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Du soin à  la violence

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par Charlène B
IFSI - Infirmière 2003
  

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Après avoir étudié sur un plan théorique ces différents concepts, je vais me tourner vers les professionnels et recueillir leurs témoignages concernant ce sujet.ENTRETIENT AVEC LES PROFESSIONNELS DE SANTE :

I/ METHODOLOGIE :

- Guide d'entretien :

Suite à mes différentes recherches théoriques, je me tourne à présent vers les professionnels de santé qui pourront compléter mes recherches car ce sont eux qui sont au coeur du problème et qui sont confrontés à ces situations. A travers ces entretiens, l'objectif est de savoir comment les soignants reconnaissent une situation de violence ? Comment répondent-ils à une telle situation ? Comment gèrent-ils une prise en charge psychiatrique en médecine ? Ces entretiens ont pour but d'étayer et de confronter mes recherches bibliographiques à l'analyse que je vais réaliser par la suite, afin de faire évoluer ma réflexion.

Lieu d'enquête et professionnel choisi :

J'ai choisi de réaliser mes entretiens dans différents services de médecine sur le Centre Hospitalier Universitaire d'Angers à savoir dans un service de médecine interne (S1), un service de pneumologie (S2) et un service d'hépato-gastroentérologie (S3). Je voulais faire mes recherches sur la violence des patients envers les soignants dans un milieu que la prise en charge n'est pas spécialisée dans ce domaine. C'est aussi parce que c'est une prise en charge sur un moyen-long séjour où la création de relation "durable" avec le patient semblerait plus facilement réalisable. Aussi ma situation de départ se trouve en médecine.

Je me suis entretenu avec différentes infirmières d'âges et d'années d'expérience diverses. (cf. Annexe II)

Construction du guide d'entretien :

J'ai décidé de recourir à des questions ouvertes afin d'obtenir les réponses les plus riches possibles et les plus personnalisées. (Annexe I)

Construction de l'analyse :

Par peur de jugement ou d'interprétation j'avais décidé d'enregistrer mes entretiens. Seule une infirmière n'a pas accepté d'être enregistrée. Chaque entretien a été retranscrit. Toutes les réponses n'ayant pas été abordées dans le même ordre, j'ai décidé de les étudier en mettant en place un tableau où j'ai regroupé chaque réponse obtenue par thème correspondant à mon guide (annexe II).

Durant mon analyse je vais utiliser l'écriture en italique pour citer les réponses des infirmières. Ces dernières apparaîtront sous les désignations S1, S2 et S3.

II/ ANALYSE ET CONFRONTATION :

En confrontant la recherche théorique aux résultats des entretiens avec les professionnels interrogés, nous constatons de nombreux points communs.

La théorie et la pratique se rejoignent sur le fait que la violence des soignées sur les soignants est bel et bien présente et qu'elle fait partie intégrante de l'hôpital. L'infirmière S2 dit que " l'on reçoit à l'hôpital tout le panel de ce qu'il y a à l'extérieur, on est le reflet de la société." "ça appartient au monde des soignants ". Même si la psychiatrie en elle-même n'est pas la pathologie la plus évoquée lors de situation de violence, ce sont tout de même toujours des pathologies associées au psychologique qui sont retrouvées dans les entretiens, "Les personnes âgées Démentes" pour la soignant S1. Les autres soignantes évoquent aussi les pathologies additives relevant bien du psychologique, "la drogue" pour l'infirmière S1 et les" des alcoolisations." pour l'infirmière S2.

Après avoir effectué ce tableau je me suis rendu compte que quelques approches émergeaient particulièrement des entretiens et du cadre théorique.

A) Représentations sociales et prise en charge :

Les représentations sociales du patient atteint de pathologie psychiatrique se trouvant dans la théorie se vérifient dans la pratique. En effet, les entretiens menés font ressortir les notions de violence, de peur et d'appréhension. Pour la première soignante, l'arrivé d'un patient psychiatrique veut dire prise de précautions et c'est donc l'appréhension d'un tel patient qui se confirme ici. L'infirmière S1 parle de " ne pas avoir nos objets dangereux dans les poches car ils peuvent nous les prendre et nous blesser, c'est arrivé de venir à deux, une fait les soins et l'autre est spectateur mais reste à surveiller de manière a ce qu'il n'y ait pas de violence.". A plusieurs reprises, la prise en charge d'un patient atteint de pathologie psychiatrique fait référence rapidement à la mise en place de contentions pour se protéger soi-même et le protéger contre lui-même. Ceci nous montre bien que la violence est intimement liée à la psychiatrie dans ces représentations. On retrouve également la peur et la difficulté de la prise en charge, pour la soignante S3 qui, à l'arrivée d'un patient psychiatrique, se dit "holalala ça va être difficile". Cette notion de difficulté est notamment reliée aux difficultés organisationnelles pour ce genre de prise en charge. Toutes ces notions peuvent être liées au fait que la violence subie reste gravée et associée à un type de patient. L'infirmière S1 dit que " le coup que l'on reçoit entre en résonnance et se grave dans la mémoire et il dure, donc après on est un peu plus sur ses gardes avec certains types de malades".

B) Facteur organisationnel et économique sur la prise en charge :

La prise en charge de patients atteints de pathologie psychiatrique parait en général compliquée. Plusieurs points sont relevés, dont certains non retrouvés dans mes sources bibliographiques, sont évoqués dans les entretiens, à savoir le manque de temps pour s'occuper de ce type de patient. En effet, la soignante S2 nous dit que "Ce sont des gens qui en demandent beaucoup et parfois on se sent agressé parce que leurs demandes sont incessantes et du coup c'est pas facile pour nous de gérer." "Ce sont des gens qui prennent beaucoup de temps" ou encore le manque de personnel. L'infirmière S1 souligne que "l'on n'a pas assez de personnel pour les surveiller, on n'a pas les moyens médicaux", l'infirmière S3 illustre aussi que "l'on a 13 patients donc si on commence à rester avec un plus particulièrement c'est beaucoup plus dur." L'historique de la prise en charge des patients psychiatriques en hôpital «général» nous rappelle que, par le passé, ces patients étaient accompagnés par des professionnels spécialisés ; ce qui résolvait le problème de personnel et de temps. Aujourd'hui, les professionnels se retrouvent seuls et démunis.

Au niveau de l'organisation, un point nouveau est rapporté, celui des disparités entre les règles hospitalières générales et les règles des hôpitaux psychiatriques. Les infirmières précisent d'autre part les conséquences de ces hospitalisations en service classique, comme événements potentiellement déclencheurs de violence, telles que la durée de l'hospitalisation, le changement d'environnement : "l'envie de partir qui peut rendre violent"(S2), "c'est le fait de changer de lieu et puis d'avoir peur et de décompenser en cours de route."(S1)

Cet aspect parait avoir son importance pour une bonne prise en charge d'un patient psychiatrique mais je ne pense pas que ce soit le principal en ce qui concerne la violence du soigné vers le soignant.

C) Maltraitance d'institution à soignant et prise en charge :

La maltraitance, dans les entretiens apparait sous un point intéressant, celui de la maltraitance d'institution à soignant. Parallèlement dans mon cadre théorique c'est plutôt la notion de violence d'institution à soignant qui prime. Mais la différence entre violence et maltraitance parait souvent assez délicate. Cette notion de maltraitance d'institution est soulevée particulièrement par une soignante et parait être un point non négligeable pour une bonne prise en charge des patients atteints de pathologies psychiatriques demandant, comme nous l'avons vu, beaucoup de temps et de disponibilité. Elle dit à ce sujet que " les soignants eux mêmes sont maltraités" "on ne respecte plus comme on respectait avant les soignants et on a moins le temps de se parler, on est plus à l'ordinateur, on est plus dans un rythme effréné de soins, d'actes qui doivent être établis et cochés, on est moins au lit du malade à parler avec le patient et on se parle moins aussi entre soignants et c'est ça qui entraine de la maltraitance." (S1) C'est cette maltraitance là qui peut-elle même engendrer une prise en charge néfaste des patients et entraîner aussi de la maltraitance du soignant sur le patient, pouvant générer en retour une violence du patient à l'égard du soignant. C'est un cercle vicieux. L'infirmière S1 rajoute qu' " il y a quand même plus de maltraitance entre guillemet aujourd'hui"(S1). D'après les définitions du cadre théorique, la maltraitance arriverait après les premières réactions à la violence. Dans les entretiens, la différenciation entre violence et maltraitance est beaucoup moins évidente à faire car pour l'infirmière S3, la maltraitance a une notion de hiérarchie. Elle dit qu'" il y a la notion où on commence à placer une hiérarchie, quand on commence à maltraiter ça veut dire que la personne qu'on a en face de soi commence à se dire qu'on a de l'emprise sur elle" et pour l'infirmière S2, c'est dans la violence qu'est en place cette notion de hiérarchie. Selon elle, "la violence peut aussi être morale, je suis en position dominante par rapport à la sienne." Tout cela nous permet de confirmer que la barrière entre maltraitance et violence n'est pas très élaborée.

D) Communication et prise en charge :

Dans les entretiens, la place de la communication soignant-soigné est importante dans la gestion de la violence, tout comme dans mes lectures. De même, la communication semble être un frein pour la prise en charge des patients atteints de pathologie psychiatrique. En effet, l'infirmière S3 nous explique qu' "il y a des situations qui ne sont pas gérables parce- que la personne n'a pas forcément les capacités mentales et [...] dans ce cas là je pense que ça ne sert pas à grand chose de rentrer dans cette communication là"(S3). La communication avec ces patients est difficile du fait de leur délire, de leur pathologie mais c'est cette communication, comme nous l'avons vu, qui permet d'établir une relation soignant-soigné. L'altération de la communication est donc un frein à la relation soignant soigné et sans cette relation, la confiance entre le patient et le soignant est difficile à mettre en place. Sans cette confiance, la gestion de situations compliquées comme la violence est plus délicate. La difficulté de communication entre un patient et un soignant peut être une cause de violence qui devient alors un moyen de communication pour les patients. En effet, elle peut permettre au patient de faire ressentir sa souffrance et son mal être comme l'explique l'infirmière S3 qui " pense que l'entrée aussi en communication avec la personne, comment on rentre, comment on s'exprime avec le patient ça agit pour beaucoup parce que du coup soit on va amener un apaisement, soit on va amener une agressivité supplémentaire". "C'est arrivé, un patient qui était [...] violent verbalement parce-que c'est un patient qui a mal, qui souffre et qui sait pas comment le retranscrire donc il est violent."

La communication soignant-soignée même si, très importante à la mise en place d'une relation de confiance, n'est pas à l'issue des entretiens menés, le point que je vais développer dans ma problématique.

Il était possible de dégager d'autres approches des entretiens et du cadre théorique, seulement, la restriction en page de ce travail ne me permet pas de toutes les étudier. C'est pour cela que pour ces approches je vais seulement les aborder et non les développer.

- Formation infirmière et prise en charge :

La formation infirmière qui est un point important dans mon cadre théorique, n'apparaît pas un point essentiel sur le terrain. Même si les infirmières avouent ne pas être assez formées en sortant de la formation, comme le dit la soignant S3" c'est des modules quand on n'a pas pratiqué.... on s'en éloigne petit à petit", cela n'est pas le problème principal dans la prise en charge de patient atteint de troubles psychiatriques en service de soins généraux.

- Expérience et prise en charge :

Même si la formation semble bel et bien insuffisante, pour les infirmières S1 et S2, l'expérience remplace ces lacunes. L'expérience professionnelle est une notion absente dans mes lectures, et pourtant cela peut être une notion importante dans la prise en charge et dans la gestion de la violence. Comme le dit la soignante S1 " Quand on est jeune professionnelle on est surement amer car on est activiste et puis avec le temps " et bien il ne veut pas il en veut pas..."". La soignante S2 rajoute à ce sujet qu'" on ne ressent pas la même chose quand on a 25 ans que quand on en a 55 ans comme moi. Je prends beaucoup de recul moi." On remarque donc que l'expérience a aussi un rôle dans la prise en charge.

- Maladie et violence :

La notion de maladie apparait dans mes deux parties. En effet, dans mes entretiens, la maladie est vue comme un élément déclencheur de la violence irrévocable. La soignante S2 nous dit bien que la violence peut venir "du fait tout simplement d'être malade et nous bien portant". A travers cette phrase, la notion d'infirmière comme rappel incessant de la maladie fait de nouveau son apparition.

PROBLEMATIQUE:

Face à ces différentes approches abordées, une en particulier, m'est apparue intéressante à développer. En effet, on a pu remarquer que les représentations sociales jouaient un rôle important dans la prise en charge des patients atteints de pathologies psychiatriques. Ces représentations persistent depuis des années malgré les changements de formation. Elles envahissent le soin sans même que le soignant ne s'en aperçoive et sans qu'il puisse rien y changer, elles sont inconscientes, elles prennent le dessus sur les grandes théories qui veulent qu'être soignant c'est n'avoir aucun à priori sur la personne que l'on soigne, c'est ne pas juger, c'est laisser ses sentiments au pas de la porte. La réalité est quelque peu différente.

Les représentations sociales ont de dangereux le fait qu'elles puissent être un élément déclencheur d'une violence de la part du patient.

C'est pourquoi cette approche me pose différentes questions. Un soignant est-il capable de soigner avec ses représentations sociales ? Les patients atteints de pathologies psychiatriques bénéficient-ils des mêmes égards et des mêmes soins qu'un patient dit "normal" ? Une prise en charge globale est-elle possible chez les patients atteints de pathologies psychiatriques sachant que la relation soignant-soignée est perturbé ? La violence a t-elle un rapport direct avec les représentations sociales ?

Suite à ce questionnement, plusieurs mots clés ressortent : prise en charge globale, représentations sociales de la psychiatrie, violence, sentiments.

Ces interrogations et ces concepts m'amènent à me poser la question suivante:

EN QUOI LES REPRESENTATIONS SOCIALES DES PATIENTS ATTEINTS DE PATHOLOGIES PSYCHIATRIQUES PEUVENT- ELLES ENGENDRER DE LA VIOLENCE DANS UN SOIN ?

En terme d'hypothèse face à cette question centrale de recherche, je dirais que les représentations sociales guident notre façon d'être et donc guident le soin. Elles peuvent alors entrainer un comportement de défense chez le soignant comme une prise en charge non plus de la personne elle même, mais d'un "malade objet de soin". C'est ce statut qui peut être traumatisant pour le patient et susciter à son tour de la violence.

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"Et il n'est rien de plus beau que l'instant qui précède le voyage, l'instant ou l'horizon de demain vient nous rendre visite et nous dire ses promesses"   Milan Kundera