le texte utilisé jusque là était le Code d'instruction criminelle, issu de l'Ordonnance du 14 février 1838 et ses modificatifs subséquents, tandis que dans la partie anglophone, le texte en vigueur était le « Criminal procedure ordinance » de 1958.

    Le renforcement du respect des droits de l'homme et la reconnaissance de la dignité à laquelle toute personne a droit, sont clairement énoncés dans les dispositions de ce nouveau code de procédure pénale. Aussi reprend-il les garanties constitutionnelles portant sur la présomption d'innocence59(*), le droit à l'intégrité physique et morale, ainsi que l'interdiction de la torture, des peines et traitements inhumains ou dégradants60(*).

    De nombreuses innovations en faveur d'un plus grand respect des droits de l'homme concernent :

    - les droits des personnes privées de liberté, notamment le droit de visite et de correspondance (article 238), le droit de constituer un conseil, de recevoir des soins médicaux (article 37), le droit à l'alimentation (article 122 al 4), le droit de demander une mise en liberté sous caution pour les personnes détenues à titre provisoire (article 224), le droit de recourir à l'habéas corpus61(*) (article 584) ;

    - L'introduction de la notion de contrainte par corps62(*), qui ne peut être exercée ni contre les personnes âgées de moins de 18 ans ou de plus de 60 ans, ni contre les femmes enceintes (articles 565) ;

    - La possibilité d'octroyer une indemnisation en raison d'une détention provisoire63(*) ou d'une garde à vue64(*) abusive, à toute personne ayant fait l'objet de telles mesures. Cette disposition constitue une réelle avancée et vient à point nommé pour réparer les injustices et le préjudice inestimable subis jusque là par les prévenus contre qui aucune charge n'était finalement retenue à l'issue du procès ;

    - Il faut également relever la stricte réglementation des délais de garde à vue, qui ne peuvent excéder 48 heures renouvelables une fois, ou deux fois sur autorisation écrite et motivée du Procureur de la République (article 119), et de la détention provisoire qui ne peut excéder 6 mois, mais qui peut être prorogée par ordonnance motivée du juge d'instruction (article 221). La précision sur les délais vient ainsi mettre fin aux gardes à vue et détentions provisoires indéfiniment prolongées et suscitera nous l'espérons, une plus grande célérité dans l'instruction des affaires.

    A quelques mois de son entrée en vigueur65(*), le gouvernement a lancé le 3 mai 2006, une campagne de vulgarisation menée par le Ministère de la justice, dans les dix chefs lieux de province. Il est question « d'assurer l'appropriation par tous les professionnels et praticiens du droit, du nouveau code de procédure pénale »66(*). Mais aussi, d'imprégner les populations qui en sont les premiers bénéficiaires afin de faciliter sa compréhension et son application. Car, il faudra que la justice assure mieux que par le passé la sécurité des personnes, la garantie de la vie et de l'intégrité physique, par la protection des honnêtes citoyens victimes des atteintes à leurs droits, sans abandonner les coupables.

    La manifestation de l'émergence de la culture des droits de l'homme au niveau de l'appareil de l'Etat ne s'est pas seulement limitée à la constitutionnalisation de ces droits et libertés et à leur prise en compte dans le champ législatif. En effet, on note une volonté d'oeuvrer pour leur promotion auprès de tous les acteurs sociaux, ce qui a conduit à la création des cadres de promotion et de protection des droits et libertés.

    Paragraphe 3 : La création des cadres de promotion et de protection des droits de l'homme

    L'action du gouvernement camerounais dans ce sens se décline à travers la création de la Commission nationale des droits de l'homme et des libertés (A) et la mise en place des organes de régulation, de contrôle et de suivi de l'exercice des droits et libertés (B).

    A- La Commission Nationale des Droits de l'Homme et des Libertés (CNDHL)

    Un rappel du contexte de la création de la CNDHL (1) est nécessaire pour mieux comprendre ses missions (2). La présentation de quelques unes de ses activités (3) permettra sans doute de saisir la portée de son action.

    1- Le contexte historique de la création de la CNDHL

    Dès la création de la Commission des droits de l'homme67(*), les Nations unies recommandaient à tous les Etats d'instaurer des « comités locaux » chargés de diffuser les droits de l'homme sur le plan interne. Par la suite, la nécessité de mieux encadrer ces droits sur un plan pratique a amené la communauté internationale à encourager les Etats à créer des institutions nationales pour la promotion et la protection des droits de l'homme ou à les renforcer s'il en existe déjà.

    Mais il faut attendre la fin des années 1980 et surtout la décennie 1990 pour voir se créer de part et d'autre, en Afrique subsaharienne, les premières institutions de cette nature68(*), à un moment où la population réclamait plus de démocratie et de libertés.

    C'est dans ce contexte que le Cameroun voit la création par décret présidentiel en 199069(*), du Comité national des droits de l'homme et des libertés. Cependant, de nombreuses carences et insuffisances ont amené le législateur à réformer cette institution en 200470(*), par le biais de la loi n°2004/016 du 22 juillet 2004 portant création, organisation et fonctionnement de la Commission nationale des droits de l'homme et des libertés. On passe ainsi du « Comité » à la « Commission » dont il importe de préciser les missions.

    2- Les missions de la CNDHL

    A la faveur de la loi de 2004, la CNDHL devient une institution indépendante de consultation, d'observation, d'évaluation, de dialogue, de concertation, de promotion et protection en matière des droits de l'homme71(*). Il s'agit donc d'une entité dont « le but fondamental est de servir de relais entre l'Etat, les pouvoirs publics et la société civile dans la gestion des droits de l'homme et plus particulièrement sous l'aspect promotion et protection de ces droits ». Cette conception de Hamid GRAHAM72(*) est largement partagée par les dispositions de la loi évoquée ci-dessus.

    En effet, au terme de l'article 2, la CNDHL « a pour missions la promotion et la protection des droits de l'homme et des libertés ». A ce titre, elle reçoit toutes dénonciations portant sur les cas de violation y relatifs, diligente toutes les enquêtes et procède à toutes investigations nécessaires sur ces cas de violation, vulgarise par tous moyens, les instruments relatifs aux droits de l'homme et aux libertés et veille au développement d'une culture des droits de l'homme au sein du public...

    Tel qu'il ressort des missions ainsi présentées, la CNDHL a un rôle central et ses activités concourent à l'enracinement des droits de l'homme auprès des différents acteurs sociaux.

    3- Les activités de la CNDHL

    Afin de permettre un meilleur déploiement des activités de la CNDHL, un décret présidentiel a procédé à l'organisation interne de la structure73(*). Mais il faut dire que bien avant cela, la CNDHL a mené de nombreuses activités sur le terrain de la promotion et de la protection des droits de l'homme dont les plus marquantes sont :

    a. Les enquêtes et investigations conduites à la suite des plaintes relatives aux violations des droits de l'homme

    La CNDHL reçoit des requêtes émanant des individus (toutes catégories sociales confondues), des ONG, et même de certaines institutions étatiques74(*), qui donnent lieu à des auditions, des investigations. Ces actions aboutissent à des résultats probants en terme de déclenchement d'actions judiciaires contre les mis en cause, de libération des personnes illégalement gardées à vue ou de paiement de compensations aux victimes ou à leurs familles75(*). La médiation de la CNDHL permet aussi de déboucher sur la conciliation des parties concernées par la violation, de faire des recommandations aux autorités habilitées à mettre fin à la violation76(*).

    b. L'organisation de séminaires de formation à l'intention de groupes ciblés, dont l'activité a une influence directe sur les droits de l'homme

    - C'est ainsi que des responsables administratifs et ceux des forces de maintien de l'ordre ont bénéficié de formations dans diverses localités du pays, à Yaoundé en 1994, Bamenda en mars 1995, Buéa en Mai 1996 et Maroua en 199777(*).

    - En 1996, des magistrats, avocats, notaires et huissiers ont reçu une formation de trois jours sur les droits de l'homme, organisée par la CNDHL, avec le concours financier du gouvernement des Etats-Unis.

    - Du 8 au 11 mai 2006, la CNDHL a organisé à Yaoundé, avec le concours du Commonwealth, un séminaire sur le renforcement des capacités d'une trentaine de fonctionnaires de police et des personnels de l'administration pénitentiaire sur la protection des droits de l'homme et des libertés dans les pénitenciers et dans les commissariats de police.

    c. L'action en faveur de l'introduction des enseignements sur les droits de l'homme dans les programmes scolaires

    Cette action initiée en juin 2004 s'est poursuivie en février 2005 par l'organisation à Yaoundé, des ateliers de préparation des « Cahiers pédagogiques d'enseignement des droits de l'homme au Cameroun ». Prévus pour être opérationnels dès la rentrée académique 2006-2007, ces Cahiers ont été validé lors d'un atelier qui s'est tenu en février 2006. Les programmes définis comprennent les niveaux d'enseignement primaire, secondaire et universitaire, les grandes écoles ainsi que les corps d'armée.

    d. Les visites des lieux de détention

    Il s'agit de la visite des commissariats de police, des brigades de gendarmerie et des établissements pénitentiaires. Cette action est décrite comme étant « l'une des activités courantes » de la CNDHL78(*).

    e. La publication de bulletins d'information79(*) et de documents spécialisés 

    f. La réalisation et l'animation des émissions radiodiffusées

    La CNDHL diffuse sur la CRTV, média audio-visuel gouvernemental, une émission radiophonique hebdomadaire intitulée « Tribune des droits et libertés », dans laquelle elle fait passer des messages sur les situations quotidiennes qui occasionnent les atteintes aux droits des individus et sur la conduite à tenir dans de telles situations.

    g. L'observation des élections

    La nécessité d'être en conformité avec les instruments internationaux régissant les droits de l'homme a inspiré la création des organes de régulation, de contrôle et de leur suivi.

    B - Les organes de régulation, de contrôle et de suivi de l'exercice des droits et libertés

    Elle s'est opérée à travers la création du Comité technique de suivi des instruments internationaux en matière des droits de l'homme (1), l'institution du Programme National de Gouvernance (2), la création du Conseil national de la communication (3) et de l'Observatoire national des élections (4).

    1- Le Comité technique de suivi des instruments internationaux en matière des droits de l'homme

    Crée par le décret n°98/109 du 8 juin 1998, ce comité a pour mission principale de suivre la jurisprudence des organes de contrôle80(*) des droits de l'homme (aussi bien au plan régional qu'au plan universel) et de veiller à ce que le droit interne s'ajuste et se conforme aux instruments internationaux en la matière.

    Ce comité n'a malheureusement pas encore été rendu opérationnel, ce qui n'est pas le cas du Programme national de gouvernance.

    2- Le Programme national de gouvernance (PNG)

    Annoncé par le Président de la République en 199581(*), le PNG est mis en place par un arrêté du Premier ministre du 11 août 1998, fixant le cadre institutionnel de son exécution. L'adoption en 1999 du document de stratégie globale de mise en oeuvre de ce programme marque le début de ses activités82(*) qui ont depuis lors contribué à :

    - déclencher la réforme administrative en vue de la mise en place d'une administration publique plus efficace et plus proche des usagers, à travers la simplification des procédures ;

    - consolider l'Etat de droit par l'initiation de profondes réformes judiciaires visant à mettre en place un environnement juridique et judiciaire qui garantit la sécurité des personnes, des biens et des investissements ;

    - renforcer la participation des citoyens et de la société civile dans la gestion des affaires publiques, à travers l'amélioration du système électoral, la mise en place des structures de la décentralisation, la défense et la promotion des droits de l'homme ;

    - renforcer la transparence dans la gestion des affaires publiques en luttant contre la corruption83(*).

    La nécessité de réguler le secteur de la communication sociale a également été prise en compte avec la création du Conseil national de la communication.

    3- Le Conseil national de la communication (CNC)

    Le décret n°91/287 du 21 juin 1991 porte création, organisation et fonctionnement du CNC. La création de cet organe de régulation du secteur de la communication se situe dans le cadre de la mise en application des dispositions de la loi de 1990, relative à la liberté de la communication sociale84(*).

    Le CNC est chargé de promouvoir les actions tendant à l'éducation au respect des règles de déontologie dans son domaine d'action. En effet, avec la libéralisation du champ médiatique intervenue en 1990, il y a eu un véritable « boom » de la presse privée. Cette situation a occasionné de la part de certains organes de presse, de nombreuses dérives dues au non respect de l'éthique et de la déontologie de la profession de journaliste et à la commission d'infractions de droit commun réprimées par le Code pénal85(*). L'importance du rôle du CNC dans la régulation, mais surtout l'encadrement des acteurs du secteur de la communication se trouve ainsi justifiée.

    En matière électorale, la question de la mise en place d'un organe indépendant a suscité dans la classe politique des débats houleux quant à la dénomination et aux attributions d'un tel organe. La création de l'Observatoire national des élections est venue mettre un terme à ces débats. 

    4- L'Observatoire national des élections (ONEL)

    La création de l'ONEL86(*) par la loi n°2000/16 du 19 décembre 2000 participe de la volonté d'améliorer le système électoral et partant de donner une garantie supplémentaire au droit de vote reconnu à tout citoyen qui en a les capacités.

    En effet, l'ONEL a pour mission de veiller au respect des règles du jeu électoral tout au long du processus. Aux termes de l'article premier de son texte fondateur, il s'agit d' « une structure indépendante chargée de la supervision et du contrôle des opérations électorales et référendaires ». Et l'article 2 précise que « la mission de l'ONEL est de contribuer à faire respecter la loi électorale de manière à assurer la régularité, l'impartialité, l'objectivité, la transparence et la sincérité des scrutins, en garantissant aux électeurs, ainsi qu'aux candidats en présence, le libre exercice de leurs droits ».

    Bien que selon la loi qui l'institue, l'ONEL n'intervient pas directement dans l'organisation matérielle des scrutins, sa participation n'en est pas moins déterminante pour permettre l'accomplissement des missions qui lui sont dévolues. C'est ainsi que l'article 6 énonce dix huit attributions parmi lesquelles on peut retenir :

    - La supervision et le contrôle : des opérations d'établissement, de conservation et de révision des listes électorales ; des opérations de distribution des cartes électorales ; de l'impression des documents électoraux ;

    - Il veille : à la régularité de la composition des membres des bureaux de vote ; au bon déroulement de la campagne électorale afin d'assurer l'égalité entre les candidats ;

    - Il vérifie la régularité des opérations de vote, de dépouillement du scrutin, des décomptes des suffrages87(*).

    Une analyse transversale de la loi portant création de l'ONEL et les premières expériences de son fonctionnement permettent de conclure qu'il s'agit d'une avancée non négligeable dans le processus de consolidation des institutions démocratiques au Cameroun, même si un toilettage de ladite loi peut s'avérer nécessaire88(*).

    Manifestement, l'ère de la condescendance vis-à-vis de tout discours relatif au respect des droits de l'homme semble révolue, au regard de l'engagement perceptible des autorités en leur faveur à travers les discours et les actes concrets. C'est ainsi que la consécration normative des droits de l'homme s'est opérée par le renforcement de leur base constitutionnelle, la rénovation des textes liberticides ainsi que la mise en place d'institutions de consultation, de régulation, de contrôle et de suivi en matière des droits et libertés de la personne humaine.

    Cette action impulsée par l'Etat ne saurait cependant garantir à elle seule la sécurité juridique des citoyens, sans le concours des acteurs indépendants jouant un rôle de contrepoids, mais surtout de relais dans l'instauration, l'acquisition et la consolidation de cette culture des droits de l'homme.

    SECTION 2 : L'ACTION DE LA SOCIETE CIVILE 

    Depuis 1990, à la faveur du vent de libéralisation, l'idée de société civile a pris corps sur la scène socio-politique des pays africains. La dynamique libérale ainsi insufflée a vu intervenir aux côtés de l'Etat, de nouveaux acteurs dans le champ de la défense et de la promotion des droits des individus, désignés sous le terme générique de société civile.

    En prenant en compte la définition de la société civile selon laquelle c'est « la fraction de la société globale située en dehors des structures de l'Etat et agissant à travers les structures de types associatives, coopératives ou associations de défense des droits et des intérêts, hors du cadre des partis politiques »89(*), on peut en déduire que la société civile est constituée des acteurs privés. Et que ces derniers agissent pour la défense des intérêts communs, en toute indépendance et à l'abri de toute influence des gouvernants.

    Dans le secteur des droits de l'homme, ces acteurs sont des ONG ainsi que des associations de défense et de promotion des droits de l'homme90(*) dont l'action contribue au renforcement du cadre normatif et institutionnel (Paragraphe 1) et à l'amélioration des pratiques respectueuses de ces droits (Paragraphe 2).

    Paragraphe 1 : La contribution des ONG et associations au renforcement du cadre normatif et institutionnel

    La contribution des associations de défense des droits de l'homme se manifeste par leur implication dans le processus de prise de décision par les autorités publiques (A) et par leur influence sur le renforcement du cadre normatif des droits de l'homme (B).

    A- L'implication dans certaines instances de concertation et de décision

    L'essor des organisations de la société civile a permis à la démocratie de trouver un terreau fertile pour son expression. L'une des manifestations de cette expression est la participation des organisations de la société civile au processus de prise de décisions qui aboutit à des propositions concrètes faites aux pouvoirs publics sur des questions spécifiques.

    C'est ainsi que l'approche participative privilégiée par les gouvernants a abouti à la désignation des représentants des ONG et associations dans divers organes, comités et commissions. Aussi interviennent-elles dans la mise en oeuvre du PNG à travers son Comité de pilotage91(*). Leurs représentants siègent au sein du Comité ad hoc, de l'Observatoire92(*) et des Cellules ministérielles de lutte contre la corruption, de la Commission nationale anti-corruption93(*), ainsi que d'autres organes consultatifs crées par les pouvoirs publics.

    A travers cette implication dans les organes de concertation et de décision, les organisations de la société civile ont ainsi l'occasion d'influencer le cadre normatif des droits de l'homme.

    B- L'influence sur le renforcement du cadre normatif

    La participation de la société civile à la Conférence tripartite 94(*) de novembre 1991 a été une expérience bénéfique pour la démocratie, et les contributions recueillies ont permis des avancées notables vis-à-vis du dispositif législatif et réglementaire au Cameroun. A diverses occasions, les ONG et associations ont réussi à faire intégrer leurs préoccupations. Ces actions se sont manifestées entre autres, par leurs contributions à la réforme constitutionnelle de 1996, à la mise en place d'un cadre juridique relatif à la protection de l'environnement et de la nature, à la loi sur la gestion et l'exploitation forestière, à l'aménagement d'un système électoral qui donne des garanties des élections libres, transparentes95(*).

    Les contributions de la société civile au renforcement du cadre normatif et institutionnel ont pour effet d'améliorer les pratiques respectueuses des droits de l'homme.

    Paragraphe 2 : La contribution à l'amélioration des pratiques respectueuses des droits de l'homme

    Trois axes majeurs permettent d'analyser la contribution de la société civile à l'amélioration des pratiques respectueuses de la dignité humaine. Ils s'articulent autour des campagnes d'éducation aux droits de l'homme (A), de l'action des associations en faveur des groupes vulnérables (B) et de la dénonciation des violations des droits de l'homme (C).

    A- Les campagnes d'éducation aux droits de l'homme

    Les actions de la société civile dans ce cadre participent d'une démarche préventive qui vise à faire que les citoyens de tous bords s'approprient l'esprit des droits de l'homme, les intègrent dans les pratiques quotidiennes, afin de mieux lutter contre leurs violations.

    La contribution des ONG ou associations des droits de l'homme (1) et l'action de l'Eglise (2), en tant que composantes de la société civile, nous permettra de mieux cerner l'impact de cette éducation.

    1- La contribution des ONG ou associations

    Leur action en faveur de l'éducation est assez édifiante. En effet, l'une de leur principale mission est « d'amener les individus et les populations à formuler les problématiques de la vie quotidienne en terme de droits fondamentaux »96(*). L'accomplissement de cette mission passe par la diffusion des textes y relatifs, leur vulgarisation, à travers les conférences, tables rondes, l'organisation des sessions de formation, les colloques ou séminaires, l'assistance juridique aux victimes des violations des droits de l'homme, les supports de publication. C'est par exemple le cas de la publication par l'ONG Nouveaux droits de l'homme (NDH), d'un magazine mensuel sur la paix, la démocratie et le développement sous le titre Libertés News, même si la périodicité mensuelle n'est pas toujours respectée.

    A cet égard, on peut citer par exemple le cas de l'Association pour la Promotion des droits de l'homme en Afrique centrale (APDHAC), qui a organisé dans le cadre de ses activités un programme de formation des officiers de la police et de la gendarmerie.

    En marge de ses activités d'assistance juridique et légale aux personnes victimes de violations diverses, l'Association camerounaise des femmes juristes (ACAFEJ) organise souvent des sessions de formation et d'information à l'intention des femmes.

    Ces associations laïques côtoient dans leur action les mouvements associatifs religieux qui font également de la cause de l'homme dans la société leur cheval de bataille.

    2- L'action de l'Eglise

    L'Eglise se positionne comme un acteur majeur dans le champ de la promotion et de la protection des droits de l'homme au Cameroun. Elle s'impose comme une autorité morale dont l'opinion et les prises de position sur les questions sociales, politiques et économiques ne manquent pas d'influencer le comportement des gouvernants.

    La doctrine de l'Eglise et la philosophie des droits de l'homme se situent sur un terrain commun et c'est à juste titre que l'Eglise prêche la justice, le respect du prochain, la préservation de la dignité humaine et affirme l'égalité de tous les hommes devant Dieu.

    Afin de mieux diffuser les enseignements y relatifs l'Eglise catholique, notamment l'Association des Conférences Episcopales de la Région Afrique Centrale (ACERAC) a mis sur pied des « Commissions justice et paix » dans les six pays de la sous région. Ces Commissions sont « des instruments de promotion de la justice, de construction de la paix et de la réalisation du développement intégral des peuples par la défense de la dignité et des droits fondamentaux de la personne humaine »97(*). Elles développent leurs activités dans chaque diocèse dans le cadre des Commissions diocésaines Justice et Paix, et sont relayées dans les paroisses par des Comités, pour une action de proximité auprès des malades, des prisonniers (visites et dons).

    En mai 2006, les évêques du Cameroun, à travers la Conférence épiscopale se sont illustrés par une contribution en vue de l'amélioration du processus électoral, afin de garantir des élections libres, démocratiques et transparentes, mais surtout, éliminer les entraves à l'exercice du droit de vote par les citoyens. Tirant les conclusions de l'élection présidentielle du 11 octobre 2004 qu'ils jugent entachée de nombreuses irrégularités (fraudes, inscriptions discriminatoires sur les listes électorales...), ils proposent la création d'un Office national des élections dont la véritable indépendance permettra de prendre en charge tout le processus électoral. Les évêques proposent également le vote d'une loi unique qui régira à la fois l'élection présidentielle, les élections législatives et municipales, tout en proposant à cet effet deux moutures de loi.

    En marge des campagnes d'éducation qui concernent l'aspect promotionnel, l'effort de protection mené par la société civile porte aussi sur les groupes défavorisés.

    B- L'action en faveur des groupes vulnérables

    De nombreuses ONG et associations ont vu le jour avec pour objectifs spécifiques la défense, la protection, l'encadrement des groupes sociaux vulnérables ou des couches sociales défavorisées. Leur action vise essentiellement les enfants (1), les femmes (2), les handicapés (3) ainsi que les personnes âgées (4).

    1- Les enfants

    Les ONG et associations qui ont l'enfant pour cible de leur action98(*) oeuvrent surtout pour les protéger et les défendre contre les sévices sociaux (travail et exploitation sexuelle des enfants, maltraitances, fugues, délinquance, utilisation des drogues, etc.). Pour ce faire, elles offrent des prestations d'encadrement, d'éducation, de soins, de formation aux petits métiers, de réinsertion dans le milieu familial, de loisirs.

    Le Foyer de l'espérance de Yaoundé, la chaîne des foyers Saint Nicodème de Douala, l'Association camerounaise d'aide aux femmes et enfants en détresse (ACFED), sont quelques unes des associations dont l'action est perceptible.

    D'autres associations portent leur attention sur les femmes.

    2- Les femmes

    Les associations qui oeuvrent pour la protection et la promotion de la femme mènent des activités de terrain qui portent sur la conscientisation de l'opinion au sujet des violences faites aux femmes99(*), et sur l'assistance100(*) directe aux femmes victimes ou non.

    Celles qui s'illustrent dans ce champ sont à titre d'exemple l'Association Camerounaise des femmes juristes (ACAFEJ), l'Association de lutte contre les violences faites aux femmes (ALVF), l'Association camerounaise pour le bien être familial (CAMNAFAW).

    En raison de leur fragilité et de la considération sociale qui leur est réservée, les handicapés recueillent aussi l'intérêt de certaines ONG.

    3- Les personnes handicapées

    Les plus représentatives des associations et oeuvres sociales qui opèrent en faveur des personnes handicapées101(*) sont l'Ecole spécialisée pour enfants déficients auditifs (ESEDA) à Yaoundé, le Centre de rééducation des enfants sourds et d'action sociale (CRESAS) à Garoua, le Centre d'écoute et de réhabilitation des sourds muets (CERSOM) à Bafoussam, le « SETA handicapped training center » à Mbengwi (Bamenda).

    L'action de ces structures couvre les domaines de la scolarisation, de l'insertion socio-professionnelle, de la prise en charge sociale et médicale des personnes handicapées. Mais, la précarité qui caractérise la condition des personnes du troisième âge ne laisse pas la société civile indifférente.

    4- Les personnes âgées

    La protection des personnes âgées ne fait malheureusement pas courir les ONG et associations qui préfèrent orienter leurs actions vers des champs plus porteurs. Néanmoins, on note la présence active de la maison BETHANIE VIACAM, qui agit dans le cadre de l'action chrétienne. Elle est une oeuvre missionnaire qui dispose de locaux (limités) pour héberger les personnes âgées abandonnées par leurs familles et leur assurer un minimum de soins médicaux.

    En dépit des mesures prises par l'Etat pour promouvoir et protéger ces couches vulnérables102(*), le rôle joué par les associations est plus significatif, permanent et plus visible sur le terrain. Malheureusement, leur champ d'action géographique est très limité car, la plupart d'entre elles exercent dans les grands centres urbains103(*) (Yaoundé, Douala, Bamenda), au détriment des villes secondaires où les besoins sont tout aussi urgents.

    En marge de ces actions qui touchent directement les personnes cibles, les ONG du secteur des droits de l'homme n'hésitent pas à fustiger quand il le faut, les dérives des pouvoirs publics et des individus.

    C- Les dénonciations des atteintes à la dignité humaine

    Il s'agit pour les associations de défense des droits de l'homme d' « un devoir de parole et de dénonciation » qui consiste à interpeller les gouvernants sur les violations graves commises par les agents publics (fonctionnaires, forces de police, gendarmerie...). Leur action dans ce sens s'exerce par le canal des revues ou bulletins et des rapports périodiques qu'elles publient, dans lesquels elles mettent en lumière les atteintes quotidiennes aux droits des citoyens et préconisent des mesures visant à empêcher la répétition des actes incriminés.

    De ce point de vue, on peut considérer que la dénonciation des atteintes aux droits et libertés fondamentaux des individus, aussi bien au plan vertical qu'horizontal104(*), revêt une dimension prophylactique. De façon générale, les militants des droits de l'homme utilisent les média privés comme alliés dans la stratégie de dénonciation des atteintes aux droits de l'homme.

    Ce fut le cas lorsque le « Commandement opérationnel » a été mis en place à Douala dans le cadre de la lutte contre la criminalité et le grand banditisme. En effet, à la suite de nombreux abus et dérives des forces de police et de gendarmerie sur des individus et face au silence des autorités, les militants des droits de l'homme105(*) se sont fortement mobilisés pour décrier la situation. Le gouvernement a ainsi été amené à sortir de son mutisme pour éclairer l'opinion, ordonner l'ouverture d'une enquête sur les faits allégués, sanctionner les personnes mises en cause106(*) et mettre fin à ce « régime spécial » auquel était soumis la ville de Douala.

    Au regard de ce qui précède, l'analyse des actions de la société civile à travers les ONG et associations de défense des droits de l'homme fait ressortir des indicateurs permettant d'entrevoir les avancées dans le domaine de l'imprégnation des camerounais à la culture des droits de l'homme. En réalité, l'un des acquis important que les militants des droits de l'homme ont contribué à mettre en place concerne le changement des mentalités. Ainsi, certaines pratiques jusque là considérées comme normales ont été dénoncées et délégitimées.

    Aujourd'hui, aucun représentant de l'Etat, quelle que soit l'étendue de ses pouvoirs, ne peut se livrer à des actions contraires à l'éthique de la dignité humaine sans soulever de vives protestations de l'opinion nationale et entraîner la réaction (bien que souvent tardive) des autorités publiques en terme de sanctions administratives et de poursuites pénales107(*). Aussi, le Président BIYA ne manque t-il pas de le souligner dans son discours à la nation du 31 décembre 1999, lorsqu'il dit qu' « On doit se féliciter que la défense des droits de l'homme soit devenue une dimension essentielle de la société politique de notre temps. Aujourd'hui, personne ne peut rester indifférent devant leurs violations, où qu'elles se produisent, et ceux qui s'en rendent coupables s'engagent et s'exposent à devoir rendre des comptes ».

    Les éléments précédemment développés montrent que la culture universelle des droits de l'homme est de plus en plus une réalité au Cameroun, et ceci, depuis bientôt une vingtaine d'années. Si les bases de cette émergence sont à mettre à l'actif des pouvoirs publics c'est-à-dire des organes de l'Etat (exécutif, législatif et judiciaire), il est évident que le rôle joué par la société civile a été et reste déterminant pour permettre l'exercice concret des droits de l'homme. En fait, autant les prises de position et l'engagement en faveur du respect de ces droits ne font aucun doute, autant leur mise en pratique fait souvent défaut, aussi bien du côté des gouvernants que de celui des gouvernés.

    Dès lors, la consolidation de la garantie pratique des droits de l'homme se pose alors comme une exigence pour une jouissance effective par toutes les composantes de la société.

    Si les droits de l'homme intègrent progressivement les mentalités et les habitudes des populations, et rencontrent l'adhésion des autorités politiques, on ne peut pour autant pas dire que la pratique consacre l'effectivité et l'efficacité de tout l'arsenal juridique mis en place. En réalité, cette culture naissante du respect de la dignité humaine reste encore à consolider.

    DEUXIEME PARTIE :

    LES DROITS DE L'HOMME AU CAMEROUN :

    DES DROITS A CONSOLIDER

    L'adhésion du Cameroun à la cause des droits de l'homme ne fait pas de doute, au regard des instruments internationaux et régionaux qu'il a signés et ratifiés et de leur intégration dans l'ordre juridique interne. Il s'agit là d'un pas important mais qui n'est pas suffisant, car la reconnaissance au plan théorique (constitution, lois, règlements) de ces droits et libertés doit pouvoir être mise en oeuvre et concrétisée en pratique, dans le vécu quotidien des populations.

    Cette mise en oeuvre effective que le Pr. POUGOUE appelle « garantie pratique » reste encore un sujet de préoccupations dans le contexte camerounais108(*).

    Il convient alors dans le cadre des développement qui vont suivre, de recenser et d'analyser les difficultés qui entravent la mise en oeuvre effective de la protection de la dignité humaine (Chapitre I), avant d'envisager les perspectives (Chapitre II) qui sont en fait une contribution pour l'effectivité du respect et de la jouissance par tous, des droits fondamentaux inhérents à la personne humaine.

    CHAPITRE I :

    LES DIFFICULTES DE MISE EN OEUVRE DE LA PROTECTION DES DROITS DE L'HOMME

    Les principes de l'Etat de droit posent que la protection des droits de l'homme, ainsi que la répression des atteintes aux dits droits, sont de la compétence des juges. Cette attribution du pouvoir judiciaire109(*) s'appuie pour son accomplissement sur l'action du législateur qui, à travers les lois, fixe le cadre de cette protection.

    La réalité des droits de l'homme au Cameroun permet cependant d'observer que le processus d'intégration de ces droits reste non seulement inachevé, mais jonché d'obstacles qui affaiblissent leur garantie (Section 1). De même, l'influence des pouvoirs publics sur les institutions nationales intervenant dans le champ des droits de l'homme relativise la portée de l'action de ces dernières (Section 2).

    SECTION 1 : LES OBSTACLES AU RESPECT ET A LA PROTECTION DES DROITS DE L'HOMME

    Pour que les droits de l'homme puissent éclore et s'enraciner durablement dans une société, il faut la réunion de deux pré-conditions : un environnement politique favorable et un environnement socio-économique juste110(*). En d'autres termes, ces droits ne peuvent véritablement être garantis que dans un contexte de tolérance, d'acceptation de l'autre, de soumission de tous à la loi qui est générale et impersonnelle, et dans un cadre de juste répartition des richesses nationales.

    Il se trouve cependant que ces conditions sont loin d'être acquises, ce qui fragilise le système judiciaire (Paragraphe 1), laisse entrevoir les insuffisances de la législation (Paragraphe 2) ainsi que l'impact négatif des traditions culturelles (Paragraphe 3).

    Paragraphe 1 : Les faiblesses inhérentes au système judiciaire

    Elles touchent à la crédibilité même de l'institution judiciaire, et leur impact sur l'efficacité de son action de protection des droits et libertés des justiciables est perceptible. Ces faiblesses seront examinées aussi bien au plan fonctionnel (A) qu'au plan structurel (B).

    A- Au plan fonctionnel

    Aborder les faiblesses au plan fonctionnel revient à s'intéresser au fonctionnement, à l'administration de la justice111(*). Aussi sera t-il question du statut des juges (1), des entraves à la protection juridictionnelle des droits de l'homme (2), de l'accès des justiciables à la justice (3) et des lenteurs judiciaires (4).

    1- Le statut des juges

    Parler du statut des juges revient pour nous à aborder essentiellement la question de l'indépendance et de l'impartialité de ces derniers. L'indépendance112(*) qui est une donnée fondamentale pour une justice véritablement garante des droits des justiciables, est le reflet du droit à un procès équitable.

    Si en effet la constitution de 1996 énonce que « le pouvoir judiciaire est indépendant du pouvoir exécutif et du pouvoir législatif » et que « les magistrats du siège ne relèvent dans leurs fonctions juridictionnelles que de la loi et de leur conscience »113(*), il reste qu'en pratique, les magistrats ne sont pas toujours à l'abri des pressions des puissances publiques et privées (les plus décriées étant la corruption, le favoritisme, la concussion...)114(*).

    Dans ces conditions, ces hommes chargés de rendre la justice tombent dans les travers de l'impartialité et rendent des décisions biaisées qui compromettent très souvent les droits des justiciables. Cette situation amène NGUELE ABADA à observer que « nos magistrats sont formés pour parer aux défis de l'Etat de droit, il y a certes des insuffisances, mais le véritable problème concerne à la fois leur indépendance et les qualités morales qui restent à prouver »115(*).

    Est-il donc possible de parler d'une réelle indépendance du pouvoir judiciaire au sens de l'article 37 de la Constitution, lorsqu'on sait que l'exécutif intervient directement dans la gestion de la carrière des magistrats chargés de dire le droit116(*) ?

    Dans un contexte social marqué par l'appât du gain et la recherche du bien-être matériel, comment les magistrats et les greffiers que la rémunération ne met pas à l'abri des besoins (parfois élémentaires), peuvent-ils résister à la tentation de la corruption ?

    En effet, tant que les juges ne sont pas affranchis de la mainmise de l'exécutif et que les conditions matérielles et financières acceptables ne sont pas mises à leur disposition, le « temps des juges »117(*) est loin d'être une réalité pour la protection de l'intégrité des personnes, de leurs libertés et leur sécurité. Encore faudrait-il que le législateur ne limite pas les juges dans leur action.

    2- Les entraves à la protection juridictionnelle des droits de l'homme

    La protection juridictionnelle des droits de l'homme est organisée au Cameroun par trois types de recours, à savoir, le recours devant le Conseil constitutionnel118(*), le recours devant le juge administratif et celui devant le juge judiciaire. La garantie des libertés qui leur incombe subit cependant quelques altérations dans la pratique.

    · Il faut relever qu'en matière de contrôle de constitutionnalité des lois, le citoyen ne peut pas saisir le juge constitutionnel pour invoquer l'inconstitutionnalité d'une loi, sa saisine étant exclusivement réservée en la matière au Président de la République, au Président de l'Assemblée nationale, au Président du Sénat et à un tiers des députés ou des sénateurs. En effet, la préférence marquée par le constituant pour le contrôle préventif de la constitutionnalité des lois119(*), met une loi qui serait inconstitutionnelle à l'abri de toute démarche contentieuse après sa promulgation. Cette situation met en péril la garantie des droits et libertés contre une loi qui violerait manifestement la constitution.

    En matière électorale cependant, la garantie effective réside dans la possibilité qui est reconnue à tout candidat ou à tout parti politique ayant pris part à une élection, de saisir le Conseil constitutionnel en cas de contestation sur la régularité de l'une des élections qui relève de sa compétence120(*).

    · S'agissant du recours au juge administratif, qui dans le cadre du contrôle de la conformité de l'activité de l'administration à la loi est appelé à protéger les droits et libertés, on note une innovation qui concerne la création des tribunaux administratifs121(*). Cependant, la pratique actuelle en matière de contentieux administratif fait ressortir quelques faiblesses qui relativisent le rôle protecteur du juge administratif.

    Contrairement à la pratique en matière pénale où le parquet peut se substituer à une victime pour porter plainte à travers l'action publique, sur le plan administratif, la requête introductive d'instance ne peut être introduite que par la victime ou son mandataire.

    Ensuite, le juge administratif ne peut être saisi qu'après l'épuisement d'une procédure pré-contentieuse (le recours gracieux)122(*), sous peine de forclusion. Cette exigence dans un contexte où l'administration conserve encore des relents d'autoritarisme, et qui reste procédurière, contribue à rallonger l'espérance de la victime d'une violation du fait de l'administration, de se voir rapidement rétablie dans ses droits.

    Enfin, le juge administratif a des pouvoirs limités face à l'administration. Sa sanction à l'encontre de l'administration est illusoire123(*), étant donné qu'il ne peut la contraindre à exécuter une décision. Le fait pour le juge administratif d'être dépourvu de pouvoir d'injonction et de ne pouvoir condamner l'administration à faire, sous peine de tomber sous le coup de l'article 129 b du code pénal124(*), constitue pour ce dernier une atteinte grave à son indépendance, et au droit pour la victime de se faire rendre justice. Pour un Etat qui se veut respectueux des droits de l'homme, nous pensons que cette disposition du code pénal devrait être supprimée, car les principes de légalité et d'égalité voudraient que l'administration réponde aussi de ses actes et assume les responsabilités qui en découlent.

    · En ce qui concerne le juge judiciaire, l'harmonisation et la réforme récentes de la procédure pénale contribuent significativement à atténuer ces entraves à la protection des droits et libertés fondamentaux des personnes125(*). Encore faut-il que les populations soient imprégnées d'une culture judiciaire.

    3- L'accès des justiciables à la justice

    Dans un contexte économique marqué par la paupérisation des populations, l'accès des justiciables aux tribunaux n'est pas facile, au regard des divers frais de procédure et honoraires qui ne sont pas à la portée de tous les citoyens. Cette situation a pour conséquences de favoriser l'abandon de la justice institutionnelle au profit du développement d'une autre forme de justice qu'on peut qualifier de « justice de la rue » ou de « justice populaire »126(*).

    A côté de l'accès à la justice, le droit de recourir au juge, d'exercer un recours effectif devant une juridiction127(*), exigence fondamentale de l'Etat de droit, fait dans la réalité l'objet d'une désaffection des justiciables. L'explication à cet état de choses se trouve dans le manque de confiance et dans l'inféodation (supposée ou réelle) des juges à certains groupes de pression, ce qui contribue à donner du système judiciaire l'image d'un ensemble gangrené par la corruption128(*).

    Par ailleurs il faut aussi relever que l'assistance judiciaire bien que prévue par la réglementation129(*), reste une possibilité dont la procédure est ignorée par beaucoup de personnes.

    Mais les lenteurs judiciaires qui ne permettent pas le rétablissement rapide du justiciable dans ses droits, ainsi que l'intervention dans de meilleurs délais de la sanction ou de la réparation, contribuent également à décourager ce dernier.

    4- Les lenteurs judiciaires

    L'objectif de célérité dans les procédures est encore loin d'être atteint, ce qui crée d'importants blocages dans la solution aux nombreux litiges qui sont portés devant les juridictions.

    D'une façon générale, ces lenteurs décriées par les justiciables trouvent leur origine dans l'utilisation abusive des renvois, même pour des affaires en état d'être jugées, la longueur de l'instruction des dossiers, le dilatoire des avocats qui peut dénoter de leur part d'un certain manque de professionnalisme, la réticence des témoins à participer à la manifestation de la vérité, l'archaïsme des méthodes d'investigation. On peut enfin souligner, et sans être exhaustif, le laxisme de certains magistrats mais surtout, l'acuité des insuffisances relevées au plan structurel.

    B- Au plan structurel

    Les entraves au bon fonctionnement de la justice sur le plan structurel concernent le déficit infrastructurel (1) auquel s'ajoute l'insuffisance des ressources humaines et matérielles (2).

    1- Le déficit infrastructurel

    L'Ordonnance n°72-4 du 26 août 1972 portant organisation judiciaire au Cameroun prévoit la création des juridictions sur la base du découpage administratif du pays. Aussi est-il dit, qu'un TPI est crée par Arrondissement (article 11), un TGI par Département (article 14), une C.A par Province (article 18). L'Ordonnance n°72/6 qui organise la C.S, dispose qu'elle siège à Yaoundé et que son ressort comprend tout le territoire de la République (article 1er). La loi n°89/019 du 29 décembre 1989 qui modifie et complète l'Ordonnance 72-4 institue les juridictions de droit traditionnel.

    La conclusion qu'on tire de cette organisation, au regard de la création effective des juridictions est que leur mise en place est inachevée, surtout en ce qui concerne les TPI et les TGI. Quant aux juridictions traditionnelles, leur implantation reste imprécisée par les textes. L'exploitation des statistiques sur le nombre de juridictions fonctionnelles présente les chiffres suivants : 10 C.A, 22 TPI, 12 TGI, 46 TGI et TPI, 1 C.S130(*). Il en découle que la décentralisation des juridictions est faible, et que la couverture juridictionnelle du pays reste encore insuffisante en vue de rapprocher la justice des justiciables.

    A ce déficit infrastructurel, il faut ajouter la vétusté de certains « Palais » de justice qui n'ont bénéficié depuis des années, ni d'un entretien, ni de travaux d'aménagement, ainsi que la dégradation rapide de celles modernes qui ne bénéficient pas toujours des conditions d'entretien minimales.

    Le fonctionnement de la justice au plan structurel est aussi affecté par l'insuffisance des personnels et du matériel.

    2- L'insuffisance des ressources humaines et matérielles

    Le manque de personnel reste préoccupant. Les magistrats et les greffiers en nombre déjà très insuffisant, sont inégalement répartis dans l'ensemble des juridictions. Beaucoup d'entre eux se « battent » pour exercer soit dans l'Administration centrale, au Ministère de la Justice, soit dans les grandes villes où la justice semble plus dynamique et les opportunités nombreuses.

    A ce personnel judiciaire, il faut ajouter les Huissiers de justice, les Notaires et les Avocats, qui, non seulement sont en nombre réduit, mais sont également concentrés dans les grands centres urbains131(*).

    Les tribunaux font aussi preuve d'un manque criard de moyens matériels. Ce constat amène certains observateurs à parler «d'insoupçonnable et scandaleuse indigence en infrastructures, moyens matériels et humains »132(*). Cette situation amène certains magistrats par exemple à acquérir à leurs frais certaines fournitures de bureau. Comment imaginer en effet qu'avec les prodigieux progrès des TIC, la majorité des juridictions camerounaises ne soit pas dotée de l'outil informatique (micro-ordinateurs, connexion Internet, etc.) ou simplement d'une ligne téléphonique ou de FAX ?

    Nous pensons à cet égard que l'urgence de la restauration du blason de la justice devrait être la préoccupation essentielle des pouvoirs publics133(*). Dans les conditions ci-dessus évoquées, la mise en péril des droits des justiciables n'est pas éloignée, même si la législation y concourt à travers les insuffisances qu'elle comporte.  

    Paragraphe 2 : Les insuffisances relatives à la législation

    Bien qu'ayant connu un toilettage et un réajustement dans le sens d'une plus grande libéralisation, la législation sur les droits de l'homme comporte encore quelques insuffisances (A) et nécessite par conséquent un renforcement (B).

    A- Les insuffisances dans l'aménagement des restrictions des libertés

    La question de la réglementation sur les restrictions des libertés a été sensiblement améliorée avec le vote de la loi de 2005 portant Code de procédure pénale, dont l'entrée en vigueur sera effective en août 2006. Bien qu'elle régit de nombreux aspects sur lesquels la loi était muette, une préoccupation persiste sur les conditions matérielles de garde à vue, de détention provisoire et d'incarcération des condamnés, dont l'esquisse de réglementation a été faite avec le décret n°92/052 du 27 mars 1992 portant régime pénitentiaire.

    B- Un nécessaire renforcement de la législation sur les droits de l'homme

    La législation sur les droits de l'homme au Cameroun reste encore à consolider car, le fait pour la Constitution de les énoncer ne constitue pas en soi une garantie réelle. Dès lors, le législateur est interpellé pour en fixer le cadre d'exercice. C'est précisément le cas de la protection de la famille, de l'assistance aux couches sociales défavorisées, de la protection des minorités et des droits des populations autochtones qui requièrent soit un réajustement des textes en vigueur, soit l'élaboration de nouvelles lois.

    Les textes à réajuster concernent l'Ordonnance n° 81-02 du 29 juin 1981 sur l'état civil et l'état des personnes physiques qui en certains points ne semble plus coller à la réalité134(*), ainsi que la loi de 1983, relative à la protection des personnes handicapées. Cette loi nous paraît imprécise sur les modalités d'octroi et la nature des aides sociales auxquelles ces derniers doivent prétendre, mais surtout, reste floue sur les mesures de facilitation de leur intégration dans la société, de même que les devoirs des autres citoyens envers ces personnes vulnérables. Même son décret d'application de 1990 n'y a pas songé.

    Quant aux droits qui nécessitent un encadrement nouveau, nous pensons à une loi sur les minorités et les populations autochtones auxquels fait allusion la Constitution, une loi ou un code qui regrouperait l'ensemble des dispositions concernant la famille (femme, enfant, personnes âgées, état civil, etc.). On relèvera aussi le droit à un environnement sain qui attend que le législateur s'y penche.

    Si les carences dont la législation sur les droits de l'homme fait preuve peuvent être corrigées, tel n'est pas le cas des coutumes et traditions qui, quant à elles, s'appuient sur des fondements sociologiques et culturels qui semblent avoir encore de beaux jours devant eux.

    Paragraphe 3 : Le poids des traditions culturelles

    Dans un pays comme le Cameroun ou plusieurs valeurs et conception des droits coexistent135(*), le respect de la dignité humaine pose parfois des difficultés au regard du poids accordé aux traditions. Aussi, l'Etat et les associations des droits de l'homme se trouvent-ils confrontés au problème de la cohabitation des normes universelles avec les cultures locales.

    Les attitudes et les comportements quotidiens des individus, surtout dans les contrées éloignées des grandes villes, laissent entrevoir de sérieuses réticences quant à l'intégration de la conception moderne des droits de l'homme, perçue comme déstabilisatrice de l'ordre social établi. Ces « pesanteurs traditionnelles auxquelles les individus sont attachés (...) et qui ne sont pas des facteurs d'encouragement d'une culture des droits de l'homme »136(*), se traduisent dans les faits par le traitement qui est réservé aux femmes137(*), aux enfants (considérés comme main d'oeuvre pour les travaux domestiques et champêtres), aux « sujets » et serviteurs des Chefs traditionnels, Sultans, Rois, « Fon » et Lamibés138(*), qui subissent des traitements à la limite de l'acceptable (portage, recueil des crachats, cession obligatoire de leurs filles parfois mineures, etc.).

    Face à la persistance de telles pratiques, on peut affirmer avec BOUKONGOU qu'aujourd'hui, « le droit positif ne peut prétendre avoir civilisé les coutumes locales »139(*). En effet, pour parvenir à cet objectif, il faudrait que les exigences modernes relatives aux droits de l'homme intègrent la diversité culturelle de nos sociétés (qui n'ont pas que des aspects négatifs), mais surtout, privilégient une approche pédagogique de proximité, visant à faire comprendre qu'en dépit des différences des cultures, coutumes et traditions, l'être humain a une dignité à préserver qui ne s'accommode pas des positions sociales.

    La nécessité de consolider les droits de l'homme au Cameroun, au-delà de la prophylaxie à administrer au fonctionnement de la justice, du toilettage et du renforcement des textes juridiques et du dépassement des fondements sociologiques et culturels de la conception traditionnelle de ces droits, suppose également que les pouvoirs publics accordent une marge de manoeuvre suffisante aux institutions nationales de ce secteur.

    SECTION 2 : L'INFLUENCE DES POUVOIRS PUBLICS SUR LES INSTITUTIONS INTERVENANT DANS LE CHAMP DES DROITS DE L'HOMME

    En vue de protéger les droits de l'homme, mais surtout de les promouvoir, les pouvoirs publics ont, sous l'impulsion des Nations unies, créé des institutions nationales visant à réguler, contrôler et assurer le suivi des questions y relatives140(*).

    Tout en relevant l'aspect positif de leurs actions sur le terrain par une contribution à la diffusion des valeurs portant sur le respect de l'être humain, on note cependant que l'accomplissement de leurs missions subit l'influence souvent négative des gouvernants qui en sont les instigateurs. Les cas de la CNDHL (Paragraphe 1), du CNC (Paragraphe 2) et de l'ONEL (Paragraphe 3) retiendront particulièrement notre attention141(*).

    Paragraphe 1 : La CNDHL

    Les mécanismes qui régissent le fonctionnement des institutions nationales des droits de l'homme sont définis par les « Principes de Paris »142(*) qui constituent une plate forme normative à laquelle doivent se référer les Etats pour leur mise en place.

    Malgré l'effort d'ajustement fait par les pouvoirs publics pour s'y conformer143(*), de nombreuses carences subsistent, notamment en ce qui concerne la réelle indépendance de la CNDHL.

    Bien que l'article 1er de la loi de 2004 consacre son indépendance, sa personnalité juridique et son autonomie financière, la réalité permet de déceler quelques points qui sont en contradiction avec les « principes de Paris ».

    - S'agissant de sa composition, la CNDHL, en dehors de ses 30 membres144(*), est dotée par la loi d'un secrétariat permanent (article 11) qui est l'émanation des pouvoirs publics, dirigé par un Secrétaire général nommé par décret du Président de la République. Le Secrétaire général qui n'est pas issu des rangs des membres de la commission est en réalité le véritable chef de son administration145(*). Il s'agit là d'une disposition qui n'est pas conforme à l'exigence pour les institutions nationales de disposer de leurs propres personnels. Cette intrusion des pouvoirs publics à travers la présence d'un « représentant » (non membre de la CNDHL) au sommet de l'administration de la Commission contribue de façon inavouée à l'effritement de son indépendance.

    - Ensuite, l'obligation qu'a la CNDHL d'adresser son rapport annuel au Président de la République, au Président de l'Assemblée nationale et au Président du Sénat, ses rapports semestriels au Premier ministre ainsi qu'aux ministres de la Justice et de l'Administration territoriale (article 19 loi de 2004), constitue un lien implicite de subordination envers ces différentes autorités. Il en découle que la publication de ces rapports est subordonnée à l'approbation de ces dernières.

    - L'un des handicaps au bon fonctionnement de la CNDHL est l'insuffisance de ressources financières et de moyens logistiques que l'Etat met à sa disposition. Cet état de choses ne permet pas une indépendance dans la conduite de ses missions146(*), surtout que la dotation budgétaire est souvent débloquée avec du retard. En outre, les contributions extérieures qu'elle reçoit sont généralement utilisées dans le sens des orientations données par les donateurs, ce qui restreint aussi sa marge de manoeuvre.

    En tant qu'organe intervenant dans le secteur de la communication sociale,le CNC n'est pas à l'abri de cette influence des pouvoirs publics.

    Paragraphe 2 : Le C N C

    L'influence des pouvoirs publics sur l'accomplissement par le CNC de ses missions se ressent au niveau de sa composition. Conformément aux dispositions du décret du 21 juin 1991 qui l'institue, les membres sont nommés par décret du Président de la République, parmi les professionnels de ce secteur. La nomination du président du CNC et de son Secrétaire permanent lui échoit de façon discrétionnaire. Le CNC fonctionne avec des ressources financières qui lui sont octroyées dans le cadre du budget de l'Etat.

    Cette situation crée à l'encontre des membres et des responsables de cet organe, une obligation de se conformer aux directives du gouvernement en matière d'encadrement des médias, et limite par conséquent sa marge de manoeuvre.

    Nous conclurons sur ce point en faisant remarquer que le CNC est longtemps resté en hibernation et n'a eu à se prononcer que rarement sur les faits qui mettent en cause les dérives des acteurs de son champ de compétence. Sa dernière sortie dans ce sens a consisté en la diffusion d'un communiqué condamnant la publication par certains journaux privés de noms de certaines personnalités présumées homosexuelles147(*).

    En matière électorale, la controverse qui a précédé la création de l'ONEL n'a pas atténué la volonté des pouvoirs publics de garder le contrôle du processus électoral.

    Paragraphe 3 : L'ONEL

    Le texte fondateur de l'ONEL comporte des dispositions susceptibles de compromettre son indépendance voulue par le législateur. La manifestation de cette amputation de l'ONEL de certains pouvoirs, dans une matière aussi sensible que le processus électoral, apparaît dès la définition de sa mission, s'étend sur sa composition et son fonctionnement.

    - La loi du 19 décembre 2000 qui l'institue précise en son article 1er que « l'ONEL est chargé de la supervision et du contrôle des opérations électorales et référendaires ». Sur ce point, la loi est claire. L'ONEL n'est pas chargé des opérations matérielles liées directement à la préparation et au déroulement des élections148(*). Ces activités relèvent de la compétence du ministère de l'Administration territoriale et de ses démembrements (CCS, CDS...).

    L'ONEL se trouve ainsi réduite à un rôle d'observateur du processus électoral dont certains méandres peuvent lui échapper. Il est marginalisé au profit de l'administration qui pilote effectivement les opérations.

    - En outre, l'obligation qui incombe à l' ONEL d'adresser son rapport au Président de la République qui le fait publier est l'une des manifestations de l'influence de l'exécutif sur cet organe qui finalement s'apparente à « un organe consultatif du gouvernement » et dont « le rapport n'aura aucune influence sur l'issue du scrutin quelle que soit l'ampleur des dysfonctionnements et des irrégularités »149(*)

    - Le point sensible qui porte véritablement un coup à la crédibilité de l'ONEL réside dans sa composition. Au terme de l'article 3 de la loi, cet organe est « composé de 11 membres nommés par le Président de la République (...) parmi les personnalités indépendantes connues pour leur intégrité morale, leur honnêteté intellectuelle, leur moralité et leur impartialité ». cette composition unilatérale confère au Président de la République un pouvoir discrétionnaire et fait de lui le seul juge de l'appréciation des qualités requises pour être nommé.

    On se serait pourtant attendu à ce que en tant qu'organe indépendant, l'ONEL ait une composition pluraliste (administration, partis politiques, société civile, personnalités indépendantes) et/ou que ses membres soient désignés par des autorités différentes comme c'est le cas dans certains pays. Le mode de désignation ainsi retenu constitue une entorse à son indépendance et implique pour ses membres une allégeance à l'autorité qui les nomme, même lorsqu'il s'agit d'une élection présidentielle pour laquelle il est candidat.

    De façon générale, indépendamment des quelques avancées que l'on peut concéder à la création de l'ONEL, la diversité des intervenants en matière électorale n'oeuvre pas pour un meilleur exercice de ce droit fondamental du citoyen. En conséquence, une réforme urgente de la loi qui l'institue s'avère nécessaire, si ce n'est la restructuration du système électoral dans son ensemble.

    Au terme de cette analyse des difficultés que rencontre la mise en oeuvre effective des droits de l'homme dans certains de ses aspects juridiques, législatifs et socioculturels, il nous semble indiqué de jeter un regard prospectif sur leur avenir, dans une approche pédagogique que nous appellerons : Les perspectives.

    CHAPITRE II :

    LES PERSPECTIVES

    L'enracinement de la culture des droits de l'homme est une dynamique qui intègre trois phases : d'abord la préservation des acquis, ensuite leur remise en cause permanente afin de ressortir les difficultés de mise en oeuvre à tous les niveaux de la structure étatique, enfin la recherche des solutions concrètes en vue de l'amélioration des pratiques respectueuses des droits de l'homme.

    Le présent chapitre se situe justement en droite ligne des propositions allant dans le sens de faire du respect des droits de l'homme au Cameroun la chose la mieux partagée par tous, une réalité qui ne sera plus considérée comme l' « affaire » des élites, des citadins ou des intellectuels.

    Le renforcement de l'Etat de droit et de la démocratie (Section 1) et une meilleure organisation de la société civile (Section 2) en constituent les axes majeurs.

    SECTION 1 : LE RENFORCEMENT DE L'ETAT DE DROIT ET DE LA DEMOCRATIE

    Les transitions démocratiques qui se sont opérées en Afrique dans les années 1990, ont amené les Etats à expérimenter l'exercice par les citoyens, de nombreux droits et libertés qui ne leur étaient pas consentis depuis presque les indépendances. Les dirigeants devaient aussi faire le dur apprentissage de leur soumission aux textes législatifs et réglementaires régissant certains droits, qu'ils n'avaient pratiquement jamais respectés. Désormais, la règle « tu patere lege quam fecisti »150(*) devient incontournable, et les populations sont appelées à participer activement à la gestion des affaires publiques151(*).

    Mais, les imperfections relevées à ce niveau appellent à un renforcement de l'Etat de droit qui passe par la consolidation de la bonne gouvernance (Paragraphe 1) et le renforcement de l'éducation aux droits de l'homme (Paragraphe 2).

    Paragraphe 1 : La consolidation de la bonne gouvernance

    La consolidation de la bonne gouvernance apparaît comme un ensemble de mesures qu'il convient de prendre afin de permettre la pleine jouissance par les populations de leurs droits et libertés, mais aussi l'accomplissement des devoirs qui leur incombent vis-à-vis de l'Etat et des autres membres de la société. Etant donné qu'elle suppose le souci de l'intérêt général, nous pensons qu'il est nécessaire pour la consolider :

    - D'engager et d'achever le processus de mise en place des nouvelles institutions créées par la Constitution de 1996. en effet, dix ans après son entrée en vigueur, force est de constater que la plupart des institutions nouvellement créées restent toujours lettre morte. C'est le cas des régions dans le cadre de la décentralisation territoriale, du Sénat dans le cadre de l'instauration d'un parlement bicaméral, de la Cour constitutionnelle, des tribunaux administratifs152(*), etc.

    De toutes les nouvelles institutions, seule la Chambre des comptes de la Cour suprême est à ce jour opérationnelle.

    - De poursuivre la lutte acharnée contre la corruption en vue d'assainir et de moraliser les comportements153(*).

    - De mettre fin à l'impunité à travers des sanctions exemplaires contre les responsables des atteintes à la fortune publique et aux droits et libertés fondamentaux.

    - Restaurer le culte du mérite, de l'effort et de la compétence, comme critères exclusifs des promotions et nominations dans l'administration publique et les consolider dans le secteur privé, afin d'inverser la tendance qui consiste à les percevoir « comme une gratification du pouvoir à telle ethnie ou à tel clan »154(*).

    - Restaurer la neutralité de l'appareil administratif dont les hauts responsables ont tendance à se mettre plus au service d'un corporatisme politique155(*). A ce sujet, NGUELE ABADA pense que « l'administration d'Etat devient par conséquent otage du pouvoir politique pris au sens des partis politiques (...) et ne répond plus aux nécessités de l'intérêt général mais à l'impératif de fidélisation au parti »156(*). Pour s'en convaincre, il n'y a qu'à voir le déploiement sur l'étendue du territoire en période électorale, de certains fonctionnaires et hauts cadres, qui abandonnent leurs postes de travail pour aller battre campagne.

    En tout état de cause, l'efficacité des mesures ci-dessus préconisées ne peut prendre cops que si l'éducation aux droits de l'homme est renforcée.

    Paragraphe 2 : Le renforcement de l'éducation aux droits de l'homme

    Le plan d'action final du congrès international sur l'éducation aux droits de l'homme de mars 1993 énonce que « l'éducation aux droits de l'homme et à la démocratie sont en soi un droit fondamental et une condition essentielle de l'épanouissement de la justice sociale et de la paix et du développement »157(*). Il en découle logiquement que l'élément clé de la prévention des violations de ces droits est l'éducation. Car, comment les faire respecter si les individus ne sont pas amenés à en prendre conscience et à connaître les moyens d'en assurer le respect 158(*)?

    En dehors des actions d'éducation de masse159(*), la diffusion des connaissances, des qualités et attitudes qui sont de nature à renforcer le respect des droits de l'homme et des libertés fondamentales n'a pas encore effectué une véritable percée dans le système éducatif camerounais. Et même la réalité que constitue l'insertion des programmes d'enseignement en droits de l'homme dans les Facultés des sciences juridiques et politiques des universités d'Etat, à l'Ecole nationale d'administration et de la magistrature, à l'Ecole nationale supérieure de police, à l'école nationale d'administration pénitentiaire et à l'Ecole militaire interarmées, est loin de répondre aux objectifs de la Décennie des Nations Unies pour l'éducation aux droits de l'homme (1995-2004)160(*).

    Mais, il faut apprécier à leur juste valeur les initiatives déjà prises par le CNDHL et la société civile, dans le sens d'étendre l'enseignement des droits de l'homme à tout le système éducatif161(*), d'organiser des sessions de formation pour un public cible varié. L'action particulière de l'église catholique mérite aussi d'être relevée, étant donné qu'en marge des activités menées dans le cadre des Commissions Justice et Paix, elle a signé le 26 mai 2006 avec le gouvernement, une convention qui lui permet d'introduire dans les établissements scolaires relevant de son ressort des enseignements sur l'éthique citoyenne. La signature de cette convention atteste de la volonté politique des gouvernants, d'oeuvrer dans un cadre de partenariat, pour le renforcement de l'éducation aux droits de l'homme car, « Les droits de l'homme resteront des enseignes décoratives tant que les populations ne s'en approprieront pas l'esprit et ne les intégreront pas dans les pratiques quotidiennes »162(*).

    L'effectivité de l'Etat de droit et de la démocratie implique cependant que la société civile joue pleinement son rôle de levain dans l'appropriation par les citoyens de la culture des droits de l'homme. Pour ce faire, elle doit ajuster son organisation pour tenir compte des exigences d'un environnement démocratique et de bonne gouvernance.

    SECTION 2 : UNE MEILLEURE ORGANISATION DE LA SOCIETE CIVILE

    Nous l'avons souligné, la société civile se positionne comme un acteur majeur dans le champ de la défense et de la promotion des droits de l'homme au Cameroun. Le nombre important des ONG et associations des droits de l'homme témoigne non seulement du contexte libéral favorable à leur création, mais aussi de leur dynamisme qui constitue une véritable chance pour la mise en place et la consolidation d'une culture des droits de l'homme. En réalité, loin de n'être qu'un atout, la pluralité des associations peut paraître aussi comme un facteur d'affaiblissement du rôle de la société civile.

    D'abord, toutes les organisations de la société civile n'ont pas la même envergure, ceci au regard des écarts quant au niveau des ressources humaines, matérielles et financières.

    Ensuite et indépendamment du niveau de recrutement de leurs leaders et de leurs cadres, les associations de défense des droits de l'homme ne sont pas à l'abri des influences et des pressions extérieures. On a ainsi pu observer que, l'Etat, du fait de la prolifération de ces associations et se situant dans la logique du pouvoir, a souvent essayé de diviser les organisations crédibles afin de réduire leur capacité de mobilisation face aux violations qui pourraient lui être reprochées.

    Il y a aussi que les droits de l'homme sont devenus un fonds de commerce dans lequel s'engouffrent de nombreux aventuriers pour recevoir des financements internes et externes, et même bénéficier d'une immunité de fait.

    Tous ces griefs amènent à suggérer une auto-consolidation de la société civile à travers le renforcement des capacités des associations (Paragraphe 1) et le développement des partenariats (Paragraphe 2).

    Paragraphe 1 : Le renforcement des capacités des associations de défense des droits de l'homme

    La diversité des organisations de la société civile au Cameroun fait ressortir que ses acteurs sont très souvent éphémères et divisés. En effet, certaines luttent pour des intérêts partisans tandis que d'autres manquent de réelle structuration.

    Les associations des droits de l'homme n'échappent pas à ces maux et nécessitent par conséquent un renforcement de leurs capacités en terme de l'amélioration de la qualité des ressources humaines (A) et de la mobilisation des ressources financières (B).

    A- L'amélioration de la qualité des ressources humaines

    L'action préconisée à ce niveau concerne essentiellement la formation des militants, des leaders et cadres desdites associations. Car, comment serait-il possible de vouloir défendre et promouvoir les droits de l'homme si l'on n'est pas imprégné des instruments internationaux qui les régissent, de la législation nationale ainsi que des techniques et procédures à mettre en oeuvre pour défendre les droits dont la violation est constatée ?

    Il s'agit en fait, de faire émerger une nouvelle catégorie de cadres163(*) qui ont pleinement conscience de la contribution qui doit être la leur dans la construction d'un Etat de droit, et qui, aguerris par leur expertise, sont prêts à faire face aux attentes de la population. Mais une action de formation des intervenants du secteur associatif des droits de l'homme ne peut s'accommoder du manque de ressources financières.

    B- La mobilisation des ressources financières

    Dans un contexte économique marqué par la difficulté à mobiliser les financements, l'un des défis auxquels doivent faire face les promoteurs d'ONG, est justement la recherche des ressources financières, élément indispensable pour le déploiement de leurs activités.

    Comment expliquer en effet qu'après une période marquée par le « boom » de ces ONG et associations, on en vienne aujourd'hui à n'identifier que quelques une qui mènent effectivement leurs activités, si ce n'est principalement le manque de moyens financiers ? Les charges diverses de fonctionnement ne permettent même pas à certaines de disposer personnels, de locaux, de mobilier ou tout simplement de matériel de bureau. Cette situation amène NGUELE ABADA à conclure que « la société civile est engluée dans des problèmes alimentaires et manque parfois du minimum pour travailler »164(*). C'est pourquoi, à défaut de disparaître complètement du paysage associatif, l'exploitation opportuniste de la thématique des droits de l'homme par les promoteurs de ces ONG leur sert de bouée de survie et de gagne-pain à l'occasion de « savants colloques »165(*) et de projets présentés avec conviction aux bailleurs de fonds.

    Face à ce constat, il devient urgent pour ces associations :

    - D'élaborer de véritables stratégies de financement de leurs activités (élaborer des plans d'actions, des projets fiables, identifier clairement les besoins de leur public cible, fixer les montants minima des prestations et des contributions des membres pour couvrir les frais de fonctionnement, rechercher des financements internes et externes) ;

    - De mettre en place des méthodes de gestion saines et transparentes166(*) (publier les rapports d'activités, rédiger le bilan financier annuel, ouvrir un compte bancaire au nom de l'association avec le principe de double signature au moins, disposer d'un « staff » administratif) ;

    - De développer des partenariats pour le co-financement de certaines activités communes.

    Paragraphe 2 : Le développement des partenariats

    Comme nous l'avons souligné dans les développements précédents, la consolidation d'une culture du respect des droits de la personne humaine nécessite la mobilisation des acteurs sociaux, ainsi qu'une véritable synergie entre les associations et ONG (A), de même que les pouvoirs publics devraient composer avec ces dernières (B).

    A- Les ONG et associations entre elles

    La collaboration des ONG entre elles doit se situer au plan interne (1) et au plan international (2).

    1- Au plan interne

    Malgré la libéralisation du champ associatif, l'Etat encadre les activités des ONG et associations qui oeuvrent dans le domaine des droits de l'homme. C'est pourquoi, pour faire face au pouvoir politique, ces dernières devraient envisager de se regrouper, de se constituer en collectif, tout en conservant leur propre identité et indépendance167(*). Une initiative de cette nature leur permettrait de faire bloc pour défendre la cause commune qui est le respect de la dignité humaine, pour définir des orientations générales de leurs actions, financer des activités d'intérêt collectif, et enfin, constituer un interlocuteur de poids devant les autorités publiques.

    Il est heureux de constater que de nombreuses ONG et associations développent des partenariats au plan national qui permettent ainsi d'affirmer leur présence sur le terrain de l'action sociale et de la protection des droits de l'homme. Cette tendance est cependant plus faible en ce qui concerne le partenariat avec les structures similaires au plan international.

    2- Au plan international

    L'importance du partenariat des ONG nationales avec les ONG des autres pays, réside dans le fait qu'il peut permettre de s'enrichir de l'expérience des autres, de bénéficier de leur soutien dans le cadre des actions d'envergure internationale, de conférer plus de crédibilité auprès des pouvoirs publics, ou de bénéficier de financements auprès de bailleurs de fonds disposés à appuyer des actions spécifiques.

    De telles prestations ne peuvent être possible que si les associations se constituent en réseaux régionaux, si elles adhèrent aux fédérations internationales ou aux ligues mondiales telles que la FIDH.

    Cette recherche de collaboration avec les ONG externes ne devrait toutefois pas faire oublier que les associations et ONG, parce qu'elles opèrent à l'intérieur du pays, se doivent d'entretenir de bons rapports avec les autorités gouvernementales, même si le plus souvent ces rapports sont conflictuels.

    B- Les associations et les pouvoirs publics

    Les ONG devraient cesser d'envisager leur action dans une logique de confrontation permanente avec les pouvoirs publics, et se positionner en partenaires de l'administration168(*) dans la recherche de l'amélioration constante de la situation des droits de l'homme. Il s'agit pour elles de devenir des interlocuteurs incontournables, des relais de l'action des gouvernants, mais aussi des « critiques », dans une approche constructive.

    Les pouvoirs publics semblent d'ailleurs avoir intégré la nécessité de cette collaboration à travers la latitude qu'a le Président de la République d'en faire des associations reconnues « d'utilité publique », lorsqu'il est établi que leurs actions contribuent de façon significative au développement national et à la réalisation de missions d'intérêt général.

    On peut cependant préconiser la formalisation d'un cadre juridique de collaboration avec l'Etat qui préciserait par exemple, les conditions et les niveaux d'appui que l'Etat pourrait accorder à celles dont les activités sont palpables sur le terrain, les modalités d'organisation d'un cadre de concertation permanent, les exonérations fiscales que l'Etat pourrait consentir dans le cadre exclusif de leurs activités.

    Les perspectives ci-dessus évoquées constituent notre modeste contribution en vue de la construction d'un Etat entièrement acquis à la cause des droits de l'homme et dans lequel, les quelques errements qui surviendraient, seraient considérés non pas comme des « boulets » à diriger contre leurs auteurs169(*), mais une occasion pour chaque individu de se remettre profondément en question, car la dignité humaine et toutes ses formes d'expression n'ont pas de prix.

    CONCLUSION GENERALE

    Les développements relatifs à notre étude sur la problématique de l'émergence d'une culture des droits de l'homme au Cameroun nous ont conduit à faire un état des lieux sur la question.

    D'un contexte où la réalité de ces droits à longtemps connu « une situation d'infortune, de drame et de désarroi »170(*), on est progressivement passé, mais non sans heurts et pressions diverses, à un environnement hostile aux formes d'avilissement de la personne humaine, en se mettant à l'école de l'acquisition d'une culture des droits de l'homme.

    L'adhésion du Cameroun à cette dynamique qui est universelle (mais à des périodes et degrés différents), se manifeste par la mise en place d'un cadre juridique général de la protection, mais aussi de la promotion des droits et libertés de la personne humaine. Au-delà des garanties conventionnelles171(*), constitutionnelles172(*) et infra constitutionnelles173(*) qui sont l'expression d'une volonté politique des pouvoirs publics, l'apparition, ou alors le renforcement de la société civile (à la faveur d'un assouplissement du cadre juridique et réglementaire des associations et ONG), permet de mener des actions de proximité au quotidien en faveur de la promotion et de la défense des droits de l'homme.

    Le processus d'intégration de cette culture, aussi bien par les gouvernants que par les gouvernés, reste encore fragile, ceci au regard des obstacles institutionnels et socio-économiques qui se placent en travers de son chemin. En effet, le respect de ces droits ainsi que leur consolidation dans la pratique nécessite une mobilisation générale, une perpétuelle remise en cause. C'est pourquoi « le « mea culpa » des uns doit encourager les efforts des autres dans ce chantier qui n'exclut personne, qui ne justifie aucun particularisme »174(*).

    De toute évidence, la présente étude sur la réalité des droits de l'homme au Cameroun ne peut prétendre avoir abordé tous les aspects du sujet, étant donné le vaste champ que ces droits et libertés couvrent, même s'il convient de remarquer qu'au Cameroun, l'accent est davantage mis sur les droits civils et politiques.

    Il faut espérer qu'avec le redressement en cours de la situation économique du pays, souvent tirée comme argument pour mettre sous boisseau les droits économiques, sociaux et culturels175(*), les droits de l'homme retrouveront leur caractère indivisible. Car, la jouissance de ces derniers ne peut s'accommoder d'un environnement de précarité et de pauvreté des populations176(*).

    Quoi qu'il en soit, la conclusion qu'on peut tirer de ce travail est que la culture des droits de l'homme est une veille permanente, qui s'acquiert et se consolide dans la patience et avec ténacité. Aussi, pouvons-nous partager le propos de Emmanuel DECAUX selon lequel « c'est d'abord sur le terrain, à travers un dialogue social permanent, que les droits de l'homme peuvent prendre racine »177(*).

    BIBLIOGRAPHIE

    OUVRAGES

    1. Cabinet Civil de la Présidence de la République du Cameroun, Cameroun 1982-1992, des faits et des chiffres : Le bilan de la décennie BIYA, Yaoundé, Imprimerie Saint Paul, 1992, 434 p.

    2. Cahier africain des droits de l'homme n°4, Penser et réaliser les droits de l'homme en Afrique centrale, Yaoundé, Presses de l'UCAC, 2000, 261 p.

    3. Cahier africain des droits de l'homme n°8, Dynamiques citoyennes et dignité humaine en Afrique centrale, Yaoundé, Presses de l'UCAC, 2002, 266 p.

    4. Cahier de l'UCAC n°7, Anthropologie, foi et développement, Yaoundé, Presses de l'UCAC, 2004, 291 p.

    5. HEYMANN-DOAT (A), Libertés publiques et droits de l'homme, 3ème édition, Paris, LGDJ, 1994, 252 p.

    6. MELONE (S), MINKOA SHE (A), SINDJOUN (L), La reforme constitutionnelle du 18 janvier 1996 au Cameroun : Aspects juridiques et politiques, Yaoundé, Fondation Friedrich Ebert, 1996, 418 p.

    7. MAUGENEST (D) et BOUKONGOU (J.D), Vers une société de droit en Afrique centrale, Yaoundé, Presses de l'UCAC, 2001, 455 p.

    8. N'GBANDA NZAMBO-KO-ATUMBA (H), Afrique : Démocratie piégée, Condé-sur-noireau, Equilibres Aujourd'hui, 1994, 183 p.

    9. OLINGA (A.D), La Constitution de la République du Cameroun, Yaoundé, éd. Terre Africaine et Presses de l'UCAC, 2006, 326 p.

    10. OLINGA (A.D), L'ONEL : Réflexions sur la loi camerounaise du 19 décembre 2000 portant création d'un Observatoire National des Elections, 2ème édition, Yaoundé, Presses de l'UCAC, 2002, 74 p.

    11. OYONO (D) et Al, Cameroun : Les chantiers de la gouvernance, Yaoundé, Imprimerie Saint-Paul, 2004, 144 p.

    MEMOIRES

    1. MAHOUVE (M), Le contrôle juridictionnel des restrictions à la liberté de la presse écrite au Cameroun (au regard de la loi de 1996 modifiant et complétant celle de 1990 relative à la liberté de communication sociale), Mémoire DIU Droits fondamentaux, 1998, 51 p.

    2. NDOH ONDOBO (D), La gestion de l'information relative aux violations des droits de l'homme : le cas de la Commission nationale des droits de l'homme et des libertés du Cameroun, Mémoire Ethique des Droits de l'Homme, 2005, 77 p.

    REVUES ET RAPPORTS

    1. Bulletin des droits de l'homme 91/1, Nations Unies, 1992, 136 p.

    2. Lex Lata « Spécial constitution », n°023-024, février - mars 1996, 38 p.

    3. Rapport d'activité annuel 2002 de la Commission nationale des droits de l'homme et des libertés, 17 p.

    4. Revue de la Commission Africaine des Droits de l'Homme et des Peuples, Tome 8, n°2 et Tome 9, n°1.

    5. Revue internationale de droit africain, EDJA n°50, juillet- août- septembre 2001, 91 p.

    ARTICLES

    1. ADOUM (S), MBALA (F), « La contribution de la société civile à la promotion des droits de l'homme en Afrique centrale: Essai d'analyse » ; Cahier africain des droits de l'homme n°8, Dynamiques citoyennes et dignité humaine en Afrique centrale, Yaoundé, Presses de l'UCAC, 2002, pp. 253-261.

    2. BOUKONGOU (J.D), « Dire le droit en Afrique francophone », Cahier de l'UCAC, Anthropologie, foi et développement, Yaoundé, Presses de l'UCAC, 2004, pp. 204-218.

    3. BOUKONGOU (J.D), « Prolégomènes sur la contribution de la société civile à la promotion de la dignité humaine au Cameroun », Cahier africain des droits de l'homme n°8, Dynamiques citoyennes et dignité humaine en Afrique centrale, Presses de l'UCAC, 2002, pp. 15-28.

    4. GROS ESPIELL (H), « Les droits de l'homme et le droit international humanitaire », Bulletin des droits de l'homme 91/1, Nations Unies, 1992, pp.15-26.

    5. KAMTO (M), « Révision constitutionnelle ou écriture d'une nouvelle constitution », Lex Lata, n° 023-024, février - mars 1996, pp.17-20.

    6. KUATE TAMEGHE (S.S), « La contribution du juge à la protection des droits de l'homme », MAUGENEST (D), BOUKONGOU (J.D), Vers une société de droit en Afrique centrale, Yaoundé, Presses de l'UCAC, 2001, p. 237.

    7. KONDE MBOM (J. B), « Nouvelle problématique de l'éducation au respect de la dignité humaine en droit international des droits de l'homme », in Revue de la Commission Africaine des droits de l'homme et des peuples, Tome 9, n°1, 2000, pp. 20-43.

    8. MENGUE (M.T), « La resocialisation des enfants en difficulté au Cameroun à l'épreuve de la culture de la rue » in Dynamiques citoyennes et dignité humaine en Afrique centrale, Yaoundé, Presses de l'UCAC, 2002, pp. 29-50.

    9. NGUELE ABADA (M), « Le progrès de l'Etat de droit : avancée réelle ou poudre aux yeux ? », MAUGENEST (D), BOUKONGOU (J. D), Vers une société de droit en Afrique centrale, Yaoundé, Presses de l'UCAC, 2001, pp. 129-150.

    10. NGUEMEGNE (J.P), « Réflexions sur l'usage et le respect des droits de l'homme au Cameroun : le droit de vote depuis 1990 » ; MAUGENEST (D), BOUKONGOU (J.D), Vers une société de droit en Afrique centrale, Yaoundé, Presses de l'UCAC, 2001, pp. 151 et S.

    11. OLINGA (A.D) « La naissance du juge constitutionnel camerounais : La Commission nationale électorale autonome devant la Cour suprême », Juridis Périodique n°36, oct. - déc. 1988, pp. 71 et S.

    12. OLINGA (A.D), « Les défis de l'émergence d'une culture des droits de l'homme dans les sociétés d'Afrique centrale », MAUGENEST (D), BOUKONGOU (J.D), Vers une société de droit en Afrique centrale, Yaoundé, Presses de l'UCAC, 2001, pp. 289-302.

    13. OLINGA (A.D), « Vers une garantie constitutionnelle crédible des droits fondamentaux », MELONE (S), MINKOA SHE (A), SINDJOUN (L), La reforme constitutionnelle du 18 janvier 1996 au Cameroun : Aspects juridiques et politiques, Yaoundé, Fondation Friedrich Ebert, 1996, pp. 320-346.

    14. ONANA ETOUNDI (F), « La pratique de la loi n°90/53 du 19 décembre 1990 portant liberté d'association au Cameroun », Cahier africain des droits de l'homme n°4, Penser et réaliser les droits de l'homme en Afrique centrale, Yaoundé, Presses de l'UCAC, 2000, pp. 223-234.

    15. POUGOUE (P.G), « La législation camerounaise et la protection des droits de l'homme », Cahier africain des droits de l'homme n°4, Penser et réaliser les droits de l'homme en Afrique centrale, Presses de l'UCAC, 2000, pp. 101-119.

    16. TEPI (S), « Le juge dans les pays de droit mixte (le système de droit romaniste et la common law) : l'exemple du Cameroun », Revue internationale de droit africain EDJA n° 50, juillet - août - septembre 2001, pp. 17-31.

    ANNEXES

    ANNEXE 1

    Préambule de la loi n°06 du 18 janvier 1996 portant révision de la Constitution du 02 juin 1972

    ANNEXE 2

    Quelques instruments internationaux relatifs aux droits de l'homme signés et/ou ratifiés par le Cameroun

    Instruments

    Date d'adoption

    Date de signature

    Date de ratification

    Déclaration universelle des droits de l'homme

    10 déc. 1948

     
     

    Convention internationale pour l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale

    21 déc. 1965

    12 déc. 1966

    24 juin 1971

    Pacte international relatif aux droits civils et politiques et son protocole facultatif

    16 déc. 1966

     

    27 juin 1984

    Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels

    16 déc. 1966

     

    27 juin 1984

    Convention relative au statut des réfugiés

    28 juillet 1951

    23 octobre 1961

     

    Protocole relatif au statut des réfugiés

    31 janvier 1967

     

    19 sept.1967

    Convention de l'OUA régissant les aspects propres aux problèmes des réfugiés en Afrique

    10 sept.1969

    10 sept.1969

    7 sept. 1985

    Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes

    18 déc. 1979

    6 juin 1983

    23 août 1994

    Protocole facultatif à la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes

    10 déc. 1999

     

    7 janvier 2005

    Charte africaine des droits de l'homme et des peuples

    26 juin 1981

    23 juillet 1987

    20 juin 1989

    Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants

    10 déc.1984

     

    19 déc.1986

    Convention relative aux droits de l'enfant

    20 nov.1989

    27 sept. 1990

    11 janvier 1993

    Charte africaine des droits et du bien être de l'enfant

    Juillet 1990

    16 sept. 1992

    5 sept. 1997

    protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l'enfant et concernant la participation des enfants aux conflits armés

    25 mai 2000

    5 oct.2001

     

    Convention des Nations unies contre la criminalité transnationale organisée

    15 nov. 2000

     

    2004

    Convention des Nations unies contre la corruption

    31 oct. 2003

     

    2004

    TABLE DES MATIERES

    DEDICACE I

    REMERCIEMENTS II

    SOMMAIRE III

    LISTE DES SIGLES ET ABREVIATIONS IV

    INTRODUCTION GENERALE 1

    PREMIERE PARTIE : LES DROITS DE L'HOMME AU CAMEROUN : DES DROITS EMERGENTS. 4

    CHAPITRE I : LES FACTEURS DECLENCHEURS DE LA NECESSITE DU RESPECT DES DROITS DE L'HOMME 5

    SECTION 1 : LES FACTEURS EXOGENES 5

    Paragraphe 1 : La fin de la guerre froide 6

    A- Le vent de démocratisation venu de l'Est 7

    B- Le discours de La Baule 7

    Paragraphe 2 : L'action des organisations internationales 9

    A- Les institutions financières et la coopération 9

    B- L'influence de l' OIF et du « Commonwealth » 10

    SECTION 2 : LES FACTEURS ENDOGENES 11

    Paragraphe 1 : Le contexte socio-politique tendu 12

    A-Les causes du mécontentement des populations 12

    B- L'expression des revendications 13

    Paragraphe 2 : Les pressions diverses sur les gouvernants 13

    A- Les pressions économiques 14

    B- Les pressions politiques 14

    CHAPITRE II : LES MANIFESTATIONS DE L'EMERGENCE DE LA CULTURE DES DROITS DE L'HOMME 16

    SECTION 1 : L'ACTION DES POUVOIRS PUBLICS 16

    Paragraphe 1 : La constitutionnalisation des droits de l'homme 17

    A- Les droits classiques 17

    B- Les nouveaux droits consacrés par la constitution 19

    Paragraphe 2 : L'encadrement législatif des droits et libertés 21

    A- Les lois sur les libertés et les autres domaines relatifs aux droits de l'homme 21

    1- La loi n°90/53 du 19 décembre 1990 portant liberté d'association 22

    2- La loi n°90/52 relative à la liberté de la communication sociale 22

    3- La loi n°92/007 du 14 août 1992 portant code du travail 24

    4- Les autres textes législatifs 25

    B- La législation sur les catégories spécifiques 27

    1- La loi n°83/013 du 21 juillet 1983 relative à la protection des personnes handicapées 27

    C - La reforme de la procédure pénale 29

    Paragraphe 3 : La création des cadres de promotion et de protection des droits de l'homme 32

    A- La Commission Nationale des Droits de l'Homme et des Libertés (CNDHL) 32

    1- Le contexte historique de la création de la CNDHL 32

    2- Les missions de la CNDHL 33

    3- Les activités de la CNDHL 34

    B - Les organes de régulation, de contrôle et de suivi de l'exercice des droits et libertés 36

    1- Le Comité technique de suivi des instruments internationaux en matière des droits de l'homme 37

    2- Le Programme national de gouvernance (PNG) 37

    3- Le Conseil national de la communication (CNC) 38

    4- L'Observatoire national des élections (ONEL) 39

    SECTION 2 : L'ACTION DE LA SOCIETE CIVILE 40

    Paragraphe 1 : La contribution des ONG et associations au renforcement du cadre normatif et institutionnel 41

    A- L'implication dans certaines instances de concertation et de décision 41

    B- L'influence sur le renforcement du cadre normatif 42

    Paragraphe 2 : La contribution à l'amélioration des pratiques respectueuses des droits de l'homme 43

    A- Les campagnes d'éducation aux droits de l'homme 43

    1- La contribution des ONG ou associations 43

    B- L'action en faveur des groupes vulnérables 45

    1- Les enfants 46

    2- Les femmes 46

    3- Les personnes handicapées 47

    4-Les personnes âgées 47

    C- Les dénonciations des atteintes à la dignité humaine 48

    DEUXIEME PARTIE : LES DROITS DE L'HOMME AU CAMEROUN :

    DES DROITS A CONSOLIDER 51

    CHAPITRE I : LES DIFFICULTES DE MISE EN OEUVRE DE LA PROTECTION DES DROITS DE L'HOMME 52

    SECTION 1 : LES OBSTACLES AU RESPECT ET A LA PROTECTION DES DROITS DE L'HOMME 52

    Paragraphe 1 : Les faiblesses inhérentes au système judiciaire 53

    A- Au plan fonctionnel 53

    1- Le statut des juges 53

    2- Les entraves à la protection juridictionnelle des droits de l'homme 55

    3- L'accès des justiciables à la justice 57

    4- Les lenteurs judiciaires 58

    B- Au plan structurel 58

    1- Le déficit infrastructurel 58

    2- L'insuffisance des ressources humaines et matérielles 59

    Paragraphe 2 : Les insuffisances relatives à la législation 60

    A- Les insuffisances dans l'aménagement des restrictions des libertés 60

    B- Un nécessaire renforcement de la législation sur les droits de l'homme 61

    Paragraphe 3 : Le poids des traditions culturelles 62

    SECTION 2 : L'INFLUENCE DES POUVOIRS PUBLICS SUR LES INSTITUTIONS INTERVENANT DANS LE CHAMP DES DROITS DE L'HOMME 63

    Paragraphe 1 : La CNDHL 64

    Paragraphe 2 : Le CNC 65

    Paragraphe 3 : L'ONEL 66

    CHAPITRE II : LES PERSPECTIVES 68

    SECTION 1 : LE RENFORCEMENT DE L'ETAT DE DROIT ET

    DE LA DEMOCRATIE 68

    Paragraphe 1 : La consolidation de la bonne gouvernance 69

    Paragraphe 2 : Le renforcement de l'éducation aux droits de l'homme 70

    SECTION 2 : UNE MEILLEURE ORGANISATION DE LA SOCIETE CIVILE 72

    Paragraphe 1 : Le renforcement des capacités des associations de défense des droits de l'homme 73

    A- L'amélioration de la qualité des ressources humaines 73

    B- La mobilisation des ressources financières 74

    Paragraphe 2 : Le développement des partenariats 75

    A- Les ONG et associations entre elles 75

    1- Au plan interne 75

    2- Au plan international 76

    B- Les associations et les pouvoirs publics 76

    CONCLUSION GENERALE 78

    BIBLIOGRAPHIE 80

    ANNEXES 84

    TABLE DES MATIERES 85

    * 1 La fin de la guerre froide, avec la chute de « l'empire Soviétique ». Voir infra, première partie, chapitre I, section 1, I.

    * 2 OLINGA (A.D), « Les défis de l'émergence d'une culture des droits de l'homme dans les sociétés d'Afrique centrales », MAUGENEST (D), BOUKONGOU (J. D), Vers une société de droit en Afrique centrale, Yaoundé, Presses de l'UCAC, 2001, p. 289.

    * 3 MENGUE ME ENGOUANG (F), cité par NGUEMEGNE (J.P), « Réflexions sur l'usage et le respect des droits de l'homme au Cameroun : le droit de vote depuis 1990 » ; MAUGENEST (D), BOUKONGOU (J. D), Vers une société de droit en Afrique centrale, Yaoundé, Presses de l'UCAC, 2001, p. 151.

    * 4 NGUELE ABADA (M), « Le progrès de l'Etat de droit : avancée réelle ou poudre aux yeux ? », MAUGENEST (D), BOUKONGOU (J. D), Vers une société de droit en Afrique centrale, Yaoundé, Presses de l'UCAC, 2001, p. 136.

    * 5 N'GBANDA NZAMBO-KO-ATUMBA (H), Afrique : démocratie piégée, Condé-sur-Noireau, Equilibres Aujourd'hui, 1994, p. 87. Il souligne que dans l'entendement de son initiateur, la philosophie de la perestroïka consiste essentiellement en une rationalisation et une rentabilisation du système socialiste dans l'optique de pouvoir lui rendre toute sa performance et gagner la guerre froide qui l'opposait aux Etats-Unis et à leurs alliés.

    * 6 Cette vague libérale est le fait de la perestroïka (restructuration) et de la glasnost (transparence) initiées par Mikhaïl GORBATCHEV en 1985, dont les résultats ont produit l'effet contraire escompté, entraînant l'exacerbation des nationalismes dans l'ex-URSS et la chute du socialisme.

    * 7 Ce sont le Bénin, le Congo (Brazzaville), l'Ethiopie, la Somalie. N'GBANDA NZAMBO-KO-ATUMBA (H), op. cit, p. 87.

    * 8 AHMADOU AHIDJO a été le premier Président de la République du Cameroun (1960-1982).

    * 9 L'année 1990 voit en effet l'Assemblée nationale voter, sous l'impulsion du gouvernement, une série de lois sur les libertés.

    * 10 N'GBANDA NZAMBO-KO-ATUMBA (H), op. cit, p. 89.

    * 11 Ces inquiétudes se sont exprimées au lendemain du Sommet de La Baule, lors du 26ème Sommet de l'OUA (9-11 juillet 1990). Dans la déclaration finale, tout en s'engageant à démocratiser leurs sociétés et à consolider les institutions démocratiques, les Chefs d'Etat et de gouvernement exprimaient leurs inquiétudes quant à la tendance qui vise à imposer de nouvelles conditions de nature politique pour l'assistance.

    * 12 Le Sénégal dont ABDOU DIOUF était le président, est l'un des premiers pays africains à s'être engagé sur la voie de la libéralisation de la vie politique, et ceci, avant même que ne souffle le « vent d'Est ». En effet, après le retrait volontaire du président Senghor, le multipartisme y a été instauré et les élections pluralistes organisées.

    * 13 Il s'agit en réalité des prêts consentis par ces institutions, qui sont destinés à financer les projets de développement.

    * 14 Association d'anciennes possessions de l'empire britannique devenues des Etats indépendants et ayant établi entre elles une certaine solidarité.

    * 15 Communauté des Etats ayant le français en partage.

    * 16 Après la première guerre mondiale, le Cameroun qui était jusque là sous protectorat allemand (1884 - 1916) a été placé par la SDN sous mandat franco-britannique, avant de passer en 1946, sous l'impulsion de l'ONU, sous le régime de la tutelle internationale confiée à la France et à l'Angleterre. Le Cameroun Oriental était ainsi dévolu à la France, tandis que le Cameroun Occidental restait sous administration britannique.

    * 17 Sommets de Dakar (1989), Chaillot (1991), Maurice (1993), Cotonou (1995).

    * 18 Réunions thématiques de N'djamena (Tchad) sur les institutions de la démocratie et de l'Etat de droit, puis celle de Paris sur les élections en mars et avril 2000.

    * 19Colloque de Yaoundé (Cameroun) sur la démocratie et les sociétés plurielles, organisé conjointement avec le Commonwealth ; Conférence de Cotonou (Bénin) sur le bilan des conférences nationales et autres processus de transition démocratique en Afrique, en janvier et février 2000.

    * 20 MOUANGUE KOBILA (J) cité par OLINGA (A.D), « Vers une garantie constitutionnelle crédible des droits fondamentaux », MELONE (S), MINKOA SHE (A), SINDJOUN (L), La reforme constitutionnelle du 18 janvier 1996 au Cameroun : Aspects juridiques et politiques, Yaoundé, Fondation Friedrich Ebert, 1996, p. 320.

    * 21 Les développements sur les évènements du 26 mai 1990 sont de NGUELE ABADA (M), op. cit, p. 134.

    * 22 Ils réclament l'instauration du multipartisme, l'organisation d'une conférence nationale (comme au Congo, au Tchad ou au Bénin...) et l'organisation d'élections transparentes, libres.

    * 23 Respect des échéances pour le paiement du service de la dette, difficultés à payer les salaires des agents publics, à assurer les subventions aux organismes para-publics et aux établissements scolaires privés.

    * 24 Il s'agit du Rassemblement Démocratique du Peuple Camerounais (RDPC) crée en mars1985, après l'accession à la Magistrature suprême de M. Paul BIYA (6 novembre 1982), pour remplacer l'Union Nationale Camerounaise (UNC).

    * 25 Sur la question des innovations opérés au sein du RDPC, voir l'ouvrage commis par le Cabinet Civil de la Présidence de la République du Cameroun, intitulé : Cameroun 1982-1992 des faits et des chiffres : le bilan de la décennie BIYA, Yaoundé, Imprimerie Saint Paul, 1992, pp. 53-54.

    * 26 Le terme promotion s'entend comme les différentes stratégies ayant pour objet de développer la connaissance des droits de l'homme, à travers des actions de sensibilisation, auprès de tous les membres de la société.

    * 27 Le Cameroun a connu quatre constitutions : celle du 4 mars 1960 au lendemain de l'indépendance (1er janvier 1960), la constitution fédérale du 1er septembre 1961, celle du 2 juin 1972 à la suite de la réunification du Cameroun oriental et occidental (20 mai 1972) et l'actuelle qui date du 18 janvier 1996.

    * 28 Cette idée est exprimée par GROS ESPIELL (H), « Les droits de l'homme et le droit international humanitaire », Bulletin des droits de l'homme 91/1, Nations Unies, 1992, p.17.

    * 29 Selon KAMTO (M), « Révision constitutionnelle ou écriture d'une nouvelle constitution », Lex Lata, n° 023-024, février - mars 1996, pp.17-20, «l'ampleur de la révision incline à dire qu'il s'agit techniquement d'une nouvelle constitution sous couvert d'une révision constitutionnelle ».

    * 30 Sur cette question, voir OLINGA (A.D), La Constitution de la République du Cameroun, Yaoundé, éd. Terre Africaine et Presses de l'UCAC, 2006.

    * 31 Il s'agit là d'une innovation controversée qui a alimenté de nombreux débats et il y a à craindre que le constituant n'ait ainsi ouvert la voie à de possibles conflits sociaux. Il devient donc urgent pour lui de préciser sinon les minorités, du moins les droits qui leurs sont reconnus sans porter atteinte au principe d'égalité et à la liberté de s'établir en tout lieu du territoire.

    * 32 OLINGA (A.D), « vers une garantie constitutionnelle crédible des droits fondamentaux », op. cit, p. 333.

    * 33 Les dispositions qui fixent le cadre d'exercice de la liberté syndicale et du droit de grève sont énoncées dans la loi n° 92/007 du 14 août 1992 portant Code du travail, respectivement au titre II (articles 3 à 22) et au titre IX (article 157).

    * 34 L'article 65 précise que : « Le préambule fait partie intégrante de la Constitution ». Les droits qui y sont énoncés sont donc inviolables et opposables au pouvoir comme aux citoyens.

    * 35 OLINGA (A.D), op. cit, p.321.

    * 36 ONANA ETOUNDI (F), « La pratique de la loi n°90/53 du 19 décembre 1990 portant liberté d'association au Cameroun », Cahier africain des droits de l'homme n°4, Penser et réaliser les droits de l'homme en Afrique centrale, Yaoundé, Presses de l'UCAC, 2000, pp. 223-234.

    * 37 La loi soumet les associations à un double régime juridique : la déclaration préalable et l'autorisation pour les associations étrangères et religieuses.

    * 38 Contrôle administratif et juridictionnel, à travers la prévention et la répression des excès qui dépasseraient les limites de cette liberté soumise à la préservation de l'ordre public et des bonnes moeurs.

    * 39 MAHOUVE (M), Le contrôle juridictionnel des restrictions à la liberté de la presse écrite au Cameroun, mémoire DIU en droits fondamentaux, 1998, pp.1-2.

    * 40 L'expression est de KONTCHOU KOUOMEGNI (A), cité par MAHOUVE (M) op. cit, p. 2.

    * 41 Loi de 1990, relative à la liberté de communication sociale, article 7.

    * 42 Environ 200 titres de journaux privés paraissent actuellement au Cameroun, 30 radios privées, 27 radios communautaires, 9 de chaînes de télévision privées émettent, 86 entreprises privées de publicité exercent. Source : Ministère de la Communication.

    * 43 Loi n°74/14 du 27 novembre 1974 portant code du travail.

    * 44 En dépit de ces innovations, la loi de 1992 comporte des points d'ombre qui ont fait dire à certains juristes qu'elle contribue à précariser l'emploi au Cameroun, en accordant aux employeurs de nombreux privilèges. A titre d'exemple, un contrat de travail à durée déterminée ne peut être conclu pour une durée supérieure à deux ans et ne peut être renouvelé plus d'une fois avec la même entreprise, tandis qu'un contrat de travail à durée indéterminée peut cesser à tout moment par la volonté des parties (article 25).

    * 45 Le titre II de la loi de 1992 contient les dispositions relatives à l'exercice de cette liberté syndicale en ses articles 3 à 22.

    * 46 Modifiée par la loi n°97/012 du 10 janvier 1997.

    * 47 Le code pénal camerounais qui résulte de la loi n°65-LF-24 du 12 novembre 1965 et de la loi n°67-LF-1 du 12 juin 1967 a connu plusieurs textes modificatifs dont la loi n°97/009 du 10 janvier 1997 ci-dessus évoquée, qui modifie et complète certaines de ses dispositions.

    * 48 Il convient cependant de mentionner que malgré l'absence de législation les concernant, l'Etat, appuyé par certaines ONG telles que INADES-FORMATION, a entrepris des actions visant à développer chez ces groupes de population, le sentiment d'appartenance à la communauté nationale et à faciliter leur intégration socio-économique. Ces actions qui visent notamment les peuples nomades du Nord Cameroun ainsi que les pygmées des provinces de l'Est et du Sud, portent sur l'initiation aux travaux agricoles et à l'élevage, la construction des centres de santé et l'initiation aux mesures d'hygiène et de salubrité, l'encouragement de la scolarisation des enfants, etc.

    * 49 Article 1er de la loi.

    * 50 Décret n°90/1516 du 26 novembre 1990 fixant les modalités d'application de la loi n°83/013 du 21 juillet 1983 relative à la protection des personnes handicapées.

    * 51 Article 3 de la loi.

    * 52 Ces aides comprennent : la pension d'invalidité, l'exemption de frais scolaires aux enfants nés de parents handicapés indigents, les bourses scolaires et universitaires, des aides en espèce ou en nature aux jeunes handicapés (article 8 de la loi et article 5 décret d'application).

    * 53 Article 7 de la loi.

    * 54 L'Organisation de l'Unité Africaine (OUA) est devenue depuis le 12 juillet 2000, Union Africaine (UA). Son acte constitutif a été adopté à Lomé au Togo lors du 36ème sommet de l'OUA.

    * 55 Article 7 « aucune personne ne peut être refoulée à la frontière, ni faire l'objet d'autres mesures quelconques qui la contraindraient à retourner ou demeurer dans un territoire où sa vie, son intégrité corporelle ou sa liberté seraient menacés... ».

    * 56 La justice évoque à la fois une valeur au sens moral, et une institution. Nous l'abordons ici dans sa dimension institutionnelle, en tant que appareil judiciaire c'est-à-dire, l'ensemble des juridictions chargées de connaître des litiges qui opposent l'Etat aux particuliers, et les particuliers entre eux, mais surtout du point de vue de l'application du droit par ces tribunaux.

    * 57 A ce sujet, TEPI (S) pense que « le Cameroun conserve une culture bi-juridique où se juxtaposent deux grands systèmes de droit : le droit romaniste et la common law ». Mais il observe qu'une volonté d'unifier les deux systèmes a été amorcée en 1972 avec l'Ordonnance n°72/4 du 26 août 1972 portant organisation judiciaire qui comporte des éléments empruntés dans les deux systèmes de droit.

    Voir son article « Le juge dans les pays de droit mixte (le système de droit romaniste et la common law) : l'exemple du Cameroun », Revue internationale de droit africain EDJA n° 50, juillet - août - septembre 2001, pp. 17-31.

    * 58 La partie francophone comprend huit provinces (l'Adamaoua, le Centre, l'Est, l'Extrême Nord, le Littoral, le Nord, l'Ouest et le Sud) et la partie anglophone en compte deux (le Nord-Ouest et le Sud-Ouest).

    * 59 Article 8 du CPP.

    * 60 Article 122 du CPP.

    * 61 Possibilité donnée au juge, lorsqu'il est saisi d'une requête à cet effet, d'ordonner la libération immédiate d'une personne arrêtée ou détenue à la suite d'une illégalité ou d'une irrégularité dans la procédure ayant conduit à la privation de liberté.

    * 62 C'est une mesure qui vise à obliger le condamné à exécuter les condamnations pécuniaires ou à effectuer les restitutions ordonnées par une juridiction répressive. Elle consiste en une incarcération au cours de laquelle le débiteur est astreint au travail.

    * 63 L'article 218 la définit comme « une mesure exceptionnelle qui ne peut être ordonnée qu'en cas de délit ou de crime. Elle a pour but de préserver l'ordre public, la sécurité des personnes et des biens ou d'assurer la conservation des preuves ainsi que la représentation en justice de l'inculpé ».

    * 64 Il s'agit au terme de l'article 119, d' « une mesure de police en vertu de laquelle une personne est, dans le cadre d'une enquête préliminaire,en vue de la manifestation de la vérité, retenue dans un local de police judiciaire pour une durée limitée... ».

    * 65 Le nouveau code de procédure pénale entrera en vigueur le 1er août 2006, conformément aux dispositions de son article 747 « la présente loi entrera en vigueur le premier jour du treizième mois suivant celui de sa promulgation ».

    * 66 Déclaration du Pr. KAMTO Maurice, Ministre délégué auprès du Vice-premier ministre de la justice garde des sceaux, lors de l'ouverture du séminaire de vulgarisation dudit code, le 8 mai 2006 à Bafoussam, dans la province de l'Ouest.

    * 67 Aujourd'hui remplacée par le Conseil des droits de l'homme, créé le 15 mars 2006 par une résolution de l'Assemblée Générale des Nations unies n°AG/10449, la Commission des droits de l'homme fut créée le 21 juin 1946 par la Résolution 9 (II) du Conseil économique et social des Nations unies.

    * 68 Le Togo et le Bénin font partie des pionniers car, leurs Commissions des droits de l'homme ont été créées respectivement en 1987 et 1989.

    * 69 Décret n°90/1459 du 8 novembre 1990, portant création du Comité national des droits de l'homme et des libertés.

    * 70 La création du Comité par décret présidentiel s'est avérée non-conforme aux principes de Paris régissant le fonctionnement des institutions nationales de protection des droits de l'homme.

    * 71 Article 1, paragraphe 2 de la loi du 22 juillet 2004 portant création, organisation et fonctionnement de la CNDHL.

    * 72 HAMID GRAHAM est ancien fonctionnaire au Haut Commissariat des Nations Unies pour les droits de l'homme.

    * 73 Le décret n°2005/254 du 7 juillet 2005 dote la CNDHL d'un secrétariat permanent et de services internes.

    * 74 En 2002 par exemple, elle a été saisie de 286 requêtes dont les plus nombreuses portaient sur la violation des droits à un procès équitable, à la propriété, sur la garde à vue prolongée, le droit au travail, les abus d'autorité et de pouvoir, les tortures et traitements inhumains et dégradants, les arrestations et détentions arbitraires et abusives (Cf. Rapport d'activité 2002 de la CNDHL, pp. 8-13).

    * 75 NDOH ONDOBO (D), La gestion de l'information relative aux violations des droits de l'homme : le cas de la Commission Nationale des droits de l'homme et des libertés du Cameroun, Mémoire pour l'obtention du Diplôme d'université de 2e cycle Ethique des droits de l'homme, 2004-2005, p. 30.

    * 76 Le rapport 2002 de la CNDHL (p. 12) fait ressortir la difficulté de ses rapports avec les administrations lorsque ces dernières sont mises en cause dans des cas d'atteinte aux droits des personnes. Très peu répondent à ses correspondances ou à ses convocations, d'autres refusent de rencontrer les délégations qui se présentent à elles.

    * 77 La CNDHL annonçait cet objectif dans son bilan quinquennal des activités 1992-1997. Les villes citées représentent les chefs lieux de quatre provinces sur les dix que compte le Cameroun.

    * 78 CNDHL, bilan quinquennal des activités, 1992-1997, p. 16.

    * 79 La CNDHL publie une revue trimestrielle intitulée Born Free.

    * 80 Il s'agit de la Commission africaine des droits de l'homme et des peuples, du Comité des droits de l'homme des Nations unies, du Comité contre la torture, du Comité pour l'élimination de la discrimination raciale.

    * 81 Cette annonce intervenait à l'occasion du message à la Nation du Président Paul BIYA, le 31 décembre 1995.

    * 82 Sur les activités du PNG, voir OYONO (D) et Al, Cameroun : les chantiers de la gouvernance, Yaoundé, Imprimerie Saint Paul, 2004, 144 p.

    * 83 Il s'agit là d'un volet transversal qui implique tous les secteurs de l'appareil de l'Etat. Il se concrétise par l'élaboration et la mise en oeuvre d'un plan d'action gouvernemental de lutte contre la corruption, la création au sein des administrations des structures de lutte contre ce fléau, l'application des sanctions pénales, administratives et disciplinaires contre les mis en cause, la création toute récente (Décret n°2006/088 du 11 mars 2006) d'une Commission nationale anti-corruption.

    Dès janvier 2006, la lutte contre la corruption a pris un tournant décisif avec l'application de la phase répressive. Ainsi, des Magistrats convaincus de telles pratiques ont été révoqués, trois Directeurs généraux de sociétés à capitaux publics et un Ministre en fonction ont été limogés, puis interpellés et mis à la disposition des autorités judiciaires. Le 23 mai 2006, 13 fonctionnaires du corps des douanes détenteurs de faux actes de gestion de carrière, ont été révoqués par des arrêtés du Ministre de la Fonction publique et de la Réforme administrative. (Voir Cameroon Tribune n° 8605/4804 du 24 mai 2006).

    * 84 Supra, Section 1, paragraphe 2, A, 2.

    * 85 Les infractions les plus courantes de la presse sont entre autres, la diffamation, l'atteinte à l'honneur et à la considération des individus, la propagation de fausses nouvelles, les écrits et propos séditieux, l'atteinte aux moeurs.

    * 86 Sur l'ONEL, voir OLINGA (A.D) in La Constitution de la République du Cameroun, op. cit, p 227 et s. Voir aussi du même auteur, l'ONEL : Réflexions sur la loi camerounaise du 19 décembre 2000 portant création d'un Observatoire National des Elections, Yaoundé, Presse de l'UCAC, 2002, 74 p.

    * 87 L'ONEL vient de rendre public, le 12 mai 2006, son rapport général sur le déroulement des opérations de l'élection présidentielle du 11 octobre 2004. Voir Cameroon Tribune n°8598/4797 du 15 mai 2006.

    * 88 Infra, deuxième partie, chapitre 1, section 2, paragraphe 3.

    * 89 Cette définition est de ABEGA (S.C), cité par BOUKONGOU (J.D), « Prolégomènes sur la contribution de la société civile à la promotion de la dignité humaine au Cameroun », Cahier africain des droits de l'homme n°8, Dynamiques citoyennes et dignité humaine en Afrique centrale, Presses de l'UCAC, 2002, p. 19.

    * 90 Une enquête réalisée par l'APDHAC en 1999 avait identifié pour la ville de Yaoundé, 60 ONG et associations déclarées qui opéraient dans le domaine des droits de l'homme. Mais, la réalité sur le terrain était toute différente car, plusieurs d'entre elles avaient cessé d'exister ou n'étaient tout simplement pas repérables à leur adresse d'enregistrement.

    * 91 Voir décision n°001/CAB/PM du 27 mai 2003, portant constitution du Comité de pilotage du Programme national de gouvernance.

    * 92 L'arrêté n°001/PM du 4 janvier 2000 fixe l'organisation de l'Observatoire de lutte contre la corruption.

    * 93 Créée par le décret n°2006/088 du 11 mars 2006.

    * 94 Elle fût annoncée et organisée en réponse aux exigences des partis politiques de l'opposition et d'une fraction de la société civile qui réclamaient la tenue d'une conférence nationale souveraine au cours de laquelle les bases de la société politique camerounaise devaient être remises en cause. Un refus catégorique leur fût opposé par le Président BIYA qui opta pour l'organisation d'un « large débat national » qui prit finalement l'appellation de Conférence tripartite (pouvoirs publics - partis politiques - société civile).

    * 95 Une action récente dans ce sens est le rapport des évêques du Cameroun sur l'élection présidentielle du 11 octobre 2004. Infra, section 2, paragraphe 2, A, 2.

    * 96 ADOUM (S), MBALA (F), « La contribution de la société civile à la promotion des droits de l'homme en Afrique centrale: Essai d'analyse » ; Cahier africain des droits de l'homme n°8, Dynamiques citoyennes et dignité humaine en Afrique centrale, Yaoundé, Presses de l'UCAC, 2002, pp.253 - 261.

    * 97ADOUM (S), MBALA (F), Op. cit, p.242.

    * 98 Sur la protection des enfants par les associations, voir MENGUE (M.T), « La resocialisation des enfants en difficulté au Cameroun à l'épreuve de la culture de la rue » in Dynamiques citoyennes et dignité humaine en Afrique centrale, Yaoundé, Presses de l'UCAC, 2002, pp. 29-50.

    * 99 Nous pouvons citer entre autres la bastonnade par les époux, les mutilations génitales, les traitements dégradants dans le cadre des rites de veuvage, les mariages précoces des filles impubères, la pratique du lévirat, la dépossession des biens en cas de décès du conjoint, l'exclusion des femmes de la succession, les difficultés d'accès à la propriété foncière, le difficile accès à certaines professions « réservées aux hommes ».

    * 100 Il s'agit notamment de l'assistance juridique et judiciaire, l'éducation au planning familial, l'appui au financement des micro-projets, l'éducation de la jeune fille à la sexualité, la formation à certains métiers.

    * 101 Voir pour la définition du handicapé, supra, Section 1, paragraphe 2, B, 1.

    * 102 Mise en place d'un cadre législatif et règlementaire, création de structures d'encadrement, octroi des aides et subventions diverses.

    * 103 PNUD, Annuaire des ONG du Cameroun, Yaoundé, août 1997.

    * 104 Les atteintes aux droits de l'homme au plan vertical concernent celles qui sont le fait de l'Etat à travers ses agents. Au plan horizontal, ce sont les violations qui sont causées par les individus entre eux.

    * 105 Il s'agit entres autres de Action Chrétienne pour l'abolition de la torture (ACAT - Littoral), Amnesty International, Human rights watch.

    * 106 Les atteintes graves aux droits de l'homme dont il est question dans le cadre de l'action du Commandement opérationnel à Douala ont été révélées dans l'affaire des neuf disparus du quartier Bépanda. Il s'agissait de jeunes gens arrêtés par les forces de l'ordre dans le cadre d'une enquête policière, dont on n'a plus eu de nouvelles depuis lors.

    * 107 A cet égard, des peines privatives de liberté à temps et à vie ont été prononcées, au terme des procédures judiciaires, à l'encontre des agents de la police et de la gendarmerie convaincus de mauvais traitements ou d'homicides sur la personne des individus poursuivis, arrêtés ou détenus. Sur la question, voir OLINGA (A.D), « les défis de l'émergence d'une culture des droits de l'homme dans les sociétés d'Afrique centrale », op. cit, p 294 et 295.

    * 108 POUGOUE (P.G), « La législation camerounaise et la protection des droits de l'homme », Cahier africain des droits de l'homme n°4, Penser et réaliser les droits de l'homme en Afrique centrale, Presses de l'UCAC, 2000, pp. 101-119. Pour lui, « l'aménagement de la garantie pratique est loin d'atteindre la promesse des fleurs ».

    * 109 Avec la révision constitutionnelle du 18 janvier 1996 (Titre V), on est passé de l'autorité judiciaire dans la constitution du 2 juin 1972, au pouvoir judiciaire.

    * 110 Commentaire d'une citation du Pr. ABDELFATTAH (A) par OLINGA (A.D), « L'émergence d'une culture des droits de l'homme dans les sociétés d'Afrique centrale », op. cit, p. 291

    * 111 Supra, première partie, Chapitre2, Section 1, paragraphe 2, C.

    * 112 Les principes fondamentaux relatifs à l'indépendance de la magistrature ont fait l'objet de résolutions de l'Assemblée Générale des Nations Unies (40/32 du 29 novembre 1985 et 40/146 du 13 décembre 1985).

    * 113 Article 37 de la Constitution du 18 janvier 1996.

    * 114 Un mouvement d'assainissement du corps des magistrats vient d'être engagé par le Chef de l'Etat qui préside le Conseil supérieur de la magistrature. En janvier 2006, des sanctions allant du retard à l'avancement à la révocation ont été prises à l'encontre de (quatre) magistrats convaincus d' « usure et abus de fonction », « abus de fonctions, abus de confiance, concussion et corruption », entre autres.

    * 115 NGUELE ABADA (M), op. cit, p. 148.

    * 116 L'article 37 de la Constitution fait du Président de la République le « garant de l'indépendance du pouvoir judiciaire ». Le Conseil supérieur de la magistrature qui est placé sous son autorité statue sur toutes les questions liées à la gestion de la carrière des magistrats (intégration, nomination, affectation, avancements, sanctions disciplinaires).

    * 117 L'expression est empruntée à HEYMANN-DOAT (A), Libertés publiques et droits de l'homme, Paris, L.G.D.J, 1994, 252 p. Par opposition au « temps de la loi » qui caractérise la prééminence du législateur dans le processus qui a conduit à l'élaboration de la loi, fondement des droits et libertés.

    * 118 Le Conseil constitutionnel est une innovation de la réforme constitutionnelle du 18 janvier 1996 (Titre VII, articles 46 à 52). Il est compétent en matière constitutionnelle (article 46), veille à la régularité des élections présidentielle, parlementaire et des consultations référendaires et en proclame les résultats (article 48).

    Il faut cependant regretter le fait que 10 ans après sa création, le Conseil constitutionnel n'est toujours pas mis en place. Ses attributions sont exercées par la Cour suprême qui est la plus haute juridiction en matière judiciaire, administrative et de jugement des comptes (article 38).

    * 119 Le Conseil constitutionnel peut être saisi par les autorités ci-dessus citées, en cas de doute ou de litige sur la recevabilité d'une loi (article 18 al 3b), ou avant sa promulgation (article 47 al. 3).

    * 120 Voir OLINGA (A.D) « La naissance du juge constitutionnel camerounais : La Commission nationale électorale autonome devant la Cour suprême », Juridis Périodique n°36, oct. - déc. 1988, p. 71.

    * 121 Article 42 al. 2 de la Constitution de 1996. On attend toujours de voir la mise en place effective de ces tribunaux administratifs dont la compétence est pour le moment dévolue à la Cour suprême. La création de ce nouveau type de juridiction appelle une révision de l'Ordonnance n°72-4 du 26 août 1972 portant organisation judiciaire, ainsi qu'une réforme de l'Ordonnance n°72-6 du 26 août 1972 fixant l'organisation de la Cour suprême et de la loi n°75/17 du 8 décembre 1975 fixant la procédure devant la Cour suprême statuant en matière administrative.

    * 122 L'article 12 de l'Ordonnance n°72/6 du 26 août 1972 fixant l'organisation de la Cour suprême précise les modalités de l'exercice du recours gracieux.

    * 123 C'est le point de vue de POUGOUE (P.G), « La législation camerounaise et la protection des droits de l'homme », Penser et réaliser les droits de l'homme en Afrique centrale, op. cit, p. 115.

    * 124 L'article 126 b du Code pénal punit d'une détention de 6 mois à 5 ans le magistrat qui intime des ordres ou des défenses à des autorités administratives ou exécutives.

    * 125 Supra, Première partie, chapitre 2, section 2, paragraphe 2, C.

    * 126 Cette forme de justice consiste pour les populations à se rendre justice eux-mêmes lorsqu'elles sont soit offensées soit dépossédées de leurs biens. Aussi, un individu pris en flagrant délit de vol par exemple subira t-il une bastonnade. La plupart du temps, ce traitement réservé au coupable ou présumé aboutit à son décès du fait du traitement cruel qui lui est administré. Malgré la condamnation par les pouvoirs publics de telles pratiques qui livrent à la vindicte populaire des citoyens souvent innocent, le sentiment d'insécurité qui anime les populations les amène à agir en justiciers.

    * 127 Il s'agit là d'un droit qui est énoncé dans le préambule de la Constitution camerounaise. Cf. préambule en annexe.

    * 128 Supra, voir les développements sur le statut des juges.

    * 129 Décret n°76/54 du 9 novembre 1976 portant réglementation de l'assistance judiciaire.

    * 130 Statistiques du Ministère de la Justice, mai 2006.

    * 131 L'esprit corporatiste qui prévaut au sein de ces professions amène ceux qui exercent déjà à en bloquer l'accès. C'est ainsi que depuis plus de cinq ans, aucun concours pour le recrutement des avocats n'a été organisé, l'examen de fin de stage d'huissier non plus (de nouvelles charges n'étant pas créées). Il en est de même en ce qui concerne les Notaires.

    * 132 KUATE TAMEGHE (S.S), « La contribution du juge à la protection des droits de l'homme », MAUGENEST (D), BOUKONGOU (J.D), Vers une société de droit en Afrique centrale, Yaoundé, Presses de l'UCAC, 2001, p. 237).

    * 133 Un effort est fait dans ce sens depuis quelques années à travers la construction, avec l'appui de la Coopération française, de nouveaux « Palais de justice » et la rénovation de quelques anciens, notamment à Yaoundé et Douala.

    * 134 L'article 74 de l'Ordonnance de 1981 dispose que la femme mariée peut exercer une profession séparée de celle de son mari. Mais, que ce dernier peut s'opposer à l'exercice d'une telle profession dans l'intérêt du mariage et des enfants. Cette disposition constitue un danger pour la femme et une sérieuse entorse à son droit au travail, surtout lorsqu'on sait que dans le contexte africain, certains hommes ont tendance à confiner leurs femmes à la maison pour des raisons inavouées, aidés en cela par certaines traditions. Le législateur a ainsi ouvert une voie à l'arbitraire du mari, en lui laissant l'appréciation du danger que pourrait constituer pour le mariage ou les enfants, la profession de sa femme.

    * 135 Le Cameroun est un pays multiethnique où plus de deux cent ethnies se côtoient. Chacune a des particularités culturelles et traditionnelles qui accordent aux individus des droits, en fonction de la considération sociale qui leur est octroyée.

    * 136 OLINGA (A.D), « Les défis de l'émergence d'une culture des droits de l'homme dans les sociétés d'Afrique centrale », op. Cit, p. 299.

    * 137 Voir à ce sujet, Supra, Première partie, Chapitre 2, Section2, paragraphe2, B, 2, note 100.

    * 138 Diverses appellations des dignitaires traditionnels, considérés comme les dépositaires du pouvoir, dans les différents groupes ethniques du Cameroun.

    * 139 BOUKONGOU (J.D), « Dire le droit en Afrique francophone », Cahier de l'UCAC n°7, Anthropologie, foi et développement, Yaoundé, Presses de l'UCAC, 2004, p. 206.

    * 140 Supra, Première partie, Chapitre 2, Section 1, paragraphe 3, A et B.

    * 141 Nous ne reviendrons pas sur leur création, missions et activités. Voir Supra, idem.

    * 142 Adoptés en 1991 à Paris lors de la rencontre des institutions nationales des droits de l'homme, les « Principes de Paris » ont été avalisés par l'Assemblée Générale des Nations unies en 1992.

    * 143 Création par une loi de 2004 qui abroge le décret de 1990 qui l'avait institué, représentation pluraliste des forces sociales, stabilité du mandat garantie.

    * 144 L'article 6 al. 2 de la loi de 2004 précise que « Les membres de la Commission sont nommés par décret du Président de la République, sur proposition des administrations, associations et organismes socioprofessionnels auxquels ils appartiennent, à la diligence du Président de la Commission ».

    * 145 L'article 3 du décret n°2005/254 du 7 juillet 2005 fixant les modalités d'application de la loi de 2004 précise les attributions du Secrétaire général de la CNDHL.

    * 146 Le Rapport 2002 du Comité national des droits de l'homme et des libertés, prédécesseur de la CNDHL, présente un état de ses ressources financières pour les années 2000, 2001 et 2002. Voir p.12, 15-16 du Rapport.

    * 147 Ces faits qui remontent à février 2006 ont donné l'occasion à certaines de ces personnalités de saisir la justice pour diffamation, atteinte à leur honneur, et d'obtenir gain de cause ainsi que la condamnation du directeur de publication de l'un des journaux mis en cause.

    * 148 Révisions et inscriptions sur les listes électorales, établissement et distribution des cartes d'électeur, publication de la liste des bureaux et de leurs membres, mise en place du matériel électoral, dépouillement des votes.

    * 149 OLINGA (A.D), L'ONEL : Réflexion sur la loi camerounaise du 19 décembre 2000 portant création d'un Observatoire National des Elections, op. cit, p. 33.

    * 150 Locution latine qui renvoie au principe de la soumission de l'Etat au droit et qu'on pourrait traduire par : « La loi édictée doit être respectée ».

    * 151 A travers l'expression libre du suffrage universel direct qui leur permet de désigner leurs représentants aussi bien au niveau local (communes) qu'au niveau national (Président de la République, députés), mais aussi à travers leur participation au processus de prise de décisions, c'est-à-dire la représentation de la société civile au sein de nombreuses instances de concertation et de décision. Voir Supra, Première partie, Chapitre 2, Section 2, paragraphe 1, A.

    * 152 Le cadre juridique de certaines d'entre elles a déjà été fixé. La raison invoquée par les pouvoirs publics pour justifier leur inopérationnalité est d'ordre économique car, leur mise en place nécessite des ressources financières importantes dont le pays ne dispose pas pour le moment. Il est à craindre qu'une telle raison soit indéfiniment invoquée créant ainsi un vide institutionnel. Sur le cadre juridique de ces institutions, voir :

    - La loi n°2003/005 du 21 avril 2003 fixant les attributions, le fonctionnement et l'organisation de la Chambre des comptes de la Cour suprême ;

    - La loi n°2004/004 du 21 avril 2004 portant organisation et fonctionnement du Conseil constitutionnel ;

    - La loi n°2004/017 du 22 juillet 2004 portant orientation de la décentralisation ;

    - La loi n°2004/018 du 22 juillet 2004 fixant les règles applicables aux communes ;

    - La loi n°2004/019 du 22 juillet 2004 fixant les règles applicables aux régions.

    * 153 Le Cameroun a ratifié en 2004, la Convention des Nations unies contre la corruption du 31 octobre 2003.

    * 154 BOUKONGOU (J.D), op. cit, p. 208.

    * 155 La notion d'Etat-parti (au pouvoir) est encore très présente dans l'esprit de beaucoup de fonctionnaires et responsables administratifs qui tiennent souvent leurs postes de leur appartenance à celui-ci.

    * 156 NGUELE ABADA (M), op. cit, p. 140.

    * 157 Ce Congrès, organisé par l'UNESCO, s'est tenu à Montréal au Canada du 8 au 11 mars 1993 et a adopté un « plan mondial d'éducation aux droits de l'homme et à la démocratie ».

    * 158 Les développements relatifs à cette question sont évoqués par KONDE MBOM (J. B), « Nouvelle problématique de l'éducation au respect de la dignité humaine en droit international des droits de l'homme », in Revue de la Commission Africaine des droits de l'homme et des peuples, Tome 9, n°1, 2000, pp. 20-43.

    * 159 L'éducation de masse est davantage le fait des ONG et des associations qui oeuvrent pour la promotion des droits de l'homme, que celui des pouvoirs publics.

    * 160 Cette décennie a été proclamée par l'Assemblée Générale des Nations Unies aux termes de la Résolution 49/184 du 23 décembre 1994. Son plan international d'action avait pour objectifs :

    a) Evaluer les besoins et élaborer les stratégies efficaces en vue de faire progresser l'enseignement des droits de l'homme à tous les niveaux scolaires, dans l'enseignement professionnel et dans toutes les formes d'apprentissage, qu'elles soient institutionnalisées ou non ;

    b) Créer et renforcer les programmes et capacités d'enseignement des droits de l'homme aux échelons international, régional, national et local ;

    c) Elaborer de manière coordonnée une documentation pédagogique consacrée aux droits de l'homme ;

    d) Renforcer le rôle des médias et leurs capacités en ce qui concerne leur apport à l'enseignement des droits de l'homme...

    * 161 L'opérationnalisation annoncée dès la rentrée académique 2006-2007, des Cahiers pédagogiques sur les droits de l'homme dont les programmes ont été validés en février 2006. Voir Supra, Première partie, Chapitre 2, Section 1, paragraphe 3, A, 3, c

    * 162 BOUKONGOU (J.D), cité par ADOUM (S) et MBALA (F), Op. cit, P. 241

    * 163 ADOUM (S), MBALA (F), Op. cit, p.258.

    * 164 NGUELE ABADA (M), op. cit, p. 145.

    * 165 Nous avons résumé ici la pensée de OLINGA (A.D), op. cit, p. 297.

    * 166 Le fonctionnement des associations est généralement caractérisé par une forte personnalisation. Les promoteurs sont en fait des hommes à tout faire, les seuls gestionnaires des finances et biens de l'association.

    * 167 L'exemple tchadien est évocateur à cet égard avec la constitution de la Ligue Tchadienne des Droits de l'Homme (LTDH) et le Collectif des associations des Droits de l'Homme (ADH) dont l'action a été déterminante dans la prise en compte de la situation des populations victimes du passage de l'oléoduc dans leurs villages, et dans l'exigence des garanties de transparence dans la gestion des revenus pétroliers.

    * 168 Certaines ONG et associations sont étroitement associées aux activités gouvernementales, notamment dans le domaine de l'action sociale, avec les ministères de la santé publique, des affaires sociales, de la jeunesse, de l'éducation de base. Elles contribuent ainsi à la lutte contre la pauvreté, l'analphabétisme et l'exclusion sociale.

    * 169 Cette analyse n'exclut pas l'application de la loi en ce qui concerne les sanctions auxquelles s'exposent les auteurs des violations des droits de l'homme.

    * 170 OLINGA (A.D), « les défis de l'émergence d'une culture des droits de l'homme dans les société d'Afrique centrale », op. cit, p. 290.

    * 171 Le Cameroun a ratifié de nombreux instruments internationaux relatifs aux droits de l'homme et leur reconnaît une valeur supra constitutionnelle.

    * 172 Supra, première partie, chapitre 2, section 1, I.

    * 173Supra, première partie, chapitre 2, section 1, I.I.

    * 174 NGUELE ABADA (M), « Les progrès de l'Etat de droit : avancée réelle ou poudre aux yeux ? », op. cit, p. 134.

    * 175 Contenus dans le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, certains de ces droits sont pourtant énoncés dans la Constitution (droit au travail, à la sécurité sociale, à la santé, à l'éducation, etc.).

    * 176 La majorité des personnes condamnées pour les délits d'atteinte à la fortune d'autrui (vol, abus de confiance, escroquerie, etc.) motivent leur forfait par la famine, le besoin de survivre, la misère et la pauvreté, le chômage, etc.

    * 177 Il s'exprime ainsi dans son exposé introductif aux enseignements du DUDF portant sur l'actualité des droits fondamentaux.






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"Il y a des temps ou l'on doit dispenser son mépris qu'avec économie à cause du grand nombre de nécessiteux"   Chateaubriand