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Le marché des restes humains. Etude sur le fétichisme politique à  Libreville

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par Lionel Cédrick IKOGOU-RENAMY
Université Omar Bongo Libreville - Maà®trise en sociologie de la connaissance 2008
  

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3- Perspective de notre problématique du rapport entre fétichisme et politique

Une première remarque s'impose sur la problématique du rapport entre fétichisme/sorcellerie et politique : posée par tous nos prédécesseurs. Au fond, tous ces auteurs auront mis l'accent particulier sur la dimension économico-politique. Il faut souligner que tous les travaux que nous avons recensés, dans le cadre du lien entre la sorcellerie et le politique, sont marqués du sceau très remarquable du matérialisme historique de Karl MARX. « Toutes ces études viennent fustiger les rapports aussi bien de domination, des luttes de groupes et de génération, que les rapports d'exploitation d'un groupe par un autre groupe ».92

Néanmoins, rares sont les études sur le fétichisme politique comme conséquence des compétitions électorales que se livrent les hommes politiques dans la conquête et la consolidation du pouvoir politique au Gabon, particulièrement à Libreville. Il faut rappeler que Pierre BOURDIEU, s'agissant de la question du fétichisme politique, lançait déjà le concept dans ses travaux, en présentant la délégation du pouvoir entre le mandant (le peuple) et le mandataire (l'homme politique) où ces mandataires ou fétiches politiques que sont des gens, des choses, des êtres, qui semblent ne devoir qu'à eux-mêmes une existence que les agents sociaux leur ont donnée ; les mandants adorent leur propre créature.

Pour sa part, Joseph TONDA a pu se rendre compte que « de jour comme de nuit, les cimetières sont visités. Les ossements humains foisonnent. Et il semble que dans cette affaire-là, les parties génitales sont recherchées et que les « clitos » sont devenus des barres d'or ».93 De plus, les profanations des tombes deviennent le lot quotidien des Librevillois qui assistent à ces phénomènes sans pouvoir réagir en périodes électorales. L'exemple le plus significatif est celui de « la criminalisation populaire des

92 Davy Willis KOUMBI OVENGA, Mort et pouvoir. Violence politique et société initiatique Ndjembè en postcolonie gabonaise, Mémoire de Maîtrise en Sociologie, Libreville, UOB/FLSH, 2006, p.39.

93 Joseph TONDA, Fétichisme politique, fétichisme de la marchandise et criminalité électorale au Gabon op.cit., p.4, citant le Missamu, n°239 du 26 novembre 2001, p.3, le n°226 du 21 avril 2001, et la Griffe n°412 du 3 janvier 2001 et enfin, la Griffe n°409 du 6 décembre 2000.

mandataires ou de manière générale ; de tout homme politique, soupçonnés ou accusés d'attenter pour des raisons et par des moyens fétichistes, mais aussi par la violence physique, à l'intégrité physique des mandats, est un phénomène ordinaire au Gabon ».94 En plus, « cette criminalité se caractérise par des « meurtres rituels », ou, comme il se dit aussi et suivant une logique de redoublement symbolique, « des sacrifices rituels ». L'objectif étant de prélever des organes humains appelés significativement « pièces détachées » : langues, mains, oreilles, crânes, coeurs, organes génitaux ».95

Venons-en à présent à la question de « ces pièces détachées » qui font l'objet de collecte et de convoitise de la part de ces hommes politiques ou « mandataires » à l'approche des élections politiques. Rappelons que les auteurs que nous avons convoqués ont évoqué tous, comme nous l'avons dit, l'aspect économico-politique du rapport entre fétichisme et politique. En fin de compte, il s'agit d'un problème qui relèverait d'une dimension purement culturelle de « ces pièces détachées » que nous voulons mettre ici en lumière ; dans un souci de montrer l'omniprésence du culturel pour expliquer, sans doute, le recours des hommes politiques aux « pièces détachées ». Ceci dérive en dernière analyse du culte des ancêtres, toujours présent chez nombre de gabonais.

Nous concluons, dans cette étude, que notre problématique s'appesantit sur le passage d'une économie symbolique lignagère à une économie de marché. On vend les éléments du corps humain sur le marché et au politique.

Eu égard tout ce qui précède, nous ne pouvons que nous inscrire que dans la sociologie dynamique de Georges BALANDIER. Comme l'écrit Davy Willis KOUMBI-OVENGA, le choix de BALANDIER est pertinent par le fait qu'il est le sociologue et l'anthropologue qui a le plus marqué la sociologie africaniste des années 1950 en Afrique coloniale. Il est le premier à initier la réflexion sur le politique et le religieux en Afrique centrale et particulièrement au Gabon et au Congo. Echappant à

94 Ibid., p.3.

95 Ibid, p.3.

l'opposition individu-société, certains auteurs renouant avec la tradition sociologique bien établie s'intéressant aux changements sociaux, au devenir des sociétés. Les mutations sociales semblent être le terrain privilégié de la sociologie car elles relèvent à la fois de la théorie et de la pratique.

BALANDIER a donc observé la décolonisation des Etats africains et leur évolution. Pour notre cas, il s'agit de voir l'aspect culturel du culte des ancêtres, à travers la conservation des reliques humaines, qui interviennent aujourd'hui en tant que « pièces détachées » dans la sphère du pouvoir politique. Pour finir, ce que BALANDIER tente de faire saisir à travers ces sociétés en évolution rapide, particulièrement le Gabon, c'est la part d'invisible, mais surtout d'imprévisible qu'elles cachent sous leurs apparences plus ou moins agitées.

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