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Les mots du sida à  Libreville: métaphores postcoloniales et hétérotopies

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par Yannick ALEKA ILOUGOU
Université Omar Bongo - Master 2012
  

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Chapitre III : Les représentations pentecôtistes et des confréries initiatiques
modernes du Sida à Libreville

Nous avons désespérément osé penser que les représentations de la maladie du Sida auraient évoluées depuis les années 1990 dans le milieu ésotérique pentecôtiste en Afrique centrale. À ces déviances représentatives et disparates de la maladie du Sida, se sont ajoutées les représentations des cercles de confréries initiatiques modernes. Nous connaissons les analogies du milieu pentecôtiste sur le Sida le comparant à une punition divine ou à une maladie du Diable. Mais, nous connaissons moins l'idée qui circule dans le milieu des cercles de confréries initiatiques modernes qui représente la maladie du Sida comme un Karma. Ici encore, les espaces hétérotopiques sont les lieux des discours déformés, perverties, qui illustrent assez bien le fait que ces lieux sont des lieux de déviances et de transgression. Pourtant, ces espaces sont des lieux du sacré, des lieux de la morale. Nous pensons alors que le capitalisme aliène la morale par la puissance du charisme. Il y a une économie des mots, qui est véhiculées par la violence symbolique et par la violence de l'imaginaire. Toutes ces imaginations font de cette maladie une maladie du karma, une maladie du Diable ou de Dieu, une punition divine. La guérison divine devient la propriété des leaders charismatiques des espaces hétérotopiques des églises, et temples initiatiques. Puisque nous ne devons pas omettre de dire que le Sida dans ces espaces est une maladie qui est hors du secteur biomédical. Seul l'imaginaire, l'imagination peut alors délivrer et extirper le mal. « La maladie existe parce que le péché est entré dans le monde. Elle est toujours le signe que nous vivons dans un monde révolté contre Dieu, le rappel de la puissance satanique (...) L'homme malade ne peut vivre sa maladie que dans la repentance247

SECTION 1 : Le pentecôtisme et le Sida : la punition divine

Comme nous avons énoncé ci-dessus, nous pensions que depuis les années 1990, les idées que l'ont se faisait du Sida aurait évolués. Mais, bien au contraire, elles persistent et se transposent dans un terme qui exclu la proposition de la maladie du Sida comme une maladie du Diable. Aujourd'hui, les discours pastoraux, au sujet de la maladie du Sida, se sont mutés en utilisant l'expression de punition divine. Il s'agit dans cette section de penser les refondations de cette pensée de la maladie du Sida comme punition divine.

1) L'évidence biomédicale du Sida et l'obstination charismatique pentecôtiste

Il faut, dès le départ, préciser que nous parlons dans cette partie de la métaphore de la maladie du Sida dans le milieu religieux pentecôtiste. Cette métaphore est la punition divine. Mais bien avant, nous devons présenter les autres représentations pentecôtistes de la maladie

247Maurice Jeanneret, « Jésus-Christ et la maladie », Les cahiers protestants, s.l, s.e, 1966, n°4-5, pp 21-22.

du Sida. Le Sida était une maladie du diable, mais aussi de la sorcellerie. Le Sida était une maladie que le diable a envoyée par les moyens de perversion et de luxure pour éprouver le peuple de Dieu. De fait la sorcellerie est le bastion des suppôts de Satan, et l'objectif de la sorcellerie est le même que celui du diable car la sorcellerie est gérée par le diable. Donc, le Sida, ou être malade du Sida, était être atteint par la maladie du diable ou de la sorcellerie. Pour cela il fallait faire une prière de délivrance pour extraire le diable et le mal sorcellaire248.

Jusqu'en 2006, la distribution des antirétroviraux (ARV), n'avait pas encore pris une telle ampleur. Et c'est vers la fin de l'année 2007 que la distribution des antirétroviraux devient effective. Lorsque nous parlons d'effectivité c'est parce que la distribution des antirétroviraux à commencé à être gratuite. Puis, cette distribution est toujours à la bourse des plus démunis. Mais plus encore, le service des statistiques du PLIST a observé une augmentation des tests de dépistage du Vih/Sida de 32%249. Mais encore, toujours selon le service des statistiques du PLIST250, il y a encore 20 ans les gens ne savaient ce que c'était le Sida. Aujourd'hui méme un enfant du primaire peut dire le mode de contamination du Sida ainsi que ce que c'est que la Sida. Ceci inclut que les modes de contamination sont connus et ne se laisse plus facilement préter à n'importe qu'elle interprétation.

Ce que nous voulons décrire ici, c'est le fait selon lequel dans le début des années 1990, la début de la maladie du Sida était méconnue et laissait place à toutes sortes d'interprétations. C'est ainsi qu'« à l'instar d'un être qui, devant une réalité objective qui le « dépasse », qu'il dit « ne pas comprendre », qui n' « est pas vraie » ou qu'il « ne réalise pas " comme on dit, la société a recours à la puissance instituante de l'imaginaire pour « réaliser " en produisant des significations sociales qui donnent sens à l'évènement251." Cependant, 20 ans plutard, la connaissance du Sida biomédical s'est construite une évidence étiologique. Quoique aux abonnés absents certaines représentations tendent à subsister, le fait est que le Sida ait affirmé sa présence étiologique dans le milieu religieux. Mais, ce n'est plus le Sida sorcier qui prend la place après les différentes tentatives de délivrances qui généralement n'ont pas échouées. C'est plutôt la présence d'une volonté divine de faire souffrir un individu. Car la punition divine est une forme de châtiment que Dieu inflige à ses fidèles les plus récalcitrants. Sur le terrain de notre étude nous avons suivie un cas de Mlle Micheline252 qui souffrait du Sida dans une église 253 . Après les différentes prières de délivrance et de désenvoutement, Micheline continuait à se sentir de plus en plus mal. Elle perdait du poids. Après avoir accusé le manque de foi de Micheline, le pasteur de l'église lui recommandait des jeûnes de plusieurs jours sans alimentation. Tout ceci contribuait à affaiblir un peu plus Micheline. Dans les dernières semaines de vie de la malade, le discours du pasteur avait changé. Il ne s'agissait

248Joseph TONDA, « Le Sida, maladie de Dieu, du Diable et de la sorcellerie », Sciences sociales et santé, Vol 25,n°4, Paris, Décembre, 2007

249 Donnée recueillie au PLIST en janvier 2010.

250 Il a refusé de décliner son identité car c'est dans une discussion hors de son lieu de travail que nous avons eu certaines informations classées confidentielles.

251 Joseph TONDA, La guérison divine en Afrique centrale (Congo, Gabon), Paris, Karthala, p 47.

252 Mlle Micheline, niveau d'étude sixième, chrétienne, ancienne caissière, mwiènè (morte le 13 septembre 2011)

253 Assemblée de Dieu du Gabon, église d'Owendo :Ad Bananier.

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plus d'une maladie du Diable mais une maladie de Dieu, une punition divine. Car aucun démon ne peut résister à aux prières et aux différents jeûnes auxquels il avait soumis Micheline. Dans ce cas, c'est la maladie de Dieu. Une maladie pour punir le fidèle d'une vie de débauche et d'infidélité à Dieu : une punition divine.

Donc, la punition divine que propose le milieu pentecôtiste comme métaphore du Sida est en fait une sorte d'obstination perverse. En fait, le terme de punition divine est un terme qui est un dernier recourt lorsque la puissance charismatique du pasteur est confrontée à l'échec. Pour éviter de mentionner le terme échec, un terme plus approprié est utilisé qui n'est autre que celui de punition divine. Ainsi, le pasteur concède sa défaite, son impuissance face à la maladie du Sida non pas à l'évidence étiologique et biomédicale, mais à la volonté supreme d'un Dieu qui décide de faire souffrir ses fidèles.

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