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La finance islamique est- elle une solution face à  la crise?

( Télécharger le fichier original )
par Ismaël BOULABAS
INSEEC - Master 2 banque et assurance 2012
  

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MEMOIRE DE RECHERCHE APPLIQUEE

Ismaël BOULABAS

La finance islamique

-

Est-elle une solution face à la crise?

MASTER « Banque et Assurance »

Tuteur : Hubert BOELTZ

Date de remise : le 28 juin 2012

RESUME

D

epuis 2008, la survenance de la crise du subprime et celle des dettes souveraines, ont fragilisé le système financier jusqu'à créer une crise économique. Nous nous sommes interrogés sur les causes de ces évènements. En effet, depuis la création de la monnaie les Hommes ont conçu un système financier décorrélé de la réalité du monde en créant des mécanismes tels que les outils de refinancement.

C'est dans ce contexte que nous avons étudié la finance islamique. Une finance basée sur des principes coraniques. Cette dernière étant construite sur des fondements éthiques, et notamment, sur l'interdiction de la spéculation et l'adossement systématique des produits à des actifs tangibles. Elle encourage le recours à des financements participatifs, dans lesquels, banques et clients partagent les bénéfices et les pertes.

Nous avons évalué la solution que représentait ce système. Il prône le retour d'une économie au service de l'Homme, et d'une éthique dans les transactions. Cependant même si il occulte les facteurs de constitution des crises, il n'est encore que trop minoritaire pour avoir un réel impact sur le monde financier. De plus nous avons pu voir qu'il portait, de par sa nature des risques qui lui sont propres.

SUMMARY

S

ince 2008, the apparition of the subprime crisis and the one of the sovereign debt, have weakened the financial system until creating an economic crisis. Also we have questioned ourselves about the causes of these events. Indeed, since the creation of money, Men have created an uncorrelated financial system of the reality of the world by creating tools like the refinancing tools.

It is in that context that we have studied the islamic finance. A finance based on coranic principals. This one being built on ethic foundations, and especially, on the ban of the speculation and the systematic backing of products on tangible assets. It prones then the requirement of participatory funding, within banks and customers share profit and loss.

That way, we have wondered about the solution this system did represent. It prones the return of an economy serving men, and an ethic in the transactions. Although, even if it goes beyond the factors that constitute crisis, it is yet only minor to have a real impact on the financial world. Also, we have managed to see that by its nature, it would carry risks of its own.

REMERCIEMENTS

A

vant de commencer mon étude, je souhaite remercier toutes les personnes qui m'ont aidé dans la construction de ce mémoire. Ainsi je tiens à faire part de ma gratitude à Monsieur Amine NAIT DAOUD pour avoir accepté de me rencontrer et pour m'avoir fait part de ses connaissances en matière de finance islamique. Je remercie, aussi, monsieur Arnaud PETIT, pour m'avoir reçu en entretien, et pour m'avoir donné son point de vue sur le monde financier. De plus j'aimerais remercier l'ensemble de mes collaborateurs du centre d'affaires entreprises du CIC de Torcy, dirigée par monsieur Olivier BRINCAT. Ils m'ont tous aidé, à différents niveaux dans la rédaction de mon étude. Enfin je tiens à faire part de ma gratitude à monsieur Hubert BOELTZ, mon tuteur de mémoire. Il m'a aidé tout au long de mon étude. Il m'a guidé, à corriger mes fautes d'orthographe, m'a fourni de la documentation et a su me motiver dans les moments où la fatigue se fit sentir. Pour cela j'aimerais le remercier tout particulièrement.

SOMMAIRE

RESUME 1

SUMMARY 2

REMERCIEMENTS 2

TABLEAUX ET GRAPHIQUES 2

Tableaux 2

Graphique 2

INTRODUCTION 2

1. LA CRISE DU CAPITALISME 2

1.1. L'histoire de la crise 2

1.1.1. La crise : sa naissance, son évolution 2

1.1.2. La crise du subprime 2

1.1.3. La crise de la dette 2

1.2. Les causes de la crise 2

1.2.1. L'immoralité 2

1.2.2. Le refinancement 2

1.3. Les conséquences de la crise 2

1.3.1. Le déficit de la confiance des ménages 2

1.3.2. L'.Effet systémique 2

2. QU'EST-CE QUE LA FINANCE ISLAMIQUE ? 2

2.1. Historique de la finance islamique 2

2.1.1. Les origines : 2

2.1.2. La finance islamique contemporaine 2

2.1.3. La normalisation de la finance islamique : 2

2.1.4. La finance islamique dans le monde 2

2.2. Les fondements et principes de cette finance : 2

2.2.1. La finance dans l'islam : 2

2.2.2. Les principes de la finance islamique 2

2.3. Les outils de la finance islamique 2

2.3.1. Les instruments de participation à revenus variables 2

2.3.2. Les instruments de financement sans prise de participation 2

2.3.3. Une innovation appelée Sukuk 2

3. LA FINANCE ISLAMIQUE, UNE SOLUTION FACE A LA CRISE ? 2

3.1. Les potentialités de cette Finance 2

3.3.1. Les musulmans dans le monde : 2

3.3.2. Le marché français : 2

3.3.3. Une réponse islamique aux attentes de la population 2

3.2. Les solutions de la finance islamique face à la crise : 2

3.2.1. La banque islamique, un modèle de rentabilité : 2

3.2.2. Le retour à l'éthique 2

3.2.3. Le retour à une finance réelle 2

3.2.4. La redistribution des revenus : 2

3.2.5. Le renforcement du partenariat banque et entreprise : 2

3.2.6. L'exclusion des produits « toxiques » 2

3.3. Les inconvénients de la finance islamique 2

3.3.1. Manque de maitrise sur le système actuel : 2

3.3.2. Le développement moins rapide que celui des banques conventionnelles 2

3.3.3. Elle n'est pas immunisée face à d'autres risques 2

CONCLUSION 2

LEXIQUE 2

ANNEXES 2

ANNEXE 1 : Le système de refinancement 2

ANNEXE 2 : Volume des émissions de CDO dans le monde 2

ANNEXE 3 : Les Musulmans en Europe (données 2006) 2

ANNEXE 4 : Panorama des produits financiers islamiques 2

ANNEXE 5 : Bilan Simplifié d'une banque islamique 2

ANNEXE 6 : Compte de résultat simplifié d'une banque islamique 2

ANNEXE 7 : Éthique: les axiomes de la finance islamique: 2

BIBLIOGRAPHIE 2

TABLEAUX ET GRAPHIQUES

Tableaux

Tableau 1: Comparaison de la confiance dans le système bancaire entre différents pays 2

Tableau 2: Les risques du refinancement 2

Tableau 3: Evolution du ROE des banques islamiques et des banques conventionnelles 2

Graphique

Figure 1: fonctionnement du système bancaire 2

Figure 2 La finance islamique dans le monde 2

Figure 3: Le contrat moucharaka 2

Figure 4: Le contrat ijara 46

Figure 5: Le contrat mourabaha 2

Figure 6: Le contrat assalam 2

Figure 7: Le contrat ijara 2

Figure 8 : Le sukuk 2

Figure 9: les religions dans le monde 2

INTRODUCTION

A

ujourd'hui en 2012 l'Europe doit essuyer l'une des plus grandes crises économiques de son histoire. En effet cet évènement, qui concerne des dettes contractées par des Etats, révèlent l'impuissance de notre système financier.

La situation est telle qu'il est possible d'envisager la sortie de la Grèce de l'Union Européenne. Les banques, quant à elles, refusent de se prêter sur les marchés monétaires interbancaires. Mais bien plus proche de nous, il est possible d'assister à de graves manifestations de la part d'un peuple grec écrasé sous la pression de l'austérité.

Pourtant il n'était pas impossible de prévoir cette crise. En effet, depuis 1909 on a vu apparaitre un détachement de la valeur liée à l'or. Cette dernière fut transmise aux billets de banque. Ce fut l'apparition de la monnaie fiduciaire mais aussi le début de la dématérialisation de l'économie. En effet, le 15 Aout 1971 le président NIXON, dans le cadre du « New Economic Policy » annoncera la fin de la convertibilité en or du dollar. En procédant ainsi il remettra en cause les principes de Betton Woods et entrainera la décorrelation totale entre sa monnaie (le dollar) et un actif tangible (l'or). Cet épisode marquera le commencement d'une série d'évènements visant à éloigner l'économie réelle de l'économie de marché.

C'est ainsi que l'on vit apparaitre les dérivés de produits, la création du Fonds Commun de Créance (FCC) ou encore les fameux Crédit Défault Swaps (CDS). Ce sont des garanties prises sur des prêts consentis par des établissements financiers. Cependant elles prennent la forme de paris sur le défaut de paiement de tiers. Ces deniers pouvant être des personnes physiques des entreprises ou des Etats.

Tous ces nouveaux outils étant adoptés afin de diminuer les risques pris par les prêteurs, ne supprimaient en aucun cas les risques pris par le système financier. En effet, l'un des défauts des systèmes de refinancement est qu'au mieux les risques sont partagés entre les refinanceurs et les refinancés, au pire que les risques sont directement transférés entre les contreparties.

Il est important de noter que les refinanceurs peuvent être des établissements bancaires, mais aussi des personnes physiques, porteurs d'obligations.

Les pays européens comprennent qu'ils vivent au-dessus de leurs moyens et qu'ils ne peuvent plus continuer ainsi. Les banques se rendent compte que même en prenant des garanties sur les prêts qu'elles accordent, elles ne font que diluer les risques dans des systèmes de refinancement opaques. Les investisseurs, quant à eux, voient peu à peu que leurs fonds sont placés sur des valeurs, elles aussi opaques, qui n'offrent aucune stabilité. Enfin, les épargnants sont en pleine méfiance vis-à-vis des marchés financiers, mais aussi des banques.

C'est ainsi que l'on voit apparaitre de nouveaux modes de consommations de produits financiers. Aussi une nouvelle science économique appelée finance comportementale détermine notamment, que les Hommes ne choisissent plus leurs investissement de manière rationnelle. En effet d'après des études leurs choix se feraient en fonction de leurs sensibilités, de leurs croyances, de leurs valeurs etc...

Dans ce contexte la finance islamique connait un essor depuis les années 1980.

Selon Boubkeur AJDIR, directeur de la société IFAAS (Islamic Finance Advisory & Assurances Advisory), la finance islamique n'est pas compatible à l'éthique musulmane mais compatible à "l'éthique tout court"1(*). Pour lui c'est un moyen de réconcilier le monde de la finance avec l'économie réelle.

En effet, loin des excès d'un monde bancaire de plus en plus immoral la finance islamique se dresse contre la spéculation à outrance, l'usure et la prise d'intérêts, les produits dérivés etc... Elle préfère se recentrer sur des modes de financements participatifs et le désendettement de l'Homme. L'objectif ici étant de le replacer au centre de l'économie et d'en faire le principal acteur. Bien que ce dessein semble utopique, la finance islamique prévoit de réelles solutions pour y parvenir.

Il n'est donc plus question d'un système à destination de la communauté musulmane, mais bien d'une finance visant les personnes qui s'exaspèrent des dérives du système. C'est en partant de ce postulat que des associations telles que l'AIDIMM essayent de promouvoir ce nouveau paradigme. Ainsi pouvons-nous nous interroger sur l'alternative que représente la finance islamique face à cette crise du capitalisme.

Afin de répondre à cette question, nous verrons, dans un premier temps, comment nous sommes arrivés à cette situation. Nous nous attarderons sur les crises, leurs causes, et leurs conséquences. Nous verrons ensuite en quoi consiste la finance islamique, et quels sont ses outils pour pallier les carences de notre système financier. Enfin nous verrons quels sont les avantages et inconvénients de cette finance face à la crise du capitalisme.

1. 1. LA CRISE DU CAPITALISME

1.1. L'histoire de la crise

1.1.1. La crise : sa naissance, son évolution2(*)

La crise du capitalisme est une expression que nous pouvons employer pour définir l'état de notre système financier. Afin de comprendre pourquoi et comment il est devenu si critiquable, nous dresserons un bref historique de son évolution. Ainsi nous remonterons jusqu'au début du XIXème siècle pour arriver en 2011. 

*De 1815 à 1914 les pièces d'or ou d'argent constituaient la monnaie des transactions marchandes. Leur poids représentait leur valeur. La loi du 12 aout 1870, mettra en place les billets « ayant un cours légal ». Ils pouvaient être échangés contre leur valeur en pièces (d'or ou d'argent). De plus, l'utilisation de la vraie monnaie permettait d'éviter l'inflation, de stabiliser les salaires et de contrôler les prix. En effet, l'existence d'une monnaie (pièces) réelle en contrepartie limitait les émissions de billets de banque.

*A la fin de la seconde guerre mondiale. Les nations alliées signent les accords de Bretton Wood. Dès lors le dollar deviendra la monnaie étalon. En effet il sera la seule monnaie indexé sur l'or et servira de référence pour les autres. C'est ainsi que fut créé le système monétaire international. D'autre part, ces accords ont permis la création de la Banque Mondiale et du FMI.

*Le 15 août 1971 le président NIXON dans le cadre du « New Economic Policy » suspendra la convertibilité du dollar en or, John Connally secrétaire du trésor, déclarera : « le dollar est notre monnaie et votre problème »

*Le 3 janvier 1973 Valéry GISCARD D'ESTAING, ministre des finances de l'époque, mettra en place la loi « POMPIDOU-GISCARD ». Cette dernière ôtera le rôle de service public à la Banque de France. Ainsi le Trésor Public ne pourra plus escompter ses effets auprès de la Banque de France. Désormais, les emprunts d'Etat seront souscrits sur les marchés financiers.

*En 1994 Blythe MASTERS perfectionnera les dérivés de crédit en « inventant » les CDS, traités « d'armes financières de destruction massive » par Warren Buffet. Elle mettra aussi au point un nouvel instrument de couverture : le CDO (collaterised debt obligation). Celui-ci permettra aux entreprises de titriser leurs dettes. En effet, il consiste en la transformation des dettes (réparties par tranche) en obligation. Ce processus se faisant par l'intermédiaire d'un SPV (special purpose vehicule).

*Le 12 novembre 1999 les Américains voteront le « Gramm-Leach-Bliley Act ». Il remplacera le « Glass-Steagall Act » voté en juin 1933 sous la présidence de Roosevelt. Cette mesure mettra fin à la séparation entre les banques de dépôts et les banques d'affaires. De plus, elle autorisera celles-ci à fusionner avec les sociétés d'assurance. L'Europe suivra le mouvement en dérèglementant, elle aussi.

*En 2007, les CDS (Crédit Default Swap) dans lesquels, entre autres, des crédits «subprimes» accordés à des américains afin d'accéder à la propriété, sont utilisés et diffusés massivement3(*) (cf. annexe 2). Ceci entrainera une méfiance entre les banques. En effet, elles ne se prêteront plus sur le marché monétaire interbancaire. Elles accorderont moins de crédits aux entreprises et aux particuliers.

*Aujourd'hui en 2012, la Grèce est en quasi faillite. La plupart des Etats de l'Union Européenne sont trop endettés.

La décorrélation progressive de la valeur de la monnaie et de son actif sous-jacent (l'or), a permis une prise de risques inconsidérée de la part des acteurs de la finance. En effet la fusion des banques de dépôts et des banques d'affaires, ainsi que la construction des instruments de transfert de risques ont eu des conséquences très graves sur notre système économique. Nous nous attacherons à expliquer cela plus loin dans notre étude.

1.1.2. La crise du subprime

Cette crise a débuté juillet 2007 jusqu'à atteindre son paroxysme à l'automne 2008. En effet les banquiers américains ont consentis des prêts hypothécaires à des ménages modestes, présentant de très grands risques de défaut. Ces banquiers peu scrupuleux, avaient, pour déplacer ce risque, titrisé un grand nombre de ces créances « douteuses ». Le principal problème fut que les biens saisis ne pouvaient être vendus à leur valeur d'origine. En effet la multiplication de ces défauts de paiement a engendré une trop grande offre face à une trop faible demande sur le marché immobilier. Les banques étaient donc propriétaires d'un parc immobilier de faible valeur. En effet, la différence entre l'hypothèque française et l'hypothèque américaine est qu'aux Etats-Unis la banque est propriétaire du bien jusqu'au remboursement du prêt, alors qu'en France la banque n'a qu'un droit de préférence sur le bien qui lui sera accordé en cas de non-paiement de la part des clients.

La part de ces « subprimes » dans le bilan de certaines banques américaine étant trop importante, ces dernières ont dû se résigner à faire faillite (Lehmann Brothers par exemple). Cependant un élément plus grave vint empirer le tableau. En effet, une grande partie des banques non-américaines avaient acheté des obligations issues des subprimes. Ceci a engendré une contagion dans la plupart des marchés bancaires développés....

1.1.3. La crise de la dette

La crise de la dette est moins complexe dans son schéma de propagation. En effet bien que l'on ignore beaucoup d'éléments sur cette crise, il est possible d'affirmer une chose : les Etats sont trop endettés et certains d'entre eux ne pourront jamais rembourser leur dette (le cas notamment de la Grèce). Dettes, qui rappelons le, sont détenues par les banques, les compagnies d'assurance et les particuliers à travers les contrats d'assurance vie souscrits en euro.

En effet la majorité des Etats de l'Union Européenne se sont endettés. Le principal souci que soulève cette information est que les nations se sont, pour quelques unes, endettées au-delà de leurs moyens. Si nous prenons le cas de l'Espagne nous pouvons voir que sa dette publique est passée de 54% à 62% du PIB entre 2009 et 20104(*) . De plus sa balance commerciale était négative de 52 milliards d'euros. Selon Arnaud PETIT5(*), cette crise est différente de celles que l'on a connues. En effet, elle ne résulte pas de l'éclatement d'une bulle spéculative, mais bien d'un défaut de gestion de la part des Etats. C'est pourquoi, il décrit cette crise comme une crise financière à ses débuts, qui se sera transformée en crise économique.

1.2. Les causes de la crise

Les causes des crises sont multiples. Afin de comprendre l'enjeu que représente la finance islamique, face à cette dernière, nous pouvons dégager 2 causes majeures :l'immoralité et le refinancement.

1.2.1. L'immoralité

L'immoralité constitue un des éléments qui fait le plus débat dans la sphère financière. En effet la question est de savoir si l'on doit être rentable ou moral. Evidemment cette présentation est caricaturale mais permet de comprendre l'enjeu caché derrière les questions d'éthique financière. Toutefois une chose est sure : l'immoralité est l'une des causes des deux crises. Ainsi nous nous pencherons sur les éléments immoraux qui ont causé la crise du subprime, ceux qui ont causé la crise des dettes souveraines et les éléments externes aux deux crises.

1.2.1.1. L'immoralité dans la crise du subprime :

L'immoralité est l'élément qui a causé la crise du subprime. En effet, des banquiers américains, peu scrupuleux ont été les instigateurs de cet évènement.

Débuts des années 2000 le marché immobilier américain était saturé. En effet la cible des agences immobilière, traditionnellement composé de ménages ayant des revenus assez conséquent pour pouvoir absorber un crédit immobilier, n'était plus assez abondante pour assurer des perspectives commerciales suffisantes. Elles se sont donc penchées sur une nouvelle cible : les ménages ayant de faibles ressources. Paradoxalement cette cible pouvait être financée.

Tout d'abord il fallait pouvoir vendre un crédit immobilier à des ménages modestes. Pour ce faire il suffisait de prêter à taux variable et à paliers. Ainsi les emprunteurs pouvaient rembourser les premières années de prêt sans trop de difficulté. Ensuite, lorsque les taux des prêts « recollaient » à la réalité des marchés, et que les clients devaient passer un pallier, ces mêmes emprunteurs devaient supporter des échéances, nettement plus élevées (allant du simple au double). Cela les conduisait inéluctablement vers l'insolvabilité.

En expliquant cela nous répondons à la question : comment la crise du subprime a-t-elle été initiée ? En revanche, nous ne répondons pas à la question  «  pourquoi ? ». Pour ce faire, il faut tout d'abord comprendre une différence juridique majeure entre le cadre juridique français, et le cadre juridique américain.

En France, les prêts hypothécaires, sont systématiquement affectés au bien qu'ils financent. De plus les lois NEIERTZ et SCRIVENER 2 obligent le créancier à s'assurer de la solvabilité de son débiteur avant de prêter. Enfin l'hypothèque prise sur le bien n'accorde à la banque qu'un droit de préférence. Cela signifie qu'en cas d'impayé de la part de l'emprunteur la banque devra demander à un tribunal la saisie du bien. Ce n'est qu'après la vente en adjudication de l'immeuble que le créancier pourra faire valoir son droit de préférence. S'il n'est pas remboursé après la vente de l'immeuble il devra faire appliquer son droit de suite qui le placera au même rang que les autres créanciers du débiteur.

Aux Etats-Unis, en revanche le cadre juridique est beaucoup plus léger. En effet, l'obligation de la solvabilité des emprunteurs est moins présente. Cependant ce qu'il faut comprendre est le principe du « mortgage loan » (prêt hypothécaire). L'hypothèque américaine, contrairement, à l'hypothèque française, donne un droit de propriété à la banque. Cela signifie que la banque est propriétaire du bien jusqu'au remboursement de la dette. Concrètement, la banque peut expulser un mauvais payeur, et revendre son bien immédiatement après. Cela démontre clairement que le prêt hypothécaire américain est beaucoup moins encadré que dans le système français.

Malgré un système hypothécaire facilitant les prêts, les banquiers américains, ont réussi à dégager ses prêts risqués de leur bilan. En effet, les banques ont tout simplement utilisé la titrisation par le FCC, mais aussi et surtout via les CDO. Ainsi elles pouvaient exporter leurs risques qu'elles prenaient en finançant ces créances douteuses. Il faut voir que le volume de CDO émis aura connu une évolution exponentielle juste avant la crise du subprime et une chute après cette dernière (cf. annexe 2).

On pourra, noter que la propagation de la crise du subprime, s'est faite en raison de la recherche du profit, et ce, de la part de chacun des agents économiques. En effet, on a souvent l'habitude de désigner les banques comme seules et uniques responsables de cette crise. Cependant il est utile d'observer que les banques qui proposaient des produits ne contenant pas de dette de subprime, offraient des rémunérations bien inférieures à celles de leurs concurrentes, qui elles en proposaient. Ainsi sous la pression commerciale infligée par leurs clients elles devaient s'aligner sur leur confrère en en proposant elles aussi.

1.2.1.2. L'immoralité dans la crise de la dette :

Lorsque l'on parle de la crise de la dette. On pense immédiatement à la Grèce. En effet, ce pays fut le premier à être frappé par ce fléau. La crise de la dette se résume par le fait que pendant trop longtemps des pays ont vécus au-dessus de leurs moyens, et qu'aujourd'hui ils doivent rembourser leurs emprunts. Nous pouvons noter, par exemple, que le premier poste de dépense de l'Etat français est le remboursement des intérêts de la dette. En effet, aujourd'hui certains Etats n'arrivent plus à rembourser leurs dettes du fait d'une charge d'intérêts trop lourde. Mais revenons-en à la Grèce. Ce pays est rentré dans la zone euro avec des comptes falsifiés. Effectivement, leur situation ne le permettait d'atteindre les critères de convergence mis en place par l'Eurogroupe. Et c'est bien ici que se place l'immoralité. En effet, aujourd'hui ce sont 10,8 millions d'habitants qui souffrent à cause de la tromperie de leurs élus. Il est ici intéressant de noter que le vice-président pour l'Europe de la banque Goldman Sachs qui a aidé la Grèce à falsifier ses comptes n'est autre que Mario DRAGHI, actuel président de la BCE.

1.2.1.3. Les éléments externes aux deux crises :

Pendant ces crises, nous avons pu voir apparaitre des éléments d'immoralité financière qui n'en sont pas des facteurs. En effet on a pu voir et entendre parler de certains scandales financiers. En effet, nous parlons ici de certaines affaires qui ont heurtées l'opinion en temps de crise, et contribué à la mise en place d'une barrière entre les banques et les personnes. Nous retiendrons dans notre cas deux scandales : l'affaire KERVIEL et l'affaire MADOFF.

Jérôme KERVIEL était un jeune trader au sein de la Société Générale. Il entra en 2000 au middle office avant d'intégrer le front office en 2005. Il fut connu pour avoir perdu 4,82 milliards d'euros en vendant à perte. L'affaire sera révélée le 24 janvier 2008. Daniel BOUTON, PDG de cette banque, n'arrivera pas à le qualifier lors de son interview ce même jour sur France Inter : «cet escroc, ce fraudeur, ce terroriste, je ne sais pas ». Le gouverneur de la banque de France (Christian NOYER) le qualifiera, quant à lui de génie de la fraude. Toutes ces allégations relayées par les médias on fait renaitre chez les français un sentiment « anti-banquier », que les grands établissements français ont tenté de faire disparaitre dans le début des années 20006(*). Le principal élément mis en avant dans cette affaire est que le trader fit un passage au middle office avant d'être placé au front office. Il connaissait les rouages du système. Il savait contourner les contrôles. On pourra noter que le 5 octobre 2010 la 11ème chambre correctionnelle de Paris reconnaitra Jérôme KERVIEL coupable de « faux, usage de faux, abus de confiance, introduction frauduleuse de données dans un système informatique ». Il sera condamné notamment à rembourser les 4,8 milliards d'euros, et a une peine de prison ferme (3 ans). Il fera appel de la décision et sera rejugé du 4 au 28 juin 2012.

Ce sera d'ailleurs le 7 juin 2012 que l'on apprendra de la bouche de Claire DUMAS (représentante de la Société Générale au procès), que les personnes qui auraient pu empêcher le trader de prendre des positions (jusqu'à 50 milliards d'euros en 2008), ne comprenaient pas les opérations passés, mais les autorisaient quand même. Elle déclarera ce jour même« [la position]était visible, mais elle n'était pas vue et c'est normal »7(*).

Bernard MADOFF, quant à lui, est un homme d'affaire qui fut condamné pour une escroquerie basée sur le système de la chaine de PONZI. Il créa Bernard L. Madoff Investment Securities LLC qui devint l'une des principales sociétés d'investissements à Wall Street.

Eloi LAURENT, dit de cet homme qu'il a su habilement profité de « l'exubérance irrationnelle de la finance mondialisée et la foie entretenue par les agences de notation, dans des rendements chimériques »7(*)

En raison de son activité au sein de la National Association of Securities Dealer (NASD), MADOFF bénéficiait de la confiance des autres investisseurs et des autorités de contrôle (la SEC par exemple), qui n'ont pas douté du cachet de notre fraudeur. Sans cette relation « consanguine » il n'aurait jamais pu réussir sa manoeuvre.

Le mécanisme était simple. Les investisseurs apportaient des capitaux qui servaient à payer les intérêts qui étaient servis aux clients plus anciens. Ce système est appelé « vente pyramidale ».

Le montant de la fraude s'élevait à 50 milliards d'euros. Il sera jugé et condamné le 29 juin 2009 à une peine de prison de 150 ans.

Contrairement à Jérôme KERVIEL, MADOFF, lui, s'est enrichi avec cette escroquerie.

Ces deux affaires, mises à jour en période de crise, ont creusé un peu plus le fossé entre les banques et les ménages. En effet, les deux affaires que nous avons évoquées ont permis de comprendre les failles morales du système financier. Effectivement, lors de l'affaire KERVIEL, nous avons pu voir l'immoralité d'une banque (Société Générale) mais aussi d'une institution (l'AMF). Ces deux entités ont laissé passer des opérations d'un montant exorbitant. Rappelons notamment que le trader en question avait, avec des opérations similaires à celles qui lui sont actuellement reprochées, gagné un peu plus d'un milliard d'euros avant d'en perdre six fois plus, et qu'à cet instant, personne n'avait dit mots à ce sujet. L'affaire MADOFF, quant à elle, mit en exergue l'immoralité d'un homme qui s'est enrichit en trompant ses clients.

1.2.1.4. L'immoralité de la spéculation :

La spéculation consiste à prévoir les évolutions de marché afin d'en tirer un profit financier, en prenant des positions d'achat ou de vente en fonction de son anticipation. Elle est l'un des éléments financiers les plus critiqués. Ainsi, elle est immorale en trois points :

Tout d'abord, nous pourrons noter que la spéculation est un moyen d'acheter ou de vendre des biens dont on ne dispose pas réellement. En effet, elle consiste en des prises de position concernant des actifs sous-jacents. Ainsi, grâce à la spéculation, nous pouvons vendre un bien dont nous ne sommes pas propriétaire.

Ensuite nous dirons que la spéculation est un moyen de gagner de l'argent en cas de baisse des prix des valeurs. Effectivement, la vente à découvert permet d'anticiper une baisse de marché, en vendant un bien dont on ne dispose pas. Concrètement, cela signifie qu'il est possible de gagner de l'argent alors que des investisseurs, sur ces mêmes valeurs sous-jacentes, enregistrent des pertes.

Enfin nous parlerons du deposit. Celui-ci est la garantie laissé au broker afin de pouvoir spéculer. Il est inférieur au montant des sommes sur lesquels on spécule. Cela signifie que nous pouvons prendre des positions sur 100€ alors que l'on ne dispose que de 50€. C'est ce que l'on appelle l'effet de levier.

En raison de ces éléments la spéculation est vivement critiquée. Souvent remise en question par les médias, elle reste très utilisée par les investisseurs

1.2.2. Le refinancement

Le système de refinancement est l'élément qui a permis de propager les crises de manière internationale. Sans ce dernier, les soucis causés par la sphère financière seraient restés localisés. Nous allons donc l'expliquer afin de le comprendre.

1.2.2.1. Rappel sur le fonctionnement du système bancaire :

Le système bancaire  français fonctionne selon un modèle appelé gestion actif/passif. Ce système repose sur un principe : la banque prête à monsieur B l'argent déposé par monsieur A (moyennant intérêts). Jusque dans les années 1990 ce système constituait le principal mode de rémunération des banques.

Figure 1: fonctionnement du système bancaire

Client A

Client B

BANQUE

Prête 100

Dépose 100

Rend 100

Rend 105

Cependant ce système présente certains risques. En effet il est possible que monsieur A demande à retirer son argent sur avant que B n'ait remboursé son prêt. Il se peut aussi que B fasse défaut (quel que soit la qualité de B). Il est donc nécessaire pour la banque de pouvoir pallier ces carences.

Il faut tout d'abord souligner qu'il existe trois risques liés au crédit :

-Le risque de crédit : c'est le risque lié au défaut de paiement du client.

-Le risque opérationnel : ce risque se constitue essentiellement de la mauvaise application des processus des collaborateurs au sein de la banque. Il résulte de fraudes, erreurs humaines...

-Le risque de marché : ce risque est lié à la performance des marchés. Par exemple, en accordant un prêt immobilier à taux fixe sur 20 ans, le banquier prend le risque que les taux de crédit en immobilier dépassent celui qu'il a fixé. Effectivement, il se peut que le coût de l'argent soit plus élevé que le taux pratiqué. Ceci est particulièrement vrai en France dans la mesure où la majorité des crédits se font à taux fixes.

Comme nous venons de le voir la gestion actif/passif présente certains risques. Il est donc nécessaire pour une banque de pouvoir se refinancer en cas d'une forte exposition à ses derniers. Nous verrons dans l'annexe 1 un tableau récapitulant l'ensemble des couvertures de ces risques.

1.2.2.2. Le système de refinancement :

Comme nous pouvons le voir dans le tableau de l'annexe 1, il existe 2 types de sources de couverture de risque pour une banque : l'interne et l'externe :

*Les sources internes.

Constituées des liquidités ainsi que des fonds propres.

*Les sources externes :

Le marché monétaire :il est composé de trois marchés

-Le marché interbancaire : c'est un marché de taux dont les participants sont exclusivement des banques. Dans ce marché, elles se prêtent entre elles à des taux qu'elles se fixent.

-Le marché banque centrale : la BCE permet aux banques d'emprunter à taux fixe via son taux directeur « Refi ». Aujourd'hui à 1%, il est l'un des moyens les plus efficaces pour lutter contre la méfiance qui règne sur le marché monétaire interbancaire.

-Le marché des titres : marché qui permet aux banques d'émettre des titres de créances négociables. Ces TCN pourront ensuite passer par le FCC afin d'être échangés sur le marché secondaire (la bourse).

Le marché hypothécaire :

-Caisse de Refinancement Hypothécaire (CRH) : La CRH est exclusivement utilisée pour refinancer les crédits immobiliers. Tout comme pour les titres, ces refinancements peuvent faire l'objet d'une titrisation par le FCC. Les dettes seront alors transformées en obligations. Lorsque l'on recourt à la CRH, on partage son risque avec notre refinanceur.

Le Fonds Commun de Créances (FCC) :

Le FCC est un « véhicule » qui permet de titriser une créance. Cela signifie que les prêts qu'une banque consent peuvent être transmis à ce fond. Ce dernier les transformera en obligations. Ainsi ces créances seront mises à disposition des épargnants. En effet, ils pourront intégrer des fonds ou des assurances-vie.

L'avantage (mais aussi le risque) est que lorsqu'une banque titrise une créance elle déplace son risque vers celui qui l'achète. On pourra toutefois noter que le recours au FCC n'est pas illimité. Par exemple, une banque n'a pas le droit de titriser plus de 30%8(*)de ses crédits à la consommation.

1.3. Les conséquences de la crise

1.3.1. Le déficit de la confiance des ménages

La méfiance est un élément bien connus de la sphère financière. En effet, elle est l'un des ennemis de la liquidité. Lorsqu'elle sévit sur le monétaire interbancaire, elle paralyse les banques et les empêchent de prêter facilement. Cependant, il existe un phénomène dont on parle moins : la méfiance des ménages.

Afin de comprendre l'enjeu de cet élément, il faut comprendre que les ménages sont à la base d'une économie développée. Ainsi, ce sont des agents économiques qui ont pour missions, entre autre, de financer les entreprises. Cependant, l'accès aux sociétés étant complexes et risqués, très peu de personnes se risquent à investir directement dans ces structures. C'est ici qu'intervient la banque. En effet, sa mission d'intermédiation, lui permet d'investir dans des entreprises avec les dépôts des ménages. Elle a donc pour mission de faire se rencontrer ces deux agents économiques.

Afin de déterminer ce qu'est la méfiance des ménages à l'égard des banques, nous nous baserons sur une étude menée par le cabinet Deloitte intitulée Comment regagner durablement la confiance des clients et parue en mai 2011.

Tout d'abord, il est nécessaire de comprendre que les ménages ne voient pas leur banque comme un offreur de prestation quelconque, mais bien comme un établissement dans lequel ils vont placer leurs économies. C'est pourquoi ils ont le sentiment que les banques prennent des risques inconsidérés lorsqu'elles spéculent sur les marchés. Les établissements bancaires l'ont compris, c'est ainsi qu'ils ont entrepris des campagnes de communication cherchant à rétablir la relation de confiance avec les clients : « Confiance (n.f.) : premier capital qu'un client doit pouvoir investir dans sa banque »9(*), « Vous méritez une marque de considération »10(*), « Etre autre chose qu'un numéro de compte, ça compte ! »11(*), « Développons ensemble l'esprit d'équipe »12(*).

Cette étude décrit l'effet négatif qu'ont eu les crises et les scandales financiers sur les ménages. De plus on peut constater que les Français sont moins confiants envers leurs banques que leurs voisins belges, britanniques, et américains. Cela est paradoxal lorsque l'on sait qu'aucune banque française n'a fait faillite alors que c'est le cas pour nos voisins.

Tableau 1: Comparaison de la confiance dans le système bancaire entre différents pays13(*)

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Même si cette étude montre que la confiance des ménages a été impactée par les crises, elle montre aussi que ce déficit de confiance est dû aussi au manque d'informations de la part des banques ainsi qu'à des tarifs jugés trop haut.

1.3.2. L'.Effet systémique

Les outils de refinancement peuvent avoir un effet néfaste sur le système financier : la transmission des risques de crédits.

Chaque crédit représente un risque pour une banque. Les outils de refinancement permettent, en plus de pallier les problèmes liés à la gestion active/passive, de les transmettre à des contreparties :

Tableau 2: Les risques du refinancement

MODE DE REFINANCEMENT

RISQUE SUPPORTE

Marché interbancaire

Partagé entre la refinancée et sa contrepartie

Banque Centrale Européenne

Partagé entre la refinancée et la BCE

Marché des titres

Partagé entre la refinancée et les acheteurs de titres

Caisse de Refinancement Hypothécaire

Partagé entre la refinancée et sa contrepartie

Fonds Commun de Créance

Déplacement du risque vers celui qui achète l'obligation

Comme nous pouvons le voir dans ce tableau, les risques pris par une banque peuvent être soit partagés soit déplacés dans le cas du recourt au fonds commun de créances. La crainte que l'on peut avoir face à ces éléments, est que les risques se propagent sur les marchés. Pire encore que les ménages aient à supporter ces risques. En effet, le recourt au Fonds Commun de Créances permet de déplacer le risque sur les acheteurs d'obligations. Par ailleurs, dans ce système de refinancement, le refinanceur et le refinancé n'ont aucun contact direct, ne se connaissent pas.

Le système de couverture permet aux banques de limiter leurs propres risques. Cependant il n'est pas illimité. Ainsi, il génère un risque très grave : le risque systémique.

Ce dernier fut découvert en 1974, en raison de la faillite de la banque Herstatt. En effet, cette dernière, qui détenait un monopole sur l'achat du dollar, tenta de spéculer massivement sur l'achat de cette devise. Cependant elle n'avait pas prévue que le gouvernement américain injecterait, à cette période une grande quantité de dollars dans son économie. Ayant acheté à crédit cette monnaie en grande quantité, la banque Herstatt n'arriva pas à rembourser et fit faillite. Le problème que cela souleva était que l'établissement entraina ses créanciers dans sa chute.

Le risque systémique est le fait que lorsqu'une banque subit un défaut de paiement conséquent mettant en jeu sa santé financière, elles mettent en danger tout le système bancaire. Nous sommes donc face à un effet domino qui entraine l'ensemble du marché dans la chute du refinancé. Ainsi la chute d'une banque qui subirait un défaut de paiement de taille, impliquerait toutes ses contreparties de refinancement.

Face au dérives que nous venons de citer, des solutions plus éthiques en terme de finance sont envisagée. En effet le retour à des outils plus sains, favorisant une économie plus proche de la réalité sont de plus en plus demandé par les Etats. Ainsi la finance islamique peut être une solution envisageable.

Mais qu'entend-on par cette expression ?

La finance islamique est un système qui base son fonctionnement sur le droit musulman (Charia).Ainsi est-il judicieux de se pencher sur ses origines, ses principes et les solutions qu'elle propose.

2. QU'EST-CE QUE LA FINANCEISLAMIQUE ?

Afin de comprendre la finance islamique, nous allons dans un premier temps, retracer son histoire, dans un second temps, nous en expliquerons ses principes, et enfin nous verrons quels sont les instruments qu'elle propose.

2.1. Historique de la finance islamique

2.1.1. Les origines14(*) :

La finance islamique trouve sa source dans la religion musulmane : l'islam. Cette dernière aurait été révélée au prophète Muhammad (né en 570 à la Mecque et mort en 532 à Médine) à partir de l'an 610.

L'islam prévoit dans ces textes (Coran et Hadiths), un ensemble de préceptes afférant aux échanges économiques entres les hommes. Ainsi pouvons-nous voir apparaitre les grands principes de la finance islamique dans la charia. Cependant nous ne pouvons pas dire qu'il s'agisse de la finance telle qu'on la connait. En effet le Coran décrit certains comportements à avoir lors de transactions commerciales, mais ne définit pas un système aussi complexe que celui que l'on connait aujourd'hui.

Les premières traces d'un système comptable organisé en terre d'islam se situeraient à l'époque des premiers Khoufala (à partir de 634). Cette époque fut le début de l'expansion de la religion musulmane. Les institutions islamiques de cette période furent très rigoureuses sur la gestion des ressources des Etats. L'enjeu majeur fut de canaliser correctement la Zakat. Déjà à cette époque la religion musulmane se voulait transparente en matière de finance. En 1969 Subhi LABIB décrit cette période comme la naissance du capitalisme islamique. Effectivement, dans un article du journal of economic history, il rappela qu'à cette époque un système économique musulman verra le jour. Ce système sera basé sur le dinar. Ce sera à partir de ce moment que nous pourrons voir apparaitre de nouveaux instruments financiers (tels que les chèques, les lettres de changes, les opérations de transferts de fond internationaux....).

Cet âge d'or perdurera jusqu'à la chute des abbassides, en 1258.

2.1.2. La finance islamique contemporaine

La finance islamique telle que nous la connaissons  ne verra le jour que dans les années 1970. En effet, ce n'est qu'en 1963 que naquit la première caisse d'épargne musulmane. Cet évènement se déroula dans le village égyptien de Mit Ghamr et fut déclenché par l'économiste Ahmad EL NAGGAR. La population locale, très croyante, exprima une méfiance vis-à-vis des banques classique. C'est pourquoi ils décidèrent de fonder un système tontinier d'entraide musulman (par le biais du microcrédit), afin de subvenir à leurs besoins. Au départ, il n'était pas question d'un système islamique à proprement parler. Il s'agissait simplement d'un rassemblement d'agriculteurs souhaitant mutualiser leurs ressources pécuniaires. Cette caisse d'épargne, qui fut la première initiative du genre dans le monde musulman, draina une grande partie des revenus des villageois. Fidèles à leurs principes, les villageois ne pratiquaient aucune distribution ou prise d'intérêts. Ils favorisaient plutôt les prises de participations et les financements directs. En ce sens on peut dire que la finance islamique moderne vit le jour à cette époque. Bien que cette première expérience fût une véritable réussite elle ne dura que 4 ans, et dû prendre fin pour des raisons politiques.

Cette initiative aura inspiré la création de plusieurs leviers islamiques :

-En 1969 la Malaisie créa un fond islamique d'entraide appelé le Tabung Hadji. Ce fond, toujours en activité, a pour mission d'aider financièrement les pèlerins (partant pour la Mecque). Aujourd'hui encore ce fonds joue un rôle économique très important en Malaisie

-En 1969, toujours, se créa le Dallah Albaraka Group. Un conglomérat d'entreprises puissant dont fait partie l'Albaraka Banking Group. Ce dernier ayant des filiales, « charia compliant », spécialisées dans la banque de détail et la banque d'investissement.

-En 1970, on observe la naissance du premier sharia board, « le sharia supervisory board ». Celui-ci fut indépendant, et fut l'initiateur de la gouvernance bicéphale des banques islamiques (nous y reviendrons plus tard dans notre étude).

-En, 1972, on assista à la création de la Nasser Social Bank. Il s'agissait de la première banque destinée aux gens modeste en Egypte. Le concept était de proposer des services conventionnels et parallèlement proposer des services islamiques tels que la collecte et la redistribution de la Zakat15(*) ou le financement du Hadj16(*).

D'une manière générale, on peut dire que c'est dans les années 1970 que l'on vit apparaitre un ensemble de pratiques financières conformes aux préceptes de l'islam. Cela à plus grande échelle. Ce mouvement verra le jour grâce à l'OCI (Organisation de la conférence islamique) qui décida en 1973 de créer l'Islamic Development Bank. Elle démarra son activité 2 ans plus tard, en même temps que la banque privée Dubai Islamic Bank. Ce mouvement fut appelé « Islamic Finance » (finance islamique en français).

2.1.3. La normalisation de la finance islamique :

Nous sommes en Mars 1981. La Dar Al Maal Al Islami est fondée. Son siège se situe à Genève. Le président de cette banque se nomme Mohammed AL FAISAL AL SAOUD. Son activité se décompose en 2 grandes parties :

-les services commerciaux islamiques : dépôts, cartes chèques, gestion d'actifs, gestion de portefeuilles etc...

-les services corporates : investissements, fusions et acquisitions, assurances islamiques etc...

Ce groupe constituera un poids lourd de la finance islamique. En effet il est présent dans une dizaine de pays (Royaume-Uni, Emirats Arabes Unis, Bahamas, Bahreïn, Egypte, Pakistan, Niger, Suisse, Sénégal, Luxembourg).

2.1.4. La finance islamique dans le monde

Nous avons vu que la finance islamique, était née en 1963 en Egypte (Mit Ghamr). Elle s'exporta ensuite en Malaisie. Dans les années 1970, elle commença tout juste son évolution, en passant par les pays du Golfe (Dubai, par exemple). Elle démarra sa normalisation au début des années 1980, atteignant des régions du monde telles que l'Afrique subsaharienne (Niger, Sénégal...) ou l'Europe (Grande Bretagne, Luxembourg).

Cette finance, a connu en quarante ans, un essor considérable. effectivement, née la veille du choc pétrolier de 1973, elle est aujourd'hui pratiquée dans plus de 60 pays. Elle s'est exportée bien en dehors des terres arabes, traditionnellement musulmanes.

Il est maintenant nécessaire de comprendre comment se répartie l'activité financière islamique.

Elle est représentée par 345 institutions financières ou fenêtres d'institutions financières17(*). Parmi ces dernières, on pourra noter que seules 105, sont des banques purement islamiques (les banques dont les résultats et bilans sont composés comme l'annexe 5 et 6). Même dans les pays du golfe arabo-persique, la part de marché des activités purement islamique ne dépassera pas les 26,5% des activités bancaires totales en 2008. Ce chiffre est enregistré par le Koweït. En revanche, l'Iran et le Bahreïn enregistre le meilleur chiffre en ce qui concerne la part des banques purement islamique dans le système bancaire des pays du golfe en 2008. Ce chiffre est de 86%. On pourra noter que même si l'Iran fait partie des pays utilisant le plus la finance islamique, elle n'est pas souvent citée pour en parler. En effet, ce pays est extrêmement protectionniste. D'après Dhafer SAIDANE, le processus d'instauration de la finance islamique dans ce pays fut différent des autres. En effet, cette finance serait née dans ce pays, à l'initiative des pouvoirs publics, pendant les révolutions de 1979. On observera aussi que le sultanat d'Oman ne pratique pas la finance islamique. Effectivement, ce pays émet un rejet, qui serait d'ordre religieux. Le dogme qui y est majoritairement pratiquée est l'islam de tendance Abadhite. Ainsi elle ne peut qu'exprimer un rejet vis-à-vis des principes émanant du courant Sunnite : « ...des recherches récentes ont montré que des anciennes sectes de l'islam [dont font partie les Abadhites], lorsqu'elle se séparèrent de la communauté orthodoxe [Sunnite], ne pouvaient partager avec la majorité les principes essentiels d'un droit qui n'existait pas »18(*).

Figure 2 La finance islamique dans le monde19(*)

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Comme nous pouvons le voir sur cette carte, l'essentiel de l'activité islamique se concentre dans les pays du golfe et d'Asie. Cela n'est pas un hasard car ces deux régions du monde abritent environ 85% de la population musulmane mondiale20(*). D'après Amine NAIT DAOUD21(*) la répartition de l'activité islamique s'effectue de la manière suivante :CCG22(*)70%, Malaisie 20%, Europe 7%, et Amérique 3%

Nous voyons que les pays du golfe doivent, en grande partie, le développement de leur finance à l'exploitation pétrolière (point que nous développerons plus loin dans notre étude).

2.2. Les fondements et principes de cette finance :

La finance islamique est une extrapolation du droit islamique. Elle découle du dogme musulman. En revanche on peut noter certaines différences entre la finance en islam et la finance islamique. Il est donc nécessaire d'expliquer en quoi consiste ces deux modèles afin d'en cerner les divergences.

2.2.1. La finance dans l'islam :

Afin de comprendre les fondements de l'islam, il est nécessaire d'en expliquer les outils. Ainsi, il existe 2 notions très fortes dans le dogme islamique : halal et haram.

Le halal  est ce qui est autorisé dans la religion musulmane. Le haram est ce qui est interdit. La charia est le périmètre qui définit ce qui est halal et ce qui est haram. Par exemple, on entend beaucoup parler de la viande halal. Elle l'est lorsque que l'animal que nous consommons est abattu selon le rite musulman. Ainsi nous pouvons voir que l'islam règlemente le financement mais aussi l'objet du financement. Il est donc interdit d'avoir recours à des financements haram, mais il est aussi interdit d'utiliser son argent de manière illicite en islam.

Ainsi les fondements de la religion musulmane se basent sur ces notions.

2.2.1.1. L'économie au service de l'Umma

L'islam est une religion apparue au VIIème siècle. Sa racine vient du mot « Salam » qui signifie « paix » et du mot « istislam » qui se traduit par « soumission » en arabe. Cette religion est basée sur la croyance en Allah et son prophète Muhammad. Cette doctrine met en valeur les Hommes et leur communauté. Ainsi voit-on apparaitre dans ce dogme la notion, d'Umma (communauté). En effet, ici on parle de l'Homme et de sa contribution à la communauté. Le croyants doit donc oeuvrer à la fois dans son intérêt, mais aussi dans celui de sa communauté. On touche ici un point fondamental de la religion musulmane. Effectivement, cela nous montre que l'islam ne prévoit pas de statut autonome à l'économie. Pour cette religion, l'économie n'est qu'un moyen de faire progresser l'Umma. Elle n'est qu'un outil au service de l'intérêt commun. A ce titre nous pouvons voir que dans son ouvrage  Towzih ol masâ el  (L'explication des problèmes), l'Imam Khomeiny ne fait pas mention du mot économie. Ceci est le point de divergence essentiel entre la finance islamique et la finance en islam.

On pourra noter que cette notion va bien plus loin que la simple théorie. En effet le musulman se voit contraint de travailler pour la progression de l'Umma (Coran sourate IX. Verset 105). De plus le coran condamne toute forme d'oisiveté. Ce qui revient à dire que la prise d'intérêts sur des contrats d'épargne est illicite, car elle ne résulte pas d'une activité quelconque. Ainsi en islam les revenus doivent être les fruits d'un travail ou d'un investissement.

On ne peut parler de la notion d'Umma, sans aborder le principe de la zakat. Cette dernière correspond à l'aumône islamique. Elle est le 5ème pilier de la religion musulmane, et constitue ainsi une obligation fondamentale pour le croyant. Son principe est simple. En effet, en fonction des ressources, qu'il épargne, le musulman, doit en reverser une partie. Il a donc le devoir de faire un don d'une partie de cette épargne à une famille nécessiteuse, ou à une mosquée qui l'utilisera pour venir en aide à un musulman. Ainsi cette religion encourage le croyant à épargner sans thésauriser à outrance23(*). Ainsi, ce dogme prône le mouvement, et la redistribution des richesses, afin que le musulman s'enrichisse tout en enrichissant l'Umma.

Selon Isabelle CHAPELIERE, la monnaie elle aussi à une définition bien précise dans l'islam. Effectivement, elle explique dans son livre « Ethique & et finance en islam » que la monnaie joue 2 rôles bien précis cette religion24(*) »:

-l'unité de compte :elle sert à quantifier la valeur d'un bien ou d'un service

-Intermédiaire des échanges : elle permet les échanges de biens et de services et de remédier au problème du troc

2.2.1.2. Les intérêts, l'usure

Les intérêts (riba en arabe) sont proscrits dans l'islam. En effet, comme nous l'avons mentionné, les musulmans doivent percevoir des revenus résultants d'une activité. Ils ne doivent pas s'adonner à l'oisiveté. Cependant il existe une autre explication à l'interdiction de la perception d'intérêts. Cette dernière réfute entièrement notre système économique. Ainsi, lorsque l'on se penche sur la conception d'un intérêt, on perçoit qu'il correspond au paiement du temps. L'intérêt permet au préteur de faire payer à son débiteur la période de temps qui s'est écoulée entre le prêt de l'argent et son remboursement. Or dans cette religion ainsi que dans le christianisme25(*), il est indiqué que le temps n'appartient qu'à Dieu. Et par voie de conséquence faire payer un intérêt revient à se placer au niveau de Dieu (ce qui est un péché très grave).

En revanche dans les premiers textes, cette interdiction ne portait que sur 6 produits. Le Hadith des « six produits » rapporté par Al BOUKHARI (810-870) dit : « du blé pour du blé à part égale, et de main à main ; le surplus étant de l'usure.  De l'orge pour de l'orge à part égale et de main à main ; le surplus étant de l'usure.  Des dattes pour des dattes à part égale, et de main à main ; le surplus étant de l'usure.  Du sel pour du sel à part égale, et de main à main ; le surplus étant de l'usure.  De l'argent pour de l'argent à part égale et de main à main ; le surplus étant de l'usure.  De l'or pour de l'or à part égale et de main à main ; le surplus étant de l'usure »

Ce texte montre clairement que seuls ces six produits étaient impactés par l'interdiction de l'usure. Par ailleurs, cette interdiction s'est vue évoluer durant les siècles. En effet, les juristes musulmans se sont longtemps penchés sur la question de la valeur de l'or et de la monnaie (dinar). Les juristes ont longtemps autorisé une personne à rembourser une dette en donnant plus de pièces d'or ou d'argent qu'il n'avait emprunté. Cela était toléré si le poids de la matière (or ou argent) était équivalent au poids des pièces que l'on avait emprunté. Le poids était donc l'indicateur de la valeur de la monnaie.

Une troisième raison à cette interdiction existe. Ainsi, au VIIème siècle les personnes qui empruntaient étaient souvent pauvres. Ils empruntaient de l'argent auprès d'autres personnes qui elles étaient riches. Dans l'islam ainsi que dans le christianisme, la prise d'intérêts est perçue comme un moyen qu'utilisent les riches pour s'enrichir au dépend des plus pauvres ; c'est un facteur d'aggravation de la fracture sociale.

2.2.2. Les principes de la finance islamique

La finance islamique, quant à elle, est bel et bien un concept se suffisant à lui-même faisant appel à une notion d'économie indépendante. En effet, elle résulte d'une réflexion philosophique sur une économie musulmane consécutive à une application des lois du Coran et de la Sunna26(*).

Afin de mettre en exergue le principe de cette finance nous établirons ce que l'on appellera les 5 piliers de la finance islamique. A ces derniers s'ajoutent les « axiomes » de la finance islamique en matière d'éthique.

2.2.2.1. La proscription du riba

L'un des aspects fondamentaux de la finance islamique. La prise d'intérêts est évidemment proscrite dans ce cadre, mais va bien plus loin que le Coran. Effectivement, d'après Mohammed FALL OULD-BAH27(*), le concept de l'interdiction du riba ne fait pas encore l'unanimité au sein de la communauté musulmane. En revanche, il existe une doctrine qui est suivie par la majorité des musulmans et qui interdit deux types d'opération :

-celles qui consistent à prêter en connaissant à l'avance le revenu que va générer cette opération

-celles qui consistent à prêter un certain nombre X de biens et engendre un remboursement en T+1 d'une quantité X+Y. Concrètement, cela signifie qu'il est interdit d'augmenter la quantité de bien remboursé, en raison du temps qui s'est écoulé. 

2.2.2.2. L'interdiction de la spéculation

La spéculation, comme nous l'avons définie n'est pas compatible avec les principes de l'islam. En effet, elle constitue le maysir, qui est proscrit par cette religion. Cependant, il est très difficile, dans notre monde de proscrire la spéculation. Cet outil est très utilisé dans le monde financier. Aujourd'hui n'importe qu'elle personne peut « trader » en ligne, et spéculer sur les marchés. De plus le high frequency trading (trading haute fréquence) permet aux marchés d'acquérir une liquidité dont ils ont besoin pour attirer les investisseurs. C'est pourquoi la définition du maysir en finance islamique reste encore floue. Ainsi, lors d'un entretien avec Amine NAIT DAOUD28(*), nous avons appris la définition du maysir. Il a expliqué que cela consistait en une spéculation à outrance. Il a donc émis une nuance. Effectivement, la finance islamique a pour but de réduire au maximum, la spéculation, qui pose des problèmes moraux (cf. chapitre 1). Cependant elle est obligée de tolérer cette dernière car elle représente une grande partie des transactions financières.

2.2.2.3. La licité de l'objet du financement

La finance islamique est une extrapolation du droit musulman dans un contexte financier mondialisé. Ses principales sources se situent donc dans le droit musulman (Coran, Hadith, et Sunna). Ainsi pouvons-nous voir que l'investissement en finance islamique doit être conforme à l'éthique religieuse. Concrètement cela signifie qu'une banque islamique n'a, en théorie, pas le droit de financer un objet illicite en termes religieux. L'investissement devra donc être halal. Ainsi une banque islamique ne pourra pas prêter, ou investir dans le but de financer des produits en rapport avec, les armes, l'activité porcine, la pornographie, l'alcool ou les jeux de hasard.

Ainsi cette finance ne permet pas une liberté dans les choix d'investissement. Elle se veut avant tout être une finance éthique et morale.

2.2.2.4. L'Obligation de partage des profits et des pertes

La finance islamique, utilise les banques comme leviers. Pour ce faire elle incite le financement par prise de participation. Le but est de faire de la banque un partenaire qui oeuvrera pour la réussite des deux parties. Ainsi ce système permet de mutualiser des moyens financiers et de savoir-faire, afin de réaliser un bénéfice partagé. On appelle souvent cet élément les 3 P (Partage des Profits et des Pertes)

2.2.2.5. L'obligation d'adossement à un actif tangible.

Comme nous l'avons évoqué plus tôt, l'islam prône une économie au service de l'Homme. Cette religion, ne permet pas que l'on « gagne de l'argent sur de l'argent ». C'est pourquoi l'un des grands principes de la finance dont on parle est d'interdire les opérations qui n'ont pas d'actif tangible. Cela signifie en claire, que les produits dérivés sans actifs sous-jacent tangibles sont proscris de ce système.

2.2.2.6. Les axiomes de la finance islamique éthique :

Ces 5 piliers sont les principes fondamentaux de la finance islamique. Ils permettent de poser les bases techniques de cette dernière. Cependant dans son intervention à l'IAE de Lyon, Anouar HASSOUN en définit les « axiomes » en matière d'éthique.

Grâce à cette présentation il montre en quoi la finance islamique s'insère dans la finance éthique. Il explique en quoi elle est en adéquation avec ces thèmes. Il est intéressant de noter que ce paradigme prône le désendettement progressif des Hommes (cf. annexe 7). Nous pouvons aussi observer dans cette présentation qu'avant d'être une extrapolation d'un droit religieux, la finance islamique, est basée sur les principes de l'éthique en finance.

2.2.2.7. Le sharia board

Toutes les structures de finance islamique reposent sur une gouvernance bicéphale. En effet il existe une organisation de gestion classique couplée à un sharia board indépendant. Ce dernier est composé de personnes compétentes pour interpréter le fiqh (jurisprudence islamique), des oulémas, qui disposent de compétences en ingénierie financière. Le but du sharia board est de pouvoir encadrer l'activité de financement de manière à ce qu'elle ne dépasse pas le cadre de la finance islamique. Son rôle est de répondre à trois questions : est-ce que le contrat est charia-compatible ? Est-ce que le contrat est dans l'intérêt du client ? Est-ce que l'investissement est dans l'intérêt de la communauté ?

Il est important de savoir que les premiers sharia board sont apparus dans les années 1970. Effectivement, nous avons pu voir qu'il existait des différences d'interprétations incessantes du Coran dans le monde musulman. Par exemple, on pourra noter que l'Arabie Saoudite est plus stricte que les pays d'Asie du sud-est. Ou alors on pourra dire que l'Université d'Al-Azhar en Egypte a autorisé le recours au taux d'intérêts dans certains cas. Il était donc nécessaire de créer un organe capable d'harmoniser les avis. Ainsi fut créé le  « Sharia Supervisory Board ».

2.3. Les outils de la finance islamique

La finance islamique est avant tout un moyen de financer l'économie par des moyens « charia-compatibles ». Nous verrons dans cette partie les différents outils à la disposition de cette finance. Nous aborderons, dans un premier temps, les instruments de participations et de partage de revenus, ensuite nous expliquerons les instruments de prêt, et enfin nous verrons l'innovation financière que constituent les Sukuks.

2.3.1. Les instruments de participation à revenus variables 

2.3.1.1. Le contrat moucharaka

Le contrat moucharaka est un instrument de prêt par participation à revenus variables. Il permet un financement par partage de risques. En effet, l'étymologie de ce mot vient de l'arabe « charika » qui signifie association ou société. Cet instrument est essentiellement utilisé pour financer l'achat, ou la création d'entreprises.

Le principe, basé sur le système de la joint-venture, est simple. Ainsi, la banque finance une partie du capital de l'affaire visée. Alors que le client devra se charger de la partie restante. Elle suppose donc un apport de fonds de la part du client.

Figure 3: Le contrat moucharaka29(*)

BANQUE

MOUCHARAKA

CLIENT

X% de participation

1-X% de participation

Le but ici est de créer une relation de partenariat entre la banque et son client. En effet, nous sommes en présence d'un contrat permettant de partager les pertes et les profits. Le moucharaka permet de générer des droits de propriétés proportionnels à la part dans l'investissement des deux parties. C'est pourquoi, les risques ainsi que les gains potentiels sont proportionnels à la part d'implication des deux parties (banque et client).

2.3.1.2. Le contrat moudharaba

Le contrat de moudharaba est un contrat d'investissement qui implique un partage des bénéfices et du rendement de l'investissement. Son fonctionnement rappel le système d'intermédiation classique. Effectivement, à son passif elle collecte et gère les dépôts de ses clients.

Figure 4: Le contrat ijara

251738112

PROJET

ENTREPRENEUR

BANQUE ISLAMIQUE

A son passif elle investit dans des projets. Par cet instrument la banque obtient donc le rôle d'investisseur et d'entrepreneur.

Cependant, il ne faut pas confondre les rôles. La banque ne fait que financer une partie de l'opération. Elle n'est en rien gestionnaire de la société. En effet, l'administration de l'affaire reste à la compétence de l'emprunteur. La banque apporte une partie des fonds, et l'entreprise son savoir-faire (même si on est bien dans un schéma de prise de participation inscrite au bilan).

En général le contrat moudharaba s'applique pour les entreprises de petite taille. Les actifs sont répartis entre la banque et l'emprunteur. Ceux qui ont été acquis par les fonds avancés par la banque, resteront la propriété de cette dernière, jusqu'au remboursement du prêt par l'emprunteur. Les profits nets, quant à eux, seront répartis entre la banque et l'emprunteur d'une manière convenue à l'avance entre les deux parties. Ils seront partagés après que les frais de gestion aient été réglés par le gestionnaire et que l'investisseur (la banque) ait recouvré son capital.

Ainsi, nous pourront qualifier le banquier dans cette opération de bailleur de fonds.

Le fonctionnement concret de cet instrument :

La banque transmet à l'entrepreneur  les fonds nécessaires à l'investissement. Elle peut exercer un contrôle et superviser l'opération. La banque porte donc le risque financier. En effet, elle seule investie les moyens financiers dans le projet. En revanche, on pourra noter qu'en cas de faute manifeste, ou d'une négligence de la part de l'entrepreneur, la banque peut dégager sa propre responsabilité et donc, ne pas supporter une éventuelle perte. Pour résumer on dira que la banque porte un risque de perte financière, et que l'entrepreneur, porte le risque de perdre le fruit de son travail.

2.3.2. Les instruments de financement sans prise de participation

2.3.2.1. Le contrat Qard-el-Hassan

Ce sont des prêts qualifiés de gracieux. Ils sont conformes à l'éthique islamique, et de par le fait sont dénués de toute prise d'intérêts.

Nous pouvons les définir comme gracieux car ils sont accordés à des clients en situation de précarité. Ils peuvent aussi répondre à un besoin spécifique, tel que les décès, les mariages, les études des enfants...

Ils sont recommandés dans le Coran. En effet, la banque joue ici un rôle social.

Afin de mener à bien ce prêt la banque prendra une garantie sur le prêt.

2.3.2.2. Le contrat mourabaha

Ce type de financement est celui qui fait le plus débats au sein de la communauté musulmane. Effectivement, il consiste, pour la banque, à acheter le bien pour son client, et lui revendre à crédit sans intérêts. Seulement entre, le prix d'achat et le prix de revente, la banque aura pris le soin d'appliquer une majoration, qui correspondrait au prix de sa prestation.

Figure 5: Le contrat mourabaha30(*)

FOURNISSEUR DU BIEN

BANQUE

CLIENT

Prix d'achat X

Transfert de propriété au client

Transfert de propriété à la banque

Prix majoré X+Y

On définit le mourabaha comme étant un prêt bancaire avec bénéfice. En effet, ce mot vient de l'arabe « ribh » qui signifie gain ou bénéfice.

Pour que ce financement soit conforme à l'éthique musulmane, il essentiel que la banque ait acheté le bien avant l'établissement du prêt. Ainsi, dans le cas où le transfert de propriété n'aurait pas été effectué le montage serait apparenté à de la prise d'intérêts, et serait donc illicite en terme islamique. Cet élément suppose que la banque établisse deux contrats : un pour l'achat du bien financé et l'autre pour sa revente.

Le montant de la majoration est négocié entre le client et le banquier.

Le mourabaha peut être utilisé pour financer les entreprises (peu importe leur taille), les ménages (en prêt à la consommation ou, plus récemment le prêt immobilier).

D'après Elyes JOUINI, docteur en mathématiques appliquées, le contrat mourabaha est un moyen pour les banques islamiques, de placer leur trésorerie dans des actifs liquides.

Ce type de financement s'effectue donc en 2 étapes pour la banque : l'achat du bien et sa revente.

Le mourabaha est le crédit dont on parle le plus en termes de finance islamique. En effet, le 16 juin 2011 la Chaabi Bank annonça qu'elle allait mettre en place un crédit immobilier charia-compatible par le biais du mourabaha à destination des particuliers. D`autre part, il représente environ 70%31(*) des prêts des banques islamiques. Il est donc important pour nous de pourvoir comparer cette offre avec l'offre classique.

Tout d'abord, nous devons indiquer que dans nos deux financements nous avons un créancier et un débiteur.

Ensuite, nous pouvons observer que le but de l'opération n'a de réelle importance que dans le cas du prêt avec intérêts. Ainsi, la banque classique n'a, en raison de son devoir de non-ingérence, pas le droit de refuser de prêter car l'objet du crédit lui semble immoral. En revanche, elle n'a pas le droit de prêter si les fonds servent à une activité illégale au sens de la loi. La banque islamique, quant à elle, n'a pas le droit de financer une activité illégale dans le sens de la loi, mais aussi une activité illégale au sens religieux. C'est pourquoi, l'objet du prêt est scrupuleusement examiné dans le cadre d'un crédit islamique.

Le gain de la banque, quant à lui, pose une réelle différence. En effet, d'un côté, nous avons une banque qui perçoit un intérêt, et de l'autre une banque qui perçoit une plus-value. Le premier sera fonction de la durée et du type de prêt. Le second sera fonction de la conjoncture.

L'un des autres éléments qui entraine une divergence est le paiement des pénalités en cas de retard. Ainsi dans une banque traditionnelle, le non-paiement d'une échéance entraine une pénalité qui se mesure en intérêts supplémentaires. En finance islamique, en revanche, on distingue deux cas de non-paiement : le cas de force majeure et la mauvaise volonté. En cas de force majeure (faillite...), le client pourra bénéficier d'un délai. Il se peut qu'une pénalité lui soit appliquée. Dans ce cas il devra faire un don à une association d'utilité publique et devra en apporter la preuve à sa banque dans l'année. En cas de mauvaise volonté la banque devra « mettre tout en oeuvre pour faire respecter ses droits »32(*) .

Enfin, pour finir ce comparatif, nous aborderons le cas des garanties. Effectivement, dans le cadre d'un financement classique la prise de garantie est un élément essentiel. En revanche dans le cadre d'un financement islamique, une garantie peut-être exigée, mais ce qui prime reste la moralité de son client.

Comme nous pouvons le constater le financement mourabaha est basé sur la confiance, qu'accorde la banque à son client. En effet, comme nous avons pu le voir pour le cas des pénalités de retard, la banque islamique possède très peu de moyens pour faire respecter ses droits.

2.3.2.3. Les contrats et assalam et istisnaa

Ce sont des contrats de financement, avant la livraison du bien.

Figure 6: Le contrat assalam33(*)

VENDEUR

ACHETEUR

BANQUE

Paiement du prix à la livraison

Paiement du prix avant la livraison

Le contrat assalam peut être désigné par le terme assalaf (arabe d'Iraq). Il constitue un contrat de vente en livraison différée.

Il est généralement utilisé pour financer les moyens de production agricole, ainsi que les entreprises de production de matières premières.

Ce contrat se déroule en trois temps :

- La banque avance le montant nécessaire à l'achat des biens (matières premières ou produits agricoles)

- La banque se fait livrer les biens

- La banque vend les biens à son client

Il est important de noter que la religion encadre ce type de transaction. En effet dans le hadith du prophète Muhammad rapporté par Al BOUKHARI et Mouslim, il est dit que toutes les caractéristiques du contrat doivent être connues à l'avance : « Le prophète est arrivé à Médine à un moment où les gens achetaient des fruits sur une et deux années à l'avance, il a dit alors : « celui qui achète un bien qui lui sera livré ultérieurement qu'il le fasse en une mesure connue, un poids connu et à une échéance connu ».Nous pourrons définir ce contrat comme une vente à livraison différé à paiement comptant.

2.3.2.4. Le contrat ijara

Le contrat ijara est un contrat de leasing. En effet le mot vient de « oujra » qui signifie loyer en arabe. Figure 7: Le contrat ijara34(*)

VENDEUR

BANQUE

CLIENT

Paiement du prix d'achat

Actif loué au client

Transfert de propriété à la banque

Amortissement

Le principe est le même que celui d'une location longue durée. En effet, la banque achète un bien et le loue à son client sur une durée qui sera déterminée à l'avance. Les échéances seront elles aussi déterminées à la signature du contrat. A la fin de la location, la banque récupère son bien pour le mettre à la disposition d'un autre de ses clients. Cependant il est possible pour un client de demander l'achat par amortissement du bien à la fin de la location. Le prix est négocié entre la banque et l'acheteur à ce moment. Si le client décide d'acheter le bien alors le contrat ijara sera vendu à l'acheteur, et n'existera plus.

Ce contrat se déroule en 3 étapes :

-la banque acquiert le bien et le met en location pour son client

-le client verse des loyers périodiques à sa banque

-le transfert de propriété se fait au terme du contrat.

2.3.3. Une innovation appelée Sukuk

Le Sukuk est certainement l'instrument financier islamique le plus complexe. Effectivement, il est l'outil le plus jeune de la finance islamique. Pour preuve nous noterons que l'une des premières émissions de Sukuks s'est déroulée en 2001 par l'agence monétaire du royaume de Bahreïn. Le mot sukuk est le pluriel du mot « sak »  qui signifie : «  document financier qui permet au titulaire de bénéficier de la somme d'argent indiquée sur celui-ci »35(*).

Figure 8 : Le sukuk36(*)

TRANSFERT DES BIENS

EMISSION

INVESTISSEURS

VEHICULE SPECIAL D'ACTIFS

SUKUK

ENTREPRENEUR

LIQUIDITE

Le sukuk est une obligation islamique. De par sa définition on devine qu'elle est adossée à un actif tangible. De plus, on peut aussi deviner qu'elle ne délivre pas d'intérêts fixes pendant sa durée de vie. En réalité elle confère à son porteur un droit de créance sur l'émetteur (ce dernier pouvant être un Etat, ou une entreprise). En revanche le sukuk oblige l'emprunteur à partager son profit avec le porteur de la valeur. Plus simplement, les coupons correspondent à une partie du résultat de l'entreprise, et varient donc chaque année en fonction des chiffres de cette dernière. On pourra noter que le sukuk ne peut pas garantir un taux de rendement, mais peut être garantie en capital.

Le sukuk est certainement le produit financier islamique le plus populaire. En effet, le marché de cet outil subit une croissance moyenne de 15% par an37(*). D'après une étude de l'agence Moody's38(*) les encours de sukuks vendus en 2007 s'élevaient à 97,3 milliards de dollars progressant de 71% par rapport à 2006.

3. LA FINANCE ISLAMIQUE, UNE SOLUTION FACE A LA CRISE ?

Comme nous l'avons observé, la finance islamique permet de renforcer les financements participatifs. Elle permet aussi de revenir à un système économique plus proche du réel. Nous verrons plus tard quelles en sont ses potentialités et ses limites.

3.1. Les potentialités de cette Finance

3.3.1. Les musulmans dans le monde :

La CIA (central Intelligency Agency) a diligenté en juillet 2008 une enquête concernant la représentation de l'Islam dans le monde. Ainsi sur une population de 6,7 milliards d'habitants, le monde comptait 21,01% de musulmans (soit 1, 4 milliards d'Hommes). Elle est donc en seconde position des religions derrière le christianisme (33,32%), et devant l'hindouisme (13,26%). Ce qui est intéressant de retirer de cette étude est que tous les musulmans ne sont pas arabes. En effet, nous pouvons voir que ces derniers sont essentiellement situés en Afrique du nord et au moyen orient et représentent environ 25% de la population musulmane. 60% de cette dernière est asiatique. L'Europe représente environ 1% de la population mondiale (environ 14 millions). De plus au sein de ce continent on peut noter que la France est le pays qui en compte le plus (cf. Annexe 3). Ainsi nous pouvons déduire que le nombre de musulmans sur la planète représente un réel potentiel pour la finance islamique.

Figure 9: les religions dans le monde39(*)

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3.3.2. Le marché français :

Afin de comprendre le potentiel de la finance islamique en France nous allons dépeindre quel est le SWOT de ce marché, et nous nous intéresserons enfin au climat régnant en France.

3.3.2.1. Le SWOT du marché français

* Forces :

Selon le rapport 2011 publié par l'IFAAS et l'AIDIMM, la France compterais entre 4 et 6 millions de musulmans en son sein, ce qui ferait d'elle, l'un des pays d'occident les plus peuplés par ces derniers. D'autre part, une tendance serait en train de se dessiner. En effet, la pratique religieuse serait en nette augmentation chez les musulmans. Par ailleurs, on pourra noter que l'identité religieuse de ses derniers s'affirme de plus en plus (enquête sur l'évolution de l'islam, IFOP, 2009). On pourra voir les autorités françaises émettent un signal positif envers la finance islamique. Ceci se ressent d'ailleurs par la mise en oeuvre de dispositions en faveur des produits de finance islamique. Enfin la France possède un pôle industriel réellement attractif.

*Faiblesses :

On pourra identifier trois grandes faiblesses. Tout d'abord on pourra noter que l'image médiatique de l'islam en France s'est profondément dégradée. De plus cette finance est encore jeune. Par conséquent, il est encore trop tôt pour pouvoir en tirer les conclusions qui s'imposent, notamment en ce qui concerne la banque de détail. Enfin nous savons que les banques islamiques ne pouvant pas générer de bénéfices sur les intérêts vont répercuter cette pertes par des surcoûts éventuels.

*Opportunités :

Les musulmans n'ayant pas d'offres adaptées à leurs besoins ont épargné durant des années. Il n'est donc pas surprenant de voir qu'il existe une réelle réserve dormante dans la population française. D'autre part, nous pouvons voir que certains ménages ont retardé leur accession à la propriété. Il est vrai qu'en regardant la moyenne nationale de l'accession à la propriété avec celle des musulmans nous pouvons observer un décalage. Par ailleurs,nous constaterons un vivier important d'entrepreneurs français qui cherchent des solutions alternatives. Les collectivités locales, elles aussi en expriment le souhait. Enfin nous dirons qu'il existe en France de nombreux projets de constructions d'infrastructures susceptibles d'attirer des investisseurs islamiques étrangers.

* Menaces

Il existe des concurrents potentiels : les banques islamiques étrangères, mais aussi les banques traditionnelles européennes qui peuvent se lancer sur le marché. De plus nous pouvons voir que les premiers acteurs de cette finance, prendront un risque de réputation, elles seront scrupuleusement observées. Enfin ces acteurs prendront le risque que cette finance ne montre pas les résultats qu'elle escompte. Ceci engendrerait un désintéressement progressif à l'égard de ce système.

3.3.2.2. Etude au sein de la communauté musulmane

En 2011, l'IFAAS et l'AIDIMM commandent un rapport sur les attentes des musulmans en France en matière de finance. Ce rapport montre clairement que la communauté musulmane à des attentes précises en matière de banque. Ainsi 55% de la population étudiée se dit intéressée par des produits de financement islamique et 47% sont intéressés par des produits d'épargne islamiques.

D'après cette étude réalisée par l'IFOP, la finance islamique, possède un marché potentiel allant de 1,1 million à 1,7 million de personnes soit une hypothèse de 7milliards d'euros.

Il est donc clair que la finance islamique possède un marché intéressant en France. D'autre part, il existe une réelle demande de la part de la communauté musulmane française.

3.3.2.3. Le déficit d'image :

Cette finance souffre aujourd'hui d'un problème d'image. En effet, bien que la France soit le pays d'Europe comportant le plus de musulmans, elle n'est pas forcément prête à accueillir en son sein un système financier basé sur des fondements coranique. A ce titre dans l'article paru sur le site du Point (source AFP), Patrick ZEN directeur de la compagnie française de conseil et d'investissement : « La France est le seul pays au monde où il n'y avait pas de fonds charia-compatible. Même en Israël, il y en a. Personne n'a voulu les commercialiser en France. On est dans un tel problème d'image qu'ils n'ont pas osé ». On constatera que l'image de l'islam en France est tellement dégradée, que nous ne sommes qu'au démarrage de la finance musulmane alors que le montant des actifs islamiques en Grande Bretagne est déjà de 19 milliards d'euros. On peut aussi citer l'exemple de l'ouverture du premier Quick Halal  de Roubaix qui déchaina les passions en février 2010. Il est donc visible que l'islam souffre d'un déficit d'image dans le monde (notamment en raison des attentats du 11 Septembre, et de l'amalgame injuste, qui se fait entre musulman et terroristes), mais aussi en France. Effectivement, on peut noter que les souvenirs de la guerre d'Algérie restent encore présents dans l'inconscient collectif.

3.3.2.4. Le cadre juridique

Dans sa présentation, lors du IVème Forum Français de la Finance islamique (28 octobre 2010), le cabinet Gide de Loyrette Nouel parle d'une tradition juridique commune entre la finance islamique et le droit français. En effet pour lui la prohibition de la rémunération du temps, ainsi la non-participation aux activités immorale, est un point commun entre ces deux éléments. De plus, cette présentation souligne que des dispositions légales ont été prises afin d'autoriser les instruments financiers islamiques. A titre d'exemple nous pourrons dire que l'Etat a assimilé l'ijara à une opération de crédit-bail classique, et relevant des mêmes textes de loi. Ainsi la France met tout en oeuvre pour pouvoir intégrer cette finance. D'ailleurs Christine LAGARDE, du temps où elle était encore ministre des finance a déclaré « nous adapterons notre environnement juridique pour que la stabilité et l'innovation de notre place financière puissent bénéficier à la finance islamique »40(*)

3.3.2.5. Le cadre fiscal41(*) :

En 2008, Christine LAGARDE, mis en place une fiscalité particulière en ce qui concerne la finance islamique. En effet, elle estimera le 10 décembre 2008 qu'il était nécessaire de pouvoir rassurer les investisseurs en finance islamique d'un point de vue fiscal : « la publication et la mise en ligne de rescrits fiscaux concernant les opérations de sukuk et de mourabaha va enfin permettre d'apporter aux investisseurs et aux opérateurs la certitude juridique et fiscale qui est nécessaire au développement de ces opérations de finance islamique en France ». Ainsi elle mettra en place deux mesures pour alléger la fiscalité appliquée aux contrats de types mourabaha et sukuks.

La fiscalité appliquée au mourabaha

La fiscalité appliquée au mourabaha consiste à exonérer d'impôt la plus-value immobilière réalisée dans le cadre d'une cession titre à onéreux de biens immobiliers bâtis ou non bâtis ou de droits relatifs à ces biens.

En ce qui concerne les droits de mutation au profit d'une institution financière islamique, l'application de la TVA est retenue. Cependant, il faut souligner que les banques islamiques relèvent du même régime d'imposition que les marchands de biens. Cela signifie qu'ils peuvent appliquer une TVA réduite.

Enfin nous pourrons noter que les opérations d'achat-revente de titres dans le cadre d'un mourabaha, ne sont pas soumises à la TVA.

La fiscalité appliquée au sukuk

La fiscalité appliquée aux sukuks, permet à la banque islamique de déduire de son bénéfice imposable que les intérêts d'emprunt, au même titre que l'IS (impôt sur les sociétés). De plus les rémunérations servies par les institutions financières islamiques aux détenteurs non-résidents de sukuks, sont exonérées de retenue à la source.

3.3.3. Une réponse islamique aux attentes de la population

Il existe des produits bancaires et financiers qui ont été adaptés en version « islamique ». En effet, grâce aux instruments l'on a évoqué (cf. chapitre 2). Les ingénieurs de finance islamique ont repris des produits classiques et les ont revisités afin de répondre aux attentes d'une cible de croyants musulmans. Ainsi, nous étudierons trois produits différents : le compte courant, l'assurance-vie et le crédit immobilier.

3.3.3.1. Le compte courant

Lancé par la Chaabi Bank le 16 juillet 2011, le compte courant  « Harmonis » est le premier à être conforme en tout point à l'éthique islamique. Ainsi, face à une réelle demande de la communauté musulmane, elle ne put faire autrement. Le principe de ce produit est simple, il repose sur :

-La séparation entre les dépôts des clients et les fonds conventionnels

-L'audit systématique et récurrent de la part d'un Sharia Board indépendant

-La non-rémunération des dépôts par le biais d'intérêts

-L'utilisation des fonds du déposant uniquement dans des produits charia-compatibles
Comme nous pouvons le constater cette offre ne permet pas l'obtention d'un découvert. En effet, celle-ci donnerait lieu à la prise d'intérêts, qui ne sont pas autorisés en finance islamique.

La Chaabi Bank souhaite pourvoir commercialiser dans les prochains mois un compte courant pour les associations et les entreprises.

3.3.3.2. L'assurance-vie

L'assurance vie est le placement préféré des Français. En effet, les encours placés sur ces contrats représentent environ 1 400 milliards d'euros. Ceci est vrai car elle est un produit très avantageux. C'est une enveloppe juridique, fiscale, et financière qui permet de répondre à un grand nombre de besoins (retraite, épargne, succession, prévoyance, défiscalisation...). Elle reste très avantagée car elle représente une manne financière importante pour l'Etat. Effectivement, elle lui permet de financer son déficit. Les obligations qui composent les fonds en euro sont, pour une grande partie des « goovies » (obligations d'Etat) françaises. Ainsi le cadre juridique qui la régit lui est très favorable.

C'est pourquoi l'adapter en version islamique peut être une avancée importante. Rappelons que le nombre de musulmans vivant en France est compris entre 4 et 6 millions d'individus. Cela permettrait de pouvoir exploiter les richesses de cette population.

Cette assurance est un contrat en unité de compte, adossé sur des sukuks. On pourra noter que la sicav émettant le sukuk devra être en accord avec les principes islamiques (ne pas exercer une activité haram, ne pas être endettée à plus de 33% etc...)

Ainsi le principal acteur créateur de cette assurance-vie, Anouar HASSOUN, lança la sicav composant l'assurance-vie, en avril 2012. Ainsi dans un article de l'AFP paru le 18/04 /2012, il est dit que l'objectif est fixé à 50 millions d'euros placés sur ce contrat à fin 2013.

3.3.3.3. Le crédit immobilier

Le crédit immobilier est l'un des produits les plus attendus par la communauté musulmane. En effet, selon une étude menée en 2003 en Belgique sur 700 ménages musulmans, 61% de ces derniers ne sont pas propriétaires en raison du riba.42(*)

Selon un agent du service client de la Chaabi Bank, le prêt immobilier est en phase de test. Ainsi certains clients sélectionnés selon des conditions de ressources, sont actuellement les testeurs du crédit immobilier de type mourabaha. Prévu sur une durée maximale de 10 ans. Il permet l'achat d'un bien immobilier par achat-revente de ce dernier.

De plus, nous pourrons noter que cette banque prévoit dans les prochains mois l'élaboration d'un prêt immobilier, à long terme par le biais d'un moucharaka dégressif. Le principe est que la banque et le client achètent ensemble le bien immobilier. Cependant le client rachète progressivement les parts de la banque pour pouvoir en devenir le seul propriétaire.

Afin de pouvoir répondre aux attentes des musulmans, certains produits de bancaires ont déjà été adaptés dans une version islamique. En revanche il existe encore un grand nombre produits à revisiter pour satisfaire la demande (cf. annexe 4). Reste encore un grand chantier pour faire de la finance une vraie offre bancaire de détail complète. Cela constitue un potentiel énorme lorsque l'on sait qu'il existe entre 4 et 6 millions de musulmans en France.

3.2.Les solutions de la finance islamique face à la crise :

Après avoir vu en quoi consistaient les différentes crises, ce qu'était cette finance, et quel était son potentiel en France, il est nécessaire de voir en quoi elle peut être une solution face à la crise.

3.2.1 Une banque pour tous

A l'instar des banques conventionnelles, les banques islamiques, se positionnent sur une clientèle de particuliers et une clientèle corporate.

La première se gère en banque de détail. Cette cible est composée de personnes de confession musulmane (1,3 milliards d'individus dans le monde). On peut cependant noter que l'accès à ces banques n'est pas restrictif. En effet, la finance islamique, s'adresse à tous. D'après Dhafer SAIDANE, la population musulmane est encline à se tourner vers la finance islamique. Il explique ce phénomène par un besoin de spiritualité, un besoin de se trouver en conformité avec les lois islamiques.

La cible corporate, quant à elle, se gère en banque d'investissement. A l'instar des banques conventionnelles, elle a comme mission principale de financer l'activité des entreprises, par le biais des instruments que nous avons décrit dans le second chapitre de notre étude. Cette activité s'est développée ces dernières années. Ainsi, elle s'appuie aujourd'hui sur des prises de participation d'entreprise en croissance. Le but ici est de générer des effets de levier. En ce sens nous pouvons dire que la banque islamique exerce un métier de capital investissement basé sur son activité d'intermédiation.

La banque islamique est un moyen de faire avancer l'économie via une activité d'intermédiation développée. Effectivement, elle base son modèle sur un métier de proximité (banque de détail) pour pouvoir financer les entreprises qui ont besoin de partenaires financiers.

Nous pouvons noter dans l'approche de l'IFAAS et de l'AIDIM, que la banque de détail en France pourrait constituer une véritable alternative à la banque traditionnelle. En effet, d'après Dhafer SAIDANE les musulmans recherchent un retour à leur spiritualité. La banque de détail islamique pourrait en ce sens répondre à leurs attentes. Ainsi le développement de la finance islamique, pourrait passer par la création de produits de détails charia-compatible

3.2.1. La banque islamique, un modèle de rentabilité :

Bien qu'elles ne peuvent pas se prémunir des risques de marché, les banques islamiques sont capables de dégager des résultats positifs. Effectivement, elles arrivent à maintenir un grand niveau de marge. Dhafer SAIDANE établit dans son livre  la finance islamique à l'heure de la mondialisation un graphique qui compare les ROE (return on equity) de 10 grandes banques conventionnelles et ceux de 10 grandes banques islamiques. Rappelons tout d'abord que le return on equity, sert à mesurer la rentabilité des fonds propres. Autrement dit, il permet aux actionnaires de savoir, pour chaque euro investis, quel est le gain. Il résulte donc du rapport entre le résultat net et les capitaux propres.

Tableau 3: Evolution du ROE des banques islamiques et des banques conventionnelles43(*)

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Comme nous pouvons le voir les banques islamiques, dégagent des ROE plus important que les banques conventionnelles. Cela est dû, notamment à leur modèle économique. En effet, ces dernières ne dégagent pas de marge d'intermédiation. Elles établissent leurs bénéfices grâce au coût de leurs produits et services, mais aussi grâces aux participations qu'elles prennent dans les entreprises qu'elles financent. De plus on observera que l'activité financière musulmane est encore très réduite. Ainsi, nous avons observé que l'essentiel de cette activité s'exerçait dans les pays d'Asie du sud ainsi que dans les pays du golfe. Ceci explique en partie la grande différence entre les ROE des banques islamiques et ceux des banques conventionnelles

On notera que les résultats des banques islamiques sont en décorrélation totale avec ceux des conventionnelles. Ce graphique comparatif démontre bien que le risque systémique ne menace pas directement les banques islamiques.

3.2.2. Le retour à l'éthique

Le retour à l'éthique est l'un des éléments le plus déterminant de la finance islamique. En effet, comme nous l'avons évoqué dans les premiers chapitres de cette étude. L'éthique et la finance se sont perdues de vue au fil du temps. Ainsi l'immoralité s'est installée dans notre système pour à terme devenir l'un des facteurs des crises que l'on subit. Ainsi la finance islamique prône un retour à de vraies valeurs morales. Par exemple nous pouvons parler du prêt Qard-el-Hassan, un prêt qui vise à aider les personnes en précarité ponctuelle. Ou bien du principe du takaful44(*), cette assurance islamique basée sur l'entraide entre sociétaires (système mutualiste). De plus, cette finance est partisane du désendettement progressif des Humains. Or, on sait aujourd'hui, que l'un des plus grands facteurs des crises est notre dépendance aux crédits. Il est aujourd'hui important de comprendre que la finance islamique est plus basée sur une philosophie de vie que sur une religion. Ainsi, en y regardant de plus près, si l'on retire le mot « charia-compatible » de la sicav d'Anouar HASSOUN, on pourrait le remplacer par le mot éthique sans que cela ne fasse débat. On peut aujourd'hui considérer qu'un fonds sur le thème du développement durable, basé sur des actifs réels, comportant des sukuks ou des actions, est charia-compatible. À ce propos Anouar HASSOUN a déclaré que la première personne à avoir investis dans cette sicav n'était pas musulmane45(*). En effet, la communication sur ce produit était essentiellement orientée sur son aspect éthique. Comme nous l'avons vu la principale préoccupation des banques envers leurs clients est de redorer leur image (cf. chapitre). En ce sens la finance islamique permet de montrer un visage sécurisant. Celui d'une banque qui se soucie de ses clients, qui ne prend pas de risques inconsidérés sur des marchés instables, qui est simple d'accès et qui ne diminue cette distance entre les personnes et le monde financiers.

3.2.3. Le retour à une finance réelle

Comme nous avons pu le voir dans le cadre des piliers de la finance islamique, les produits proposés doivent avoir un actif tangible. D'autre part, comme nous avons pu le décrire dans notre historique, l'un des éléments qui a conduit à la crise du capitalisme est bien la dématérialisation de la monnaie. Il faut bien entendre que le retour à une finance au service de l'Homme, est le principe philosophique de la finance islamique. Ainsi elle introduit, l'interdiction de la spéculation. Cette dernière est un des éléments les plus vivement attaqués d'un point de vue moral. Il est aussi l'un des moteurs de crises régulières. En effet, aujourd'hui, on sait que les modèles prévoient environ une crise tous les sept ans. Ceci correspond à la définition des cycles boursiers. A chaque cycle on perçoit les mêmes symptômes : un gonflement progressif d'une bulle spéculative (alimenté par les spéculateurs), et l'éclatement de cette dernière. Dans ce schéma nous voyons bien comment la décorrelation entre un actif et sa valeur réelle entraine des irrégularités. Ainsi la finance islamique préconise un adossement systématique d'un actif réel sur un produit.

3.2.4. La redistribution des revenus :

La finance islamique se base sur la charia. Elle impose donc à ses banques d'en respecter les principes. Ainsi une banque islamique se doit de respecter la philosophie de l'Umma. Elle en est un acteur au même titre que ses clients. Il lui est donc nécessaire de redistribuer une partie de ses revenus sous forme de Zakat. Ceci afin d'oeuvrer dans l'intérêt de l'Umma. Elle pourra aussi se charger de la reverser pour ses clients. Ainsi elle sera l'intermédiaire entre le bénéficiaire et le client. De plus, en tant que membre de la communauté, elle peut financer certains projets, sponsoriser certains évènements, ou même organiser elle-même des évènements d'intérêt général. Ainsi la banque n'est plus qu'une entreprise dont le but et le bénéfice, mais bien un acteur social de proximité avec ses clients.

Enfin, on peut voir dans la finance islamique, un rappel de la morale qui s'impose à tous. Comme nous avons pu le voir dans le cadre du prêt immobilier mourabaha, un client qui ne paye pas une de ses échéances, se voit contraint de payer une pénalité sous forme d'un don auprès d'une association d'utilité publique. On voit bien ici que la finance islamique cherche à donner un réel rôle social aux banques.

3.2.5. Le renforcement du partenariat banque et entreprise :

Comme nous l'avons vu précédemment, la finance islamique encourage la prise de participation. En effet, cela permet aux entrepreneurs de supporter une partie du risque mais aussi de bénéficier de l'expertise de sa banque. Cela entraine une réelle relation de partenariat entre les deux parties. Ainsi les deux partageront les bénéfices ou les pertes de l'opération. Cela est très important car en période de crise, il faut que les banques puissent avoir confiance en leur client et que leurs clients aient confiance en elles. De plus, rappelons que les banques sont les poumons d'une économie développée. Effectivement, elles possèdent le pouvoir de pratiquer une activité d'intermédiation. Cela signifie qu'elles peuvent transformer les dépôts de leurs clients, en enveloppe de crédits pour les autres. Ainsi elles peuvent prêter à nos entreprises grâce à nos dépôts. Les techniques de financements par prise de participations vont dans ce sens. Ainsi, une banque qui croit au projet de son client pourra s'y investir plus facilement car elle y verra un bénéfice futur. Cela peut même aller dans le sens du capital risk. Grace à ces outils elles permettent la création, ou le développement d'entreprises, et ainsi favorisent l'emploi. Ainsi les banques islamiques constituent des leviers en termes d'emplois et d'économie.

Le principe des 3 P, peut être un réel outil de sortie de crise. En effet, nous savons aujourd'hui que l'un des objectifs des dirigeants européens (notamment François HOLLANDE), est de relancer l'économie par le biais de la croissance. En ce sens les prises de participations peuvent servir aux entreprises (notamment les PME), pour investir dans des facteurs de croissances.

3.2.6. L'exclusion des produits « toxiques »

Nous avons vu que certains produits, tels que les CDO ou les CDS font partis des éléments constitutifs des crises que nous avons étudié. En regardant, de près ces produits nous pouvons voir qu'ils ne peuvent pas être intégrés dans les bilans des banques islamiques. Effectivement, les CDO et autres produits structurés, par exemple, sont des produits de taux. Par conséquent ils sont illicites au sens de cette finance (interdiction du riba). De plus, ils sont excessivement spéculatifs. Ce qui est aussi interdit en finance islamique (gharar). Ainsi le bilan d'une banque islamique doit être basé sur le même modèle que celui de l'annexe 5.

De plus, les banques islamiques n'ont pas le droit de prendre des positions sur des dettes sur des banques traditionnelles, qui sont exposées aux risques de crédit. En effet, cette finance exige de la part des banques une surveillance accrue de ses actifs. Ainsi elles ne peuvent intégrer que des actifs dont elles sont sures de la qualité. Elle tente par ces principes d'enrayer le risque systémique, en interdisant l'intégration de produits « toxiques » et en limitant les transferts de risques par le biais de la titrisation. D'autre part, de par la structure du bilan des banques islamiques (cf. annexe 5 et 6), elles fonctionnent avec des fonds propres très présents, limitant ainsi les risques d'insolvabilité en cas de faillite. Cependant on pourra noter que même si les banques islamiques ne sont pas directement exposées au risque systémique, elles le sont indirectement. Effectivement, nous noterons qu'en cas de faillite du système bancaire, les entreprises ne pourraient plus se financer. Cela se ressentirait dans les résultats de leurs partenaires commerciaux, qui eux peuvent être suivis en banque islamique. Cet élément impacterait de façon significative ces institutions financières, qui sont dépendantes des filières qu'elles financent.

3.3. Les inconvénients de la finance islamique

Nous avons vu que la finance islamique possédait de réelles qualités pour endiguer les crises. Cependant, elle comporte de réels inconvénients que nous allons étudier.

3.3.1. Manque de maitrise sur le système actuel :

La finance islamique est très jeune. Elle reste très minoritaire dans les opérations financières qui s'effectuent chaque jour. Ainsi on peut voir qu'elle n'a aucune maitrise sur les opérations de finance traditionnelle. En effet si une banque islamique n'a pas le droit d'investir dans des CDO, la banque traditionnelle, quant à elle, n'est pas soumise à cette interdiction. Elle n'a pas encore assez de poids par rapport à la finance conventionnelle.

Par ailleurs, on peut voir que la finance islamique ne prend pas en compte l'inflation. Ainsi, on observe qu'en France, par exemple, les taux de rémunération sont fixés en fonction de l'inflation. Les livrets se rémunèrent par rapport au livret A (l'actif sans risque), pour lequel le taux dépend en partie de l'inflation. L'inconvénient que cela suppose est que lorsqu'un client dépose une somme X sur son compte bancaire à une date T et qu'il récupère cette somme à une date T+1, il perd de l'argent. Ceci étant dû au fait que les prix ont augmenté entre T et T+1. Il perd donc du pouvoir d'achat. Ainsi la finance islamique ne permet pas de conserver sa capacité d'achat sur une durée. Il faut noter que cette finance, restant minoritaire ne permet pas non plus d'endiguer l'inflation. Effectivement, cette dernière est en partie causée par le coût de l'argent sur les marchés monétaires. Or si l'on est une banque islamique on ne peut empêcher les autres banques de se refinancer sur les marchés.

Enfin même si nous avons observé que le cadre juridique français se positionnait en faveur de la finance islamique, nous ne pouvons pas dire que la législation soit adaptée à cette dernière. En effet le cadre juridique de la loi de 1905 définissant les rapports entre l'Eglise et l'Etat est peu compatible avec la charia.

Ainsi son statut de finance embryonnaire ne lui permet pas d'avoir un poids nécessaire pour faire pression sur les banques classiques.

3.3.2. Le développement moins rapide que celui des banques conventionnelles 

L'un des aspects négatifs d'une banque islamique est sa faible capacité à se développer rapidement. Cela s'explique par la structure de son bilan. Ainsi, nous pouvons voir dans l'annexe 5 que l'essentiel des fonds propres d'un de ces établissements est constitué des dépôts des clients. Ainsi une banque islamique, n'ayant pas le droit d'utiliser les leviers du refinancement, sera contrainte de restreindre sa vitesse de développement. Ceci est pourtant en désaccord avec la réalité. En réalité, nous pouvons constater, une croissance conjoncturelle de cette finance extrêmement rapide. Cependant le rapport Arthuis, montre que cette croissance est entièrement due à l'évolution des cours pétrole (dépendance à la filière financée).

De plus, on notera que dans le cadre de la gestion actif/passif (cf. chapitre 1), la banque islamique aura du mal à pallier le risque de liquidités. En effet, le fait qu'elle n'utilise pas de produits de refinancement (qui sont ribawi), l'empêche de couvrir ce risque. Ainsi, dans l'hypothèse où tous les clients d'une même banque venaient à retirer leurs dépôts en même temps, la banque islamique aurait des difficultés à les servir. Là aussi, la réalité nous fait mentir, cependant, Anouar HASSOUN a affirmé dans un rapport sénatorial de mai 2008 : « bénéficiant à l'origine des surliquidités du golfe persique liées au pétrole et renforcées par les effets du 11 septembre, la finance islamique, s'est orientée vers les années 1990 vers les particuliers ». Cela montre bien qu'elle doit s'orienté vers une nouvelle cible pour pouvoir générer des liquidités.

Ensuite, nous dirons que la finance islamique prévoit la fin du trading haute fréquence. Comme nous avons pu le souligner les spéculateurs sont des « market makers ». Ils participent à la liquidité des marchés et les rendent plus attrayant pour les investisseurs. Ils ont donc une utilité économique et financière. L'inconvénient de la finance islamique est donc qu'elle freine l'évolution des marchés.

D'autre part, il est important de comprendre que le modèle économique des banques françaises, est composé environ à 60% de la marge d'intermédiation (différence entre les intérêts perçus et les intérêts versés). Elle représente une vraie source de revenus pour les banques. Or la finance islamique ne permet pas la prise ou le versement d'intérêts. Cela signifie qu'une banque islamique doit se priver d'une recette importante. Or on sait qu'une banque qui fait des bénéfices peut investir, embaucher, prêter (grâce au renforcement des fonds propres du à l'intégration des bénéfices dans les réserves) et payer son impôt sur les sociétés. En résumé une entreprise bénéficiaire est une bonne chose au niveau économique. On peut donc considérer la finance islamique comme étant un frein à l'économie, mais aussi un frein au développement de ses institutions financières.

3.3.3. Elle n'est pas immunisée face à d'autres risques

Bien que la finance islamique soit immunisée contre les risques systémiques directs« elle ne constitue en rien la panacée »46(*). En effet, elle n'est pas immunisée contre certains risques.

Elle est, par exemple, exposée aux risques de concentration. Cela signifie qu'elle s'expose à la défaillance d'une région, une filière, ou toute une profession. D'autre part, étant donné qu'elle n'autorise pas l'investissement dans des activités haram. Elle ne peut pas se diversifier autant qu'une banque conventionnelle afin de lisser ses risques. L'exemple est très parlant, lorsque l'on sait que la finance islamique est très corrélée à la filière pétrolière. Ainsi comme nous avons pu le voir l'activité financière (70%) islamique trouve l'essentiel de son développement dans les pays du moyen orient qui sont exportateurs de pétrole. Or on a pu constater que lorsque les volumes exportés par ces Etats augmentent les capitaux placé dans des banques islamiques augmentent eux aussi47(*).

Par ailleurs, les institutions financières islamiques peuvent être exposées au risque d'image. En effet elle reste minoritaire et peine à être prise au sérieux. D'autre part, son nom évoque clairement ses fondements religieux. Ceci peut lui être préjudiciable, car cela lui donne une image obsolète, décorrelée de la modernité du monde. Ainsi il est possible que cet élément lui incombe à terme. Au demeurant, comme nous l'avons évoqué l'islam est une religion qui souffre aujourd'hui d'une mauvaise image. Ceci étant dû, notamment, à l'amalgame qui se fait (à tort) entre islam et terrorisme, depuis le 11 septembre 2001.

Enfin les risques que doivent supporter les banques islamiques sont très spécifiques. Effectivement, la nature des prestations qu'elles servent influe sur les risques pris. Ainsi, si on prend l'exemple du contrat moucharaka, on peut voir que la banque prend à la fois un risque de préteur mais aussi un risque entrepreneurial. Ainsi en fonction du contrat elle prendra un risque différent.

De plus, on notera que le risque opérationnel est renforcé pour une banque islamique. Ainsi, du fait de sa jeunesse et des contraintes juridiques qu'elle doit subir, les process établis ne sont pas assez usités pour avoir un recul suffisant sur leur efficacité. Afin de pallier cette contrainte l'IFSB (Islamic Financial Service Board) tente d'établir des standards internationaux. Ainsi l'AAOIFI (Accounting and Auditing Organization of Islamic Financial institution), prévoit l'harmonisation des normes comptables internationales.

La finance islamique est un système qui cherche à endiguer certains aspects de la finance conventionnelle. Cependant, nous avons pu voir qu'elle n'était pas forcément adaptée à la finance classique. Par exemple, elle ne prend pas en compte l'inflation. En effet, nous pourrons voir qu'à l'instar du système libéral (qui fonctionne uniquement dans un contexte de concurrence pure et parfaite), la finance islamique ne pourrait fonctionner que dans un contexte où la finance classique (qui représente la majeure partie des échanges) n'existerait pas. Ce paradigme comporte ses avantages et ses inconvénients. En réalité, même s'il occulte certains inconvénients spécifiques aux crises que l'on évoqués, il en comporte d'autres.

CONCLUSION

T

out au long de notre étude nous nous sommes intéressés à l'éthique au sein du monde financier. Nous nous sommes, dans un premier temps, penchés sur le fonctionnement de ce système, ainsi que sur ses défauts. Nous avons retracé un bref historique montrant comment nous sommes arrivés à créer une finance de plus en plus décorrélée de la réalité du monde. En effet, nous avons créé, tout au long de notre histoire financière, un certain nombre d'outils permettant d'effectuer des opérations sur des actifs non tangibles. Fort de ce constat nous avons cherché à savoir quelles pouvaient être les conséquences de cela. Ainsi, nous avons pu observer que ce système favorisait l'immoralité, mais aussi la prise de risque inconsidéré, mettant au danger tout un mécanisme financier. C'est dans ces conditions que naquit le risque systémique.

Dans ce contexte, nous avons étudié la finance islamique. Un paradigme reposant sur les principes du Coran. Cette dernière étant, une finance essentiellement basée sur des principes éthiques. Elle prône, notamment, un modèle économique, totalement dénué d'intérêts. Elle encourage le financement par prise de participation, renforçant ainsi une relation de partenariat entre une banque et son client. Elle interdit la spéculation et ses outrances. Enfin, elle interdit la transmission d'actifs toxiques entre les banques.

C'est dans ce cadre que nous nous sommes interrogés sur les solutions qu'elle pouvait générer pour endiguer la crise. Ainsi nous avons vu qu'elle apportait certaines réponses à ce contexte. Effectivement, son mode de fonctionnement lui permet d'éviter le risque systémique. De plus elle permet à ses banques de revêtir un aspect « social » auprès de ses clients. Enfin elle oblige ses institutions financières, à se constituer de réels fonds propres pour pouvoir fonctionner. Cependant nous avons vu qu'elle n'est pas une solution miracle face à la crise. En effet, de par les restrictions qu'elle impose à ses banques, elle ne peut pas se développer rapidement. De plus, même si elle endigue certains risques inhérents aux crises économiques, elle en porte d'autres qui lui sont propres. Enfin elle souffre d'un réel risque d'image, dans le monde mais aussi et surtout en France.

Ainsi nous pouvons qualifier la finance islamique de prometteuse. Effectivement, les valeurs qu'elle prône, ainsi que ces objectifs font d'elles un paradigme très intéressant. Elle est pour un retour à l'exercice d'une activité bancaire traditionnelle de proximité. Ses outils simples d'accès, et sa conception des valeurs humaines lui permettent de replacer ses clients au centre de l'intérêt de la banque. Ainsi peut-on voir dans ce retour aux sources, un modèle d'avenir. C'est pourquoi on peut supposer que dans le cas où cette crise nous entrainerait dans un cataclysme, les personnes se tourneraient vers un modèle, à l'image de cette finance. Elle pourrait répondre aux attentes des personnes en proposant une offre de détail plus complète. Ce serait un retour à l'expression de leur spiritualité. En effet, André MALRAUX a dit : « Je pense que la tâche du prochain siècle, en face de la plus terrible menace qu'ait connue l'humanité va être d'y réintégrer les Dieux»48(*).

LEXIQUE 

A- AL Boukhari: érudit de l'islam ayant, entre autre écrit Al-Jâmi'us-Sahih, un recueil de hadiths qualifiés d'authentiques par la communauté musulmane.

C- Charia: droit musulman

Coran :livre sacré des musulmans. Ecrit par le prophète Muhammad à destination des humains, il recenserait les paroles de Dieu (Allah pour les Musulmans)

F- Fatwa: opinion émise par un ouléma

Fiqh: jurisprudence islamique

G- Gharar : hasard en arabe

H- Hadiths :histoires retraçant la vie du Prophète Muhammad

Hadj : pèlerinage du musulman. Il s'effectue à la Mecque

Halal:ce qui est licite en dans la religion musulmane

Haram: ce qui est illicite dans la religion musulmane

I- Imam Khomeiny :imam de la Mecque

K- Khoufala: signifie « successeurs » en arabe. Ce mot désigne donc les premiers califats ayant propagé l'islam à travers le monde

O- Ouléma :érudit, savant théologien musulman

M- Maysir :spéculation à outrance

Mouslim: érudit de l'islam ayant, entre autre écrit Sahih-i-Muslim un recueil de hadiths qualifiés d'authentiques par la communauté musulmane.

Muhammad :aussi appelé Mahomet, il est le plus grand prophète de l'Islam, celui qui aurait consigné les paroles d'Allah dans le Coran.

R- Riba: intérêts usuraires

Ribawi : adjectif qualifiant un produit comprenant des intérêts

S- Sunna :la tradition du prophète Muhammad. Elle est suivie par les musulmans sunnites

T- Takaful : assurance islamique

U- Umma: communauté islamique

Z- Zakat: aumône obligatoire dans l'islam

ANNEXES

ANNEXE 1 : Le système de refinancement

Couverture et refinancement des crédits accordés par une banque grâce...49(*)

En interne

En externe

Fonds propres

Monétaire

Hypothécaire

Financier

Liquidités

-Marché des taux :

Interbancaire :

Eonia

Euribor

Banque centrale taux

Refi

-Marché des titres :

Titres de créances négociables :

C.D.-B.I.F.S.-B.M.T.N.-B.T.N.

C.R.H.

Caisse de Refinancement hypothécaire

Marché secondaire : bourse

Monétaire

Souscription de TCN par les OPCVM

Hypothécaire

Titrisation de créances en obligation

FCC

Fonds Communs de Créances

 

ANNEXE 2 : Volume des émissions de CDO dans le monde

Volume des émissions de CDO dans le monde50(*)

Date

Montant en Milliards $

Nombre

2000

237,39

226

2001

351,35

341

2002

394,40

261

2003

413, 96

248

2004

960,10

403

2005

1784,57

582

2006

3588 ,76

1162

2007

3099,09

1142

2008

212,48

166

ANNEXE 3 : Les Musulmans en Europe (données 2006)51(*)

Pays

Chiffres officiels

Chiffres non officiels

Allemagne

Autriche

Belgique

Chypre

Danemark

Espagne

Estonie

Finlande

France

Grèce

Hongrie

Irlande

Italie

Lettonie

Lituanie

Luxembourg

Malte

Pays-Bas

Pologne

Portugal

République slovaque

République tchèque

Royaume-Uni

Slovénie

Suède

Suisse

3 000 000

338 988

4 182

270 000

1 000 000

1 387

2 833

5 500 000

5 777

17 979

825 000

355

2 860

945 000

5 123

12 014

3 700

1 600 000

47 488

300 000

310 000

3 400 000

360 000

1 064 904

360 000

8 898

3 000

3 000

400 000

Total

14 188 986

 

ANNEXE 4 : Panorama des produits financiers islamiques

PANORAMA DES PRODUITS FINANCIERS52(*)

Produits

Eligibilité charia

Prêt à la consommation, immobilier, automobile, PME

A construire

Livret A, B, LDD

A construire

Monétaire

Non

FCP

Oui sous conditions

FIP

Oui sous conditions

SCPI/OPCI

Oui sous conditions

Assurance-vie

Oui sous conditions

PEA

Oui sous conditions

Obligation

Non

Produit dérivé

A construire

Investissement direct Action

Oui sous conditions

ANNEXE 5 : Bilan Simplifié d'une banque islamique53(*)

Actif

Passif

Trésorerie et opérations interbancaires

-Liquidités et réserves auprès de la Banque centrale, banques et établissements financiers, mourabaha de court terme interbancaire.

Financements d'actifs

-Financements de type mourabaha.

-Financement de type istisnaa.

-Ijara.

-Assalam.

-Autres financements d'actifs.

Investissements

Sukuks acquis.

Participations

-Participation dans les investissements moudharaba.

-Participation dans les investissements moucharaka.

-Participation dans les filiales.

Immobilisations

-Propriétés.

-Equipements.

Autres actifs

Trésorerie et opérations interbancaire

-Banques et établissements financiers, mourabaha de court terme interbancaire.

Dépôts

-Comptes courants : dépôts sans intérêt. Capital garanti.

-Mourabaha de court terme interbancaire et à la clientèle.

-Mourabaha syndiquée de long terme

Dépôts d'investissement de partage du profit et de la perte moudharaba et moucharaka.

Capital non garanti.

-Réserve de péréquation (Profit Equalization Reserves).

-Sukuks émis.

Autres passifs

Fonds zakat : alimenté par l'aumône légale perçue auprès des actionnaires, des déposants et des employés.

Fonds propres

ANNEXE 6 : Compte de résultat simplifié d'une banque islamique54(*)

Produits opérationnels

(-)

Charges opérationnelles

(-)

Distribution aux dépôts d'investissement de partage du profit et de la perte

=

Revenu net des investissements

(+)

Commissions perçues sur services bancaires

(+)

Autres revenus opératoires

=

Revenus opératoires totaux ou produit net bancaire

(-)

Charges salariales

(-)

Location, dommages, dépréciations, amortissement

(-)

Autres dépenses administratives et rémunération du comité directeur

=

Résultats nets

ANNEXE 7 : Éthique: les axiomes de la finance islamique:55(*)

Valeur

Sujet

Maximes

Réalité

La monnaie

La monnaie est une mesure de la valeur, pas une valeur en soi. C'est l'économie réelle qui prime; l'inflation notionnelle n'est pas souhaitable.

Responsabilité

La dette

La dette est sacrée; elle constitue une responsabilité et ne fait pas l'objet d'un échange. L'endettement excessif est découragé.

Copropriété

La régence sur le monde

Les Hommes ne sont pas maîtres et possesseurs de la Nature; ils en sont seulement les dépositaires.

Équité

.

La justice

sociale

La finance participative, de type actionnariale et mutualiste, est encouragée; ni la spéculation, ni la thésaurisation ne sont souhaitables

Séquentialité

La production

et l'échange

La production précède l'échange marchand: on ne peut pas vendre ce qu'on ne possède pas.

BIBLIOGRAPHIE

Entretiens

-Amine NAIT DAOUD, le 2 décembre 2011, associé du cabinet 570, spécialisé en ingénierie financière islamique

-Arnaud PETIT, le 18 mai 2012, ancien professeur de marketing bancaire (notamment INSEEC, Normale sup), aujourd'hui chargé d'affaires entreprises au CIC-Est

-Un technicien de service de la Chaabi Bank (n'ayant pas souhaité donner son nom), le 30 mai 2012.

Ouvrages :

-Institut de Recherches et de Formation Banque Islamique de développement (1992), Introduction techniques islamique de financement (Djeddah, 206 pages).

-Olivier PASTRE et Krassimira GECHEVA (2008), La finance islamique à la croisée des chemins (197 pages).

-Eloi LAURENT (2012), Economie de la finance, la découverte, (Paris, 122 pages).

-Isabelle CHAPELIERE (2009), Ethique& finance en Islam, Koutoubia (329 pages).

-Dhafer SAIDANE (2011), La finance islamique à l'heure de la mondialisation (2ème édition), RB édition (128 pages).

Articles de presse et études :

-Frédérique GARROUSTE, Faut-il avoir peur des CDO ?, Option finance, 10 septembre 2007

-Frédérique GARROUSTE, les CDO s'enfoncent dans la tourmente, AGEFI HEBDO du 9 au 15 octobre 2008

- Patrick VIGNAL, La SocGen sur la sellette à son tour au procès Kerviel 8 juin 2012, Reuters 7 juin 2012

- Hubert BOELTZ, Vous avez dit la crise ?, 13 avril 2012, (10 Pages)

-AFP (non signé), La finance islamique fait un nouveau pas en France avec une assurance-vie, le 18 avril 2012

-Amine NAIT DAOUD, mémoire  finance islamique & fonds sharia compliant, Université d'Evry val d'Essonne, année 2007-2008 

Rapports

-Cabinet Deloitte,  Relations banques et clients, Comment regagner durablement la confiance des clients ?, mai 2011 (24 pages)

-La Finance islamique rapport 2011, quels marchés et quelles opportunités pour les banques de détail, commandé par l'IFAAS, (55 pages)

Support de conférences

- Anouar HASSOUN Cartographie de la finance islamique, le 21 novembre 2009, IAE Lyon

-Anouar HASSOUN les fonds propres des banques islamiques face aux exigences règlementaires, Paris, janvier 2010

- Cabinet Gide Loyrette Nouel dernières avancées du cadre juridique et français, présenté au IVe Forum Français de la Finance Islamique, le 28 octobre 2010

Sites internet 

-www.toutsurlesimpots.com : consulté entre l9et le 23 mai 2012

-www.diplomatie.gouv.fr: consulté entre le 10 et le 15 mai 2012

-www .chaabibank.com : consulté entre le 25 et le 30 mai 2012

-www.tamwil-islami.com : consulté  le 10 juin

* 1 Rapport IFAAS 2011, La Finance islamique rapport 2011, quels marchés et quel opportunités pour les banques de détail, commandé par l'IFAAS

* 2BOELTZ Hubert, Vous avez dit la crise ?,13 avril 2012

* 3 Nous y reviendrons plus loin dans notre étude

* 4 Source : http://www.diplomatie.gouv.fr/

* 5 Entretien du 18 mai 2012

* 6 D'après Arnaud PETIT

* Reuters, La SocGen sur la sellette à son tour au procès Kerviel 8 juin 2012», paru le 7 juin 2012

* 7 LAURENT Eloi, économie de la confiance, édition la découverte, 2012

* 8Depuis le sommet de Bruxelles du 27 Janvier 2012

* 9 Caisse d'épargne

* 10 HSBC

* 11 LCL

* 12 Société Générale

* 13 Source : Cabinet Deloitte, mai 2011, Comment regagner durablement la confiance des clients ? 

* 14Toutes les dates figurant dans cet historique se réfèrent au calendrier grégorien

* 15Aumône obligatoire en islam

* 16 Pèlerinage à la Mecque

* 17Filiales de banques classiques répondant aux normes islamiques

* 18 SACHT Joseph (1953), esquisse d'une histoire du droit musulman

* 19 Source www.tamwil-islami.com, tiré du sitehttp://www.hsbcamanah.com/

* 20 Nous ne prenons pas en compte les divergences de courant islamique

* 21NAIT DAOUD Amine dans son mémoire  finance islamique & fonds sharia compliant, Université d'Evry val d'Essonne, année 2007-2008 ; Mémoire nominé au concours des Mémoires de l'Economie et de la Finance organisé par le Centre des Professions Financières de Paris

* 22Conseil de coopération du golfe regroupant : l'Arabie saoudite, d'Oman, du Koweït, de Bahreïn, des Émirats arabes unis et le Qatar.

* 23Coran sourate 70, verset 15-18

* 24 Idée reprise par Amine NAIT DAOUD dans son mémoire op.cit.

* 25On notera que dans le judaïsme, il est interdit de prêter avec intérêts à un juif, mais que la prise d'intérêts est autorisé si il le débiteur est un non juif. Cette nuance appliqué au Lévitique verset 35 à 37, est introduite dans le Deutéronome chapitre 23 ; versets 19 et 20).

* 26 Tradition du prophète Muhammad. Elle fait partie des sources de droit des musulmans Sunnite

* 27 FALL OULD-BAH Mohamed, (2007) l'argent de Dieu. Contribution à une anthropologie économique des systèmes financiers musulmans», thèse de doctorat soutenue à l'université Paul VERLENE

* 28Entretien du 2 décembre 2011

* 29SAIDANE Dhafer, (2012)  La finance islamique à l'heure de la mondialisation

* 30SAIDANE Dhafer op. cit.

* 31SAIDANE Dhafer op. cit.

* 32 AL-JAHRI Mabid Ali et IQBAL Munwar, Banques islamique : réponse à des questions fréquemment posées, 2001

* 33SAIDANE Dhafer op. cit.

* 34SAIDANE Dhafer op. cit.

* 35 Dictionnaire Larousse Arabe, 1987 p. 848

* 36SAIDANE Dhafer op. cit.

* 37 Rapport sénatorial Arthuis n°33 du 17 octobre 2007

* 38 2007 Review & 2008 Outlook,

* 39 Graphique crée par l'auteur à a partir des informations contenues dans le livre de Dhafer SAIDANE op. cit.

* 40 Forum financier de l'association Paris Europlace, 2008

* 41 Source : www.toutsurlesimpots.com

* 42FULCONI-TIELENS Andréane (2007 b), La finance islamique a-t-elle un avenir prometteur en France ? revue Banque n°696, novembre

* 43SAIDANE Dhafer op.cit.

* 44 Elément que nous ne développerons pas dans notre étude, car il relève plus de l'assurance que de la finance

* 45 AFP, le 18 avril 2012, La finance islamique fait un nouveau pas en France avec une assurance-vie,

* 46HASSOUN Anouar conférence à l'IAE de Lyon le 20 novembre 2009 : « cartographie de la finance islamique »

* 47PASTRE Olivier et GECHEVA  Krassimira: « La finance islamique à la croisée des chemins »

* 48MALRAUX André (1955)

* 49Source : MAZZONI Jean-Christian cours d'institution et gestion bancaire 2012

* 50Source : GARROUSTE Frédérique, les CDO s'enfoncent dans la tourmente, AGEFI HEBDO du 9 au 15 octobre 2008

* 51 Source : SAIDANE Dhafer (2011), La finance islamique à l'heure de la mondialisation (2ème édition), RB édition

* 52 Source :La finance islamique rapport 2011, quels marchés et quelles opportunités pour les banques de détail, commandé par l'IFAAS et l'ACERFI

* 53Source: SAIDANE Dhafer op.cit.

* 54Source: SAIDANE Dhafer op.cit.

* 55 Présentation de HASSOUN Anouar du 20 novembre 2009 à l'IAE de Lyon






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"Entre deux mots il faut choisir le moindre"   Paul Valery