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Le fondement de l'ordre social et politique chez Jean- Jacques Rousseau. Une lecture de " du contrat social "

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par Oscar OMARI NGABO
Institut supérieur de philosophie et de théologie de Kolwezi RDC - Graduat en philosophie 2007
  

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CHAPITRE DEUXIEME : DE L'INTELLIGIBILITE DU CONTRAT SOCIAL DANS LA PERSPECTIVE ROUSSEAUISTE

INTRODUCTION

La conjoncture sociale et politique vécue au 17ème siècle où l'homme était devenu un loup pour l'autre, par des révoltes, des guerres civiles et autres anarchismes; cette conjoncture sera plus expérimentée au 18ème siècle par la révolution industrielle et la robotisation. Cette mutation sociale va susciter un bon nombre de philosophes à penser à constituer un "état civil" où chaque homme serait libre et où tous seraient égaux, en référence à un état hypothétique ou mythique, l'"état de nature". Ce nouvel état va naître d'un contrat social où tous les hommes remettront leurs volontés particulières à une volonté générale.

En effet, le contrat suffit-il pour garantir la paix, la sécurité et la justice dans une société ? Qu'est-ce qu'en fait un contrat social selon que l'entendrait Rousseau ? Y a-t-il intérêt à contracter ? Ce sont autant de questions sur lesquelles va s'articuler le présent chapitre. Mais avant tout commentaire, signalons que la pensée politique de Rousseau s'oriente à partir du présent dans deux directions dont l'heureuse liberté de l'homme dans le passé et l'établissement d'un régime futur qui pourra invoquer la volonté de ceux qui vivent sous son autorité. C'est la tâche même du philosophe que d'éclairer ce qu'est véritablement la nature humaine et, à partir de là, de définir les conditions d'un bon ordre politique.

II.1 ROUSSEAU ET LA POLITIQUE

Au milieu des tumultes sociopolitiques susmentionnés, Rousseau opère deux réformes capitales : celle de l'éducation qui est un plan de réforme pour l'individu et celle de la politique qui est un plan de réforme pour la société. Dans cette seconde réforme- objet de notre propos-, Rousseau cherche à appliquer à la société un principe fondamental qui va susciter un débat difficile et dont la solution constitue sa politique. Mais, la politique quid ?

Etymologiquement, la politique est l'art de diriger une cité, un Etat. Mais, alors que les aristocrates définiraient la politique comme l'"art de conduire les peuples en le trompant" pourvu qu'ils les écrasent davantage, et les démocrates comme l'art de guider ces mêmes peuples en les éclairant sur leur propre avantage, Rousseau, pour sa part, effectue une réponse qui renferme la définition démocratique en la dépassant. Il ne suffit donc pas, pour lui, d'éclairer les peuples mais, surtout, il s'agit de les transformer.

Ainsi dit-il:

« la définition aristocratique de la politique réduit, en effet, cet art à son niveau le plus bas: celui des faits et des institutions établies. Il en résulte que la pseudo-science de la politique n'est, dans cette perspective, que la justification ou la tolérance du fait accompli [...]. La vraie politique, donc, est celle qui transforme la cité pour rendre les hommes le moins malheureux possible et pour tenter de leur procurer un bonheur durable qu'eux-mêmes auront mérité: cette lourde tâche suppose qu'on sache allier la connaissance du possible à la prescience ou la conscience des ressources encore inexplorées de la générosité humaine »18(*).

Ayant appliqué à la société le principe fondamental selon lequel l'unique forme d'association légitime est le contrat social, Rousseau dans son traité Du contrat social ou principes du droit politique pose donc, dès le départ, le problème en ces termes : « je veux chercher si, dans l'ordre civil, il peut y avoir quelque règle d'administration légitime et sûre, en prenant les hommes tels qu'ils sont, et les lois telles qu'elles peuvent être. Je tacherai d'allier toujours dans cette recherche ce que le droit permet avec ce que l'intérêt prescrit, afin que la justice et l'utilité ne se trouvent point divisée19(*). Par là, il veut considérer les conditions de possibilité d'une autorité légitime en élaborant des "principes du droit politique". Du contrat social ne constitue donc pas une recherche historique, mais il établit des normes qui énoncent le droit.

Une question se pose, à savoir celle de celui qui est habilité à faire de la politique ou à écrire sur la politique. La lecture du Du contrat social montre que ce traité ne résout pas tous les problèmes, puisque par définition la politique, dit-on, est l'art du concret. Ce qui fait que Rousseau se contente de définir les règles du jugement politique, en prenant soin que celles-ci soient applicables à toutes situations données. Il ne confond pas non plus son travail de théoricien et celui de l'homme d'action ou du législateur, même s'il rêve de devenir lui aussi législateur d'un peuple. C'est dans cette tension du fait et du droit, dans cette dialectique de la théorie et de la pratique, que réside l'essentiel de son message quand il dit : « on me demandera si je suis prince ou législateur pour écrire sur la politique. Je réponds que non, et que c'est pour cela que j'écris sur la politique. Si j'étais prince ou législateur, je ne perdrais pas mon temps à dire ce qu'il faut faire; je le ferais, ou je me tairais »20(*).

II.1.1 L'ESSENCE DE L'ORDRE SOCIAL

L'être humain, selon Aristote, est un être naturellement social. Il naît, grandit et meurt dans la société. C'est pourquoi il est si difficile de s'imaginer un être isolé de la société. Car, ce dernier ne se réalise que dans un cadre social donné- L'état de nature21(*) est à comprendre, donc, non point d'une manière historique, mais comme état de l'homme quand on en retranche, de manière purement hypothétique, ce que la société lui a fourni et apporté. C'est ainsi que de toutes les premières sociétés, Rousseau envisage la famille comme la plus ancienne et la seule naturelle. Naturelle car, elle n'est pas obtenue par convention. Et les enfants qui y sont nés ne choisissent pas d'y naître, c'est un fait du "hasard", ou mieux, naturel.

Par contre, « les enfants ne restent-ils liés au père qu'aussi longtemps qu'ils ont besoin de lui pour se conserver. Sitôt que ce besoin cesse, le lien naturel se dissout. Les enfants, exempts de l'obéissance qu'ils devaient au père, le père, exempt des soins qu'il devait aux enfants, rentrent tous également dans l'indépendance »22(*). Cette indépendance n'est pas une scission définitive des relations entre père et enfant mais c'est le temps où, déjà adultes, les enfants deviennent capables de s'auto-conserver; une obligation naturelle à tout être humain.

Pour que règne l'ordre, il est donc de nature à toute société d'être structurée en suivant une certaine hiérarchie. « La famille est donc, si l'on veut, le premier modèle des sociétés politiques: le chef est l'image du père, le peuple est l'image des enfants; et tous, étant nés égaux et libres, n'aliènent leur liberté que pour leur utilité. Toute la différence est que, dans la famille, l'amour du père pour les enfants le paie des soins qu'il leur rend; et que, dans l'Etat, le plaisir de commander supplée à cet amour que le chef n'a pas pour ses peuples »23(*). Grotius, quant à lui, refuse que le pouvoir humain soit établi au profit des gouvernés en illustrant, comme appui de sa conviction, l'esclavage. Aristote, lui aussi, va réfuter l'affirmation selon laquelle tous les hommes naissent égaux et libres car, dit-il, « nous ne prétendons, quant à présent, établir rien de plus, sinon que, par les lois de la nature, il y a des hommes faits pour la liberté et d'autres pour la servitude, auxquels, et par justice et par intérêt, il convient de servir »24(*). D'une part, cette conviction d'Aristote tient debout dans la mesure où nous sommes égaux "de jure", c'est-à-dire de nature mais inégaux "de facto". Au fait, l'expérience montre qu'il y a d'énormes imperfections parmi les hommes : inégalité physique, intellectuelle, ....

De nos jours, du moins,

« quel que soit le niveau sectorial, local, régional, national ou international auquel nous pouvons nous situer pour le décrire, le monde dans lequel nous vivons aujourd'hui se présente, fondamentalement comme un monde d'inégalités et d'injustices, [...], où les uns sont toujours plus heureux et les autres toujours plus malheureux! Cela, à tous points de vue, cela dans tous les domaines : justice, santé, alimentation, éducation, ... En effet, nous y trouvons, d'un côté, ceux à qui tout est permis, qui sont au-dessus de la loi et, de l'autre, ceux à l'égard de qui la même loi se montre particulièrement cruelle et inhumaine »25(*).

D'autre part, en niant l'égalité naturelle des hommes et ayant affirmé que les uns naissent pour l'esclavage et les autres pour la domination, Aristote semble prendre l'effet pour la cause. Car, « tout homme né dans l'esclavage naît pour l'esclavage, rien n'est certain. Les esclaves perdent tout dans leurs fers, jusqu'au désir d'en sortir; ils aiment leur servitude [...]. S'il y a donc des esclaves par nature, c'est parce qu'il y a eu des esclaves contre nature. La force a fait les premiers esclaves, leur lâcheté les a perpétués »26(*).

En revanche, aucun pouvoir légitime ne peut survenir de la force car, celle-ci est une puissance physique de laquelle rien de moralité ne résulte de ses effets. Par conséquent, elle devient un acte de nécessité et non point de volonté du fait que la volonté est toujours positive. C'est seulement par prudence qu'on fait recours à la force, laquelle force n'engendre donc aucun droit. Le droit est légitime et suppose n'être pas conditionné par la force dans la mesure où une fois la force anéantie par une autre supérieure, le droit cesse à l'instant même. Dès lors, on n'est obligé d'obéir qu'aux puissances légitimes27(*).

La liberté de l'homme étant naturelle, son obligation d'obéir à la puissance légitime n'est pas un esclavage. L'homme demeure libre dans ses actions et, contrairement à d'autres penseurs (Aristote, Spinoza, Diderot, ...), Rousseau affirme que la liberté28(*) est la caractéristique essentielle de l'homme. Mais, il arrive que cet homme, libre par nature, ne s'appartienne plus : il devient donc aliéné. Aliéner, selon Rousseau, signifie donner ou vendre. Ainsi donc, un être aliéné est celui qui ne s'appartient pas. Un individu, un peuple peut se vendre ou se donner sous plusieurs motifs : soit pour s'assurer la subsistance, soit pour sa sécurité ou encore pour sa tranquillité.

Ceci s'expérimente à travers le monde aujourd'hui où beaucoup d'hommes et de femmes sont aliénés si pas au niveau individuel (par le sexe, le travail, et autres maux ou abus commis sur eux à cause de la pauvreté), régional, national (par la crise économique), culturel (par la mode, ...); etc. En Afrique, et en particulier en République Démocratique du Congo, à cause de la disette issue des guerres calamiteuses, certains souhaiteraient le rétablissement des pouvoirs déchus en guise d'une référence périodique de tranquillité, de stabilité, dite de "paix". D'autres encore, souhaiteraient le retour de la colonisation. En Irak, de même, vu la multiplicité des hostilités, certaines opinions réclameraient le retour de Saddam au pouvoir. Tout ceci, ce sont de sortes d'aliénations. En effet, Rousseau récuse le pacte de soumission car « renoncer à sa liberté, c'est renoncer à sa qualité d'homme »29(*).

Ainsi, ayant rejeté la famille comme modèle de la société politique, ainsi que les théories de Grotius et de Hobbes selon lesquelles le droit, issu des faits donne le pouvoir à un petit nombre de chefs de nature supérieure, c'est-à-dire, à une minorité d'individus; ayant rejeté l'autorité naturelle et la force comme sources du droit et de légitimité; ayant établi que la doctrine selon laquelle l'autorité peut être fondée sur une convention d'aliénation est inacceptable, Rousseau souligne qu'une convention "unanime" d'association, antérieure aux institutions, est indispensable. En effet, « puisque aucun homme n'a une autorité naturelle sur son semblable, et puisque la force ne produit aucun droit, restent donc les conventions pour base de toute autorité légitime parmi les hommes »30(*).

* 18LAUNAY, M., Rousseau, Paris, PUF, 1966, pp.41-43.

* 19 ROUSSEAU, J.-J., Du contrat social. Les rêveries d'un promeneur solitaire, Paris, La renaissance du livre, s.d, p. 9.

* 20 Ibid, p.9.

* 21 «Pour comprendre l'homme civil, et le situer comme tel, il faut viser l'homme de la nature».Cf. CHIRPAZ, F., L'homme dans son histoire. Essai sur Jean-Jacques Rousseau, Genève, Labor et Fides, 1984, p.26.

* 22 ROUSSEAU, J.-J., Op. Cit., p.10.

* 23 Ibid, p.11.

* 24 ARISTOTE, La politique, Paris, Gonthier/PUF, 1983, p.23.

* 25 KALELE Ka-Bila, «Comment changer l'ordre social actuel?», in Revue de Recherches Philosophiques Africaines, n°11, Kinshasa, 1985, pp.315-316.

* 26 ROUSSEAU, J.-J., Op.Cit., pp.11-12.

* 27 Ibid, p.13.

* 28 «Précision capitale, car si, pour Rousseau, l'homme est libre, ce n'est pas parce qu'il serait considéré comme cause prochaine et seule efficace d'une action, c'est parce qu'il est un sujet moral [...]. En plus, l'homme est libre parce qu'il est créature de Dieu et parce qu'il est sujet moral». Cf. CHIRPAZ, F., Op. Cit., pp.38-39.

* 29 ROUSSEAU, J.-J., Op. Cit., p.14.

* 30 Ibid, p.13.

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"Il faudrait pour le bonheur des états que les philosophes fussent roi ou que les rois fussent philosophes"   Platon