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Les enfants en situation de rue du Sénégal. L'identité et la socialisation dans le processus de sortie de la rue

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par Corentin SIROU
Université Lumière Lyon 2 (ISPEF) - Master 1 sciences de l'éducation 2011
  

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CONCLUSION

Arrivée au terme de ce travail, nous en rappelons les éléments importants. D'abord, nous observons l'ambivalence des relations entre pairs. Elles peuvent ralentir la carrière, de part l'attirance qu'elles exercent et de part les promesses qu'elles émettent. Les liens forts peuvent maintenir un enfant dans une situation de rue. Mais ces relations peuvent également déclencher la fin de la carrière. La multiplication des contacts, l'insertion dans des réseaux permet de mettre à porter des enfants les opportunités de sortie qui, pour certains, faisaient l'objet d'une recherche, sous tendue par une projet post-rue mûri ou en construction. Ce sont parfois même les pairs qui directement agir, par solidarité, en faveur d'un enfant, et précipiter sa sortie de la rue.

Dans un deuxième temps, nous observons chez beaucoup des enfants que nous avons rencontré une distance significative avec la rue. Nous entendons par là que l'enfant, s'il est en situation de rue, ne se l'est pas complètement approprié. Certains refuse en effet certaines pratiques, notamment le vol, ou la mendicité. D'autres sont gênés par la pratique de ces activités, et y participent par nécessité, avec une certaine retenue, en essayant de s'y associer le moins possible. C'est enfin en refusant des étiquettes qu'ils jugent ne pas leurs correspondre ou stigmatisantes (« talibés », « fakhman ») que ces enfants vont marquer le degré limité de leurs appropriation de la rue, et des représentations qui lui sont associées. Cette distance que certains arrivent à conserver va alors constituer le terreaux sur lequel va naître, s'il n'existait pas déjà, un projet post-rue.

C'est souvent là que l'aide d'un adulte est nécessaire. Dans ces cas là, l'adulte qui croise le parcours de l'enfant, lorsqu'il fait preuve d'écoute et de bienveillance, va souvent être le chaînons manquant d'un parcours auquel l'enfant souhaite mettre un terme. D'une certaine manière, l'adulte est le moyen concluant par lequel la carrière va prendre fin. Il arrive aussi que la rencontre soit plus fortuite, mais néanmoins efficace, d'autant plus si l'enfant, sans forcement être porteur d'un projet post-rue bien défini, ressent une certaine insatisfaction quant à sa situation dans la rue. Dans d'autres cas enfin, les contacts avec les adultes vont jouer le rôle d'agitateur, par des conseils répétés, des pistes tracées, que les enfants vont alors suivre jusqu'à la sortie de la rue.

Ce sont là les résultats les plus significatifs que nous ayons obtenus. Ces derniers sont en effet le fruits d'une méthode dont il nous faut dire les limites. D'abord l'échantillon choisi oriente les résultats. Nous nous sommes entretenus avec des enfants sortis de la rue, et pour la plupart en réinsertion scolaire ou professionnelle. Nous avons donc mis de côté les enfants actuellement en situation de rue, qui sont sans nul doute porteurs de réponses différentes, car ils se trouvent encore

confrontés à la rue et aux attaches qui les y retiennent. Aussi, certaines redondances conceptuelles dans la grille d'analyse sont à retravailler, et cette dernière est d'avantage à mettre en cohérence avec le guide d'entretien. Cela passe notamment par proposer des questions permettant une saisie la plus achevée possible des dimensions que l'on souhaite analyser. Aussi, il a été difficile de mener de longs entretiens (au delà de 20 ou 25 minutes). Il sera donc important d'approfondir les entretiens, pour rentrer dans certains détails, et révéler d'autres éléments, avec d'avantage de finesse. Sur le plan pratique, il sera notamment nécessaire de multiplier les entretiens avec un même enfant ou adolescent, afin d'aborder chacun des thèmes souhaités dans toutes les dimensions recherchées.

Pour poursuivre et améliorer ce travail, il sera intéressant de se pencher sur une dimension intimement liée à l'identité personnel, à savoir le regard des adultes. En effet, Nous avons vu que l'image qui est renvoyé à l'enfant de lui-même est déterminante dans les choix qu'il peut faire dans sa carrière. Il est donc important de lier cette dimension du regard adulte ou institutionnel, au côté de celle de l'image de soi et des contacts avec les adultes. Nous venons également de le souligner, il est intéressant d'attacher une importance plus grande aux éléments qui freinent la carrière de l'enfant. Pour ce faire, une étude auprès des enfants actuellement en situation de rue permettra alors de saisir les facteurs et attaches qui empêchent l'enfant d'avancer vers la fin de sa carrière.

Au Sénégal, la situation des enfants en situation de rue est intolérable. Hier, après indépendance, ils constituaient une gène sociale. Aujourd'hui, le regard social s'est en quelque sorte habitué. « La gène vient maintenant de l'extérieur (de occident). Les discours des intellectuels font référence au passé et aux solidarités traditionnelles et communautaires, pour donner une image encore positive. Ces discours sont relativement de mauvaise foi. Preuve en est le nombre d'enfant des rues, signe de la désagrégation des structures parentales traditionnelles, et de l'absence de politique publique pour les enfants marginalisés »116. Si l'Etat se hasarde à de timides tentatives, notamment en condamnant quelques maîtres coraniques, parmi ceux qui exploitent et maltraitent leurs talibés, elles ne sont encore que mesures de communication, et les progrès enregistrés sont faibles, voir inexistants. Ces changements seraient de toute façon difficilement mesurables, tant le problème est vaste. Les efforts déployés par les personnes qui travaillent directement auprès de ces enfants sont remarquables, mais ne sont malheureusement qu'une goûte d'eau face à l'ampleur du problème et de ses multiples enracinements. Sans s'attaquer à ces causes, sans travailler sur les structures sociétales qui conduisent ces enfants à la rue, ce travail est malheureusement en grande partie vain, au Sénégal comme ailleurs.

116Camille Kuyu Mwissa, Parenté et Famille dans les cultures africaines, Paris, Karthala, 2005, p. 115

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