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L'Opus Déi et l'éducation au Chili

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par Mathilde Nicolai
Institut d'études politiques Aix en Provence - Diplôme de sciences politiques 2010
  

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UNIVERSITE PAUL CEZANNE - AIX-MARSEILLE III

INSTITUT D'ETUDES POLITIQUES

MEMOIRE
pour l'obtention du Diplôme

L'OPUS DEI ET L'EDUCATION AU CHILI

Par Mathilde Nicola
·.

Mémoire réalisé sous la direction de
M. Rapha`l Liogier

L'IEP n'entend donner aucune approbation ou improbation aux opinions émises dans ce mémoire. Ces opinions doivent être considérées comme propres à leur auteur.

REMERCIEMENTS

Je dis toute ma gratitude pour leurs conseils et leur soutien, lors de la conception de ce mémoire, à :

Mon directeur de mémoire, M. Rapha`l Liogier, pour ses conseils avisés sur l'angle à adopter pour traiter un thème polémique de manière neutre et impartiale.

Toute la famille Lopez, pour avoir éveillé ma curiosité pour ce sujet pendant mon séjour au Chili, et pour leur aide dans mes recherches.

Marcela Sa
·d, qui m'a été d'une grande aide malgré son emploi du temps chargé, et gr%oce à qui j'ai pu recueillir des informations peu accessibles.

Mes parents, pour leurs encouragements et leur relecture attentive.

Mots-clés : Opus Dei, Religion, croyance, valeurs, catholicisme, éducation, numéraires, surnuméraires, apostolat, catéchisme.

- Collège / école / lycée : Au Chili, il n'y a pas de différence entre les termes « école », « collège » et « lycée ». Les enfants fréquentent en effet le même établissement de 3 à 18 ans. Selon les établissements, les directeurs préfèrent l'un ou l'autre des termes, mais dans ce mémoire, nous avons employé les trois mots sans distinction.

- Josemar'a Escriva de Balaguer : Le nom du fondateur de l'OEuvre s'écrit de manière différente selon les langues employées, et on trouve même parfois des écritures sensiblement distinctes dans une même langue. Dans ce mémoire, nous avons choisi de l'écrire selon la manière la plus répandue dans la langue espagnole, utilisée au Chili.

Résumé : L'Opus Dei, branche officielle de l'Eglise Catholique, est très présent au Chili dans le domaine de l'éducation au sens large. L'organisation est responsable de l'enseignement moral et religieux d'une partie importante de la société, à travers de collèges, résidences étudiantes, clubs de jeunesse, université ou encore formations professionnelles pour adultes. Le but est d'une part, l'apostolat, qui vise à recruter de nouveaux membres, et d'autre part, la diffusion des valeurs de l'OEuvre à toute la société.

SOMMAIRE

Partie I - Entretenir et renouveler l'organisation

Chapitre I - Former les enfants de la grande famille de l'Opus Dei

Section I - Accompagner et éduquer la progéniture de l'organisation durant toute son enfance

Section II - L'Îuvre de l'Université Los Andes

Section III - Les Fondations, garantes du bon fonctionnement de la Ç Mission d'éducation,,

Chapitre II - Eduquer et recruter le personnel de l'organisation

Section I - Ç tailler des joyaux dans de la pierre brute,, Section II - Recruter les numéraires auxiliaires

Section III - Le paternalisme de l'organisation

Partie II - Former la société à la manière de San José Maria

Chapitre I - L'extension des activités de l'Opus Dei à tous les milieux éducatifs, et tous les publics

Section I - S'imposer dans toutes les branches de l'éducation Section II - Un guide à travers tous les %oges de la vie

Section III - Les formations de l'%oge adulte

Chapitre II - Transmettre les valeurs du Fondateur par tous les biais possibles

Section I - Faire partager la Ç bonne voie ,, Section II - Une forme d'éducation totale

Section III - Maintenir la réputation de l'Opus Dei

INTRODUCTION

Au Chili, meme emprisonnes dans la galerie effondree dÕune mine de cuivre pres de Copiapo, dans le Nord du pays, les trente -trois mineurs ont pu lire Ç Le Chemin È, lÕÏuvre majeure de San Jose Maria Escriva de Balaguer, le fondateur de lÕOpus Dei. Il a fallu moins dÕun mois pour que les travailleurs, pieges depuis le 7 août 2010 à presque 700 metres de profondeur, regoivent le recueil de pensees du Pere de la prelature, sans lÕavoir jamais demandé.

Ce fait divers illustre bien, parmi dÕautres, la puissance de lÕOpus Dei dans ce pays du Sud de lÕAmerique Latine, à ecrasante majorité catholique.

En effet, selon une enquete1 dirigee par le Centre dÕEtudes Publiques du Chili en 2001, 72% de Chiliens seraient catholiques, alors quÕil nÕy a que 15% de protestants, le reste de la population se partageant entre certaines croyances traditionnelles, juda
·sme et quelques agnostiques, qui restent extremement minoritaires.

LÕOpus Dei, qui se traduit par Ç Îuvre de Dieu È, est un mouvement religieux minoritaire rattaché à lÕEglise Catholique, fondé en 1928 par le pare Josemar'a Escriva de Balaguer, en Espagne. LÕinstitution appelle les croyants à rencontrer Dieu, non pas en masse mais un par un et individuellement, et à se sanctifier au milieu de la vie ordinaire quÕils manent. Selon lÕÎuvre, chaque individu peut donc devenir saint dans le cadre de ses activités professionnelles, sociales et familiales, et doit lutter contre tout ce qui ne correspond pas aux valeurs de lÕEvangile.

Erigée en prélature personnelle par le Pape Jean-Paul II en 1982, lÕÎuvre est aujourdÕhui présente sur les cinq continents. Ce statut de Ç prélature personnelle » a été aménagé exceptionnellement pour lÕOpus Dei, qui, comme on ne peut limiter géographiquement lÕinstitution, ne rentrait pas dans les critares antérieurs de

« dioceses È. DÕailleurs, les fidèles de la prélature personnelle de lÕÎuvre continuent à appartenir à leurs propres dioceses.

Cette institution a pour but de promouvoir la vie chrétienne et la t%oche évangélisatrice dÕune manière complémentaire à celle des dioceses. Elle est par ailleurs structurée de manière similaire, avec un prélat à sa tate et un gouvernement de vicaires régionaux, nommés par le prélat dans chaque pays où est implanté lÕOpus Dei.

LÕÎuvre compte environ 86 000 fidèles à travers le monde, dont 48 700 en Europe, 29 400 dans les Amériques, 4 700 en Asie et Océanie et 1 600 en Afrique. La

1 LEHMAN, Carla, Ç Chile, un pais cat--lico ? È, Centro de estudios poeblicos, Puntos de referencia, novembre 2001, n249

répartition est à peu prés équilibrée entre hommes et femmes. Parmi les membres,

1 900 sont des prêtres, donc environ 2% de l'institution, le reste se répartissant entre surnuméraires (à peu prés 70% de l'ensemble des fidéles), hommes et femmes mariés pour qui la sanctification des devoirs familiaux est une partie primordiale de leur vie chrétienne, numéraires, qui se consacrent entiérement à l'apostolat, et numéraires auxiliaires, uniquement des femmes, responsables des travaux domestiques dans l'institution. Les membres de ces deux derniéres catégories font vÏu d'obéissance, de pauvreté (ils donnent l'ensemble de leurs revenus à l'institution, ne conservant que le strict nécessaire), et de chasteté (ils vivent sauf exception dans des maisons de l'Opus Dei, pour hommes ou pour femmes). Certains numéraires, pour des raisons bien spécifiques (parent malade, travail exceptionnellement prenant qui nécessite d'habiter sur place, etc.) obtiennent une dérogation pour habiter en dehors de ces centres. Ce sont les agrégés.

On donne de multiples surnoms à l'Îuvre. Entre autres, Ç la Mafia blanche È, Ç l'arme du Pape È ou encore Ç la franc-maconnerie blanche È, malgré les protestations véhémentes de l'institution, qui ne supporte pas d'être vue de maniére négative alors qu'elle s'efforce justement d'acquérir une bonne image internationale. Un pas trés important dans ce sens a été franchi le 17 mai 1992, jour de la béatification par le Pape Jean Paul II de San José maria Escriva de Balaguer, pour la guérison d'une carmélite en 1976, et le 6 octobre 2002, il a été canonisé en grande pompe, devant une foule de plusieurs milliers de personnes.

L'action de l'Opus Dei dans le milieu éducatif est trés importante, dans le monde entier. En effet, l'Îuvre dirige 150 écoles de formation professionnelle, 200 résidences universitaires et 5 universités, sur tous les continents.

De son vivant, des 1946, San Josemar'a s'installe à Rome pour préparer l'établissement de l'Opus Dei dans d'autres pays d`Europe et du Monde. Aprés l'Italie, le Portugal et la Grande Bretagne cette même année, la France et l'Irlande l'année suivante et en 1950 les Etats Unis et le Mexique en 1949, le Chili est le premier pays d'Amérique du Sud à recevoir des missionnaires de l'institution, en 1950. Des son arrivée à Santiago, le prêtre don Adolfo Rodr'guez Vidal, envoyé par le Fondateur, commence immédiatement l'Ïuvre apostolique dans le pays, considéré comme une des terres nouvelles à convertir. Il fut accueilli par le cardinal Josemar'a Caro Rodr'guez, et vécut sous son toit durant le premier mois aprés son arrivée, avant de s'installer dans ce qui allait être la première maison de l'Opus Dei au Chili, et qui était

alors une résidence universitaire. Le prêtre, professeur, commenca trés vite à donner des cours dans différents établissements, réalisant grâce à cette occupation un important travail d'apostolat. Rapidement, les premières vocations virent le jour à Santiago, et des 1953, la prélature chilienne accueillit les premières femmes. Depuis, l'institution n'a cessé de s'étendre au Chili, dans tout le pays, et dans tous les domaines, créant de plus en plus de vocations.

Il est aujourd'hui trés difficile de déterminer le nombre de fidéles de l'Opus Dei au Chili, car la plupart des membres gardent une prudente réserve sur leur appartenance au mouvement, mais on peut affirmer sans aucun doute que leur présence n'a fait qu'augmenter de maniére exponentielle durant ces soixante derniéres années, dépassant de loin les 2500 membres annoncés par l'organisation au début des années 1990. Les maisons de l'institution se sont multipliées elles aussi, et même si on ne peut accéder à une liste complete, du fait du secret qui entoure certaines de ces résidences, on peut du moins affirmer qu'elles sont maintenant réparties dans toute la partie centrale du pays, de La Serena, au Nord, à Puerto Montt, au Sud.

Par ailleurs, beaucoup d'établissements éducatifs ont été crées. Colleges, lycées, écoles techniques, résidences étudiantes, et une université ont été construits par l'Opus Dei, majoritairement à Santiago mais également à Viña del mar, à Concepci--n ou encore à La Serena, et jouissent tous d'un presque incroyable succés.

La réussite de l'Opus Dei dans l'éducation au Chili ne peut s'expliquer sans un examen approfondi du systéme éducatif du pays. Effectivement, ce pays, sorti il y a seulement vingt-deux ans de la Dictature du général Augusto Pinochet, n'a toujours pas de systéme éducatif efficace. La distinction public/privé est trés forte, et rares sont les établissements publics qui obtiennent de bons résultats aux concours nationaux. Les professeurs n'étant pas nommés par l'Etat mais candidatant eux-mêmes de maniére libre dans les structures éducatives de leur choix, les écoles privées rassemblent bien évidemment tous les meilleurs professeurs, les plus motivés, qui auront également affaire aux meilleurs éléves, d'un niveau social relativement élevé. Par ailleurs, les problémes d'infrastructure sont légion, et beaucoup d'établissements sont réellement délabrés, alors que l'Opus Dei s'attache à construire des bâtiments flambant neufs, et fournissent un accés à la toute derniére technologie.

Nous n'étudierons pas ici l'organisation de l'Opus Dei en tant qu'institution au sens global, mais seulement du point de vue de l'éducation, et des valeurs et principes que l'Îuvre cherche à transmettre à la société. Le but n'est pas de critiquer l'institution,

mais d'examiner le rTMle qu'elle joue dans l'éducation au Chili. Le mot éducation est pris au sens large en tant que formation de l'individu. Il englobe la formation scolaire primaire, secondaire et également supérieure, mais aussi la formation continue des adultes, les clubs de jeunesse o u encore les séminaires, et cours organisés pour les entreprises. L'éducation ne peut en effet se restreindre à l'apprentissage de connaissances purement scolaires. Elle englobe également toutes les normes culturelles et les valeurs morales que l'élève, au cours de n'importe laquelle des formations qu'il recoit, intègre de manière explicite ou implicite, et qui forme un corpus culturel indissociable de l'individu.

L'Îuvre agit chez l'individu aussi bien au niveau des connaissances scolaires que de la formation mentale et culturelle de son public. En un petit peu plus de cinquante ans, l'Opus Dei a réussi à être reconnue dans le milieu pour l'excellence des formations fournies, autant au niveau primaire et secondaire que dans l'éducation supérieure. Comment peut-on expliquer cette réussite éclair, qui a hissé les établissements de l'Îuvre, écoles techniques, collèges ou encore universités, en haut des classements nationaux? Et comment se fait-il que tant de gens, pour leur formation personnelle ou pour celle de leurs enfants, adhèrent à cette proposition d'éducation, malgré les traits caractéristiques qu'elle présente et les valeurs qu'elle affirme ? En effet, souvent sans adhérer au mouvement religieux lui-même, les individus décident d'accorder leur confiance à ces établissements confessionnels, comme un investissement pour l'avenir.

On observe que l'institution poursuit deux buts principaux: Le premier est d'entretenir et de renouveler l'organisation elle-même, en formant les enfants de la grande famille de l'Opus Dei selon ses propres valeurs, et en travaillant, par le biais de ses différents établissements éducatifs, à sa mission apostolique, qui vise à recruter de nouveaux membres. La deuxième mission que poursuit l'Îuvre par le biais de ses activités éducatives est la diffusion dans toute la société des valeurs de San Josemar'a Escriva de Balaguer, en investissant des champs très divers de l'éducation et de la formation de l'individu. Ces stratégies permettent à l'organisation de s'adresser à un public très large et de réaliser un constant travail d'apostolat.

Partie I - Entretenir et renouveler l'organisation

Le plus important pour L'Opus Dei, c'est précisément l'institution elle-même. Effectivement, le premier but d'une organisation telle que la prélature personnelle est de se maintenir, voire de grandir, de former ses adhérents, et d'en convaincre d'autres. C'est pourquoi l'Opus Dei dirige en premier lieu ses efforts vers l'éducation, indispensable dans un pays nouvellement conquis, comme le Chili, pour faire conna»tre l'Îuvre de Dieu et engendrer de nouvelles vocations. Non seulement donc, l'institution doit s'occuper de ses fidéles, et leur assurer une éducation de qualité tout au long de leur vie pour leur permettre d'accéder à des postes de pouvoir, mais elle a également le devoir de se préoccuper du renouvellement et de l'augmentation du nombre de ses membres.

Chapitre I - Former les enfants de la grande famille de l'Opus Dei

L'Opus Dei se veut certes une grande famille. Pourtant, quand il s'agit de former ses membres, la meilleure éducation est impartie aux enfants des numéraires et surnuméraires. En aucun cas elle ne s'adresse aux numéraires auxiliaires ou aux agrégées, qui ont droit à un traitement différent, de par leur statut social inférieur. Les colleges SEDUC, l'université Los Andes, financés par les Fondations, sont les outils qu'utilise l'Opus Dei pour hisser ses membres vers les plus hauts échelons de la société.

Section I - Accompagner et eduquer la progeniture de l'organisation durant toute son enfance

Selon le fondateur de l'Opus Dei, San Josemar'a, l'%oge le plus important pour tous est
l'enfance, lui qui écrivait Ç Les enfants n'ont rien à eux; tout est à leurs parentsÉet ton

2

Pére sait toujours trés bien comment administrer son patrimoineÈ. En effet, il est du devoir du Pére, entendu ici comme le pére biologique mais aussi spirituel de l'enfant, de le guider dans la vie et de lui enseigner ce qu'il sait. C'est pourquoi il est important pour l'institution de diriger un certain nombre de ses activités vers les enfants, pour que le plus tTMt possible dans leur vie ils commencent à être formés aux principes de l'Îuvre.

2 ESCRIVA DE BALAGUER, Josemar'a, Le Chemin, Le Laurier, maxime n°867

C'est la raison d'être des clubs de jeunesse et des écoles corporatives de l'Opus Dei, assez nombreux au Chili.

§ I - Les clubs et associations pour enfants et adolescents

Cours de guitare, de tennis, de golf, week-ends à la montagne ou vacances à la mer, l'Opus Dei n'est jamais en mal d'activités pour enfants, dirigées principalement vers ses jeunes. L'intégralité des enfants de surnuméraires chiliens, et ils sont légion, participent à ce genre d'amusements. En effet, selon San José Maria, les enfants doivent vivre des leur naissance entourés des valeurs chrétiennes chéres à l'Opus Dei, et des leurs 3 ans, ils peu vent et doivent être éduqués en partie par les prêtres de l'organisation, par le biais d'activités ludiques.

L'idée, dans le fond, est toujours la même: la personne, à tous les %oges de sa vie, doit être occupée et son esprit concentré sur quelque chose de précis. Les jours et les minutes sont comptés dans l'Opus Dei, et on n'est pas libre de son temps. Selon l'Ïuvre fondatrice de l'institution, Ç Le Chemin È de San Josemar'a Escriva de Balaguer, tout notre temps doit être offert à Dieu. Ce n'est pas étonnant, alors, que ce temps doive être valorisé au maximum, car il a pour but d'attirer la gratitude de Dieu sur les activités humaines de chacun. Pour les jeunes enfants de familles de surnuméraires, le choix le plus rationnel pour leurs parents est donc de les laisser s'enrichir des valeurs chrétiennes au contact de numéraires et surnuméraires de l'Opus Dei qui consacrent leur temps à former de jeunes esprits. Pour cela, étant donné que les enfants en bas %oge ne sont pas encore occupés par l'école, l'Îuvre tente de remplir leurs journées au moyen de ces clubs de jeunesse, répartis stratégiquement dans un éventail trés large d'activités et d'occupations diverses, toutes plus alléchantes les unes que les autres. Au Chili, c'est Juan Cox Huneeus, numéraire de la première heure, qui a été l'artisan de leur création et de leur déploiement. Directeur du premier college Opus Dei pour hommes, il a des son entrée dans l'organisation, accordé beaucoup d'importance au développement de ces clubs de jeunesse.

Au cours des entretiens menés, tous les membres de l'Opus Dei interrogés ont déclaré avoir participé à ce genre d'activités, en général durant une trés longue période de leur enfance et adolescence, parfois par intermittence. Tout est fait pour faciliter la fréquentation de ces clubs par les enfants de surnuméraires: les horaires sont trés larges, du lundi au samedi, tous les jours aprés l'école, et le samedi toute la journée. Les groupes d'éléves dans chaque classe sont trés réduits, et l'apprentissage en

général trés efficace. De plus, les classes sont menées de maniére trés pédagogique, le but étant que les enfants se divertissent tout en évoluant dans un milieu religieux, sans trop le remarquer. Les professeurs, qui sont souvent des prêtres de l'Îuvre ou des numé raires ou surnuméraires spécialisés dans un domaine artistique ou sportif, sont toujours trés proches des enfants, qu'ils connaissent individuellement. Katixa Mellado, ex numéraire originaire de Santiago, de mere surnuméraire et de pére catholique non membre, mais tolérant envers leurs pratiques, déclare ainsi avoir commencé à fréquenter ces clubs trés tTMt, vers ses 4 ans, emmenée par sa mere le week-end, avec ses 7 fréres et sÏurs. Elle assistait à des cours de théâtre, et surtout de guitare, passion qu'elle a conservé depuis, alors que sa sÏur Nadia prenait des cours de danse qui lui ont ensuite permis d'entrer au Théâtre Municipal de Santiago. < Dans les cours, le nombre d'éléves était trés réduit, ce qui permettait de vraiment progresser. Mes cinq amies de la classe de guitare ont toutes continué à pratiquer au moins jusqu'à leurs 18ans. Nous étions six, trés soudées, et notre professeur était toujours la même. È3 Déclare-t-elle. De plus, dans un contexte de généralisation progressive des séjours en vaca nces, les jeunes qui fréquentent ces clubs sont toujours ravis de profiter des occasions de week-ends à la mer ou à la montagne, des séjours < dans le Sud È, (c'est à dire au Sud de Santiago, dans la région comprise entre Talca et Puerto Montt, région trés verte que les Chiliens apprécient tous beaucoup, et qui est trés prisée pour les vacances d'été). <Chaque année, je partais une semaine prés de Pucon, dans le Sud, avec le club de Los Leones. J'adorais ces séjours, oü nous vivions au milieu de la nature, et passions nos journées à faire du sport, à visiter et à prier. Comme je ne partais pas en vacances avec mes parents, c'était un grand moment de dépaysement4 È dit Katixa. En effet, au Chili, même les familles appartenant aux catégories sociales aisées ne partent pas beaucoup en vacances, car les congés payés sont de seulement trois semaines, et les semaines de travail, de 40h, au minimum, ce qui laisse moins de temps au loisir. <Bien évidemment, rajoute Katixa, durant la journée, nous faisions des priéres communes et assistions à des cercles de réflexion, les mêmes qu'à Santiago5. È

Malgré cette ambiance bon enfant, Katixa avoue s'être éloignée de ces clubs vers l'âge de 13-14 ans, durant ce qu'elle appelle sa <période de rébellion contre Dieu È. <Pendant quelques mois, je ne mettais plus les pieds à Los Leones (la rue oü

3 Voir annexe n°1

4 Voir annexe n°1

5 Voir annexe n°1

était situé le club de jeunesse qu'elle fréquentait, dans un quartier favorisé), pour montrer à Dieu que je n'étais pas d'accord avec certaines choses; les mendiants dans la rue, les chiens abandonnés, ca me faisait de la peine et malgré les explications des prêtres, je ne parvenais pas à l'accepter. De plus, j'étais fatiguée de voir les mêmes gens semaine.È 6

et de faire les mêmes choses chaque Mais Katixa finissait toujours par

revenir au club, attirée par ses amies, qui continuaient à le fréquenter, et qui sont vite devenues ses seules connaissances. En effet, les enfants de numéraires sont encouragés à passer le plus de temps possible ensemble, et généralement, les fidéles qui fréquentent la même église, tous les jours pour la messe, se connaissent tous, comme ceux qui assistent aux mêmes cercles de réflexion, ou aux mêmes retraits spirituels. De plus, on déconseille fortement à ces enfants de participer à d'autres fêtes que celles, rares, organisées par un autre membre. Les anniversaires se célébrent donc entre familles de l'Îuvre, et les enfants invités à des anniversaires de camarades de classe n'appartenant pas à l'organisation ont dans certaines familles peu de chances d'y assister, ce qui n'aide certes pas à se créer un réseau de connaissances en dehors de l'organisation. Les enfants de famille Opus Dei sont donc souvent isolés entre eux, et quand, parfois, ils se retirent de l'Îuvre, ils doivent entiérement créer leur nouveau réseau social. Finalement, c'est un grand réseau qui tient lieu de famille, renforcé par les diminutifs et surnoms que les membres se donnent les uns aux autres. Il est en effet trés courant que les jeunes aient un surnom au Chili. Généralement, les diminutifs prévus pour chaque nom sont utilisés: << PanchoÈ pour <<Francisco È, << NataÈ pour << Natalia È, etc. Au Chili, c'est une pratique trés généralisée. Mais au sein de l'Opus Dei, ces diminutifs prennent un sens encore plus important, car l'accent est mis sur le côté affectif des surnoms, sur la proximité qu'ils apportent dans la relation entre les personnes. En effet, si d'ordinaire, l'usage de ces surnoms se cantonne aux relations entre amis, la plupart du temps à peu prés du même %oge, dans l'Îuvre, ce sont les prêtres et d'une maniére générale tous les éducateurs appartenant à l'organisation, qui emploient ces surnoms des le début de leur relation avec l'enfant. Par la suite, plus jamais ils ne sont appelés par leur nom complet, qui sonnerait cérémonieux et distant, alors que l'usage du diminutif para»t toujours affectueux, même en cas de réprimande.

Katixa s'est donc toujours appelée <<Kata È, et raconte que, une fois sortie de l'Opus Dei, à ses 22 ans, elle était surprise et même gênée que ses amis, au début de leur relation, l'appellent par son nom complet. << Ca me semblait bizarre, ce nom-là

6 Voir annexe n°1

n'était plus utilisé que par mes professeurs d'université, et personne dans mon entourage ne m'appelaitjamais comme caÉ È7

Tout le temps qu'elle a passé dans ces clubs de jeunes lui a également donné des habitudes de comportement qui restent plus tard ancrées, comme le veulent les responsables de l'organisation.

Marcela Sa
·d, réalisatrice chilienne du documentaire ÇL'Opus Dei, une croisade silencieuse È, (2007) déclare durant notre entretien ÇOn nous dit que l'enfant est libre de décider et qu'il ne pourra pas être numéraire avant ses 18ans, mais dans la pratique, à ses 14 ans il vit déjà comme un numéraire: il ne va plus aux fêtes et va à la messe tous les jou rs. C'est légal, à leurs 13 ans, de leur laver le cerveau ainsi ? È8. Elle montre dans son documentaire une scene filmée dans un de ces clubs de petites filles, et raconte qu'elle a mis un an à obtenir l'autorisation de filmer cette scene. Toutes ces recherches pour le documentaire lui ont pris cinq ans, car il a été trés difficile pour elle d'accéder à l'intérieur des bâtiments de l'Opus Dei et à nouer tous les contacts nécessaires, car les membres de l'Îuvre étaient, à juste titre, trés prudents. Durant la séquence filmée, hors champs, trois membres du clergé de l'organisation surveillent la scene et font attention à ce que disent les six petites filles, de 8 à 10 ans. Elles racontent qu'elles ont des cours de valeurs humaines, une fois par semaine, qui ne durent qu'une demi-heure pour ne pas ennuyer les enfants, et qui sont faits par un prêtre. Elles affirment prier tous les soirs, et Marcela Sa
·d leur demande pourquoi. Elles répondent prier pour les âmes au Purgatoire, pour que la loi du divorce, à ce moment là en discussion soit refusée par le Parlement, pour que tout le monde se convertisse, ou encore pour qu'il y ait plus de vocations pour être ordonné prêtre de l'Opus Dei.

Katixa Mellado confirme, elle, que la totalité des fillettes avec qui elle jouait dans le club de Los Leones, sont maintenant membres de l'Ïuvre, ou l'ont été à un moment. Il est clair, d'ailleurs, que les jeunes recrues numéraires viennent à 90% de familles surnuméraires, qui confient leurs enfants à ces clubs de maniére toute naturelle, et en toute confiance.

Katixa, elle, est finalement entrée dans l'organisation à 16 ans et demi, comme numéraire. C'est l'âge minimum pour intégrer l'Ïuvre, sachant que pendant un an et demi, les jeunes ne sont pas à proprement parler numéraires, et, en régle générale, ils ne vivent pas encore dans les maisons de l'Opus Dei, mais y arrivent le matin avant 7h, heure de la messe, et en partent le soir aprés le repas.

7 Voir annexe n° 1

8 Voir annexe n° 2

Cet encadrement moral et spirituel ressort de manière générale dans l'attitude des adultes qui s'occupent de ces clubs et associations. Ils se comportent de manière presque paternelle, mais sans cesser de tenir des discours sur les valeurs morales, telles que ne pas nuire à son prochain, ne pas tricher, ne pas tromper, partager ce qu'on a. Petit à petit, les enfants s'habituent à entendre ce type de discours, et les répètent eux-mêmes ensuite. Ces propos se retrouvent chez tous les membres de l'Opus Dei sans aucune exception, qui ont été conditionnés au plus jeune âge, et continuent dans les collèges et écoles de l'organisation.

§ II - Les colleges SEDUC, le potager des vocations

Simultanément avec les clubs, sont nées les premières écoles de l'Opus Dei. Plus précisément, aucune école n'appartient à l'Îuvre, officiellement. Cela dit, sous cette apparence de total désengagement, l'Opus Dei a à sa charge l'éducation morale de milliers de jeunes Chiliens, et bien que les bâtiments n'appartiennent pas à l'organisation sur le papier, dans les faits, elle a tous les attributs du pouvoir.

Les collèges SEDUC sont nés d'une idée du Fondateur, le père Josemar'a Escriva de Balaguer, selon les mythes de l'institution. C'est une des histoires que les membres de l'Îuvre aiment à conter. Ils racontent que, en 1968, le père Josemar'a aurait soufflé à un groupe de surnuméraires chiliens en visite à Rome l'idée d'écoles confessionnelles dans lesquelles l'Opus Dei assurerait la formation morale et religieuse des élèves. Quelques antécédents existaient déjà dans d'autres pays, notamment en Espagne et en Italie, et les écoles créées y avaient recu un accueil plutTMt favorable.

En effet, une demande existait déjà, en partie influencée par l'évolution des mÏurs à l'Ïuvre dans les années 1960 et au début des années 1970, sous la présidence d'Eduardo Frei Montalva, de 1964 à 1970, puis de Salvador Allende, de 1970 à 1973. Notamment, Eduardo Frei a exécuté une grande réforme de l'éducation, la rendant gratuite et obligatoire jusqu'à 14 ans, dès son élection. Par la suite, Salvador Allende poursuivit la réforme, et en 1970, beaucoup d'écoles deviennent mixes, dont certaines écoles confessionnelles, comme le collège de la Congrégation de Santa Cruz, qui ouvre ses portes aux filles. Ces évolutions sont beaucoup trop rapides pour le gout des membres de l'Opus Dei, qui continuent à prTMner la séparation des garcons et des filles à l'école. De plus, c'est une époque de libération culturelle, et sociale, fondamentalement marquée, au niveau international, par le concile Vatican II, qui prTMne un cTMté plus social de la religion. Au chili, cette période marque surtout la présidence

prématurées, et font peur, ce qui mènera au coup d'état du Général Augusto Pinochet le 11 septembre 1973.

Suivant les évolutions de la société, beaucoup d'écoles ont commencé un processus de majeur compromis social durant la fin des années 1960, et en réponse, l'Opus Dei, par le biais d'une association de parents appelée SEDUC, dont nous parlerons plus bas, fonde deux collèges, un pour hommes, et un autre pour femmes, visant clairement comme public les élèves des écoles confessionnelles, aux parents désireux d'apporter une éducation stricte à leurs enfants. Même si l'Opus Dei refuse de s'en laisser attribuer la paternité, ces écoles sont les vitrines les plus importantes de l'Îuvre au Chili. Le collège Los Andes, pour filles, est donc crée en 1969, construit dans la rue Biarritz, et sa réciproque pour hommes, le collège Tabancura, commence à fonctionner en 1970, à Vitacura, un des quartiers les plus aisés. Il attire un public en général venu du collège Saint George, des Pères Francais ou de la congrégation du Verbe Divin.

Effectivement, ces écoles ne portent pas de noms de saints, volonté peut-être, de l'Opus Dei de rendre moi ns évidents ses liens avec les établissements scolaires en question, et, malgré le culte impressionnant voué au Père Josemar'a, aucune ne porte son nom. On a plus facilement donné aux collèges des noms qui rappellent la nature comme << Los Andes È, ou encore des noms autochtones, <<Tabancura È ou << Huélen È.

Ces écoles ne sont pas techniquement parlant des écoles confessionnelles, et les chapelles, qui sont toujours une des plus belles pièces des bâtiments, n'ont pas de croix à l'extérieur, et ne sont pas facilement identifiables comme lieu de culte. Le profane est en général séparé du sacré, auquel on réserve certains lieux, clairement identifiables. Les lieux de culte remplissent ce rTMle. Ce sont des espaces réservés à la présence de Dieu sur Terre. Or, l'Opus Dei ne cherche pas à rendre visible ce qu'il y a de sacré dans ces institutions éducatives, pour ne pas effrayer un public qui pourrait douter de l'omniprésence de la religion dans l'école. Dans ces écoles, l'organisation reconna»t seulement être chargée de la formation morale et religieuse des élèves. Cependant, sous l'expression <<formation moraleÈ on peut trouver une réalité très large. C'est effectivement le cas, puisque les associations de parents d'élèves qui les dirigent sont très largement dominées par des membres de l'Îuvre. Cette association, au départ, était uniquement composée de surnuméraires, qui n'acceptaient pas que leurs enfants recoivent à l'école un enseignement contraire à celui donné à l'Eglise et à

la maison. Ils ont ensuite, il est vrai, été rejoints par des Ç coopérateurs È, c'est à dire, selon le terme employé par l'Opus Dei, des gens qui soutiennent l'organisation mais n'en ont pas demandé l'intégration. Selon la version de la surnuméraire Gabriela Monckeberg, en 1971 se sont donc rassemblés quelques parents considérant qu'il fallait une éducation chrétienne à leurs enfants, et demandèrent à l'Opus Dei d'assurer la formation doctrinale, et toute la partie spirituelle du nouveau collège. Le clergé de l'institution célébrait les messes, mais les parents étaient ma»tres de l'école. En effet, ce sont eux les premiers et irremplaçables éducateurs de leurs enfants et le collège doit collaborer avec familles pour cette tâche 9

les remplir . Ils créèrent ainsi la SEDUC,

société éducative partagée entre plusieurs actionnaires. La SEDUC se charge des études et de la mise en marche de nouveaux collèges, ainsi que de la nomination des membres de chaque Conseil de direction. C'est le président de la SEDUC, avec le conseil d'administration, qui se charge de décider du contenu des programmes et du plan d'études des cinq écoles. Finalement, ces responsabilités sont retombées sur les surnuméraires, comme prévu, puisque les piliers de la SEDUC sont et ont toujours été des personnages de premier plan de l'Îuvre. Mario Cuevas Valdés, par exemple, père de trois filles numéraires et lui même surnuméraire, a été président de la SEDUC pendant vingt ans, jusqu'en 1999, puis remplacé par Jorge Montes Varas, également surnuméraire. Actuellement, des six membres du conseil d'administration, cinq peuvent être clairement identifiés comme numéraires (Eduardo Guilisasti Gana, le Président Directeur Général de la vigne Concha y Toro, une des plus importantes exploitations du Chili), ou surnuméraires (Juan Enrique Zegers Hochschild, directeur du conseil général d'administration de la SONAMI, Société Nationale Minière du Chili, Diego Ibañez Langlois, qui a également été plusieurs années directeur du collège Tabancura à la suite de Juan Cox Huneeus, et enfin Luis Fernando Silva Ibañez, qui est aussi recteur de la faculté de droit de l'université Los Andes, l'université reliée à l'Opus Dei.)

Cependant, certains affirment que la SEDUC n'exerce que très peu d'autorité sur les collèges. Ç Le contact des écoles avec la SEDUC est en fait minime, assure Diego Ibañez Langlois, à cette époque directeur du collège Cordillera. Je n'ai jamais recu la moindre instruction, sauf pour nous mettre d'accord sur les jours de vacances ou les horaires, pour avoir les mêmes que ceux des écoles de filles. »10 Plus tard, une fois membre du Conseil d'administration de la SEDUC, il affirme que ce sont les parents d'élèves actionnaires qui décident de l'orientation générale des cours.

9 Site officiel de la SEDUC www.seduc.cl

10 MONCKEBERG, Maria Olivia, El Imperio del Opus Dei en Chile, Ediciones B 2003, P 556

1 5

16 MONCKEBERG, Maria Olivia, ouvrage précité, p 581

Ç Los mejores colegios de Chile È, La Naci--n, article du 27 février 2006

Deux jours après le ÇnonÈ au referendum convoqué par le General Pinochet le 5 octobre 1988, qui marqua la fin de la Dictature, la SEDUC a subi certaines modifications structurelles : les actionnaires individuels se sont retirés pour céder la place à deux sociétés, les Ç promotrices éducatives È I et II, qui sont des sociétés anonymes fermées, qui brouillent la clarté sur le nom des véritables actionnaires, donnant lieu à un complexe système administratif. Selon Marcela Sa
·d, la co
·ncidence des dates est peut-être due à l'implication forte de certains actionnaires dans le gouvernement de Pinochet, ce qui aurait pu entacher la réputation de la SEDUC une fois ces faits à la fin de Dictature 11

révélés au grand jour la .

Aujourd'hui, les actions sont donc vendues aux parents quand leurs enfants entrent à l'école, et quand il s en sortent, elles sont parfois revendues, mais aussi bien souvent transmises aux enfants qui vont par la suite enseigner dans ces collèges ou y placer leurs futurs enfants. Il arrive aussi que, au lieu de revendre les actions, les parents les donnent à la fondation de parents d'élèves, pour contribuer à son financement.

Il existe maintenant cinq écoles appartenant à la SEDUC à Santiago: Los Andes, Huélen et Los Alerces pour filles, Tabancura et Cordillera pour garcons.

La SEDUC est certes l'association de parents d'élèves la plus importante, mais il existe cela dit d'autres organisations qui ont en charge des écoles dont la responsabilité de la formation doctrinale est endossée par l'Opus Dei. A Viña del Mar, à deux heures de Santiago, une société anonyme finance l'école de filles Albamar et celle de garcons, Montemar, tandis qu'à Concepci--n, la troisième ville du Chili, au Sud, la société Adesa est responsable de l'école Itahue, pour filles, et Pinares, pour garcons. Ces deux sociétés sont détenues par les parents d'élèves actionnaires.

Bien que non écrit noir sur blanc, le but de tous ces établissements est de fournir aux enfants des familles surnuméraires une éducation respectant parfaitement les principes de l'OEuvre. D'autre part, ces collèges doivent permettre à l'organisation de se renouveler en recrutant de bons éléments, catholiques, travailleurs acharnés, appartenant aux classes les plus favorisées de la société. Effectivement, la position géographique de ces écoles est éclairante. Les cinq collèges de la SEDUC sont maintenant tous situés dans les quartiers les plus riches de la capitale: Vitacura, Las Condes, Manquehue, et Lo Barnachea12.

11 Voir annexe n°2

12 Annexe n°3

Il est très intéressant d'étudier de près la trajectoire d'un de ces collèges: Huélen. Cette école pour fil les ouvre ses portes en 1978, sous la direction de Ruby Mac-Pherson, ex professeur au lycée St George, entrée récemment à l'Opus Dei comme surnuméraire. Le but de l'Opus Dei était, à ce moment là, de s'orienter légèrement vers les classes moyennes du pays, qui étaient en train d'appara»tre. L'école a donc été établie à Vickuña Mackenna, dans le centre de Santiago, un quartier à mi-chemin entre les secteurs très favorisés et les secteurs plus pauvres, un quartier fait de petites maisons résidentielles, peu luxueuses. C'est une autre structure éducative de l'Opus Dei, Fontanar, dont nous parlerons plus bas, qui lui cède une partie de ses locaux, pour les cours. Mais Huélen, gr%oce à sa rapide renommée dans le milieu scolaire, et à ses excellents résultats, comme tous les collèges SEDUC, a progressivement vu son public évoluer vers des classes sociales beaucoup plus favorisées, qui faisaient le déplacement depuis les quartiers hauts, car l'unique autre école de filles à ce moment, Los Andes, ne pouvait accueillir tous les élèves qui le désiraient. Les parents d'élèves commencèrent à exiger de meilleures installations pour leurs filles, et plus d'heures de cours que ne pouvait leur céder Fontanar car les locaux étaient constamment occupés, et quatre ans plus tard, l'école fut transférée à Manuel Montt, dans le quartier de Providencia, beaucoup plus aisé. Ce choix était très pertinent à l'époque, car certains parents qui avaient envoyé leurs enfants à Los Andes ou Tabancura, dans les quartiers riches, ont vu leurs revenus diminuer avec la crise, et ont donc dü se rapprocher du centre, redescendant vers des quartiers plus modestes.13 Quelques années ensuite, la SEDUC vendit les locaux de Manuel Montt et se transféra définitivement dans les quartiers riches, sur l'avenue Santa Maria, dans le quartier Manquehue, au pied des Andes.

Pour entrer dans ces collèges très sélectifs, il y a bien plus à faire que remplir un simple dossier. Tous ces établissements ont des places très limitées, par volonté de l'Opus Dei et de la SEDU C qui ne veulent pas de collèges gigantesques et anonymes. Le Tabancura, par exemple, recoit plus de 300 demandes par an, mais n'accueille que 50 nouveaux élèves chaque année, après une sévère sélection. Pour les élèves qui n'ont pas déjà un frère ou une s Ïur dans un établissement SEDUC, les parents doivent fournir deux lettres de recommandation de professeurs, les plus renommés possible,

13 A Santiago, la ville a d'abord était fondée près de la rivière Mapocho, au fond d'une vallée. C'est là que maintenant se répartissent les quartiers les plus pauvres. Tout au long de l'histoire de la capitale, les catégories les plus aisées ont fui le centre pour s'installer toujours plus loin du Mapocho et toujours plus près des Andes, en montant vers les sommets, en quelque sorte. Les quartiers Ç à la modeÈ pour les bourgeois ont donc changé, et se situent maintenant aux pieds des montagnes

des établissements précédemment fréquentés par leurs enfants. En théorie, cette disposition s'applique à tous, mais Damian Bettancourt Avila, fils de parents surnuméraires, affirme que ses parents n'ont jamais eu besoin de lettre de recommandation pour le faire entrer lui, l'a»né des 8 enfants, au lycée Tabancura, en 199214. En effet, en pratique, toutes les familles membres de l'Opus Dei obtiennent d'office une place dans ces écoles.

Pour les autres, la compétition est forte, car ces lycées sont très renommés, et obtiennent systématiquement d'excellents résultats aux examens nationaux. Dans le

15

classement du journal La Naci-- n, en 2006 , trois des collèges SEDUC sont dans le
classement des Chili, Cordillera à 3 ème

dix meilleurs établissements scolaires du la

place, Los Tabancura à 6 ème

Andes à la 4 ème et la .

Bien sür, la sélection pour intégrer ces établissements se fait en partie par l'argent. Les collèges sont tous situés aux pieds des Andes, dans des quartiers qui ne sont pas encore desservis par le métro, et où on se déplace majoritairement en voiture. Venir tous les jours du centre-ville à ces écoles serait très difficile, et demanderait beaucoup de temps. De plus, l'inscription est très chère, comme pour toutes les écoles

ème

privées au Chili. Mais à partir du troisième enfant inscrit, les prix baissent, et 5

le

enfant entre gratuitement, tout comme les suivants. Ce système avantage considérablement les familles de surnuméraires, qui ont systématiquement plus de cinq enfants, et souvent plus de huit, puisqu'ils ont choisi d'arriver à la sainteté en menant une vie de famille parfaite, selon les principes du Père fondateur.

Il existe cependant un système de bourses, confesse Damian Bettancourt durant l'entretien, mais personne n'en parle, car la SEDUC ne veut pas susciter une demande exagérée de bourses. Autrement dit, les familles aux revenus moyens à modestes ne sont pas les bienvenues dans ces collèges.

Effectivement, l'Opus Dei recrute dans ces établissements, véritables potagers ou poussent de nouvelles vocations. Ç Evidemment, les nouvelles vocations de numéraires naissent dans nos écoles. C'est logique, et j'espère qu'il y en aura plus encore dans le futurÈ dit Monica Ruiz-Tagle16. Ces enfants ont étés formés à l'esprit de l'Opus Dei pendant quatorze ans, et passent dans ces écoles plusieurs %oges critiques, et les périodes de la vie durant lesquelles ils sont le plus vulnérables à l'influence de quiconque représente l'autorité, dont les professeurs, le directeur de l'école, etc.

14 annexe n4

D'ailleurs, les nouvelles recrues ne demandent pas seulement leur intégration comme surnuméraires ou numéraires. Certains ressentent une vocation pour devenir membre du clergé de l'Opus Dei également. Il y a eu 16 candidats à la prélature depuis la création des collèges jusqu'à 2003, et de Los Andes sont également sorties des sÏurs carmélites, puisque dans l'Opus Dei, les filles ne peuvent bien sür pas entrer dans les ordres.

Quant aux frères et sÏurs de Damian Bettancourt, deux d'entre eux sont maintenant numéraires (Cecilia, et Fernando), et une autre surnuméraire, Camila. Ils ont tous de Dei durant toute leu r scolarité 17

fréquenté les établissements l'Opus .

Sur un des deux principaux sites internet d'opposition à l'Opus Dei, OpusLibros, on trouve une multitude de témoignages d'ex membres de l'Opus Dei, dont celui de Rodrigo, qui a tenu à garder secret son nom de famille, qui s'intitule ÇInscrire ou non son enfant à un collège Dei 18

de l'Opus È. Il y raconte que ses parents, très catholiques,

mais ne connaissant absolument pas l'Îuvre, l'ont inscrit à ce collège car il semblait la meilleure alternative en terme d'éducation privée, de bonne qualité. Rapidement, Rodrigo s'est converti en un profil idéal pour un futur numéraire. Il était le deuxième de sa classe. Le premier de la classe appartient toujours à l'Opus Dei au jour d'aujourd'hui. Il avait des facilités à se faire des amis, ses parents avaient toujours eu un mariage exemplaire, son père était un entrepreneur à la carrière fulgurante, et tous les membres de sa famille étaient catholiques. Tous les ingrédients étaient donc réunis pour faire na»tre une vocation chez Rodrigo. L'influence qu'avait son directeur de conscience sur lui à cette époque était très grande, et Rodrigo, à seulement 14 ans et demi, assez perméable pour se laisser convaincre qu'il avait été appelé par Dieu à être numéraire. A cet %oge il entra dans l'Ïuvre. Les bonnes relations avec ses parents et son frère se sont détériorées, et son monde ne tournait plus qu'autour des prescriptions de San Josemar'a. Maintenant, une fois sorti de l'organisation il y a neuf ans, il ajoute Ç tous ceux qui sortent de ce profil idéal, c'est à dire, les enfants de parents divorcés, les étudiants médiocres, les malades ou les handicapés, les élèves de religion différente ou d'origine plus humble seront des plus négligés par l'organisation È.

17 Annexe n°4

1 8 Rodrigo, Ç Sobre llevar o no a un niño a un colegio del Opus Dei È, www.opuslibros.org, 13 février 2003.

Ces colleges sont orientés vers un public trés spécifique: celui des possibles futurs membres de l'organisation. Qu'ils soient enfants de surnuméraires ou seulement enfants de bonne famille, l'Opus Dei a comme but premier de se maintenir elle-même et de s'agrandir. Ces établissements éducatifs lui servent avant tout, comme les clubs, à faire na»tre des vocations.

Section II - L'Îuvre de l'Université des Andes

La réussite fulgurante de l'Opus Dei, qui, en quelques année a hissé ses colleges au plus haut des classements nationaux au Chili, a encouragé l'organisation à étendre son influence dans le milieu éducatif, cette fois-ci vers l'université. On peut qualifier l'Université des Andes de chef d'Ïuvre de l'Opus Dei. Cette université a été pensée pour les membres de l'organisation, et prépare leur futur comme entrepreneurs accomplis.

§ I - Des conditions d'étude optimales

L'Université Los Andes ne dépare pas dans son environnement. Construite à San Carlos de Apoquindo, un des quartiers les plus riches de Santiago, aux pieds des Andes, il faut compter au moi ns une heure de transports en commun pour y arriver, en partant du centre ville. En effet, la capitale étant trés compartimentée, il n'y a que d'infimes chances qu'un éléve fréquentant cette université habite dans les quartiers centraux de la ville. La ségrégation sociale joue ici un grand rTMle, et il n'est pas faux de dire qu'un nouveau centre s'est recrée dans les quartiers riches, dans le quartier de Vitacura, au Nord-Ouest de la ville.

L'environnement dans lequel s'est implantée l'université est exceptionnel: les pics enneigés des Andes s'élévent devant les fenêtres, et les bâtiments sont adossés à des collines vertes, loin de la pollution de Santiago, en contrebas. L'infrastructure elle- mê m e est sans pareille dans tout le Chili. L'université ne ressemble à aucune autre du pays, elle est moderne, bien agencée et fonctionnelle.

Construite dans les années 1990, son design, ses briques rouges, ses colonnes terminées en arcades ovales rappellent les anciennes universités européennes. Les bâtiments de l'avenue Francisco Bulnes Correa ont été inaugurés en 1998. Trois imposantes constructions entourées de jardins et de corridors se répartissent les

domaines de la connaissance : un pour les sciences, un pour les humanités et une somptueuse bibliothèque.

On voit que l'Université a été construite pour perdurer de nombreuses années. C'est le centre vital de l'empire de l'Opus Dei au Chili, le lieu de formation des jeunes professionnels et académiciens aux valeurs de San Josemar'a, valeurs qui seront transmises ensuite vers les plus jeunes générations, en cours de formation.

Entre le bâtiment de sciences et celui des humanités, on compte déjà presque 15000m2 de constructions. A cela s'ajoute la bibliothèque, de près de 12 500m2. Les bâtiments de sciences et d'humanités ont chacun leur chapelle, et les bureaux administratifs sont dans la partie des humanités, au deuxième étage. On y trouve les carrières de droit, journalisme psychologie, l'école d'études supérieures de l'entreprise, etc. Dans le bâtiment des sciences sont installées les carrières de médecine, science économique, infirmerie, philosophie, ingénierie civile et industrielle, et l'institut des sciences de la famille.

Ces deux bâtiments ont un immense patio intérieur oü les étudiants se réunissent, conversent ou étudient. L'ensemble est d'une propreté impeccable.

Mais l'édifice le plus spectaculaire est la bibliothèque, la plus moderne de toutes les universités du pays. Elle a été dessinée par les nord américains Shepley, Bulfin, Richardson et Abbot, de Boston, et la construction a été réalisée par Fuenzalida et Rosende Arquitectos Asociados, dont le PDG est le numéraire Osvaldo Fuenzalida.

Tout le bâtiment est construit dans un style architectural moderne, et avec des matériaux de luxe. Elle est dédiée à José Enrique Diez, le numéraire espagnol qui initia le travail d'apostolat au Chili. Ce sont trois étages, reliés par un escalier de marbre blanc, dont la construction a couté huit millions de dollars. Les salles de travail sont imposantes, il y a des salles de lecture et de réunion pour tous, professeurs, élèves, et 525 points de connexion à internet, avec un grand nombre d'ordinateurs. Les tables de travail ont chacune une lampe individuelle, et le troisième étage, réservé aux professeurs, est orné de tapis et de tentures faits sur mesure.

La bibliothèque a été construite au centre du campus, pour que l'étudiant, oü qu'il aille, doive passer à côté, et n'ai pas à faire de détour pour aller à la bibliothèque, tout cela dans le but d'encourager les élèves à y passer le plus de temps possible. Tout est fait pour que les élèves étudient le plus et le mieux possible, dans les meilleures conditions. Autant le campus lui-même que la bibliothèque exceptionnellement bien aménagée, tout invite à étudier.

Les étudiants chiliens tendent d'une maniére générale à ne pas lire assez selon leurs professeurs, et le but est de faire de la bibliothéque un lieu d'étude pour tous les étudiants, y compris ceux qui n'appartiennent pas à l`université Los Andes. Pour emprunter des livres, il faut seulement s'inscrire avec sa carte d'identité, et même nous, qui ne possédions pas de numéro d'identité chilien, nous n'avons eu aucun mal à y emprunter des ouvrages.

Le fonds bibliographique n'est toutefois pas encore trés important, comparé à d'autres universités, mais il est bien plus étendu que celui des universités privées. De plus, quasiment 40% des livres qu'on peut y trouver ne sont dans aucune autre bibliothéque chilienne, car la direction a donné la préférence aux ouvrages étrangers. Par exemple, les sections Ç droit È et Çphilosophie classiqueÈ et ÇantiqueÈ sont extrêmement bien fournies, au contraire de la section de philosophie moderne, comme on le verra plus bas. D'ailleurs, l'Université a ouvert un programme spécial d'étude des philosophes grecs, et a nommé une salle d'aprés le nom de Socrate.

Même le sport n'est pas oublié, considéré comme saint pour le corps par le Fondateur. Un terrain couvert multisports a été installé, oü l'on peut jouer au basketball, au football et au volleyball, en plus d'un terrain réglementaire pour le football, le rugby et le hockey.

Tout cela a été construit grâce à des donations de grandes familles de l'Îuvre, et à quelques crédits hypothécaires qui ne sont toujours pas remboursés. Le fonctionnement de l'université est équilibré depuis environ 15 ans maintenant, dans ses dépenses opérationnelles.

Dans les années 1990 c'est un groupe d'académiciens et d'hommes d'affaire, tous membres de l'Opus Dei, qui fonde officiellement l'Université Los Andes. Parmi eux, on retrouve le numéraire Eduardo Guilisasti Gana, Président Directeur Général de la vigne Concha y Toro , tout comme le chef de l'entreprise Bravo e Izquierdo, entre autres. Ils chargent l'Opus Dei de deux choses : la formation doctrinale des éléves et l'attention religieuse. L'université est concue à l'image de l'Université de Navarre, en Espagne, la première institution de l'éducation supérieure construite par l'Opus Dei en 1952.

Son premier recteur honoraire fut Alvaro del Portillo, le successeur de San Josemar'a Escriva de Balaguer au poste de Prélat de l'organisation, aprés sa mort en 1975. Il a inauguré les bâtiments et s'est vu offrir un cadre d'honneur à l'entrée de l'Université. Maintenant, c'est Msg Xavier Echeverria qui assume ce rTMle, depuis qu'il

assume le rTMle de prélat, depuis 1994. Dans les faits, le recteur est un numéraire, Oscar Cristi Marfil, frére de la députée UDI Angélica Cristi.

Les vice-recteurs sont Raul Bertlesen, la journaliste Maria José Lecarros, tous les deux surnuméra ires, de même que tous les directeurs de section des facultés et des directeurs d'instituts. L'équipe de direction est également exclusivement composée de membres de l'Opus Dei: Patricio Moya Cañas et Eduardo Guillisasti, tous les deux numéraires, tout comme Monica Ruiz-Tagle, directrice d'Albamar, et Waldemar Sommer Tuñon, critique d'art. Les hommes d'affaire Eduardo Fernandez Léon et Matias Izquierdo Menendez sont surnuméraires, comme l'économiste Canio Corbo Lioi, président de l'entreprise de construction Pizarreño.

Raul Bertlesen a été le premier recteur de l'Université, resté en poste jusqu'en 2000, il est maintenant, à 58 ans, vice-recteur et professeur de droit constitutionnel. Surnuméraire, il est arrivé dans l'Opus Dei à la suite de la polémique constitution du Général Pinochet en 1980, toujours en vigueur aujourd'hui. Le plébiscite national a toujours été discuté, et certains membres de l'époque de l'organisation ont été les plus farouches défendeurs de la nouvelle constitution. Parmi eux, la famille Ibañez Langlois, ou encore la famille Monckeberg. Raul Bertlessen se serait rapproché de l'Ïuvre en partie pour cette raison. Aprés la défaite du Dictateur en 1988, il a collaboré avec les avocats de la défense de Pinochet, à partir de son arrestation à Londres, depuis 1998.

Selon Katixa Gallego, il y a également une présence écrasante de membres de l'Opus Dei parmi les professeurs, même si beaucoup n'en parlent pas ouvertement. Elle-même les reconna»t pour les avoir connus quand elle faisait partie de l'organisation, mais elle confesse que sur ses sept professeurs en licence de commerce, cinq sont membres, mais seulement deux l'ont dit aux éléves en cours. Elle rajoute qu'elle ne voit pas pourquoi ils devraient avouer à leurs éléves leur appartenance, alors même que la foi est un sujet privé. Mais elle doit quand même accepter que l'enseignement dispensé puisse parfois être influencé par ces croyances. Cela dit, elle précise que certains professeurs ne sont absolument pas membres, ni mêmes catholiques pratiquants, mais ont choisi d'enseigner à Los Andes car ils sont trés bien payés, et parce que l'infrastructure est exceptionnelle.19

Même le site internet de l'Université a été construit avec soin par des professionnels, et fonctionne à la perfection. Le design est attractif, et les cursus précisément décrits, avec un détail de tous les cours et une présentation de chaque

19 Voir annexe n°1

professeur, ce qui reste plutôt rare au Chili. Sur le site, on trouve en lien direct des liens
vers certains textes saints, la plupart du fondateur de l'Opus Dei, dans la page
consacrée à la chapelle. On y trouve également des nouvelles du Saint Pére, une

20

biographie complete d'Escriva de Balaguer et les horaires de la messe.

Dans la page décrivant la <<mission et vision de l'Université È, il est écrit << L'Université de Los Andes cherche à diffuser dans la société un mode de vie cohérent avec la Vérité chrétienne, qui harmonise la foi et la raison. È Effectivement, l'Université permet à l'Ïuvre un travail direct de sanctification et d'apostolat. Elle est construite <<pour cent ans et plus È, et doit être à la hauteur de l'édifice majestueux réalisé.

§ II - Le regne de l'ordre moral chrétien

L'Université de Los Andes n'est pas le seul établissement de l'éducation supérieure à jouer ce rôle en Amérique Latine. A peu pres à la même période, ont été crées les universités de la Sabana, en Colombie, de la Piura au Pérou, et enfin la Austral en Argentine. D'autres établissements sont liés à l'Opus Dei mais sans en faire partie, comme l'Université de Montevideo, en Uruguay, par exemple.

Sur le campus de San Carlos de Apoquindo, on compte quatre chapelles, rassemblées sous l'égide du prêtre de l'Opus Dei, Juan Ignacio Gonzaléz Errazuriz. Dans chacune d'elles, un prêtre est en charge de célébrer les offices religieux, et est à disponiblité des éléves qui veulent se confesser, ou tout simplement s'entretenir avec un membre de l'église. Les trois autres prêtres sont José Miguel Iba-ez Langlois (le frére de Diego Iba-ez Langlois, membre du Conseil d'administration de la SEDUC), José Antonio Guillam--n, et Lu's L--pez.

Les messes sont célébrées deux fois par jour, et les horaires de confession sont trés larges, aménagés pour qu'en aucun cas un éléve n'ait de difficulté à se confesser. Les confessionnaux sont trés isolés, on ne peut rien entendre de dehors, et des ouvrages qui répertorient les pêchés et les punitions sont à disposition. Pour avoir avorté par exemple, la punition recommandée par le Pére fondateur est l'excommunication.

L'université accueille également de multiples cercles de réflexion, auxquels les membres de l'Ïuvre doivent participer une fois par semaine, numéraires comme surnuméraires. Un cercle est une sorte de cours sur une valeur morale, la charité, la

20 www.uniandes.edu.co

piété filiale, ou l'acharnement au travail, donné en général par un numéraire, mais parfois aussi par un surnuméraire, à un petit groupe (en général entre cinq et dix) de membres du même sexe, une fois par semaine. Les fidéles s'inscrivent à un cercle et le fréquentent durant tout un semest re. Si, pour une raison de force majeure, ils ne peuvent pas y assister une fois, ils le remplacent par un autre.

L'université accueille aussi des retraites spirituelles, autre passage obligé de tous les membres de l'Îuvre, une fois par mois. Ce sont des rassemblements de deux jours, sous la direction de prêtres, de membres féminins ou masculins, durant lesquels chacun doit se retrouver avec lui-même par la priére et la réflexion. Durant ces retraites, les membres vivent dans un centre de l'Opus Dei, et passent beaucoup de temps dans la chapelle, priant, ou assistent à des conférences des membres du clergé, et à des cours de valeurs.

Qu'on soit membre ou pas de l'Opus Dei, à l'Université Los Andes, la religion reste omniprésente. Suivant sa qualité d'université privée, la direction a tout à fait le droit d'imposer à ses éleves des cours de théologie, inévitables. Il y a trois ou quatre

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cours de doctrine catholique chaque semestre, selon les parcours universitaires.Deux d'entre eux traitent de théologie fondamentale, et abordent des themes comme la réalité de la foi, ou pourquoi l'Homme croit en Dieu, un de théologie morale qui traite des sacrements, et le dernier de doctrine sociale de l'église. Ce dernier volet est sensé se rapprocher au plus pres possible de la discipline étudiée par les éleves: ce sera un cours de doctrine sociale sur l'éthique médicale pour les étudiants en médecine, par exemple.

La théologie est en effet une discipline scientifique comme toute autre, selon Mar'a José Lecarros, vice-recteur de l'université, et il est fondamental pour les éleves qu'ils la connaissent.22 Elle rajoute cependant que l'Université respecte toutes les religions. Par exemple, s'il y a des éleves juifs dans un cours, les professeurs se communiquent l'information, et aucun ne programmera un examen le samedi matin. Mais tous les éleves, de quelque religion qu'ils soient, doivent suivre les cours de théologie, qu'ils doivent prendre comme une connaissance en plus.

Donner aux éleves tous les outils pour se rapprocher de Dieu est une recette qui marche. En effet, au cours de leur cursus dans l'université, un nombre inconnu mais probablement trés important d'éléves demandent leur admission à l'organisation comme numéraires. L'apostolat est incroyablement actif dans les couloirs de Los

21 MONCKEBERG, Maria Olivia, ouvrage précité, p 591.

22 MONCKEBERG, Maria Olivia, ouvrage précité, p 594.

Andes. D'autres étudiants optent directement pour une formation de prêtres de l'Opus Dei, et suivent dans ce cas leurs cours au Séminaire Majeur, dans le campus. L'Opus Dei forme ici son personnel ecclésiastique, et recrute de nouveaux numéraires à tour de bras. Selon Consuelo Antonia L--pez, étudiante du master de formation pédagogique des futurs professeurs, sa classe de 22 étudiants est à grande majorité composée de membres de l'Ïuvre. Elle -même a étudié les beaux-arts à l'université Andrés Bello, une trés bonne université privée, et a candidaté à l'université Catholique, la meilleure université du pays, pour y suivre son master, indispensable pour devenir professeur. Refusée, elle s'est alors tournée vers la seule autre bonne université qui propose cette spécialisation: Los Andes. Consuelo L--pez vient d'une famille catholique non pratiquante, et a beaucoup hésité à candidater à l'université Opus Dei. Aprés quelques semaines de cours déjà, elle s'était rendue compte que quasiment tous les éléves étaient catholiques pratiquants, et le plus souvent membres de l'Opus Dei. Ç Il y a au moins quatre filles numéraires dans ma classe. Je l'ai appris à force de les entendre parler entre elles de leurs maisons, et de leurs directeurs de conscience, une personne qu'elles choisissent comme guide moral, avec qui elles s'entretiennent tous les jours, ne serait-ce que dix minutes, et à qui elles disent tout ce qu'elles pensent, et font. »23 Beaucoup d'autres éléves sont des enfants de surnuméraires, qui se connaissent tous entre eux pour s'être rencontrés à travers les messes, les cercles et les retraites spirituelles, voire qui ont fréquenté les mêmes clubs et écoles plus jeunes.

Effectivement, dans tous les cursus, la religion est tellement présente qu'elle définit dans une certaine mesure la maniére d'enseigner les matiéres les plus délicates. Selon Marcela Sa
·d, dans les carriéres de médecine, gynécologie, par exemple, les cours sont coupés, tronconnés selon les valeurs de l'institution. Cela pourrait mener à un probléme trés grave car les éléves qui recoivent ces enseignements sont les professionnels de demain: ils vont intervenir dans la vie publique, prendre des décisions qui pourront influencer la vie de tous. Marcela nous donne l'exemple d'un médecin seul à exercer dans une région trés peu peuplée de la Patagonie. S'il lui vient à l'idée de refuser de donner la pilule du lendemain, ses patients n'ont aucune alternative possible, aucun moyen de s'adresser à un autre professionnel. En effet, dans ces carriéres, l'influence des valeurs morales conservatrices de l'organisation peut avoir beaucoup d'effet. Pendant les cinq ans du cursus de médecine par exemple, s'entendre répéter que l'avortement est un crime, et un pêché puni d'excommunication

23 Voir annexe n°5

pourrait bien fortement influencer le raisonnement du futur professionnel prochainement face à face avec ses patients. 24

En examinant les cours de philosophie que suit Consuelo L--pez, on remarque que certains auteurs sont tout simplement oubliés, par choix. Ne pouvant évidemment pas traiter toute l'Histoire de la philosophie en un semestre, les professeurs doivent sélectionner les auteurs qu'ils aborderont, et font alors volontiers l'impasse sur les auteurs plus polémiques, qui ne paraissent pas en accord avec les valeurs morales de l'OEuvre. Le professeur de Consuelo, surnuméraire, a ainsi passé quatre heures à exposer aux élèves les théories de Saint Thomas d'Aquin, mais ne s'est intéressé qu'à la théorie de l'analyse psychanalytique de Freud, c'est à dire sa démarche en tant que technique d'investigation, sans exposer ses théories sur la sexualité infantile, l'importance des rêves et du subconscient, en conseillant aux élèves qui souhaiteraient développer le sujet d'aller faire des recherches à la bibliothèque. Encore plus surprenant, Nietzsche n'a pas été évoqué durant le cours, alors qu'il est considéré comme un des auteurs les plus importants du 19ème siècle.

Cependant, faire des recherches soi-même à la bibliothèque peut se révéler plus difficile que prévu. En effet, pour certains livres, par exemple « Ainsi parlait Zarathoustra » de Nietzsche, il existe des résumés tout prêts et déjà remodelés, en accès direct sur les étagères de la bibliothèque, alors que le livre original est gardé en réserve. Pour le consulter, il faut faire une demande en remplissant un bon, puis attendre qu'un membre du personnel aille le chercher. De plus, il n'est consultable que sur place. Autrement dit, les élèves sont fortement encouragés à choisir la solution de facilité et à se contenter du résumé, fait par un membre de l'oeuvre, au lieu de s'attaquer à l'oeuvre ardue de l'auteur.

D'autres livres encore ne sont tout simplement pas à la bibliothèque. Il faut dire à la décharge de l'université que, au fil des années, elle a acquis beaucoup d'ouvrages philosophiques qui ne sont absolument pas en accord avec les préceptes de l'Opus Dei, comme la plupart des oeuvres de Freud, et on peut même trouver « LÕantéchrist È de Nietzsche, ou encore « Islam, les questions qui fâchent », de Bruno Etienne. Cela dit, de Jacques Lacan, on ne trouve qu'un seul ouvrage, « les quatre concepts fondamentaux de la psychanalyse È, de même que de Ludwig Feuerbach « Pensées sur la mort et lÕimmortalité », pour prendre un ou deux exemples.

24 Voir annexe n°2

On ne peut cependant pas nier l'effort d'ouverture qu'a fait l'université ces derniéres années, ce qui montre qu'elle a pris en compte les critiques qui lui ont été adressées, dans les ouvrages et documentaires critiques récents.

L'université Los Andes, formidable publicité pour l'Opus Dei, est aussi l'établissement éducatif qui a le plus d'influence sur la société car elle intervient au moment de la formation professionnelle définitive de ses éléves. Elle doit donc permettre la liberté d'expression et de choix, en proposant des enseignements variés et complets sur chaque theme.

Section III - Les Fondations, garantes du bon fonctionnement de la mission d'éducation

Les fondations ont été, depuis le début de l'Ïuvre d'apostolat au Chili, un des outils utilisés par l'institution, pour multiplier ses ressources, et pour aider à développer ses actions dans l'éducation. La prélature ne possede rien, comme elle ne cesse de l'affirmer, et les fondations ne sont à personne, ce sont des initiatives totalement indépendantes de groupes de personnes, qui demandent postérieurement à la création de la fondation, une orientation spirituelle à l'Opus Dei. L'idée est que les membres de l'Opus Dei, une fois formés spirituellement, commencent à développer de maniére spontanée des activités d'apostolat. Du moins, c'est ce que les membres de l'Ïuvre prétendent.

Cela dit, on se rend compte que les fondations restent extrêmement liées à l'Opus Dei. Elles ont toutes été crées par des numéraires ou des surnuméraires, et les membres de ses conseils de direction sont en général exclusivement des membres de l'Ïuvre, même si par exception, on peut y trouver un coopérateur trés proche de l'institution.

§ I Ð Le financement de l'action éducative

La majorité de ces fondations vise à initier et à développer les tâches éducatives dans lesquelles est engagée l'institution. Certaines ont pour but l'assistance aux plus défavorisés, l'aide au travail éducatif dans les quartiers pauvres, par exemple, et

d'autres possédent des terrains, des bâtiments, etc, et servent de réservoirs de fonds aux institutions éducatives.

Elles sont par essence conservatrices. En effet, les fondations au Chili ont des statuts trés rigides, qui les empêchent de changer de maniére substantielle leurs objectifs au cours de leur existence, ce qui les préserve de modifications majeures lors de changements de direction, par exemple. Elles sont donc les garantes de la durée du travail d'apostolat dans le temps.

Comme ce sont toujours des entités à but non lucratif, elles sont en grande partie exemptées d'impôts, et selon la loi de donations culturelles, dite loi Valdés d'incitation à l'art et à la culture25, les dons d'entreprises aux fondations sont exemptés de 50% d'impôts.

Les plus évidentes de ces fondations sont les associations d'amis créées avec chaque institution éducative: il existe ainsi une association d'amis des colleges SEDUC et une association d'amis de l'université Los Andes, par exemple.

L'association d'amis du college Tabancura, par exemple, publie sur le site internet de l'écol e les actions qu'elle a menées pendant l'année. En 2010, elle avait fourni une aide pour le financement de l'infrastructure sportive du college, aidé au financement des travaux bénévoles d'été, des éléves engagés dans des compétitions d'athlétisme, avait acheté du matériel de sport, aidé à l'achat de cadeaux de no`l pour les professeurs, financé et crée l'annuaire téléphonique du college, et aidé à rénover certaines parties de l'école26.

En effet, bien que beaucoup dénoncent les apports financiers et fiscaux de l'Etat à des ensembles pédagogiques confessionnels, dans lesquels l'éducation est manifestement utilisée pour répandre la foi, l'Etat chilien n'a jamais cessé de soutenir économiquement ces institutions éducatives, leur assignant des terrains, et fournissant des subventions pour chaque éléve27. Le coüt mensuel par éléve à l'université Los Andes est presque quatre fois plus élevé que les subventions étatiques. L'association d'amis, crée avec l'université, a maintenant trois branches : l'association d'amis- pe rson nes , dirigée par Rafael Valdés Guilisasti, l'association d'amis-entreprise, dont le président est Ronald Brown Fernandéz, et l'association d`amis-étudiants, avec à sa tête Ignacio Ruiz-Tagle Mena. Par leur biais, les étudiants en médecine peuvent par exemple effectuer leurs stages à l'hôpital paroissial de San Bernardo, et dans des

25 Loi n° 18.985, de 1990, article 8.-modifiée par les Lois n1/4 19.721, de 2001 y n1/4 19.885, de 2003

26 www.tabancura.cl

27 SCHUFFENEGUER, Humberto Lagos, Chile y el mito del estado laico, Icthus el Editor, 2005, p 55.

28

cliniques privées aux noms gardés secrets . En plus de ces associations, qui drainent les dons parfois énormes accordés à l'université, des sa naissance, le conseil de direction a signé deux larges accords de coopération, l'un avec l'Université Catholique de Santiago, et l'autre avec l'Université de Navarre, qui appartient à l'Îuvre, tandis que les fondations font le lien entre elles, grâce à un personnel commun, et entretiennent la collaboration.

Les fondations proprement dites ont donc trés souvent pour objectif l'éducation et la formation culturelle et morale des personnes, sans but lucratif. Elles peuvent créer des établissements éducatifs ou administrer ceux qui existent déjà, créer ou gérer des résidences étudiantes, des centres de formation culturelle, des moyens de communication, des bibliothéques ou encore des laboratoires. La fondation Alameda, par exemple, a démarré avec un capital de 53 millions 500 mille pesos, dont 500 millions investis par l'entrepreneur numéraire Nicolás Hurtado Vickuña. Le reste a été apporté par les autres actionnaires, tous membres de l'Îuvre, dont l'ingénieur Enrique Bone Sato, qui fut le premier directeur du conseil d'administration. Son statut du 7 décembre 1994 stipule que Ç sous l'inspiration chrétienne, la fondation a pour fins de créer, organiser, et soutenir des établissements éducatifs pour les enfants de familles à faibles revenus, par elle-même ou en collaboration avec d'autres personnes naturelles ou juridiques È29. La fondation est propriétaire de la résidence Alameda, et de divers clubs de jeunesse. Si elle s'éteint, tous ses biens seront liquidés et passés à la fondation éducative Los Olmos, crée en 1976, par le premier surnuméraire chilien, Eduardo Infante Rengifo, qui en fut également le premier président. La fondation Los Olmos est elle-même propriétaire de la résidence universitaire Alborada et de la résidence La Cañada, à Concepci--n.

Quant à la fondation d'éducation et de développement social Los Lagos, elle a été créée sur un terrain donné par Alicia Fleishman de Silva, une des femmes qui accueillit le premier prêtre de l'Ïuvre à son arrivée au Chili. Depuis, la fondation, installée dans le quartier Recoleta, de classes moyennes à défavorisées, posséde El Salto, une polyclinique, qui soigne gratuitement les voisins du secteur, et un centre d'appui à la famille, dans les mêmes bâtiments, qui donne des cours aux femmes au foyer, pour les aider à trouver un travail. La direction de la fondation a toujours été entiérement féminine, comme celle de Fontanar, une des plus anciennes fondations de

28 ESCOBAR, Jaime, Ç La puissance de l'Opus Dei È, La situation de l'Eglise au Chili, DIAL Diffusion de l'information sur l'Amérique Latine n°2567,16 juin 2002, p 7

29 MONCKEBERG, Maria Olivia, ouvrage précité, p388.

l'Opus Dei, créée en 1965, quand la ligne d'action de l'Ïuvre au niveau international était de revaloriser le service à la personne et d'améliorer les qualifications du personnel domestique30. Au commencement, la fondation s'appelait L'Académie, et avait ses locaux sur la place Brazil, dans la zone pauvre de la ville. Quand elle se transfére à Vickuña Mackenna 229, elle change de nom et devient Fontanar. C'est une fondation d'éducation technique professionnelle, à but non lucratif, qui vise à donner une formation académique, humaine et spirituelle au personnel domestique. Son actuelle directrice est la numéraire Rosita Errázuriz Ruiz-Tagle. Si une de ces deux fondations venait à être dissoute, tous ses biens seraient également liquidés et passeraient aux mains de la fondation chilienne pour la culture.

La fondation chilienne pour la culture est elle-même une des premières initiatives liées à l'Opus Dei au Chili: créée en 1957, son statut précise qu'elle a pour but de faciliter l'éducation scientifique, culturelle, spirituelle, etc, de toute personne, sans but lucratif. Elle recoit beaucoup de donations, et centralise plusieurs types d'actions: elle posséde et dirige l'école agricoles Las Garzas, dont nous parlerons plus bas, la maison de retraite Antullanca, dans le quartier de La Dehesa, et est propriétaire de plusieurs terrains à Santiago, et même de quelques locaux commerciaux, dont deux laveries, dans le centre de la capitale. Son directeur est un numéraire: Rodrigo Hoyl Moreno.

Ces fondations ne sont qu'un petit exemple, trés en decà de la réalité. Elles sont extrêmement nombreuses, et la plupart du temps dissimulées derrière des sociétés anonymes. Leur action est primordiale dans le soutien économique aux institutions éducatives de l'Opus Dei, et elle explique en partie d'oü viennent les capitaux mis en Ïuvre par tous ces établissements, au financement parfois trés obscur. En effet, l'apport financier de l'Etat ou des collectivités territoriales reste trés mineur, même si certaines municipalités comme celle de Las Condes, un quartier riche de Santiago, est trés active dans son soutien à ces établissements, sürement parce que le maire Francisco de Maza est coopérateur de l'organisation. Le précédent maire, Carlos Larra'n, faisait, lui, partie de l'Opus Dei.

Les financements privés mis en Ïuvre sont donc trés importants, et dans une grande partie, ne sont pas vraiment rendus publics. Tony Adams, entrepreneur partenaire de la chambre industrielle chilienne, confirme que les liens sont extrêmement forts entre l'Opus Dei et la chambre31. Il ajoute même que donner de l'argent à des fondations éducatives provoque chez les salariés une bonne impression. En effet,

30 MONCKEBERG, Maria Olivia, ouvrage précité, p395

31 SAID Marcela, L'Opus Dei, une croisade silencieuse, documentaire, 2003

l'Îuvre recoit de l'argent de toutes sortes d'individus, sans vraiment se demander s'il

32

s'agit d'argent propre, selon Marcela Sa
·d . Ricardo Claro, par exemple, est un entrepreneur, principal actionnaire du groupe Claro, qui posséde plusieurs journaux, une chaine de télévision et plusieurs autres entreprises. Bien connu pour être un fervent défenseur du Général Pinochet, il fut d'ailleurs un des conseillers économiques du gouvernement sous la Dictature, et a eu des liens établis avec la DINA, la police secrete du régime. Cet homme aux actions trés controversées a fait de trés importants dons à l'Opus Dei, qui les a acceptés alors même que Ricardo Claro était accusé dans plusieurs affaires et en cours de procés.

§ II - Des formes d'éducation diverses et novatrices

Toutes ces fondations ont un but éducatif plus ou moins important, qu'elles mettent au premier plan ou non. Pour les fondations qui sont principalement détentrices de fonds et d'établissements, leur rTMle est essentiellement économique et juridique.

Au contraire, certaines fondations sont elles-mêmes des vecteurs de la transmission de l'éducation selon les valeurs de l'euvre, et organisent des activités dans

33

ce but. Le centre d'appui à la famille El Saltopar exemple, dans la commune Recoleta, organise des classes à destination des méres de famille, dans le but de leur donner des instruments pour acquérir un petit revenu supplémentaire à celui de leur époux, en travaillant depuis leur domicile. Une sorte de micro-commerce, qui peut apporter un appui à la famille,

sans délaisser les enfants, ce qui serait inaccepable pour l'Opus Dei. La fondation donne donc des cours de confection de vêtements, de cuisine, de soin aux malades, ou encore de théorie sur les herbes médicinales. Des enseignements qui restent irrémédiablement féminins, et qui coütent en tout 2000 pesos par mois, environ 3 euros; un prix extrémement bas car le but de la fondation n'est absolument pas de s'enrichir gr%oce à cette ativité, mais au contraire d'attirer les gens des catégories pauvres dans le giron de l'Opus Dei, en les aidant à moindre prix. Les éléves peuvent ensuite assister à des conférences ou des débats d'initiation à la foi catholique, qui les aident à comprendre le sens de la vie, du travail, et la valeur du service aux autres.

Les femmes qui le souhaitent peuvent également se former pour la première communion avec des membres du clergé de l'organisation. La pratique de cours

32 Voir annexe n°2

33 MONCKEBERG, Maria Olivia, ouvrage précité, p392

plaisants entre voisines est ainsi mêlée au spirituel, comme dans toutes les activités de l'Opus Dei.

La fondation <<Hacer familia34 È, qui pourrait se traduire comme <<Fonder une famille È, ou <<créer une famille È, va encore plus loin dans ses activités d'éducation. Selon l'Opus Dei, la fondation, comme toutes les autres, ne leur appartient pas, mais ses postulats, son contenu et l'identité des membres de son conseil d'administration reflétent un lien trés étroit. Elle est créée en 1981 sous le nom de <<fondation pour l'éducation et l'orientation familiale Hacer Familia È, et affirme des le commencement des principes moraux trés conservateurs, tels que l'indissolubilité du mariage, la fidélité des époux, le droit à la vie, ou encore l'éducation rigide des enfants. Le siege de la fondation est installé dans une belle et grande maison de Vitacura, à Pamplona 78. Son président est un surnuméraire omniprésent dans toutes les organisations éducatives de l'Îuvre : Juan Enrique, Zegers Hotschild, qui préside aussi la SEDUC.

La fondation organise des cours destinés aux parents, dans plusieurs écoles SEDUC et dans les instituts d'autres fondations. Quatre branches sont proposées, selon l'%oge de l'enfant: << Les premiers pas È, pour les enfants entre 0 et 5 ans, << Premières décisions È, de 5 à 10 ans, <<L'adolescence de nos enfants È, de 10 à 15 ans, et << Avancer sürs È, de 15 à 18 ans.

De plus, des 1994, la fondation crée sa propre revue <<HF È sigle de <<Hacer Familia È, orientée vers les surnuméraires, parents des futurs membres de l'Opus Dei. Un mensuel de plus de 70 pages en couleur, imprimées dans un papier brillant trés coüteux, dirigé par le déjà connu Diego Ibañez Langlois, et vendu dans les magasins des quartiers chics de Santiago, dans le centre commercial Alto Las Condes et dans celui du Parc Arauco. Ce sont effectivement les quartiers ou évolue la quasi majorité des membres de l'organisation, en général trés aisés, et avec des enfants qui fréquentent déjà les écoles SEDUC. Un an plus tard, la fondation commence une campagne d'abonnement, proposant des prix assez élevés. En effet, pour un abonnement d'un an, soit 12 numéros, le prix est de 29 500 pesos, soit environ 43 euros. Environ 14 000 abonnements sont pour l'instant enregistrés, selon Diego Ibañez Langlois, répartis équitablement entre personnes privées et entreprises. Les numéros se divisent de la maniére qui suit: une partie d'actualité, puis les pages <<mariage È, << vie de famille È, << vie scolaire È et << temps libre È.

34 www.hacerfamilia.cl

Le numéro 175, du mois d'octobre 2010, par exemple, publie dans la partie actualité un reportage intitulé << Dominés par la mode ? È qui présente la mode comme dangereuse car elle influencerait trop les femmes et les jeunes filles, les amenant à trop découvrir leur corps et à devenir superficielles. Dans la partie << mariage È, une vertu est mise en avant. Ce mois-ci, c'est la pudeur, alors que dans la partie <<vie de famille È, un reportage intitulé <<Les adolescents face à face avec l'alcool È conjure les parents de renforcer leur sévérité pour éviter une telle confrontation à leurs enfants.

Diverses interviews présentent de plus des personnes des quatre coins du monde, toujours avec une vision trés religieuse ou morale. Dans ce numéro, la francaise Christine Vollmer est interviewée. Membre de l'Opus Dei, elle a crée l'association PROVIVE au Venezuela, qui lutte contre l'avortement et la contraception. Mais la revue a donné naissance à un moyen de communication encore plus important pour la fondation : en 1995, elle crée un site internet sophistiqué, << Al Hacer Familia È, qui reçoit des consultations de tous types, depuis la maniére d'enlever sa sucette à un enfant, jusqu'à la préoccupation des enfants d'un homme de 70 ans devenu veuf qui fréquente une autre femme, en passant par tous les problémes d'adolescence, ou matrimoniaux.

N'importe qui peut se connecter sur le site, et, aprés s'être crée un profil, peut poser une question aux autoproclamés spécialistes de la famille, psychologues, qui leur répondront en quelques heures. Les journalistes de <<Hacer Familia È publient aussi des articles déjà parus dans la revue sur le site internet, comme par exemple celui de Magdalena Pulido, intitulé Ç L'avortement thérapeutique: comment justifier un meurtre ?35 È

La fondation a de plus étrenné en 2002 un logiciel de navigation protégée pour éviter aux enfants l'accés à des informations jugées gênantes sur internet. Gr%oce à ce logiciel, les parents peuvent définir eux-mêmes les pages accessibles à leur enfants.

De plus, Hacer Familia s'est récemment lancée dans l'édition de livres scolaires, avec deux premières séries << L'éducation des vertus È, jusqu'à 10 ans, et Ç L'art d'éduquer È de 10 à 15 ans. Ces manuels sont des guides pour le professeur et contiennent un catalogue d'activités pour l'éléve. La première série est divisée en 8 vertus: ordre, travail, fraternité, obéissance, sincérité, responsabilité, force, générosité, respect, amitié, persévérance, patience, charité et justice. La deuxiéme série contient quatre

35 PULIDO, Magdalena, Ç L'avortement thérapeutique: comment justifier un meurtre ? È, Hacer Familia, 18 décembre 2009, n°166

tomes, qui compilent des textes parus sur le site de la fondation entre 1994 et 2006. Ces livres peuvent être achetés par des familles ou par des institutions éducatives. Par la suite, la fondation a publié plusieurs autres livres de contes religieux, et également des CDs intitulés Ç Jésus de Nazareth È, destinés aux enfants.

La fondation devient ainsi un véritable outil multimédia en totale adéquation avec le 21ème siècle, qui projette une vision éducative d'un autre %oge, à travers des mécanismes divers.

Effectivement, la plus grande manifestation jamais organisée par l'Opus Dei au Chili fut le congrès national convoqué par la fondation Hacer Familia, intitulé ÇLa famille, aujourd'hui, et toujours È36, les 9 et 10 aout 2002, en hommage au centenaire de San Josemar'a. Plus de 2500 personnes (plus de femmes que d'hommes, et d'une moyenne d'%oge entre 30 et 50) se sont rassemblés à Huechuraba, un quartier riche au Nord de la capitale, en présence de l'archevêque de Guayaquil, Juan Ignacion Lattrea, et présidés par le secrétaire général du congrès, Francisco Lav'n Infante (le frère de l'actuel ministre de l'éducation Joaqu'n Lav'n).

Un grand nombre d'entreprises en vue au Chili ont financé le projet: parmi lesquelles Johnson (une chaine de magasins de vêtements et accessoires), Cristal Chile (production de bière), El Mercurio (un des plus grands quotidiens d'information du Chili), la BCI et Santander, deux des plus grandes banques, Paris et Falabella, des centres commerciaux spécialisés dans le vêtement, des assurances, ou encore la mairie de Vitacura.

Dans l'immense et luxueux espace Riesco, avant l'accès au salon de conférence, étaient installés des panneaux exposant la vie du Père fondateur, mais aussi des informations sur les horaires des messes, et des jours de retraite spirituelle. Durant les deux jours, la salle de conférence ne désemplit pas, beaucoup de gens suivaient les exposés debout, gr%oce à deux gigantesques panneaux de retransmission. Beaucoup de moyens furent donc mis en Ïuvre.

Quelques intervenants étrangers venus du monde des organisations internationales de la famille, comme l'espagnol Rafael Pich, surnuméraire père de 16 enfants, créateur de la fondation internationale de la famille (une association francaise) qui fit un exposé intitulé Çles idéaux de l'éducation des enfants È, et Victoria Gillick, une Anglaise de 60 ans, mère de 10 enfants, qui a fait un procès au gouvernement britannique pour avoir fait la promotion du contrôle de la natalité par le biais d'un

36 MONCKEBERG, Maria Olivia, ouvrage précité, p 248

37

circulaire aux médecins sur la contraception. Le procès a fait jurisprudence , et la Chambre des Lords a statué qu'un médecin peut prescrire un moyen de contraception à un mineur avec son consentement, même sans le consentement des parents.

Malgré ce revers, Victoria Gillick a été l'un des succès majeurs du congrès, (malgré le matériel de traduction instantanée car elle exposait en anglais), avec sa conférence Ç Ma bataille pour ma famille È, arguant que Ç le sexe court partout, et a abandonné les liens maritaux. Il s'attaque aux jeunes non mariés, et même aux enfants È, et que Çles parents doivent reconna»tre ce délinquant qu'est le sexe et l'attaquer. È Elle compare le sexe avec la peste bubonique, transmis par les plaies humaines comme des professeurs haineux, contre la chrétienté. Elle demande au public si ces plaies sont arrivées au Chili et exhorte les gens à les découvrir: Ç ne vous y trompez pas, derrière ces figures souriantes aux discours de paternité planifiée, vous découvrirez des rats38È.

Le discours de Victoria Gillick, particulièrement conservateur et moralisant, ne déparait cependant pas de l'ensemble, et l'exposé le plus suivi, celui de José Miguel Ibañez, d'un style plus détendu et complice, abordait dans le fond les mêmes thèmes. Il donne des clés pour que le mariage dure toujours: il recommande d'avoir un projet spirituel de vie commune, surveiller la fidélité, comprendre que le véritable bonheur est de faire plaisir à l'autre, et séduire constamment son conjoint. Il condamne chez les femmes le gaspillage d'argent dans l'achat de fioritures, maquillage, etc, arguant qu'il faut garder son naturel. Les hommes quant à eux, ne doivent pas Ç évoluer dans la vie avec des airs de célibataires, et doivent garder la distance matrimonialeÈ. Quant au frère de José Miguel, Diego Ibañez Langlois, il expose sur Ç l'amour intelligent pour les enfants È, et récolte également un franc succès.

L'accès aux conférences, pendant deux jours, coüte au total 5 000 pesos, soit un peu plus de 6,5 euros, et 20 000 pesos (25 euros) pour le CD qui va avec certains exposés. A la fin, tout le public est béni par un prêtre, et le congrès clôturé par le chÏur des en fants de l'école Nocedal, après l'annonce de Juan Enrique Zegers, le directeur de la fondation, de la création d'une nouvelle entité qui multipliera les actions dans lesquelles elle est déjà engagée. L'association d'amis de Hacer Familia devra apporter tout l'appui nécessaire aux familles de faible niveau social, gr%oce à l'aide de

37 Jurisprudence de la Chambre des Lords Ç Gillick v West Norfolk and Wisbech Area Health Authority», 1985

38 MONCKEBERG, Maria Olivia, ouvrage précité, p 249

psychologues, de conseillers dÕorientation et de professeurs. Les fiches dÕinscription à lÕassociation et les fiches de dons sont distribuées dans le public.

Des fondations homonymes de Hacer Familia ont été, depuis, créées dans plusieurs autres pays, dont lÕEspagne, le Mexique, la Colombie, le Pérou, lÕArgentine et le Venezuela, et ont pour projet de sÕétendre en Europe prochainement.

Le monde des fondations est donc plus complexe quÕil nÕy para»t, car les différentes organisations ne font pas précisément dÕefforts pour exposer toutes les activités, ainsi que leurs revenus et leurs dirigeants au grand jour. Il est cependant troublant de constater que malgré cette grande opacité, beaucoup dÕentre-elles ont une activité assez importante dans lÕéducation, particulièrement dirigée vers les classes sociales défavorisées mais pas seulement. Elles sont les ambassadrices des valeurs de lÕÎuvre les plus proches de la société.

Chapitre II - Eduquer et recruter le personnel de l'organisation

L'Opus Dei, cela dit, ne se contente pas d'éduquer les membres des familles surnuméraires et les futurs numéraires, dans les quartiers riches de Santiago. L'organisation n'a pas pour but d'être vue comme élitiste et sectaire, ne cherchant à recruter ses membres que dans une certaine catégorie de la population. Au contraire, elle a également besoin de la partie plus modeste de la société pour écarter cette critique, et fait tout pour jouir d'une bonne réputation au sein de ces catégories sociales, se chargeant de leur éducation, autant au niveau primaire et secondaire que dans l'éducation supérieure, en mettant à leur disposition des établissements de trés bon niveau.

Section I - Ç Tailler des joyaux dans de la pierre bruteÈ

Dans les quartiers plus défavorisés de la capitale, l'Opus Dei a longtemps été absente, et ce n'est que plus récemment que l'organisation a pris conscience du parti à tirer de ces catégories sociales, elle qui a besoin d'un personnel domestique important et appliqué, mais également de main d'Ïuvre docile dans ses entreprises. Un grand travail a alors été fait, depuis les années 1990, pour remédier à ce manque, et les activités destinées à ces secteurs de la population sont en constante augmentation.

§ I - La vitrine sociale de l'Opus Dei: une education exceptionnelle

Au début de l'année 1992, dans les bureaux de la corporation chilienne de construction se réunit un groupe d'hommes d'affaires et divers professionnels liés à l'Opus Dei, dont le numéraire Juan Cox Huneeus, et les ingénieurs Alberto Ureta Alamos, Mario Ram--n Dominguéz Rojas, Sergio Silva Alcalde ou encore Carlos Arteaga Marchant, tous catholiques, sinon membres connus de l'Opus Dei. Leur objectif était de développer le projet de construction d'une école technique professionnelle dans un quartier d'extrême pauvreté à Santiago. Ils pensérent au début à Puente Alto, un quartier à problèmes

dans le Sud de la ville, ou l'Opus Dei avait déjà développé des activités formatives. Le lieu choisi au commencement s'appelait Nocedal. Mais ils n'arrivérent pas à un accord avec les propriétaires du site à Puente Alto, et optérent pour le quartier La Pintana, un peu à l'Ouest de Puente Alto. A La Pintana, 31% de la population est pauvre, et plus de 10% de la population vit en situation d'indigence, depuis qu'à sa création, le gouvernement métropolitain a transféré là-bas, comme à Puente Alto, une grande partie de la population qui vivait jadis dans des campements

précaires, en leur achetant des terrains de peu de valeur. Aujourd'hui encore, la Pintana manque d'infrastructures et d'équipements, et beaucoup de familles souffrent problémes de drogue d'alcoolisme 39

d'importants et . Il existait déjà plusieurs écoles

dans ce quartier, mais aucune ne remportait véritablement l'adhésion. Toutes les autres écoles sont publiques, et, comme dans le reste du Chili, ont beaucoup souffert de la Dictature. Dans tout le pays, les meilleures écoles sont privées, et chéres. L'éducation publique primaire et secondaire est en général de médiocre qualité, elle manque d'infrastructures, et les professeurs, peu payés, travaillent souvent dans de mauvaises conditions. Evidemment, dans un quartier comme La Pintana, trés peu de gens ont les moyens d'offrir une scolarité privée à leurs enfants. Ceux qui le peuvent les font scolariser dans le quartier

de Peñalolen, le plus proche qui posséde des écoles privées, mais sur 100 enfants, seuls 23, en 1995, accédaient à l'éducation secondaire. A la Pintana, seules 13 écoles publiques fonctionnent, et n'ont en général pas trés bonne réputation. 40

Le projet naissant des membres de l'Opus Dei prit finalement vie en 1995 quand la fondation Nocedal, à peine créée, recoit une généreuse donation au travers d'une fondation espagnole, au moment même oü Nocedal obtient une personnalité juridique. Ce don d'un million de dollars est suffisant pour l'achat d'un terrain de 5 hectares et pour la construction de la première partie de l'école, par les architectes Cristobal Edwards Prado et Alberto Soffia Garc'a, et l'entreprise Nicolás Hurtado Vickuña, tous de l'Opus Dei, alors que le futur directeur, Manuel Dannemann sortait littéralement sur

la place centrale éléves 41

du quartier pour faire conna»tre leur projet et recruter des .

Moins d'un an plus tard, le 4 mars 1996, le lycée Nocedal pour garcons est inauguré. Il est gratuit, car il appartient à la catégorie des établissements particuliers subventionnés: c'est à dire qu'il reçoit un fond de l'Etat qui varie selon le nombre d'éléves, comme tous les établissements de ce type. Les éléves, eux, ne paient rien. Les subventions étatiques couvrent environ le tiers des dépenses pour chaque éléve (300 000 pesos par éléve et par an, soit environ 440 euros), et l'établissement trouve le reste dans les dons de personnes privées, d'entreprises et de certaines fondations.

Les petits déjeuners et déjeuners sont par exemple fournis par l'Assemblée Nationale des Auxiliaires Scolaires et des Bourses, comme dans les autres écoles

39 www.pintana.cl

40 Voir annexe n°6

41 MONCKEBERG, Maria Olivia, ouvrage précité, p 337

subventionnées, mais certaines entreprises aident Nocedal à enrichir le régime proposé. On leur donne ainsi des poulets, des chocolats, ou encore des céréales.

Au milieu de la banlieue El Castillo, la partie la plus pauvre du quartier de La Pintana, se dresse maintenant Nocedal, une construction de 5 000m2 sur un terrain de plus de 5 hectares. L'édifice central du collège Nocedal a trois étages, et deux bâtiments sur le côté, qui sont des salles de classe. Dans la partie centrale, on trouve l'administration, la bibliothèque, les salles de réunion, la chapelle, la cantine et les bureaux des professeurs. L'ensemble est neuf, lumineux, spacieux, et brillant de propreté.

Les bibliothèques ont toujours beaucoup d'importance dans les bâtiments de l'Opus Dei: il n'y a pas seulement des livres, mais aussi de spacieuses salles d'étude et de consultation. Celle de Nocedal a une capacité de 50 élèves assis, et compte 5000 ouvrages. Elle a été réalisée grâce à un don d'August'n Hunneus Cox, entrepreneur viticole qui vit depuis une dizaine d'années hors du Chili. Il a été pendant des années le gérant général du domaine viticole Concha y Toro, avant de s'exiler sous la présidence de Salvador Allende, et a fait ensuite fortune dans le vin en Californie.

L'ameublement est moderne, et le lieu agréable et accueillant.

Le collège compte aussi un terrain de football en pelouse aux dimensions homologuées, plusieurs terrains multisports, une piste de course, un parc de conifères et une serre. Ces espaces naturels ont été beaucoup exploités par Andrés Ruiz-Tagle, directeur adjoint, et professeur de biologie à Nocedal. Après avoir lui-même étudié à l'école Tabancura, il entre à l'Opus Dei à 19 ans, puis devient professeur à l'école Cordillera. A la création de Nocedal, le directeur lui propose ce poste. A peine arrivé, il plante des arbres, des arbustes, et crée de beaux jardins, grâce aux plantes données par les familles du quartier reconnaissantes.

Quelques années après l'ouverture de Nocedal, selon l'histoire que les membres de l'Opus Dei aiment raconter, une mère de famille s'approcha du directeur, et lui demanda quand est-ce qu'ils allaient créer un collège de filles. Quand il lui demanda pourquoi, elle lui répondit tout naturellement par une autre question: Ç A qui allons- nou s marier nos fils alors ? 42È. Depuis 1999, à 500 mètres à côté de Nocedal s'élève l'Almendral, sa réciproque pour filles.

La fondation fut efficace. En 1997, Msg Javier Echeverria, le prélat de l'Opus Dei, réalisa un voyage au Chili et encouragea lui aussi les membres de la fondation

42 www.nocedal.cl

Nocedal à créer un collège pour filles. En septembre de l'année 1998, elle fit acquisition des terrains, grâce au don d'une famille surnuméraire, et en mars 1999 le collège commenca à fonctionner, avec des cours du CP au CM1, et 140 nouvelles élèves. En 2009, la fondation Nocedal a fait acquisition de 40 ordinateurs, pour équiper deux salles informatiques dans l`Almendral

Les élèves, que ce soit à Nocedal ou à l'Almendral, suivent des matières généralesjusqu'à leurs 15 ans, puis, en plus des branches générales, ils ont des cours particuliers à leur section. A Nocedal, les spécialités sont: électronique, électricité et télécommunications. Cela les mène à un niveau de technicien professionnel de niveau intermédiaire. A l'Almendral, les fillettes ont une spécialité technique dans la santé. Elles sont dirigées vers des postes d'infirmières, ou d'aides-soignantes.

A part ces spécialités, la liste des activités est longue dans les deux établissements. Nocedal place tout son orgueil dans l'orchestre infantile, crée en mars 2002. Pour la deuxième fois, cet orchestre, composé de 32 enfants étudiant la musique, et de 42 instruments, a remporté le concours de la fondation Andes, tandis que les filles de l'Almendral ont obtenu la première place dans la ligue scolaire de gymnastique artistique en 2009. Les garcons de Nocedal ont eux, obtenu le prix de l'innovation technologique à Atlanta, aux Etats Unis, au concours mondial de First Lego League. Parmi 18 000 étudiants du monde entier, ils ont su se distinguer avec leur système d'arrosage automatique fonctionnant avec l'énergie solaire, après avoir récolté des

43

dons pour pouvoir payer le voyage aux Etats Unis . Dans les deux écoles, on encourage les enfants à participer à plusieurs ateliers extrascolaires: lecture, tennis de table, volley, folklore, théâtre, modélisme, etc. En résumé, toutes les activités développées dans les clubs de jeunes de l'Opus Dei dans les quartiers riches. «Nous

44

pensons que ces enfants ont une capacité d'apprentissage qu asiment illimitée»dit Emilia Ferrera, éducatrice et membre du conseil de direction de l'Almendral.

En 2009, le collège Almendral comptait 1076 élèves, de 3 à 15 ans. Il cro»t chaque année d'une classe, de 80 élèves chacune, et dès 2002, l'établissement se situait déja au dessus de la moyenne nationale en langues et mathématiques, dans les examens nationaux. Nocedal également a obtenu trés rapidement d'excellents résultats, et une bonne partie des élèves suivent maintenant des cours à l'université. Les demandes pour inscrire les enfants dans ces établissements sont en constante augmentation, à tel point que beaucoup sont refusés chaque année. Mar'a José

43

Ç Colegio Nocedal de La Pintana gana concurso mundial», El Mercurio 20 avril 2009.

44 MONCKEBERG, Maria Olivia, ouvrage précité, p 348

Traboldt, la directrice de l'Almendral, avoue volontiers qu'il y a selon elle, d'autres bons
établissements à la Pintana, avec des professeurs de qualité, mais que les écoles de la

45

fondation Nocedal ont un côté humain, chaleureux, qui a fait leur réputation .

L'Opus Dei ne compte cela dit pas s'arréter en si bon chemin. En mars 2010, l'organisation annoncait une donation de 16 millions de dollars de la fondation éducative Claro Vial, crée par Ricardo Claro avant sa mort, pour la construction de deux nouveaux colleges, un pour filles, l'autre pour garcons, dans une commune pauvre du Chili. L'éducation morale et religieuse sera la responsabilité de l'Opus Dei, dans les futurs colleges, qui pourraient être construits à Concepci--n, Valpara'so, Viña del Mar ou Santiago46.

§ II - Rallier les milieux sociaux défavorisés, un appui dans la société

En quelques années, l'Opus Dei, parti de rien dans ces quartiers, a réussi à s'imposer comme un des acteurs majeurs de la commune de la Pintana, et récolte toutes les louanges. Ces colleges représentent en effet un espoir d'avenir pour ces enfants de familles pauvres voire tres pauvres.

Sélectionnés avec beaucoup de rigueur, les éleves de Nocedal et de l'Almendral doivent refléter une image tres positive de l'Îuvre, qui a fait beaucoup d'efforts aussi bien humains qu'économiques, pour créer de toutes pieces cette vitrine sociale, sensée redorer l'image de l'organisation. En effet, la Dictature a beaucoup écorné la vision des gens à propos de l'Îuvre, puisqu'un grand nombre de ses membres ont activement participé au gouvernement du Général Pinochet, et se sont enrichis avec lui. L'Opus Dei a pour but, avec ces écoles, d'envoyer un signal tout différent: dire

aux catégories défavorisées de la société que l'organisation veut également les aider, et ne s'intéresse pas qu'aux quartiers riches, puisque tout le monde peut devenir saint, selon l'Îuvre.

Cela dit, selon le Fondateur, on na»t dans une condition à laquelle on est destiné, et il ne faut pas chercher à en changer, ce qui n'empêche pas d'accéder à la sainteté depuis cette même position. Dans Ç Le Chemin È, il écrit Ç Hiérarchie : chaque piece à sa place. Que resterait-il d'un tableau de Vel‡squez si chaque touche de couleur s'en

45 Voir annexe n°6

46 El Mercurio Ç US$ 16 millones para construir dos colegios en una comuna pobre», 27 mars 2010.

allait à son gré, si chaque fil de la toile cédait, chaque bout de bois du ch%ossis se détachait des autres ?47 È.

L'Opus Dei, gr%oce à ces écoles, cherche également à former des membres et des sympathisants de l'organisation, dociles car, en sortant de ces écoles, ils leurs doivent tout, et s'assurent un futur gr%oce à cette formation reconnue par les employeurs.

C'est pourquoi le processus de sélection est trés soigneux: environ 500 éléves postulent tous les ans pour une place, dans chacun des deux colleges, et seulement 80 filles et 80 garcons sont acceptés aprés plusieurs étapes. Les enfants doivent être domiciliés à La Pintana, et nécessiter une éducation tous frais payés. Pour s'en assurer, une assistante sociale visite les maisons, car beaucoup de candidatures sont abusives. Selon la directrice de l'Almendral, le college a déjà recu des demandes venant de familles habitant à Las Condes, un des quartiers les plus aisés.

L'assistante sociale décrit les maisons, les besoins de la famille, l'attitude des parents et de l'enfant, etc. Ce sont à terme les plus pauvres qui sont acceptés. En effet, ils sont aussi les plus reconnaissants de l'aide qu'on leur apporte dans leur éducation. La deuxiéme étape consiste en une entrevue avec les parents et l'enfant. La directrice ou la directrice adjointe explique aux parents la mission de l'école, et ils doivent s'engager à suivre de trés prés leur enfant, à signer les cahiers, et le calendrier d'examens envoyé chaque mois pour les préparer à l'avance. Ils doivent également s'assurer de la propreté de leur enfant, qui doit être peigné, et habillé correctement, avec son uniforme. Pour les candidats qui ont plus de 11 ans, un examen est également de rigueur, avant l'entrée: il consiste en un test de mathématiques et de langues.

Pendant l'entretien, on répéte aux parents que ces établissements sont confessionnels, à la charge de l'Opus Dei, et qu'il sera enseigné le catéchisme à leurs enfants. Les colleges respectent cela dit la liberté de chacun. Environ 20% des éléves ne sont pas catholiques. La messe est inscrite sur l'emploi du temps de tous les éléves, mais seuls les éléves en dessous de 13 ans sont obligés d'y assister au moins une fois par semaine. Les plus grands décident. Par contre, tous les éléves ont un cours de catéchisme par semaine, car, selon la directrice de l'Almendral, Ç qui ne

47 ESCRIVA DE BALAGUER, Josemar'a, Le Chemin, obéissance 624

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conna»t pas ne s'intéresse jamaisÈ. Il y a beaucoup d'éléves évangéliques, en particulier, qui ne semblent pas du tout gênés par les cours de religion.

Un prêtre de l'organisation officie à Nocedal et à l'Almendral. Dans son emploi du temps sont aménagées des heures prévues pour que les enfants, les parents et les professeurs puissent s'entretenir avec lui de n'importe quel sujet. Mais aucune obligation n'est donnée aux éléves, et le prêtre est parfois désÏuvré.

Les professeurs sont en général tous catholiques, bien qu'ils soient recrutés par des annonces dans les journaux, car un entretien a pour unique but de vérifier si leurs valeurs correspondent avec celles de l'école, bien que par la suite, ils ne soient pas obligés d'aller à la messe. Cela dit, selon la directrice de l'Almendral, on compte trés peu de membres de l'Opus Dei parmi l'équipe de direction et l'équipe enseignante, seulement 10 ou 11 sur les 80 employés, sans compter le personnel d'entretien. Le professeur Hector Canquil enseigne à Nocedal depuis 1996, et a choisi de rester dans cette école, malgré les nombreux autres postes qu'on lui a proposés, car il se sent en adéquation avec les valeurs transmises par l'école. Il n'est pas membre de l'Îuvre, mais d'un autre mouvement catholique, et est trés pratiquant. Selon lui, les valeurs transmises sont celles qu'on peut attendre de n'importe qui: ordre, sincérité, respect, soin, joie, amitié, fraternité49. Pour lui, dans ces établissements, on s'intéresse vraiment à l'éléve, que chaque professeur conna»t individuellement.

Les deux colleges cultivent par ailleurs un rapport spécial entre les éléves et tout le personnel enseignant et de direction. Les parents, d'ailleurs, peuvent quand ils le veulent, parler directement avec le directeur, ou avec n'importe lequel des professeurs, tous trés disponibles, comme le demande l'administration. Les parents sont en général trés satisfaits car ils sentent leurs enfants guidés, loin de la rue et de la drogue, voire même loin de leurs fréres et sÏurs désÏuvrés.

L'équipe éducative dit vouloir agir sur tout l'être de l'éléve, et pas seulement sur ses connaissances culturelles. Un véritable plan de développement de l'être humain est alors mis en place, et deux psychopédagogues sont à la disposition des éléves, alors qu'il y a des professeurs qui organisent des heures de soutien scolaire dans chaque matiére. En tout, une centaine d'entre eux, dans chaque établissement, sont ainsi suivis de maniére particuliére par des professionnels.

Cet encadrement spécialisé a séduit la grande majorité des parents, qui conna»t souvent assez bien les professeurs des enfants, mais aussi la directrice et la directrice

48 Voir annexe n°6

49 MONCKEBERG, Maria Olivia, ouvrage précité, p 403

adjointe, ce qui est plus rare. Les collèges Nocedal et Almendral semblent etre un petit oasis ordonné et calme au milieu du quartier.

Bien plus que de simples écoles au centre d'un quartier défavorisé, Nocedal et Almendral sont la meilleure publicité de l'Opus Dei, qui tente d'imposer une image philanthrope et charitable, conforme avec les valeurs de la religion chrétienne. Cependant, non contente de donner une bonne éducation à ces enfants, l'OEuvre cherche surtout à diffuser ses règles et valeurs, voire à recruter ses numéraires auxiliaires, indispensables au bon fonctionnement de l'organisation.

Section II - Recruter les numéraires auxiliaires

Fontanar, l'école technique d'hôtellerie et restauration, oeuvre corporative de l'organisation, est l'un des plus anciens établissements éducatifs de l'Opus Dei au Chili. Il répond principalement au besoin de recruter des numéraires auxiliaires pour s'occuper des centres de l'organisation, mais aussi à la nécessité de répandre ses valeurs centrales chez les employées de maison.

§ I - Fontanar: former les numéraires auxiliaires de l'Opus Dei

A Fontanar, les sols brillent, les toilettes sont impeccables, l'air sent le propre. Il n'y a pas un seul papier par terre, ni une voix plus haute que l'autre dans les couloirs. Comme tous les établissements de l'Opus Dei, l'endroit est immaculé et calme.

Fontanar na»t en 1965, pour améliorer les qualifications des employées de maison et revaloriser le travail domestique. C'est un b%otiment discret fait de briques rouges, avec une minuscule entrée donnant sur la rue Vicku-a Mackenna, dont la création correspond à une ligne d'action mondiale de l'Opus Dei, qui met l'accent sur la nécessité de former des employées domestiques pour les maisons de l'institution. Les numéraires Otilia Trenova Balharry, professeur, et Sandra del Campo Mullins, assistante sociale, en sont les fondatrices. La fondation dans son statut proclame son influence dans « l'éducation et la formation professionnelle, scientifique, culturelle et morale de tout type de personne50 ». Le conseil de direction est aujourd'hui fondé exclusivement de femmes piliers de l'OEuvre au Chili, avec à leur tete Rosita Err‡zuriz, directrice depuis 1999, surnuméraire. Les débuts furent difficiles, raconte Rosita

50 www.fontanar.cl

Errázuriz51 : Ç On a l'impression que l'Opus Dei a beaucoup d'argent. C'est vrai qu'il y a des gens dans l'Îuvre qui ont de l'argent, mais ce n'est pas pour ca que nous, nous pouvons utiliser cet argent. Et quand je voyais que tous les mois il me manquait de l'argent pour régler les factures, et je me mettais à prier et prier, essayant de l'obtenir. È

Fontanar a commencé comme un cours de formation pour femmes au foyer, puis en 1978, l'Îuvre créa le Collège, un établissement technique qui donne un diplôme d'hôtellerie. Il fonctionne toujours aujourd'hui mais de moins en moins d'éleves le fréquentent, et il est question de le fermer, car beaucoup d'équivalents existent aujourd'hui dans différents établissements. Par contre, en 1998, Fontanar ouvre le centre de formation technique, qui avait déjà des racines dans les ateliers de coiffure, de couture ou encore de peinture que fréquentaient les employées de maison, et les femmes au foyer de Santiago. Cependant avec les années, beaucoup de municipalités avaient imité cette idée, et Fontanar a préféré par la suite se concentrer exclusivement sur la formation technique. Le centre commence avec trente éleves, qui suivent des cours du soir. Les cours du jour naissent seulement en 1999, quand Rosita Errázuriz est nommée au poste de directrice. Deux carrieres, qui donnent un titre de Ç technicien de niveau supérieur È, sont alors ouvertes : gastronomie, et hôtellerie, deux champs dans lesquels les femmes de l'Opus Dei sont spécialisées. Les deux carrieres durent quatre semestres en cours diurnes, et six semestres en cours du soir, car les éleves n'ont cours que trois soirs par semaine. Pour pouvoir préparer ces diplômes, il faut avoir l'équivalent du baccalauréat, et passer un examen d'admission, et une entrevue personnelle52.

Fontanar est une autre des grandes idées de l'Opus Dei. A partir de 1999, l'école devient un lieu de formation de techniciennes en services gastronomiques, hôteliers et de restaurants, techniciennes en infirmerie, et techniciennes en assistance de direction. Mais la préparation est aussi humaine, éthique, et culturelle, comme dans toutes les institutions éducatives de l'Opus

Dei. Les éleves ont des cours d'anthropologie, de relations humaines, de théologie et d'éthique. De plus, elles ont chacune une tutrice personnelle et recoivent une formation spirituelle et les sacrements qu'elles n'ont pas, explique la directrice. Elle ajoute Ç Monseigneur Escriva désirait qu'il y ait des Ïuvres corporatives de service. Ici on enseigne aux jeunes filles que servir l'autre n'est pas avilissant, cela sert à démontrer son amour au prochain. »53

51 MONCKEBERG, Maria Olivia, ouvrage précité, p398

52 MONCKEBERG, Maria Olivia, ouvrage précité, p412

53 MONCKEBERG, Maria Olivia, ouvrage précité, p414

Fontanar se targue de former des techniciens d'excellence dans le secteur tertiaire, en adéquation avec les besoins du pays, puisque l'école s'adapte aux demandes des entreprises pour former des spécialistes selon leurs attentes. Dedans, tout fonctionne comme une véritable entreprise. Le bâtiment de plus de 2000m2 possède, en plus de la chapelle et de la bibliothèque, obligatoires dans toute institution éducative de l'Îuvre, de gigantesques chambres froides, des cuisines aux meubles en acier inoxydable, équipées avec toute la technologie moderne, un four de dernière génération et tous types d'ustensiles, et un dortoir aménagé comme un hTMtel, oü les élèves apprennent à faire le ménage et à faire les lits.

Les diplTMmées de cette école travaillent maintenant dans des hTMtels ou des restaurants, mais beaucoup d'entre elles demandent aussi leur admission comme numéraires auxiliaires, ces femmes qui dévouent leur vie à servir dans les maisons de l'Opus Dei.

Le parcours vers la vie et la vocation de numéraire auxiliaire commence d'ailleurs souvent encore plus tTMt. Si on examine la promotion diplTMmée de l'équivalent du baccalauréat en 2009 à l'Almendral, on voit que sur 80 fillettes, 12 sont en 2010 à l'université, une travaille à l'école comme assistante, plus de 15 ont trouvé un travail directement, et 12 ont continué leurs études à Fontanar. De celles-ci, trois ont déjà demandé leur intégration comme numéraires, tandis que celles qui ont choisi d'aller à l'université sont toutes à l'Université Los Andes, dans la carrière d'infirmière, grâce à un accord spécial avec l'université. Les stratégies d'apostolat fonctionnent parfaitement dans ces quartiers.

Le fonctionnement de Fontanar est une routine bien installée, et inamovible, comme aime à le répéter la directrice. En gastronomie, chaque élève travaille à un poste et après usage, doit le laisser absolument impeccable. Les moules d'aluminium ont quelques années, mais ils brillent comme s'ils sortaient de l'usine. Une liste identifie tout ce qu'il y a à disposition, et une élève est responsable de tout ce qui entre et sort de la pièce de rangement, chaque jour. Toutes les courses et tout ce qui s'utilise dans les ateliers est suivi par ordinateur et le coüt de fabrication est calculé automatiquement à la minute près, durant les cours. Ce qui n'a pas été utilisé est étiqueté, pesé, et rangé. Rien ne se perd et rien ne se jette.

Toutes ces activités ont évidemment un coüt, important pour le niveau de vie chilien. Le cursus normal coüte 77 000 pesos par mois (environ 100 euros), et celui en cours du soir coüte 58 000 pesos. Il existe un centre de bourse, et beaucoup d'entreprises se sont engagées à aider les élèves les plus pauvres. Elles font des

remises de 5 à 20% sur le coüt complet de la formation, mais seule la bourse que donne l'entreprise de poulets Ariztia à la meilleure éléve couvre 100% du coüt. Chaque éléve en gastronomie représente une somme de 170 000 pesos par mois (250 euros environ), on fournit tout le matériel, les aliments, et même l'uniforme. 54

car

leur

C'est pourquoi des le début de leur cursus, les éléves travaillent beaucoup en stage, pour se préparer le plus rapidement possible à la vie active. Elles doivent effectuer trois stages internes et deux stages externes. La cafeteria du centre a été créée spécialement en forme de restaurant pour que les éléves puissent mettre en Ïuvre la pratique enseignée. Tous les jours à 12h15, huit éléves de classes différentes doivent préparer à grande vitesse un repas du midi qui doit être prêt à 13h30, pour tout le centre. On profite de ce qui n'a pas été utilisé dans les ateliers pendant la matinée, et on se sert d'aliments pré élaborés. De plus, les lundis et vendredis, c'est un repas avec invités qui est élaboré. Au cours de notre journée à Fontanar, nous avons participé à un de ces repas, et avons été extrêmement surpris de la rapidité d'exécution, et du résultat, étonnant, qu'avaient pu obtenir les éléves en si peu de temps. Toutes les semaines, des hommes d'affaire et des hôteliers sont invités, pour pouvoir admirer le travail des éléves de gastronomie, qui font la cuisine, et des éléves d'hôtellerie, qui font le service.

Les étudiantes en hôtellerie ont par ailleurs une laverie, oü elles apprennent à laver et repasser de la meilleure

maniére, et pratiquent aussi dans l'édifice d'à côté, qui est un centre de retraite spirituelle et de week-ends de réflexion organisés par l'Opus Dei, durant lesquels elles travaillent comme dans un hôtel, organisant le service des chambres et de la restauration, pendant que des étudiantes en gastronomie préparent le petit déjeuner, le repas du midi, le thé et le repas du soir. Chacune des étudiantes doit donc travailler dans ce centre un weekend end par semestre, à tour de rôle.

De plus, au milieu de leur cursus, elles font un stage d'un mois, trouvé par Fontanar, dans des hôtels ou restaurants avec qui l'organisation a des accords, et à la fin de leurs études, le stage dure trois mois, en général dans la même structure. Les stages proposés montrent que l'école est déjà trés reconnue dans le milieu éducatif chilien, pour pouvoir proposer à ses éléves des stages dans des hôtels comme le Hyatt Regency, le Holiday Inn, le Kennedy, ou le Radisson, parmi les hôtels les plus

54 MONCKEBERG, Maria Olivia, ouvrage précité, p418

prestigieux de la ville, ou encore dans des restaurants comme l'Opera y Catedral, ou l'Union el Golf, tous les deux trés luxueux55.

Les résultats de tous ces efforts, indubitablement, sont là. Le cursus de gastronomie est un succés incroyable au Chili, et provoque beaucoup d'intérêt. L'hôtellerie a un succés plus relatif car, avec ce diplôme, les étudiantes accédent à des postes seulement techniques, car, ne suivant aucun cours d'anglais, elles ne peuvent être en charge de postes plus importants dans l'administration. Elles ont, selon le personnel enseignant, un tel déficit en anglais en arrivant à Fontanar qu'il serait illusoire de leur faire rattraper le retard en deux ans. Elles peuvent donc être femmes de ménage, serveuses, voire chef d'étage ou de salle, mais pas réceptionniste par exemple.

Les promotions qui sont déjà sorties de Fontanar, depuis 2003, ont toutefois recu un trés bon accueil dans des entreprises aussi prestigieuses que l'hôtel Radisson, ou la cha»ne de restaurants Mariott, et la grande majorité a aujourd'hui un emploi stable, bien que peu qualifié.

Cet accueil trés favorable est en partie dü aux valeurs transmises par l'Opus Dei au travers de Fontanar, puisque l'organisation a établi une véritable anthropologie du service : en effet, avec l'éducation technique, elle donne aux éléves une formation morale qui les rend différentes, selon elle. Les étudiantes sont amenées à se demander pourquoi elles doivent servir, et pourquoi c'est digne de le faire. Elles suivent également un cours de théologie, obligatoire, malgré la diversité de religion des éléves, dont beaucoup de témoins de Jehova et d'évangéliques. Par ailleurs, comme à l'université de Los Andes, chaque éléve à une conseillére académique, qui est un guide durant toutes ses études, et peut aussi la conseiller dans sa vie privée. En effet, certaines d'entre elles ont de gros problémes personnels, alcoolisme, drogues, grossesse, et ne peuvent se consacrer pleinement à leurs études.

Bien sür, le but est que le plus grand nombre possible de numéraires auxiliaire suivent un cursus à Fontanar, et celles qui le font accédent ensuite à des postes de plus haute responsabilité dans les maisons de l'Opus Dei. Dans l'autre sens, beaucoup des éléves qui suivent ces cours demandent ensuite leur admission comme numéraires auxiliaires. D'ailleurs, les familles surnuméraires recoivent avec plaisir des diplômées de Fontanar comme personnel domestique à domicile, ce qui se fait trés fréquemment au Chili. Historiquement, il y a encore une trentaine d'années, l'énorme majorité des

55 www.fontanar.cl

familles chiliennes possédait encore une Ç nana È, cÕest à dire une femme de ménage, cuisinière, nounou des enfants, qui vivait très souvent Ç puertas adentro È, dans la maison, dans une petite piece qui lui était réservée, souvent bien séparde du reste de la maisonnée. AujourdÕhui, même si leur nombre diminue, un très grand nombre de familles assez favorisées possède encore sa « nana », qui est un membre de la famille à part entière, et les familles surnuméraires préfèrent de loin avoir affaire à une personne éduquée selon les valeurs de lÕOpus Dei, sachant que la Ç nana È va etre amenée à passer beaucoup de temps en compagnie des enfants.

La section dÕinfirmerie, qui commence juste à prendre son envol, sert également à lÕÎuvre, bien que lÕavantage quÕelle retire dÕavoir des infirmières formées à son idéologie para»t moins evident. Effectivement, lÕOpus Dei possède déjà une clinique dans la commune défavorisée de San Bernardo, au Sud Est de Santiago, et est en train de développer un projet de construction dÕune autre clinique à San Carlos de Apoquindo, à cTMté de lÕuniversité Los Andes. Pour les deux, il est nécessaire dÕavoir à disposition des infirmières formées selon les valeurs chrétiennes, qui jamais ne seraient en faveur de lÕavortement, même thérapeutique, ni de quelconque moyen de contraception, par exemple.

§ II - Inculquer les valeurs de l'Opus Dei

Il faut bien se rendre compte, des quÕon pense à Fontanar, à Nocedal ou à Almendral, que le type de public qui fréquente ces établissements nÕest absolument pas le même que celui des établissements scolaires des quartiers favorisés, les colleges SEDUC, les clubs, lÕUniversité Los Andes. Ici, les parents des élèves ont en general vécu une existence totalement différente, et les enfants qui fréquentent les établissements de lÕOpus Dei, du haut de leurs huit ans, sont plus cultivés que leurs parents, souvent incapables de lire ou de compter correctement, dÕutiliser un ordinateur, ou de citer les grandes dates de lÕHistoire du Chili.

Il faut en effet prendre en compte que la generalisation de lÕéducation secondaire est récente au Chili, et que seule une petite minorité des jeunes continuent leurs etudes à lÕuniversité, à cause du coat très important de telles etudes. La plupart, comme dans le reste de lÕAmérique Latine, commence à travailler très tTMt, et recommence à étudier plus tard, si leur situation économique le leur permet. Les situations familiales qui incluent des pères en prison, des meres célibataires ou des enfants élevés par les grands-parents sont legion, et les familles bien constituées au sens que lÕentend lÕOpus

Dei sont trés rares. Pourtant, tout le personnel de ces établissements insiste systématiquement sur le respect dü aux parents, qu'on soit professeur, directeur ou enfant. Mais c'est aussi gr%oce à ces situations familiales peu sécurisantes que beaucoup d'éléves se tournent vers l'Îuvre, dans laquelle ils trouvent une organisation et une rigidité qui leur manquait, et qui les fait se sentir plus en sécurité.

Dans ces quartiers difficiles en effet, la fondation Nocedal croit que l'apprentissage du respect, de la responsabilité, de la ponctualité, et du travail bien fait est indispensable, et qu'en ayant acquis ces valeurs, les éléves pourront étudier seuls ce qu'ils désirent.

Les carriéres de Fontanar, d'autre part, donnent une opportunité aux jeunes filles qui ne trouvent pas le cursus de gastronomie qui leur convient dans d'autres écoles, autant à cause du coüt de ces filiéres, que par l'absence de formation humaine qu'elles ont à Fontanar.

En effet, pour les auxiliaires, ces femmes provenant des milieux les plus défavorisés, qui dévouent leur vie au service des autres membres de l'Opus Dei, et s'engagent au célibat, à la pauvreté et à l'obéissance, le service domestique est un accomplissement. Elles se sentent appelées par Dieu à suivre cette voie de don aux autres.

Comme les autres numéraires, elles vivent dans les maisons de l'Îuvre, recoivent un salaire mensuel et contribuent au soutien du travail apostolique avec cet argent.

Elena Muñoz, numéraire auxiliaire de 25 ans, technicienne en gastronomie, raconte qu'elle est venue étudier la première fois durant deux semaines à Portezuelo, un lycée technique de l'Opus Dei à Valdivia, dans le Sud du Chili, venu faire sa promotion dans son école. Séduite, elle a par la suite continué ses études à Fontanar, et un an et demi aprés le début de son cursus, elle demanda l'admission come numéraire auxiliaire, à 19ans. Ç Mes parents sont des gens catholiques et trés respectueux. Parfois ils ont du mal à comprendre le don total qu'implique ce chemin, mais ils savent que je suis heureuse dans mon travail d'auxiliaire. Tout se résume en une phrase: c'est servir par amour pour les gens. Ma récompense est que les personnes que je sers soient heureuses, qu'elles mangent bien, que le ménage soit bien fait. C'est ca qui me rend heureuse56 È.

56 Voir annexe n° 7

A Fontanar, en plus de la responsabilité et de la discipline, on met

l'accent sur des valeurs comme la joie, le respect pour les autres, la générosité, et bien sür la serviabilité.

Un point essentiel des valeurs de l'Opus Dei repose sur la séparation des sexes, le plus longtemps possible dans l'éducation des enfants, et adolescents. En effet, dans les colleges, ceux de la fondation Nocedal comme ceux qui appartiennent à la SEDUC, l'Opus Dei recherche une formation intégrale de la personne, qui implique notamment de permettre aux filles de développer la part de féminité qui leur correspond, selon les membres de l'Îuvre. Un des principaux arguments de la directrice de l'Almendral est que les éléves suivent notamment à partir de 13 ans une classe d' Ç éducation de caractére et d'affectivité È, l'équivalent d'une classe d'éducation sexuelle, avec un intitulé plus pudique pour ne pas choquer. On enseigne aux enfants comment le corps change, comment être une bonne personne, on leur parle des drogues, ou encore des tribus urbaines, qui sont un véritable phénomène au Chili, chez les jeunes de moins de 18 ans. Les prof esseurs ont pour consigne de promouvoir la chasteté, et de décourager l'usage du préservatif. De l'avis de tous les professeurs, ce cours serait plus facile à donner en présence d'un seul sexe. Selon Rosita Errázuriz, ce cours, et de maniére plus large, la transmission des valeurs au sein de l'Almendral, ont porté leurs fruits, puisque le taux de grossesse à l'école est trés bas, d'environ 2%, alors qu'à San Bernardo, dans certaines écoles, il atteint 25% pour des filles du même %oge (jusqu'à 15 ans).

La séparation aiderait par ailleurs les éléves à se concentrer sur leurs études, et permettrait de leur inculquer un véritable projet de vie, le plus rapproché de l'Opus Dei possible, bien entendu. Beaucoup de parents disent d'ailleurs confier leurs filles aux écoles de l'Opus Dei par peur des mauvais traitements, des intimidations qu'elles pourraient subir avec les garcons. La directrice avoue cependant qu'elle a elle-même fréquenté une école mixte, et n'a eu aucun probléme à s'y épanouir. Elle reconna»t également qu'on y apprend mieux à partager avec l'autre sexe. D'ailleurs, les numéraires qui décident de sortir de l'organisation, et il y en a beaucoup, se retrouvent totalement démunis dans leur relation avec le sexe opposé. Katixa Gallego confie, elle, qu'une fois sortie de l'Opus Dei, aprés cinq ans de vie dans un centre exclusivement féminin, et en ayant, avant cela, fréquenté une école de la SEDUC, elle a beaucoup peiné pour établir des relations stables d'amitié ou d'amour avec des hommes, et

aujourd'hui, deux ans après sa sortie, elle est toujours mal à l'aise en présence inconnus 57

d'hommes .

De même, il y a eu beaucoup de cas d'ex numéraires de sexe masculin impliqués dans des affaires de harcèlement sexuel, et de comportements pervers, selon Marcela Sa
·d, qui a pu établir des contacts avec trois d'entre eux au Chili. Effectivement, n'ayant jamais appris à se comporter avec les femmes, ils sont désemparés quand ils doivent agir seuls dans le vrai monde, sans que personne, et

58

surtout pas San Josemar'a, ne le ur dicte ce qu'ils doivent faire .

Les valeurs qu'on trouve dans <<Le Chemin È, telles que l'obéissance <<ton devoir est d'être un instrument 59» le travail <<Une heure d'études, pour un apostolat moderne, c'est une heure de prière60 È ou la joie <<Mine allongéeÉmanières brusquesÉallure ridiculeÉaspect antipathiqueÉ est-ce ainsi que tu encourager les autres à suivre le Christ ?61 È sont sans cesse répétées, souvent dans les paroles de San Josemar'a, à tel point que quand les élèves les restituent, ils le font avec les mêmes exemples que ceux donnés dans << Le chemin È, et sous la même forme.

L'Îuvre a donc établi tout un réseau d'établissements éducatif destinés à une tranche de la population qu'elle ne touchait pas avec ses collèges et ses clubs de jeunesse, implantés dans les quartiers aisés. Le succès qu'elle rencontre dans les quartiers plus populaires montre que ces valeurs répondent à une demande du public.

Section III - Le paternalisme de l'organisation

L'Opus Dei, on ne peut le nier, a une action bénéfique sur la partie défavorisée de la population, animé, peut être, d'un esprit de charité, mais également, d'un comportement paternaliste, venu d'une vision hiérarchique de la société que tous les membres de l'Ïuvre ont intériorisé, de manière consciente ou non. Il serait illusoire de croire que dans l'organisation il n'existe pas de hiérarchie, alors que, du moins au Chili, les différentes catégories sociales se retrouvent dans les différents groupes de l'organisation : prêtres, surnuméraires, et numéraires d'un côté, auxiliaires de l'autre.

57 Voir annexe n°1

58 Voir annexe n° 2

59 ESCRIVA DE BALAGUER, Josemar'a, ouvrage précité, maxime n°484

60 ESCRIVA DE BALAGUER, Josemar'a, ouvrage précité, maxime n°335

61 ESCRIVA DE BALAGUER, Josemar'a, ouvrage précité, maxime n°661

66 Voir annexe n° 10

67 Voir annexe n° 2

68

69 NORMAND, François, article précité

Ç La garde blanche du Vatican È, Le Monde Diplomatique, Septembre 1995

§ I - Les structures de parrainage des enfants

Evidemment, l'Opus Dei part d'un constat logique: l'éducation des enfants à Nocedal et à Almendral coüte cher. L'infrastructure est neuve et trés bien équipée, que ce soit en ordinateurs ou en matériel pour les différents cursus (électronique ou infirmerie), on fournit aux éléves le petit déjeuner et le repas du midi, et les professeurs font beaucoup plus d'heures que dans des écoles publiques, car ils doivent être disponibles pour les enfants et les parents. Or, malgré leur accord total avec la mission de la fondation Nocedal d'éduquer les quartiers pauvres, il faut quand même les payer. C'est pourquoi la fondation a, des le départ, mis en place un programme de parrainage, par le biais de l'association d'amis de Nocedal. Les parrains vivent tous en dehors de la commune de la Pintana, et trés souvent dans les quartiers riches du Nord de la ville, Lo Barnachea, Las Condes ou Vitacura.

Ce ne sont pas toujours des membres de l'Opus Dei, mais beaucoup sont surnuméraires. Les autres sont des coopérateurs, qui ne font pas partie de l'institution mais se joignent aux fidéles dans ce projet éducatif. En général, il sont tous catholiques, et ont pour but, charitable, d'aider à éduquer les plus démunis.

Ainsi sur le site internet de la fondation Nocedal, un lien direct permet de parrainer un enfant, ou de faire un don ponctuel à la fondation. Le parrainage est fait pour installer un lien durable entre un enfant et un parrain. Mais le parrain donne son argent à la fondation, qui le redistribue à toute l'école, pas seulement à l'éléve en question. Tout est mis en commun, et il n'y a pas de favoritisme. Par contre, les enfants connaissent les parrains, du moins en théorie, puisqu'ils les rencontrent aux kermesses, ou aux spectacles de fin d'année organisés par les écoles.

A ces événements, les parrains sont eux-mêmes encouragés à amener des amis, qui seraient susceptibles de parrainer eux aussi, pour leur faire conna»tre les écoles, les professeurs, et surtout les éléves, qui montrent durant ces activités leurs plus belles performances.

Une fois par an est également organisé un événement majeur pour la fondation Nocedal: la sanguchada. C'est une soirée, à laquelle assistent le personnel de direction des écoles, les membres de l'association d'amis, et les coopérateurs, appelée ainsi car le menu gastronomique est uniquement composé de sandwichs, pour optimiser les marges que réalise la fondation pour cette soirée. Les places sont vendues 5 000 pesos (environ 7,5 euros) et elles sont limitées à 120, pour permettre aux gens de se parler et de se conna»tre, puisque le but est que ceux qui ne

connaissent pas encore la fondation et ses actions, amenés par des coopérateurs, se laissent convaincre et entrent dans ce système.

Les sanguchadas sont toujours un succès, car elles entra»nent en général beaucoup de nouveaux dons. A la sanguchada du 23 avril 2010, 120 personnes étaient présentes mais pas un seul élève des écoles de la fondation, et seulement quelques professeurs. Durant la soirée, les organisateurs ont projeté divers films, celui de la kermesse, celui du spectacle de fin d'année, mais aussi un film réalisé pendant la construction de Nocedal, à l'arrivée dans la commune de La Pintana, qui avait alors des apparences de bidonville. Des panneaux de photos montrent l'état des lieux maintenant, les bâtiments neufs et pimpants, les salles informatique, la salle d'électronique, la cantine, avec au milieu de tout ca des portraits d'enfants souriant de toutes leurs dents. Difficile de ne pas être convaincu de l'action de Nocedal.

Le personnel de direction des écoles s'emploie à plein temps à parler aux inconnus, leur vantant les mérites de leur établissement. Indéniablement, la méthode fonctionne.

La fondation utilise également d'autres moyens pour récolter de l'argent pour les écoles. La communication passe par un magazine mensuel homonyme, qui expose les projets réalisés, les résultats obtenus et les projets ou événements futurs, avec force photos et témoignages positifs. Par ce biais également, Nocedal fait de la communication sur les activités qu'elle organise pour récolter des fonds. A la fin de l'année 2010 par exemple, est prévue une course de karting, à Lo Barnachea, un des quartiers les plus riches, à l'opposé de La Pintana sur la carte de Santiago. Cette course, à laquelle participe une majorité de coopérateurs, est payante, et les bénéfices en sont reversés à la fondation.

Même principe pour les courses à pied organisées tous les ans depuis 2007. Elles ont également lieu à Lo Barnachea, et coütent 4 000 pesos. Tous les bénéfices sont encore une fois reversés à Nocedal.

Alors que les parrains sont tous des gens étrangers au quartier, dans les écoles de la fondation, les femmes de ménage sont quasiment toujours des parents d'élève, coopératrices de l'Îuvre. Les enfants doivent tout à l'Opus Dei, et le reconnaissent. Ce sont finalement les riches qui paient une certaine éducation aux pauvres, selon les normes et les valeurs qu'ils pensent les bonnes.

A Fontanar, le but est semblable, bien que le système soit différent. En effet, pas de parrainage ici, mais ce sont souvent les familles surnuméraires elles-mêmes qui paient des cours de spécialisation à leurs employées domestiques. Les mercredis par

exemple, les Çnanas È inscrites recoivent un cours du soir d'une heure. Pendant une demi heure, on leur donne une formation spirituelle, et celles qui veulent recevoir les sacrements peuvent s'y préparer, et le prêtre en charge peut les leur administrer. Dans la deuxiéme moitié du cours, on leur enseigne des points précis du soin domestique: repassage, ménage, voire gestion des provisions. Le jeudi, le cours est spécialisé dans la cuisine. Ces employées, qui bien souvent n'ont fait aucune études, sont en grande majorité très volontaires, et veulent étudier, et apprendre des choses. Seulement, ces cours les cantonnent à ce qu'elles ont fait toute leur vie, en ajoutant des valeurs et des principes moraux proprement catholiques qui ne sont pas obligatoirement les leurs, dans l'unique but de rentrer dans le moule et d'être de parfaites employées pour les membres de l'Opus Dei.

Dans le documentaire de Marcela Sa
·d, une des scenes les plus polémiques est l'interview d'une de ces Çnanas È en présence de la surnuméraire qui l'emploie. La Ç nana È raconte que, ayant commencé à travailler dans cette famille à 18 ans, juste aprés sa sortie de l'école, elle avait envie de continuer à étudier. Mais, comme les enfants de la maison étaient petits, la ma»tresse de maison, Carolina Errázuriz, lui dit que dans quelques temps, elle pourrait reprendre les études, quand elle aurait moins besoin d'aide pour les élever. Il lui a donc fallu attendre, puis, quand Fontanar a mis en place ces cours de spécialisation du mercredi, elle a pu commencer à y assister. ÇEn plus d'apprendre à faire toutes ces bonnes choses, g%oteaux etc, j'ai appris l'amour du travail bien fait, l'amour des autres, et l'amour de Dieu. A faire les choses bien, et avec tendresse, pour les autres62 È.

§ II - Une vision hiérarchisée de la société

Selon les critiques, l'Opus Dei chercherait tout simplement à former des employés de confiance, hommes et femmes qui seront dociles et travailleurs, en respect des principes de San Josemar'a. Cette politique d'éducation déployée dans les quartiers pauvres répondrait aussi à l'inquiétude de la droite qui cherche des moyens pour s'imposer dans ces milieux, et tout simplement l'appétit prosélyte de l'Îuvre 63

à . Il

est bien sür certain que l'Îuvre recrute là ces futures numéraires auxiliaires, mais
également des collaborateurs qui seront techniciens, électriciens, etc, et qui pourront
travailler toute leur vie avec acharnement dans les entreprises qui ont pour PDG des

62 SAID, Marcela, documentaire précité

63 MONCKEBERG, Maria Olivia, ouvrage précité, p 628

membres de l'organisation. Et ces mêmes hommes d'affaires qui donnent leur argent à des institutions éducatives de l'Opus Dei le font d'autant plus que selon eux, les employés travaillent alors dans de meilleures dispositions, car ils savent qu'une partie des revenus va à une Ïuvre de charité.

L'Îuvre développe par ailleurs une certaine vision hiérarchique de la société. Après la sortie de son documentaire, Marcela Sa
·d avait recu des courriels de la part d'un numéraire chilien, Nicolás Ferrari, lui exposant ses oppositions au travail réalisé, qu'il estimait partial et malhonnête. Dans un de ces courriels, répondant à l'accusation de paternalisme de Marcela, il écrit Ç Tu ne crois pas à la sainteté, que nous pourrions peut-être tous obtenir, tous ceux qui sont baptisés, comme l'a établi le Concile Vatican II ? (...) Comment? A travers de l'apostolat que jour après jour nous devons faire dans nos vies. (...)Si tout ca signifie que nous devons adopter une attitude Ç paternaliste È, comme la mère se comporte avec son enfant, ou comme le professeur se comporte

64

avec ses élèves, je le ferai alors avec beaucoup de plaisir, ma chère Marcela . È

Nicolás Ferrari reconna»t donc qu'il existe une hiérarchie dans la société, entre personnes éclairées, touchées par la gr%oce de Dieu, qui savent que l'Opus Dei est la bonne voie pour arriver à la sainteté, et le reste des gens, toujours dans l'obscurité de l'ignorance, de laquelle il faut les tirer par l'apostolat, jour après jour. Ce sont donc des esprits encore fermés à Dieu, qu'il faut avant tout éduquer, pour qu'ils puissent conna»tre ce bonheur. Pour Natalia Izquierdo, numéraire, Ç Depuis que je suis entrée à l'Opus Dei, je suis chaque jour plus heureuse, et j'espère que gr%oce à mon influence, mes amis se rapprocheront de Dieu aussi65. È Tous les numéraires prononcent ce genre de phrases typiques, sorties tout droit de Ç Chemin È. Les numéraires se pensent comme des anges sur Terre. Ils ont été appelés par Dieu à former ce groupe restreint (plus de 70% des membres de l'Opus Dei au Chili sont surnuméraires) qui guide sa vie selon les trois Ç promesses È de pauvreté, d'obéissance et de chasteté. Il n'y a pas de Ç vÏu È dans l'Îuvre. Le mot est différent, mais le concept est le même.

Cependant, selon le Fondateur, personne ne doit prétendre à une évolution de sa condition. Chacun est né à sa place, selon le bon vouloir de Dieu, et chacun peut accéder à la sainteté depuis la place qui lui est attribuée, gr%oce au travail bien fait, qu'on offre à Dieu. Il n'est pas nécessaire, donc, de chercher à élever sa position.

Pourtant, force est de constater que, mis à part quelques contre-exemples nécessaires pour la réputation de l'institution, aucun numéraire ne vient d'un milieu

64 Voir annexe n° 8

65 Voir annexe n° 9

défavorisé, ni de quartiers particulièrement pauvres de Santiago, par exemple. Au contraire, le profil type du futur numéraire est un enfant ou adolescent de bonne famille, intelligent et bien éduqué, chrétien, avec si possible des parents possédant assez d'argent pour aider l'organisation par des dons divers.

Katixa Gallegos habite avec sa famille à deux pas du centre commercial Las Condes, dans un quartier très riche. La famille de Coni Reyes vient, elle, de Concepci--n, et son père est directeur d'une petite entreprise. Coni est venue à Santiago pour continuer ses études dans une des plus prestigieuses universités,

66

l'Université catholique de Santiago .

Des profils parfaits pour l'Opus Dei, qui recrute beaucoup chez les étudiants, de préférence ceux qui ont les meilleurs résultats, et qui, par leur acharnement au travail, peuvent servir l'organisation une fois dans la vie active.

Selon Marcela Sa
·d toutefois, le profil type des membres numéraires de l'Opus Dei n'englobe pas les personnes les plus intelligentes, mais les plus travailleuses, celles qui s'efforcent beaucoup pour atteindre le même but qu'une personne qui a des facilités. De plus, ce sont des gens plus fragiles, car les plus forts sont capables de résister au bombardement affectif qui précède et suit de près l'entrée d'un nouveau membre67.

L'Opus Dei est donc, pour ses membres, une organisation d'élus, qui doivent sauver le monde depuis le haut de l'échelle, car même s'ils ne l'avouent pas, tous ces membres se sentent bel et bien supérieurs au reste des gens, touchés par la Vérité. Comme le décrit la revue secrète de l'Opus Dei, Cr--nica, l'institution est Ç le reste saint, immaculé, de la véritable Eglise, fondée pour sauver papauté 68

l'Eglise et la È.

L'Opus Dei, dit le Père Ringliet, Ç ne vise que l'élite de la société, ce qui est inacceptable pour notre université. (É) La quête de la perfection a quelque chose de très orgueilleux et malsain69 È. En effet, l'Opus Dei, s'articule à travers une structure hiérarchique ou l'autorité du leader symbolise la figure paternelle et oü tous les membres sont subordonnés, regroupés entre frères spirituels. Comme la figure du Fondateur n'est plus visible, ce sont un certain nombre de dirigeants, à différentes

échelles, qui représentent cette figure paternelle, qui donne un sentiment de sécurité aux membres70

.

L'organisation emploie donc une forme de sélection mystérieuse, qui sépare même ses membres en différents groupes. La revue Cr--nica, et sa version féminine, par exemple, sont accessibles seulement aux numéraires. Même les surnuméraires ne peuvent pas les consulter.

Toute une hiérarchie règne en fait sur l'Opus Dei, aussi bien au Chili que dans les autres pays, et l'organisation des établissements éducatifs de l'OEuvre ne fait que la refléter. Sous des dehors de générosité, Msg Escriva de Balaguer entretient des divisions déjà existantes dans la société, qui se retrouvent dans l'organisation, sous une forme encore plus figée, puisque les changements de statut, entre numéraires auxiliaires et numéraires ou surnuméraires sont interdits.

Tout le travail que fait l'Opus Dei dans le champ de l'éducation est en grande partie lié au besoin intrinsèque à toute organisation de se conserver elle-même, et de se reproduire. Le but est donc de convaincre de nouveaux membres et de former tous les individus qui composent l'OEuvre, dans un constant souci d'apostolat, pour maintenir l'institution et lui permettre de grandir. Pourtant, l'institution travaille, depuis son origine, à répandre ses valeurs et ses préceptes dans la société entière. Dans les établissements éducatifs de l'OEuvre, le public est loin d'être exclusivement composé de membres ou de futurs membres, mais le message que véhicule l'institution ne leur est pas réservé. L'Opus Dei tente au contraire de l'étendre à la plus large part possible de la société, par tous les biais possibles.

Partie II - Former la société à la manière de San José Maria

L'Opus Dei, contrairement à d'autres groupes religieux minoritaires, n'a pas pour but de convertir le plus de personnes possible. Comme nous l'avons vu, c'est un mouvement élitiste, dans lequel les fidèles sont choisis, plus qu'ils ne choisissent

70 LUIS MOYANO, Antonio, ouvrage précité, p 49.

dÕintégrer lÕinstitution. Cependant, lÕÎuvre a toujours eu, depuis sa creation, une doctrine apostolique, au sens large du terme, de propagation dÕun système de valeurs, qui est sa vraie raison d'être. Autrement dit, peu de personnes deviendront finalement membres, mais toute la société doit etre touchée par les valeurs de lÕOpus Dei, et ce, par le biais de lÕéducation. CÕest pourquoi tous les efforts portent vers lÕextension des activités éducatives réalisées et la diffusion des valeurs dans tous les milieux de la société, et dans tout le pays.

Chapitre I - L'extension des activités de l'Opus Dei à tous les milieux éducatifs, et tous les publics

LÕOpus Dei a développé une strategie dÕéducation qui fut très tTMt, la plus large possible. Non seulement au Chili mais dans dÕautres pays, lÕorganisation a su sÕimplanter dans différents secteurs éducatifs, et pas seulement ceux qui lÕintéressaient pour ses activités dÕapostolat. LÕinstitution met tout en Ïuvre pour etre présente dans lÕéducation de la société, à tous les %oges, et dans toutes les formations possibles. Depuis lÕenfance jusquÕà la vieillesse, lÕÎuvre transmet une formation chrétienne conforme aux valeurs de San Josemar'a. Le but est dÕinfluencer la société entière, sans se cantonner aux secteurs les plus favorisés qui forment la majorité du public de lÕorganisation.

Section I - S'imposer dans toutes les branches de l'éducation

Les écoles techniques, par exemple, ne sont pas a priori des terrains de recrutement de lÕÎuvre, mais sont un bon moyen pour diffuser les valeurs de lÕinstitution dans dÕautres categories de la population, et à lÕextérieur de Santiago. De même que lÕuniversité Los Andes, un veritable relais dÕinfluence de la population, qui a su acquérir beaucoup dÕimportance dans tout le pays.

§ I - Les écoles techniques

On a pu lire dans tous les journaux nationaux, il y a quelques mois, que les élèves de lÕécole agricole Las Garzas ont construit, en juin, six logements temporaires destinés à des familles à faibles revenus de la commune de Chimbarongo, laissés sans domicile par le tremblement de terre qui a affecté le Chili dans la nuit du 27 février

2010. C'est avec beaucoup d'enthousiasme qu'ils ont, avec leurs professeurs, mené à bien ces constructions, dans le cadre du programme Ç Reconstruire le Chili È, qui canalise les dons financiers aux victimes de la catastrophe. Selon le directeur de l'école Las Garzas, Marcelo Silva, ce fut Ç une opportunité unique de renforcer la formation de valeur des élèves 71 È

Cette école technique a été construite sur un terrain de 20 hectares à 150 km au Sud de Santiago, dans la commune de Chimbarongo, dans la région O'higgins. Elle est construite dans un milieu rural, sur un domaine nommé San Juan de la Sierra, qui compte un parc d'eucalyptus, de pins et autres arbres autochtones centenaires, et 4000 m2 d'édifices de briques rouges, entourés de jardins avec une belle pelouse fleurie et bien entretenue, comme tous les bâtiments qui appartiennent à Dei 72

l'Opus . En plus

des dortoirs, il y a des salles communes et des salles d'étude, une laiterie, une salle informatique, une bibliothéque moderne, un amphithéâtre, des terrains de sport, mais aussi une résidence de numéraires masculins, et une maison isolée pour l'équipe administrative. Le nom, Las Garzas, a été donné en raison des hérons (Ç garzas È) qui nichent dans le parc.

L'école a été crée en 1963, seulement treize ans aprés le début du labeur apostolique au Chili, quand les bases de l'Opus Dei étaient encore assez fragiles dans le pays. Un groupe de numéraires et surnuméraires formule donc ce projet, qui vise à former les paysans chiliens, pour leur permettre une promotion technique et sociale, dans un pays dans lequel les études supérieures sont toujours le privilege d'une minorité possédante. C'est l'agriculteur Fernando Silva qui fait donation des maisons patronales et du parc, à partir desquels l'école s'est ensuite agrandie, en acquérant des terres et en construisant de nouvelles installations. Ce sont les architectes Alliende, Guridi et Rodriguez qui dirigent la construction, comme pour beaucoup d'autres établissements de l'Opus Dei. Il ne reste maintenant plus qu'une petite partie de la vieille maison, car le reste s'est effondré. Las Garzas appartient à la Fondation Chilienne pour la Culture, dont nous avons parlé plus haut, qui appartient également à l'Opus Dei. C'est la fondation qui paye les salaires des professeurs et de l'équipe administrative, alors que le financement de l'école agricole dépend des subventions de l'Etat, des fonds apportés par l'association d'amis et d'entreprises de l'école, mais aussi de l'exploitation de la laiterie, et des vignes. Les donations privées représentent environ 30% du total du budget de l'établissement.

71

Ç Alumnos de las Garzas ayudan a familias afectadas por el terremoto È, Diario VI region, 2 juillet 2010.

72 MONCKEBERG, Maria Olivia, ouvrage précité, p 510

La bibliothèque et les salles contigu`s ont été construites grâce à un projet du ministère de l'éducation: le projet Montegrande a ainsi départagé 300 écoles municipales subventionnées, qui avaient postulé à l'aide en élaborant un projet de développement pédagogique. Cinquante et un établissements ont ensuite été sélectionnés, dont Las Garzas, dont le projet comprenait une réforme des plans d'études, une formation particulièrement poussée pour les professeurs, et la bibliothèque.

A Las Garzas, un enseignement technique dans le domaine agricole est donc donné aux étudiants de 11 à 16 ans, et l'Opus Dei, une fois encore, prend en charge la formation morale et religieuse des élèves. D'ailleurs, San Josemar'a a, selon les dires de la fondation qui s'occupe de l'école, suivi de près sa création et son développement. L'école agraire a été crée suite à ses encouragements, et en juin 1974, lors de sa visite au Chili, le Père Fondateur a rencontré certains de ses enseignants, et les a félicité pour leur travail de formation des jeunes, grâce à leur connaissance, leur affection, leur patience et surtout leur piété.

L'école est exclusivement masculine. Tous les élèves sont des hommes, ainsi que les professeurs et l'équipe de direction. Seul un petit groupe de femmes, des numéraires auxiliaires, s'occupe de l'entretien des locaux et de la cuisine, mais elles restent en général invisibles, travaillant selon des horaires fixés avec précision pour que personne ne les rencontre.

La première année, l'école ne put accueillir qu'une promotion de 13 élèves, car elle manquait cruellement de personnel. Maintenant, elle a atteint une capacité de 160 élèves, dont 90 en internat. On encourage fortement les élèves à rester à l'internat, construit en 1967, pendant leur formation, car il est plus facile pour le personnel pédagogique de leur donner des habitudes de travail et de comportement qu'ils désirent. Depuis quelques années cela dit, l'internat atteint sa capacité maximale tous les ans, et certains enfants ne peuvent y rester.

Actuellement, 25 professeurs enseignent à Las Garzas. Ceux qui enseignent des matières techniques sont des techniciens agricoles ou des ingénieurs agronomes, parfois eux-mêmes diplTMmés de Las Garzas. Selon le directeur, seuls huit d'entre eux appartiennent à l'Opus Dei. Le rythme de travail et d'études est intense. Il comprend les tâches propres à une école de ce style, mais les élèves suivent aussi une intense formation de l'Opus Dei: la journée commence très tTMt, et avant les cours, les élèves doivent faire leur lit, laver et ranger leur dortoir, et ont une heure consacrée au travail personnel. Après, ils déjeunent, puis la moitié des élèves ont des cours théoriques de

mathématiques, espagnol, biologie, histoire, anglais, musique et de sport, pendant que l'autre moitié suit les cours pratiques de soin de la vigne, d'entretien des champs ou de la laiterie. L'après-midi, chaque groupe fait ce que l'autre a fait le matin.

Toute la formation de Las Garzas est basée sur un principe: apprendre en faisant. En effet, les élèves sont encouragés à prendre de plus en plus de responsabilités dans les travaux de production, pour finir, durant la dernière année du cursus, par diriger, aidé par un professeur tuteur, une section complète de la production, par exemple la laiterie, ou l'élevage des veaux. L'élève de dernière année est donc responsable, et a sous ses ordres les élèves des années suivantes, encore en apprentissage. Ce système a été installé par Héctor Lizana, ancien élève maintenant professeur et chef de la laiterie de son ancienne école.

Les élèves apprennent le métier dans des champs d'activité très différents: du vignoble à l'usine d'aliments concentrés, en passant par un atelier de mécanique agricole et un laboratoire d'analyse, les professeurs tentent de former leurs élèves de manière très complète. Les deux premières années du cursus portent sur des connaissances plutôt humanistes et scientifiques, alors que les deux années suivantes sont plus techniques.

Outre les cours, les élèves participent à des activités extrascolaires, pour leur formation ou pour leurs loisirs. Par exemple, en 2001, un groupe de dix élèves et leur professeur ont effectué des travaux de jardinage et de manutention dans l'école Santa Eugenia, de Chimbarongo. Ils rendent aussi visite à des familles défavorisées des alentours, et effectuent d'autres activités de bénévolat, très encouragées par l'Opus Dei. Des championnats sportifs sont également organisés dans diverses spécialités.

Avec le temps, Las Garzas a souvent innové dans l'enseignement des techniques agricoles, en acquérant un matériel technologique et audiovisuel moderne, visant deux objectifs : obtenir une plus grande autonomie dans l'apprentissage pour que les élèves développent leur propre capacité d'accès à l'information, et également afin que les enseignants améliorent leurs méthodes à l'aide des nouvelles technologies.

Des cours de religion sont également au programme: ils sont obligatoires, contrairement à la messe, à 7h30 tous les matins, dans la chapelle de l'école, très bien décorée, et qui comporte une illumination de San Josemar'a et la croix de bois noir sans crucifix qui représente l'Opus Dei. Les élèves peuvent également assister à des débats et conférences sur les valeurs religieuses, mais comme pour la messe, ils n'y sont pas obligés. Pour intégrer l'école, les enfants ne sont d'ailleurs pas tenus d'être

catholiques. La diversité de culte est respectée, comme dans tous les établissements éducatifs de l'Îuvre.

L'examen d'entrée peut se faire à 11, 12, 13 ou 14 ans, mais pas aprés, car tous les éléves doivent passer au moins deux ans à Las Garzas pour obtenir le diplôme. Chaque éléve doit pour candidater, se soumettre à un examen de mathématiques et d'expression verbale, mais l'attitude des parents durant l'entrevue avec le directeur de l'établissement est fondamentale. Ils doivent s'engager à collaborer avec l'école dans l'éducation de leurs enfants, donc apprendre à conna»tre l'école et suivre certaines activités formatives qu'elle dispense pour les parents d'éléves, dont un cours d'orientation familiale.

Le style propre à l'Opus Dei se manifeste dans le résultat final: les employeurs apprécient en général la formation intégrale de la personne que les éléves recoivent, car ils sont responsables, sérieux, honnêtes. Le fait qu'il y ait constamment un groupe de membres de l'Îuvre avec les éléves marque la différence. Selon eux, l'école est trés différente des établissements qui ont des horaires rigides, avec des professeurs qui arrivent à une heure précise et repartent des leurjournée finie. A Las Garzas, le contact avec les éléves est permanent, et même le week-end, les éléves et les professeurs se relaient pour s'occuper de la laiterie.

Le contact d'ailleurs, est étroit avec les entreprises agricoles des environs. De la création de l'école à l'année 2008, 891 techniciens agricoles ont recu leur diplôme à Las Garzas, et l'école fait en sorte de maintenir des liens trés suivis avec les anciens éléves. Cela permet de générer l'existence de sympathisants chez les enfants de paysans éduqués comme techniciens agricoles, et chez leurs parents.

A Las Garzas, tous les ans est organisée une journée des anciens éléves, durant laquelle le public suit des cours d'approfondissements sur des points techniques, mais aussi et simultanément des cours sur les vertus humaines, donnés par des membres de l'Îuvre. Toute l'année, on envoie à tous les anciens éléves une petite revue pour les tenir au courant des nouvelles relatives à la vie de l'école, et aux résultats obtenus dans les différents secteurs d'activités. Beaucoup d'entre eux, d'ailleurs, travaillent par la suite quelques années à l'école, parfois de maniére saisonniére, la majorité dans les vignes et les caves à vin.

Les éléves, sortant de l`école avec un diplôme de technicien agricole, sont souvent embauchés par des entreprises agricoles de la zone, bien que certains soient appelés à travailler dans d'autres régions, voire même à l'étranger, par exemple dans le vin. L'association d'anciens éléves, trés active, regroupe environ 600 diplômés et les

tient au courant des offres de travail, trés bien actualisées. Toutes ces productions contribuent au financement de l'établissement. La laiterie, les vignes et le laboratoire d'analyse sont les trois principales sources de revenus. Deux cent cinquante vaches sont soignées en permanence par vingt ouvriers à la laiterie, mais les résultats ne couvrent pas ces derniéres années, les coüts d'entretien, et elle fonctionne au ralenti, tandis que plus de la moitié des laiteries du secteur ont dü fermer.

Les vignes et le laboratoire fonctionnent beaucoup mieux. Le laboratoire vend ses analyses d'eaux, de sols, et de capacité nutritive des aliments, tout en servant d'apprentissage aux éléves.

L'école agricole Las Garzas est donc une réussite en tous points de vue. Non seulement elle s'autofinance, pour u ne grande partie du budget, mais surtout, elle peut diffuser les valeurs de l'Opus Dei dans une région moins accessible à l'apostolat, car elle ne compte pas d'autres activités éducatives, et car les habitants, en général travailleurs du secteur primaire, n'ont pas le profil recherché par l'Îuvre pour ses futurs membres. L'intérêt est ici d'influencer la société en général, et de provoquer la sympathie des gens pour l'organisation.

§ II - Carrières et instituts à l'université Los Andes

A l'université Los Andes, les cursus ont été tellement diversifiés depuis sa création que la grande majorité des étudiants y trouvent leur bonheur. L'ensemble est en général bien positionné dans les classements nationaux et dans les entreprises, ces diplômes sont généralement très reconnus.

Selon San Josemar'a Escriva de Balaguer, l'université est l'école de la responsabilité pour les jeunes. Ils y découvrent les exigences des devoirs de chacun dans la vie. En effet, on demande à l'universitaire qu'il soit responsable de ses actes, et conscient de l'exigence de bons résultats de l'Université, justement car celle-ci doit former des personnes capables de s'engager dans la résolution des problémes de la société, grâce à une bonne préparation professionnelle73.

Selon le fondateur de l'Opus Dei, le Christ s'est donné pour chacun de nous, et chacun doit se sentir personnellement concerné par la tâche de sa propre sainteté et de la construction du monde, qu'ils ont recu comme héritiers de Dieu. On apprend l'individualisme aux étudi ants, qui font en général, en sortant de leur cursus, de trés

73 IBANEZ-MARTIN, José Antonio, Ç La formation sociale et civique à l'université selon le fondateur de l'Opus Dei È, Promesa Centenario 5, 2002, p 11.

bonnes carriéres d'hommes d'affaire. La responsabilité de tous est donc mise en jeu, y compris celle des professeurs, qui ne pourraient pas, par exemple, assister à une conférence en abandonnant un cours prévu avec leurs éléves. De même, les retards sont inacceptables, de la part des professeurs comme des éléves. Les cours commencent à l'heure à l'université Los Andes, et finissent à l'heure également, réglés

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par une puissante sonnerie, qui réson ne dans tous les bâtiments .

Il y a en ce moment plus de 3 000 étudiants à l'université Los Andes, et environ 770 professeurs. De tous les éléves, environ 10% sont boursiers, car l`université a une des activités de recherche les plus importantes du pays, et postule à de nombreux fonds étatiques. La première carriére inaugurée fut celle de droit, comme dans toutes les universités les plus importantes du Chili (l'université du Chili, l'université Catholique, l'université de Concepci--n), comme à l'université de Navarre, construite par l'Opus Dei quelques années avant.

En 1991, les carriéres de médecine et de philosophie ont été ouvertes, suivies par celles de marketing, pédagogie et journalisme. Ce sont des choix stratégiques: la médecine, le droit, le journalisme et le marketing sont quatre des carriéres les plus recherchées du Chili, et beaucoup de jeunes font le choix de les suivre, dans l'espoir d'obtenir un diplôme et un emploi stable et reconnu. La philosophie et la pédagogie sont des carriéres dont les enseignements peuvent être trés facilement influencés par les valeurs chrétiennes de l'organisation religieuse, et il est trés important pour l'Opus Dei de former de futurs psychologues particuliers, ou d'entreprise, selon ces valeurs, qui changent complétement leur maniére d'exercer leur métier. Dans la carriére de pédagogie, le but est encore plus évident. L'Université Los Andes est en train de former de maniére catholique les futurs professeurs de la Nation. En 2009, la carriére de pédagogie de l'Université Los Andes était classée en seconde position derrière celle de l'Université Catholique de Santiago. Cette derniére propose un cursus d'un an seulement, relativement bon marché, puisque l'université est publique, et extrêmement demandée. Chaque année, plusieurs centaines de candidatures sont refusées. L'Université Los Andes, de son côté, propose un cursus de deux ans, beaucoup plus cher (5 000 euros par an) et de trés bon niveau, selon le classement. Par conséquent, beaucoup d'étudiants, refusés à l'Université Catholique, demandent à entrer à Los Andes, pour suivre des cours du meilleur niveau possible, et trouver plus facilement du travail ensuite. Comme nous l'avons dit plus haut, au Chili, le systéme est privé : les

74 MONCKEBERG, Maria Olivia, ouvrage précité, p 589

professeurs déposent eux-mêmes leurs candidatures dans les établissements scolaires et sont nommés par l'établissement lui-même.

C'est exactement ce qu'a choisi de faire Consuelo Lopez, ayant terminé son cursus d'art à l'Université Andrés Bello, une des meilleures universités privées, selon les classements nationaux. Sa candidature n'a pas été retenue à l'université Catholique, et, bien que non-croyante, elle n'a pas hésité à entrer à Los Andes, pour le bien de son vitae 75

curriculum .

L'Opus Dei est donc en train de former un grand nombre de futurs professeurs, qui seront amenés eux -mêmes à relayer leurs connaissances aux enfants, et, inévitablement, leurs valeurs. Déjà pendant leur année d'études en pédagogie, les étudiants sont assistants à temps partiel d'un professeur de collège, dans la matière qu'ils vont enseigner. Les collèges qui établissent ce genre d'accords sont bien évidemment au courant de la nature confessionnelle de l'université, et sont tous des collèges catholiques, ou appartenant à des congrégations chrétiennes diverses. Consuelo, elle, a fait son stage au collège Tabancura, de l'Opus Dei, non par choix, mais parce que les places sont limitées et qu'il ne restait pas d'autres options. Elle est donc, durant son stage comme durant les cours, exposée aux mêmes valeurs, celles de l'Îuvre.

Il existe maintenant six facultés et cinq écoles et instituts à l'université. Les carrières se sont beaucoup diversifiées, et on compte maintenant 30 cursus de licence, mais certaines restent impossibles à créer sous l'égide de l'Opus Dei. Selon Marcela Sa
·d, l'université a tenté de créer une école de cinéma il y a quelques années. Elle a contacté tous les cinéastes du pays, pour leur proposer un poste de professeur, mais ils ont tous refusé de travailler là-bas, car il était évident que l'art y serait contraint. Selon Marcela, les artistes ont besoin d'une totale liberté d'expression pour créer. L'université a donc crée une école de scenario et a fait envoyer un numéraire étudier en Italie pour qu'il puisse dispenser des cours à los Andes par la suite. La créativité ne fonctionne pas sous la contrainte76.

Parfois, les buts de l'institution

ne sont pas atteints. A l'époque de la création de l'université de Navarre, Msg Josemar'a prit conscience que la faiblesse de l'Opus Dei résidait dans la communication. Il a donc crée en complément de l'université une très bonne école de communication à Pamplone, en Espagne, pour former leurs propres journalistes. Cette stratégie a parfaitement fonctionné, et maintenant, les sites internet,

75 Voir annexe n°5

76 Voir annexe n° 2

revues et autres publications de l'organisation sont parfaitement bien élaborées et sont un atout en plus pour recruter des membres et relayer les valeurs de l'Îuvre.

Les accords de coopération, eux, fonctionnent toujours entre toutes les universités de l'institution. Des sa créatio n, l'université Los Andes a signé immédiatement deux larges accords de coopération, l'un avec l'Université Catholique de Santiago, et l'autre avec l'Université de Navarre, représentée au Chili par le numéraire chilien Gonzalo Rojas S‡nchez, farouche défenseur du Général Pinochet,

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diplômé de l'Université Navarre

de .

L'université déploie une intense activité, notamment au travers de plusieurs grands séminaires organisés au Chili, l'un en 1991, sur le theme Çl'entreprise et l'humanisme È, et l'autre sur le theme Ç le divorce face au droit È, deux ans plus tard. Certaines sections de l'université ont été crées seulement pour les filles: ce sont les carriéres d'infirmiére, d'administration et de services: ces carriéres préparent les étudiants pour des services basiques (ménage, cuisine, nutrition, service aux clients) et rappellent un peu les cours dispensés à Fontanar, même si, à l'université, les cours sont destinés à un public issu de milieux plus favorisés.

Cette carriére a recu un trés bon accueil dans le monde de l'entreprise, car le secteur tertiaire augmente chaque jour. Ce sont des carrières multifonctionnelles : elles peuvent déboucher sur un travail dans les hôpitaux, les lignes aériennes, les hôtels, les banques, ou encore les entreprises d'alimentation. Selon l'université, ces carriéres sont réservées aux femmes car elles auraient des aptitudes spéciales dans ce genre de travail.

Dans la même ligne d'action, un institut de la famille a été crée plus récemment: les étudiants, en général des professionnels qui veulent renforcer leur connaissance dans le milieu de la famille, y suivent un diplôme de trois semestres en cours du soir. Parmi les étudiants, on trouve des avocats, des infirmiéres, des pédagogues, ou encore des psychologues78.

A la faculté de médecine, beaucoup de spécialités sont proposées, parmi lesquelles la chirurgie, l'obstétrique ou la pédiatrie, et les éléves font leurs stages à l'hôpital de San Bernardo, qui appartient également à l'Opus Dei, en attendant la construction de la nouvelle clinique prés de l'université.

L'université a par ailleurs réussi à trouver un écho international gr%oce aux efforts réalisés, et à l'investissement de nombreux membres de l'Ïuvre. Elle est devenue un

77 ESCOBAR, Jaime, Ç Situation de l'église au Chili È, Dial n°2567, 16 juin 2002

78 MONCKEBERG, Maria Olivia, ouvrage précité, p 613

centre majeur de recherche et de divulgation des analyses, mais aussi de congrés, et de rencontres au travers desquelles les membres de l'Opus Dei peuvent augmenter leur influence sur la société, et relayer leurs valeurs, trouvant un écho chez des représentants des entreprises.

Deux bâtiments d'une grande importance ont par ailleurs été inaugurés en 2009: l'ESE et l'édifice de l'horloge. L'ESE est l'école d'études supérieures de l'entreprise, dirigée vers le perfectionnement professionnel, inspiré par le modéle des écoles de commerce nord américaines. Le cursus en soi a commencé à fonctionner en 1999. En général, les étudiants sont des hommes d'affaires, ou des professionnels jeunes qui ont une expérience d'environ trois ou quatre ans dans le monde du travail. Le surnuméraire argentin Alberto Lopez-Hermida en est le directeur, en plus d'assumer la charge de président de la fondation Alborada.

Le but de l'école est de donner aux dirigeants une dimension chrétienne, d'éthique et de responsabilité entrepreneuriale, mais l'école a également des liens trés étroits avec les entreprises, car son objectif est avant tout de favoriser l'insertion de ses éléments dans le monde des affaires chilien et international. L'ESE doit permettre à l'élite chilienne entrepreneuriale l'accés à une position qui pourrait par la suite aider

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l'université ou plus généralement l'organisation, par le biais de dons, par exemple .

On peut en effet parler de ducs, comtes et marquis de l'empire de l'Opus Dei. Effectivement, on retrouve toujours les mêmes noms dans toutes les organisations éducatives, mais aussi dans toutes les entreprises liées à l'Îuvre. Ce sont des familles de renommée nationale, les Ibañez, les Larra'n, les Monckeberg, qui donnent beaucoup d'argent à l'université, comme par exemple Fernando Larra'n Peña, homme d'affaires, actionnaire à la BHC, la banque hypothécaire du Chili.

L'Université des Andes, et derrière elle, tous les membres de l'Opus Dei au Chili, ont donc, depuis les années 1990, redoublé leurs efforts pour faire de leurs étudiants des professionnels achevés, avec des liens établis dans le milieu entrepreneurial, et des compétences reconnues par tous. La maniére dont les matiéres sont enseignées est bien évidemment particuliérement importante. Même si dans certaines disciplines, la différence entre un enseignement c lassique et un enseignement de l'Opus Dei ne peut être trés grande, inconsciemment, les étudiants évoluent dans un milieu qui est confessionnel, et qui respecte les enseignements de Msg Josemar'a.

79 MONCKEBERG, Maria Olivia, ouvrage précité, p 615

A lÕécole Las Garzas comme à lÕuniversité, lÕinfluence est bel et bien là, et les valeurs sont transmises, quoi quÕil arrive, à lÕensemble des élèves de ces établissements. Non seulement à travers les cours de religion, qui ne sont pas toujours obligatoires, mais dans le ton general des cours et dans le comportement du personnel éducatif.

Section II - Un guide à travers tous les %oges de la vie

LÕOpus dei est une organisation tentaculaire. Bien plus quÕune institution de lÕEglise catholique, cÕest un organisme appelé à attirer toujours plus de fidèles, car il cherche à guider le maximum de personnes, tout au long de leur vie. QuÕelles soient ou non membres de lÕÎuvre, elles sont encadrées par des valeurs qui sont propres à lÕOpus Dei. CÕest une manière de faire, une marque de fabrique, pourrait-on dire, de laquelle lÕÎuvre signe son action chez les enfants comme chez les adultes.

§ I - Les activites et clubs pour enfants

Les enfants et adolescents sont évidemment le public favori de lÕorganisation. Plus facilement influengables, sensibles au comportement des adultes qui les entourent et pour qui ils ont du respect, ils sont prioritaires pour lÕOpus Dei.

Les clubs pour enfants sont des lieux privilégiés de conditionnement progressif, et même si les jeunes ne finissent pas toujours par demander leur integration, les valeurs quÕon leur enseigne laissent souvent des traces jusque dans lÕ%oge adulte.

Comme nous lÕavons dit plus haut, lÕintégration nÕest pas forcément le but recherché. Il est très profitable à lÕOpus Dei dÕavoir un groupe de sympathisants, autant dans les quartiers riches que pauvres, et repartis dans le pays, qui prennent la defense de lÕorganisation sans en faire partie. En effet, lÕÎuvre regoit beaucoup dÕattaques. Ne pas même avoir à y repondre quand dÕautres sÕen chargent est très appreciable, et plus lÕOpus Dei forme de jeunes selon ses idées, moins lÕinstitution catholique aura à subir de critiques.

CÕest pourquoi lÕaccent est mis sur lÕapostolat dans ces clubs de jeunesse, particulièrement dans les écoles privées evidemment, mais pas seulement. Dans les quartiers riches de Santiago, les membres de lÕOpus Dei font fréquemment du porte à porte pour inviter les enfants des bonnes familles à assister à des cours de musique, de sport, etc. Les arguments sont toujours les mêmes : les enfants sÕamuseront bien plus

le mercredi après-midi entourés de trente autres camarades qu'entre frères et sÏurs. Les parents pourront tranquillement se reposer ou vaquer à d'autres occupations. Les activités sont ludiques, très diverses, et encouragent la mémoire, la dextérité et l'intelligence. Ces séries d'arguments amènent souvent les parents à visiter le club, et à assister à quelques activités.

D'autres fois, ce sont les enfants eux-mêmes qui recoivent l'invitation de la part d'amis de leur quartier ou de leur école, de la mère ou du père de tel ami, etc. De toutes ces activités, aucune ne mélange les garcons et les filles.

La plupart du temps, les membres de l'Opus Dei ne diront pas que le club appartient à l'organisation, et dans les faits, il ne leur appartient pas. Tous ces clubs sont des Ïuvres corporatives de l'Opus Dei. Cela veut dire qu'ils sont crées par des fidèles de l'organisation, parfois avec d'autres personnes, mais sont garantis moralement par la prélature de l'Opus Dei. Cela ne veut pas dire que le club soit officiellement catholique. Ce sont donc des associations séculières et la
·ques, mais dont la formation chrétienne et l'attention pastorale est de la responsabilité de l'Îuvre, selon le désir de ses fondateurs. L'accord du club avec la prélature de l'Opus Dei ne modifie en rien sa nature civile, c'est à dire que la responsabilité pleine de sa gestion et de sa direction incombe à ses créateurs, personnes ou entités civiles.

Gr%oce à cet état des choses, non seulement l'Opus Dei para»t ne rien posséder en propre, et s'applique à démentir sa réputation d'organisation riche et possédante, mais surtout les clubs peuvent porter un nom totalement abstrait, et masquer ainsi leur véritable appartenance. Au Chili, ces clubs portent souvent des noms qui rappellent la nature, comme Ç Aillahue È (réunion des chefs indiens), Ç Vidalai È (un mot du Mapudungun, le langage Mapuche), ou Ç Tajamares È (qui désigne les piliers d'un pont). Quand des membres de l'Opus Dei entrent en contact avec les parents, ils ne soulignent pas, en général, que l'Îuvre prend en charge l'éducation spirituelle des enfants, et c'est donc dans l'anonymat le plus complet que l'organisation entame son travail d'apostolat.

En effet, le premier contact ravit en général le nouvel arrivant. Il ressent la sensation d'entrer dans un monde absolument merveilleux, plein de gens sympathiques et attentionnés, souriants et heureux. Le club a alors des apparences d'»le de bonheur au milieu de la tempête, ou règne l'amour et la fraternité la plus sincère.

Les anciens du club ou de l'association déploient une amabilité pseudo familière, et le nouveau venu est entouré de toutes les attentions. Cela vaut pour l'enfant, mais aussi pour le parent qui l'accompagne et vient le chercher, accueilli comme un prince

par le personnel de l'association, qui le reconna»t immédiatement, se rappelle de son nom et sait exactement lequel des enfants est le sien. Il aura également un mot gentil a propos de l'enfant, que ce soit pour apprécier sa vivacité d'esprit, sa sagesse ou son habileté a tel ou tel jeu. Pendant les premières semaines qui suivent l'entrée de l'enfant dans le club, ses parents et lui-même seront le centre de toute l'attention.

Rapidement, un lien émotionnel s'établira entre l'enfant et le reste de son groupe, non seulement avec ses camarades, mais aussi avec le personnel adulte de l'association, qui prend toujours un soin particulier a désigner un des adultes, toujours celui avec lequel l'enfant s'est senti le plus a l'aise instinctivement, comme conseiller personnel. L'adulte devient ainsi un confident, et petit a petit, un guide.

En effet, au lieu de donner l'exemple et de laisser les gens s'intéresser seuls a l'institution catholique, les membres de l'Opus Dei prennent les choses en main: on leur apprend différentes techniques de psycho manipulation pour amener un maximum de personnes a découvrir leur vocation a entrer dans l'organisation. Cela commence dès l'enfance, et les jeunes exposés a ces enseignements finissent souvent par adopter la spiritualité de l'Opus Dei, parfois sans intégrer l'Ïuvre, mais en appliquant ces principes et valeurs80.

Dans ces clubs, les enfants ont toujours le choix d'assister ou pas a des petites conférences hebdomadaires. En général cependant, le mouvement de groupe fait que tous choisissent d'y assister, puisque rien n'est prévu dans le déroulement de la journée pour remplacer ce moment de réflexion spirituelle. La conférence est faite par un prêtre, et porte sur une valeur humaine, et chrétienne. Pour les plus petits, elle ne dépasse pas 15 minutes, pour ne pas ennuyer les enfants, et le prêtre fait jouer l'interaction, a l'aide de questions, ou de mini débats, selon leur âge. Parfois, les conférences sont données sous forme de pièce de théâtre, pour mieux retenir l'attention des enfants. En assistant a une de ces conférences, avec des fillettes de 8 ans approximativement, on se retrouve soi-même tenté d'acquiescer a tout ce que dit le prêtre, grâce au ton employé, a la vivacité de ses propos, et a son sourire d'encouragement chaque fois qu'un des enfants s'exprime.

Ce sont bel et bien des professionnels qui prennent en main les enfants dès la porte du club, et qui leur relaient leurs valeurs, par le biais d'activités toujours ludiques. Tous les enfants, même totalement étrangers a l'Îuvre ressortent enchantés de leurs activités du mercredi après -midi.

80 DEVOS, Bruno, Ç La face cachée de l'Opus Dei : documents secrets, des vérités qui dérangent È, Presses de
France, 2009, p 102.

§ II - Un encadrement personnalisé de la personne

Entourer l'éléve, l'encadrer dans sa progression dans la vie, telle est la mission que se donne l'Opus Dei, dans toutes ses institutions éducatives. Une des qualités majeures de ces établissements, en général reconnue par tous, est sa maniére d'intégrer chaque éléve à un Tout, et de lui faire sentir qu'il n'est pas seul, qu'on sait qui il est etce dontila besoin.

Pour l'université, par exemple, Msg Escriva de Balaguer a élaboré sa propre théorie81, concernant les devoirs sociaux et civiques du citoyen, qui se forment durant les études. A l'université donc, les étudiants doivent apprendre, gr%oce à l'encadrement personnalisé des professeurs et de tout le personnel de l'établissement, l'art de savoir vivre en communauté. Les devoirs du citoyen, en effet, commencent, selon San Josemar'a, par la promotion d'un échange social confiant entre les éléves et les professeurs, et entre les éléves entre eux. Il n'y a pas de communauté si les gens ne peuvent pas se parler, par manque de confiance, ou par différence de centres d'intérêt. Or, toujours selon le fondateur, la fonction traditionnelle de l'université est de transmettre la culture, en donnant une base commune aux étudiants, une structure mentale qui encadre leurs connaissances, et leur permet d'utiliser les mêmes ressorts intellectuels.

Tous les adultes présents, que ce soit à l'université ou dans les colleges, les clubs, doivent donc agir dans le même but: donner aux enfants et aux adolescents une même confiance en soi, et une confiance mutuelle entre l'éléve et le professeur, confiance qui sera la plus achevée à l'université car les éléves sont plus %ogés. La condition nécessaire à cette confiance est le respect mutuel, qui permet l'échange d'idées, sans pour autant que les professeurs et éducateurs acceptent des idées erronées, qui feraient dispara»tre la vérité.

Selon Msg Escriva, les professeurs ne doivent pas rejeter en bloc un étudiant qui a une attitude erronée, car ca ne le fera pas changer de comportement. Ils doivent se montrer ouverts et accueillants, et croire à la capacité de changement de l'éleve.

L'université doit également être un espace de solidarité et d'amitié. Cette affirmation du fondateur peut également s'appliquer à tous les établissements éducatifs de l'Opus Dei: en effet, souvent des amitiés trés fortes se nouent à l'école, à l'université, et également dans les clubs de jeunesse, entre les éléves mais aussi entre

81 IBANEZ-MARTIN, José Antonio, ouvrage précité, p 28

les élèves et les professeurs. C'est du moins ce que l'Ïuvre encourage, car ces échanges permettent toujours plus aux membres de l'Opus Dei d`imposer à leurs élèves leur manière de penser. Les professeurs collaborent en effet de manière permanente à l'é ducation, faisant des recherches sur les problèmes spécifiques de la communauté, et cherchant à perfectionner leur savoir constamment. Leur devoir est d'aider à la découverte de sens de l'existence humaine.

Dans ces établissements éducatifs, en général, l'équipe pédagogique doit former les étudiants à une mentalité de service: le service à la communauté, promouvant le bien commun, et la fraternité chrétienne, car rien n'est plus triste que de former des hommes qui profiteront égo
·stement de leur culture.

Par ailleurs, l'école en général, à tous les âges de la personne, doit être école de la responsabilité. C'est à l'école qu'on découvre les exigences des devoirs de la vie. L'universitaire, par exemple, doit donc répondre de ses actes, et doit être conscient de son devoir d'obtenir de bons résultats à l'université, pour ensuite pouvoir justifier d'une bonne préparation professionnelle. Les professeurs, par exemple, ne peuvent en aucun cas, selon la conception de l'Opus Dei, partir donner des conférences dans d'autres universités en abandonnant des cours prévus avec leurs élèves.

Selon Msg Escriva, le Christ s'étant donné pour chacun de nous, chacun doit se sentir personnellement concerné par la tâche de sa propre sainteté, et de la construction du Monde, qu'ils ont recu comme héritiers de Dieu. C'est pourquoi les professeurs et éducateurs se sentent tant responsables de l'éducation des générations futures. Effectivement, la formation des élèves leur importe, non seulement car ils se préoccupent sincèrement de leur futur, mais également car, en leur procurant une bonne éducation, ils travaillent à leur sainteté, et offrent leur travail apostolique à Dieu. Ce devoir qu'ils s'imposent implique pour les éducateurs, en général, une grande responsabilité. Ils doivent par exemple être extrêmement ponctuels concernant les horaires des classes, tout comme pour les devoirs rendus en temps et en heure; le but étant de former des gens responsables, en les encadrant avec soin.

Pour que les enfants se sentent entourés, une des principales exigences de tous les collèges reliés à l'Opus Dei, est que les professeurs connaissent le nom de tous leurs élèves. Selon le témoignage de Caren Hidalgo82, 17 ans, élève à Almendral, effectivement, tous les professeurs, membres de l'Opus Dei ou non, connaissent son nom, et la traitent avec familiarité. Elle nous dit que, arrivée à 7 ans à Almendral, alors

82 Voir annexe n° 11

qu'elle était avant scolarisée dans une école publique du secteur, elle a constaté une grande différence de traitement entre les deux établissements. <<A Pablo Neruda (son ancienne école), je pense que j'étais une éléve parmi les autres, et trés souvent, même à la fin de l'année, les professeurs ne nous reconnaissaient toujours pas. Ici, ils s'inquiétent pour nous quand on a l'air triste È.

Oveda 83

Sa camarade, Valérie , 17 ans, est entrée à Almendral des le début de

sa scolarité. Elle ajoute que, à Almendral, comme dans toutes les écoles reliées à la prélature, les professeurs viennent en uniforme. Elle dit trouver ca beaucoup plus juste, étant donné que les éléves, eux, sont toujours obligés de se plier à la régle de l'uniforme, dans les écoles publiques comme dans les privées. Elle ajoute <<La professeure déléguée de notre classe est avec nous depuis nos 6 ans, elle nous conna»t trés bien, c'est une amie È. Elle parle des professeurs délégués, institution dans tous les établissements de l'Opus Dei. Ces professeurs sont sensés améliorer encore la prise en charge de l'éléve, puisqu'ils servent d'interface entre les parents, les éléves et les autres professeurs.

Ces mécanismes laissent en général une empreinte favorable chez les anciens éléves de ces structures éducatives, qui n'optent pas pour l'intégration à la prélature. Autant Damian Bettancourt que Katixa Gallego nous ont tous les deux confirmé, durant les entretiens, qu'ils ne regrettaient absolument pas d'avoir fréquenté ces établissements, et qu'ils les trouvaient d'un niveau supérieur aux autres, autant pour l'encadrement des enfants que pour les relations de confiance qui s'installent entre les différents acteurs.

Mais l'encadrement de la personne englobe aussi une dimension beaucoup plus préoccupante: la volonté de la prélature de protéger les éléves de la culture jugée dangereuse pour eux. Les professeurs se méfient des films, des peintures, des livres, enfin de tout ce qui pourrait heurter les valeurs enseignées dans ces établissements.

Selon José Miguel Ibañez, professeur à l'université Los Andes, il faut attendre d'avoir atteint une carapace naturelle, et les armes nécessaires pour affronter certains ouvrages. Pour lui, tout doit être lu, mais au bon moment, et il y a un processus de maturité à acquérir avant de se <<jeter au feu È. Il affirme lui, avoir lu des Ïuvres de Nietzsche dans sa jeunesse, sans avertissement préalable, et déclare <<Il fut si difficile de sortir Nietzsche de ma peau, et de pouvoir l'analyser84 È. C'est donc le directeur spirituel, ou le professeur conseiller de chaque éléve qui doit lui dire à quel moment il

83 Voir annexe n° 11

84 SAID, Marcela, documentaire précité

peut lire tel ou tel ouvrage, pour sa propre sécuri té, selon les principes de San Josemar'a. Le Père fondateur expliquait, sous forme de petite histoire, comment il avait compris la nécessité de la censure partielle des livres: Ç Imaginez-vous face à une multitude de petits flacons, que vous voulez tous essayer. Mais l'un d'eux contient du poison. Seul un connaisseur peut trier pour vous 85

les È. Il n'y a donc pas de livres

interdits, mais des livres déconseillés pour telle ou telle personne à tel moment de sa vie. Quand ensuite on arrive à un niveau de culture suffisant, on peut tout lire.

Il est cela dit certain que les élèves sont à ce point entourés qu'ils ne peuvent lire les ouvrages ou visionner les films qu'ils souhaiteraient. Qu'ils soient membres ou non de l'Opus Dei, les élèves des établissements éducatifs de la prélature sont surveillés, et les valeurs que l'institution véhicule, défendues par tous les moyens.

Section III - Les formations de l'âge adulte

L'éducation, à l'Opus Dei, s'entend au sens large. C'est ce que la Prélature a prouvé en prenant en charge les enfants dès l'%oge de trois ans, et ce qu'elle confirme en travaillant beaucoup sur la formation des parents.

Bien que ce soient les jeunes qui représentent l'avenir de l'organisation, l'éducation de leurs parents est fondamentale, pour leur transmettre les valeurs du Fondateur, et leur permettre d'élever leurs enfants dans leur respect. Les parents, en effet, doivent être les relais de l'Opus Dei dans les maisons des non membres, dans lesquelles l'institution n'entre pas.

§ I - Cours du soir pour les parents dans les écoles de la Prélature

Les écoles qui sont des Ïuvres corporatives de l'Opus Dei, c'est à dire les écoles SEDUC, celles qui appartiennent à la fondation NOCEDAL et les quelques autres qui existent dans le pays, à Viña del Mar, ou à Chimbarongo, se sont employées dès le début de leur activité, à former les parents, car, comme la directrice de l'Almendral nous le dit, l'école n'est pas permanente pour les enfants. Ils peuvent changer de quartier, de ville, mais jamais de famille. Le plus important est donc de former des familles en vertu des valeurs chrétiennes.

L'objectif de ces cours parentaux, qui sont obligatoires à Nocedal

et à Almendral,

et optionnels dans les autres collèges, est de créer une ambiance de confiance entre

85 MONCKEBERG, Maria Olivia, ouvrage précité, p 270.

tous, professeurs, équipe de direction, éléves et parents. Une fois cette ambiance installée, il est trés facile d'orienter les parents dans le sens voulu.

Selon la fondation NOCEDAL il est au départ trés difficile de faire comprendre aux parents quell e est responsabilité 86

leur . Ils veulent le meilleur pour leurs enfants mais

souvent ne savent pas comment le leur donner, et font souvent des erreurs, alors qu'ils doivent être les premiers éducateurs.

A la fondation Nocedal, tous les samedis, quatre professeurs, qui sont responsables du diplôme de la famille à l'Université Los Andes, assurent des cours d'éducation familiale adressés aux parents des éléves des deux colleges de la fondation. Ils abordent des notions comme les relations entre mari et femme, ce qui est permis aux enfants, les punitions, ou les vertus. Selon les dires de la directrice de l'Almendral, 90% des parents d'éléves y assistent toutes les semaines, alors qu'on ne les oblige qu'à suivre trois conférences par an, et trois ateliers, pour voir une amélioration réguliére.

La fondation organise également des cours de spécialisation pour tous les membres de la communauté scolaire, c'est à dire y compris les professeurs, et les femmes de ménage, par exemple. Le but est, selon le site internet de la fondation, d'offrir un espace de développement personnel, social et professionnel aux adultes de la communauté et de renforcer les familles et donner aux parents des outils pour qu'ils prennent en charge l'éducation de leurs enfants. La fondation leur offre un espace de lecture, et une bibliothéque, ainsi que des salles communes, des salles de classe, une cuisine, une cantine, un salon gymnase, des dépendances administratives et des espaces verts.

Par ailleurs, la fondation posséde aussi une radio, la radio Nocedal FM, crée en 1999, qui a une couverture locale de 5 km. Elle diffuse des émissions de formation similaires à celles que les parents recoivent à la fondation. Elles ont une dimension éducative avec des répercussions sociales. Le but est de donner les capacités nécessaires à chaque personne pour surmonter les difficultés sociales, telles les drogues. Les enfants doivent être trop occupés, à l'école et dans leur famille, pour se laisser entra»ner dans ces cercles vicieux. Durant les émissions éducatives, qui durent deux heures, les auditeurs peuvent envoyer des messages et les professeurs de la fondation apportent des réponses à leurs préoccupations. Les intermédes musicaux

86 MONCKEBERG, Maria Olivia, ouvrage précité, p 410

sont composés de thèmes des années 1960, les préférés des parents, selon une enquête.

Dans le centre d'appui à la famille El Salto, comme dans les écoles SEDUC, le même système de cours familiaux est instauré, et fonctionne en général très bien. Les parents se sentent entourés dans leur tâche d'éducateurs, et conseillés au moindre souci qu'ils rencontrent dans leurs relations avec leur progéniture. Plusieurs fondations sont en train de copier ce modèle, qui leur permet d'asseoir leur domination sur les parents, anxieux de savoir élever leurs enfants sans faux pas.

Parmi elles, toutes les associations d'amis des collèges SEDUC suivent ce modèle. Les cours sont très suivis par les parents, qui apprécient d'être guidés à travers les âges, parfois difficiles, de leurs enfants. Ainsi, au collège Tabancura, les conférences auxquelles assistent les parents ont pour nom <<Une sexualité propre87 È, ou encore <<Amour adolescence 88

et È. Ils sont un recueil de conseils extrêmement

pratiques pour aider les parents dans leur relation avec l'enfant

La conférence << Amour et adolescenceÈ détaille ainsi plusieurs questions que posent à cet âge les enfants, en séparant les questions des filles et celles des garcons. A chaque question, les conférenciers apportent une réponse type qu'ils conseillent aux parents, comme meilleure option pour guider leurs enfants dans cette période problématique. Pour les garcons, une question comme << les parents pensent-ils aux enfants avant de se séparer? È recevra comme réponse <<Le divorce est inhumain. Il tue une famille entière. La séparation ne résout rien, elle empire tout, et parfois définitivement. Et ce que Dieu a uni, aucun homme ne doit le séparer, pour quelque motif qu'il soit.89 È

Si l'enfant demande comment il doit se comporter si une fille le provoque, ou le touche, ses parents devraient lui répondre, comme un prêtre de l'Opus Dei le ferait, que << la passion amoureuse se nourrit plus de l'imagination que de la réalité, et ceux qui promeuvent la pornographie le savent bien. Il faut faire la distinction entre les filles avec qui on passe un moment et celles qui seront les amies de toujours. De nuit elles paraissent toutes diamants, mais de jour elles ne resplendissent pas toutes de bonté et de beauté. Et celle qui use de son corps pour provoquer ne mérite pas de s'appeler femme. Ne la prends pas comme compagnon de route, et ne l'accompagne même pas au coin de la rue, ou tu finiras mal.È

87 Voir annexe n° 12

88 Voir annexe n° 13

89 Voir annexe n° 13

Si un garcon demande à ses parents quels sont les effets de la masturbation, ils seront contents de savoir lui répondre, gr%oce à la formation de lÕOpus dei, quÕ Ç il est frequent que les mauvaises habitudes juveniles produisent des pathologies dans lÕunion sexuelle, comme lÕéjaculation précoce È et quÕ Ç abuser de notre propre corps, qui est Temple de Dieu et ne nous appartient pas comme objet de plaisir, nous ecarte de lÕamour de Dieu, et de lÕamour à la femme vue comme un objet90. È

Aux parents dÕune adolescente, qui risquent d'être confrontés à des questions telles que Ç pourquoi certaines de mes amies aiment aller à des fêtes pour que les garcons les collent ? È, on leur recommande de repondre quÕ Çelles sont en quête de nouvelles sensations, quÕune fille pure et saine sait reserver pour après sa lune de miel, cherchant à prolonger sa personnalité en ayant des enfants bien formés. Il ne convient

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pas de rechercher ces émotions de manière précoce . È

Le contenu des cours reflète exactement lÕétat dÕesprit du Père fondateur. Le conservatisme social est de mise, autant en matière de droit à lÕavortement, de moyens de contraception, ou encore de chasteté avant le mariage. Les norme s dictées par ces etablissements surprennent par leur rigidité, mais dans lÕOpus Dei, elles sont totalement acceptées par tous, et le contact des parents membres de lÕinstitution avec les autres accélère ce processus.

La mission de lÕÎuvre dans lÕéducation dépasse largement ses limites originelles en sÕinteressant aux parents, depuis longtemps sortis des bancs de lÕécole mais à qui on offre lÕaide de prêtres et de numeraires de lÕOpus Dei pour elever leurs enfants.

§ II - Fontanar et les formations professionnelles pour adultes

La devise de lÕécole technique Fontanar est «Des femmes qui vont loin». Fontanar se veut lÕemblème de la liberation des femmes au foyer, qui peuvent, en suivant ces cours, trouver un travail et apporter un revenu complémentaire à la famille. La portée ethique de lÕécole para»t très louable à première vue. Mais lÕÎuvre poursuit aussi un but plus personnel : en effet, plus large est le public que Fontanar arrive à toucher avec ses cours et ses seminaires, plus important est lÕécho de lÕOpus Dei dans la societe.

Fontanar maintient donc, en plus des carrières techniques que suivent les etudiantes en gastronomie ou en hTMtellerie, des secteurs plus spécifiques. LÕ

90

Voir annexe n 13

91 Voir annexe n 13

Organismo Técnico de Capacitaci--n (OTEC), c'est à dire l'Organisme technique de formation continue, appartient à Fontanar, et les cours ont lieu dans les mêmes locaux. Ce sont des cours de formation continue adressés aux entreprises et à leurs salariées. C'est un département à part, qui se développe peu, mais il fournit un financement trés important pour l'école. En effet, si les carriéres traditionnelles de l'école restent d'un prix raisonnable par rapport aux autres études offertes dans des établissements privés chiliens, ces formations continues ont un prix plus important, qui varie en fonction de la durée des séminaires et du nombre d'éléves que l'entreprise envoie.

Le but est de permettre aux entreprises de s'adapter aux évolutions techniques et sociales, en formant progressivement leurs salariés dans des domaines aussi divers que l'administration, le tourisme, le commerce et les services financiers, l'informatique, la gastronomie, les langues et la communication, ou encore les procédés industriels dans l'aire de la santé, de la nutrition ou de la diététique. Cette formation doit permettre aux entreprises de se maintenir compétitives dans un pays qui voit son économie se développer à grande vitesse et se complexifier.

Ces programmes s'adressent en priorité aux salariées, uniquement des femmes, mais certains éléves sont des méres de famille, qui préférent cette forme d'enseignement, dirigée avant tout vers le monde des entreprises. Les cours leur donnent des outils qui leur permettent d'être efficaces dans leur milieu de travail.

L'entreprise Telesat, par exemple, de télécommunications, a fait suivre un séminaire de service aux clients à une partie de ses salariées, en 2008, et la Fondation Las Rosas, reliée à l'Opus Dei, a contracté un séminaire d'assistance aux personnes %ogées pour ses salariées.

L'école propose également des cours de mise à jour des études, c'est à dire des approfondissements des connaissances de certains salariés qui n'ont pas eu la possibilité de continuer leurs études à l'université. Ces cours ont lieu le jeudi d'avril à novembre, de 15h à 19h, et incluent un débat de développement personnel, autrement dit un cours de valeurs religieuses camouflé sous un nom attrayant pour les entreprises. Les éléves peuvent choisir parmi les autres cours des lecons de cuisine niveau intermédiaire et avancé, des lecons de patissere, et également d'informatique.

Il faut également rappeler l'active formation des employées domestiques des familles de surnuméraires, qui suivent presque toutes des cours à Fontanar à un moment de leur carriére.

Dans tous ces cursus, l'accueil est très sympathique, les professeurs aimables, les

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cours intéressants, selon les dires des élèves .

Bien que la formation des adultes soit moins importante aux yeux des dirigeants de l'Opus Dei, dans ce secteur éducatif aussi, la Prélature est trés active, et renforce progressivement ses activités. De 22 en 1990, les élèves de Fontanar sont maintenant environ 300 toute l'année, et l'école organise régulièrement des séminaires pour une cinquantaine de salariées.

Fontanar est également de plus en plus cité dans le milieu des formations de l'%oge adulte, et beaucoup de projets sont en cours pour diversifier les cursus proposés.

Les adultes ne sont donc pas oubliés dans les activités éducatives de l'OEuvre, et plusieurs structures s'emploient à leur proposer des formations dans divers champs, pour les aider à s'adapter au monde actuel du travail, mais pas seulement. Comme pour les enfants, la stratégie d'éducation est plus globale, et vise à éduquer la personne comme un Tout, dans ses connaissances pratiques mais aussi dans sa morale.

92 Voir annexe n° 7

Chapitre II - Transmettre les valeurs du Fondateur par tous les biais possibles

Les opinions sont partagées sur le mouvement religieux de l'Opus Dei en tant que tel. Mais entre adhésion frénétique et rejet total, une importante partie de la société chilienne considère d'un bon oeil ses activités éducatives, tout en désapprouvant certains cTMtés trop rigides et conservateurs. Ne pas adhérer à la vision du monde de Msg Escriva n'empêche pas bon nombre de gens de faire confiance à l'OEuvre pour l'éducation de leurs enfants.

Section I - Faire partager la Ç bonne voie »

Les numéraires sont les ambassadeurs de l'OEuvre. Ils dédient leur vie à l'apostolat, et sont chargés de «rapprocher les gens de Dieu », dans les textes. Dans la pratique, leur but est de répandre les valeurs de l'organisation, en donnant des cours, en menant diverses activités bénévoles, et en donnant l'exemple d'une vie bien organisée et heureuse.

Ils sont extrêmement sympathiques, et démontrent, par leur comportement, que l'Opus Dei cherche seulement le bonheur des personnes qui ont entendu l'appel de Dieu. Dans la société catholique chilienne, ce message rencontre un large écho.

§ I - Les Ç invitations »

Les numéraires, les membres qui ont fait les trois promesses, de célibat, de pauvreté et d'obéissance, se dévouent corps et times à l'apostolat, qu'ils doivent mener d'une part en donnant le bon exemple, et d'autre part en encourageant leurs proches à se rapprocher de Dieu.

La vie d'un numéraire doit être irréprochable sous tous rapports. Natalia Izquierdo avoue que, depuis qu'elle est entrée dans l'OEuvre, elle a beaucoup moins de difficultés à étudier sans répit, à se concentrer, car elle sait qu'elle offre son travail à Dieu93 et que « une heure d'étude, pour un apostolat moderne, c'est une heure de prière94».

En effet, le plus important pour les numéraires est de recruter de nouveaux membres, et de rapprocher les gens de la Prélature. Selon Marcela Sa
·d, les numéraires ont l'obligation de présenter une liste de noms chaque année, à leur

93

Voir annexe n° 9

94 ESCRIVA DE BALAGUER, Josemar'a, ouvrage précité, maxime 335

directeur de conscience, le jour de la Saint José. La liste récapitule leurs activités d'apostolat directement en relation avec des personnes, cités par leurs noms. Les numéraires doivent élargir leur cercle d'amis en fonction des profils qui pourraient potentiellement être intégrés à l'organisation. On leur demande en général d'avoir de 12 à 15 Ç amis È, qui auraient un profil adéquat, dont 2 ou 3 personnes au moins qui soient tout prés de demander leur admission. Si l'un de ces Ç amis È se montre un jour totalement opposé à l'Opus Dei et qu'il devient clair qu'il ne demandera jamais son

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intégration, il est abandonné sans coup férir .

La principale raison qui a conduit Katixa Gallego à sortir de l'Îuvre, aprés plusieurs années comme numéraire, est la pression constante qui reposait sur elle pour faire entrer des gens dans l'Opus Dei. Ç Je n'aimais pas être poussée à l'apostolat, toujours. Je pense que normalement, quelqu'un d'heureux améne les gens à adhérer à l'Îuvre tout seul, sans se forcer. Et je me suis rendue compte que Dieu ne voulait pas

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me voir malheureuse dans quelque chose qui ne me convenait pasÈ dit-elle.

Effectivement, les membres de l'Opus Dei sont encouragés à inviter leurs amis à toutes les activités de l'institution: les clubs, les sorties à la montagne, à la mer, les séjours dans le Sud, etc, sont autant d'occasions d'intégrer de nouveaux sympathisants. Comme l'écrit lui -même le Fondateur: Ç Résidences universitaires, universités, fondationsÉsont-elles des fins? Non, et quelle est la fin ? Promouvoir dans

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le monde le plus grand nombre possible d'âmes dédiées à Dieu dans l'Opus DeiÈ.
L'apostolat est une activité trés structurée: les numéraires forment en général des

98

équipes, et développen t des stratégies pour attirer de nouveaux membres . Par exemple, si une recrue potentielle est un avide skieur, les numéraires pourraient bien planifier un week-end au ski, oü l'ami numéraire sera chargé de dire à la recrue potentielle qu'elle pourrait bien avoir la vocation. Aprés cela, si la réaction est positive, le numéraire passera le relais à son directeur de conscience, qui discutera de la vocation de maniére plus approfondie avec le futur membre.

Les anciens membres numéraires qui témoignent sur le site de l'ODAN certifient même l'existence de dossiers de statistiques à propos de leurs Ç amis È, incluant par exemple le nombre de visites apostoliques faires, le nombre de retraites spirituelles ou de cercles de méditation suivis, pour que les membres supérieurs de l'Opus Dei sachent constamment oü en est le processus d'intégration.

95 Voir annexe n° 1

96 Voir annexe n° 2

97 ESCRIVA DE BALAGUER, Josemar'a, Cr--nica, v, 1963.

98 www.odan.org

Les numéraires ont d'ailleurs le droit d'inviter des gens là ou ils habitent, dans les centres de l'organisation, par exemple pour manger ou prendre le thé, mais le seul but doit être l'apostolat: il faut qu'ils donnent l'impression d'être ouverts et accueillants, alors que les entrées sont filtrées, et qu'ils doivent demander l'autorisation au directeur du centre avant d'inviter qui que ce soit.

Effectivement, l'accueil des numéraires est toujours incroyable. Ils ont conscience de gagner leur sainteté en vivant une vie d'apostolat, et en se montrant toujours avenants avec tous. C'est pourquoi ils sont si gentils avec les inconnus, qui sont toujours de potentielles vocations. Natalia Izquierdo par exemple, avait été choisie pour nous accueillir à la résidence étudiante Araucaria, car c'est une personne naturellement bavarde, avenante, et trés souriante. Elle est jolie, et nous a fait visiter la résidence bien habillée, légérement maquillée, et bien coiffée, ce qui est extrêmement rare en réalité chez les numéraires, qu'on décourage fortement d'attacher une quelconque importance à des accessoires ou à du maquillage, qui rendent, selon Msg Escriva, la personne superficielle. Mettre en avant Natalia sert un but bien précis: renvoyer une image favorable de l'organisation, qui serait ouverte, et globalement accueillante pour les étrangers.

Toutefois, un premier contact avec n'importe quel membre de l'Îuvre, pour peu que notre profil corresponde à celui d'une potentielle recrue, sera toujours trés plaisant. Selon Marcela Sa
·d, au début de leur parcours dans l'Îuvre, Çles nouveaux membres deviennent numéraires comme ils seraient scouts, trés motivés, touchés par la grâce99È. C'est pourquoi ce sont le plus souvent les jeunes qui font entrer de nouveaux membres. Pour leur faciliter la tâche, l'Opus Dei a énormément développé ses activités à l'université.

Cependant, tout cet aspect de l'organisation reste en grande partie secret. C'est ce que lui reproche Marcela Sa
·d, qui affirme que ÇTout le monde est maintenu dans le

100

secret et on les encourage à se taire : c'est la discrétion, comme ils l'appellent È, et effectivement, dans ÇLe Chemin È, le fondateur précise Çsitu te tais, tu auras bien plus d'efficacité dans tes activités d'apostolat101 È.

Certains membres du clergé non membres de l'Opus Dei trouvent préoccupants le secret et la réserve qui entourent les jeunes aspirants numéraires102. En effet, on leur

99 Voir annexe n° 2

100 Voir annexe n° 2

101 ESCRIVA DE BALAGUER, Josemar'a, ouvrage précité, maxime n°648

102 MONCKEBERG, Maria Olivia, ouvrage précité, p 208

dit souvent de ne pas parler de leur intérêt à leurs parents ou à leurs proches, et il n'est pas rare que certains jeunes entrent à l'Opus Dei sans avertir leurs parents avant.

Durant les rencontres qu'effectua le Pére Josemar'a Escriva avec les militants de l'Opus Dei à Santiago, une mere de famille un jour lui confia son angoisse: elle lui raconte que trois de ses enfants appartiennent à l'Opus Dei et qu'elle a l'impression de les avoir perdus. Escriva lui avait alors répondu Ç je ne parle pas à des poules couveuses103 È.

§ II - Activités bénévoles des numéraires

Les numéraires sont en quelque sorte le fer de lance de l'organisation, portés par la croyance qu'ils ont été élus par Dieu pour suivre ce chemin, le plus dur, vers la Sainteté. Ils sont envoyés par les hauts responsables de l'Îuvre pour réaliser différentes activités d'apostolat, souvent à l'étranger, ou dans d'autres villes que la leur, dans le but de diffuser les valeurs de l'Opus Dei. Leur public privilégié est d'une part les groupes sociaux qui présentent le profil idéal pour l'organisation : des gens appartenant à un milieu social assez élevé, bien éduqués et croyants. Mais les activités des numéraires sont également dirigées vers les plus faibles, qui sont les plus pauvres, ou les groupes au niveau social précaire, la plupart du temps peu éduqués. Ceux-là sont visés dans le but de les convertir à la vision du monde de l'Îuvre, et d'en faire une sorte de vitrine sociale, montrant au monde que l'Opus Dei s'occupe des plus défavorisés et a une activité dans les quartiers pauvres.

Dans les centres de l'Opus Dei, la plupart des numéraires ont des actions sociales, au moins une fois par semaine, souvent plus. Ils peuvent aller donner des cours de catéchisme dans des quartiers défavorisés comme La Pintana, ou Conchal', comme le fo nt les résidentes de Araucar'a, une résidence étudiante dirigée par l'Îuvre. D'autres organisent des conférences bénévoles dans ces quartiers, à propos de la religion, de la relation mari femme, ou encore de l'application au travail. Certains numéraires sont même envoyés pour aider les familles de milieux sociaux défavorisés, par exemple pour assurer un soutien scolaire dans certaines écoles.

L'Opus Dei rencontre un écho trés favorable dans ces milieux, car ils s'adressent a priori aux plus faibles, ceux qui auraient justement besoin de se raccrocher à quelque chose, à un systéme de valeurs, alors que les problémes à affronter ne sont pas

103 ESCOBAR, Jaime, article précité, p 3

mineurs. Entre trafic de drogues, alcoolisme, précarité des habitats, les Ç poblaciones È de Santiago ne représentent pas l'avenir rêvé de ces familles, qui luttent pour en sortir. C'est donc un soulagement pour eux de se sentir encadrés par des gens sürs d'eux, guidés, semble-t-il, par la volonté de Dieu.

Certaines personnes se montrent en effet plus vulnérables que d'autres, et plus perméables à la rhétorique des membres de l'Îuvre. C'est en effet le seul mouvement religieux qui promet la sainteté à toute personne qui croit en Dieu avec ferveur et qui travaille avec application tout au long de sa vie, en élevant bien ses enfants, dans un ménage dévot et respectueux des valeurs chrétiennes. Ce type de discours représente l'espoir pour de pauvres gens qui ont travaillé dur toute leur vie et se raccrochent à Dieu, qui est leur seul soutien moral devant les problémes et les revers de la vie. Il est alors trés facile pour les numéraires, dans la position dans laquelle ils se trouvent, de donner l'exemple d'une vie heureuse et bien remplie, transcendée par Dieu à tous les moments de la journée.

Selon le pére Comblin, Belge, Ç le Chilien est un militaire virtuel. Il aime la discipline, l'ordre, l'organisation. C'est un terrain trés favorable pour la consolidation de l'Opus Dei104 È. Il continue Ç J'ai lu le Chemin, et j'ai l'impression que ce n'est pas un livre chrétien. Je crois que, apparemment, Escriva n'a jamais rien compris au christianisme, dans lequel justement l'essentiel est l'amour pour son prochain et pas la promotion personnelle105 È. Effectivement, l'Îuvre souligne en priorité la destinée personnelle, et la charité n'est pas mise en avant comme une obligation chrétienne.

Dans ces quartiers, les numéraires ont pour but de faire entrer les femmes dans l'organisation comme numéraires auxiliaires, et le recrutement est effectivement trés efficacement organisé par le biais de ces activités bénévoles. Pour beaucoup d'autres familles touchées d'une maniére ou d'une autre par les membres de l'Îuvre, l'Opus Dei passe du statut d'une organisation secrete et inconnue à une institution chrétienne et charitable. Cette évolution lui procure une publicité enviable dans des milieux encore trés majoritairement chrétiens et pratiquants.

Par ailleurs, pour beaucoup de numéraires, les activités d'apostolat se dirigent vers un autre type de public: celui des quartiers riches, dans lequel l'organisation recrute ses futurs membres. Coni Rivas nous a déclaré, pour sa part n'avoir jamais fait Ç cracher È personne, comme ils disent (le terme en espagnol est Ç pitar È), c'est à dire qu'elle n'a encore amené aucune de ses relations à entrer dans l'Îuvre, mais elle

104 MONCKEBERG, Maria Olivia, ouvrage précité, p 249

105 MONCKEBERG, Maria Olivia, ouvrage précité, p 250à

donne des cours de valeurs et de catéchisme à l'université Catholique oü elle étudie le droit. Durant une heure par semaine, elle explique à ses élèves quelle est finalement sa vision des valeurs chrétiennes, en s'inspirant de textes religieux, souvent écrits par Msg Escriva de Balaguer. Ses élèves sont des étudiantes catholiques proches du

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mouvement de l'Opus Dei, et qui en sont parfois membres .

Natalia Izquierdo donne également des cours de catéchisme, à la résidence Araucaria cette fois-ci. Cela présente également l'avantage de faire entrer les élèves dans un des centres éducatifs de l'Opus Dei, ou la transmission des valeurs est encore plus aisée. Ainsi, chaque mardi soir à 18h30, Natalia parle des valeurs chrétiennes à ses trois élèves, qui ont toutes son âge. L'une vient du Sud du Chili et est déjà membre surnuméraire de l'Opus Dei. Une autre étudie le marketing à l'université Catholique, ou Natalia étudie le droit, et la troisième est une amie de celle-ci, croisée par hasard, et qui est venue par curiosité puis restée. Les deux dernières sont donc de possibles vocations pour Natalia, qui espère éveiller chez elles l'amour qu'elle ressent elle-même pour le Fondateur de l'Îuvre et pour Dieu. Ç Je cherche à rapprocher les gens qui m'entourent de Dieu, surtout en montrant l'exemple, dit-elle, les gens voient que je suis

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heureuse en travaillant autant et en offrant mon travail à Dieu È.

En effet, il n'est pas malvenu de montrer aux Chiliens qui témoignent d'une grande réussite économique que Dieu ne leur tiendra pas rigueur de s'être détourné de la prière pour l'action et le travail bien fait. C'est cette dimension de l'Îuvre qui arrive à convaincre beaucoup de gens. Certains entrent dans l'organisation car ils s'y retrouvent complètement, mais d'autres lui font confiance pour l'éducation de leurs enfants, simplement parce que sa réputation de travail et de sérieux n'est plus à faire. Les numéraires ont donc pour tâche de diffuser cette image de l'organisation, en enseignant aux parents et aux enfants les préceptes de Msg Escriva de Balaguer.

Section II - Une forme d'éducation totale

Dirigés par les numéraires, qui ont acquis, dès le fondement de l'Îuvre, une supériorité implicite, les personnes touchées de près ou de loin par les institutions éducatives de l'organisation doivent se soumettre à une discipline sévère. Le rythme de

106 Voir annexe n° 10

107 Voir annexe n° 9

travail est soutenu, et les enfants trés encadrés, ce qu'apprécient beaucoup leurs parents.

§ I - Des résidences étudiantes très strictes

Il y a encore peu de résidences étudiantes de l'Îuvre au Chili. Pour l'instant, on en compte deux, toutes a Santiago. Araucar'a, dans la rue Ricardo de Lyon 1162, est la résidence des filles, et Alborada, dans la rue Pedro de Valdivia, celle des garcons. Toutes les deux sont situées a Providencia, un quartier central de la vile, assez aisé, situé a peu prés a mi-chemin entre les deux principaux campus universitaires de la vile, dans le centre, et a San Carlos de Apoquindo. Araucar'a appartient a la fondation Nocedal, et vaut a peu prés 1 650 000 dollars. Alborada appartient a une autre fondation. Les deux fonctionnent sur le même mode: elles accueillent de 15 a 30 étudiants par an, en pension complete. Ils viennent souvent d'autres régions du Chili, voire de l'étranger. A la résidence Araucar'a, durant l'année 2010, sur les trente résidentes, on comptait 22 étudiantes venues d'Amérique du Sud hors Chili, surtout d'Equateur, de Bolivie et du Pérou.

Les étudiants sont logés par deux, et prennent leur petit déjeuner et leur repas du soir a la résidence. Le repas du midi peut y être pris également. Si les étudiants sont en cours, ils peuvent emmener leur repas préparé par les cuisiniéres.

Tout le personnel travaillant dans la résidence fait partie de l'Îuvre. Le Directoire est composé d'un directeur, d'un adjoint et d'un secrétaire, tous les trois surnuméraires ou numéraires, et les numéraires auxiliaires s'occupent du ménage, des courses et de la cuisine. A Alborada, les numéraires auxiliaires ne doivent pas être vues par les hommes résidents. C'est pourquoi elles utilisent une entrée différente pour aller et venir dans la maison.

Dans les deux résidences, les régles sont assez strictes, et exposées aux futurs résidents des le moment de leur candidature. On leur demande, dans le formulaire d'inscription, de répondre a une série de questions trés personnelles, beaucoup plus détaillées que ce qui est normalement demandé a l'entrée dans une résidence étudiante. Le dossier a compléter ressemble plutôt a un dossier de candidature a une école particuliérement sélective, par exemple. On demande aux candidats quel est le dernier livre qu'ils ont lu et l'enseignement qu'ils en ont retiré, quels sujets d'actualité éveillent particuliérement leur intérêt, ou quels sont leurs loisirs. Ils doivent également décrire leur caractére, et faire une breve autobiographie. Les parents, quant a eux,

doivent remplir toute une série d'informations pratiques, et également expliquer pourquoi ils veulent que leur enfant entre à cette résidence, et ce qu'ils pensent qu'elle va lui apporter. Ces informations sont à compléter que l'enfant soit majeur ou mineur. Il n'est pas, selon les dires des numéraires qui habitent à Araucar'a, obligatoire pour les résidentes d'être catholiques, ni même croyantes. Mais en pratique, en 2010, toutes les résidentes que nous avons rencontrées étaient catholiques, même si aucune n'appartenait à l'Opus Dei. Elles ont dü, selon Natalia Izquierdo, faire preuve de leur attachement aux principes chrétiens lors de l'entrevue.

Le conseil de direction de chaque résidence examine les dossiers de candidature, et, s'il les estime convenables, convoque les candidats à une entrevue, oü il leur explique les régles de vie commune et les objectifs de la résidence, nous explique la directrice, Anastas'a Assimak--pulos.

Il y a peu de régles, mais elles sont intransigibles: les résidents vivent dans des chambres de deux personnes, sans télévision. Ils peuvent lire leurs magazines, leurs livres, mais pas regarder la télévision. Seul un poste est gardé sous clé et sorti uniquement pour les occasions spéciales. Les résidents doivent les quitter à 10h du matin au maximum, et revenir à la résidence à 22h, pour les filles, et 23h pour les garcons, en semaine, et 3h du matin pour les garcons le week-end. En ce qui concerne les filles, elles peuvent demander à prolonger leur permission jusqu'à 2h du matin durant le week-end, en en faisant la demande à la directrice. Les repas sont pris à heures fixes, et tous ensemble dans la salle à manger.

Le loyer coüte 275 000 pesos par mois (430€). Pour ce prix, les résidents sont nourris, logés et blanchis. Le ménage est également inclus.

L'infrastructure des deux résidences est parfaitement aménagée pour une vie d'étudiant studieux. Comme il est inscrit sur le site internet de la résidence Araucar'a «la maison offre toutes les conditions pour que les résidentes aient un rendement académique optimum»108.

La résidence Araucar'a compte, dans ses 1900 m2 et ses six étages, de grandes salles d'étude, communes, mais aussi des salles idividuelles, une bibliothéque trés complete, des salles informatiques avec accés à internet, le wi-fi partout dans le bâtiment, et des ateliers d'art plastique et d'architecture, ainsi qu'un salon de conférence d'une capacité de 200 personnes, et un cinéma avec un écran géant. Elle a l'aspect extérieur d'une maison francaise des années 1950, avec ses solides

108 www.residenciaaraucaria.cl

constructions, ses balustrades et ses petites fenêtres. Il n'y a pas d'écriteau sur le mur d'enceinte, la grille est couverte de lierre et le jardin tellement grand qu'on apercoit à peine la maison à travers la végétation. Les fenêtres sont toutes cachées par des rideaux d'un épais tissu blanc.

Des anges, des gravures de la Vierge et d'autres figurines d'ornement décorent les murs, et une petite table à l'entrée expose des dépliants sur l'Opus Dei et des écrits de Msg Escriva, dont le portrait est accroché dans toutes les pièces de la résidence, alors qu'à Alborada, un cadre avec son portrait est pendu au dessus d'une relique en bronze argenté contenant un petit bout d'une de ses molaires, dans l'oratoire. Le culte de San Josemar'a est partout.

Les directeurs accordent beaucoup d'importance à l'échange, car dans ces moments amicaux, il est plus facile pour les numéraires habitant sur place (environ 10 dans chaque résidence) d'influencer les résidents. C'est pourquoi chaque résidence comporte cinq ou six salons, confortables bien que vieillots, oü tout le monde se réunit après manger pour bavarder, apprendre à se conna»tre, ou se soutenir mutuellement. La solidarité est trés forte, selon Natalia Izquierdo, durant les périodes d'examens, etc. Quant à la formation religieuse et spirituelle, les résidents n'ont pas d'obligation mais peuvent assister à la messe tous les jours, à 7h30, avant d'aller en cours, et un prêtre est toujours à leur disposition. De plus, des cercles de réflexion et des retraits spirituels sont constamment organisés sur place. Les résidents qui le veulent peuvent y participer.

Les résidences mettent toujours un point d'honneur à pousser les étudiants à travailler, pour avoir les meilleurs résultats possibles. C'est pourquoi à Alborada, une fois par mois, les anciens résidents viennent faire de l'aide aux devoirs, dans leur matière majeure, pour aider les actuels résidents.

De plus, Alborada organise assez fréquemment des journées de travail intensif dans un centre de l'Opus Dei à l'extérieur de Santiago. Tous les résidents et leurs amis intéressés sont conviés. Durant ces journées, chacun étudie beaucoup, et des pauses sportives sont aménagées. Ces journées ont aussi pour but de repérer de potentiels futurs membres, car évidemment, pour le travail universitaire lui-même, ces déplacements ont peu d'intérêt.

Dans le même but d'éveiller l'intérêt des résidents, à Alborada, chaque mercredi soir, un invité illustre vient diner, et animen ensuite un débat sur des thèmes comme «La mort du cinéma engagé», ou encore «La politique budgétaire chilienne». Les

intervenants sont tous des membres de l'Opus Dei, qui peuvent être diplomates, chefs d'entreprises, ou encore professeurs d'université.

Par ailleurs, les maisons organisent beaucoup d'activités, pour garder occupés leurs résidents, qui doivent rester concentrés sur leurs études et sur les valeurs chrétiennes. Ainsi, ils peuvent participer avec les numéraires à des activités d'apostolat dans des quartiers défavorisés de Santiago, tous les samedis. Les numéraires d'Araucar'a en particulier donnent des cours de catéchisme aux enfants de la commune de Renca, pour les préparer aux sacrements. Pendant ce temps, les résidentes ont pour coutume d'organiser des jeux avec les enfants, de les faire dessiner, etc. Le dimanche, les numéraires, et les résidentes qui le désirent peuvent rendre visite aux personnes âgées des hospices alentours. Sinon, les résidents peuvent, pendant l'hiver ou l'été, accompagner les numéraires, qui réalisent des travaux de bénévolat dans d'autres villes du pays, comme en 2010 à Concepcion, après le tremblement de terre. Des activités plus récréatives sont également organisées, et Araucar'a comme Alborada mettent l'accent sur l'atmosphère familiale des résidences, oü l'anniversaire de chaque étudiant est célébré avec soin. C'est l'occasion pour lui d'inviter des amis de l'extérieur, amis qui pourraient également être intéressés par les valeurs transmises par l'Îuvre.

Le jour des parents est un jour portes ouvertes pour les parents des résidents, pendant lequel chacun montre ses talents de danse, chant ou encore de théâtre, pour que les parents soient bien convaincus que leurs enfants s'amusent beaucoup à la résidence. Effectivement, toutes les résidentes avec lesquelles nous nous sommes entretenues sont trés contentes d'habiter à Araucar'a. Elles ont beaucoup d'affection pour les numéraires qui vivent avec elles et pour le personnel de direction. En revanche, elles ne connaissent pas le nom de leurs numéraires auxiliaires, qui savent rester totalement anonymes.

Pour l'instant, il n'existe pas d'autres résidences étudiantes au Chili, mais le concept est appelé à se développer. En effet, les parents apprécient beaucoup ce mode de logement pour leurs enfants, souvent lors de leur première année loin du foyer parental. Les savoir encadrés par une organisation religieuse les rassure, et même les étudiants à qui nous avons parlé nous avouent être ravis de l'ambiance studieuse et familiale qui règne dans les résidences.

Coni Rivas avait habité à Araucar'a pendant un an après son arrivée à Santiago pour étudier. Cette même année, elle a demandé à intégrer l'organisation comme numéraire, et ce n'est pas un cas isolé.

L'exemple que donnent les numéraires qui logent dans ces résidences est contagieux, et l'équipe de direction est toujours là pour recevoir les confidences, les doutes d'un étudiant, et pour y répondre en lui conseillant de méditer telle ou telle maxime de San Josemar'a.

§ II - Un rythme de travail soutenu

Les collèges qui sont des Ïuvres corporatives de l'Opus Dei, ceux qui appartiennent à la SEDUC, à la fondation Nocedal ou aux autres fondations chiliennes, suivent tous exactement la même discipline et les mêmes méthodes de travail. Le rythme y est soutenu, et le niveau, excellent.

Mais ces atouts ne sont pour l'Îuvre que le moyen de diffuser ses valeurs et de continuer sa mission d'apostolat. Le recrutement ne se fait pas de manière violente, mais subtil, et sur le long terme, mais le processus est le même: dans ces collèges, dès l'entrée, les élèves qui ont le profil requis deviennent immédiatement le centre de toutes les attentions, et les invitations à participer à tel club de jeunes, ou à tel cercle de réflexion pleuvent. Dans le même temps, les professeurs diffusent un système de valeurs propre à l'institution, qui dans le cas de l'Îuvre, comprend surtout l'acharnement au travail, la rigueur et l'obéissance.

Dans ces écoles, pas question de décider seul les livres que l'on veut consulter, les émissions de télévision que l'on veut regarder. L'excellent niveau de tous ces établissements est basé, selon ses responsables, sur cette éthique du travail, développée par San Josemar'a, et également sur la qualité des infrastructures, qui en font les écoles les mieux agencées et possédant le meilleur équipement technique du Chili, qu'elles soient situées dans les quartiers riches ou pauvres de la capitale. Selon Msg Escriva, l'excellence des bâtiments doit permettre l'excellence des études.

L'Opus Dei semble ainsi offrir une très bonne éducation, prometteuse d'un bel avenir pour ses élèves, ce qui convainc sans peine les parents. Evidemment, tout le personnel des écoles s'emploie à transmettre les valeurs de l'Îuvre, par le biais d'un rythme de travail très soutenu.

Sur le site internet de la SEDUC, un des points de la mission de ces écoles est précisément l'amour du travail: Ç Nous cherchons spécialement à développer chez chacun l'amour de l'étude et du travail, qui constitue pour les chrétiens le chemin ordinaire de leur sanctification et de leur action apostolique. Nous cherchons à faire en

sorte que les élèves voient leurs études personnelles dans cette perspective 109È. Ainsi, les élèves doive nt faire Ïuvre d'apostolat en donnant l'exemple dans leurs études et leur travail, après avoir été convertis à la vision du monde du fondateur de l'Îuvre.

Selon la fondation SEDUC, l'exigence au travail est toujours raisonnable, humaine. Il n'y a pas de manu militari, et le traitement de l'élève serait toujours personnel, selon les caractéristiques de chaque enfant. Les exigences, selon eux, doivent être raisonnables, justes et toujours personnelles, en adéquation avec les différences de caractère.

La journée scolaire est très longue dans ces établissements. Alors que normalement au Chili, les élèves ont cours ou bien toute la matinée de 9h jusqu'à 14h, ou bien toute l'après -midi de 12h à 17h, dans les établissements gérés par l'Îuvre, les élèves %ogés de 3 à 14 ans doivent arriver à 8h30 et repartent à 17h30 chez eux, quatre des cinq jours de la semaine. Ils ont une demi-journée de repos, qui peut être le mercredi ou le jeudi après les élèves 15 16 ans la 4 ème

-midi. Pour de et (équivalent de

et de la 3ème), les enseignements durent jusqu'à 18h30. Tous les élèves prennent leur petit-déjeuner et leur déjeuner sur place, mais ont cours toute la journée, et les récréations ne durent que dix minutes.

Selon Barbara G--mez, 27 ans, professeur à l'Almendral depuis quatre ans, l'enseignement est parfois dur pour les fillettes les plus jeunes, pourtant, elles s'habituent rapidement au rythme110.

Les restrictions portent aussi sur les loisirs des élèves. En effet, très peu de temps libre leur est laissé, sürement dans le but de les obliger à se concentrer uniquement sur leurs études et sur leurs cours de catéchisme. Les avis sont divergents parmi les élèves: certains disent qu'on les submerge d'exigences diverses, et qu'ils doivent passer leurs soirées à faire leurs devoirs. D'autres disent passer relativement peu de temps à travailler leurs cours, et déclarent avoir le temps de s'amuser ensuite. La directrice de l'Almendral déclare qu'en CP et CE1 (primero et segundo básico, les classes équivalentes), le temps de travail personnel par jour est prévu pour durer environ une demi heure. Ce temps passe à trois quarts d'heure en CE2 et CM1, puis à une heure par jour en CM2 et 6ème, et ainsi de suite. En 5ème4ème

, et 3ème, les élèves

passent environ une heure et demie à faire leurs devoirs tous les jours. En sortant de
l'école à 18h30, il ne leur reste effectivement plus de temps libre, ou très peu. Ce n'est

109 www.seduc.cl

110 Voir annexe n° 14

pas pour déplaire aux parents, qui ont ainsi le sentiment que leurs enfants préparent leur avenir studieusement.

La télévision, par exemple, est particulièrement discriminée par l'Opus Dei: accusée de tous les maux, entre autres d'encourager à la dépravation sexuelle, au vice, et à la paresse, on décourage les élèves de la regarder. Selon Barbara G--mez, quand un enfant demande à regarder la télévision, il faut lui demander tout d'abord quel programme il veut voir en particulier. ÇLes enfants qui regardent beaucoup la télévision ont une attention très dispersée, et moins d'imagination, alors que ceux qui ne la visionnent pas beaucoup imaginent plus et inventent des personnages 111È. Par la lecture, il est plus facile d'influencer les enfants, puisque certains livres leur sont recommandés, et facilement accessibles. Katixa Mellado ne regardait pas la télévision quand elle était numéraire, mais une fois, par curiosité, elle est allée voir des extraits d'une série à succès sur internet. Ç Je n'en revenais pas. Elisa avait mon %oge, elle allait à des fêtes, avait un petit copain, et paraissait aimer sa famille, réussir ses études, et être heureuse. Je me suis sentie pour une idiote 112

prise È. Effectivement, c'est tout un

système de valeurs qui reste étranger à tous les élèves de ces écoles, pour peu que les parents suivent les consignes qu'on leur dicte durant leurs cours de formation.

Sur le site de la SEDUC, on peut lire Ç la discipline tient une place importante dans la vie des écoles. Il s'agit de former des habitudes de vie commune et de respect113 È.

L'ambiance de ces écoles est également particulière: on y observe nombre de comportements louables, tels le respect très prononcé du professeur, un salaire honorable, l'obligation à la formation continue et la valorisation de son travail, ce qui n'est pas toujours le cas dans les écoles publiques chiliennes. Par ailleurs, l'Îuvre accorde beaucoup d'importance au travail en équipe du personnel éducatif et de la direction de l'école. La collaboration est efficace, voire tombe même dans l'excès, car les élèves sont surveillés par tous, et chaque membre de l'équipe se communique tous les éléments utiles pour comprendre l'enfant, et peut-être pour le convaincre des valeurs de l'Opus Dei. Le travail d'équipe est si intense que rapidement, les professeurs peuvent désigner la personne la plus proche de l'enfant, celle qui semble lui procurer le plus de confiance. Cette personne devient alors son ami et son tuteur officiel, et profite de la confiance de l'enfant qui l'écoute pour l'influencer et le guider.

111 Voir annexe n° 14

112 Voir annexe n° 1

113 www.seduc.cl

Quand on interroge les anciens éléves, tous disent qu'étudier dans ces écoles ou vivre dans ces résidences leur a donné une voie à suivre, toute tracée, et que s'ils ne la suivent pas, ils en sont conscients et se sentent coupables. Cette trace que les établissements éducatifs dirigés par l'Opus Dei laissent est palpable chez toutes les personnes interviewées.

Section III - Maintenir la réputation de l'Opus Dei

C'est dans son attitude envers les comportements qu'elle réprouve que l'organisation recoit le plus de critiques. Les normes de comportement sont strictes, l'Îuvre cherchant à imposer à ses membres et à toute la société des valeurs extérieures.

§ I - Des normes de comportement très rigoureuses dans l'éducation supérieure

Dans tous les établissements éducatifs de l'Îuvre, les mécanismes se ressemblent fortement, et la pression subie par tous les élèves, concernant le comportement à adopter, les valeurs à respecter, est la même partout.

Mais à l'université Los Andes, les éléves, qui ont tous plus de 18 ans, disent être surveillés comme dans une école catholique trés stricte, et traités comme des enfants en bas %oge114. En effet, le but n'est pas, contrairement à ce qu'affirmait San Josemar'a dans ses écrits, de conquérir sa liberté en acquérant des connaissances. Au contraire, les étudiants de Los Andes recoivent un enseignement formaté, délimité par les valeurs de l'Îuvre, et auquel ils doivent

se soumettre.

Maria Elena Larra'n, psychologue à Los Andes, confesse qu'elle était il y a encore quelques années pleine de préjugés envers l'Opus Dei, alors même qu'elle travaillait déjà à l'université. N'ayant pas recu de formation catholique à l'école, elle désapprouvait par avance le rTMle que jouait l'Îuvre dans l'éducation. D'ailleurs, quand sa fille postula à l'université Los Andes pour la première fois, celle-ci fut refusée, en partie à cause des préjugés de sa mere. Acceptée l'année suivante, la fille a par la suite incité la mere à se renseigner plus avant sur l'organisation, et, aprés quelques cercles de réflexion et retraits spirituels en leur compagnie, Mar'a Elena Larra'n demanda son

114 MONCKEBERG, Maria Olivia, ouvrage précité, p 549

intégration comme surnuméraire, en 1994. Depuis son entrée à l'Opus Dei, elle déclare avoir changé sa maniére de travailler. Elle s'intéresse maintenant également à la psychologie, à l'anthropologie. Mar'a Elena Larra'n défend maintenant activement la séparation des sexes à l'école. Selon elle, ca n'a rien à voir avec le cliché de la contamination sexuelle, trop répandu. Mais la volonté de l'organisation de donner à chacun une éducation spécialisée selon sa nature profonde et selon son rythme est

115

selon elle, tr és louable, car les filles murissent plus tTMt .

Mme Larra'n est un parfait exemple de l'efficacité du systéme normatif de l'Îuvre, qui choisit fréquemment de passer par les enfants pour influencer les parents. En quelques années, ce professeur a totalement changé sa vision de l'organisation, et en est devenue une des grandes promotrices. Elle ajoute parfaitement comprendre le refus de sa fille la première fois qu'elle avait candidaté, car il serait pénible pour l'Opus Dei de subir un groupe de parents d'éléves qui critiquent constamment l'organisation. C'est pourtant une des caractéristiques des universités d'être des lieux de débat et de liberté de parole.

Elle nous parle également de la propreté. En effet, c'est une valeur clé pour l'Îuvre, et à l'université Los Andes, chaque bâtiment a une ma»tresse de maison, qui a pour tâche d'éduquer les éléves sur le maintien de la propreté des salles de cours.

Rien de plus louable, en effet, et d'ailleurs, les éléves parlent en général des excellentes installations, de la propreté des locaux, de la bibliothéque incroyablement bien fournie, mais toutes leurs critiques portent sur les normes de comportement.

Alors que l'infrastructure et l'aspect académique sont trés positivement percus, les exagérations sur les maniéres de s'habiller, le manque d'organisations étudiantes et de possibilité de s'exprimer sont trés mal vus. Tous les éléves qui critiquent l'université ainsi ont d'ailleurs exprimé lors de l'enquête leur souhait de rester anonymes.

Concernant la maniére de s'habiller, par exemple, on ne peut que constater les restrictions imposées par l'organisation à l'université, qu'elles soient avouées ou cachées. Les uniformes des étudiantes en médecine font par exemple l'objet d'une grande préoccupation, surtout quand elles vont travailler à l'hTMpital San Bernardo, car elles doivent refléter une image absolument parfaite de l'Opus Dei. Leurs uniformes doivent donc couvrir les genoux, et remonter jusqu'au cou, fermés en col rond, avec des collants couleur chair et pas plus foncés, des chaussures sans aucune décoration

115MONCKEBERG, Maria Olivia, ouvrage précité, p 538

et bien sür sans talons. Une heure et demi de cours est consacrée à la révision des uniformes en début d'année, pour dissuader toutes fantaisies.

Consuelo L--pez nous confie par ailleurs qu'un jour, à la fin du cours, leur professeur leur conseille, malgré la chaleur, de bien veiller à ne pas porter de décolletés, ni de hauts trop transparents, et de ne pas laisser voir leurs débardeurs car elles avaient théologie juste après, et que leur professeur éta prêtre 116

cours

de it un .

En effet, ce n'est qu'en 1993 que les femmes de l'Îuvre ont obtenu l'autorisation de porter des pantalons. Aujourd'hui, les surnuméraires qui envoient leurs enfants à une école de l'Opus Dei les découragent toujours de porter des jupes courtes, des blouses transparentes ou encore trop de maquillage. L'apprentissage, en effet, ne se limite pas aux salles de classe. Les enfants répercutent ensuite dans leurs familles les normes acquises et intériorisées, bien que beaucoup s'en plaignent.

Effectivement, tous les étudiants avec qui nous nous sommes entretenus, qui n'appartiennent pas à l'Opus Dei, s'accordent à dire que quelque chose ne va pas dans l'université, une ambiance étrange, en lien avec l'omniprésence de la religion et de ces thèmes conservateurs, récurrents.

La constance des encouragements des professeurs, membres du clergé ou de l'équipe de direction pour visionner des vidéos de la vie de Msg Escriva, pour participer aux travaux bénévoles d'été, ou encore pour assister à un cercle de réflexion leur donne un sentiment de malaise persistant. Ç Il y a tout le temps des invitations, dit Consuelo L--pez, mais à côté, dès que l'on prend le risque, car c'en est un, de porter une jupe plus courte ou un short, on ne peut éviter le regard réprobateur des professeurs117. È

Ce témoignage concorde avec l'atmosphère générale qui règne dans les établissements de l'Îuvre. Par exemple, les membres de l'organisation vouvoient toujours les personnes extérieures à l'Îuvre. Ainsi nous étions nous-mêmes toujours vouvoyés, même dans une conversation avec une personne du même %oge, et de même condition. C'est ce qui se passe à l'université Los Andes. Les étudiants membres de l'Îuvre vouvoient leurs camarades, ce qui établit rapidement une sorte de distance entre eux. En général, les classes sont rapidement plus ou moins divisées entre membres de l'organisation et non membres, avec des exceptions quand les numéraires lient des amitiés qui servent leurs activités d'apostolat.

116 Voir annexe n° 5

117 Voir annexe n° 5

De même, chaque élève a un conseiller personnel, qui est lÕéquivalent universitaire des tuteurs des écoles. Ceux-ci les aident sÕils rencontrent un probleme pratique, administratif ou pédagogique. Ils sont responsables de petits groupes, avec qui ils organisent des petites reunions, et sont quasiment systématiquement des numéraires ou des surnuméraires. Pour Consuelo L--pez, cÕest une femme, très gentille, qui leur parle souvent des valeurs chrétiennes, et de toutes sortes de sujets dÕéthique et de pédagogie, puisque cÕest ce que Consuelo et ses camarades étudient, et elle lÕappelle même chez elle pour lui demander comment elle va quand elle est absente. Mais Consuelo nous dit cependant ne pas aimer dire quoi que ce soit qui aille à lÕencontre de ce que la conseillere affirme, dans le domaine des valeurs, etc, car elle nÕa pas envie dÕavoir des différends avec elle. Elle se contente donc dÕacquiescer et de se taire.

Par ailleurs, comme tous les numéraires, la conseillère de Consuelo répete à lÕenvie des phrases du Chemin, quÕelle sait par cÏur, comme tous les membres de lÕOpus Dei, mais qui ne trouvent aucun echo chez son groupe dÕétudiants.

Effectivement, tout est fait pour que les étudiants intériorisent les normes de comportement cheres à lÕÎuvre, et les reproduisent ensuite dans leur entourage et dans leur vie professionnelle.

§ II - La stigmatisation des esprits deviants

LÕOpus Dei, bien que sÕen defendant, adopte certains comportements rigides à lÕheure de sanctionner lÕindiscipline, dans ses rangs ou pas. LÕorganisation sanctionne à la moindre ÒerreurÓ de comportement de son public et de ses membres.

Le fait quÕil nÕexiste pas de federations dÕétudiants à lÕuniversité, ni de délégués dÕélèves, dans aucun des établissements éducatifs de lÕÎuvre le montre bien. On discourage, voire interdit aux étudiants de sÕorganiser pour défendre leurs droits, le principal étant quÕils suivent sagement les cours, sans cultiver leur esprit dÕopposition. Tout est fait, en effet, pour que ces établissements soient parfaitement organises, de telle maniere quÕil nÕy ait rien à redire sur leurs activités. Mais lÕOpus Dei interdit purement et simplement le regroupement dÕétudiants dans un groupe universitaire qui aurait pour but dÕaméliorer la vie sur le campus. Il existe toutefois quelques clubs de loisirs, parmi lesquels le club de trekking, dÕastronomie, ou encore de photo, dont le seul but est dÕorganiser des activités récréatives.

C'est pourquoi aucune défense n'a été organisée au sein de l'université lors de l'exclusion d'une éléve, Soledad Arze-Varas, en 1992. Celle-ci est en effet tombée enceinte alors qu'elle faisait une licence d'infirmerie. Non-mariée et ne voulant pas se fiancer, elle fut suspendue de ses études, «pour le temps que sa condition attenterait aux postulats de la morale chrétienne et de la foi catholique». L'étudiante a par la suite attaqué l'université en justice et obtenu sa réintégration aux cours, la décision de justice

118

affirmant que ses droits fondamentaux avaient été violés .

Dans ce cas, une grossesse en dehors du mariage correspond en effet à une violation de toutes les valeurs de l'Îuvre.

Encore plus polémique est l'histoire d'Eduardo Hidalgo, ancien éléve de l'université Los Andes, étudiant de philosophie, une histoire cachée par l'université, et par toutes les autorités de l'Opus Dei, tout comme par la majorité des medias chiliens.

Msg Escriva avait écrit «traite ton corps charitablement, mais pas avec plus de

119

charité que celle que tu n'en aurais avec un ennemi déloyal . C'est un précepte que tous les membres de l'Îuvre doivent appliquer, quand leur corps leur fait défaut, comme ils doivent supporter la douleur comme un don envoyé par Dieu. Mais cela s'applique-t-il aux non membres ?

Eduardo Hidalgo a effectivement été blessé en décembre 2008, durant un travail de bénévolat qu'il effectuait avec des numéraires à Coñaripe, dans la région du Maule, au Sud du Chili120. C'était un de ces séjours d'été caritatifs, ou les jeunes, quasiment tous des numéraires, et quelques «amis» invités par eux, exécutent des tâches sociales. Eduardo Hidalgo était donc un potentiel futur numéraire, il avait suivi plusieurs cercles de réflexion et avait même participé à un retrait spirituel prés de Santiago. De religion catholique, de famille pratiquante, il était trés intéressé par les activités de l'Îuvre à l`université et voulait s'en rapprocher.

Il a changé ses plans d'avenir maintenant qu'il a porté plainte contre l'université pour «dommages graves et action négligente des autorités». En effet, Eduardo Hidalgo est tombé de quatre metres de haut alors qu'il réparait le to»t d'une maison, ce qui a provoqué une lésion à la jambe droite, la perte de 20% de son audition et surtout une lésion à la colonne vertébrale, qui aurait nécessité une opération le plus tTMt possible.

118 www.esacademic.com

119 ESCRIVA DE BALAGUER, Josemar'a, ouvrage précité, maxime n°226

120 SCHONHERR, T--mas, Chileliberal, Ç Lo que esconde la Universidad de Los Andes È, 23 novembre 2009.

Au lieu d'emmener Eduardo à l'hôpital le plus proche, le prêtre Pablo Joannon, aumônier de l'université Los Andes et prêtre de l'Opus Dei, le photographiait alors que ses jambes tremblaient convulsivement sur le sol, et les numéraires riaient de la scène, selon le témoignage d'Eduardo Hidalgo. «Par la suite, ils m'ont photographié à l'hôpital de Coñaripe et chaque jour ensuite en différentes occasions. Quel était le sens de tout ca ?» ajoute-t-il. De plus, les responsables du camp de vacances ne le laissèrent pas retourner à Santiago, pour profiter d'une aide médicale spécialisée, et firent pression sur lui pour qu'il accepte de rester, en particulier en répétant au groupe de jeunes que l'accident n'était pas si grave. Le coordinateur des travaux sociaux Mauricio Figueroa ne préviendra d'ailleurs jamais la direction de l'université, et ce fut l'élève lui-même qui en informa le recteur.

Pendant plus d'une semaine, Eduardo devait donc se déplacer avec le groupe, alors que les numéraires devaient le porter pour le placer dans sa chaise roulante ou dans son sac de couchage, et l'emmenaient pour toutes les activités qu'ils faisaient, travaux sociaux, méditations ou repas, pensant peut-être que ca le distraierait de ses douleurs. Quand enfin ils rentrèrent à Santiago, selon le témoignage d'Eduardo «ils me laissèrent deux heures sur le parking de l'université, seul, sans même me donner un antidouleur, car selon les autorités, depuis le début, c'était Dieu qui me l'envoyait et que je devais l'accepter et le supporter». Mauricio Figueroa suspendit plus tard le traitement d'Eduardo, juste avant son opération de la colonne vertébrale. L'étudiant demande maintenant réparation pour «l'atteinte psychologique, morale et physique». «En plus d'avoir de bonnes notes, et d'avoir à une occasion majoré dans sa promotion, Eduardo faisait du VTT et sa vie a, sans aucun doute, radicalement changé», commente son avocat Estanislas Dufey.

Cette histoire ne fut jamais publiée dans les medias chiliens, alors que l'agence d'informations Orbe a travaillé dessus par le biais de T--mas Ignacio Schnherr. Evidemment, cette affaire n'est jamais sortie à la lumière du jour car les moyens de communication les plus important au Chili ne sont pas disposés à perdre un de leurs plus gros clients, l'université Los Andes, qui génère des millions de pesos en contrats et accords d'intérêt. Tout a donc été fait pour que les medias ne s'emparent pas de l'histoire, surtout en période d'inscriptions à l'université, selon le journaliste chargé de l'affaire.

La bourse attribuée à Eduardo Hidalgo à l'université a été suspendue de manière
indéfinie, sans raisons, et l'étudiant a perdu l'opportunité de profiter d'une bourse pour

étudier un an en France, et sa famille a beaucoup de mal à payer les coüteux traitements dont il a besoin.

Deux ans aprés les faits, on commence à parler de l'affaire dans différents journaux

122

chiliens, dont Mercurio 121

le et la Tercera , ce qui montre que le pouvoir de l'Opus Dei

n'est pas sans limites.

Le message est clair, chacun doit respecter les valeurs de l'organisation, même dans sa dimension la plus extreme et peu de place est laissée au libre-arbitre. Chacun doit faire ce qu'on lui ordonne, par le biais des préceptes de Msg Escriva de Balaguer. Un rebelle devient un ennemi de l'institution, ce qui justifie une campagne immédiate de diffamation. C'est ce qui est arrivé à Eduardo Hidalgo et à sa famille, qu'on accuse d'avoir inventé toute l'histoire pour soutirer de l'argent à l'université. Jadis proche de rejoindre l'Opus Dei, Eduardo dénonce aujourd'hui «un mensonge officiel», relayé par les plus hautes autorités de l'université, dont le directeur des études, Jaime Arrancib'a, qui est allé jusqu'à intervenir plusieurs fois sur la cha»ne de télévision Chilevision, démentant la version des faits de l'étudiant.

121 El Mercurio, Ç Por accidente, ex alumno demanda a su Universidad», 12 novembre 2009

122 La Tercera, Ç Ex estudiante presenta millonaria demanda contra universidad por accidente», 11 novembre 2009

Conclusion

Après avoir détaillé les différents aspects que prend l'activité éducative de l'Îuvre au Chili, nous sommes en mesure d'expliquer en partie le succès rencontré par l'organisation religieuse. Effectivement, l'Opus Dei a rencontré, dès le début de son entreprise éducative au Chili, en 1953, un accueil extrêmement favorable, auprès des différents milieux sociaux d'abord de la capitale, puis des régions.

Depuis lors, l'organisation n'a cessé de diversifier ses activités éducatives et de les étendre dans le pays, créant de nouvelles structures d'abord dans les grandes villes du Sud et du Nord, points de départ pour s'insérer ensuite dans le monde rural.

Il est certain que l'éducation offerte, autant dans les écoles qu'à l'université ou que dans les différentes associations ou résidences étudiantes, est d'un très bon niveau, certifié par les résultats aux examens nationaux d'une part, et par la facilité de l'insertion dans le monde du travail pour les élèves, d'autre part. En effet, l'Îuvre fait beaucoup d'efforts pour entretenir des liens étroits avec les milieux entrepreneuriaux, ce qui fournit de très bons débouchés aux élèves. Par ailleurs, ses propres établissements éducatifs représentent une très bonne option pour les futurs professeurs, massivement formés à l'université Los Andes.

D'autre part, l'Opus Dei bénéficie, gr%oce aux dons de ses membres, de fonds suffisants pour construire et faire fonctionner des établissements éducatifs bien au-dessus de la moyenne chilienne, et ne lésinent pas sur le matériel informatique, les salles de sport ou encore les équipements audiovisuels pour donner aux élèves un environnement idéal pour étudier. Les valeurs de l'Îuvre, travail acharné, application, perfectionnisme, obéissance, sont bien évidemment une autre raison de la réussite de cette mission d'éducation, à tous les étages de la pyramide.

De plus, l'Opus Dei représente une possibilité, pour les parents, de confier leurs enfants à des éducateurs qui les maintiendront dans ce qu'ils estiment le droit chemin, gr%oce à une discipline stricte et un encadrement soigneux de chaque élève. Pour ceux qui n'auraient pas eu la chance d'étudier sans l'Îuvre, les femmes au foyer par exemple, ou ceux qui n'auraient pas pu suivre leur scolarité dans de bonnes conditions, comme les enfants des quartiers pauvres, l'Opus Dei représente une solution à très bas coüt et néanmoins très enrichissante.

Par le biais de toutes ces activités, l'organisation réussit à diffuser son système de valeurs, celui de Monseigneur Escriva de Balaguer, dans toute la société. Par ailleurs, l'Opus Dei cherche, comme tout mouvement religieux minoritaire, à faire Ïuvre

d'apostolat et à convaincre de nouveaux membres. Ses activités d'éducation doivent donc servir ce but, en formant des individus aux valeurs de San Josemar'a, leur permettre de les diffuser à leur tour dans la société, voire, d'intégrer l'organisation en tant que numéraires ou surnuméraires.

Pourtant, même quand le public concerné par l'Ïuvre éducative de l'organisation n'adhére pas ensuite, ce qui est le cas de la majorité des anciens éléves, l'Opus Dei provoque une grande sympathie, du moins pour ses méthodes d'éducation, considérées comme une barriére contre les possibles dérives de l'enfant et de l'adolescent, et également comme une possibilité d'accéder à une bonne situation sociale et économique gr%oce au bon niveau d'études.

Dans le cas précis du Chili, cette évaluation semble pertinente car de grands pans de la population ne pourraient pas, si ces établissements de tous types n'existaient pas, profiter d'une offre éducative similaire. En effet, que ce soit à cause du coüt des études, de la généralisation de l'école pour tous encore trés récente, ou encore du milieu social auquel ces groupes appartiennent, recevoir une bonne éducation n'est pas encore donné à tous au Chili.

On peut d'ailleurs souvent sentir, dans les propos tenus par les éléves de ces établissements, tout comme par les jeunes ou moins jeunes qui fréquentent les structures éducatives de l'Opus Dei, une sorte de gratitude envers l'organisation, qui leur a, bien souvent, ouvert des possibilités de futur.

Pourtant, nous avons vu que l'action de l'Opus Dei ne se limite jamais à permettre une éducation académiquement impeccable, et qu'elle s'accompagne au contraire de tout un corpus de valeurs inséparables de l'organisation. Le Chili était seulement un pays stratégique pour développer l'organisation à l'étranger dans les années 1950, étant un pays à écrasante majorité catholique. Par la suite, la Dictature et ses normes strictes et conservatrices ont installé un climat favorable à la diffusion de ses activités éducatives. L'Îuvre répond, il est vrai, à une demande précise, qui n'est pas satisfaite par l'offre traditionnelle dans le secteur de l'éducation, autant en ce qui concerne les clubs pour enfants, par exemple, que les formations pour adultes.

On peut toutefois se demander si cette demande n'est pas proprement chilienne, et si la politique de l'Opus Dei peut fonctionner dans d'autres pays, par exemple en Europe, ou les structures éducatives sont trés différentes, tout comme la société elle- mê m e , plus éduquée, avec un niveau de vie globalement plus élevé.

Il est alors surprenant de constater qu'en France, l'Opus Dei conna»t un essor tout aussi surprenant. Il serait intéressant de mener plus loin les recherches, alors qu'on

peut constater qu'il y a déjà plusieurs écoles, collèges et lycées qui sont des Ïuvres corporatives de l'Opus Dei, comme le collège de garcons Hautefeuille, à Courbevole, inauguré en 1985, ou l'école hôtelière féminine de Dosnon, à Courvelles. L'organisation utilise en effet exactement le même schéma de développement de ses activités éducatives qu'au Chili et, probablement, le même que dans le reste des pays oü elle est implantée. En France, on trouve donc également des clubs de jeunesse, comme Fontneuve, pour garcons, et également des résidences universitaires, comme Les écoles, à Paris, pour filles.

Dans tous ces établissements, les valeurs transmises sont identiques, les normes de comportement sont les mêmes. Bien qu'au Chili, l'uniforme soit de rigueur dans toutes les écoles, ce n'est pas le cas en France. Pourtant, dans les écoles de l'Opus Dei, tous les élèves sont habillés à l'identique, et tous les établissements pratiquent également la séparation des sexes. On peut donc en conclure qu'il existe un public réceptif à ce genre de valeurs en France, un public dont seulement une infime partie est membre de l'Îuvre, car on sait que la France compte moins de 1 000 membres de l'organisation. C'est donc des raisons autres que l'affinité religieuse qui pousse les parents à faire confiance à l'Îuvre pour éduquer leurs enfants. Ces raisons sont donc à chercher du côté des valeurs de travail transmises, ainsi que de l'enseignement lui-même, tout comme au Chili.

En définitive, au Chili comme en France, c'est donc moins la religion que l'ascétisme qui l'accompagne qui convainc et permet un développement de ces activités éducatives particulières.

ANNEXES

Annexe n°1 Rencontre Katixa Mellado, 12 juin 2010, 17h-18h30

-Comment en es-tu devenue numéraire?

-Depuis toute petite, j'allais aux clubs OD, avec mes 7 frères et sÏurs. Ma mère est surnuméraire, mariée à un catholique pas OD, mais tolérant envers leurs pratiques.

Ma mère maintenant donne des cours de théologie à l'université Los Andes, mais avait avant renoncé à son travail pour s'occuper de ses 8 enfants.

Pendant mon enfance et adolescence, j'ai été par périodes proche ou éloignée de l'OD. Parfois je m'y ennuyais beaucoup, et j'au surtout eu un moment de rejet fort, à cause de tout ce que je voyais atour de moi : je ne pouvais pas accepter qu'il y ait tant de misère sur Terre et que Dieu n'y fasse rien.

Finalement, je suis entrée à l'OD à 16 ans et demi, très jeune!

-Mais tu n'y es pas restée trés longtemps, pourquoi ?

-J'y suis restée 5 ans, et j'en suis sortie en novembre 2008, mais je voulais sortir depuis avril.

Je me suis apercue que ca ne me convenait pas. Pour beaucoup de choses. Je supportais pas de demander la permission pour tout, tout l e tps, par exemple quand je voulais m'acheter un habit parce que je le trouvais joli et pas seulement si j'en avais besoin. J'avis l'impression de manquer de liberté, j'étais fatiguée de devoir me lever tTMt tous les jours.

Je voyais mes parents environ une fois tous les deux mois, à partir de la rentrée à l'université. Avant, j'habitais chez eux. Et surtout, je n'aimais pas être poussée à l'apostolat, toujours. M'entendre dire que je devais Ç entrer È des gens dans l'Ïuvre. Je pense que normalement, quelqu'un d'heureux entre les gens tout seul, sans se forcer. Et je m'étais rendue compte que Dieu ne voulait pas me voir malheureuse dans quelque chose qui ne me convenait pas.

Ma sÏur, numéraire pendant plusieurs années aussi, est sortie en 2008, et est maintenant coopératrice, elle donne des classes dans une des maisons de l'OD et en est très heureuse.

-Non pas du tout, je maintiens toujours une distance. Imagine, aprés la rupture avec ton petit ami, tu ne peux pas aller prendre le thé chez ton ex belle mere!

De toutes mes anciennes amies, qui ont toutes des relations avec l'OD bien sür, la plupart me parlent toujours, sont gentilles avec moi, et même m'ont déjà invité à des cercles de réflexion, mais je n'y suis pas allée. Quelques unes m'ont completement tourné le dos, comme si j'étais maintenant inférieure, comme si j'avais décu.

-Quelle est ta position actuelle envers l'OD?

-Je les soutiens toujours, je trouve que l'organisation est trés bonne, même si bien sur il y a des problémes, que j'ai constatés petit a petit.

En tout cas, j'ai eu beaucoup de mal à retrouver une vie normale aprés ma sortie, j'ai eu tellement de mal à m'habituer à avoir des relations avec un groupe mixte au début. J'ai mis des années à pouvoir être amie avec un homme, je ne savais tout simplement pas comment me comporter.

-Comment vois tu ton futur maintenant?

-Je pense que mon futur est de fonder une famille, d'avoir beaucoup d'enfants.

-Que penses tu des clubs de jeunes de l'OD?

-J'admets que quasiment tous les petits qui fréquentent ces clubs jeunes, finissent par intégrer l'organisation. Les promenades à la montagne, séjours à la mer etc, sont géniaux, et on t'inculque des valeurs petit à petit.

-Et l'université Los Andes, oU tu étudies ?

-Evidemment, il y a une présence écrasante des membres de l'OD parmi les directeurs, les chefs de section mais pas forcément les professeurs, car ils sont bien payés. Dans les cours de commerce que je suis, je ne crois pas qu'il y ait beaucoup d'influence sur la matière, à l'inverse de cours de philo, etc. dans tous les cas, l'université est trés bonne, le niveau est excellent et l'infrastructure vraiment exceptionnelle. C'est pareil pour les écoles de l'OD.

-Est-ce que tu regardais la télé vision quand tu étais numéraire?

-Bien sür que non, c'est totalement interdit? Mais une fois, j'avais entendu parler des
éléves de mon cours à l'université. Elles parlaient d'une série télé, Ç Donde está
Elisa? È. (Une série qui a passionné tout le Chili durant toute sa diffusion). J'étais allée

voir sur internet des extraits, en cachette. Je nÕen revenais pas. Elisa avait mon %oge, elle allait à des fêtes, avait un petit copain, et paraissait aimer sa famille, réussir ses etudes, et etre heureuse. Je me suis sentie prise pour une idiote. A ce moment, je pensais déjà à sortir, et ga nÕa fait que renforcer ma determination.

-Quelle est ton opinion sur ton parcours, maintenant que tu es sortie de l'organisation ? -Je ne regretterai jamais de lÕavoir fait, car sinon jÕaurais toujours eu l doute, et le regret de ne pas avoir suivi Dieu quand il mÕappelait.

Annexe n°2 Entrevue Marcela Said Mercredi 14 avril 11h-13h

-Ca a été dur de réaliser le reportage?

-J'ai commencé les recherches en 2002, et sorti le documentaire en 2007: ce furent 5 ans de travail car il a été trés dur d'entrer dans l'Ïuvre, j'ai dü négocier des mois pour filmer certains bouts de scène. Ils ont, comme toute secte, des endroits publics qu'ils montrent pour souligner que tout va bien, mais il est trés difficile d'aller plus loin.

-Que peux-tu me dire à propos des livres sélectionnés?

-Pour certains livres interdits, il y a des résumés tout prêts et déjà remodelés.

Pour les carriéres de médecins, gynécologie, à l'université par exemple, les cours sont coupés, tronconnés selon les valeurs de l'OD. Cela donne un probléme trés grave car ils seront les professionnels de demain: ici ils interviennent dans la vie publique, et influencent notre vie à tous (ex d'un médecin seul à exercer dans le S du chili, qui refuse de donner pilule lendemain)

-Quelle serait ta définition des surnuméraires, apres tes recherches?

-C'est la partie Ç bonne È de l'OD, seulement des gens riches qui veulent le meilleur pour leurs enfants en général. Ils rêvent qu'ils deviennent numéraires sans savoir à quoi ils les envoient.

Ce sont eux qui apportent les sous, répandent la bonne image, ils sont la meilleure partie de l'OD

Ils sont convaincus que Dieu les a choisi pr faire le métier de la vierge

Ce sont des gens qui travaillent beaucoup, s'efforcent, mais une personne trés intelligente, selon moi, ne resterait pas à l'OD, Nous avons trop besoin de liberté

C'est pour ca qu'il n'y a pas de vrai philosophe ni d'artistes dans l'Ïuvre

-Que penses-tu du secret dans l'organisation ?

-L'OD est trés compartimenté, c'est un mode de fonctionnement hyper squizophrénique: tout le monde n'a pas la même information, l'information est compartimentée entre membres normaux et hiérarchie. Tout le monde est maintenu dans le secret et on les encourage à se taire: c'estÇ la discrétion È comme ils l'appellent. Par exemple, ils ne parlent pas de Ç vÏu È de chasteté, d'obéissance etc, mais de Ç promesse È : c'est la même chose!

Les numéraires se considérent comme des anges au milieu du monde, ils sont supérieurs aux autres, car ils ont été appelés par Dieu, et la hiérarchie est trés forte : on n'accepte pas n'importe qui!

L'OD a un magazine propre, dans lequel tous puisent les semi vérités qu'ils ont le droit de divulguer: quand on leur pose des questions qui remettent en cause d'OD, ils apportent tous la même réponse, sous forme d'histoire: ex pour la censure: ils répondent que le Pére, un jour, avait vu l'explication de la censure des livres: imaginez- vo us face à une multitude de petits flacons, vous voulez tous les essayer, mais vous ne savez pas si l'un deux contient du poison. UN connaisseur doit les trier pour vousÉ

Les numéraires sont occupés 24h/24, emploi du tps minuté, et pendant les vacances ne peuvent pas ne rien faire, peuvent faire des loisirs, du sport, pousser vers la perfection. Ont peur du tps libre car il donne le temps de réfléchir et dc un certain esprit critique. L'Ïuvre devient leur famille.

Elles peuvent inviter des gens à manger chez elles, mais le but est le prosélytisme: l'OD veut construire une soc hiérarchisée.

-Comment sont recrutés les jeunes numéraires?

-Ils viennent à 90% de familles surnuméraires, le reste, du recrutement dans les facs surtout.

Au début, ils deviennent numéraires comme ils seraient scouts, trés motivés, touchés par la gr%oce, et ce n'est que de nombreuses années aprés qu'ils commencent à se rendre compte de la vérité.

-Ton opinion sur le financement de l'oeuvre?

-L'OD a une facon trés machiavélique d'agir : ils recoivent leur argent de toute sorte d'individus, comme Claro par exemple, sans même se demander si c'est de l'argent propre, alors que ce n'est pas du tout pour sortir les gens de la pauvreté, mais pour construire la bibliothéque de Los Andes, par exempleÉ

-Que penses -tu des gens qui sortent de l'oeuvre?

-Les numéraires qui quittent l'Ïuvre sont détruits, ils ont subi un traumatisme trés important, il y a beaucoup de dépressions, des gens qui tombent dans la drogue... c'est trés dur pour eux, ils n'ont plus d'amis. Ils ont beaucoup de difficultés à se réhabituer à la vie extérieure, n'ont plus d'argent, plus l'habitude de s'occuper d'eux-mêmes, de gérer la solitude, et le temps libre. Ils ne savent pas non plus comment se comporter

avec lÕautre sexe, et beaucoup des ex numéraires sont pervers, il y a même des cas de viols, de harcelement sexuel etc.

10 ans apres, ils se sentent toujours coupables et pensent quÕils vont aller en enferÉ

En general, ils nÕosent même pas demander ce quÕil en sera de leur argent, et ne le revoient jamais, puisquÕils ont fait un testament en faveur de lÕOD apres 5ans dans lÕÏuvre)

LÕOD ne veut pas que les autres sachent ce qui se passe quand quelquÕun part. Un ex numéraire mÕa raconté avoir d0 partir à 6h du matin pour que les autres ne le voient pas, comme sÕil avait été envoyé quelque part.

Ils découvrent très tard quÕils se sont mentis à eux-mêmes. Mais ils voulaient juste trouver un sens à leur vie. Les femmes fidélisent leurs maris dans lÕÏuvre, il nÕya plus aucune possibilité pour eux de se refugier dans lÕadultère. De même, quand un enfant meure, il va au ciel : lÕexplication est beaucoup plus facile, plus simple à accepter. Et dÕune maniere generale, sÕil arrive quelque chose de mal, cÕest que Dieu le veut, donc la vie a un sens, et on peut continuer à vivre tranquillement, Dieu veille sur nous...

-Que sais-tu des clubs de jeunes ?

-Les enfants, des 6 ans, vont dans des clubs, à porte fermée. Ils sont recrutés à cTMté des écoles, par le porte à porte, ou des amis et relations. On propose aux meres des cours de dessin, de guitare ou de foot très bon marché, pour les occuper lÕapres-midi, sans mentionner que ce sont des organisations de lÕOD, car les associations portent un autre nom. Dans ces clubs, les enfants sont lentement embrigadés.

Dans la scene du documentaire o0 lÕon voit les petites filles, il y avait trois personnes qui me surveillaient derrière la camera, et jÕai mis un an à avoir lÕautorisation de filmer dans un de ces clubs.

-Qu'en est-il de Nocedal, d'Almendral, etc ?

-LÕOD a besoin dÕouvriers agricoles qui ne vont pas se rebeller, même peu payés. Dans un pays avec des differences sociales si marquees, il est bénéfique pour eux de se menager des sympathisants dans les categories pauvres de a population.

-Oui, les numéraires ont l'obligation de recruter, de donner des listes de personnes susceptibles d'entrer, chaque année, au jour de San José. Tous les numéraires en général donnent des cours de valeurs, de chrétienté. Ce sont des activités d'apostolat. Un des arguments pour attirer les futures numéraires auxiliaires est excessivement retors: on leur promet qu'on les enverra à l'étranger, perspective trés attrayante pour des jeunes femmes qui ne sont jamais sorties de Santiago.

-Que penses-tu de l'université Los Andes?

-Le créateur de l'OD était très narcissique: il savait que la faiblesse de l'OD résidait dans la communication: donc ils ont crée une trés bonne école de com munication à Pamplona, en Espagne, pour former leurs journalistes.

Effectivement, la créativité ne marche pas avec la contrainte: A l'université de los Andes, ils ont essayé de faire une école de cinéma: ils ont contacté tous les cinéastes du pays, tous ont refusé de travailler là bas, car il y aurait beaucoup de contraintes, qui empêchent la liberté totale de l'art. Donc ils ont fait une école de scénario et ont envoyé un numéraire étudier en Italie pour qu'il puisse dispenser des cours au Chili.

-Est-ce vrai que les numéraires peuvent être envoyés n'importe oU?

-Ils n'avouent jamais qu'ils sont Ç envoyés È. Un jeune que je connaissais, Jorgito, voulait aller à l'université Catholique, et a été envoyé à Concepci--n. On m'a dit qu'il voulait, para»t il, aller là bas, et on lui a dit que l'année suivante il serait à la catholique. L'année d'aprés il était à los Andes, avec une bourse. Et maintenant, il est à Jérusalem, et il para»t il qu'il a choisi la destination...

-Quelle est ton opinion sur les numéraires auxiliaires?

-A table, quand les numéraires sont servis, ils ne doivent pas les remercier, il parait qu'elles ne le veulent pas, car elles offrent leur travail à Dieu et le considèrent comme normal.

Almendral est une école crée parce qu'elle va leur servir: ils y forment des expertes en infirmerie et en cuisine!

L' OD est également en train de construire une clinique à Santiago, à San Carlos de Apoquindo., et aura besoin de salariés dociles.

Ces petites ne pourront jamais devenir numéraires car sont pauvres! et si elles le
veulent vraiment, elles pourront être numéraires Ç agregadas È, c'est à dire qu'elles
vivent chez elles, en général pour des cas trés particuliers, car l'OD ne veut pas

prendre en charge une numéraire qui ne lui rapportera pas plus qu'elle lui couteÉ C'est une vision trés utilitariste. De même qu'il leur faut certains profils bizarres d'artistes, de pseudo philosophes, pour l'image

-Que penses-tu des résidences d'étudiants ? Ce sont des lieux de prosélytisme?

-A araucaria, même si les résidentes ne sont pas OD et ne le deviennent pas, elles font une publicité enviable à l'OD, disant que ce sont des gens normaux mais excessivement accueillantsÉ L'ambiance est familiale, c'est une vitrine pr l'organisation.

Les numéraires sont forcées d'être sympathiques parce qu'elles vont aller au ciel. Elles sont en fait généreuses pour elles mêmes.

L'OD ne veut pas que tout le monde devienne membre, mais il veut répandre ses idées, valeurs.

-Vois-tu une évolution dans les méthodes de l'OD dans l'Histoire?

-Je pense que aujourd'hui, l'OD commence à changer ses méthodes: moi-même je n'ai recu que beaucoup de mails critiquant mon travail et contestant mes dires, mais ils ne m'ont pas diffamé, ils disent seulement

Annexe n°3 Carte des communes de Santiago

Annexe n°4 Entretien Damian Bettancourt Avila, fils de parents surnuméraires 21 avril 2010. 18h

Etudiant, 24 ans.

-Quelle école as-tu fréquenté ?

-J'étais à Tabancura, pendant toute ma scolarité. C'et un e école qui donne un enseignement de très bonne qualité. Les professeurs sont sérieux, exigeants, et le cadre est idéal.

-Est-ce que cÕest difficile dÕobtenir une place à Tabancura ?

-Je ne crois pas. Mes parents, au moins, n'ont pas eu besoin de lette de recommandation, alors que j'étais l'a»né de 8 enfants, et nous avons tous fréquenté le même établissement. Mais je crois que tous les enfants des familles de surnuméraires obtiennent d'office une place, en fait.

-Sais-tu sÕil existe un système de bours e ?

-Oui, il y en a un. Mais personne n'en parle, car la SEDUC ne veut pas susciter une demande exagérée.

-Tes frères et sÏurs sont-ils entrés dans lÕÎuvre ?

-Cecilia et Fernando sont numéraires, depuis quelques années, et Camila est surnuméraire. Les autres sont comme moi, catholiques, mais n'appartiennent pas à l'OEuvre.

Annexe n°5 Entretien avec Consuelo L--pez, 23 ans, étudiante en pédagogie à l'Université Los Andes.

12 avril 2010, 19h

-Que penses-tu de lÕenseignement à lÕuniversité Los An des ?

-Je ne suis absolument pas croyante, je viens d'une famille de tradition vaguement catholique, mais ce n'est pas très important pour nous. Alors je savais que j'allais avoir un peu de mal à m'habituer à cette université. Cette année je suis donc dans une classe de 22 personnes, et il y a je pense une majorité de membres de l'OEuvre. Il y a au moins quatre filles numéraires dans ma classe. Je l'ai appris à force de les entendre parler entre elles de leurs maisons, et de leurs directeurs de conscience, une personne qu'elles choisissent comme guide moral, avec qui elle s'entretiennent tous les jours, ne serait-ce que dix minutes, et à qui elles disent tout ce qu'elles pensent, et font.

-Et donc, tu penses quÕil y a une certaine modification des cours qui en découle ?

-Oui bien sir. Mon professeur de philosophie est surnuméraire. IL a passé deux séances à nous expliquer les théories de Saint Thomas d'Aquin, mais par contre, il ne s'est intéressé qu'à la théorie de l'analyse psychanalytique de Freud, sans exposer la moindre de ses théories sur la sexualité infantile, l'importance des rêves et du subconscient, en conseillant aux élèves qui souhaiteraient développer le sujet d'aller faire des recherches à la bibliothèque. Et il n'a même pas évoqué NietzscheÉ

-Pourquoi as-tu intégré cette université si tu nÕes pas croyante ?

-J'ai étudié les beaux arts à l'université Andrès Bello, une très bonne université privée et ai candidaté à l'université Catholique de Santiago, la meilleure du pays, pour y faire la fin de mon cursus, de pédagogie, obligatoire pour être professeur. J'ai été refusée, et suis donc entrée à Los Andes, parce que c'est la deuxième meilleure du pays pour ce cursus.

-Y a-t-il des normes de comportement propres à lÕuniversité ?

-Oh oui. Même si e lles ne sont pas très explicites parfois. Une fois, notre professeure nous a dit de ne pas porter de décolletés, ni de hauts trop transparents, alors que nous étions en plein été, car nous avions cours de théologie juste après, avec le prêtre. Et puis il y a notre tutrice. Elle est très gentille, elle nous parle tout le temps des valeurs chrétiennes, de la pédagogie, etc. et elle nous appelle même à la maison quand on est

absents, ou pour nous dire quelque chose dÕimportant. Mais honnetement, ce sont des conversations qui nÕont rien dÕargumentatives. On ne peut rien dire qui va à lÕencontre de ses arguments. Personne ne veut se la mettre à dos, donc on se tait et on acquiesce à toutes les citations du Chemin quÕelle nous recite par cÏur.

-Globalement, que penses-tu de l'ambiance de l'université ?

-LÕuniversité en elle-même est géniale. Les b%otiments sont impressionnants, il y a tout ce quÕon veut. Mais il y a une sorte dÕambiance genérale que je nÕaime pas du tout. CÕest comme si la religion envahissait tout, et les valeurs quÕon ne cesse de nous répéter sont tellement conservatricesÉ En plus, Il y a tout le temps des invitations à aller à tel club, tel retrait spirituel ou telle conference, mais à cTMte, des que lÕon prend le risque, car cÕen est un, de porter une jupe plus courte ou un short, on ne peut éviter le regard réprobateur des professeurs. On ne se sent pas très libres. Et on en pale beaucoup avec mes trois amies, qui sont comme moi agnostiques et se sentent mal ici.

Annexe n°6 Interview Maria José Traboldt, directrice de l'Almendral 23 mai 2010

-Que pouvez-vous me dire sur votre établissement en particulier, par rapport aux autres écoles de La Pintana?

-Selon moi, il y a d'autres bons établissements à La Pintana, je ne peux pas le nier. Ils ont eux aussi des professeurs de qualité, mais n'ont pas le côté humain, chaleureux que les écoles de Nocedal ont, et qui fait leur réputation.

-Comment êtes-vous arrivée à la direction de l'Almendral ?

-Je suis sortie de l'Université en 1999, j'ai fait un stage de spécialisation dans l'éducation des enfants handicapés, et un ami de la fondation Nocedal m'a offert ce poste. Je n'ai jamais été ennuyée par la présence de l'Opus Dei, au contraire, je trouve que les valeurs qu'il transmet sont trés bonnes. L'Opus Dei se préoccupe beaucoup des gens, l'organisation est chaleureuse, l'ambiance est familiale, et on s'intéresse vraiment aux enfants.

-Dans quelle mesure le personnel de l'école appartient-il à l'oeuvre? -Sur environ 80 salariés, seuls 10 ou 11 appartiennent à l'OD.

-Quelle est votre opinion sur la séparation des sexes à l'école ?

-Dans cette école, on recherche une formation intégrale dela personne, pas seulement dans l'éducation, donc n veut aussi donner aux filles la part de féminité qui leur correspond. Nous avons une matiére qui s'appelle «éducation de caractère et de l'affectivité». C'est une sorte de classe d'éducation sexuelle, qui est beaucoup plus facile à faire en présence d'un seul sexe. On leur enseigne comment être un bonne personne , comment le corps change, els drogues, les tribus urbainesÉ bien sür, nous promouvons la chasteté, et nous décourageons le préservatif. Ca fait partie des valeurs promues par l'oeuvre. Apparamment d'ailleurs, ca porteses fruits, puique nous n'avons qu'un taux de 2% de grossesses dans l'école, par an, alors qu'à San Bernardo, il y en a 25%.

Il est d'ailleurs plus facile pour les enfants de se concentrer sur leurs études quand il sont séparés.

Cela dit, jÕai été dans une école mixte et je nÕai eu aucun problème, on apprend mieux à partager avec lÕautre sexe. Cependant, les parents qui postulent disent souvent quÕils préfèrent la separation car il veulent éviter le bullying à leurs enfants.

-Quel est le contexte social des familles de lÕAlmendral ?

-La plupart des parents ont vécu une vie totalement différente, et leurs enfants, à 8 ans, sont souvent beaucoup plus cultivés quÕeux. A majorité des mères sont célibataires, les enfants élevés par les grand-parents, le spères en prison.. Peu de familles sont bien constituées, mais on insiste beaucoup sur le respect di) aux parents.

Annexe n°7 Entretien Elena Mu-oz, numeraire auxiliaire de 25 ans Entretien le 18 mars 2010

-Qu'est ce que tu étudies à Fontanar ?

-Je suis technicienne en gastronomie, je suis venue étudier la première fois durant deux semaines à Portezuelo, un lycée technique de l'Opus Dei à Valdivia, dans le Sud du Chili, qui était venu faire sa promotion dans mon école. Ensuite, j'ai continué ses études à Fontanar, et un an et demi après le début de mon cursus, j'ai demandé l'admission comme numéraire auxiliaire, à 19ans.

-Qu'en a pensé ton entourage ?

Mes parents sont des gens catholiques et très respectueux. Parfois ils ont du mal à comprendre le don total qu'implique ce chemin, mais ils savent que je suis heureuse dans mon travail d'auxiliaire. Tout se résume en une phrase : c'est servir par amour pour les gens. Ma récompense est que les personnes que je sers soient heureuses, qu'elles mangent bien, que le ménage soit bien fait. C'est ga qui me rend heureuse.

-Et comment trouves-tu l'ambiance en cours ?

-Dans tous ces cours, l'accueil est très sympathique, les professeurs aimables, et les cours sont intéressants.

Annexe n°8 Correspondance entre Marcela Said et Nicolas Ferrari

11 avril 2007

Hola Marcela, Àc--mo estás?.

Toe no me conoces, mi nombre es Nicolás Garrido y te escribo desde Chile. Me gustar'a y es como un anhelo personal, que ambos llegáramos a hablar un mismo lenguaje siempre y cuando comencemos y conversemos siempre hablando con la verdad. La verdad, que tengo muchos temas que me gustar'a comentarte. Ojalá que dentro de tu apretada agenda y de tu trabajo filmando el nuevo documental sobre el FPMR puedas conversar un poco conmigo. Te ofrezco un par de mails de conversaci--n.

(É) Sin embargo, en el documental (te lo digo muy humilde y ?amateurmente?) levantas y creas ?conclusiones? (ojo, conclusiones) que no son acertadas ni tampoco se acercan a la realidad. Primeramente, que lástima que lo hayas grabado hace tantos años atrás y no hayas logrado obtener un fiel reflejo de la realidad. Creo además que no es bueno estimada Marcela, darles a conocer todo lo negativo o quizás todo lo dudoso de la obra. (É) Marcela, en honor a la verdad, creo que falt-- un poquito de informaci--n. No me refiero a cuántas veces al d'a visitamos al Sant'simo o cuánto dinero entregamos a la fundaci--n. Eso nunca lo sabrás, porque cada cual ?vive su fe personalmente y no poeblicamente?. Creo entonces, que la informaci--n que falt-- publicar es la que habla sobre la gran calidad de empresarios de la obra que han ganado premios de responsabilidad social en Chile; sobre los 5 de los 10 mejores colegios de Chile son de la obra, sobre la UAndes que hoy por hoy es la cuarta mejor universidad de Chile, sobre Nocedal un Oasis entre la perdici--n, sobre la calidad de vida antes y después de las señoritas que egresan de Fontanar etc. (É) Te quiero decir además Marcela, que no es poder lo que tienen los miembros del Opues, sino un gran ?c'rculo de amigos?. C'rculo que cuesta mucho armarlo y afianzarlo. Pero que al fin y al cabo siempre están cuando mas se necesita. De hecho, te podrás imaginar como obtuve tu mail sin siquiera conocerte. (É) No quiero que lo tomes a mal, s--lo necesito darte mi opini--n y saber que es lo que opinas. Por eso te mando este mail, el cual espero y conf'o, sea solo para t'. Saludos Cordiales. NG

21 avril 2007

Marcela:

Creo y soy un convencido que simplemente por ser el Opus Dei un tema tan «provocador» haya generado algunos sentimientos de irracionalidad en tu trabajo.

ÀNo crees en la perfecci--n? ÀNo crees en la santidad - muy distinta a la santidad divina - que podr'amos alguna vez obtener todos los que estamos bautizados, as' como lo dicta el Concilio Vaticano II?. (É) Creo en lo perfecto que podemos ser como humanos y como hombres. Pero también sé que es imposible que se haga. Sin embargo, moriré tratando de que se logre. ÀC--mo? A través del Apostolado que d'a a d'a debemos hacer en nuestras vidas. Y no hablo de una «misi--n encubierta» o algo parecido. El Apostolado que nos pide el Señor que hagamos es un apostolado desde donde estemos, con quien estemos. Seamos ricos o pobres. Seamos empresarios o empleados. Lo más importante en la obra, es que como hombres li bres, seamos capaces de entregarle valor a nuestra vida, regalándoles vida a los demás.

Si todo lo anterior, significa que debamos ofrecer una actitud «paternalista» tal como la madre lo hace con su hijo, o la profesora con los alumnos, lo hago entonces con mucho gusto estimada Marcela.

(É)

Como siempre, este mail es solamente para t'.

Queda pendiente el café, para dentro de los pr--ximos d'as.

Estamos hablando.

Saludos Cordiales.

NG

Annexe n°9 Entrevue Natalia Izquierdo 06/05/2010 18h-19h30

Résidence Araucaria

Natalia (20ans) m'attend au salon, m'améne dans une salle commune dont elle ferme les portes (avec soin ?). Accueil trés chaleureux, 20 ans, numéraire depuis 4 mois.

Bien habillée, maquillée, bien coiffée, boucles d'oreille, trés jolie.

Elle m'accueille trés chaleureusement, ca fait longtemps qu'on ne s'est pas vues mais je l'ai appelé au moins 6 fois sans réponse, envoyé des textos, et laissé des messages vocauxÉ elle a répondu finalement alors que j'appelais d'un numéro inconnuÉ

Prétend quasiment ne plus se servir de son téléphone, et ne pas avoir de crédit.

-Comment vas-tu, depuis la dernière fois?

-Je n'ai jamais été aussi bien. Je suis plus heureuse chaque jour depuis que je suis entrée à l'OD.

-Parle-moi de ta famille, tu les vois souvent?

-Mes parents habitent à 1h30 de Santiago, dans un petit village. Je vis moi -même à Santiago avec un de mes fréres, mais je passe toute la journée au centre. Je le croise rapidement le soir, mais à partir de juin, j'habiterai au centre, je pense que je le verrai moins. Je vois assez souvent mes parents, mais ca va forcément changer quand j'habiterai au centre. Maintenant, je suis dans quelque chose de différent, forcément, je les verrai moins. J'ai déjà un frére qui est numéraire et habite dans un centre de l'OD, et moi, je rêve d'y emménager, je ne peux plus attendre!

-Ta famille est catholique?

-Oui bien sür, mes parents sont trés pratiquants. Je connaissais l'od depuis toute petite car ils en sont proches, mais je n`en faisais pas partie.

-Comment es-tu entrée à l'OD?

-Je suis entrée il y a 5 mois, six mois aprés avoir commencé à fréquenter la maison, à l'occasion de conférences, de cercles etc. J'ai tellement h%ote de venir habiter à Araucaria, c'est déjà tout comme ma maison ! j'y arrive le matin vers 7h, et ne repars jamais avant 22h.

-Qu'est ce que tu faisais avant d'entrer à l'OD?

-Pendant les vacances, j'aimais beaucoup aller dans le Sud. J'ai été serveuse à Puerto Varas l'été, et pour gagner de l'argent, je vendais des vêtements usés à la brocante aussi.

-Qu'est ce qui a changé pour toi maintenant que tu es numéraire?

-Depuis que je suis numéraire, j'ai l'impression de me réveiller tous les matins avec des papillons dans le ventre, comme quand on est amoureux. J'ai déjà été amoureuse avant, mais jamais rien d'aussi fort. L'amour est toujours risqué, on est toujours en situation instable, alors que l'amour de Dieu est sür, et il ne changera pas. Dieu est toujours à tes côtés, pour les moindres petites choses et tous ce que tu fais, tu le fais dans un but de don aux autres, tu te lèves le matin et c'est dur, mais tu le fais avec plaisir pour montrer l'exemple et comme pour offrir ce geste aux gens.

-Tu te sens plus sUre de toi, alors?

-Je n'ai plus peur d'échouer, de me tromper, parce que Dieu me trace le chemin. Si j'échoue à un examen par exemple, je sais que je devrais juste travailler plus dur dans l'avenir

-La responsabilité est moindre, alors?

-Pas du tout! Elle est bien plus grande au contraire, on doit montrer l'exemple aux autres, avoir une vie exemplaire ! c'est dur! gr%oce à l'exemple que je donne, mes amis doivent, j'espère, se rapprocher de Dieu (phrase sortie du Chemin)

-En faisant quoi?

-Comme dit Monseigneur Escriva, pour un apostolat moderne, une heure étude équivaut à une heure de prières (autre phrase de chemin) je dois donc étudier sans répit, toute la journée, et je le fais avec facilité, alors qu'avant, j'avais beaucoup de mal à me concentrer, car ce travail je l'offre à Dieu, à tous moments, et je peux l'o ffrir à quelqu'un et prier pour lui, car Dieu est toujours avec moi.

-Tu as une directrice de conscience, comme toutes les numéraires?

-Bien sür, la mienne s'appelle Sangel, elle est professeur à l'Université Los Andes, et
sous directrice à Araucaria. C'est par elle que je suis arrivée à la résidence d'ailleurs.

C'est une des professeurs de mon frère, qui me l'a présentée. Je peux tout lui dire, c'est la personne qui me conna»t le mieux au monde, mieux que mes parents. Elle peut lire en moi comme un livre ouvert.

-Est-ce que parfois, tu ne préfères pas te confier à quelquÕun dÕautre ?

-a m'est arrivé, mais je me suis toujours aperçu finalement que c'est Sangel qui m'aurait le mieux comprise et qu'elle savait toujours exactement quoi me direÉJe lui parle tous les jours, à un moment ou à un autre de la journée, même si c'est seulement 5 minutes, c'est obligatoire.

-As-tu des activités dÕapostolat spéciales ?

-Oui, je donne des cours de catéchisme chaque mardi soir à 18h30 à Araucaria. J'ai maintenant trois élèves, qui ont toutes mon %oge : l'une vient du Sud du pays, et est déjà membre de l'OD, surnuméraire. Une autre étude le marketing à l'université Catholique, o0 j'étudie le droit, et une amie de celle-ci, qu'on a croisé toutes les deux par hasard, et qui est venue par curiosité et est restée. Les deux dernières sont des possibles vocations...

Je cherche à rapprocher les gens qui m'entourent de Dieu, en montrant l'exemple surtout : les gens voient que je suis heureuse en travaillant autant, en offrant mon travail à dieu.

Annexe n°10 Entretien avec Coni Rivas

Lundi 12 avril 15h-16h

Etudiante à l'université Catholique de Santiago, numéraire.

-Comment es-tu arrivée à la résidence Araucaria?

-Je suis arrivée à Araucaria complétement par hasard, un ami m'avait donné les coordonnés. Je viens de Concepci--n, et mes parents avaient très peur de me laisser partir à Santiago pour étudier. Ils ont été enchantés par la résidence, quand ils l'ont visité il y a quatre ans. Mon pére dirige une petite entreprise dans le Sud, et avait tenu à m'envoyer à la meilleure université, l'université Catholique de Santiago.

-Ta famille est-elle croyante?

-Ma famille est trés catholique, mais moi-même je n'étais pas pratiquante. Avec un peu de chance, j'allais à la messe deux fois par mois.

-Qu'a tu pensé de la résidence, en arrivant?

-Je m'y suis directement sentie comme chez moi. J'ai par la suite demandé l'admission à l'Opus Dei un an aprés être arrivée à Araucaria. Puis, comme toujours, aprés avoir demandé l'admission, on passe un an dans le centre oü on l'a demandée, et j'ai ensuite été envoyée à San Carlos de Apoquindo, dans une maison avec 8 autres numéraires.

-Il y a beaucoup de résidentes d'Araucaria qui ont par la suite demandé leur admission?

-Non, pas du tout (elle s'empresse de démentir). Avant moi, cela faisait dix ans que ce n'était pas arrivé!

-Est-ce que tu as déjà fait entrer quelqu'un à l'Opus Dei, maintenant que tu es numéraire et que tu as un devoir d'apostolat?

-Non, je n'ai jamais fait Ç cracher È personne, mais je donne des clases de valeurs et de catéchisme à l'université Catholique.

-Pourquoi, selon toi, certaines personnes décident de quitter l'OD?

-Je suppose qu'ils doivent se rendre compte que ce n'est pas leur vocation.

-Je ne l'ai jamais vu chez personne, les seules personnes que j'ai connues et qui sont partis ont toujours des liens avec l'OD. Je pense que chacun peut partir quand il veut : Ç vive la libert é È est une des devises de l'OD.

Je comprends tes doutes, j'ai eu les mêmes doutes que toi au début, puis je me suis rendue compte une fois dedans que tout ce qu'on dit n'est pas vraiÉ

-Parle-moi de l'organisation des centres oü vous vivez?

-Dans chaque centre (casa) il y a une directrice, une sous directrice et une secrétaire. On ne confie jamais le pouvoir à une seule personne

-Que penses-tu faire plus tard ? vas-tu vivre au Chili?

-Aprés notre formation, l'OD peut nous envoyer n'importe oü au Chili, sans nous demander, mais pour nous envoyer à l'étranger, ils ont besoin de notre accord. On peut trés bien dire non ! et ils prennent soin de ne jamais perturber notre travail, car c'est trés important pour eux.

Aprés ces questions un peu dérangeantes, je devais revoir Coni deux semaines plus tard, chez elle. Ne m a plus jamais répondu ni au téléphone, ni sur internet.

Annexe n°11 Entretien Caren Hidalgo et Valerie Oveda, élèves à l'Almendral

Caren, 17 ans:

-On m'a dit que tous les pro fesseurs connaissaient personnellement tous les élèves ici, c'est vrai?

-Oui c'est vrai qu'ils connaissent tous notre nom.. ils nous traitent assez familiérement. Moi je suis arrivée à 7 ans à l'Almendral, alors que j'étais dans une école publique de la Pintana avant. C'est vrai que c'est trés différent ici. A Pablo Neruda (son ancienne école), je pense que j'étais une éléve parmi les autres, et trés souvent, même à la fin de l'année, les professeurs ne nous reconnaissaient toujours pas. Ici, ils s'inquiè tent pour nous quand on a l'air triste.

-Et la discipline, ici, c'est comment?

-C'est assez strict, les cours sont trés bons, je vois bien la différence quand je parle avec mes amis qui sont restés à Neruda. Les classes sont plus profondes, le niveau est plus élevé, c'est plus durÉ

-Tu connaissais l'OD avant d'entrer à l'école?

-Pas du tout, j'ai tout appris sur eux ici. Je suis catholique, je crois en Dieu et ma famille aussi, mais personne n'est de l'Îuvre.

Valerie, 17 ans:

-Moi je suis à l'Almendral depuis toute petite, depuis le début de ma scolarité, à `ouverture de l'école, en 1999. Mes parents voulaient que j'aille au moins dans le meilleur college, étant donné que la Pintana n'est pas vraiment le meilleur quartier pour étudier. C'est vrai que ici au moins, les professeurs portent l'uniforme, c'est plus juste. Aprés tout, ils font comme nous. Les professeurs sont aussi plus proches de nous.notre professeure déléguée est avec nous depuis nos 6 ans, elle nous conna»t trés bien, c'est une amie.

-Est-ce que tu es croyante?

-Je suis catholique, j'ai fait ma communion et ma confirmation à l'école. On nous le propose tous les ans. L'OD m'interesse mais je ne veux pas du tout y entrer.

Annexe n°12 Cours dispensé dans les colleges de l'Opus Dei Ç Une sexualité propre pour un amour heureux È

Appelés vers l'amour vrai : Tout homme est appelé à l'amour et à l'amitié, au don. La sexualité, la masculinité et la féminité sont des dons complémentaires qui ont comme fin intrinsèque l'amour comme donation et accueil, comme donner et recevoir.

L'amour vrai et la chasteté : la chasteté est l'énergie spirituelle qui libère l'amour de l'égo
·sme et de l'agressivité. Elle implique un apprentissage du contrôle de soi-même pour se donner.

La valeur éminente de la virginité et le sentiment de la vocation du mariage: la famille a un rôle décisif dans la naissance et le développement des vocations, la pudeur et la modestie, la juste intimité, l'auto domination, les parents modèles pour leurs enfants. (É)

III. Les phases principales du développement de l'enfant.

Les années de l'innocence: des 5 ans à la puberté, on vit une période de sérénité pendant laquelle on n'est pas perturbé par quelque information sexuelle inutile. Il faut surtout prévenir la violence sexuelle entre enfants.

La puberté: expliquer avec détail le développement de la masculinité et de a féminité dans sa dimension corporelle, psychologique, et spirituelle, de manière prudente et positive.

Montrer les faiblesses des conduites permissives et hédonistes.

L'adolescence et le projet de vie : développement du sujet, période de découverte de soi-même et de sa propre vocation personnelle. Les parents sont un modèle de conduite réel et attrayant. Aborder masturbation et vision égo
·ste de la sexualité. Homosexualité: distinguer les concepts de normalité/anormalité. Amitiés, relation amoureuse: un lien solide, prometteur et honnête.

Annexe n°13 Cours dispensé dans les écoles de l'Opus Dei Ç Amour AdolescenceÈ

(É) «Former le regard». Au garcon il convient de lui enseigner à surveiller ses yeux, pour apprendre à contempler la beauté de la nature féminine avec tendresse et pas avec sensialité. Il est difficile pour le garcon de voir sans regarder, sans fixer ses yeux sur un aspect particulier du corps de la femme, ce qui l'amène à considérer la femme seulement comme objet de plaisir. La beauté se contemple mais ne se touchje pas et ne se consomme pas.

La jeune fille aime être regardée, c'est pourquoi elle doit apprendre à réserver ce qui est intime à l'intimité. Ne pas suggérer pour attirer l'attention. Surveiller sa pudeur et la réserver pour un amour fidèle et fécond.

Questions des jeunes garcons à leurs parents, aux alentours des 8 ans : (É)

4. Les parents pensent-ils aux enfants avant de se séparer ?

< Le divorce est inhumain. Il tue une famille entière. La séparation ne résout rien, elle empire tout, et parfois définitivement. Et ce que Dieu a uni, aucun homme ne doit le séparer, pour quelque motif qu'il soit. È

(É)

7. Comment dire non quand elles nous touchent, nous frôlent, et font les coquettes?

< la passion amoureuse se nourrit plus de l'imagination que de la réalité, et ceux qui promeuvent la pornographie le savent bien. Il faut faire la distinction entre les filles avec qui on passe un mome nt et celles qui seront les amies de toujours. De nuit elles paraissent toutes diamants, mais de jour elles ne resplendissent pas toutes de bonté et de beauté. Et celle qui use de son corps pour provoquer ne mérite pas de s'appeler femme. Ne la prend pas comme compagnon de route, et ne l'accompagne même pas au coin de la rue, ou tu finiras mal. È

(É)

9. Quels sont les effets de la masturbation?

< Abuser de notre propre corps, qui est Temple de Dieu et ne nous appartient pas comme objet de plaisir, nous écarte de l'amour de Dieu, et de l'amour à la femme vue comme un objet. È

il est frequent que les mauvaises habitudes juveniles produisent des pathologies dans l'union sexuelle, comme l'ejaculation precoce È

(É)

Annexe n°14 Entretien Barbara Gómez, professeur à l'Almendral 27 ans.

-Comment êtes-vous arrivée dans cette école?

-Par hasard. Quelqu'un a transféré mon cv à l'école. Avant je travaillais dans des écoles pour handicapés. Ici on sent la différence, les éléves sont trés pauvres, vulnérables.

-Parlez-moi du rythme d'enseignement

-Ici, l'enseignement dure toute la journée, pour les petites c'est un rythme dur mais elles s'habituent. On entretient une communication directe avec les parents, les petites racontent tout trés facilement, elles sont trés proches de nous.

-Je peux vous demander si vous croyez en Dieu?

-Je suis catholique, et quand j'ai le temps je vais à la messe de l'école. J'aime bien cette ambiance, on ne se sent pas obligé.

-On m'a dit qu'on int erdisait aux enfants de regarder la télévision. C'est vrai?

-Elle incite à la dépravation sexuelle, au vice, à la paresse. On décourage les éléves de la regarder, on ne leur interdit pas. Quand un enfant demande à regarder la télévision, il faut d'abord lui demander quel programme en particulier il voudrait voir. Les enfants qui regardent beaucoup la télévision ont une attention trés dispersée, et moins

d'imagination, alors que ceux qui ne la visionnent pas beaucoup imaginent plus et inventent des personna ges.

BIBLIOGRAPHIE

OUVRAGES

- DEL CARMEN TAPIA, Mar'a, Tras el umbral, una vida en el Opus Dei, Ediciones Espa-a, 1994

- DEVOS, Bruno, La face cachée de lÕOpus Dei : documents secrets, des vérités qui dérangent , Presses de France, 2009

- DURKHEIM Emile, Les formes élémentaires de la vie religieuse, Les Presses universitaires de France, 1968, cinquième édition

- ESCRIVA DE BALAGUER, Josemar'a, Le Chemin, Le Laurier, 1993

- IBANEZ-MARTIN, José Antonio, La formation sociale et civique à lÕuniversité selon le fondateur de lÕOpus Dei , Promesa Centenario, 2002

- MONCKEBERG, Maria Olivia, El Imperio del Opus Dei en Chile, Ediciones B 2003 - SCHUFFENEGUER, Humberto Lagos, Chile y el mito del estado laico, Icthus, 2005 - WEBER, Max, LÕethique protestante et lÕesprit du capitalisme, Gallimard, 2003

ARTICLES

- LEHMAN, Carla, « Chile, un pais católico ? », Centro de estudios poeblicos, Puntos de referencia, novembre 2001, n°249

- « Los mejores colegios de Chile È, La Naci--n, 27 février 2006

- Rodrigo, Ç Sobre llevar o no a un ni-o a un colegio del Opus Dei », Site www.opuslibros.org article du 13 février 2003.

- ESCOBAR, Jaime, « La puissance de lÕOpus Dei », La situation de l'Eglise au Chili, DIAL Diffusion de l'information sur l'Amérique Latine n°2567,16 juin 2002

- PULIDO, Magdalena, « LÕavortement therapeutique : comment justifier un meurtre ? È, Hacer Familia , 18 décembre 2009, n°166

- « Colegio Nocedal de La Pintana gana concurso mundialÓ, El Mercurio, 20 avril 2009. - « US$ 16 millone s para construir dos colegios en una comuna pobre», El Mercurio, 27 mars 2010.

- « La garde blanche du Vatican », Le Monde Diplomatique, Septembre 1995

- « Alumnos de las Garzas ayudan a familias afectadas por el terremoto », Diario VI region, 2 juillet 2010.

- ESCRIVA DE BALAGUER, Josemar'a, Cr--nica, v, 1963.

- ESCOBAR, Jaime, Dial n°2567, ÇSituation de l'eglise au Chili È, 16 juin 2002

- SCHONHERR, T--mas, Chileliberal, ÇLo que esconde la Universidad de Los Andes È, 23 novembre 2009.

- Ç Por accidente, ex alumno demanda a su Universidad», El Mercurio, 12 novembre 2009

- Ç Ex estudiante presenta millonaria demanda contra universidad por accidente» , La Tercera, 11 novembre 2009

ARRETS

- Loi n° 18.985, de 1990, article 8.-modifiée par les Lois n1/4 19.721, de 2001 y n1/4 19.885, de 2003

- Jurisprudence de la Chambre des Lords Ç Gillick v West Norfolk and Wisbech Area Health Authority», 1985

DOCUMENTS AUDIOVISUELS

- SAID, Marcela, L'Opus Dei, une croisade silencieuse, documentaire, 2003

SITES INTERNET

www.seduc.cl : site de la fondation Seduc, qui dirige les collèges de l'Îuvre www.esacademic.com : site d'un journaliste critique des médias traditionnels www.odan.org: site d'opposants à l'Opus Dei crée par des ex membres et leurs familles.

www.residenciaaraucaria.cl: site de la résidence étudiante Araucaria www.fontanar.cl: Site de la fondation Fontanar, qui gère l'école technique du même nom

www.pintana.cl: site de la mairie de La Pintana

www.nocedal.cl: site de la fondation Nocedal, qui gère les deux écoles du quartier La Pintana

www.hacerfamilia.cl: site de la fondation Hacer Familia, membre de l'Îuvre www.uniandes.edu.co: site de l'Université Los Andes

www.tabancura.cl: site du collège Tabancura, de la fondation Seduc

TABLE DES MATIERES

Remerciements 3

Résumé 4

Sommaire 5

Introduction 6

Partie I - Entretenir et renouveler l'organisation 10

Chapitre I - Former les enfants de la grande famille de l'Opus Dei 10

Section I - Accompagner et éduquer la progéniture de l'organisation durant toute

son enfance 10

§ I - Les clubs et associations pour enfants et adolescents 11

§ II - Les colleges SEDUC, le potager des vocations 15

Section II - L'Îuvre de l'Université Los Andes 22

§ I - Des conditions d'étude optimales 22

§ II - Le régne de l'ordre moral chrétien 26

Section III - Les Fondations, garantes du bon fonctionnement de la Ç Mission

d'éducation È 30

§ I - Le financement de l'action éducative 30

§ II - Des formes d'éducation diverses et novatrices 34

Chapitre II - Eduquer et recruter le personnel de l'organisation 40

Section I - Ç tailler des joyaux dans de la pierre bruteÈ 40

§ I - La vitrine sociale de l'Opus Dei : une éducation exceptionnelle 40

§ II - Rallier les milieux sociaux défavorisés, un appui dans la société 44

Section II - Recruter les numéraires auxiliaires 47

§ I - Fontanar: former les numéraires auxiliaires de l'Opus Dei 47

§ II - Inculquer les valeurs de l'Opus Dei 52

Section III - Le paternalisme de l'organisation 55

§ I - Les structures de parrainage des enfants 56

§ II - Une vision hiérarchisée de la société 58

Partie II - Former la société à la manière de San José Maria 61

Chapitre I - L'extension des activités de l'Opus Dei à tous les milieux éducatifs, et tous les publics 62

Section I - S'imposer dans toutes les branches de l'éducation 62

§ I - Les écoles techniques 62

§ II - Carriéres et instituts à l'université Los Andes 67

Section II - Un guide à travers tous les %oges de la vie 72

§ I - Les activités et clubs pour enfants 72

§ II - Un encadrement personnalisé de la personne 75

Section III - Les formations de l'%oge adulte 78

§ I - Cours du soir pour les parents dans les écoles de la Prélature 78

§ II - Fontanar et les formations professionnelles pour adultes 81

Chapitre II - Transmettre les valeurs du Fondateur par tous les biais possibles

84

Section I - Faire partager la Ç bonne voie È 84

§ I - Les Ç invitationsÈ 84

§ II - Activités bénévoles des numéraires 87

Section II - Une forme d'éducation totale 89

§ I - Des résidences étudiantes trés strictes 90

§ II - Un rythme de travail soutenu 94

Section III - Maintenir la réputation de l'Opus Dei 97

§ I - Des normes de comportement trés rigoureuses dans l'éducation supérieure 97

§ II - La stigmatisation des esprits déviants 100

Conclusion Générale 104

Annexes 107

Annexe n°1 Rencontre Katixa Mellado 107

Annexe n°2 Entretien Marcela Sa
·d 110

Annexe n°3 Carte des communes de Santiago 115

Annexe n°4 Entretien Damian Bettancourt Avila 116

Annexe n°5 Entretien avec Consuelo L--pez 117

Annexe n°6 Interview Maria José Traboldt 119

Annexe n°7 Entretien Elena Muñoz 121

Annexe n°8 Correspondance entre Marcela Sa
·d et Nicolas Ferrari 122

Annexe n°9 Entretien Natalia Izquierdo 124

Annexe n°10 Entretien avec Coni Rivas 127

Annexe n°11 Entretien Caren Hidalgo et Valerie Oveda 129

Annexe n°12 Cours dispensé dans les colleges de l'Opus Dei Ç Une sexualité propre

pour un amour heureux È 130

Annexe n°13 Cours dispensé par l'Opus Dei Ç Amour Adolescence È 131

Annexe n°14 Entretien Barbara G--mez 133

Bibliographie 134

Table des matières 136






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"Il ne faut pas de tout pour faire un monde. Il faut du bonheur et rien d'autre"   Paul Eluard