WOW !! MUCH LOVE ! SO WORLD PEACE !
Fond bitcoin pour l'amélioration du site: 1memzGeKS7CB3ECNkzSn2qHwxU6NZoJ8o
  Dogecoin (tips/pourboires): DCLoo9Dd4qECqpMLurdgGnaoqbftj16Nvp


Home | Publier un mémoire | Une page au hasard

 > 

La psychologie, un genre médiatique devenu rentable

( Télécharger le fichier original )
par Ariane Gaffuri
Celsa-Université de Paris IV-Sorbonne - Master 2 Pro en Information et Communication spécialisé en Journalisme 2008
  

Disponible en mode multipage

Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy

Celsa

Ecole des hautes études en sciences de l'information et de la communication

Université de Paris-Sorbonne (Paris IV)

MASTER SPECIALISE EN JOURNALISME

Mention : Information et Communication

Spécialité et Option : Journalisme

« LA PSYCHOLOGIE, UN GENRE MEDIATIQUE DEVENU RENTABLE »

Du non-dit au grand déballage

Préparé sous la direction de Madame le professeur Véronique Richard

Nom : GAFFURI

Prénom : Ariane

Promotion : 2007 - 2008

Soutenu le : 12 novembre 2008

Mention : Assez Bien

Note du mémoire : 14 /20

REMERCIEMENTS

Je remercie le CELSA, Université de Paris IV-Sorbonne pour la formation continue Master 2 Pro en journalisme, que j'ai suivie avec enthousiasme et intérêt.

Je remercie Monsieur Hervé Demailly, maître de conférences, qui m'a fait confiance pour mener ce travail jusqu'au bout.

Je remercie Madame Michèle Chouchan, mon rapporteur professionnel. Ce mémoire n'aurait pas vu le jour sans son exigence et son soutien exceptionnel.

Je remercie Madame Valérie Jeanne-Perrier qui m'a permis de mieux cerner ma problématique.

Je remercie Madame Menie Grégoire qui m'a ouvert son coeur.

Je remercie Madame Pascale Breugnot qui m'a accordé un long entretien détaillé.

Je remercie Madame Evelyne Dubreu, psychologue clinicienne, qui m'a apporté un éclairage précieux sur le rôle des psychologues dans les médias.

Je remercie Monsieur Bruno Denaes, journaliste, qui m'a expliqué le fonctionnement de la rubrique « Savoir être » sur France Info.

Je remercie Monsieur Arnaud Gachi, directeur de la communication de Réservoir Prod, qui m'a donné de nombreuses indications sur l'émission télévisée « Ca se discute ».

Je remercie Madame Imogen Lamb, rédactrice en chef adjointe au Service anglais de Radio France Internationale, qui m'a encouragée à poursuivre cette formation et qui a facilité ma disponibilité.

Je remercie ma mère, Madame Françoise Rémont, qui s'est occupée de mes filles pendant mes études.

Je remercie mon amie, Madame Gabrielle Stange, qui m'a épaulée.

Je remercie mon époux, Monsieur Daniel Gaffuri, pour sa patience dans les moments difficiles.

Je remercie mes filles qui ont eu à supporter une maman débordée. Elles sont toutes les deux le soleil de ma vie.

SOMMAIRE

« LA PSYCHOLOGIE, UN GENRE MEDIATIQUE DEVENU RENTABLE »

Du non-dit au grand déballage

INTRODUCTION ........................................................................ p. 7

1. Le fonctionnement des médias ..................................................... p. 9

1.1 Le tandem audience/annonceurs ................................................. p. 10

1.1.1 La mesure d'audience ............................................................. p. 11

1.1.2 Une cible pour les annonceurs .................................................... p. 11

1.1.3 Les annonceurs ..................................................................... p. 12

1.2 La psychologie, promesse d'un genre ........................................... p. 13

1.2.1 Qu'est-ce que la psychologie dans les médias ? ................................ p. 14

1.2.2 Un genre rentable ? .............................................................. p. 14

2. Les grands tournants des relations entre psychologie et médias ............ p. 16

2.1 Menie Grégoire, premiers pas ................................................... p. 17

2.1.1 Les débuts de l'émission ........................................................... p. 17

2.1.2 Intervention de la psychanalyse ................................................... p. 19

2.1.3 Vives controverses ................................................................. p. 20

2.2 « Lorsque l'enfant paraît », Françoise Dolto ................................... p. 21

2.3 « Psy-Show » ou le spectacle de la parole ...................................... p. 24

2.3.1 Première de « Psy-Show » : Viviane et Michel ................................. p. 26

2.3.2 L'émission fait scandale en 1983 ................................................. p. 27

2.4 A l'école de « Psy-Show » ........................................................ p. 28

2.4.1 « L'Amour en danger », Pascale Breugnot ..................................... p. 29

2.4.2 « Bas les masques », Mireille Dumas ........................................... p. 29

et « Ca se discute », Jean-Luc Delarue

2.4.3 Un nouvel avatar : la téléréalité .................................................. p. 30

3. Omniprésence de la psychologie et des psychologues dans les médias .... p. 32

3.1 Les psychanalystes à la Une ...................................................... p. 32

3.2 Changement de statut dans « Ca se discute » .................................. p. 34

3.2.1 Rôles des psychologues dans l'émission ....................................... p. 35

3.2.2 La place du témoin ................................................................. p. 38

3.2.3 La situation du public .............................................................. p. 40

3.3 A l'école de Françoise Dolto : Claude Halmos ................................ p. 40

3.3.1 « Savoir être » ...................................................................... p. 41

3.3.2 Le courrier des lecteurs dans Psychologies Magazine ........................ p. 42

3.3.3 Mettre des mots .................................................................... p. 43

3.4 Psychologies Magazine : un symbole du genre ................ ................. p. 44

3.4.1 La culture du bien-être ............................................................ p. 45

3.5 Vers le débordement du genre ; de la psychologie à la chronique ........... p. 46

3.5.1 Des relations à redéfinir .......................................................... p. 48

CONCLUSION .......................................................................... p. 49

BIBLIOGRAPHIE ...................................................................... p. 52

INTERVIEWS ...........................................................................  p. 57

SITOLOGIE .............................................................................. p. 58

RESUME .................................................................................. p. 59

ANNEXE 1 : Les chiffres de « Ca se discute » ..................................... p. 60

ANNEXE 2 : Index des noms propres ................................................ p. 64

MOTS CLES .............................................................................. p. 65

INTRODUCTION

Au départ, existait le courrier du coeur des lectrices anonymes dans quelques journaux féminins. Aujourd'hui, on rencontre l'interprétation à tout va des maux divers de l'individu ou du groupe - dans tous les médias.

Autrefois cantonnée à l'intimité du cabinet du psychothérapeute, la psychologie s'est en quarante ans propagée à la radio, à la télévision, dans la presse écrite, et plus récemment sur Internet, avec une ampleur considérable. Elle est devenue un genre, par le biais notamment d'émissions de témoignages (dites de flux), comme la cuisine, le jardinage, la fiction...

Protégée des contraintes d'audience au début, la psychologie est, semble-t-il, un produit rentable de nos jours pour les médias du secteur public et privé. Ceux-ci sont des entreprises dont la survie économique dépend de la fidélité du public. Au travers de la psychologie et des psychologues, l'émotion est présente, l'intimité dévoilée, voire mise en spectacle, attirant l'auditeur. Largement sollicités par les journalistes, les praticiens tentent de décrypter les événements qui ponctuent la vie des individus, anonymes ou célèbres, et de la collectivité : des simples doutes inhérents à la vie quotidienne aux souffrances les plus intenses. On les retrouve dans les journaux, les talk shows, les débats de société, l'actualité, la politique...

Ce mémoire cherche à comprendre comment les médias se sont emparés de la psychologie pour séduire, retenir et augmenter leur public.

Il étudiera le rôle et la place qu'occupent la psychologie, les psychologues1(*), les journalistes ou les animateurs qui s'y apparentent, dans l'hypothèse où effectivement la

psychologie est un genre profitable dans l'univers médiatique actuel, un genre en transformation, sans doute victime de son succès aujourd'hui - ce que nous tenterons de démontrer.

Ce mémoire s'articulera autour de trois grands axes :

Dans la première partie, nous rappellerons le fonctionnement des médias et leur utilisation économique du genre. Nous déterminerons à qui s'adressent les émissions à caractère psychologique en termes de mesure d'audience et de cible pour les annonceurs.

Nous ferons, en deuxième partie, un retour dans le temps pour découvrir comment et grâce à qui la psychologie s'est introduite dans les médias. Nous suivrons son évolution, passant du non-dit à la mise en spectacle de la parole. Nous observerons ce qui a permis à la discipline de rencontrer un large public populaire et pourquoi elle a suscité la controverse. Nous évoquerons trois grands « passeurs » avec Menie Grégoire en 1967 et Françoise Dolto à la radio ; puis Pascale Breugnot et le psychanalyste Serge Leclaire en 1984, avec leur émission télévisée « Psy-Show » - qui marquera le début d'une série de talk shows, dont ceux de Mireille Dumas et Jean-Luc Delarue.

En troisième partie, nous parlerons de l'omniprésence des « psys » et de la « psy ». Nous prendrons pour exemple l'émission « Ca se discute » de Jean-Luc Delarue, archétype de rentabilité et de longévité des programmes de flux à la télévision. Nous examinerons l'approche de la psychanalyste Claude Halmos, héritière de Françoise Dolto, sur France Info et dans Psychologies Magazine. Nous réfléchirons au succès de ce mensuel, symbolique de la quête du « mieux être » que semble être devenue la psychologie dans les médias. Enfin, nous observerons les rôles « polyvalents » de certains praticiens qui s'étendent à l'actualité et à la politique.

En conclusion, nous ferons un bilan sur ce genre en mutation. Est-ce que trop de psys n'en viendraient pas à tuer la psy ?

1. Le fonctionnement des médias

« Une bonne émission, c'est celle où le lendemain la régie pub appelle en disant que le standard explose et qu'elle a déjà une liste d'attente d'annonceurs pour le prochain numéro. »2(*)

André Obadia, cofondateur d'ACTA (Atelier de coach et de training d'animateurs), 2004.

Les médias sont des entreprises dont la santé économique dépend de la clientèle, en l'occurrence du public, et de sa satisfaction. L'objectif est la fidélisation de « consommateurs », un concept marketing en hausse dans la plupart des sociétés. Il s'agit d'en séduire le plus possible et de retenir ceux qui sont déjà acquis. Ils deviennent alors une valeur « sûre » à partir de laquelle les médias peuvent capitaliser, élaborer des stratégies et gagner de l'argent.

Plusieurs instituts d'analyses ont mis en évidence les avantages financiers d'une stratégie défensive de fidélisation par rapport à une stratégie offensive de conquête du client. Le retenir coûterait jusqu'à cinq fois moins cher qu'en conquérir un nouveau.3(*)

Fidéliser la clientèle implique de connaître ses goûts, ses habitudes et d'être en adéquation, voire en avance, sur les tendances d'une époque. « On constate aujourd'hui que les médias ont chacun ouvert un marché, avec une offre et une demande. Les entreprises qui offrent ces médias se distinguent de moins en moins des autres entreprises, si singuliers que soient leurs "produits". En ce sens, les marchés de la communication n'ont pas cessé de se banaliser, depuis la première utilisation de la rotative jusqu'à nos jours. »4(*)

Attirer la clientèle exige que les médias élaborent des « produits » susceptibles de la captiver tout en intéressant les annonceurs. Ce fonctionnement s'applique aux médias publics et privés. Bien que le secteur public vive essentiellement de la redevance, il est propulsé dans la course à l'audience par le secteur privé dont le financement provient de la publicité.5(*)

1.1 Le tandem audience/annonceurs

La publicité est apparue dans la presse au début du XIXe siècle. Emile de Girardin, journaliste et homme politique, en a établi les bases lors du lancement du journal La Presse en 1836, la publicité devant financer le journal (plus que le lecteur lui-même).6(*) Cette formule lui permet de diviser par deux le prix de vente, d'augmenter le tirage et le nombre de lecteurs et d'accroître les recettes publicitaires. Un système qu'ont poursuivi les médias. Comme le résume le sociologue Francis Balle, la publicité est plus chère si elle touche le plus grand nombre de personnes. Par conséquent, « les médias, s'ils veulent augmenter leurs recettes, doivent séduire le public pour élargir leur audience, et donc celle de la publicité dont ils sont le support. »7(*) En même temps, la concurrence pour le marché publicitaire dépend de la confiance qu'ont les annonceurs pour la notoriété et le prestige d'un support (la presse, la radio ou la télévision) et sa capacité à susciter l'adhésion du public pour un programme donné. « La publicité télévisée confère au produit une notoriété et une image plus fortes que les autres supports, poursuit-il. De ce fait elle est l'objet d'une forte demande de la part des annonceurs et peut atteindre des tarifs très élevés lorsqu'elle est diffusée à des heures de grande écoute. »8(*) Grâce à la publicité et à la volonté des annonceurs de bien cibler leurs messages, les médias et les publicitaires ont développé des outils de mesure leur permettant de connaître leur public et d'adapter leur contenu avec efficacité.

1.1.1 La mesure d'audience

Bien qu'utilisé dans le langage courant pour parler de l'audience, le terme « Audimat » se rapporte à un instrument de mesure aujourd'hui remplacé par un outil baptisé « Médiamétrie ». Médiamétrie est une société indépendante créée en 1985 par les pouvoirs publics suite à l'apparition des radios privées de la bande FM, de la privatisation de la première chaîne (TF1) et d'Europe n° 1, du lancement de Canal +, de la Cinq et de la Six.9(*) C'est une référence en matière de mesure d'audience des chaînes hertziennes analogiques et numériques (TNT), par câble, satellite et ADSL.

Autrefois, la mesure d'audience « Audimat » était calculée par foyer. Aujourd'hui, Médiamétrie mesure qui dans la famille regarde quoi et quand et permet aux annonceurs et aux médias de cibler leur public.

Au 24 décembre 2007, le panel Médiamat comprenait 8 895 individus âgés de 4 ans et plus (1 % = 566 800) vivant dans 3 420 foyers équipés d'un audimètre à bouton-poussoir. Le temps moyen passé à écouter ou à regarder des programmes est calculé à la seconde près. La part d'audience est calculée en pourcentage (ou PDA).

Les chiffres publiés par Médiamat/Médiamétrie en janvier 2008 sont éloquents : dans les 25,13 millions de foyers équipés, la télévision est regardée 5 heures 58 minutes par jour par l'un et/ou l'autre des 2, 3 individus, âgés de « 4 ans ou + », présents en moyenne dans chaque foyer. Cela fait de la télévision le média traditionnel le plus fréquenté. L'entreprise note une progression constante de l'audience féminine : « La cible commerciale des ménagères âgées de moins de cinquante ans progresse encore. »10(*)

1.1.2 Une cible pour les annonceurs

Pour les professionnels, le concept de la ménagère de moins de cinquante ans sert de base de référence. Toutefois, la définition de la personne a évolué au fil des années. L'Institut Ipsos a mené une enquête qualitative en 2003 pour déterminer ce qu'elle est

devenue. Existe-t-elle toujours ? Apparemment oui, mais elle a changé. « Les obligations du monde du travail l'ont amenée à devenir plus souple, plus adaptable, plus autonome. Elle est aujourd'hui plus éduquée, et a appris à manipuler les symboles et les codes du monde moderne. Ses expertises en matière de marketing sont indéniables : elle identifie les stratégies, salue les innovations, sait reconnaître le faux du vrai. [Elle] aime toujours la consommation, parce que c'est le domaine privilégié où elle peut exercer son expertise, mal utilisée dans la sphère professionnelle. C'est une groupie des marques, surtout celles qui savent rester elles-mêmes en changeant. Au-delà de ces expertises modernes, [elle] s'est recentrée, repliée sur des valeurs traditionnelles [...] avec l'enfant comme point central... »11(*)

1.1.3 Les annonceurs

En janvier 2008, 508 annonceurs ont communiqué sur l'ensemble des chaînes et ont investi 482,8 M€ bruts à la télévision. Le coût de la publicité pour 1000 téléspectateurs âgés de « 4 ans ou + » est de 7,97 € bruts, soit un coût/GRP (sur une base de trente secondes) de 4 137 €. Le coût pour 1000 ménagères âgées de moins de 50 ans est de 42,66 € bruts.12(*) Avec des tarifs aussi élevés, seules les multinationales de la grande consommation comme Danone, Procter, Renault peuvent s'offrir des écrans réguliers. De ce fait, plus des deux tiers de la publicité diffusée à la télévision concernent des produits de base : les laitages, les shampoings, les couches-culottes... Ils sont consommés en grande partie par « la ménagère de moins de cinquante ans ». Selon l'enquête menée par la journaliste Hélène Risser, les études réalisées par les publicitaires montrent que dans 90 % des foyers, les femmes font les courses ou donnent des consignes précises à leur conjoint sur les produits à acheter. « Autrement dit, c'est elle qu'il faut convaincre, elle qu'il faut attirer devant le poste au moment de la pub et donc elle que les chaînes s'évertuent à séduire avec leurs émissions. »13(*)

1.2 La psychologie, promesse d'un genre

« Nous ne sommes pas là pour faire la télévision qu'on aime, mais pour faire la télévision dont nous pensons qu'elle peut être appréciée par le plus grand nombre. »14(*) 

Christopher Baldelli, ancien directeur général de France 2, 2002.

Les médias et les annonceurs ciblent leurs « produits » en fonction de l'audience.

Un des instruments qui permet d'agir sur l'auditeur est le genre. Cela peut être la fiction, le bricolage, la cuisine... « Il y a genre, pourrait-on dire, à partir du moment où, pour interpréter un programme, le téléspectateur ramène ce qu'il n'a pas encore vu à une classe d'émissions déjà identifiées (information, série, jeu, etc.). Pour cette raison, chaque genre est une promesse, au sens où Stendhal disait du Beau qu'il est une promesse de bonheur, mais au sens aussi où les publicitaires promettent un bénéfice à celui qui achète le produit qu'il vante par le biais des films ou des affiches. »15(*)

Bien que floue et plus difficile à distinguer que d'autres genres, la psychologie s'est installée dans les médias, attirant un public composé principalement de femmes. Elle apparaît dans le courrier des lecteurs, les rubriques qui lui sont consacrées, les programmes radio, les émissions de témoignages où psychologues, psychiatres et psychanalystes abondent.

Ces supports rassemblent une large audience. C'est le cas du mensuel Psychologies Magazine dont les ventes augmentent d'année en année depuis 1997. C'est aussi celui de l'émission « Ca se discute » de Jean-Luc Delarue depuis quatorze ans. Ils nous serviront d'exemples plus loin pour montrer comment les médias utilisent la

psychologie16(*) et ses spécialistes pour attirer le public.

1.2.1 Qu'est-ce que la psychologie dans les médias ?

Jean-Louis Servan-Schreiber, rédacteur en chef de Psychologies Magazine définit la discipline en ces termes : « Notre magazine s'intéresse à la manière de mieux vivre sa vie, mieux se débrouiller dans sa relation à soi, aux autres et à ses enfants. Les gens ont besoin d'une grille d'analyse pour comprendre leurs rapports avec eux-mêmes, dans leur couple et avec leurs enfants. Nous abordons de plus en plus de questions liées au corps. Il est important de se demander chaque jour quelle est la bonne manière de vivre. Et comment faire pour l'améliorer. La psychologie, ce n'est pas que pour les gens qui vont mal, c'est aussi pour les gens qui vont bien. »17(*)

Cette description est loin de l'étude scientifique des faits psychiques qui caractérise la matière. Ne s'agirait-il pas d'une vision vulgarisée de la psychologie qui correspond aux promesses du genre dans les médias ? A savoir, un lieu d'écoute et d'expression des misères de l'existence et un melting pot de consignes de praticiens pour aider l'individu à bien faire et mieux vivre sa vie, tout en se divertissant.

1.2.2 Un genre rentable ?

Selon certains observateurs, la psychologie s'est répandue dans les médias parce qu'elle est en phase avec la tendance actuelle qui donne une large place à la prise de parole, à l'introspection de l'individu et de la collectivité, au désir de mieux vivre avec soi-même et avec les autres. Cette disposition est particulièrement perceptible dans le mensuel Psychologies Magazine. Elle intéresse aussi parce qu'elle permet à l'intimité et à son expression de s'exhiber et d'être vues. L'observation du contenu des programmes de télévision à succès montre l'importance croissante de l'émotion, laquelle oscille entre la joie et la détresse, avec une présence plus fréquente de cette dernière. Les studios et les plateaux sont occupés par les artistes, les personnalités politiques et d'autres acteurs de la société qui parlent avec leurs « tripes ». « Ce sont ceux que les animateurs appellent les "bons clients" ; des invités qui vont dire à coup sûr des choses fortes, propres à déclencher le rire, la compassion, en tout cas l'adhésion des auditeurs et spectateurs [...] et faire monter l'audience... »18(*) Ce constat est manifeste dans les émissions de flux comme « Ca se discute » de Jean-Luc Delarue qui ont gagné de l'argent en utilisant la psychologie.19(*)

Pour rester compétitifs, les responsables de ce type de programmes sont à l'affût de recettes à la mode qui ont déjà fait leurs preuves en France ou à l'étranger. Comme l'explique Arnaud Gachy, directeur de la communication de Réservoir Prod, qui produit « Ca se discute » : « Les thématiques des émissions se décident `au feeling' et au gré de l'actualité. Les sujets qui marchent sont surtout les sujets « people » depuis 5, 6 ans. Les émissions sur la santé, par exemple le cancer, marchent bien aussi, à condition qu'elles ne soient pas anxiogènes. »20(*)

Pour l'audience, cette expression de la discipline peut présenter plusieurs promesses : se divertir tout en s'identifiant aux souffrances d'autrui et se réconforter sur sa propre condition. Selon Evelyne Dubreu, psychologue clinicienne : « Les thèmes présentés dans "Ca se discute" permettent à une multitude de gens de s'y retrouver, de s'identifier21(*), soit à leur propre histoire soit à celle de quelqu'un de leur entourage. Ils ne se sentent pas seuls, cela les rassure. C'est ce qui rapporte. »

La psychologie dans les médias est devenue un produit de consommation rentable parce qu'elle attire un large public et de nombreux annonceurs. La prise de parole introduite par Sigmund Freud, le père de la psychanalyse, s'est émancipée. Aujourd'hui on dit ce qu'hier on taisait. Il y a quarante ans encore, le non-dit régnait et bien des drames étaient vécus dans le silence.

Comment et grâce à quels intermédiaires la parole s'est-elle libérée dans les médias ? Pour mieux comprendre la situation actuelle, il est important de se tourner vers le passé. La deuxième partie de ce mémoire se consacrera à l'histoire.

2. Les grands tournants des relations entre psychologie et médias

« Les mots faisaient primitivement partie de la magie, et de nos jours encore le mot garde beaucoup de sa puissance de jadis. »22(*)

Sigmund Freud, « Introduction à la psychanalyse », 1916.

Timide, pudique au début, la psychologie fait son apparition dans les médias avec les premières confidences de femmes recueillies par Menie Grégoire sur RTL dés 1967. Dans le même temps, presque invisible, la psychanalyste Françoise Dolto, alias Dr X, distille des conseils aux parents de jeunes enfants. Elle se fait un nom presque dix ans plus tard grâce à l'émission « Lorsque l'enfant paraît », sur France Inter en 1976.

Il y avait néanmoins, depuis 1938, le courrier des lectrices des premiers magazines du coeur tels que Confidences et Nous Deux. Mais les sujets « tabous » n'étaient pas abordés. Avec Menie Grégoire qui a déclenché la prise de parole, les médias permettent peu à peu aux femmes principalement de dire « l'indicible », suscitant l'adhésion du public et la controverse. Françoise Dolto aide plus particulièrement les parents à comprendre et élever leurs enfants, mais se garde de lever les tabous.

La parole profane est introduite et mise en spectacle à la télévision avec l'émission de Pascale Breugnot, « Psy-Show » en 1983. Là, intervient Serge Leclaire, premier psychanalyste à apporter sa contribution en qualité d'expert sur un plateau de télévision. Ensuite, la vague des talk shows23(*) (« L'Amour en danger », « Sexy folies », « Mea culpa », « Perdu de vue », « Témoin numéro un », etc.) connait un succès retentissant, ainsi que les magazines « Bas les masques » de Mireille Dumas et « Ca se discute » de Jean-Luc Delarue. En 2001, l'avènement de la téléréalité, avec le succès de « Loft Story » inspiré du Big Brother néerlandais, marque une nouvelle étape.

2.1 Menie Grégoire, premiers pas

« Je suis un mythe à mi-chemin entre le Bon Dieu, le général De Gaulle et la tireuse de cartes. »24(*)

Menie Grégoire, Le Monde, 1970.

La présence de Menie Grégoire à la radio marque un tournant crucial dans l'histoire des médias. Elle est apparue au bon endroit, au bon moment et a su libérer, voire révolutionner, la prise de parole de ses interlocutrices.

Nous sommes en 1967. Jean Farran, directeur de RTL, veut faire parler les femmes et fait appel à Menie Grégoire, journaliste et écrivain alors âgée de quarante-huit ans. Celle-ci est déjà connue pour « Le métier de Femme », un ouvrage sur la condition féminine publié en 1965 chez Plon. L'une des rares références à l'époque est « Le Deuxième Sexe » de Simone de Beauvoir paru en 1949. Selon Menie Grégoire, Jean Farran souhaitait faire participer les auditeurs « au lieu de leur parachuter informations et distractions, ce qui ne s'était jamais fait nulle part ailleurs. Un vrai pari. J'ai accepté. » L'émission sera quotidienne et s'appellera « Menie Grégoire ».25(*)

2.1.1 Les débuts de l'émission

En 1967 (un an avant 1968 !) la sexualité est un sujet tabou, la contraception est mal maîtrisée, l'avortement reste clandestin et honteux. Voici un exemple de témoignage :

« Chère Menie,

Je suis une jeune fille de dix-neuf ans, j'ai toujours été sérieuse et mes parents sont très sévères. Je suis sortie l'année dernière avec des camarades et j'ai rencontré un jeune homme qui m'a dit qu'il m'aimait. Il voulait absolument que je lui cède. Il me disait que si je ne cédais pas c'est que je ne l'aimais pas. Et voilà, j'attends un bébé. Je n'ai plus son adresse, il a quitté son travail. Mes parents s'ils l'apprennent, vont me mettre à la porte. »26(*)

Les premiers courriers émanent de femmes issues de milieux populaires. Leurs préoccupations tournent surtout autour de l'entité familiale.27(*)

Menie Grégoire dit recevoir rapidement des centaines de lettres. Elle choisit une des missives et y répond à l'antenne. Le débat se poursuit avec les réactions des auditeurs en direct. « J'étais à la fois une compagne de ceux et celles qui m'écoutaient et un peu plus, un révélateur. Un révélateur de ce qui était porté en secret dans cette société. J'ai fait parler une société pour dire ce qui n'était pas dicible, ce qui était enfermé dans l'inconscient de la collectivité. »28(*)

Les émissions sont prétextes à échanges entre des générations de femmes, comme en atteste l'extrait suivant :

« Maman écoute votre émission tous les jours et le soir elle me commente la discussion. Elle m'a donc conseillé de vous écrire pour vous exposer mon problème. J'ai dix-neuf ans et mon fiancé vingt-deux... »29(*)

Pendant quatorze ans, de 1967 à 1981, la journaliste dit avoir répondu à plus de 100 000 lettres et de nombreux appels d'auditeurs. Elle a accumulé un total de mille cinq cents bandes magnétiques.30(*) Ce qu'elle qualifie de « phénomène » est en marche : pendant cinq ans, au rythme de deux émissions quotidiennes à 14 heures et 15 heures, puis pendant six ans sous forme d'éditorial sur un sujet social à 8 heures du matin. L'engouement du public pour l'émission est accentué, explique-t-elle dans son dernier ouvrage « Comme une lame de fond », par le mystère de la voix humaine, proche, magique, qui a le pouvoir de rompre la solitude31(*) :

« Je me confie à vous comme à une amie, car vous êtes pour moi une amie, vous entrez dans mon foyer par les ondes. Ce n'est pas un conseil que je viens vous demander, non, mais j'ai besoin de parler à quelqu'un, non pas pour m'aider, mais pour m'écouter [....] Nous habitons un immeuble dans une cité dortoir [...] Je hais cet entassement de gens comme dans des cages à lapin, sonores comme des tambours... »32(*)

En moins d'un an, l'écoute s'établit à deux millions d'auditeurs quotidiens.33(*)

2.1.2 Intervention de la psychanalyse

L'émission évolue. En 1970, les auditrices évoquent leurs rêves. Menie Grégoire choisit de rapprocher différentes séquences. « Elles parlent et je les aide discrètement à réfléchir sur l'interprétation freudienne, laquelle a deux clés : on rêve toujours de soi, sous quelque forme que ce soit. Ensuite le rêve révèle un désir inconscient ou refusé... En me lançant dans cette dangereuse aventure, mais prudemment, tout en essayant de ne pas pousser trop loin mais de désangoisser, j'ai provoqué un intérêt inouï. »34(*) Par exemple, une jeune mariée rêve que son ex-fiancé vient la chercher, une autre que son mari se tue en auto et finit par révéler que sa mère est morte dans un accident d'automobile.

Toujours en 1970, Menie Grégoire introduit le psychodrame. Elle s'inspire des travaux réalisés dans les années 1930 par Jacob Levy Moreno, psychiatre et psychologue américain d'origine roumaine. Il s'agit d'un jeu de rôles où des volontaires interprètent devant témoins une situation conflictuelle. La meneuse de jeu est Menie Grégoire qui sert de garde fou et intervient quand la scène devient trop « réelle » pour l'un des acteurs. Les assistants émettent, l'un après l'autre, un avis personnel sur les réactions qu'ils ont observées. Dès les premières annonces, des centaines d'auditeurs veulent participer et voter. Les petits et grands problèmes de l'époque sont abordés : équilibre du couple, naissances refusées, vieillesse dépendante...35(*)

2.1.3 Vives controverses

L'étape suivante est d'aborder la sexualité avec l'aide du pédiatre Robert Debré en 1974. Le professeur de médecine s'adresse aux auditeurs, Menie Grégoire aux auditrices. Le programme insiste sur un meilleur accès à la sexualité pour le public. Hors antenne, tous deux bénéficient de l'aide d'autres médecins (Dr Jacques Donnars, psychanalyste, Dr Paul Altan, gynécologue, Dr Jean Laurentin, généraliste).36(*) Dès lors, le contenu des lettres que Menie Grégoire reçoit s'oriente de plus en plus vers la sexualité. L'auditorat compte beaucoup d'hommes même si les femmes restent majoritaires.

Le lancement de cette rubrique baptisée « Responsabilité sexuelle »37(*) vaut à l'animatrice les foudres de l'Ordre des médecins pour incitation à la débauche. Elle est accusée d'exercice illégal de la médecine. « J'ai senti que je cassais quelque chose de tabou. Je brisais un mur que la religion catholique, dans ses mouvements extrêmes, avait dressé dans la société au XIXe siècle. C'est cela que je cassais pour voir ce qu'il y avait derrière et brusquement [...] sont sortis des drames qui n'avaient jamais été dits en public : "j'ai été violée, je n'ai pu le dire à personne, mon père m'a violée et ma mère n'a rien voulu comprendre ou mon mari me demande tous les soirs et moi je ne ressens rien ou il me fait mal... »38(*)

Aucun média n'avait jamais dévoilé publiquement un témoignage tel que celui-ci :

« Je suis marié et père de trois enfants, je vais avoir quarante ans. Or depuis mon adolescence j'ai toujours été attiré par le sexe masculin. Je n'ai jamais eu de rapports homosexuels malgré des souffrances terribles [...] Je suis torturé car je veux préserver ma vie de famille qui est un exemple [...] Je ne sais plus que faire. »39(*)

Après le monde médical, les médias attaquent. Les intellectuels dénoncent « l'atteinte à la pudeur, à la bienséance, et aux bonnes moeurs »40(*). Les critiques se manifestent avec « une rare violence »,41(*) confirme l'intéressée. « Mais j'étais en phase d'amitié et de confiance avec des millions de personnes. C'est ce qui m'a permis de tenir le coup alors que j'ai été tellement agressée, méprisée. »42(*)

Peut-on dire que Menie Grégoire s'est exercée à la psychanalyse ? Avec le regard d'aujourd'hui, on pensera que non. Mais elle a ouvert la brèche et démystifié l'accès au cabinet et à la consultation. « Je disais à qui voulait l'entendre que l'émission était une psychanalyse de la société. C'est important d'amener dans le monde quotidien un regard profond et le regard second de l'analyse. »43(*)

Menie Grégoire a été une « passeuse ». Elle a su écouter et donner des conseils de bon sens.

2.2 « Lorsque l'enfant paraît », Françoise Dolto

« C'est en femme qui, bien que psychanalyste, est en âge d'être grand-mère et plus que je parle. » 44(*)

Françoise Dolto, « Lorsque l'enfant paraît », 1990.

Françoise Dolto a été, en France, la première psychanalyste à s'exprimer sur l'enfance à la radio45(*). Son approche se démarque diamétralement de celle de Menie Grégoire.

C'est sur France Inter en 1976 qu'elle se fait connaître du grand public. Pourtant elle était déjà apparue sous le pseudonyme « Docteur X » sur Europe n° 1 en 1967. Le Conseil de l'Ordre des médecins lui ayant interdit de donner son patronyme, elle répond anonymement aux questions que lui posent de jeunes auditeurs et leurs parents au téléphone.46(*)

Sept ans plus tard, cette dernière modifie son concept initial. Avec « Lorsque l'enfant paraît » sur France Inter, de 1976 à 1979, elle évite de se présenter en qualité d'experte, mais comme une personne de bon sens. « J'essaie seulement d'éclairer la question du demandeur. Il ne faudrait pas que les auditeurs [...] s'imaginent que je suis dépositaire d'un vrai savoir qu'ils n'auraient pas à remettre en question », prévient-t-elle.47(*)

Animé par Jacques Pradel, le programme s'adresse aux parents et rassemble une large audience. Les lettres des auditeurs sont sélectionnées avec la fille de Françoise Dolto, Catherine, en fonction de leur pertinence et de leur représentativité des préoccupations de l'époque. L'émission est calibrée à environ six minutes quotidiennes. La psychanalyste répond aux missives, apportant des conseils et un regard nouveau sur l'enfance pour de nombreuses familles. Selon celle-ci, l'enfant est une personne intelligente dès sa naissance, un « être de langage » qu'il convient de traiter avec respect.

« Dois-je allaiter mon nourrisson ? », « Pourquoi mon fils ne marche-t-il pas encore ? », « Quand mon enfant doit-il être propre ? », « Que faire si le père s'en va ? », Françoise Dolto répond aux interrogations des auditeurs en recommandant d'écouter son enfant, de jouer avec lui, de lui dire la vérité qui le concerne avec des mots simples (bannissant les mensonges sur l'identité des parents, l'adoption, la séparation, la mort...), de ne pas laisser les baisers remplacer l'échange de paroles et de lui faire confiance,48(*) comme en témoigne la séquence suivante :

Jacques Pradel : « Cette lettre concerne un petit garçon de dix-sept mois, enfant unique, qui a des difficultés de propreté [...] Nous, les jeunes mamans, nous sommes souvent désorientées par les manuels, les conseils, les idées toutes faites pour élever un bébé. Mon enfant, à dix-sept mois, ne parle pas. A quel âge est-ce qu'un enfant doit parler ? »

Françoise Dolto : « Il n'y a pas de "doit parler". Mais pour qu'un enfant parle à l'âge où il aura à parler, il faut qu'on sente que, lorsqu'on lui parle, il est vivant, il vous regarde, il fait des mimiques et que de son côté, il cherche les contacts, veut se faire

comprendre [...] Un enfant apprend le langage parlé en voyant sa mère parler de lui,

ou pour lui, à son père, l'introduisant dans la conversation lorsqu'elle parle de quelque chose. Que cette mère ne s'inquiète pas pour la parole. Un garçon parle généralement plus tard qu'une fille [...] »49(*)

Se penchant sur la période, Yannick François, psychiatre et psychanalyste, analyse la problématique des émissions. « Les questions posées naissent le plus souvent de la vie courante des familles : demandes de conseils concernant la toilette, le rangement, le coucher, les rythmes journaliers, l'entrée à la maternelle ou à l'école primaire, etc. Quelquefois les parents posent une question plus particulièrement en relation avec une situation critique ou une difficulté plus spécifique avec leur enfant. Le plus souvent Françoise Dolto répond en proposant ici un petit "truc", là une analyse plus complexe, mais toujours avec humour, simplicité et une totale maîtrise didactique. Si la situation lui paraît plus grave, elle essaie surtout de convaincre les parents de la nécessité de recourir à une aide spécialisée. »50(*)

La distinction entre la consultation en cabinet et les échanges à l'antenne est particulièrement sensible dans les thèmes sélectionnés. Françoise Dolto s'impose en effet des limites à la radio et certains sujets ne sont jamais évoqués. « Elle considérait qu'il valait mieux ne pas aborder à la radio le suicide des adolescents [...] Il fallait faire des silences, il fallait des tabous, en tout cas dans la parole publique, confirme Jacques Pradel. Même dans la foulée de 1968 - il est interdit d'interdire - elle rappelait qu'une société doit avoir des tabous. »51(*)

Malgré cette précaution, elle est vivement critiquée par ses pairs : « En passant sur les ondes, Dolto transgressait un interdit, le secret du cabinet de l'analyse. »52(*)

Dans la mémoire collective, Françoise Dolto a pris le pas sur Menie Grégoire, occultant souvent la contribution de cette dernière. « Menie Grégoire a vulgarisé l'approche psychanalytique. Toutes les deux sont compétentes, mais Françoise Dolto a, par ses diplômes et son expérience clinique, une légitimité plus importante »,53(*) se souvient la psychologue clinicienne Evelyne Dubreu.

La praticienne ne fait pas de psychanalyse à l'antenne, mais elle simplifie la discipline et incite l'auditeur à se prendre en charge en allant consulter.

2.3 « Psy-Show » ou le spectacle de la parole

« J'ai eu l'idée de raconter ce qu'est la psychanalyse à travers un problème de couple. »54(*)

Pascale Breugnot, Interview, 2007.

Un autre tournant dans le traitement de la psychologie apparaît en 1983 avec l'émission télévisée « Psy-Show », produite et animée par Pascale Breugnot. Promue par Pierre Desgraupes en 1982 à la Direction des magazines d'Antenne 2, celle-ci met à profit « la liberté » qui lui est offerte pour créer un produit qui sera ultérieurement diffusé sur TF1. Elle lance ensuite une série de talk shows, aussi célèbres que controversés, qui mettent en scène l'intimité et l'émotion. Elle donne à la psychologie une nouvelle direction.

Il y a eu des précédents. Les premières confessions télévisées ont été diffusées en 1957. A l'époque, les équipes de tournage étaient envoyées chez les Français pour filmer leur vie quotidienne, en collaboration avec des universitaires et des chercheurs ethnologues du CNRS, le Centre national de recherche scientifique. De 1964 à 1973, Eliane Victor produit plus de soixante émissions, présentées par Françoise Mallet-Joris et intitulées : « Les femmes aussi », une sorte de « Menie Grégoire » de l'écran. Pour la productrice Eliane Victor, il s'agissait d'un nouveau concept à la télévision : mettre des destins de femmes au centre des préoccupations.55(*) Ainsi, une ménagère, Micheline, raconte à la caméra du réalisateur Claude Goretta - et tout en repassant son linge - sa vie harassante consacrée à ses six enfants.56(*)

Environ vingt ans plus tard, le 10 novembre 1983, le premier numéro de « Psy-Show » sur Antenne 2 crée un choc. Les spectateurs voient apparaître sur leur écran Viviane et Michel face à Pascale Breugnot et au psychanalyste Serge Leclaire. Le couple se raconte, s'aventurant à parler de ses problèmes sexuels. Le lendemain, la presse est en émoi. « Psy-Show » attire ainsi la curiosité d'un large public, fidèle pendant sa durée de vie : quatorze numéros en deux ans, dont le dernier est diffusé le 21 novembre 1985.57(*)

Le principe est de recueillir des confidences de couples venant exposer leurs difficultés relationnelles. « Dans Psy-Show, venaient nous voir des gens qui avaient mené une réflexion sur eux-mêmes, sans avoir fait de psychothérapie car cela les effrayait, explique Pascale Breugnot. Ils trouvaient qu'une interview à la télévision, qui est un objet familier, était plus accessible qu'une consultation chez un psychologue. Ils pensaient que celui-ci pouvait découvrir des vérités sur eux à leur insu. Ils disaient qu'avec nous ils étaient amenés à s'interroger sur des questions que personne ne leur avait jamais posées. Leur histoire s'apparentait à celle de tout le monde tout en étant unique. »58(*)

Etait-il nécessaire de solliciter un psychanalyste pour recueillir ces confidences ? « J'étais journaliste, répond Pascale Breugnot. Ce n'est pas parce que j'avais fait une analyse que j'étais capable de poser les bonnes questions. C'est pourquoi l'accompagnement d'un professionnel comme Serge Leclaire était important. On travaillait de concert. Je lui racontais ce que les gens m'avaient appris et on élaborait ensemble un plan du parcours qu'ils allaient effectuer avec nous, avec tout ce qui pouvait arriver d'imprévisible et qui a constitué des morceaux d'anthologies. »59(*)

2.3.1 Première de « Psy-Show » : Viviane et Michel60(*)

Viviane et Michel sont propriétaires d'une station-service. Ils ont deux enfants. Ils souhaitent résoudre leurs conflits conjugaux et espèrent que l'émission le leur permettra. Ils sont assis l'un à côté de l'autre, face aux animateurs Alain Gillot-Pétré et Pascale Breugnot, ainsi qu'au psychanalyste Serge Leclaire. Autour d'eux, un décor beige dépouillé, avec pour seules touches de couleur la chemise fleurie de l'animatrice et une large photo de leur station d'essence. Invitée à s'exprimer, Viviane se plaint que son mari est trop dépendant d'elle. Elle parle d'insatisfaction sexuelle. Elle avoue mener une double vie, avec le consentement de celui-ci. Michel reconnaît être angoissé et trop amoureux de sa femme. Il accepte sa liaison parce qu'il ne se sent pas à la hauteur, mais il en souffre.

Dans ses rares interventions, Serge Leclaire s'adresse plus particulièrement à Michel, plus réservé dans l'émission que son épouse. Le psychanalyste reprend ses propos et ouvre des pistes de réflexion, une technique utilisée en analyse : « Vous dites : je suis trop amoureux d'elle. Quand est-ce qu'on est trop amoureux ? » Ou plus tard : « Quand on dit qu'on n'est pas à la hauteur, on pense à un modèle, il me semble ? »

La séquence suivante s'oriente vers le récit de l'enfance douloureuse du couple. Viviane pleure en parlant de sa mère défigurée par un grave accident. Michel invoque le destin d'un père en souffrance, de ses grands-parents déportés qu'il n'a pas connus. L'émotion est omniprésente, communicative. Lorsque Pascale Breugnot leur demande s'ils ont appris quelque chose d'eux-mêmes au cours de l'émission, Michel et Viviane affirment n'avoir jamais été aussi loin dans la confidence avant de passer à la télévision.

Pour la psychologue clinicienne Evelyne Dubreu, l'intervention du psychanalyste

apporte « une forme d'empathie, au même titre que les animateurs sur le plateau. Il ne juge pas.  Il a introduit l'aspect trans-générationnel de la problématique du couple, ce qui est positif. Sinon, il n'apporte rien de plus dans cette émission, si ce n'est la caution que représente son titre. »61(*)

En retrait dans ce premier numéro, Serge Leclaire sera plus présent dans ceux qui suivront.

2.3.2 L'émission fait scandale en 1983

« Il n'y a qu'une seule chose que je craigne, c'est qu'on nous oblige à faire de la morale [...] parce que l'éthique de la psychanalyse ce n'est rien d'autre que de faire apparaître cette fameuse question du comment vivre, et comment vivre avec son prochain. »62(*)

Serge Leclaire, « A chaud après Psy-Show », 1983.

En 2008, nous sommes loin de l'indignation que « Psy-Show » a suscitée naguère. En 1983, l'émission est largement dénoncée dans la presse et sur les bancs de l'Assemblée nationale. Un député RPR fustige un programme télévisé « déplacé et scandaleux. »63(*) Un psychanalyste condamne « l'exhibition de chair fraîche et de pulsions qui offre un spectacle pitoyable. »64(*) Pour lui, ce « déballage » télévisuel a un rôle pernicieux et est symptomatique d'une société en déliquescence, dépourvue de règles de conduite.

Un autre sujet d'indignation est l'éventuelle manipulation des témoins par les journalistes et la chaîne pour appâter le spectateur et faire de l'audience.

Qu'en disent les « professionnels du surmoi » ? En 1991, Gérard Bayle, directeur adjoint de la Revue française de Psychanalyse65(*), étudie les émissions de Pascale Breugnot. Il reconnaît que les témoins ont fait le choix de participer au programme en toute liberté. Il estime cependant que « tout est une question de déontologie de la part de ceux qui font la télévision. On n'a pas le droit d'entraîner quelqu'un dans la fosse aux lions en lui faisant croire qu'on veut le sauver. Le couple participant vient dévoiler un bout de son âme, authentique et bouleversant. Il paie son passage à la télévision avec une livre de chair, de vraie émotion, et la télévision se jette dessus pour en faire du ragoût. »66(*)

En réponse à ces observations, Pascale Breugnot dément avoir utilisé les témoins sans scrupule dans le but de faire de l'audience. Ils pouvaient assister au montage et refuser la diffusion. Il y avait aussi un suivi des participants, après l'émission. « Serge Leclaire les rencontrait au moins trois ou quatre fois par la suite et s'ils souhaitaient continuer à faire un travail sur eux-mêmes, nous les orientions, indique l'intéressée. Certains ont été pris en main par des psychothérapeutes. Pour ma part, je restais en contact pendant des années parfois. J'ai arrêté l'émission parce que j'avais l'impression de devenir psychanalyste à temps complet. »67(*)

Malgré les critiques, il était, pour Serge Leclaire, important de faire sortir la psychanalyse de son ghetto et la rendre accessible à tous. La télévision lui en offrait l'opportunité. Il a été « traîné dans la boue » par ses pairs, raconte Pascale Breugnot.

« Psy-Show » sera suivi de nombreux talk shows produits mais non présentés par la journaliste, celui-ci étant le seul où elle apparaît.

2.4 A l'école de « Psy-Show »

« L'instrumentalisation de la psychanalyse par le ludique (les candidats jouent) jointe au mécanisme de l'enquête policière est d'autant plus efficace [...] qu'elle cadre mieux avec la mission que s'assigne la télévision des années 1990, à savoir se substituer aux institutions défaillantes. »68(*)

François Jost, « De Psy-Show à Loft Story », 2003.

Dans « L'Amour en danger », « Sexy folies », « Témoin numéro un », « Mea culpa », « Perdu de vue », émissions produites par Pascale Breugnot, les journalistes et les experts présents sur le plateau ne se contentent plus de recueillir et d'encourager les confidences. Ils mettent en spectacle l'intimité et la souffrance des témoins.

2.4.1 « L'Amour en danger », Pascale Breugnot 

« La télévision est un spectacle, donc elle tire du côté du spectacle, de "voir". De voir à exhiber, il n'y a qu'un pas. »69(*)

Claude Halmos, « Psy et médias sont-ils compatibles ? », 2003.

Dans la lignée de « Psy-Show », le magazine « L'Amour en danger », diffusé à 22 heures sur TF1 du 28 octobre 1991 au 6 mai 1993, est animé par Jacques Pradel et la psychanalyste Catherine Muller. La problématique est de nouveau celle d'un couple qui se raconte. Nous prendrons l'exemple de Danièle et Alain, le 28 octobre 1991.

Le rôle joué par la praticienne se démarque de l'écoute prudente de Serge Leclaire. En coulisses pendant la première partie de l'émission, elle entre en scène sous les applaudissements, après la pause publicitaire, lorsque les hostilités entre les conjoints sont à leur paroxysme. L'émotion sur le plateau est à son comble et les participants sont dans l'impasse. La psychanalyste est appelée pour « sauver » un conflit qui a été exacerbé par l'animateur. Par un jeu de rôles entre Danièle et Alain, elle incite le couple à improviser une scène de ménage, se mettant l'un à la place de l'autre. Elle leur demande ensuite de rejouer le même conflit en suivant ses instructions. Puis, elle livre ses déductions : Danièle, maniaque, range pour satisfaire le désir de sa mère et Alain, époux violent, frappe l'enfant en lui...

Catherine Muller transforme le récit de paroles par un spectacle où le suspens règne. Elle apparaît, selon le sociologue François Jost, comme celle qui a le pouvoir « de lire un sens caché là où chacun n'y verrait que pure gesticulation. »70(*) Elle n'est alors ni psychanalyste, ni journaliste.

2.4.2 « Bas les masques », Mireille Dumas et « Ca se discute », Jean-Luc Delarue

Au début des années 1990, les animateurs sont Mireille Dumas et Jean-Luc Delarue. Traitant de sujets de société en présence de psychanalystes, ils rassemblent chaque semaine jusqu'à sept millions de « fidèles ».71(*) Dans l'émission hebdomadaire « Bas les masques » diffusée sur France 2 de septembre 1992 à juin 1996, des anonymes viennent faire le récit de leur vie. Ils relatent les chagrins d'amour, les deuils, l'abandon, l'alcoolisme, la délinquance, les violences conjugales, les viols, le Sida, l'homosexualité, la prostitution, la transsexualité... Des tragédies alternativement bénignes ou graves sont évoquées avec une mise en scène minimale : un journaliste face à des témoins. Dans certains cas, Mireille Dumas demande la participation d'un psychologue sur le plateau. Dans d'autres, elle semble en adopter le rôle. L'émission « Bas les masques » est suivie en 2000 par « Vie privée, Vie publique » sur France 372(*). Le magazine conserve la même approche, avec la participation de personnalités.

Dans un style plus spectaculaire, Jean-Luc Delarue propose depuis 1994 avec « Ca se discute » une émission de témoignages, aux thèmes d'abord hétérogènes et aujourd'hui centrés sur le couple, la famille, la santé. Au moins un psychologue, voire plusieurs, est présent sur le plateau. Nous étudierons son rôle en détail dans la troisième partie de ce document.

2.4.3 Un nouvel avatar : la téléréalité73(*)

L'émission « Loft Story », inspirée du Big Brother néerlandais, suscite la stupéfaction en 2001. Animée par Benjamin Castaldi, elle apparaît sur les écrans au moment du développement de la webcam (pendant deux saisons de 70 jours, d'avril à juillet, en 2001 et 2002 sur M6). Il ne s'agit plus là d'une émission de témoignages où des personnes viennent faire le récit de leur vie. « Loft Story » est une mise en situation, une mise en « concentration » même selon certains détracteurs, de jeunes gens enfermés dans un grand appartement et devant vivre en communauté pendant onze semaines. Environ trente caméras filment leurs faits et gestes en continu. Internet diffuse l'intégralité des images. Tous les jeudis à 18h25, M6 propose une sélection des moments forts. Des psychiatres et des psychanalystes (Didier Destal, chef de service de l'hôpital psychiatrique de Ville-Evrard et Marie Haddou, psychologue clinicienne) interviennent dans les phases de sélection des candidats, puis tout au long de l'émission. « Loft Story » suscite une vive curiosité et de nombreuses critiques. Le psychanalyste Serge Hefez dit avoir refusé d'y participer, estimant que sans la présence d'un animateur (lequel, selon lui, permet à la relation interpersonnelle de s'établir et à une vérité de se révéler), le concept de l'émission est dangereux. « Ce ne sont plus des personnes, mais des rats dans une cage. Celui qui est observé est déshumanisé, instrumentalisé. Pire, on lui impose un scénario. Un scénario pervers. »74(*)

Propulsé sous les feux de la rampe par l'émission « Loft Story », Didier Destal, s'attire les foudres du Conseil national de L'Ordre des médecins. Il est accusé de galvauder la profession en mettant son expertise au service d'une expérimentation télévisuelle.75(*)

Depuis quarante ans, la psychologie s'est imposée dans les médias sous diverses formes, grâce à l'influence de journalistes et de professionnels qui ont su devancer l'air du temps. A chaque étape, la prise de parole a généré la curiosité et l'adhésion d'un large public. Mais elle a aussi bousculé les schémas sociaux et suscité la désapprobation. Nous verrons dans les pages suivantes, comment la psychologie se manifeste de nos jours dans la presse écrite, à la radio et à la télévision.

3. Omniprésence de la psychologie et des psychologues dans les médias

« La France est peut-être en passe de devenir une sorte d'étrange démocratie psychologique avancée. » 76(*)

Robert Castel, « Le phénomène psy et la société française », 1980.

Aujourd'hui, les « psys » sont omniprésents. Les programmes de témoignages où ils officient rassemblent un large public, les rubriques « psychologie » abondent dans la presse écrite et à la radio, les magazines spécialisés se vendent en masse - particulièrement le mensuel Psychologies Magazine, qui illustre ce que la discipline est devenue dans les médias. Les chaînes de télévision proposent, par exemple, une dizaine d'émissions : « Vie privée, vie publique » (sur France 3) ; « Ca se discute », « Toute une histoire », « Cas d'école » « C dans l'air », « C'est au programme » (sur France 2) ; « Les conseils du jour », « L'amour c'est magique » (sur M6) ; « Sentez-vous bien », « On n'est pas que des parents », « Les tabous du... », « Psycho-fiction » (sur France 5)...

La grille de lecture des psychologues s'étend aux domaines liés à la vie quotidienne, le couple, la famille, la santé, l'évolution des moeurs. Elle se manifeste aussi dans les débats de société, l'actualité, les faits divers, la politique...

3.1 Les psychanalystes à la Une

« On me demande souvent : "comment pouvez-vous rester un authentique psychanalyste tout en vous montrant à la télé ?" Je réponds que c'est aussi simple que d'être un psychanalyste qui se cache, sauf qu'on se montre. »77(*)

Gérard Miller, « Dans l'oeil du cyclope », 2005.

Gérard Miller, Boris Cyrulnik, Marcel Rufo, Serge Hefez, Caroline Eliacheff, Claude Halmos, et bien d'autres, constituent un vivier de professionnels polyvalents opérationnels dans la presse écrite, les studios de radio et les plateaux de télévision.78(*)

La sociologue Dominique Mehl considérait en 2005 que se distinguent dans l'univers « psy » deux principales figures publiques : le nouveau moraliste qui délivre des conseils normatifs (moins lourds que les prêtres d'autrefois) et le « panseur/penseur » qui propose des pistes de réflexion sur les maux de la société. Tous accompagnent ce qu'elle qualifie de « vaste mouvement d'introspection publique des citoyens ordinaires. »79(*) Outre ces deux profils, d'autres tendances s'affirment car le genre continue à évoluer dans les médias.

La plupart des praticiens ont une véritable légitimité sur les questions de moeurs : « Sans eux, il n'y aurait pas eu cette richesse des débats sur les secrets de famille ou l'accouchement sous X. En revanche, asséner qu'en cas de divorce les enfants vont gravement trinquer est abusif. Partir d'une expérience clinique pour en faire une espèce de savoir prédictif me semble dangereux », prévient-elle.80(*)

Il existe des dissensions au sein de la discipline. Toujours selon Dominique Mehl, de nombreux professionnels ne se reconnaissent pas dans sa médiatisation. D'autres dénoncent les dangers de l'exportation de la parole hors du cabinet médical, sans bouder les médias. C'est le cas de la psychiatre Elisabeth Roudinesco qui dit avoir choisi les émissions où elle se rend, « uniquement pour parler de mes livres ou pour livrer un combat, jamais dans les déballages et jamais au titre d'expert [...] Je condamne les exhibitions en tous genres. »81(*) C'est également la position de la psychanalyste Claude Halmos. Elle met en garde contre les interprétations « sauvages » de certains praticiens dont la parole se réduit à « presque rien ».82(*)

Nous observerons dans cette partie différentes utilisations de la psychologie dans les médias au travers notamment de : « Ca se discute » sur France 2, de l'émission de radio « Savoir être » sur France Info avec Claude Halmos, et du mensuel Psychologies Magazine...

3.2 Changement de statut dans « Ca se discute »

« Un psy avait dit un jour : "Delarue est incroyable, il arrive à obtenir en quelques minutes ce qu'il me faut six mois pour obtenir." Ce n'est pas moi, c'est la télévision qui fait cela. »83(*)

Jean-Luc Delarue, « Télé confessions », 2006.

Créée et produite en septembre 1994 par Jean-Luc Delarue, « Ca se discute » sur France 2 est une émission de témoignages à forte audience. Hebdomadaire au début, elle a été depuis septembre 2007 diffusée un mercredi sur deux à 22h45.

La problématique est choisie parmi des thèmes de société : le couple, la vie de famille, les relations avec autrui, la sexualité, la délinquance, la maladie, etc.

Entourés d'un décor sobre en forme d'arène, plusieurs participants sont assis côte à côte dans de larges fauteuils carrés, un grand écran derrière eux. Ils font face à d'autres invités et au public installés sur des gradins, un public bien « rôdé », dont les réactions (étonnements, rires, applaudissements) contribuent à la mise en scène de l'émission.

Un témoin ayant surmonté ses problèmes personnels, une célébrité du moment et un psychologue sont présents. L'animateur arrive sur le plateau en courant, sous les applaudissements. Vêtu d'un costume, équipé d'une oreillette visible et tenant des fiches, il encourage les participants - dont 80 % sont des femmes - à raconter tour à tour leur histoire et à dévoiler leurs blessures. Dans certains cas, le témoin se trouve submergé par l'émotion. Il pleure ou explose de colère. L'avis du psychologue est alors sollicité pour, à partir de ce cas particulier, apporter un éclairage général pouvant s'appliquer à la collectivité.

3.2.1 Rôles des psychologues dans l'émission

« Ca se discute » le 14 novembre 2001 a pour sujet d'actualité « Peut-on se remettre de ses blessures d'enfance ? » Boris Cyrulnik, psychiatre, l'un des vulgarisateurs français de la « résilience » (capacité à une poursuite de la vie post traumatique) fait face au public. Il écoute et commente les diverses confidences. 

Auteur de livres à succès,84(*) il énonce des généralités sur les blessures de l'enfance et donne quelques conseils optimistes susceptibles d'aider Chantal, par exemple, qui n'a pas « digéré » son enfance ou Philippe qui longtemps ne voulait pas grandir.

Selon la sociologue Dominique Mehl, cette émission consacrée aux traumatismes de l'enfance est « emblématique de la culture psychologique de masse », à l'oeuvre dans les médias et le corps social. Les éléments du  phénomène de diffusion de la « psy » dans la société y sont ici exposés : la souffrance psychique, l'intimité, l'auto-analyse

devant autrui, l'énoncé d'une parole libératrice.85(*)

Il semblerait que la fonction du praticien sur le plateau ait changé ces dernières années. Dans certains cas, l'animateur sollicite peu sa parole, n'hésitant pas à l'interrompre à

l'avantage du témoin dont le récit de l'expérience vécue est privilégié. Comme le confirme le sociologue Rémy Rieffel, l'audience d'émissions comme « Ca se discute » illustre « le succès de cette télévision dite compassionnelle qui valorise l'expression des profanes à travers celle des émotions et des sentiments. Le récit de vie devient à lui seul un témoignage qui fonctionne comme argument « c'est vrai parce que je l'ai vécu. »86(*)

Prenons, par exemple, l'émission du mercredi 19 mars 2008 à 22h40. Le thème en est : « Les ex : amis ou ennemis ? » Trois psychologues, toutes des femmes, y participent. L'une est présente parmi le public, une autre est installée dans une sorte de « bulle » visualisée sur le grand écran et la troisième intervient dans un reportage.

Dés le début de l'émission, Jean-Luc Delarue donne la parole à son premier témoin, Marie. Elle est séparée de son compagnon depuis deux ans, mais ne parvient pas à l'oublier. L'animateur se tourne vers le public et interpelle la psychologue, se trompant dans son prénom : « Isabelle Choukhroun dans l'audience, où êtes-vous ? Non, Alexandra... Comment peut-on s'accrocher à quelqu'un comme cela ? » La praticienne s'adresse directement au témoin :  « Marie, il serait intéressant de réfléchir aux blessures de votre enfance, commence-t-elle, aux raisons de votre dépendance affective et à votre besoin de vous construire autour d'une seule et même personne... »  Jean-Luc Delarue l'interrompt pour répliquer :  « Oh la la ! C'est difficile de demander à quelqu'un de prendre du recul quand il y a une histoire passionnelle, on ne se pose pas la question de savoir à qui est la faute : est-ce que c'est elle, est-ce que c'est lui ? » La psychologue semble déconcertée et tente de répondre : « Eh bien quand il y a de la souffrance, il faut se la poser ». L'animateur se tourne aussitôt vers Marie et demande : « Est-ce qu'il y a de la souffrance ? »

Il fait alors entrer Mélanie, 25 ans, hôtesse de l'air. Elle prend place à côté du premier témoin et raconte longuement comment elle a réussi à surmonter une séparation.

« Quel conseil donneriez-vous à Marie qui ne s'en sort pas ? », lui demande l'animateur. Mélanie se tourne vers Marie et lui dit : « Cet homme te manipule, il faut te détacher de lui. » Mélanie s'adresse ainsi aux autres invités sur le plateau et bavarde gentiment. La spécialiste sur le plateau n'est pas, quant à elle, conviée à donner son avis.

Isabelle, la deuxième psychologue, commente depuis sa bulle : « Cet homme a besoin de votre souffrance. Tant que vous souffrez, il vit. Maintenant que vous reprenez votre indépendance, il devrait morfler », énonce-t-elle. Nous sommes loin semble-t-il - tant sur le fond que sur la forme - du commentaire avisé d'un expert sérieux !

Plus tard, un reportage est diffusé. Il s'intitule Quand l'amour se transforme en haine et retrace l'histoire d'une femme harcelée par son ancien amant. La troisième psychologue Sophie Cadalen apparaît alors et délivre quelques explications : « Le harcelé espère toujours que le harceleur va l'écouter et comprendre qu'il ne l'aime plus, mais le harceleur n'est pas sur ce registre là... »

Les confidences de personnes harcelées vont crescendo en intensité dramatique jusqu'à celles d'une femme qui a tué son compagnon, avant de tenter de se donner la mort. Elle est aujourd'hui paraplégique. S'appropriant une phrase de Marcel Proust extraite de Albertine disparue, l'une des psychologues conclut « savamment » : « Il est rare qu'on se quitte bien, car si on était bien, on ne se quitterait pas. »

Que dire du rôle des trois expertes dans cette émission ? Leur disposition géographique est symbolique puisque la seule présente sur le plateau, Alexandra Choukhroun, n'a pas de fauteuil attitré. Elle est assise au milieu du public. Les téléspectateurs et les invités ne la distinguent pas. L'intervention d'Isabelle, depuis sa bulle, semble amener un moment de distraction à l'émission - à la manière d'un chroniqueur ou d'un comique invité à faire un sketch. La troisième, Sophie Cadalen, est filmée derrière un bureau. Sa situation est plus crédible, mais son discours est sommaire. Apporte-t-il des éclairages sur la difficulté à se séparer ou sur le harcèlement ? Probablement pas. Est-ce d'ailleurs ce qui est demandé aux spécialistes ? Sans doute pas non plus. Pour preuve, lorsque Alexandra Choukhroun se hasarde à approfondir un cas particulier, elle est interrompue sans ménagement.

La place du témoin, par contre, est mise en valeur. Le récit de son expérience est encouragé et écouté avec attention. Aurait-il donc ici supplanté le praticien, devenant lui-même vecteur de connaissance et d'expertise ? Il semblerait que oui. Le rôle du psychologue est réduit à ce qui pourrait s'apparenter à du « divertissement psychologique » dont la chaîne pourrait très bien se passer, l'émission pouvant exister sans sa participation, mais pas sans celle des témoins.

Il convient de rappeler que le but de l'émission est d'informer le public de façon « ludique et distrayante », comme l'a indiqué le directeur de la communication de Réservoir Prod en novembre 2007. « Les sujets qui marchent sont surtout les sujets `people' qui ne sont pas anxiogènes. »87(*) Il ne s'agit pas de faire avancer la connaissance d'une problématique, ce qui risquerait de provoquer l'ennui ou le désagrément, mais de satisfaire le public et de le fidéliser. L'intervention des psychologues - et des participants - doit être en phase avec ces objectifs.

L'exemple de « Ca se discute » illustre l'un des courants de la mise en spectacle de la psychologie dans les médias de nos jours : la « psy » de divertissement soumise aux nécessités d'audience et de rentabilité et le « tout psy » qui imprègne le corps social, tant et si bien que de l'expert ou du profane on ne sait plus qui a valeur de compétence. Tous les acteurs du spectacle, à savoir la chaîne, l'équipe de production, l'animateur, les témoins et les experts contribuent à cette scénographie. Les rôles s'enchevêtrent et se confondent, au point que chacun se sent habilité à parler en psychanalyste, comme monsieur Jourdain faisait de la prose, sans s'en rendre compte.88(*) Comment, dans ce cas, ne pas s'interroger sur la place que chaque acteur occupe ?

3.2.2 La place du témoin

« A l'opposé de la parole de l'expert qui est froide et lointaine, la parole ordinaire est chaude et proche, immédiatement accessible. »89(*)

Rémy Rieffel, « Que sont les médias ? », 2005.

Quelles sont les motivations, les vertus thérapeutiques ou les dangers pour ces personnes anonymes venues livrer un morceau de leur vie au grand public ?

Les témoins auraient différentes raisons de souhaiter s'exprimer dans les médias. Ils sont parfois motivés par le souhait de partager une expérience, de transmettre une connaissance, de régler un problème ou de révéler aux proches un secret trop lourd à porter.

Elizabeth a accompli la mission qu'elle s'était donnée. Elle est apparue à l'écran en janvier 2006 dans le cadre de « Ca se discute » sur les femmes battues. Elle voulait, en retraçant une période douloureuse de son histoire, apporter un message d'espoir à toutes celles qui, prises dans l'engrenage, ne voient pas d'issue possible.90(*)

Relevant souvent du défi personnel, le passage à la télévision laisse aux participants des impressions mitigées, comme en atteste Marc, directeur artistique, en avril 2006, dix ans après son intervention dans « Ca se discute ». Le thème était alors : « Hommes-femmes, à chacun sa grossesse ». Marc souhaitait défier les idées reçues sur le rôle des jeunes pères, mais il n'a pas pu s'exprimer comme il le souhaitait. Il se souvient avoir éprouvé un sentiment de « forte déception. »91(*)

Les participants ne sont pas tous armés pour surmonter leur passage à la télévision, confirme le psychiatre Serge Hefez. Pour lui, une minorité d'entre eux a une capacité de séduction et peut se nourrir de célébrité furtive. Mais la plupart se trouvent en difficulté.92(*)

Dans « Ca se discute » le 11 octobre 2004, Pierre raconte son penchant pour l'alcool. Il se souvient avoir tenté d'établir une relation privilégiée avec Jean-Luc Delarue. « On a besoin de lui, mais c'est le danger, car on se rend très vite compte qu'on est un témoin parmi tant d'autres. Le rapport privilégié va durer le temps de l'émission ou du reportage, mais il va ensuite disparaître. »93(*)

Le rôle de l'animateur, à l'inverse de celui d'un psychologue dont c'est la fonction, ne consiste pas à apporter un soutien moral aux témoins.

Invité d'un talk show,94(*) Christophe évoque un épisode traumatisant de sa petite enfance. Interrogé sur ses sentiments après l'émission il répond qu' « être là sur le plateau à se raconter devant l'animateur et devant les autres invités, c'est comme être dans un immense lieu vide, dans une énorme chambre d'écho [...] On parle, mais on ne sait pas à qui on parle, on sait qu'on parle à des millions de gens, mais aucun lien ne se crée avec eux. On ne parle pas à quelqu'un. » Pour cet homme, cet instant de célébrité où il a ouvert son coeur à la multitude le plonge dans une extrême solitude.

La psychologue Evelyne Dubreu estime que les témoins sont souvent des gens qui se sentent isolés moralement. L'émission peut être libératrice, la prise de parole étant positive, à condition qu'il y ait ensuite une prise en charge et que les témoins ne soient pas « lâchés dans la nature ».

3.2.3 La situation du public 

La mise en spectacle de la parole profane sur les thèmes de la vie quotidienne permet aux téléspectateurs de s'identifier soit à leur propre histoire, soit à celle de quelqu'un de leur entourage - tout en se divertissant. « Ils ne se sentent pas seuls, cela les rassure »,95(*) confirme Evelyne Dubreu. Ils peuvent aussi s'approprier les sujets plus éloignés de leurs préoccupations immédiates, poursuit-elle (comme le parcours d'un enfant autiste ou encore celui d'un transsexuel), qui leur offrent la possibilité « d'aller à la rencontre de l'autre et de comprendre ses difficultés. » Mais face à l'exhibition de l'intimité et de la souffrance d'autrui, ils se retrouvent en position de voyeurs passifs et éprouvent des sentiments ambigus. Il n'est pas faux de dire, ajoute Evelyne Dubreu, que les producteurs utilisent le malheur des autres pour activer le phénomène d'identification et faire de l'argent. Toutefois, conclut-elle, « ce n'est pas pervers, à partir du moment où les règles sont clairement énoncées. » 96(*)

« Ca se discute » utilise les praticiens en fonction des objectifs éditoriaux (et commerciaux). Dans d'autres émissions et sur d'autres supports, les psychologues sont amenés à jouer des rôles qui différent.

3.3 A l'école de Françoise Dolto : Claude Halmos

« La parole psy partout sollicitée est en même temps de plus en plus déniée. »97(*)

Claude Halmos, « Freud et Dolto gadgétisés ? », 2003.

Parmi les praticiens qui apparaissent dans les médias, accompagnant la tendance à l'introspection publique, plusieurs semblent suivre les traces de Françoise Dolto. C'est le cas de Claude Halmos, impliquée dans plusieurs supports depuis seize ans.

Cette psychologue de formation a débuté sa carrière publique dans l'émission télévisée « La grande famille », de 1992 à 1997 sur Canal +, aux côtés de Jean-Luc Delarue. Elle est également l'auteur de plusieurs livres.98(*) Elle apparaît régulièrement à la radio et à la télévision, et répond au courrier des lecteurs du mensuel Psychologies Magazine et aux lettres des auditeurs de France Info tous les samedis matins.99(*)

Spécialiste de l'enfance, Claude Halmos s'adresse à un public plus large. Elle tente d'apporter des éclairages sur les difficultés de la vie des individus dans un langage accessible à tous, invitant les cas les plus sensibles à entamer un travail thérapeutique. Outre le courrier des lecteurs et des auditeurs, elle répond aux invitations des journalistes, apportant parfois une lecture psychologique à des sujets de société.

3.3.1 « Savoir être »

Chaque samedi (à 6h27, 10h27, 11h57) sur France Info, Claude Halmos évoque une problématique concernant la famille, la vie en société, les relations professionnelles. Le thème est choisi en fonction de l'actualité (la mort ou la religion à la Toussaint, la solitude à Noël etc.) et de son originalité (s'il est inédit).100(*) Comme pour l'émission de Françoise Dolto, un journaliste lit un extrait d'une lettre d'auditeur, auquel la

psychanalyste répond prudemment, comme dans cet exemple, portant sur « L'Angoisse du mariage » (France Info, samedi 16 juin 2007) :

Bruno Denaes : « Les mois d'été sont les mois privilégiés des mariages. Valérie se marie dans quelques jours. Elle nous écrit qu'elle est dans le stress des préparatifs...Elle demande à la psychanalyste Claude Halmos si, en fait, elle n'a pas peur de grandir et de s'engager [...] »

Claude Halmos : « D'abord c'est un peu difficile pour moi de penser quelque chose de cette jeune femme alors que je ne la connais pas [...] C'est vrai que la peur du mariage

peut renvoyer à une peur de s'engager mais elle peut avoir aussi beaucoup d'autres

significations [...] Donc si elle a des doutes, il faut qu'elle se donne le droit de les avoir et d'y réfléchir au lieu de les faire taire. C'est ça qui va l'aider à avancer, se sentir libre et décider ce qui est mieux pour elle. »101(*)

La psychanalyste rappelle d'emblée qu'elle ne connaît pas son interlocutrice, indiquant de façon implicite qu'elle s'exprime hors du champ thérapeutique. Elle généralise le cas particulier, puis elle se recentre sur la jeune femme, l'invitant, l'autorisant même, à s'écouter et à s'exprimer sans refouler ses émotions.

3.3.2 Le courrier des lecteurs dans Psychologies Magazine

Dans le même registre, Claude Halmos répond au courrier des lecteurs de Psychologies Magazine, s'attardant parfois sur un cas particulier sans le généraliser, comme dans cet échange épistolaire datant du mois de mai 2008 :

« Comment arrêter d'avoir peur du sort ? »


 « 
Ma mère était handicapée mentale et me maltraitait, et je n'ai pas connu mon père. J'ai réussi ma vie personnelle et professionnelle, mais je me sens parfois malheureux jusqu'au suicide. De plus, par peur du sort, je dois porter sur moi un objet religieux. Comment me débarrasser de ce comportement ? »

La réponse de Claude Halmos est la suivante :

« Je ne pense pas que l'on puisse réduire votre obligation de porter un objet religieux à un "comportement". Car elle me semble être pour vous une façon - inconsciente - d'exprimer des choses essentielles [...] L'adulte que vous êtes aujourd'hui, en effet, n'est pas seul, mais l'enfant et surtout le bébé que vous avez été ont sans doute vécu dans une absence de liens... »

3.3.3 Mettre des mots

Comment la psychanalyste explique-t-elle sa présence dans les médias ? Par la conviction, dit-elle, qu'il existe parmi le public un désir de savoir, de comprendre et de mettre des mots sur la souffrance. Répondre à cette attente est pour elle un travail « militant et pédagogique. »102(*) Il s'agit « d'intervenir de façon sérieuse » en apportant

une « véritable information » à partir de laquelle les gens pourront mener une réflexion personnelle. « C'est parce que le spécialiste s'est mis au travail et a essayé de penser le problème dont il traite que le public peut se mettre en position de le penser à son tour. Transmettre ne va pas de soi. »103(*)

Claude Halmos se démarque des programmes de télévision où la parole est mise en scène, dans la mesure où ils « donnent à voir » plus qu'à « entendre » et encouragent l'exhibitionnisme. Elle dénonce par ailleurs l'intervention de certains psychanalystes dans les talk shows qui, d'après elle, manquent de sérieux et relèvent de « l'escroquerie ».104(*)

Même si elle s'impose des limites, elle reconnaît que sa contribution dans les médias comporte des risques. Il ne faut pas faire croire au public qu'il existe des explications simples et universelles au malheur, alors qu'elles sont complexes et enracinées dans l'histoire personnelle de chacun, ni lui donner l'impression que les praticiens détiennent les « clés du salut ».105(*)

3.4 Psychologies Magazine : un symbole du genre

« L'un des traits saillants de notre époque, c'est d'avoir ajouté à la liste traditionnelle des droits de l'homme un droit nouveau, celui de s'épanouir. »106(*)

Mony Elkaïm, neuropsychiatre, Marianne, 2005.

Psychologies Magazine a su profiter de la manne « psy ». Créé en 1970, puis racheté et remanié en 1997 par Jean-Louis Servan-Schreiber, ancien directeur de l'Expansion, ce mensuel, qui a pour sous-titre « mieux vivre sa vie », rencontre un succès immédiat.

Il voit sa diffusion progresser de 75 000 exemplaires en 1997 à plus de 372 000 exemplaires en 2007. Dans un marché déprimé, le groupe Psychologies (Finev, Inter psycho, Selma) enregistre une croissance de 5 % de ses recettes publicitaires en 2007.107(*)

Autre preuve de bonne santé, en mai 2008 la filiale Lagardère Active acquiert 51 % du capital du groupe (le mensuel, la régie publicitaire Inter psycho, les activités Web regroupées au sein de la société Selma) dont elle détenait déjà 49 % depuis juin 2004. Le mensuel devient ainsi l'entière propriété du groupe Lagardère, consolidant la présence du magazine, leader en France et à l'étranger, dans la branche féminin/santé/bien-être.108(*) La société réalise un chiffre d'affaires de 23 millions d'euros. Psychologies Magazine est l'un des journaux « les plus profitables de la presse magazine en France, avec un taux de rentabilité de 18 % à 20 % », confirme Arnaud de Saint-Simon, son directeur général109(*).

Huit autres Psychologies Magazine en six langues sont lancés avec succès dans le monde : en Italie, en Espagne, en Belgique, au Royaume-Uni, en Russie, en Chine, en Afrique du sud, en Roumanie. Le groupe a créé cinq sites Internet : psychologies.com, mood.fr, questionsexo.com, testezvous.com et le dernier-né, quelpsy.com, un annuaire des professionnels en France qui offrent des conseils sur les thérapies.110(*)

3.4.1 La culture du bien-être

Le credo de Psychologies Magazine est en corrélation avec ce que la discipline est devenue dans les médias : mieux réussir sa vie par soi-même mais avec de l'aide. Il n'est pas un outil didactique qui relaterait les théories de Freud, de Jung, ou de Lacan.

Lu essentiellement par des femmes, le magazine offre des conseils axés sur « le mieux être », le « bien dans sa peau ». Quel est le secret de sa réussite ? Selon le directeur de publication, le journal a su établir « un climat de confiance avec ses lecteurs », en proposant des articles divertissants commentés par des experts qui leur offrent des pistes de réflexion, des repères, voire un nouveau « regard » sur eux-mêmes et sur les autres.111(*)

Le magazine se décline en plusieurs rubriques. Dans « Divan », une personnalité se confie « de l'intérieur » (Alain Chabat, Carla Bruni, Nicolas Hulot, Romain Duris, Zinedine Zidane etc.). « Le Dossier » rédigé par un journaliste comporte l'interview d'un praticien et distille des conseils, sur le « Plaisir sexuel : oser donner, savoir recevoir » (juillet-août 2007), « Pourquoi, comment vivre l'instant présent » (septembre 2007), « Ce qui nous rend vraiment heureux » (octobre 2007). Sous la rubrique « Enquête », des psychologues et d'autres experts apportent leurs recommandations sur des thèmes variés. On trouve ainsi « Les sept leçons de vie des surfeurs, plus qu'un sport le surf est une manière d'appréhender le monde », avec les interviews d'une rédactrice en chef allemande, d'un scientifique, d'un professeur de philosophie et d'un ex-footballeur (juin 2007), « Les jeunes et l'alcool, quand s'inquiéter ? », avec l'interview de Daniel Bailly, pédopsychiatre (septembre 2007), « Les hommes se sentent-ils encore virils ? Le masculin en pleine mutation » avec Serge Hefez, psychiatre et psychanalyste (novembre 2007).

En janvier 2008, Psychologies Magazine expérimente une nouvelle formule. Il se veut « plus rythmé, plus complet, plus accessible ».112(*) La nouvelle version ressemble à la précédente. Elle reprend le « Courrier des lecteurs » de Claude Halmos, la rubrique « Divan » et cinq colonnes qui correspondent à diverses facettes de la vie psychique et physiologique des individus, comme « Se connaître », « Vivre ensemble », « Aimer », « Transmettre », « Etre bien ». Elle propose de plus nombreux sujets plus illustrés, avec des entretiens et des conseils d'experts : « Changer, devenir soi en mieux », (janvier 2008), « Echapper à la bêtise » (février 2008), « Penser positif » (avril 2008).

Dans tous les articles, le discours psychologique est érigé en culture du bien-être et de l'épanouissement. « Chacun se sent obligé de s'accomplir individuellement, de réussir sa vie, de devenir exceptionnel. Beaucoup n'y parviennent pas. Si la névrose est une pathologie du désir, la dépression est une pathologie de la grandeur », argumente le sociologue Alain Ehrenberg, auteur de La Fatigue d'être soi 113(*) et dont le travail porte en particulier sur la toxicomanie chez les jeunes.

Psychologies Magazine est emblématique de cette quête du bien-être et du mouvement d'introspection personnelle à la mode de nos jours.

3.5 Vers le débordement du genre ; de la psychologie à la chronique

« Je frémis quand [les psychologues] débordent leur champ de compétence et parlent de politique, par exemple, avec un vocabulaire relooké, importé de la culture psy. »114(*)

Dominique Mehl, L'Express, 2003.

Depuis Françoise Dolto, de nombreux professionnels se sont exprimés sur les sujets de société, tels que l'adoption, le Pacs, l'insémination artificielle, le clonage...115(*) alertant l'opinion sur leurs dérives et sur leurs dangers possibles pour les individus.

Ils se sont aussi introduits dans les sphères où ils s'aventuraient peu auparavant : l'analyse de l'actualité (pour au contre les OGM, la violence dans les établissements scolaires, etc.) et l'observation des faits et gestes des personnalités politiques. Dans presque tous les domaines, la grille de lecture « psy » est requise, parfois même là où son bien-fondé pose question.

Par ailleurs, participant à la dérive du « tout psy », de plus en plus de professionnels publient leurs « diagnostics » des femmes et des hommes politiques. Ce n'est toutefois pas un phénomène nouveau.

Effectuons un bref retour dans le temps. Sigmund Freud aurait lui-même analysé les actions et discours du président des Etats-Unis, Thomas Woodrow Wilson dans les années 1910.116(*) Plus récemment, lorsque la discipline s'est répandue dans les médias français, François Mitterrand, Jacques Chirac, Jean-Marie Le Pen ont été des sujets d'étude pour les experts et les éditeurs. Le psychanalyste Ali Magoudi dans son livre Les Rendez-vous, François Mitterrand sur le divan, paru aux Editions Maren Sell fin 2005, a même « analysé » l'ancien président dix ans après son décès ! Il aurait été l'un de ses interlocuteurs privilégiés de mai 1982 à juin 1993.117(*)

Aujourd'hui, quelques psychiatres de renom, comme Gérard Miller, Boris Cyrulnik, Serge Hefez décryptent les discours et comportements du président Nicolas Sarkozy, un sujet « vendeur ». Selon Serge Hefez118(*), la personnalité du chef de l'Etat et son rapport avec les Français prêtent le flanc à une lecture psychologique de ses faits et gestes. Contrairement à ses prédécesseurs, le président a souvent fait référence aux blessures passées : « Ce qui m'a façonné, c'est la somme des humiliations d'enfance » ou « à part d'un père, je ne manque de rien. »119(*)

Chroniqueur dans les émissions de divertissement de Laurent Ruquier sur Europe 1 et France 2, Gérard Miller a souvent indiqué qu'il s'exprimait en tant que citoyen et non pas en tant qu'expert. Toutefois, lorsqu'il « analyse », en mai 2007, le sens caché du discours du chef de l'Etat, qui entend-on ? Le psychanalyste ou le citoyen ? Comment le public perçoit-il sa parole ? Peut-on isoler l'homme de sa fonction ?

La sociologue Dominique Mehl s'inquiète dans une interview à L'Express : « Au nom de leur pratique clinique, certains médecins de l'âme s'érigent en experts des modes de vie. Attention à ce que leur parole ne devienne parole d'Evangile. »120(*)

Quant aux médias, ils sont divisés sur l'influence de ces nouveaux « chroniqueurs ». Où est l'information ? Quelle est sa fiabilité ? Les praticiens semblent avoir utilisé leur statut dans les médias pour véhiculer des idées personnelles et affirmer leur engagement citoyen et politique, quitte à outrepasser leur rôle et à déroger à ce qui pourrait relever du secret professionnel.

3.5.1 Des relations à redéfinir

Après une période de prospérité, la psychologie et ses acteurs dans les médias se sont égarés, modifiant le genre. Les médias semblent avoir renoncé à une « psy » introspective pour s'orienter vers une presse rentable, dédiée au bien-être, comme en atteste Psychologies Magazine. La qualité de l'information en est éprouvée. De nouvelles relations sont à définir, respectant le rôle spécifique de chacun : pour le praticien soigner, pour le journaliste informer. Les besoins économiques des médias ne peuvent, sans se discréditer, ni se satisfaire de la dépendance à l'égard d'une profession, ni servir d'exutoire aux praticiens désirant sortir de la solitude du cabinet.

CONCLUSION

« Les hommes ont toujours eu des blessures à cautériser. Ils ont toujours eu besoin de chirurgiens. Ce qui est nouveau, c'est qu'ils aient tant besoin de psychologues. Peut-être qu'au bout de l'individualisme, il y a un Moi qui doute, qui s'effrite, qui attend tout d'autrui. »121(*)

Jacques Gaillard, « Des psychologues sont sur place », 2003.

Nous avons tenté, tout au long de ce mémoire, de comprendre comment la relation entre les psychologues et les médias s'est construite en l'espace de quarante ans. Françoise Dolto à la radio, et Serge Leclaire à la télévision, ont été les premiers à exporter leurs connaissances cliniques de la psychanalyse hors du cabinet, employant un langage simple, vulgarisant la discipline. Se sont succédées ensuite les émissions de témoignages rentables pour les chaînes de télévision, où les psychologues ont officié, servant parfois de garde-fous ou de caution à une mise en spectacle de l'intimité et de l'émotion. La psychologie a continué sa progression jusqu'à devenir omniprésente dans tous les supports médiatiques. Cette invasion marque un nouveau tournant de la discipline. De rares praticiens s'inquiètent, qu'à force, leur crédibilité dans les médias soit contestée et le genre dévoyé.

Nous avons établi en première partie que les médias dépendent de la fidélité d'un large public, cible pour les annonceurs et facteur d'équilibre économique. Nous avons constaté que la psychologie était un genre, au même titre que le jardinage ou la cuisine peuvent l'être.

Le retour historique effectué dans la deuxième partie a permis l'analyse des principaux « passeurs » de la psychologie.

Nous avons traité, en troisième partie, le rôle de la psychologie et des praticiens à la télévision, à la radio, et dans la presse écrite. Nous avons observé sa transformation, au cours de ces dernières années dans « Ca se discute », à la radio, et au travers de Psychologies Magazine, qui vante les mérites du mieux être physique et psychique et de l'épanouissement personnel.

La description des spécialistes du surmoi à l'oeuvre dans les médias pourrait se résumer ainsi. Il y a le conseiller pédagogue, qui transmet une information et une réflexion de bon sens sur les interrogations des individus et de la collectivité ; le praticien qui apparait de façon fantasque et anecdotique dans les émissions de témoignages, comme « Ca se discute » ; le « psy polyvalent », qui apporte des réponses à presque tous les maux des hommes et de la société ; puis le nouveau « psy chroniqueur » qui décrypte les discours et observe les personnalités des politiciens, tirant des conclusions cliniques hors du champ thérapeutique. Il exprime des opinions citoyennes, voire partisanes, débordant de son domaine d'expertise.

Sur tous les fronts, jusque dans les informations, avec son lot de catastrophes et de malheurs (tremblements de terre, crack boursier, faits divers, crimes...), les médias sollicitent « en boucle » ces professionnels pour rassurer les individus et la collectivité, comme si les blessures de l'existence étaient évitables ou faciles à résoudre.

Le « tout psy » a envahi la société, rattrapant le psychologue, lui-même victime de son propre succès.

Trop de psys tuent la psy 

« Le savoir le plus exhaustif n'évite pas d'avoir à se faire son opinion propre pour pouvoir décider quoi faire face à des évolutions majeures. »122(*)

Jean Lebrun, psychiatre, «L'Homme sans gravité », 2005.

Il semblerait que s'amorcent les premiers signes de fatigue et de lassitude du public face à de tels excès. Ceci est manifeste dans l'édition123(*) qui a pourtant connu des années florissantes.

De rares psychanalystes condamnent le détournement de la psychologie à des fins narcissiques et vénales. Ils redoutent que sa surenchère ne discrédite la fonction et ne lasse le public. Ils y voient, confortés par certains observateurs, une faille de la société moderne et la manifestation d'une profonde crise de repères.

Face à la difficulté de prendre des décisions, l'individu prélève dans le vaste marché « psy » des bribes de réponses. Les praticiens lui fournissent un réconfort immédiat et des arguments par l'intermédiaire d'une parole médiatisée. Mais, cette parole lui évite d'aller chercher par lui-même, et en lui-même, des solutions à ses doutes et à sa souffrance.

En 1967, Menie Grégoire a recueilli les premiers chuchotements et a libéré la parole. Plus de quarante ans après, on assiste au grand déballage. Les médias ont gagné en termes d'audience, d'argent et de crédibilité. Mais ce faisant, la psychologie a été dévoyée, gadgétisée et il règne aujourd'hui une confusion.

Il est temps que les médias respectent les « psys », tout en s'en détachant et que la psychologie, après avoir été prisée, retrouve sa singularité.

Y a-t-il équivalence de genre entre l'investigation de la souffrance humaine et la recette du poulet aux olives ou la culture des radis ? Il est important, afin de retrouver la confiance du public, de revaloriser la parole du journaliste en tant qu'informateur ou chroniqueur, celle du témoin en tant que parole occasionnelle et celle du psychologue dans une situation qui lui est davantage conforme et légitime.

Paris, août 2008

BIBLIOGRAPHIE

Livres

BALLE, Francis. - Introduction aux médias.- Presse universitaires de France, 1994.

BOUTILLIER, Sophie, GOGUEL D'ALLONDANS, Alban, LABERE, Nelly, UZUNIDIS, Dimitri. -Méthodologie de la thèse et du mémoire.- collection Principes dirigée par Annie REITHMANN, Studyrama n° 575, 2007.

CASTEL, Robert, LE CERF, Jean-François. -Le phénomène psy et la société française.- Le Débat n° 1, 2, 3 juin août, 1980.

DESTAL, Didier. -Les miroirs du Loft.- Plon, 2001.

DOLTO, Françoise. -Lorsque l'enfant paraît.- Seuil, 1990.

DUMAS, Mireille. -La parole interdite.- Edition n°1, 1994.

FRANCOIS, Yannick. -Françoise Dolto, La langue des images.- Bayard, 1999.

FREUD, Sigmund. -Essais de psychanalyse.- Payot, 1981.

FREUD, Sigmund. -Introduction à la psychanalyse.- Payot, 1975.

GAILLARD, Jacques. -Des psychologues sont sur place.- Mille et une nuits, coll. Essais, 2003.

GREGOIRE, Menie. -Comme une lame de fond.- Calmann-Lévy, 2007.

HADDOU, Marie. -La psy du Loft raconte.- Flammarion, 2001.

HALMOS, Claude. -Parler c'est vivre.- Nil, 1997.

HEFEZ, Serge. -La Sarkose obsessionnelle.- Hachette Littératures, 2008.

JALLET, Emile. -Psychologie clinique et psychopathologie.- Collection Grand Amphi Psychologie, dirigée par G. Amy et M. Piolet, ouvrage coordonné par Robert Samacher, Bréal, 2005.

JOST, François. -Introduction à l'analyse de la télévision.- Ellipses, 1999.

LOCHARD, Guy. -Les débats publics dans les télévisions européennes.- l'Harmattan, 2006.

MATTELART, Armand. -L'Invention de la communication.- La Découverte et Syros, 1994, 1997.

MEHL, Dominique. -La bonne parole, quand les psys plaident dans les médias.- La Martinière, 2003.

MELMAN, Charles. -L'Homme sans gravité.- Denoël, 2002.

MILLER, Gérard. -Minoritaire.- Stock, 2001.

MUZET, Denis. -La mal info.- L'Aube, 2006.

RIEFFEL, Rémy. -Que sont les médias.- Gallimard, 2005.

RISSER, Hélène. -L'Audimat à mort.- Seuil, 2004.

SAMACHER, Robert. -Psychologie clinique et psychopathologie.- Bréal, 2005.

SCHNEIDERMANN, Daniel. -Le cauchemar médiatique.- Denoël, 2004.

SICHLER, Liliane. -Le parti psy prend le pouvoir.- Grasset, 1997.

THIBAULT, Mireille. -Comprendre les médias.- Ellipses 2005.

Articles presse parus entre 2001 et 2008

ALONSO, Cristina. - « La presse psy sur le divan », Le Journal du Dimanche, 24 février 2002.

BACQUE, Raphaëlle. - « Sarkozy couché de force sur le divan », Le Monde, 26 mars 2008.

BITTON, Anna. - « La dictature du tout-psy », Marianne, 22 au 28 octobre 2005.

BONAVITA, Marie-Laetitia. - « Servan-Schreiber cède "Psychologies" à Lagardère », Le Figaro, 3 juin 2008.

BORMAN, Christophe. - « Les médias nous psychanalysent-elles ? », Publications INA, Médiamorphoses, Dossiers de l'audiovisuel n°14, 8 octobre 2005.

BOUVET Bruno, CONRAD, Sophie. - « La 500e de Delarue, un magazine qui se discute », La Croix, 29 avril 2006.

CHERER, Sophie. - « Notre Dolto », Le Nouvel Observateur, n° 2257, 7 au 13 février 2008.

CHOMBEAU, Christiane. - « Le Pen de père en fille », Le Monde, 16 décembre 2007.

DELFOUR, Jean-Jacques. - « Loft Story, une machine totalitaire », Le Monde, 19 mai 2001.

FRAISSARD, Guillaume. - « Ces émissions ne grandissent pas l'homme », Le Monde, 3 mai 2002.

FRANCE 2, RESERVOIR PROD. -« Ca se discute, Derrière l'oreillette », dossier de Presse, 2006

HEFEZ, Serge, Libération, 3 mai 2001.

JOST, François.- « Psy et médias sont-ils compatibles ? », Dossiers de l'audiovisuel, INA n° 111, septembre-octobre 2003.

KELLEY-LAINE, Kathleen. - « Un jeu régressif et mortifère », Télérama, 16 mai 2001.

LIAKHOFF, Sylvia.- « Psy mania sur toutes les chaînes », Dossiers de l'audiovisuel, INA n° 111, septembre-octobre 2003.

MEJEAN, Max et UNGARO, Jean. -« Peut-on psychanalyser les médias ? », Médiamorphoses n° 14, INA, Armand Colin, septembre 2005.

MILLER, Gérard.- « Dans l'oeil du cyclope », « Peut-on psychanalyser les médias ? », Médiamorphoses n° 14, septembre 2005.

ROCHEFORT, Robert. - « Ca se discute, les raisons du succès », Supplément France 2 Hebdo, juin 2004.

SERVAN-SCHREIBER, Jean-Louis. -« Edito », Psychologies Magazine, janvier 2008.

SIX, Nathalie. - « Psychologie, psychanalyse, la polémique comme thérapie », Livre Hebdo n° 735, 23 mai 2008.

SYFUSS-ARNAUD, Sabine. - « Le cénacle des divas du divan », L'expansion, 27 avril 2005.

VILADIE, Anne. - « Shoah en CM2 : Simone Veil fustige l'idée de Sarkozy », L'Express, 15 février 2007.

WILLIAMS, Patrick. - « Tous obsédés par Sarko ? », Le Nouvel Observateur, 21 avril 2008.

Tous les numéros du mensuel Psychologies Magazine publiés entre juillet 2007 et mai 2008.

Documents audiovisuels

« Bas les Masques », de septembre 92 à juin 96. 179 en référence à l'INA (la centième), 1er mars 1995.

« Ca se discute », « Derrière l'Oreillette, les dix ans de Ca se discute », France 2 et Réservoir Prod, INA, 3 mai 2006.

« Ca se discute », « Les ex : amis ou ennemis ? », France 2, 19 mars 2008.

« Ca se discute », « Peut-on se remettre de ses blessures d'enfance ? », France 2, INA, 14 novembre 2001.

« Ca se discute », « Pourquoi bascule-t-on dans la folie ? », France 2, INA,

13 septembre 2003.

« Lorsque l'enfant paraît », Françoise Dolto et Jacques Pradel, France Inter 1976, vol 1.

« Psy-Show », Pascale Breugnot, « Viviane et Michel », « Françoise et Yvan », « Carole et ses parents », TF1, 1984.

« Télé confessions », « Les pionniers de l'intime », Episode 1, Richard Cannavo et Marie Desmeuzes, réalisation Marie Desmeuzes, AMIP/INA 2006.

« Télé confessions », « Grands prêtres et dérives », Episode 2, Richard Cannavo et Marie Desmeuzes, réalisation Marie Desmeuzes, AMIP/INA 2006.

INTERVIEWS

Menie Grégoire, journaliste et écrivain, 4 octobre 2007.

Bruno Denaes, journaliste à France Info, 6 novembre 2007.

Arnaud Gachi, directeur de la communication de Réservoir Prod, 14 novembre 2007.

Evelyne Dubreu, psychologue clinicienne, 3 décembre 2007.

Pascale Breugnot, journaliste et productrice, 18 décembre 2007.

SITOLOGIE

www.acrimed.org

www.arretsurimages.net

www.cairn.info

www.dailymotion.com

www.dicocitations.com

www.doctissimo.fr

www.ego-productions.com (maison de production de Pascale Breugnot)

www.evene.fr

http://familles.blogs.liberation.fr (blog du psychanalyste Serge Hefez)

www.france5.fr

www.france2.fr

www.franceinfo.fr

www.francetelevisions.fr

www.francoise-dolto.com

www.google.com

www.google.fr

http://hebdo.nouvelobs.com

www.ina.fr

http://jeanmarcmorandini.tele7.fr

www.lemonde.fr

www.mediametrie.fr

www.nouvelobs.com

www.observatoiredesmedias.com

www.psychologies.com

www.puf.com

www.reservoir-prod.com (maison de production de Jean-Luc Delarue)

www.snptv.org (Syndicat national de la publicité télévisée)

www.toutelatele.com

www.tvmag.com

http://vie-privee-vie-publique.france3.fr

RESUME

« LA PSYCHOLOGIE, UN GENRE MEDIATIQUE DEVENU RENTABLE »

Du non-dit au grand déballage

Ce mémoire vise à montrer comment les médias ont utilisé la psychologie, les psychologues et les psychanalystes pour fidéliser et augmenter leur public au cours des quarante dernières années.

Les médias sont des entreprises dont l'équilibre économique (redevance et recettes publicitaires) dépend du public et de sa satisfaction, mais aussi des annonceurs publicitaires, ce qui suppose d'être en adéquation voire en avance sur les tendances d'une époque.

L'histoire des médias foisonne de tentatives pour conquérir une audience. Parmi d'autres, un genre apparaît à la fin des années 1960, la psychologie, qui va voir intervenir à travers différents supports des journalistes, puis des psychologues ou des psychanalystes.

Aujourd'hui, les psychologues sont omniprésents. Ils tentent de décrypter les événements qui ponctuent la vie des individus et de la collectivité, des simples doutes inhérents à la vie quotidienne aux souffrances les plus cuisantes. On les retrouve à la télévision dans les émissions de témoignages comme « Ca se discute », à la radio avec « Savoir être » sur France Info, dans la presse écrite au travers du mensuel Psychologies Magazine, symbole de la quête du « mieux être » qu'est devenu le genre dans les médias. Ils sont aussi sollicités pour donner une lecture psychologique de l'actualité et des personnalités politiques, exprimant des opinions citoyennes et débordant ainsi de leur rôle « curatif ». Risquant de susciter la lassitude médiatique, ils mettent en péril leur discipline d'origine. Et si trop de psys finissaient pas tuer la psy... Il reste aux journalistes, chroniqueurs, témoins et « experts » à redéfinir leur statut et la valeur de leur propos.

ANNEXE 1

Les chiffres de « Ca se discute »

Créée et produite en septembre 1994 par Jean-Luc Delarue, « Ca se discute » est une émission hebdomadaire de témoignages, diffusée sur France 2 en deuxième partie de soirée.124(*)

Pendant de nombreuses années, l'émission rassemble un large public. Elle est même imbattable dans la concurrence avec TF1. Aucun programme ne parvient à assurer une audience stable à la chaîne privée ce soir-là. Par exemple, en octobre 2002, les résumés des matchs de football, la série « Columbo », ou « Ca peut vous arriver », dépassent à peine les 2 millions de téléspectateurs, alors que « Ca se discute » caracole en tête avec 3 millions de « fidèles » pour plus de 40 % de part de marché.

TF1/F2

20H55

Fictions/Foot/Magazines

Ca se discute

M 02/10/02

Football :
Inter de Milan/Lyon

2.33 millions
29.9 %

2.76 millions
36.4 %

M 09/10/02

Columbo
1.43 millions
29.7 %

2.70 millions
36.4 %

M 16/10/02

Ca peut vous arriver
1.48 millions
21.1 %

2.76 millions
40.9 %

M 23/10/02

Football :
Milan AC/Bayern Munich

2.81 millions
25.7 %

3.02 millions
44.2 %

M 30/10/02

Football :
PSV Eindhoven/Auxerre

1.96 millions
25.7 %

2.54 millions
32.4 %

M 06/11/02

Columbo
1.80 millions
34.0 %

2.33 millions
30.1 %

Audience de « Ca se discute » en octobre 2002125(*)

A partir de 1998, l'émission subit quelques variations et devient bimensuelle. Elle vaut au producteur-animateur deux 7 d'Or en 2000 et en 2003 pour la meilleure émission de société. Puis elle est un temps mensuelle sous l'intitulé « Ça se discute, jour après jour », en prime time. Huit ans après la création de cette version, l'émission réunit à chaque fois environ 5 millions de téléspectateurs.

Jean-Luc Delarue et sa société Réservoir Prod, marquent avec ce concept une succession de coups médiatiques. Pour célébrer ses 10 ans, le 30 juin 2004, le magazine ouvre ses coulisses aux téléspectateurs sur France 2 à 0h50. L'émission est appelée « Derrière l'oreillette ». Elle est suivie par 750 000 téléspectateurs.126(*) En 10 ans, 5 000 personnes, anonymes pour la plupart, sont venues témoigner dans 424 émissions.

En décembre 2005, « Ca se discute » propose une soirée spéciale sur la téléréalité qui attire près de 42 % de téléspectateurs, une audience record. Mercredi 3 mai 2006 à 22h35 sur France 2, la 500e est retransmise en direct, avec 7 500 invités, 1 000 reportages, 300 heures d'images pour cette seule émission. Elle bat son record de la saison avec près de 3,5 millions de téléspectateurs.127(*)

La crise des producteurs-animateurs

Nous sommes en 1994. Coup sur coup, l'animateur Arthur est débauché d'Europe 1 et Jean-Luc Delarue de Canal +. Tous deux négocient un contrat avantageux avec Jean-Pierre Elkabbach, alors « patron » du pôle public - ce qui leur aurait permis, ainsi qu'à d'autres producteurs, de fonder leur maison de production.128(*)

Ce jour là, explique la journaliste Hélène Risser dans son livre « l'Audimat à mort », Jean-Luc Delarue signe « entre quatre yeux » un contrat de 404,5 millions de francs (environ 61,50 millions d'euros) pour trois saisons de 1994 à 1997, avec une avance de 29 % du montant prévisionnel des commandes pour la saison 1994-1995. Chaque émission est rémunérée 1,7 million de francs (près de 244 000 euros). Cet arrangement, selon la journaliste, permet à l'animateur de financer gratuitement sa société de production Réservoir Prod et de réaliser jusqu'à 80 % de marge. En contrepartie, France Télévisions réussit à redresser son audience en baisse, passant de 24,7 à 25 % de parts de marché. En 1995, le député UDF Alain Griotteray examine les contrats de France 2 et révèle l'affaire. D'autres animateurs producteurs d'émissions de divertissement sont sur la sellette. Outrés par « l'ampleur des dérives »,129(*) les salariés de France Télévisions rédigent une motion de défense contre Jean-Pierre Elkabbach, l'acculant à la démission. Mis en défaut dans la presse, Jean-Luc Delarue justifiera ses tarifs ainsi : « L'émission a décollé en audience, nous battons régulièrement Anne Sinclair. Et "Ça se discute" fait aussi des excellents scores. Nous rapportons plus de recettes publicitaires que nous ne coûtons à la chaîne. On ne peut rien me reprocher. »130(*)

Le scandale a du succès. Pour exemple, le mercredi 24 octobre 2007, l'émission, enregistrée et diffusée en différé, a pour thème les « Célébrités traquées : victimes consentantes ? » A la suite d'un échange verbal musclé avec le paparazzi Jean-Claude Elfassi, Daniel Ducruet, ancien époux de la princesse de Grimaldi, en vient aux mains.132(*) Cet éclat est aussitôt repris par les médias et mis en circulation sur Internet. Le jour de la diffusion, l'émission réunit environ 2 800 000 téléspectateurs pour 32 % de part d'audience, dont 29 %, sont des femmes au foyer de moins de cinquante ans.133(*)

ANNEXE 2

Index des noms propres

« L'Amour en danger »

« Ca se discute »

Claude Halmos

Françoise Dolto

Jean-Luc Delarue

« Loft Story »

« Lorsque l'enfant paraît »

Menie Grégoire

Pascale Breugnot

« Psy-Show »

Psychologies Magazine

« Savoir être »

Serge Hefez

MOTS CLES

Annonceur

Audience

Chronique

Clientèle

Consommateur

Emission de témoignages

Genre

Médiamétrie

Ménagère

Psychanalyste

Psychiatre

Psychologie

Psychologue

Public

Publicité

Rentabilité

Talk show

Téléréalité

Témoin

* 1 Ce terme comprend l'ensemble des praticiens de la discipline : les psychologues, les psychiatres, les

psychothérapeutes et les psychanalystes.

* 2 Risser, Hélène, « L'Audimat à mort », Seuil, 2004, p. 73.

* 3 Dawkins and Reichheld, « Costumer retention as a competitive weapon », Directors and Boards, 1990.

* 4 Balle, Francis, « Introduction aux médias », PUF, 1994, p. 90.

* 5 Notons que la situation de l'audiovisuel public est en cours de réforme. Un calendrier de suppression par   étapes de la publicité sur les chaînes publiques est prévu à partir du début 2009, pour arriver à une suppression   totale d'ici 2011. Voulue par le président Nicolas Sarkozy et élaborée sous la conduite de Jean-François Copé,

  président du groupe UMP à l'Assemblée nationale, cette décision respecte le calendrier de passage de

  l'analogique au numérique fixé par la loi au 30 novembre 2011. Site www.nouvelobs.com « France

  Télévisions : Copé propose la fin de la pub d'ici 2011 », 9 avril 2008.

* 6 Balle, Francis, « Introduction aux médias », PUF, 1994, op.cit., p. 168.

* 7 Ibid.

* 8 Ibid, pp. 170-171.

* 9 www.mediametrie.fr, mars 2008.

* 10 Ibid.

* 11 Truchi, Stéphane, Nuizière, Solange, « Qu'est devenue la ménagère de moins de cinquante ans ? », Ipsos,

2003.

* 12 www.mediametrie.fr, mars 2008, op. cit.

* 13 Risser, Hélène, « L'Audimat à mort », Seuil, 2004, op. cit., p. 84.

* 14 Risser, Hélène, « L'Audimat à mort », Seuil, 2004, op. cit., p. 74.

* 15 Jost, François, « Introduction à l'analyse de la télévision », Ellipses, 1999, p. 19.

* 16 Selon Emile Jalley, professeur honoraire de psychologie à l'université Paris VIII, le terme « Psychologie »

est utilisé dans le discours médiatique pour identifier la psychanalyse. La discipline « est le plus couramment

présentée et reçue comme s'identifiant de manière implicite à la "psychologie" tout court. La demande

croissante qui se fait jour dans le public en matière d'information aussi bien que d'utilisation des techniques

de la psychologie assimile spontanément et le plus fréquemment celles-ci à la rubrique générique, à vrai dire

un peu vague, où le sentiment commun range les grandes découvertes de la psychanalyse. » Jalley, Emile,

« Psychologie clinique et psychopathologie », Collection Grand Amphi Psychologie, Bréal, 2005, p. 16.

* 17 Godineau, Emilie, « La psychologie vue par Jean-Louis Servan-Schreiber », Le journal des femmes,

22 mars 2007.

* 18 Rieffel, Rémy, « Que sont les médias ? », Gallimard, 2005, p. 282.

* 19 Nous verrons comment dans les pages qui vont suivre et dans l'Annexe 1 (Les chiffres

de « Ca se discute »).

* 20 Interview, novembre 2007.

* 21 L'identification est connue par la psychanalyse « comme expression première d'un lien affectif à une autre

personne [...] Elle aspire à rendre le moi propre semblable à l'autre pris comme modèle », Freud, Sigmund

« Essais de psychanalyse », Payot, 1981, pp. 167-169.

* 22 Freud, Sigmund, « Introduction à la psychanalyse », Payot, 1975, p. 7. La matière de cet ouvrage est une série

de leçons professées en 1916.

* 23 Talk show : mot anglais composé de to talk parler et show spectacle. Emission de télévision consistant en une

conversation entre un animateur et ses invités. « Le Petit Robert », 2008.

* 24 Le Monde, 23 octobre 1970.

* 25 Grégoire, Menie, « Comme une lame de fond », Calmann-Lévy, 2007, op. cit., p. 10.

* 26 Ibid, p. 79.

* 27 Grégoire, Menie, « Comme une lame de fond », Calmann-Lévy, 2007, op. cit., p. 154.

* 28 Grégoire, Menie, Interview, Paris, 3 octobre 2007.

* 29 Grégoire, Menie, « Comme une lame de fond », Calmann-Lévy, 2007, op. cit., p. 196.

* 30 Ibid, p. 15.

* 31 Editions Calmann-Lévy, 2007.

* 32 Grégoire, Menie, « Comme une lame de fond », Calmann-Lévy, 2007, op. cit., p. 12.

* 33 Ibid, p. 15.

* 34 Ibid, p. 92.

* 35 Ibid, p. 93.

* 36 Grégoire, Menie, « Comme une lame de fond », Calmann-Lévy, 2007, op. cit., pp. 221-222.

* 37 Cardon, Dominique, Chercheur au CNRS, Laboratoire usages, créativité, ergonomie, France Télécom R&D.

Le Temps des Médias, n° 1, 2003.

* 38 Grégoire, Menie, Interview, Paris, 3 octobre 2007.

* 39 Grégoire, Menie, « Comme une lame de fond », Calmann-Lévy, 2007, op. cit. p. 255.

* 40 Grégoire, Menie, « Comme une lame de fond », Calmann-Lévy, 2007, op. cit., p. 95.

* 41 Ibid, p. 96.

* 42 Grégoire, Menie, Interview, Paris, 3 octobre 2007.

* 43 Ibid.

* 44 Dolto, Françoise, « Lorsque l'enfant paraît », Seuil, 1990, p. 14.

* 45 Quatorze ans après Donald Winnicott, le premier pédiatre et psychanalyste à la BBC, en Angleterre.

* 46 Yannick, François (psychiatre, psychanalyste), « Françoise Dolto, La langue des images », Bayard, 1999.

* 47 Dolto, Françoise, « Lorsque l'enfant paraît », Seuil, 1990, p. 14.

* 48 David, Catherine, « Notre Dolto » article sur le livre biographique « Ma Dolto » de Sophie Chérer, paru chez

Stock en 2008 (sorti à l'occasion du centenaire de la naissance et du vingtième anniversaire de la mort de

Françoise Dolto), Le Nouvel Observateur, n° 2257, 7 au 13 février 2008.

* 49 Dolto, Françoise, « Lorsque l'enfant paraît », Seuil, 1990, op. cit., p. 111.

* 50 Yannick, François, « Françoise Dolto, la langue des images », Bayard, 1999, « Docteur X ».

* 51 Interview de Jacques Pradel dans « Psy et média sont-ils compatibles ? », Dossiers de l'audiovisuel,

n° 111, INA, septembre-octobre 2003.

* 52 David, Catherine, « Notre Dolto », Le Nouvel Observateur, n° 2257, 7 au 13 février 2008.

* 53 Dubreu, Evelyne, Interview, 3 décembre 2007.

* 54 Breugnot, Pascale, Interview, 18 décembre 2007.

* 55 Caldara, Alexandre, « Eliane Victor productrice de pudeur », L'Express, 18 avril 2007.

* 56 Richard Cannavo, Marie Desmeuzes « Télé confessions », Episode 1, « Les pionniers de l'intime »,

AMIP/INA 2006.

* 57 Psy-Show, document INA, 3 décembre 2007.

* 58 Breugnot, Pascale, Interview, Paris, 18 décembre 2007.

* 59 Ibid.

* 60 Antenne 2, le 10 novembre 1983.

* 61 Dubreu, Evelyne, psychologue clinicienne, Interview, Paris, 3 décembre 2007.

* 62 Leclaire, Serge, « A chaud après Psy-Show », Aujourd'hui la vie, Antenne 2, 4 novembre, 1983.

* 63 Landrot, Marine, « Une liaison dangereuse », Télérama, n° 2184, 20 novembre 1991.

* 64 Ibid.

* 65 Première revue internationale de psychanalyse en langue française, parution trimestrielle.

* 66 Ibid.

* 67 Breugnot, Pascale, Interview, Paris, 18 décembre 2007.

* 68 Jost, François, « De Psy-Show à Loft Story », Dossiers de l'audiovisuel, septembre-octobre 2003, p. 15.

* 69 Jost, François, « Psy et médias sont-ils compatibles ? », Dossiers de l'audiovisuel, INA, n° 111,

septembre-octobre 2003, p. 57.

* 70 Ibid, p. 15.

* 71 Risser, Hélène, « L'Audimat à mort », Seuil, 2004, op. cit.

* 72 www.evene.fr

* 73 Téléréalité : calque de l'anglais reality-TV. Genre télévisuel qui consiste à filmer la vie quotidienne de

candidats sélectionnés et placés dans des situations déterminées. « Le Petit Robert », 2008.

* 74 Schneidermann, Daniel, « Le cauchemar médiatique », Denoël, 2004, p. 225.

* 75 Ozanam, Mathieu, « Télévision : la Psy-mania », dossier « Les psys sont partout », Psycho pour tous,

www.doctissimo.fr, 2008.

* 76 Castel, Robert, Le Cerf, Jean-François, « Le phénomène psy et la société française », Le Débat n° 1, 2, 3,

juin-août, 1980.

* 77 Miller, Gérard, « Dans l'oeil du cyclope », « Peut-on psychanalyser les médias ? », Médiamorphoses n° 14,

septembre 2005, p. 81.

* 78 Ils sont également rentables pour les maisons d'édition. Guérir, le best-seller du neurobiologiste David Servan-

Schreiber paru en 2003, s'est vendu à plus de 800 000 exemplaires. Oedipe toi-même, de Marcel Rufo, paru en

2000, s'est vendu à plus de 600 000 exemplaires. (Fourgnaud, Agathe, Valeurs Actuelles, 20 janvier 2006).

* 79 Mehl, Dominique, « La bonne parole », La Martinière, 2005, p. 329.

* 80 Huret, Marie, « Attention aux psys prêcheurs », L'Express, 11 mars 2003.

* 81 Roudinesco, Elisabeth, courriel en réponse à une demande d'entretien, 13 novembre, 2007.

* 82 Jost, François, « Psy et médias sont-ils compatibles ? », Dossiers de l'audiovisuel, INA, n° 111,

septembre-octobre 2003, op. cit., p. 57.

* 83 Richard Cannavo, Marie Desmeuzes « Télé confessions », Episode 1, « Les pionniers de l'intime »,

AMIP/INA 2006, op. cit.

* 84 « Un merveilleux malheur » (1999), « Les vilains petits canards » (2001), « Le murmure des fantômes »

(2003), « Parler d'amour au bord du gouffre » (2004), « De chair et d'âme » (2006), Odile Jacob.

* 85 Mehl, Dominique, « La bonne parole », La Martinière, 2005, op. cit., p. 282.

* 86 Rieffel, Rémy, « Que sont les médias ? », Gallimard, 2005, p. 284.

* 87 Gachi, Arnaud, directeur de la communication de Réservoir Prod, Interview, Paris,

14 novembre 2007.

* 88 Méjean, Max et Ungaro, Jean, « Peut-on psychanalyser les médias ? », Médiamorphoses, n° 14, INA,

Armand Colin, septembre 2005.

* 89 Rieffel, Rémy, « Que sont les médias ? », Gallimard, 2005, op. cit., p. 286.

* 90 Bouvet Bruno, Conrad Sophie, « La 500e de Delarue, un magazine qui se discute », La Croix, 29 avril 2006.

* 91 Ibid.

* 92 Richard Cannavo, Marie Desmeuzes, « Télé confessions », Episode 2, « Grands prêtres et dérives »,

AMIP/INA 2006, op. cit.

* 93 Ibid.

* 94 « Vie privée, vie publique », émission animée par Mireille Dumas, France 3, 24 mars 2004.

* 95 Dubreu, Evelyne, psychologue clinicienne, Interview, Paris, 3 décembre 2007.

* 96 Ibid.

* 97 Halmos Claude, « Freud et Dolto gadgétisés ? », « Psy et médias sont-ils compatibles ? », Dossiers de

l'audiovisuel, INA, n° 111, septembre-octobre 2003, p. 57.

* 98 « L'autorité expliquée aux parents » (2008), « Pourquoi l'amour ne suffit pas » (2006), « Parler c'est vivre »

(1997), Nil Edition.

* 99 Rubrique « Savoir être », France Info, le samedi à 6h27, 10h27, 11h57.

* 100 Denaes, Bruno, journaliste à France Info, Interview, 6 novembre 2007.

* 101 Site web de France Info, www.franceinfo.fr, rubrique « Savoir être ».

* 102 Halmos, Claude, « Parler c'est vivre », Nil, 1997, p. 20.

* 103 Jost, François, « Psy et médias sont-ils compatibles ? », Dossiers de l'audiovisuel, INA, n° 111,

septembre-octobre 2003, p. 57.

* 104 Halmos, Claude, « Parler c'est vivre », Nil, 1997, op. cit., p. 19.

* 105 Ibid., p. 23.

* 106 Bitton, Anna, « La dictature du tout-psy », Marianne, 22 au 28 octobre 2005.

* 107 Bonavita, Marie-Laetitia, « Servan-Schreiber cède "Psychologies" à Lagardère », Le Figaro, 3 juin 2008.

* 108 AFP communiqué, site www.jeanmarcmorandini.com, 23 mai 2008.

* 109 Bonavita, Marie-Laetitia, « Servan-Schreiber cède "Psychologies" à Lagardère », Le Figaro, 3 juin 2008, op.

cit.

* 110 Servan-Schreiber, Jean-Louis, Editorial, Psychologies Magazine, janvier 2008.

* 111 Servan-Schreiber, Jean-Louis, Editorial, Psychologies Magazine, janvier 2008.

* 112 Ibid.

* 113 Editions Odile Jacob.

* 114 Huret, Marie, « Attention aux psys prêcheurs », L'Express, 11 mars 2003, op. cit.

* 115 Mehl, Dominique, « La bonne parole », La Martinière, 2005, op. cit., p. 86.

* 116 www.evene.fr, juin 2008.

* 117 Bitton, Anna, « La dictature du tout-psy », Marianne, 22 au 28 octobre 2005, op.cit.

* 118 Serge Hefez est responsable de l'unité de thérapie familiale du service de psychiatrie de l'enfant et de

l'adolescent à l'hôpital de la Pitié Salpêtrière à Paris. Il vient de publier un ouvrage sur Nicolas Sarkozy La

Sarkose obsessionnelle. Il a également créé un blog : « Famille je vous haime » où il s'exprime

quotidiennement. (Humery, Thomas et Daumas, Cécile, « A l'aise dans la civilisation », Libération,

20 octobre 2007.

* 119 Bacqué, Raphaëlle, « Sarkozy couché de force sur le divan », Le Monde, 26 mars 2008.

* 120 Huret, Marie, « Attention aux psys prêcheurs », Interview de Dominique Mehl, sociologue, L'Express,

11 mars 2003, op. cit.

* 121 Gaillard, Jacques, « Des psychologues sont sur place. », Mille et une nuits, collection « Essais », 2003.

* 122 Melman, Charles, Lebrun Jean, « L'Homme sans gravité », Denoël, 2005.

* 123 Les ventes d'ouvrages traitant de la psychologie sont en baisse depuis 2007, atteste Elsa Rosenberg, éditrice

de la collection Psychologie aux Editions du Seuil. Pour redynamiser le secteur, les éditeurs misent sur les

prix, les maquettes, le rajeunissement des auteurs, l'humour... Six, Nathalie, « Psychologie, psychanalyse, la

polémique comme thérapie », Livre Hebdo, n° 735, 23 mai 2008.

* 124 www.france2.fr, 2007.

* 125 Roulet, Jérôme, « TF1 vs Ca se discute », Toutelatele.com, 18 décembre 2002.

* 126 De Mallevoüe, Delphine, « Ca se discute », Le Figaro, 30 juin 2004.

* 127 France 2, Dossier de presse, « Ca se discute, Derrière l'oreillette », 2006.

* 128 Risser, Hélène, « L'Audimat à mort », Seuil, 2004, op. cit., p. 91.

* 129 Ibid, p. 93.

* 130 Soula, Claude, « Elkabbach et le millionnaire » Le Nouvel Observateur, n° 1644, Semaine du 9 mai 1996.

* 131 Risser, Hélène, « L'Audimat à mort », Seuil, 2004, op. cit., p. 110.

* 132 www.dailymotion.com, 24 octobre 2007.

* 133 Chiffres publiés par la société Réservoir Prod, www.reservoirprod.fr, janvier 2008.






Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy








"Soit réservé sans ostentation pour éviter de t'attirer l'incompréhension haineuse des ignorants"   Pythagore