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Pratiques de responsabilité sociale des entreprises industrielles au Cameroun

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par Joseph Herman TIONA WAMBA
Université de Douala Cameroun -  Diplôme de professeur d'enseignement technique grade 2 ( DIPET II ) 2009
  

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Pour trouver une convergence entre les intérêts dissonants de ses multiples parties prenantes, l'entreprise doit définir ses performances économiques, sociales et environnementales comme une contribution à un bien commun. Une telle vision de l'entreprise a été développée pour la première fois en 1953 aux États Unis par H. BOWEN dans son ouvrage « Social Responsibilities of the Businessman », auteur à qui on attribue la paternité du thème sur la Responsabilité Sociale des Entreprises (RSE). Le thème sur la RSE a été véritablement développé entre les décennies 1960 et 1970. C'est ainsi que W. FREDERICK (1960) affirmait que les moyens de production devaient être utilisés de telle façon qu'ils améliorent le bien être socioéconomique global. Mc GUIRE (1963) a mis en évidence les obligations sociétales qui incombent à la firme (obligations qui dépassent le cadre économique et légal). Pour ce dernier, l'entreprise doit agir équitablement comme devrait le faire tout citoyen. DAVIS (1967) quant à lui, souligne la dimension éthique de la responsabilité sociétale ; pour lui, l'entreprise doit considérer les conséquences de ses actions sur le système social dans son ensemble.

La responsabilité sociale présente des spécificités lorsqu'on va d'un milieu à un autre. En effet, aux États Unis, la RSE s'inscrit dans un registre de culture d'entreprise. Les entreprises y posent des actes socialement responsables par volonté et non par obligation. Leurs motivations à poser des actes sociaux ne sont ni imposées par l'État, ni exigées par la loi, et le plus souvent, ni même attendues par la société civile (A. B. CARROL, 1979). On peut regrouper les activités sociales volontaires qui y ont été menées et qui continuent de l'être, dans les actions telles que les contributions philanthropiques la réintégration des enfants abandonnés dans la société, des programmes de formation des travailleurs ou non travailleurs entre autres. L'approche de la RSE aux États Unis est de ce fait, qualifiée d'approche normative. Ce qui n'est pas le cas ailleurs.

En effet, en Europe, les actes de RSE posées par les entreprises sont plus ou moins régis par des lois. L'entreprise est comme un citoyen qui a des droits et devoirs envers la société dont elle fait partie. En Europe, le comportement de la firme est une réponse aux forces du marché et aux contraintes légales (E. PERSAIS, 2007). En d'autres termes, la responsabilité sociale de la firme implique que celle-ci soit en phase avec les normes, les valeurs et les attentes de performance sociétale. L'actualité européenne témoigne de la richesse du débat quant à la prise en compte des données environnementales. C'est ainsi que la Directive N° 2004-35 du 21 Avril 2004 sur la responsabilité environnementale en ce qui concerne la prévention et la réparation des dommages environnementaux, impose des nouvelles obligations pesant sur les entreprises. Les dommages environnementaux couverts par le texte européen doivent répondre à un certain nombre de conditions : être mesurable, consister à une modification négative d'une ressource naturelle, survenir de manière directe ou indirecte, être d'une gravité significative sur l'environnement (I. TCHOTOURIAN, 2006). C'est pourquoi l'approche européenne de la RSE est qualifiée d'approche légale.

En Afrique en général et au Cameroun en particulier, compte tenu du respect des normes environnementales, il existe une légère hésitation quant à la fixation des entreprises camerounaises dans l'une ou l'autre approche de la RSE. On note quand même la présence d'actions philanthropiques de la part de quelques multinationales opérant au Cameroun ; à l'instar du Pari Mutuel Urbain Camerounais (PMUC) qui, en plus des emplois qu'il offre aux citoyens camerounais, fait des dons de toute nature notamment dans les communes urbaines et aux clubs sportifs. On peut aussi énumérer le cas de MTN qui est le sponsor officiel du championnat camerounais de football des première et deuxième divisions (« MTN elite one » & « MTN elite two », respectivement) et qui sponsorise massivement les grands évènements tels que les jeux universitaires, les foires et concerts entre autres. Toutefois, au niveau des entreprises nationales et au sein des multinationales de fabrication, on est un tout petit peu confus quant au respect des normes environnementales et des valeurs des populations riveraines qui sont pourtant des stakeholders à part entière. On peut citer en guise d'exemple le cas de Sic CACAO qui, de par sa situation géographique, pollue les populations environnantes sur plus de dix kilomètres de diamètre. On peut aussi citer le cas de HYSACAM dont les bacs à ordures empestent les populations des sous-quartiers, par ce que toujours débordant d'ordures ménagères.

Face à ces deux situations extrêmes, il serait difficile de statuer sur les habitudes réelles des entreprises camerounaises en termes de responsabilité sociale ou sociétale. C'est la raison pour laquelle nous nous sommes intéressés au thème intitulé « pratique de responsabilité sociale des entreprises au Cameroun »

Dans son ouvrage « Social Responsibilities of the Businessman », H. Bowen analyse les facteurs expliquant l'émergence de la RSE : « Pourquoi est-ce que les hommes d'affaires d'aujourd'hui se sentent concernés par leurs responsabilités sociales ? [...] Il est possible de diviser la réponse à cette question en trois parties : (1) parce qu'ils ont été forcés de se sentir plus concernés ; (2) parce qu'ils ont été persuadés de la nécessité de se sentir plus concernés et (3) parce que la séparation entre propriété et contrôle a créé des conditions qui ont été favorables à la prise en compte de ces responsabilités » (p. 103), (J. P. GOND, 2006).

Si au cours des années 1980 les chercheurs tels que A. Carroll, Jones, Wartick & Cochran, Epstein, Mc Guire et J. PASQUERO entre autres, s'attèlent plus à montrer le lien ou l'absence de lien entre CSR (Corporate Social Responsibility) et performance économique, c'est au cours de la décennie 1990 que le concept de CSR a servi de point d'ancrage à de nombreux courants de pensée partageant la même philosophie : existence d'une responsabilité extra économique de l'entreprise (Eric PERSAIS, 2007). En effet, la place de l'entreprise dans la société a été véritablement une préoccupation depuis le début des années 1990, avec « les comportements opportunistes des firmes privées mais aussi parfois publiques, qui ont conduit à des mises en cause sérieuses de la légitimité des entreprises et de l'éthique de leurs dirigeants qui se sont rendus coupables d'errements divers, à cause d'une gestion exclusivement financière » (AMADIEU in LE DUFF, 1999). C'est ainsi que dans la deuxième moitié de la décennie 1990, de nouvelles théories du management sociétal ont progressivement vu le jour. Il s'agit notamment des: stakeholder theory, business ethics, corporate citizenship.

Au niveau mondial, le mouvement autour de la RSE n'a pris de véritable ampleur qu'au milieu de la décennie 1990 pour se généraliser au début du troisième millénaire (E. PERSAIS, 2007). Le thème sur la Responsabilité Sociale de l'Entreprise (RSE) constitue l'un des sujets phares de la recherche en sciences de gestion en ce début de troisième millénaire (A. BENSEBAA et A. BÉJI-BÉCHEUR, 2008). Aujourd'hui en Europe, Elle se caractérise ainsi par : une démarche volontaire visant à aller au-delà des obligations légales et des conventions collectives ; un souci d'intégrer durablement les vues des différentes parties prenantes de l'entreprise ; et un engagement à une certaine transparence (Commission européenne, 2001). Mais une telle vision de la RSE concilie mal avec la perception que les managers d'entreprises se font du libéralisme économique.

En effet, outre ses avantages commerciaux indéniables, le libéralisme économique a contribué à certaines déviances au niveau du comportement des firmes (exemple : recherche de la rentabilité à tout prix au détriment du bien être des parties prenantes). Un tel comportement associé aux pratiques de corruption et aux trafics d'influence ont accru la demande pour une moralisation des activités économiques. La publication en 2001 du livre vert sur la RSE par la Commission Européenne atteste la volonté de faire de cette problématique, un élément central de la politique économique de l'union.

Toutefois, les contraintes économiques qui se traduisent par des compressions de personnel et des délocalisations concilient mal avec l'ambition affichée par certaines grandes entreprises de pratiquer un management responsable. C'est ainsi qu'en France par exemple, des entreprises telles ST Micro ou Hewlett Packard peuvent-elles à la fois revendiquer leur statut d'entreprise socialement responsable et fermer certains de leurs sites en France pour développer leurs activités dans de pays où la main d'oeuvre bénéficie de moins d'avantages sociaux (Bénédicte .D & Christine .N, 2006). C'est également le cas de DELL cette année.

La RSE est un concept flou par nature ; puisqu'il est difficile de dire où commence et où s'arrête cette responsabilité (E. Persais, 2004b). Le fait de s'interroger sur la nature même de la RSE permet de mieux comprendre ce qui touche à sa mise en oeuvre dans les pratiques d'entreprises.

Cependant, une telle responsabilité ne saurait être simplement vécue comme une obligation légale ou réglementaire. Elle se manifeste au contraire par des actes libres et volontaires, susceptibles justement d'aller au delà des définitions qu'en donnent les juristes (Cornu .G, 2004) : « une obligation de répondre d'un dommage devant la justice et d'en assumer les conséquences civiles, pénales, disciplinaires, etc. (soit envers la victime, soit envers la société). La suggestion de Carroll (1991) d'aborder la RSE au travers du concept de partie prenante est intéressante. Ainsi, dans le contexte camerounais actuel, la problématique apparaît beaucoup plus complexe dans une conception extensive où, la RSE confronte le management à toutes les parties prenantes dont les intérêts sont concernés par les résultats et le développement de l'entreprise.

Dans un contexte d'internationalisation de l'économie, la question de la RSE prend une importance croissante. Face aux critiques formulées par les groupes de pressions vis-à-vis de comportements opportunistes, les entreprises sont désormais tenues de démontrer qu'elles inscrivent leurs actions dans le cadre d'une économie responsable. En général, l'éthique de l'entreprise est surtout un moyen d'entretenir une image positive de celle-ci, aux yeux de ses différents publics, internes et externes. Son développement est incontestablement lié à l'importance croissante de l'opinion des différents publics de l'entreprise : actionnaires, salariés, clients, partenaires économiques, pouvoirs publics (G. Bressy & C. Konkuyt, 2000). Elle est un des moyens récents utilisés par les firmes pour tenter de maîtriser leur image. Ceci dit, si la question de la RSE reste au centre des préoccupations liées à l'entreprise et à son rôle dans la société, tel n'est pas le cas dans les pays en voie de développement, notamment en Afrique.

Dans les pays africains, les réglementations ne sont pas pour encourager la mise en oeuvre de la RSE. En effet, le sous-développement, la misère et la pauvreté poussent les États et les politiques gouvernementales à s'intéresser uniquement à la rentabilité des entreprises.

Au Cameroun, on assiste dans les entreprises spécialisées dans la fabrication des matériaux de construction, à une mise en chômage technique qui se transforme progressivement en chômage définitif (cas vécu par deux employés de la SOBAF que nous avons rencontré). Que dira t-on des employés à temps partiel embauchés par les sociétés de construction des routes, qui sont remis au chômage en fin de travaux ? L'incidence des contraintes économiques sur la RSE a aussi été observée en Janvier 2009 à la SCR MAYA (entreprise spécialisée dans la fabrication des matières grasses) où les employés ont dû observer deux semaines de congé non payant, le temps d'écouler la surproduction réalisée pendant les périodes des fêtes de fin d'année 2008.

Par contre au Cameroun, le comportement des entreprises à l'égard des exigences de RSE est surprenant. En effet, il est de coutume de retrouver, des entreprises qui se veulent citoyennes de par certaines oeuvres sociales et qui, en même temps nuisent aux populations qui leur sont riveraines. C'est le cas par exemple de la société Sic CACAO qui a mis à la disposition des populations environnantes, un forage (oeuvre sociale) et qui en même temps, pollue l'atmosphère sur plus de dix kilomètres à la ronde. Le cas des « Brasseries du Cameroun » qui, en dépit des évènements sportifs pour jeunes qu'elle organise (coupe top), pollue la zone de Koumassi où elle brasse du vin. Ou encore la Guinness qui, elle aussi, pollue l'environnement des populations environnantes malgré le puits d'eau potable qu'elle met à la disposition de ces mêmes populations.

Face à cet état des choses, on est enclin de se demander : quelles sont les réalités de la RSE au Cameroun ? En d'autres termes, les préoccupations et les pratiques réelles des entreprises camerounaises correspondent-elles véritablement aux valeurs véhiculées par le concept de RSE ?

Cette question principale suscite les sous-questionnements suivants :

- Peut-on caractériser la RSE au Cameroun ?

- Quelle est la spécificité de la RSE dans les entreprises au Cameroun ?

- Vers quel modèle la RSE tend-t-elle au Cameroun ?

L'importance majeure de ce thème sur la Responsabilité Sociale des Entreprises (RSE) est qu'il constitue l'un des sujets phares de la recherche en sciences de gestion en ce début de troisième millénaire.

L'intérêt de travail apparait principalement à deux niveaux :

- Vu sous un angle purement académique, ce travail va contribuer au renforcement de la recherche sur les thématiques de la RSE, particulièrement dans le contexte camerounais. En effet, la littérature abonde ailleurs sur le thème de la RSE, mais au niveau camerounais, il y a un vide à combler ;

- Pour les entreprises, ce travail s'inscrit dans le cadre de la recherche par celles-ci, d'objectifs extra économiques (environnementaux et sociaux) à moyen et long terme. En plus, ce travail servira d'outil de positionnement stratégique aux entreprises, par rapport à leur environnement endogène et exogène.

Pour répondre aux questions posées plus haut, nous nous sommes fixés un certain nombre d'objectifs. De manière générale, ce travail vise à caractériser la Responsabilité Sociale des Entreprises au Cameroun. Pour y arriver, il faudra spécifiquement :

- Découvrir la réalité de la RS au sein des entreprises ;

- Ressortir la spécificité et la logique de la RSE dans les entreprises camerounaises ;

- Déterminer un modèle de RSE convenable aux entreprises camerounaises.

Si les problèmes d'ordre sociaux concernent aussi bien les entreprises commerciales qu'industrielles, il va de soi que les problèmes d'ordre environnementaux (la pollution par exemple) font majoritairement recours aux entreprises de fabrication. C'est dans cette perspective que nous avons mené une étude exploratoire sur une population majoritairement constituée d'entreprises du secteur industriel.

Après avoir parcouru la littérature sur la RSE, nous avons effectué une première descente sur le terrain (dans les zones industrielles de Ndobo-Bonaberi, MAGZI de Bonaberi et MAGZI Douala Bassa) où nous avons constaté que les pratiques des entreprises en matière de responsabilité sociale étaient ambigües et prêtaient à confusion. Aussi avons-nous décidé d'appliquer à la fois les méthodes qualitatives et quantitatives de la recherche. Le volet qualitatif ayant pour objectif de comprendre le phénomène étudié, consiste en une approche constructiviste appliquée à quatre entreprises de la place (par voie d'entretiens semi-directifs). Le volet quantitatif ayant un objectif de généralisation, consiste à analyser vingt-huit questionnaires administrés à autant d'entreprise, pour confirmer ou infirmer les résultats de la recherche exploratoire. Nous nous sommes limités uniquement à la ville de Douala, parce que, non seulement Douala est la capitale économique, mais aussi, la principale ville industrielle du Cameroun.

Nous avons donc procédé par voix d'enquête sur un échantillon d'entreprises qui opèrent dans les domaines d'activités suivants : matériaux de construction, parfums et produits de toilettes, imprimeries, entreprises brassicoles, industries agro-alimentaires, industries textiles, savonneries, matières plastiques, peintures, câbles électriques, incinération des déchets. La sélection au sein de chaque sous secteur s'est faite de manière probabiliste.

Notre recherche étant exploratoire, la collecte des données s'est faite par voie d'entretiens avec les responsables de la mise en oeuvre de la RSE. Nous avons nous-mêmes effectué ces entretiens (observation participante) afin d'éviter l'introduction des biais dans les résultats de recherche.

Enfin, les données collectées ont été analysées à l'aide de deux outils d'analyse pour une bonne lisibilité du phénomène. Nous avons premièrement procédé par analyse du contenu, ensuite, pour répondre aux objectifs de spécificité et de modélisation de la RSE au Cameroun, nous avons procédé par tri-croisé, notamment les tableaux et coefficients de contingence.

L'ensemble du travail rapporté dans ce mémoire s'articule autour de deux parties :

La première partie reprend de manière dynamique, les appuis théoriques existants sur la thématique de la responsabilité sociale d'entreprise. Elle est subdivisée en deux chapitres : le premier explore et retrace la genèse et l'évolution du concept de responsabilité sociale à travers les théories modernes existantes à cet effet, et aborde les différents domaines d'application et instruments de mise en oeuvre de responsabilité sociale. Le second chapitre est consacré aux enjeux, aux risques et à l'importance croissante de la responsabilité sociale dans un contexte de mondialisation.

La deuxième partie, la phase empirique de notre travail, comprend elle aussi deux chapitres. L'un s'intéresse à la démarche adoptée, tout en revenant sur la population étudiée, et l'échantillon de notre recherche. L'autre chapitre (le dernier), présente les résultats obtenus, en fait une analyse détaillée, les interprète et propose un modèle de responsabilité sociale propre aux entreprises situées au Cameroun.

PREMIÈRE PARTIE :

NÉCESSITÉ ET MISE EN OEUVRE DE LA RESPONSABILITÉ SOCIALE DE L'ENTREPRISE

Selon les acteurs de la théorie évolutionniste de la firme, ce sont leurs « savoir-faire » et leurs « compétences organisationnelles » qui différencient les entreprises. L'identité de l'entreprise se reflète dans l'image de l'entreprise qui est perçue par son environnement et que l'entreprise peut influencer par ses actions de communication et de relations publiques. L'entreprise voit ainsi s'élargir, la sphère des tiers à qui elle doit rendre compte, de ses partenaires à l'ensemble de la société : on dit que l'entreprise devient citoyenne. Cette citoyenneté se traduit par des interventions dans différents domaines socioculturels et on parle de Responsabilité Sociale de l'Entreprise.

Ainsi, cette partie essentiellement théorique, a été consacrée à la nécessité de la Responsabilité Sociale de l`Entreprise et à sa mise en oeuvre au sein des pratiques de gestion d'entreprise. Elle se subdivise en deux chapitres. Nous nous sommes attardés dans un premier temps sur la genèse et l'évolution du concept de responsabilité sociale de l'entreprise (Chapitre 1). Il est question ici de retracer l'historique de ce concept aux contours multiples et d'en présenter les modèles (anglo-saxon et européen), domaines et instruments. Dans en second temps, nous avons mis exergue la place désormais incontournable des pratiques de responsabilité sociale au sein des entreprises (Chapitre 2). Pour y parvenir, nous avons, dans une première section, dégagé les enjeux, risques et avantages liés à la mise en oeuvre de la responsabilité sociale. Dans une deuxième section, nous avons illustré l'importance et le rôle des instances internationales dans les pratiques de responsabilité sociale.

Chapitre I :

GENESE ET EVOLUTION DE LA RESPONSABILITE

SOCIALE DES ENTREPRISES

Dans ce chapitre, nous nous proposons de situer sur l'axe du temps, l'éclosion du concept de Responsabilité Sociale de l'Entreprise et d'en ressortir l'évolution depuis sa conception jusqu'à nos jours. Pour ce faire, nous développerons dans une première section, l'émergence du concept de la RSE à travers son historique jusqu'à son importance en passant par ses différentes approches organisationnelles. Ensuite, nous présenterons dans une deuxième section, les modèles de RSE, les différents domaines d'application de la RSE et les instruments de la RSE.

Section I : EMERGENCE DU CONCEPT DE RESPONSABILITE SOCIALE DE

L'ENTREPRISE.

Dans cette section, nous allons après avoir retracé son histoire, définir le concept de RSE, présenter la théorie des parties prenantes, développer quelques approches organisationnelles de la RSE et en ressortir l'importance croissante.

I - 1 - LA RESPONSABILITE SOCIALE DE L'ENTREPRISE : HISTORIQUE,

DEFINITION ET PRINCIPE

Nous retraçons d'abord l'histoire de la RSE, puis nous définissons ce concept aux contours multiples que nous abordons par la suite selon l'approche des parties prenantes.

I - 1 - 1 - Aperçu historique de la Responsabilité Sociale de l'Entreprise

On associe souvent la RSE au développement durable ou encore à la mondialisation, alors que cette notion a vu le jour bien avant ces phénomènes. En réalité, la RSE est apparue dès les années 1950' aux États-Unis, mais sa diffusion vers d'autres contextes s'est faite de manière décalée dans le temps. Nous allons dans ce qui suit nous intéresser à l'historique de ce concept et aux diverses acceptions auxquelles il a donné lieu.

Le thème de la Responsabilité Sociale des Entreprises n'est pas véritablement nouveau. À partir des années 1920, plusieurs dirigeants s'expriment publiquement sur leur responsabilité à l'égard de la société. Si aucune doctrine clairement formulée de la responsabilité sociale n'avait émergé à la fin de la décennie, les discours de l'époque sont très marqués par les concepts de « public service » et de « trusteeship » qui stipulent l'idée d'un contrat implicite, caractérisant la relation entre l'entreprise et la société (Heald, 1961, 1971).

Ces débats, bien que controversés, ont été mis en application par Henri Ford, surtout sur le plan interner avec l'instauration du salaire journalier minimum (principe du five dollars per day). Des discours et pratiques relatifs à la responsabilité sociale se développent ainsi de manière précoce dans le milieu des affaires. Au début des années 1930, notamment en 1932 le débat entre Berle et Dodd sur la question de la gouvernance d'entreprise (stakeholders versus shareholders) conduit aux premières réflexions sur la RSE. Mais ce n'est que dans les années 1950 que des efforts significatifs en matière de RSE voient le jour.

Dans son expression et dans son sens actuel, la RSE est essentiellement liée au contexte nord américain de l'après Deuxième Guerre mondiale (Charles et Hill, 2004). C'est l'ouvrage de Bowen en 1953 qui marque l'avènement du concept et le début de la recherche autour de lui (Carroll, 1999 ; Acquier et Gond, 2005 ; Locket et coll., 2006 ; Windsor, 2006). En effet, Bowen y pose les fondements de la responsabilité sociale de l'entreprise, même s'il y relève plus tard (en 1978), un caractère idéaliste et normatif faisant prévaloir deux principes. Le premier renvoie au fait que les hommes d'affaires ne doivent prendre que des décisions qui vont dans le sens des orientations et des valeurs souhaitées par la société. Le deuxième stipule que la prise en compte de préoccupations sociales par la firme doit se faire d'une manière volontaire. C'est donc H. BOWEN qui a fait passer ce concept dans l'ère moderne du management.

Si Bowen est reconnu dans la littérature comme étant le père de la RSE, Caroll (1999) signale que les idées qu'il a exprimées dans son ouvrage ne sont pas nées ex nihilo et qu'on en trouve la trace dans certains essais de la littérature managériale, notamment dans les années 1930' et 1940'. Notons tout de même qu'il est possible que la RSE, telle que formulée à l'époque par Bowen, repose sur les valeurs culturelles et managériales qui prévalaient à son époque. Le contexte ayant évolué, l'acception de la RSE a progressivement changé.

La RSE est devenue un thème de recherche à l'origine de l'émergence d'un nouvel espace académique, à savoir le courant « Business and Society » s'intéressant aux relations entre l'entreprise et son environnement sociétal (Acquier et Gond, 2005). Son influence s'est progressivement renforcée à travers le monde pendant les années 1960. Depuis lors, la responsabilité sociale de l'entreprise fait l'objet de nombreux débats entre chercheurs, praticiens, État, organisations non gouvernementales et autres acteurs de la société moderne.

Après avoir occupé les chercheurs américains et suscité quelques controverses émanant d'académiciens libéraux, la recherche sur la RSE diminuera d'intensité à partir du milieu des années 1980 et muera vers d'autres concepts comme la citoyenneté de l'entreprise ou l'approche par les parties prenantes (Caroll, 1999). Toutefois, cette pensée de Carroll, bien que séduisante, ne s'applique qu'au contexte américain. Elle va alors se heurter au nouvel ordre économique mondial établi, qui prône le libéralisme économique.

L'émergence de la grande entreprise au delà des frontières nord-américaines est à l'origine du regain d'intérêt que connait la RSE en ce début de siècle, en redevenant un phénomène de plus en plus présent sur la scène politique et économique.

En Europe, on a commencé à s'intéresser à la RSE dès le milieu des années 1990 suite aux actions des organismes de la société civile à l'encontre des entreprises ayant causé un tort environnemental (Shell, Total ...), social (Danone, Renault...) ou sociétaire (Parmalat, Vivendi...). D'un autre côté, le regain d'intérêt pour la question s'est accentué à partir du début des années 2000 aux États-Unis avec les faillites touchant de grands groupes américains (Enron, Arthur Andersen, Worldcom, Xerox...). C'est sans doute la raison pour laquelle Doh et Guay (2006) attribuent le regain d'intérêt pour la RSE à deux éléments : la montée de la société civile d'un côté, et les scandales financiers des grandes entreprises de l'autre.

I - 1 - 2 - Définir la Responsabilité Sociale de l'Entreprise : ambiguïtés

institutionnelles, managériales et académiques

La RSE est un concept en pleine évolution pour lequel il n'existe pas, à l'heure actuelle, de définition universellement acceptée. Les qualificatifs ne manquent pas à son égard : concept vague, flou sémantique, ambiguïté lexicale, concept ombrelle, notion ondoyante et protéiforme, sont autant d'expressions sensées décrire l'hétérogénéité à la fois des discours et théories sur la RSE et des pratiques plus éparses. Elle est généralement interprétée comme étant la façon dont les entreprises intègrent les préoccupations sociales, environnementales et économiques à leurs valeurs, à leur culture, à leur prise de décisions, à leur stratégie et à leurs activités d'une manière transparente et responsable, et donc la façon d'instaurer des pratiques exemplaires, de créer de la richesse et d'améliorer la société.

Sue le plan de la généalogie, le concept de RSE fait référence à deux visions distinctes: la RSE comme obligation contraignante et la RSE comme engagement volontaire. Cette distinction est au coeur des discussions internationales sur la RSE entre ceux qui veulent que des contraintes s'imposent sur les entreprises (ONG, syndicats...) et ceux qui ne le souhaitent pas (milieu d'affaires).

Depuis les années 1960 et 1970, on assiste à une multiplication de définitions du concept de responsabilité sociale de l'entreprise. L'une des explications à cette connotation polysémique de la RSE est que ce domaine est non seulement influencé par les évolutions théoriques, mai aussi, par des agendas politiques, sociaux et managériaux. D'où la difficulté à concilier les attentes de l'ensemble des parties en question. Selon Allouche et al. (2004), les tentatives de définition de la RSE par les acteurs concernés, entreprises, agences de notations et chercheurs, ont généré une confusion dans la conceptualisation de cette notion. Déjean et Gond (2004) font la différence entre les définitions institutionnelles et celles académiques de la RSE. Nous nous proposons donc de développer les définitions institutionnelles, managériales et académiques de la RSE, en prenant chaque fois le soin de ressortir leurs contributions respectives à la conceptualisation de cette notion.

I - 1 - 2 - 1 - Vers une définition univoque de la RSE : définitions institutionnelles et

managériales

La responsabilité sociétale fait l'objet d'une attention accrue de la part de nombreuses entreprises ainsi que d'organisations de nature très diverses : des ONG, des institutions européennes et mondiales, mais aussi des associations religieuses, des associations professionnelles et des réseaux d'entreprises.

Ainsi, La commission européenne (2001) a adopté une définition qui ménage les deux aspects fondamentaux de la RSE (contrainte et volontarisme) : « Être socialement responsable signifie non seulement satisfaire pleinement aux obligations juridiques applicables mais aller au-delà et investir davantage dans le capital humain, l'environnement et les relations avec les parties prenantes, cela suppose l'intégration volontaire par les entreprises de préoccupations sociales et environnementales à leurs activités commerciales et leurs relations avec les parties prenantes ». En effet, le livre vert (2001) de la Commission Européenne, qui est devenu une référence dans les organismes internationaux et qui est évoqué dans la majorité des travaux sur la RSE, la définit comme : « l'intégration volontaire des préoccupations sociales et écologiques des entreprises à leurs activités commerciales et leurs relations avec toutes leurs parties prenantes internes et externes (actionnaires, personnels, clients, fournisseurs et partenaires, collectivités humaines,...), et ce, afin de satisfaire pleinement aux obligations juridiques applicables et investir dans le capital humain et l'environnement ».

Pour la Business for Social Responsibility, la CSR (Corporate Social Responsibility) se réfère généralement au fait de relier les prises de décision en entreprise à des valeurs éthiques, de se conformer aux contraintes légales, de respect pour les personnes, la communauté et le gouvernement. [...] la CSR est définie comme le fait que l'entreprise se comporte de manière à satisfaire ou dépasser les attentes éthiques, légales, commerciales et publiques que la société manifeste envers les entreprises (F. DEJEAN & J-P. GOND, 2003). A cette définition, vient s'ajouter celle de la World Business Council on Sustainable Development pour qui la CSR est l'engagement de l'entreprise à contribuer à un développement économique durable, en travaillant avec ses employés, leur famille, la communauté locale et la société dans son ensemble pour améliorer la qualité de vie.

La plupart des définitions accordent une place centrale à la notion d'engagement de l'entreprise, et spécifient que cet engagement doit aller au delà des obligations et des attentes légales. Cependant, ces définitions divergent quant à leur approche de la structure de la CSR, et les axes privilégiés par les organismes ne sont pas toujours les mêmes. Ainsi une entreprise d'un secteur donné définira la CSR en fonction des stakeholders pertinents de son point de vue, alors que des institutions à caractère plus international auront tendance à privilégier les relations avec la communauté locale et les familles des employés, renvoyant à des problèmes plus spécifiques tels que le travail des enfants.

L'impression d'ensemble qui se dégage des ces définitions est le caractère en partie contingent du contenu de la CSR en fonction du niveau où se situe l'organisation (secteur / niveau national ou supranational) et de ses problématiques propres. Nous allons dans le sous-paragraphe suivant, donner les définitions académiques de la RSE.

I - 1 - 2 - 2 - Rapprochement des définitions théoriques et académiques de la RSE

Selon M. Friedman (1970), la responsabilité sociale des entreprises est d'accroître ses profits. La seule responsabilité des entreprises est envers ses actionnaires. Cette proposition de Friedman repose sur les postulats de la « main invisible de Adam Smith », car pour lui, seules les forces du marché génèrent la richesse collective, ce qui n'est pas totalement acceptable dans le contexte actuel. Par exemple, dans des cas de fraudes comme Enron et bien d'autres, cette responsabilité envers les actionnaires n'a pas été respectée. Autrement dit, la RSE ne se limiterait pas à cela.

En effet, nombreux sont les auteurs qui s'opposent à cette vision étroite de la responsabilité sociétale de l'entreprise. Au contraire de la vision de Friedman, selon la théorie des stakeholders, il existe un contrat implicite entre l'entreprise et la société. Si ce contrat est rompu, l'entreprise perd sa légitimité et ne peut bientôt plus fonctionner. En conséquence, l'entreprise doit gérer ses relations avec ses parties prenantes, i.e. avec tous ceux qui peuvent affecter ou peuvent être affectés par les activités de l'entreprise. Ainsi, selon Freeman (1984), l'entreprise est responsable devant toutes ses parties prenantes.

Les définitions académiques du concept de RSE ont ceci en particulier qu'elles fournissent un cadre d'analyse général indépendant des objectifs propres à une organisation donnée. C'est le cas, par exemple, de la définition de Mc Williams et Siegel (2001) selon laquelle la RSE est l'ensemble des actions visant le bien social au-delà des intérêts de la firme et de ce qui est demandé par la loi. Les divergences liées à la définition de la RSE renvoient aux fondements et aux mobiles qui ont poussé à l'intégration de la responsabilité sociale.

Selon le père du concept moderne de la RSE H. Bowen (1953) : « La CSR renvoie à l'obligation pour les hommes d'affaires d'effectuer les politiques, de prendre les décisions et de suivre les lignes de conduite répondant aux objectifs et aux valeurs qui sont considérées comme désirables dans notre société ». Le caractère obligatoire que souligne Bowen dans cette définition est propre à un système assidu de contrôle du respect de la réglementation. C'est le cas dans plusieurs pays d'Europe (France et Grande Bretagne par exemple). Ramené au contexte subsaharien en général, et camerounais en particulier, cette définition trouve mal son application.

Mc Guire (1963) et Davis (1973) soutenus plus tard par M. T. Jones (1980), perçoivent la RSE comme la prise en compte par l'entreprise, de problèmes qui vont au delà de ses obligations économiques, techniques et légales et reconnaissance par celle-ci, de ses responsabilités envers la société. Vu sous cet angle, la RS débute là où s'arrête la loi. Que dira t-on des entreprises qui ne se conforment qu'au stricte minimum requis par la loi, parce que ne faisant face à aucune compétition sur le marché ?

A. B. Carroll (1979) ne se contente pas seulement de limiter les champs d'action possibles de l'entreprise responsable car pour elle, « la CSR intègre l'ensemble des attentes économiques, légales, éthiques et philanthropiques que peut avoir la société à l'égard d'une entreprise à un moment donné ». Suivant le même ordre d'idées que Carroll, Wood (1991) souligne que: « La signification de la responsabilité sociétale ne peut être appréhendée qu'à travers l'interaction de trois principes : la légitimité, la responsabilité publique et la discrétion managériale, ces principes résultant de la distinction de trois niveaux d'analyse, institutionnel, organisationnel et individuel ». Les définitions proposées par Carroll et Wood vont plus loin que les approches précédentes en spécifiant les catégories d'analyse de la CSR et en systématisant les acquis des recherches antérieures.

On constate une assez forte proximité entre les plus anciennes définitions de la CSR et les approches managériales. Ces définitions se contentent en général de mettre en avant le caractère discrétionnaire de la CSR, en insistant sur le fait qu'elle recouvre des dimensions qui dépassent les aspects purement économiques ou légaux de l'activité de l'entreprise.

Mais au fait, qu'est ce que la responsabilité sociale ou sociétale de l'entreprise ?

De toutes les définitions et approches développées ci-dessus, nous pouvons définir la responsabilité sociale de l'entreprise comme la prise en compte par l'entreprise des variables extra économiques dans la réalisation de ses objectifs à long et moyen terme. C'est un processus d'amélioration, dans le cadre duquel, les organisations, les entreprises, les pouvoirs publics et les collectivités locales intègrent de manière volontaire, systématique et cohérente des préoccupations d'ordre social, environnemental et économique dans leur gestion au quotidien. En d'autres termes, une entreprise socialement responsable est celle dont l'atteinte des objectifs économiques est conjointe à l'intérêt collectif de toutes les parties prenantes et dans le respect des contraintes légales naturelles.

La responsabilité sociétale s'appuie ainsi sur des principes directeurs et des outils (normes, standards et labels) qui permettent, non seulement, de mesurer la réalité de ces pratiques et leur valeur ajoutée, mais aussi d'en maximiser les impacts positifs pour les entreprises, les collectivités et la société dans son ensemble.

I - 1 - 3 - Principes théoriques de la RSE : dépasser l'opposition entreprise - société

La notion de la responsabilité sociale de l'entreprise est fondée sur l'idée que les entreprises doivent assumer des responsabilités qui vont au-delà de leur sphère d'activités directe. Du point de vue de l'entreprise, la RSE se traduit par « l'intégration volontaire de préoccupations sociales et environnementales à leurs activités commerciales et leurs relations avec leurs parties prenantes »1(*). La théorie de la RSE se veut une réponse aux thèses défendues par plusieurs auteurs sur le pouvoir disproportionné dont disposent les entreprises et leurs managers dans nos sociétés modernes (Bearle et Means, 1932) cités par Bowen (1953) et Mills (1956). En effet, la RSE renvoie à une vision de l'entreprise dont la finalité n'est pas d'enrichir les shareholders (actionnaires), mais de concilier les intérêts opposés de tous les stakeholders (parties prenantes). Une entreprise socialement responsable adopte ainsi nécessairement une approche à long terme de ses objectifs, de sa stratégie et de ses bénéfices.

Le principe théorique de la RSE postule par ailleurs qu'un comportement socialement responsable n'est pas incompatible avec une meilleure performance financière. Cette attitude permet de créer un environnement institutionnel favorable à l'exercice des activités économiques de l'entreprise et contribue à l'acceptation volontaire des principes de RS. Notons aussi, qu'un comportement responsable de l'entreprise se traduit par une plus grande stabilité économique, sociale, et politique, et d'une diminution des critiques faites par la société civile aux entreprises privées.

Plusieurs tendances lourdes confirment la portée de la notion de RSE pour les entreprises. Le développement des filières de commerce équitable atteste par exemple de la sensibilité des citoyens-consommateurs à des facteurs non économiques mais plutôt d'ordre sociétal (Jacquot et Attarça 2006). Dans une certaine mesure, le succès grandissant des filières de produits biologiques relève de la même logique : besoins de sécurité er de transparence entre autres. Le développement des agences de notation sociale souligne également la prise en compte du comportement sociétale de l'entreprise dans les choix des actionnaires

La performance de l'entreprise n'est pas seulement jugée selon des critères financiers ou économiques, mais aussi selon des critères relatifs à son comportement sociétal. Les relations avec l'ensemble de ses parties prenantes deviennent alors une donnée objective dans l'appréciation de la performance. Différentes initiatives publiques donnent à la RSE un caractère stratégique pour les entreprises. A l'échelle internationale, le programme Global Compact, lancé par les Nations Unies en 2000 a pour objectif de promouvoir au sein des entreprises des pratiques respectueuses de l'environnement et des droits de l'homme. En 2001, la Commission européenne a publié un Livre vert visant à promouvoir la RSE.

Ces initiatives visent à faire prendre conscience aux dirigeants d'entreprises, de la présence d'acteurs autres que les actionnaires (shareholders), pouvant affecter et être affectés par les activités de l'entreprise. Il s'agit des stakeholders ou parties prenantes.

I - 2 - LA RESPONSABILITE SOCIETALE DE L'ENTREPRISE : UNE APPROCHE

PAR LES PARTIES PRENANTES

C'est dans le sillage des approches managériales de la Corporate Social Responsiveness (CSR) que le terme de stakeholders va se développer, à partir de la fin des années 1970 et du début des années 1980. Ces approches ont ceci d'original qu'elles rapprochent et font cohabiter des groupes aux intérêts contradictoires. A ce titre, on peut définir un stakeholders comme « n'importe quel groupe dont le comportement collectif peut affecter de manière directe le futur de l'organisation, mais qui n'est pas sous son contrôle direct » (Emshoff et Freeman, 1978)2(*).

Le concept cosmopolite de stakeholders constitue une deuxième occasion de synthèse théorique majeure. Ce concept est doublement intéressant. Premièrement, il bénéficie d'une large diffusion au sein des milieux académiques. De plus, le concept de stakeholders apparaît aujourd'hui comme le concept fédérateur pour mener à bien une unification voire une refondation théorique du champ Business and Society (Freeman, 1994). Deuxièmement, le concept de stakeholders se distingue par son appropriation massive et inédite dans le champ des pratiques managériales (A. ACQUIER & F. AGGERI, 2008). Ainsi, le management des parties prenantes occupe une place centrale dans la conceptualisation et la mise en oeuvre de la RSE au sein des entreprises. Les stakeholders constituent alors un outil stratégique de management, car la prise en compte de leurs intérêts n'a d'importance que lorsqu'elle est associée aux objectifs de l'entreprise.

Arguant du côté peu opérationnel du concept de CSR, Carroll (1991) préconise d'utiliser la notion de partie prenante pour mieux identifier les responsabilités sociétales. Notons tout de même que les stakeholders ne sont pas les mêmes pour toutes les entreprises et au cas où, par hasard, elles le seraient, ils n'ont pas la même importance au sein de ces entreprises.

Toutefois, l'approche des parties prenantes a été acceptée et adoptée par de nombreux auteurs et est d'ailleurs considérée comme élément de cohésion quant aux acceptions divergentes de la RSE.

Pour représenter l'entreprise et ses parties prenantes, le schéma que Freeman propose est le suivant :

Tableau 1.1 : Modélisation de l'approche des stakeholders : The stakeholder view of the firm.

Entreprise

Communauté locale

Clients

Concurrents

Ecologistes

Associations commerciales

Employés

Medias

Gouvernement

Propriétaires

Défenseurs des consommateurs

Fournisseurs

Est considéré comme stakeholder, tout individu ou groupe qui peut

affecter ou être affecté par la réussite de l'entreprise.

 

Source : A. ACQUIER et F. AGGERI (2008), Inspirés de Freeman (1984)

La question des parties prenantes pose la question de leur recensement. F. Lépineux (2003) propose ainsi de distinguer entre les parties prenantes sur la base d'une classification en catégories d'acteurs : les parties prenantes internes (actionnaires, salariés, syndicats), les partenaires opérationnels (clients, fournisseurs avec, parmi ceux-ci, les sous-traitants, les banques dans la position de prêteur mais aussi en attente d'une stabilité et d'une solvabilité, les compagnies d'assurance dans les termes d'une confrontation au risque dont la substance se renouvelle profondément aujourd'hui), la communauté sociale (pouvoirs publics, organisations spécialisées de type syndicat professionnel, organisations non gouvernementales, société civile).

Le tableau ci-dessous recense et reprend de manière synthétique, l'énumération faite ci-dessus.

Tableau 1.2 : Tableau synthétique des parties prenantes et leurs attentes ou intérêts principaux

Parties Prenantes

Exemples de leurs objectifs, intérêts

Équipe de direction / Décideurs

Gouvernance, Culture d'entreprise, ventes à l' exportation, risque juridique, risque de réputation, stratégie (court et moyen terme), responsabilité civile, risque de perte de compétence, performance, rémunération, lien de subordination

Propriétaires / actionnaires

Profit, valeur de l' action en bourse, information, stratégie (long et moyen terme)

Clients

Qualité et absence de défaut des produits/Coût et délai de livraison des produits/qualité de service, relation de confiance et partenariat

État, Mission économique

Souveraineté, sécurité collective ( défense), indépendance énergétique, sécurité des approvisionnements ( énergie, matières premières), exportations, respect des principes du droit ( sécurité juridique), respect des règles ( comptabilité publique, loi), monnaie, impôts

Citoyens des communautés locales

Information sur les impacts environnementaux et sociaux ( emplois), taxes et contributions financières, risque juridique

Employés

Rémunération, sécurité de l' emploi, intérêt du travail, conditions de travail, hygiène et sécurité au travail ( CHSCT)

Syndicats

Négociation d'accords, rémunération, conditions de travail, hygiène et sécurité au travail ( CHSCT)

Fournisseurs / sous-traitants

Prix et volume d'achat, continuité, retombées technologiques, partenariat

Banques

Fiabilité des systèmes de paiement

Investisseurs

Informations sur la solvabilité, la liquidité,

Compagnie d'assurance

Informations sur la gestion des risques et la solvabilité, sur la sécurité informatique ( profil de protection)

Source: 1. Post, Preston, Sachs (2002),

2. Freeman R. E. (1984), « Strategic Management : A Stakeholder Approach », éd. Pitman.

Cependant l'équivocité de la notion de RSE aboutit parfois à des situations paradoxales d'entreprises autoproclamées responsables, se félicitant de respecter les droits de l'homme, tout en interdisant les syndicats et toute forme d'expression collective. Il est en effet difficile, vu l'étendue de la notion de se prétendre socialement responsable ou labellisé RSE par quelque organisme que ce soit et prétendre satisfaire simultanément les attentes de chaque partie prenante.

De ce qui précède, on est enclin de penser que les débats et divergences d'approche, de compréhension, de contextualisation et de théorisation ne manquent pas. Il existe en sciences de gestion, une multitude de théories permettant d'appréhender les démarches et politiques RSE.

Différentes théories, parfois issues de l'économie (régulation) ou de la biologie (évolutionnisme) ont été mobilisées sur le domaine naissant du courant de la RSE en gestion.

I - 3 - CONTRIBUTION DES THEORIES D'ORGANISATION A L'ANCRAGE DES

PRATIQUES DE RESPONSABILITE SOCIALE AU SEIN DE L'ENTREPRISE

La question principale est ici de dégager le cadre théorique le plus adapté à une analyse des mouvements autour de la responsabilité sociale de l'entreprise. Nous allons développer tour à tour la théorie néoclassique, la théorie de l'agence, la théorie post-moderne, la théorie de la régulation, la théorie néo - institutionnelle, la théorie conventionnaliste, la théorie évolutionniste.

I - 3 - 1 - La théorie néoclassique : une approche dépassée

Selon la conception classique, la responsabilité de l'entreprise est exclusivement de nature économique. La fonction de l'entreprise est de produire des profits réguliers et à haut niveau, car l'essence de l'entreprise libre est de rechercher le profit de toutes les manières qui soient cohérentes avec sa propre survie en tant que système économique (Levitt, 1958, cité par Lépineux, 2003). En d'autres termes, les entreprises pérennes sont celles qui poursuivent leur seul objectif de maximisation du profit à long terme. Vu sous cet angle, les entreprises n'ont plus qu'à respecter le strict minimum de sincérité et de loyauté, et rechercher le gain tangible et pécuniaire.

Friedman (1962) partage le même point de vue. Il est connu pour sa position radicale dans le débat sur la RSE selon laquelle l'entreprise ne devrait pas fausser le libre jeu par des interventions dans le domaine de la RSE. Il considère qu'« il existe peu de courants aussi dangereux pour les fondements même de notre société libre que l'acceptation, pour les dirigeants d'entreprise, d'une responsabilité autre que celle de maximiser le rendement de l'argent de leurs actionnaires ». Pour inscrire la prise en compte des objectifs sociétaux dans les décisions des entreprises, il faudrait démontrer qu'il y a une corrélation positive entre performance financière et performance sociale.

En bref, la théorie néoclassique ne trouve pas les pratiques de responsabilité sociétale nécessaires au sein de l'entreprise, et ceci pour deux raisons principales : tout d'abord, les actionnaires sont les seules parties prenantes auxquelles l'entreprise doit rendre des comptes ; ensuite, l'objectif unique de l'entreprise est de maximiser les profits. Or, il est possible que les parties prenantes externes influent sur les performances des entreprises. Par exemple en Europe, les banques inscrivent les pratiques de RSE parmi les conditions pré requises au financement des projets de PME.

Comment prétendre servir les intérêts de toutes ses parties prenantes si on ne se préoccupe que de la maximisation du profit au sein de l'organisation ? D'autres théories jugées plus réalistes, ont été développées.

I - 3 - 2 - La théorie de l'agence : existence d'un contrat social

La notion d'agence est définie par Jensen et Mekling, (1976) comme un contrat par lequel une personne appelée principal ou mandant, délègue à une autre personne appelée agent ou mandataire le pouvoir de prendre à sa place un certain nombre de décisions. Au-delà du risque de conflit d'intérêts qui existe entre les parties concernées (intérêt du mandant et intérêt du mandataire), l'information diffusée joue un rôle déterminant entre les acteurs. La relation d'agence peut être élargie à l'ensemble des parties prenantes de l'entreprise ; dans ce cas les dirigeants sont des « agents » qui sont les seuls à être en relation avec les parties prenantes (Hill et Jones, 1992). Vu sous cet angle, la RS repose sur les dirigeants qui sont en relation contractuelle implicite ou explicite avec plusieurs catégories d'acteurs : actionnaires, créanciers, salariés, clients, fournisseurs, consommateurs, collectivités, entre autres. Ainsi pour assurer la pérennité de l'entreprise, les dirigeants se doivent de concilier les attentes divergentes de toutes ces parties prenantes de telle sorte qu'aucune d'entre elles ne sente défavorisée.

Toutefois, cette théorie bien que constructiviste repose sur la nécessité d'un système d'information idéal, difficilement envisageable sur le plan pratique. Car dans cette approche, les parties prenantes influencent les décisions stratégiques des dirigeants et ceux-ci doivent leur rendre des comptes sur la façon dont ils ont pris en compte leurs attentes (existence d'un contrat social).

I - 3 - 3 - Critique de type post-moderne : théorie néo-classique renouvelée

Encore appelée critique du grand discours de la raison occidentale, la critique de type post-moderne est un « flash back » à la théorie néoclassique. M. T. Jones (1996) dénonce l'idéologie de la RSE qui pour lui s'enracine dans celle de son ancêtre le plus proche : le managérialisme (Le Goff, 1995). La croyance qu'une classe de managers créés par le développement institutionnel, servirait de manière bienveillante les intérêts de la société.

Au niveau managérial, l'action ne peut se concevoir qu'à l'intérieur de frontières dont les limites sont tracées par la rationalité économique dominante. Pour reprendre les analyses de Foucault : le discours sur la CSR contribue à renforcer l'hégémonie idéologique dans laquelle les arrangements institutionnels contemporains sont décrits comme servant l'intérêt général alors qu'ils ne servent en fait que les intérêts d'une minorité. Cette vision de la RSE, bien que développée sous d'autres cieux, trouve une application profonde dans le contexte camerounais actuel. Par exemple, les dirigeants d'entreprise n'ont pas compris que le recrutement des autochtones (démarche RSE) au sein des entreprises ne veut pas dire recruter uniquement les autochtones de manière à défavoriser les immigrés. Une telle analyse du sujet amène à opter pour la conclusion de DELALIEUX : empiriquement et théoriquement la seule voie plausible pour la RSE est de proposer une force de pression externe exerçant des contre pressions incitant et obligeant les entreprises à agir de manière socialement plus responsable.

Cependant, une telle conclusion renverrait la RSE à sa case de départ à savoir la dimension volontariste (déjà dépassée) de la RSE. Cette approche fait ressortir le besoin pressant de régulation qui permettrait de trouver un point d'équilibra entre l'entreprise et l'ensemble de ses parties prenantes.

I - 3 - 4 - Approche régulationniste : un espoir de conciliation d'intérêts divergents

Issue des sciences économiques, le cadre théorique de la régulation a cependant été utilisé en sciences de gestion notamment pour analyser la contextualisation de la démarche qualité au sein d'une entreprise industrielle (Rousseau, 1997). Cette approche reprend en grande partie les analyses de la critique post-moderne de la RSE. Elle dénonce la supériorité des acteurs institutionnels de l'économie dans le domaine de la réglementation et de la législation environnementale et sociale ainsi que sa capacité d'imposer par des jeux institutionnels, des règles du jeu n'incluant pas forcément l'intérêt de leurs parties prenantes dans son sens le plus large.

L'instrumentation de la RSE au sein des sciences de gestion peut alors s'interpréter comme la réponse à cette remise en cause, le rôle de la RSE étant de définir ou de circonscrire la « marge de tolérance à l'intérieur de laquelle les valeurs théoriques d'un système social peuvent varier sans que son existence soit mise en danger » (Habermas, 1982). Les normes sociales et environnementales se retrouvent alors par le truchement de la concurrence, réduites à de simples variables d'ajustement des manoeuvres stratégiques des entreprises.

En bref, la RSE telle que développée par les postulats de la théorie régulationniste, intègre les dimensions sociales et économiques dans la recherche d'un point d'équilibre en ce qui concerne les attentes des parties prenantes.

I - 3 - 5 - Approche néo-institutionnelle : la quête de la légitimité

Dans le prolongement des travaux de Di Maggio, Powell (1983), Oliver (1991), Meyer & Rowan (1977), la théorie néo-institutionnelle subordonne la compréhension des organisations à l'étude des relations entre organisations et à l'influence de leur environnement social. La légitimité naît au sein d'un environnement qui impose des exigences sociales et culturelles, incitant les entreprises à jouer un rôle déterminé et à maximiser certaines apparences externes (Capron, 2003). L'entreprise doit apprendre à paraitre selon les critères convenus et ressembler à une organisation rationnelle (M. C. Suchman, 1995)3(*). Suchman M. C. défini la légitimité comme : « l'impression partagée que les actions de l'organisation sont désirables, convenables ou appropriées par rapport au système socialement construit de normes, de valeurs ou de croyances sociales ».

L'approche néo-institutionnelle s'intéresse à l'influence du contexte institutionnel sur l'adoption de pratiques institutionnelles, que cette adoption soit contrainte ou choisie. Les entreprises adoptent les structures que les institutions exigent d'elles afin d'accroître leur légitimité institutionnelle et leur pouvoir. La multiplication de départements de développement durable ou RSE au sein des entreprises semble répondre en partie à cette logique de quête de légitimité. Mais cette théorie rencontre une difficulté majeure, liée au risque de décalage existant entre adoption formelle au sein d'un organigramme et pratique réelle qui peuvent parfois diverger dans le temps et de manière notoire.

I - 3 - 6 - La théorie Conventionnaliste : l'ancrage de la RSE dans les pratiques

quotidiennes de l'entreprise

Selon E. PERSAIS (2007)4(*) la responsabilité sociétale de l'entreprise relève avant tout d'une convention entre acteurs. L'approche conventionnelle, décrite plus comme un mouvement d'idées qu'une théorie unifiée (Rojot, 2003) définit la nécessité de l'existence de conventions entre les acteurs d'une organisation commune afin de permettre l'action collective. Ces conventions ont pour principal inconvénient qu'elles reposent sur des fondements théoriques (en particulier philosophiques) et non sur des principes pratiques. La théorie des conventions se propose d'aller au delà des aspects légaux et volontaires de la RSE pour concevoir la RSE comme un phénomène naturel.

En effet, E. Persais (2007) souligne que la théorie des conventions relève en partie de l'implicite : la vie en société n'est et ne peut être totalement régulée (i.e. régie par des lois, des règlements ou des contrats).... Un certain nombre de règles implicites opèrent souvent sans que nous nous en apercevions, voire même que nous en ayons, à un moment ou à un autre, discuté les fondements. Ces règles qui relèvent du savoir-vivre, contribuent à une amélioration de la vie en société. On retrouve des exemples pratiques assez mitigés de cette théorie dans le contexte camerounais (le sponsoring par MTN du championnat camerounais de football ; la mise à la disposition du grand public d'un puits d'eau potable par Sic Cacao ; les forages des Brasseries et de Guinness et bien d'autres oeuvres caritatives), mitigés par ce que à cheval entre la stratégie de rentabilité à long terme de l'entreprise et son savoir-vivre.

En bref, le modèle conventionnaliste de la RSE est susceptible de concerner deux aspects de la gestion de l'entreprise : la mise en oeuvre de la RSE au quotidien et la perception qu'ont les parties prenantes du comportement sociétal de l'entreprise.

I - 3 - 7 - La théorie Evolutionniste : les routines organisationnelles face à la RSE

Les idées de la théorie évolutionniste en sciences de la nature ont été reprises et appliquées en sciences de gestion. L'approche orthodoxe (néo classique) ne réussissant pas à appréhender de manière satisfaisante l'évolution du progrès et de la technique au sein des firmes, qu'elle décrit comme un processus continu et régulier alors que des travaux empiriques illustrent son caractère discontinu et par grappes. Nelson et Winter (Ibert, 2002) décident alors de reconstruire une théorie en se basant sur la rationalité limitée de Simon et la théorie de l'innovation. Le niveau d'analyse qui va être privilégié est celui des routines organisationnelles (semblables aux conventions) qui vont déterminer le comportement de la firme en fonction de variables externes multiples (conditions de marché principalement) à travers le processus de recherche d'innovations et de sélection de l'environnement. Sans rentrer dans les subtilités de la théorie évolutionniste en distinguant les contributions de Darwin, Lamarck et Spencer la performance organisationnelle est déterminée par la capacité des organisations à détenir les routines organisationnelles requises pour passer la sélection imposée par l'environnement (Heilbrunn, 2004).

Appliqué à la RSE, si l'exigence de labellisation sociale, comportements socialement responsables des entreprises de la part des consommateurs, des pouvoirs publics (de l'environnement en général) venait à s'intensifier, seules les organisations ayant développé les routines organisationnelles nécessaires survivraient et passeraient le cap de la sélection imposée par l'environnement.

Section II : CONTEXTUALISATION DU CONCEPT DE RESPONSABILITE

SOCIALE DE L'ENTREPRISE : DOMAINES D'APPLICATION

ET INSTRUMENTS DE MISE EN OEUVRE

Deux modèles sont universellement reconnus comme modèles de référence en matière de RSE. Il s'agit du modèle américain ou anglo-saxon qualifié de modèle normatif et du modèle européen encore appelé approche légale de la RSE. Dans le contexte de mondialisation actuel qui prône le libéralisme économique, grand est le besoin d'opérer un accommodement entre ces deux modèles antagonistes. Dans le sous-paragraphe suivant, nous allons concilier ces modèles afin d'arrimer la recherche sur la RSE aux exigences de la mondialisation.

II - 1 - Les différences d'acception entre l'Europe et les États-Unis : rapprochement

du modèle normatif au modèle légal de la responsabilité sociale de l'entreprise

Bien que le concept de développement durable ait une influence particulière sur la RSE telle qu'elle est pratiquée en Europe, l'acception américaine de cette notion n'y est pas totalement hermétique. Pour Capron (2003), les pratiques des entreprises tant européennes qu'américaines mettent en évidence l'intérêt croissant accordé à cette question afin de s'aligner sur les objectifs du développement durable. L'auteur signale, cependant, des différences entre l'approche anglo-saxonne qui vise plutôt la correction des effets des activités économiques et l'approche européenne qui est généralement plus sensible à l'anticipation et à la prévention des risques.

Sur un autre plan et comme le soulignent Capron et Quairel-Lanoizelée (2007), dans la conception états-unienne du concept de RSE, l'individu est au centre de tout. Il y a lieu de rappeler que l'ouvrage fondateur écrit par H. Bowen (1953) était intitulé « La responsabilité sociale des hommes d'affaires », renvoyant ainsi au sens du devoir et à la morale individuelle des hommes d'affaires et non à celle des entreprises (F. Acquier et J-P. Gond, 2005). Une explication d'ordre culturel pourrait être avancée ici puisque la logique individuelle est beaucoup plus prégnante aux États-Unis que dans les pays européens. La régulation se passe sans les autorités publiques dont l'intervention est perçue comme limitant les libertés individuelles. Dans cette perspective, il serait difficile d'imposer aux entreprises un comportement responsable via des textes et législations.

Eu Europe, par contre, la RSE est beaucoup plus permissive à l'influence de l'État et des autorités publiques. Le livre vert de l'Union Européenne sur la RSE en est l'illustration la plus significative. Ainsi, c'est la définition donnée à la RSE dans ce document qui est la plus communément reprise par de nombreux auteurs européens. Le livre vert de l'Union Européenne est censé constituer un outil permettant d'inciter les entreprises à adhérer à la RSE et d'orienter leurs démarches (CCE, 2001). Le document accorde une place de choix aux relations avec les employés et à leurs conditions de travail. On peut également donner l'exemple de la loi NRE en France (2002) qui encadre la publication des rapports de RSE. Cette loi va dans la continuité de la loi de modernisation sociale de 1977 prônant la réalisation d'un bilan social pour les entreprises dont l'effectif est d'au moins 300 salariés (Igalens, 2004).

Ainsi, nous pouvons dire que la RSE pourrait être approchée sous deux angles : le courant «orthodoxe » anglo-saxon, et le courant plutôt « social » européen. La conception américaine de la RSE aux origines éthiques et religieuses diffère de celle européenne qui, de par sa référence au développement durable, acquiert une posture plus tournée vers la politique et est de ce fait plus institutionnalisée. Ces divergences ont un facteur explicatif commun : la culture (libéralisme économique aux États Unis et politique interventionniste en Europe).

II - 2 - Champ d'application des activités extra économiques des entreprises

Les domaines d'application de la RSE sont multiples, mais par rapport à l'entreprise qui là réalise, on peut regrouper les activités de RSE en interne et en externe. Nous allons d'abord présenter les types ou niveau de RSE avant d'aborder les domaines de la RSE proprement dits.

II - 2 - 1 - Les niveaux de responsabilité sociale de l'entreprise : vers une classification

des activités responsables

D'une manière générale, il est accepté que la notion de RSE intègre globalement les deux critères normatifs suivants :

· Les firmes doivent honorer des obligations à l'égard d'une pluralité de groupes sociaux ;

· Les firmes doivent savoir réagir aux demandes sociales qui émanent de leur environnement.

Dans les deux cas, il s'agit de qualifier des actions de l'entreprise qui traduisent une forme d'engagement de celle-ci envers ses parties prenantes, et cela au-delà de ses obligations purement légales ou économiques.

La responsabilité sociale des entreprises a été abordée sous plusieurs dimensions et par plusieurs auteurs. Il convient tout de même de noter que ces dimensions de RSE présentent des similitudes et des complémentarités fortes d'un auteur à l'autre.

Dans une étude sur la pratique de la RSE, Johnson et Scholes (2000) identifient quatre types de positions responsables :

- Les entreprises qui considèrent que leur seule responsabilité est de garantir l'intérêt à court terme des actionnaires. Pour cette catégorie d'organisations, seul l'État est garant de l'encadrement juridique de la politique sociale de l'entreprise ;

- Les entreprises dont les dirigeants pensent qu'une position intelligente avec les autres parties prenantes sert à long terme les intérêts des actionnaires ;

- Les entreprises qui intègrent dans les buts et les stratégies, de façon explicite, les intérêts et les attentes des parties prenantes. Elles dépassent souvent les obligations légales. Pour les dirigeants de ces entreprises, la performance va au-delà des considérations financières ;

- Enfin, les entreprises qui ont pour ambition de transformer la société. Les considérations financières y sont reléguées au second plan et sont plutôt perçues comme une contrainte et non comme un objectif.

Cette approche bien qu'intéressante, ne nous permet pas de ranger une entreprise dans l'un ou l'autre niveau de RSE de façon explicite. A. B. Carroll rend cette classification plausible en définissant

A. B. CARROLL (1979) souligne que les activités de RSE englobent quatre grandes catégories d'obligations : économiques (être profitable, fabriquer des produits respectant des normes de qualité et de sécurité), légales (respecter les lois et les réglementations), éthiques (agir conformément à des principes moraux partagés au sein de la société), philanthropiques (agir avec bienfaisance et charité). La définition d'A. B. Carroll, considérée comme fondatrice des approches théoriques de la RSE, a été affinée par WOOD (1991) qui précise trois niveaux de responsabilité pour l'entreprise.

En effet selon Wood (1991), la responsabilité sociétale de l'entreprise présente trois niveaux. D'une part, la responsabilité de l'entreprise en tant qu'institution sociale : l'entreprise dispose d'une légitimité accordée par la société, elle doit utiliser son pouvoir économique qui découle de cette légitimité, dans un sens favorable aux attentes de la société, au risque de perdre ce pouvoir. D'autre part, la responsabilité en termes de conséquences (outcomes) de ses activités : ce sont les conséquences au niveau de ses parties prenantes primaires (acteurs concernés directement et profondément par les décisions de l'entreprise) ou de ses parties prenants secondaires (acteurs concernés indirectement par les décisions de l'entreprise). Enfin, la responsabilité individuelle et morale des dirigeants et des managers : ceux-ci doivent utiliser leur pouvoir discrétionnaire au service de la responsabilité sociétale de l'entreprise (dans le choix des stratégies de l'entreprise et dans les moyens de mettre en oeuvre ces stratégies).

L'approche de Wood est complémentaire à celle de Carroll. Chacune des formes de RSE proposées par Carroll (économique, légale, éthique et discrétionnaire) peut être déclinée selon les trois niveaux définis par Wood.

Capron et Quairel-Lanoizelée (2000) proposent de distinguer deux catégories de comportements ou de logiques stratégiques en matière de RSE5(*). D'une part, les stratégies substantielles : l'entreprise modifie réellement ses objectifs, adapte ses méthodes de travail et son organisation de manière à répondre aux valeurs de la société et à la demande sociale. L'intégration entre les préoccupations sociales de l'entreprise et ses choix stratégiques économiques est forte6(*). Elle peut découler d'une attitude proactive d'anticipation des demandes sociales ou d'une attitude réactive d'adaptation face à une pression sociale. D'autre part, les stratégies symboliques : l'entreprise s'approprie opportunément la notion de RSE mais sans les fondements de cette approche. Ce type de stratégie est centré sur l'image et sur la réputation. Cela passe par la politique de communication institutionnelle de l'entreprise, sa politique de communication commerciale ou encore les stratégies de discours de leurs dirigeants envers les parties prenantes. Leur objet est alors moins de prendre en compte certains enjeux sociétaux que de servir de support à une politique de communication externe ou de motivation du personnel.

Les niveaux de RSE tels que décrits par Capron et Quairel-Lanoizelée peuvent être qualifiés de génériques parce qu'elles englobent toutes les dimensions proposées par les auteurs précédents. Toutes les approches de la RSE proposées ci-dessus ont ceci de commun qu'elles débouchent toutes sur les deux grandes orientations de la RSE à savoir les dimensions obligatoires et volontaires de la RSE.

II - 2 - 2 - Mise en oeuvre de la RSE : un problème pluri dimensionnel

La Responsabilité Sociale de l'Entreprise peut être mise en oeuvre de plusieurs façons et ce dans plusieurs domaines. En ce qui concerne les pratiques de RSE proprement dites, la littérature distingue l'approche sociétale française de l'approche d'inspiration anglo-saxonne. Dans l'une ou l'autre approche de la RSE, les domaines d'application de la RSE ont deux grandes orientations ou dimensions à savoir : la responsabilité sociale interne et la responsabilité sociétale externe.

Bien qu'ils ne constituent pas les destinataires de référence, les parties prenantes internes sont les acteurs dominants du discours managérial (devant les actionnaires et les clients). Depuis une quinzaine d'année, le personnel est davantage présenté comme un partenaire, c'est d'ailleurs la raison pour laquelle on lui attribue une place notoire dans les études portant sur la performance partenariale des entreprises de l'ère contemporaine. L'intégration des membres de l'entreprise a fortement progressé à la fin des années 1990 (M. Attarça & T. Jacquot, 2006). En effet, ces évolutions confirment l'importance accordée à l'Homme au sein de l'organisation. Par exemple dans les grandes entreprises et dans certaines PME, on emploi désormais des termes plus valorisant, comme les notions d'Equipe et de Collaborateurs, pour substituer les notions de Personnel, employés ou de Salariés.

Ainsi, le « collaborateur » ne représente plus un simple potentiel à gérer, mais est plutôt perçu comme un acteur interne à former, bâtir, édifier et animer. En bref, la responsabilité sociale en interne a trait à plusieurs composantes de la GRH, notamment les conditions de travail, la politique de rémunération, le dialogue social dans l'entreprise, le climat social dans l'entreprise, la gestion des emplois et des compétences, le temps de travail, l'intégration des catégories fragiles, le principe de non discrimination selon l'âge, le sexe, voire l'appartenance tribale.

En externe, la responsabilité sociale a trait aux dimensions sociétales et environnementales. Les parties prenantes externes prennent également une importance grandissante dans le discours managérial. La progression significative des références aux partenaires économiques puis à la population et à la préoccupation environnementale illustre la volonté par les dirigeants d'entreprise, d'affirmer une légitimité sociale. Elle manifeste également la volonté de démontrer l'étendue du champ de la réflexion stratégique (la RSE s'inscrit dans une perspective de développement durable). Enfin, cette présence met en évidence la volonté de valoriser les acteurs dans le but de rechercher leur confiance, leur adhésion et d'orienter leurs comportements à l'égard de l'entreprise.

Ainsi la mise en de la RSE en externe, peut caractériser une dépendance ou bien une volonté d'associer certains acteurs à la réflexion stratégique. Deux grandes composantes auxquelles on peut associer les décisions stratégiques de l'entreprise vis-à-vis des parties prenantes externes sont la société civile et l'environnement. La responsabilité environnementale s'inscrivant dans la volonté de préserver l'environnement naturel (le souci du maintien des écosystèmes) voire de participer activement à l'écologie (lutte contre la pollution par exemple).

En bref, les domaines de la RSE en externe concernent essentiellement la consultation et la prise en compte des attentes des parties prenantes externes (État, société civile, banques et autres compagnies), la prise en compte de l'impact écologique des produits et services fabriqués et commercialisés, la limitation de la consommation d'énergie et des matières premières, la lutte contre la pollution, le recyclage des fournitures et des produits usés, la réduction des rejets et émissions dans l'eau, la contribution à la protection de la biodiversité et des écosystèmes, application du principe de précaution en matière de recherche scientifique et technologique.

Les domaines d'application de la RSE en interne et en externe, et selon le modèle (anglo-saxon et français) sont résumés en annexe. Il convient toutefois de noter que la maitrise des différents domaines vers lesquels les dirigeants d'entreprise peuvent orienter leurs démarches RSE n'est pas un acquis, encore faut-il qu'ils sachent comment instrumenter la RSE et avec quelle efficacité.

II - 3 - Les instruments au service de la responsabilité sociale de l'entreprise

A la question « comment instrumenter la RSE ? », on trouvera difficilement une réponse immédiate qui soit acceptée de tous. Car les contextes de mise en oeuvre de RSE sont différents malgré la conjoncture actuelle de mondialisation (déphasage persistant entre les conceptions européenne et anglo-saxonne de la RSE). Les instruments dont dispose l'entreprise dans sa politique de responsabilité sociale, ont été regroupés en cinq catégories par Capron et Quairel (2004) et dans un rapport de la CNUCED7(*). Par instruments de la RSE il faut entendre l'ensemble des dispositifs que mettent en oeuvre les différents acteurs (internes ou externes à l'entreprise) pour peser sur les décisions. Ces dispositifs sont présentés sommairement dans le tableau suivant :

Tableau 1.3 : Les Instruments de la Responsabilité Sociale de l'Entreprise

Dispositif

Utilité

Exemple

Mise en oeuvre

Assister le manager à la mise en oeuvre des stratégies RSE au sein de l'entreprise. Autoévaluation et évaluation croisée avec d'autres PP.

- Système de management de qualité (ISO 9001 et 9004),

- Système de management environnemental (ISO 14004),

- Système de management de la sécurité (OHSAS 180001),

- Guide méthodologique (AA 1000-SD 21000).

Prévention

Construire la crédibilité des représentations de l'entreprise et donner confiance aux parties prenantes.

- Codes de conduite

- Certification sociale (SA 8000)

- Labellisation

Communication

Communiquer sur l'impact social de son activité et sur la performance environnementale.

- Reporting social

- Rapport de DD

- Rapport Annuel

- Bilan Sociétal / Bilan Social

Contrôle

Contrôler l'application des critères sociaux internationalement reconnus.

- Normes de performance (SA 8000)

- Normes de certification (AA 1000)

- Normes de gouvernance (OCDE)

- Tableaux de bord

Évaluation

Aider au diagnostic des performances sociétales.

- Bilan sociétal

- Notation sociétale

- Indice social danois

- SME key

Source : CAPRON et QUAIREL (2004) et le CNUCED

Le tableau ci-dessus comprend au total cinq (05) catégories de dispositifs auxquels les entreprises peuvent recourir dans leurs démarches responsables. De manière sommaire, ces dispositifs sont universellement applicables, mais pris dans les détails, chaque société s'inscrit dans un exemple bien précis. Le tableau ci-dessus aurait donc été construit sur la base de l'exemplarité8(*), ce qui ferait de toutes ses rubriques (dispositif, utilité et exemples), et particulièrement celles sur l'utilité et les exemples des rubriques non exhaustives et sujettes à des critiques. Par exemple, les instruments d'évaluation, telles que définies, restent un mythe dans le contexte camerounais. Ce qui nous amène à poser la question suivante : évalue t-on la RSE au Cameroun ?

La maitrise des domaines d'application et des instruments nécessaires à la mise en oeuvre d'une politique de responsabilité sociale au sein de l'entreprise, engendre pour ses dirigeants, le besoin de connaitre les enjeux, les risques et les avantages inhérents à la pratique de responsabilité sociale au sein de l'entreprise dans le contexte actuel de mondialisation. C'est ce qui fera l'objet du prochain chapitre.

Chapitre II

LA RESPONSABILITE SOCIALE DE L'ENTREPRISE :

UNE EXIGENCE CONCRETE INCONTOURNABLE ET UN

BESOIN CROISSANT D'HARMONISATION DES

PRINCIPES INTERNATIONAUX.

Pour les défenseurs de la RSE, la demande sociale est désormais pour les grandes entreprises comme pour les PME, telle qu'elles ne peuvent se couper de cette nouvelle exigence de RSE qui influe directement sur leur vente et leur rentabilité à moyen et long terme. La demande d'un nombre de consommateurs solvables avec la montée en puissance de l'achat éthique ou de consommation durable, impose peu à peu une transparence et une traçabilité des actions menées (C. Jolly, 2006). Les dirigeants de l'entreprise doivent par conséquent démontrer une performance à long terme y compris sur le terrain social et environnemental. Cet engagement permet de mesurer l'adaptabilité de son modèle qui ne peut se limiter uniquement à des considérations purement financières et économiques dans une logique trop simpliste de maximisation du profit à court terme. Dans une économie fortement globalisée et concurrentielle, la capacité de l'entreprise à intégrer des données relatives à son environnement devient la clef de sa stratégie voire de sa survie.

La multiplication des expériences concrètes de RSE notamment en Europe mais également dans le monde indique désormais qu'il s'agit, plus d'un mouvement de fond irréversible, que d'un effet de mode passager aux seuls relents médiatiques (T. Berns & P-F. Docquir, 2007). Il existe un consensus sur une approche large de la responsabilité sociale. En effet, la déclaration adoptée en Juin 2008 à Genève par la Conférence internationale du travail sur la justice sociale pour une mondialisation équitable retient aussi une approche large de la responsabilité sociale. Elle souligne en particulier que la violation des droits sociaux ne peut être utilisée comme avantage comparatif. Les Nations-Unies, proposent aussi une approche holistique pour la responsabilité des entreprises en matière de droits de l'homme (V. Spidla, 2008). Cette approche a très naturellement reçu le soutien des vingt-sept États Membres de l'Union européenne, puisque cette approche large est aussi l'approche européenne. Les pratiques de RSE ont en effet besoin de politiques qui favorisent leur développement. Il s'agit de politiques adaptées au contexte économique et social, fondées sur la confiance. Dans les pays à faible gouvernance, seules des politiques ambitieuses de mise sur pied de procédures de contrôle entraîneront un cercle économique vertueux.

La mondialisation de l'économie est si avancée aujourd'hui que la réussite de chaque ensemble régional est liée à la réussite de tous les autres. Par ailleurs, le poids croissant des entreprises des pays émergents montre bien que la Responsabilité Sociale des Entreprises ne peut plus être un sujet limité aux seuls pays développés. Il est donc absolument nécessaire que les pays émergents ne restent pas en dehors de ce mouvement qui conduit à une harmonisation des pratiques internationales de RSE. Harmonisation dont l'application est rendue plus aisée par la prise en compte des lois des institutions internationales en matière de RSE et de développement durable.

Dans nous présentons dans un premier temps les enjeux de la RSE, les risques liés à la RSE en tant que composante du management d'entreprise et les avantages potentiels d'une telle responsabilité de l'entreprise dans un contexte de mondialisation. Dans un deuxième temps, nous allons présenter les différentes institutions internationales qui jouent un rôle substantiel dans la mise en oeuvre et le développement d'actions RSE au sein des entreprises.

Section I : POLITIQUE DE RESPONSABILITE SOCIALE DES ENTREPRISES :

ENJEUX, RISQUES ET AVANTAGES DANS UN CONTEXTE DE

MONDIALISATION

Reprenant le point de vue partagé par T. Levitt (1958) et M. Friedman (1962), on est enclin de se demander pourquoi une entreprise dont l'objectif principal est de maximiser ses profits, engagerait des dépenses supplémentaires pour mettre en oeuvre une politique RSE.

En effet, la mise en oeuvre d'une politique de responsabilité au sein de l'entreprise comporte des enjeux déterminants pour celle-ci, surtout dans le contexte actuel de mondialisation. Ces enjeux constituent une source majeure de motivation des dirigeants à s'engager dans des activités socialement responsables.

I - 1 - Inscription des démarches RSE dans la politique générales de l'entreprise : les

enjeux de la mise en oeuvre de la RSE

Les enjeux de la RSE pour l`entreprise sont multiples et relatives au milieu dans lequel elle opère, à son domaine d'activité et aux attentes de ses différentes parties prenantes entre autres. Dans leurs pratiques de RSE, les dirigeants d'entreprises sont généralement en phase avec le respect et la protection de l'environnement, le développement durable et la bonne santé de l'entreprise.

Selon J. IGALENS (2005) « l'enjeu premier est de pouvoir bien aligner l'ensemble des dimensions et donc ne pas les traiter de façon séparée. Il faut aussi se situer dans un contexte sectoriel. Car il ne faut pas que la RSE devienne un moyen de fausser la concurrence ». C'est-à-dire qu'il ne faut pas qu'une entreprise très en avance sur ces aspects sociaux et environnementaux soit pénalisée parce que ses concurrents n'en feraient pas autant. Prenons l'exemple de Nike qui, après des difficultés, est allé très loin dans la transparence. Les conditions de travail de certains de ses sous-traitants n'étaient pas conformes aux principes de sa Charte et cela apparaissait dans un rapport d'audit. Un consommateur a attaqué Nike pour publicité mensongère et a obtenu le bénéfice d'une transaction financière avantageuse. Du coup, Nike ne veut plus aller aussi loin dans la transparence. Aujourd'hui la responsabilité sociale est devenue un vaste sujet, très complexe, qui sollicite beaucoup de précautions de la part des entreprises. Une stratégie de RSE doit être mûrement réfléchie en amont comme le préconise à juste titre le MEDEF9(*), mais aussi dotée des capacités requises en prévision de l'entrée en vigueur de la nouvelle norme ISO 2600010(*).

Comme nous l'avons énoncé ci-dessus, les enjeux de mise en oeuvre de la RSE sont multiples et variés, les plus connus sont les enjeux managériaux, économiques, sociétaux et environnementaux. Locket et coll., (2006) distinguent aussi les enjeux théoriques et les enjeux idéologiques. P. Crifo et J-P Ponssard (2008) quant à eux, examinent les enjeux que prend la RSE sur quelques leviers classiques : décisions stratégiques, décisions opérationnelles, communication.

Nous allons tour à tour examiner les décisions ou enjeux stratégiques, les enjeux ou décisions opérationnelles, les enjeux managériaux et les enjeux économiques et sociétaux et leurs implications dans les pratiques de RSE.

I - 1 - 1 - Préserver les intérêts à moyen et long terme de l'entreprise : les enjeux

stratégiques

Le problème qui se pose ici est celui de la détermination de la stratégie à adopter vis-à-vis des exigences de responsabilité sociale. Cette stratégie peut se développer au niveau de la communication d'informations à caractère sociétal et l'entreprise pourra alors s'appuyer sur des outils existant à cet effet (les médias, internet, ou le reporting social). Il est notoire que les perspectives de croissance de marché jouent un rôle prépondérant pour justifier les choix d'investissement (P. Crifo et J-P. Ponssard, 2008)11(*). Il est clair que la RSE s'inscrit tout naturellement dans un tel schéma : par exemple les questions relatives à l'énergie renouvelable, à l'obésité et à la nutrition ouvrent de nouveaux marchés et précipitent le déclin d'autres marchés.

Ainsi, l'innovation, perçue ici comme la capacité à anticiper les besoins futurs du marché, offre des opportunités de croissance en termes de revenus et d'emplois pour les firmes et les pays. C'est le cas, certes inversé, de quelques firmes de l'industrie automobile. En effet, le constructeur automobile Krysler envisage fermer une de ses branches en France. Le fait d'annoncer la nouvelle quelques mois à l'avance permet non seulement à l'entreprise de revoir ses stratégies en terme de coût (performance économique), mais aussi, de préparer psychologiquement ses employés afin d'éviter les effets néfastes d'un licenciement soudain (aspect sociétal).

Après les enjeux stratégiques qui concernent les intérêts de long et moyen terme de l'entreprise dans ses pratiques de RSE, viennent les enjeux opérationnels, qui sont d'un horizon plus rapproché et par conséquent, concernent les décisions tactiques et courantes prises par les dirigeants.

I - 1 - 2 - Responsabilité sociale et profit à cour terme : Les enjeux opérationnels

Selon M. Kramer et M. E. Porter (2006) c'est à ce niveau que se font les arbitrages en matière de conditions de travail, de sécurité, de sous-traitance... Ces arbitrages sont pris par le management intermédiaire : responsables d'unités, responsables logistique, directeurs d'usine, .... On peut penser que c'est à ce niveau qu'est ressentie de manière la plus forte la contradiction entre la RSE et le profit à court terme, profit mesuré et analysé dans toutes ses dimensions par les multiples outils du contrôle de gestion. C'est aussi à ce niveau que les objectifs opérationnels se retrouvent le plus directement dans les critères d'évaluation servant de base à l'établissement des parts variables de rémunération.

Les procédures et outils auxquels les entreprises peuvent avoir recours pour infléchir les décisions correspondantes sont encore peu analysés. Epstein et Cornelius (2003) proposent de s'appuyer sur des sustainable balanced scorecards12(*) permettant d'inscrire les nouveaux enjeux dans les outils modernes de contrôle de gestion tels que les tableaux de bord. Une autre démarche consiste à recourir à l'exemplarité. L'exemplarité fait appel à la motivation intrinsèque des managers, satisfaction personnelle associée au fait de mettre en oeuvre des actes cohérents avec son propre système de valeur. On a, à cet effet, pu montrer que le fait d'être identifié par la collectivité pouvait favoriser l'engagement personnel.

En bref, la mise en oeuvre de la RSE engendre des coûts élevés à court terme, c'est-à-dire sur le plan opérationnel, mais constitue une source d'avantage concurrentiel sur le plan stratégique. Toutefois, les enjeux peuvent être analysés par rapport aux attentes et intérêts des parties prenantes de l'entreprise.

I - 1 - 3 - Arbitrage entre critères économiques et extra économiques : les enjeux

managériaux

Les enjeux managériaux de la RSE expriment les valeurs et le comportement des dirigeants concernant le style de management et l'esprit d'entreprise. Ils traduisent la perception que les managers se font de la RSE et sont fondés sur les motivations individuelles de ces derniers plutôt que sur des réflexions de groupe.

La tâche du manager n'est donc pas simple, car il doit piloter l'entreprise dans l'intérêt de toutes les parties prenantes. Cela suppose aussi d'arbitrer entre des critères économiques et d'autres critères qui ne sont pas toujours en « coalition » et qui ne sont généralement pas pris en compte dans les modèles traditionnels de management (croissance et profits par exemple). Le secteur de la construction en est un exemple récurrent. En effet, comment concilier les politiques de GRH actuelles des grands constructeurs automobile (contraction du personnel) à celles de protection de la couche atmosphérique (fabrication des véhicules à faible émission de CO2).

L'enjeu de la mise en oeuvre de la RSE apparait donc assez compliqué et complexe au niveau des dirigeants pris individuellement. En effet, comment rechercher des profits en menant des activités extra économiques dans un marché intérieur sans frontières ?

I - 1 - 4 - Mariage RSE - rentabilité : les enjeux économiques

Les enjeux économiques de la RSE concernent essentiellement le lien (positif ou négatif) qui existerait entre performance sociétale et performance financière. Le débat sur l'existence d'un lien entre la performance financière et la performance sociétale a été le sujet de très nombreuses recherches théoriques et empiriques. Pourtant, l'existence de lien entre RSE et rentabilité n'a jamais été formellement établie, encore moins le sens de la relation. La question de l'impact financier de la CSR peut se décliner au plan managérial à travers l'étude des croyances des managers concernant cet impact, et au plan théorique à travers les recherches empiriques cherchant à évaluer le niveau et la nature de cet impact.

Il semble que l'existence d'un lien positif entre la performance sociétale et la performance financière n'est pas remise en question par les praticiens, le problème étant celui de l'échéance ou de la date à laquelle la rentabilité commence à se matérialiser. A cet effet, F. DEJEAN & J-P. GOND ont collecté en 2003, les avis de quelques organismes internationaux et de quelques gérants de fons éthiques, sur le lien entre RSE et performance économique (voir tableau ci-dessous). Il en résulte que les actions socialement responsables constituent un enjeu économique important pour l'entreprise.

Tableau 2.1 : Relation entre CSR et performance économique

Organismes

Citations

CSR Europe

« Pourquoi la CSR ? Les récompenses sont énormes. Il a été démontré que la CSR est une stratégie qui fonctionne. » Un encadré liste ensuite l'ensemble des bénéfices que la CSR est susceptible de procurer : performance financière accrue, des coûts de gestion réduits, un renforcement de la valeur de l'entreprise et de sa réputation, etc..

Business for Social Responsibility

Le document disponible sur le site Internet de l'organisme et intitulé « Introduction à la CSR » commence par détailler l'ensemble des impacts positifs susceptibles d'être générés par la CSR, au premier rang desquels figure l'idée d'un renforcement de la performance financière. A l'appui de chacun des impacts, un grand nombre d'études empiriques montrant l'existence d'un impact positif de la CSR sont citées.

Gérants de fonds éthique A

« une société qui est bien avec ses salariés, avec son actionnariat, avec ses clients, ses fournisseurs et puis avec tous les gens qui travaillent avec elle, doit normalement assurer des bases solides pour croître durablement et avoir des performances financières élevées ».

Gérants de fonds éthique B

« Je pense qu'une société qui gère de manière intelligente des problèmes sociaux et environnementaux est une société dans la quelle il y a une dynamique beaucoup plus forte, où les gens sont plus productifs, et cela a une influence énorme sur la rentabilité des sociétés. Pour le social c'est une évidence, une société qui est bien gérée sur le plan social ne peut pas faire autrement que d'avoir des bonnes performances, enfin on va dire des performances économiques au moins supérieures à ses concurrentes mal gérées, ça ne veut pas dire que ce sera extraordinaire mais ça sera supérieur, ça c'est tout à fait évident. ».

Gérants de fonds éthique C

« c'est un jugement sur des sociétés qui allonge leur durée de visibilité, c'est-à-dire qu'on pense que ce sont des sociétés qui se projettent non pas sur les résultats financiers des six mois prochains mais qui se projettent à long terme. Et comme nous on est des investisseurs très fondamentaux, comme ce qui nous intéresse c'est d'investir dans des sociétés qui ont des fondamentaux très solides, on pense que ça nous donne une vision plus complète de la société »

Source : Inspiré des travaux de Frederique Dejean et Gond Jean-Pascal (2003).

Au-delà des avantages économiques potentiels que les dirigeants reconnaissent à la RSE on assiste à un renforcement d'un ensemble de pressions qui contraignent ces derniers et convergent pour leur faire adopter un comportement socialement responsable. Ces transformations de l'univers des entreprises confèrent à la gestion stratégique de l'entreprise, des dimensions sociétales. C'est ce qui fera l'objet du sous-paragraphe suivant.

I - 1 - 4 - 2 - L'entreprise face aux pressions des parties prenantes externes : les enjeux

sociétaux de la RSE

Les entreprises ont vu émerger et se démultiplier les pressions visant à leur faire prendre conscience de nouveaux enjeux sociétaux. Ces pressions varient quant à leur forme et à leur nature, elles renvoient à différentes catégories d'acteurs parmi lesquels on peut compter

· Les mouvements anti-mondialisation, qui, en se focalisant sur les graves excès de quelques grandes firmes multinationales contribuent à une plus forte prise de conscience des enjeux liés à la responsabilité sociétale (N. Klein, [39]) ;

· Une partie des grandes ONG, qui ont contribué à faire passer la stratégie de l'entreprise d'une orientation réactive à une orientation proactive de la RSE ;

· Des consommateurs, qui, en plus du rôle joué par les ONG, se préoccupent d'avantage des conditions de fabrication des produits

Autrement dit, la RSE permettrait à l'entreprise d'adresser les besoins de la société civile (des PP externes en générale) avant que ceux-ci ne s'imposent à eux.

Les enjeux de la RSE, principale source de motivation des dirigeants à s'engager dans la responsabilité sociale de l'entreprise leur permettent d'éviter ou de gérer au mieux, les risques latents liés à la RSE. En effet, l'environnement des entreprises a considérablement changé depuis une quinzaine d'années. Confrontées à de nouveaux risques de plus en plus lourds dans un contexte imprévisible, les systèmes actuels de protection semblent montrer quelques faiblesses. L'émergence de la responsabilité sociale, comme une nouvelle préoccupation des entreprises depuis quelques années, a multiplié ces risques.

I - 2 - La responsabilité sociale : un mal nécessaire pour les managers.

Face à la prise de conscience croissante de la responsabilité sociale, les entreprises ont adopté des politiques environnementales et sociales différentes afin de gérer les risques inhérents à leur contexte économique, social et environnemental et de défendre leur réputation et leur image auprès des parties prenantes. Ainsi, le nombre d'acteurs grandit et les logiques sociales se diversifient. L'entreprise est tenue d'élargir son champ d'action et d'instaurer ou de renforcer ses relations de confiance avec ses différentes parties prenantes.

L'entreprise d'aujourd'hui évolue dans un environnement complexe et fluctuant dans des proportions souvent difficiles à prévoir. Les décideurs ont de plus en plus de mal à appréhender et à mesurer l'interdépendance des différents facteurs : sociaux, politiques, économiques, juridiques et environnementaux. Ainsi, l'entreprise se trouve face à des risques éventuels qui peuvent affecter les diverses composantes de l'organisation.

Il faut noter que l'importance de ces risques peut être évaluée de façon extrêmement variée. Cette variété est relative au temps, à l'espace, aux circonstances, aux acteurs et même au degré de médiatisation de l'événement considéré. Ainsi, Barthélemy (2000) définit le risque comme une situation dont l'occurrence est incertaine et dont la réalisation affecte les objectifs de l'entreprise qui le subit. Avant de pouvoir traiter et maîtriser ses risques, l'entreprise doit les identifier. Les typologies proposées pour la classification des risques encourus par les entreprises sont fondées sur deux grandeurs : la fréquence et la gravité (S. D. AYADI, 2007). C'est ainsi qu'on fait la distinction entre les risques majeurs et les risques mineurs. Les risques majeurs étant ceux liés aux phénomènes naturels et aux activités humaines.

En faisant le recoupement entre la fréquence et la gravité, Barthélemy (2000) distingue : Les risques de fréquence dont la fréquence d'occurrence est très élevée, mais de gravité relativement faible ; Les risques de gravité qui au contraire auront une gravité forte mais une probabilité d'occurrence faible ; Les risques négligeables dont la fréquence et la gravité sont faibles ; Les risques inacceptables de fréquence et de gravité élevées ; Et enfin les risques de gravité et de fréquence moyennes13(*).

Nous allons adopter une classification différente qui met l'accent sur la nature des risques plutôt que leur fréquence ou leur gravité. Nous faisons ainsi la distinction entre trois types de risques : les risques économiques, les risques sociaux et les risques environnementaux.

I - 2 - 1 - Les risques économiques : la résurgence du débat sur le lien probable entre

performance sociale et performance économique

Ce type de risque est généralement rattaché à la fluctuation du marché, l'évolution des réglementations et/ou de la concurrence entre autres. Ces risques sont généralement plus faciles à identifier puisqu'ils ont un effet immédiat sur les résultats et la performance économique de l'entreprise. Mais il n'est pas évident pour autant d'identifier les risques économiques liés à la responsabilité sociale de l'entreprise.

La relation entre la RSE et la performance économique a été largement étudiée. Cette relation est complexe. Une corrélation positive dans les deux sens signifie que, d'une part, le bien être d'une organisation garantie une bonne performance sociale et, d'autre part, une bonne performance sociale génère une meilleure performance économique. Certains chercheurs ont trouvé que la relation pourrait être positive ou nulle. Mais certaines études supposent qu'il existe une corrélation négative entre la performance sociale et la performance économique. Selon Friedman (1962), les investisseurs trouvent que la performance sociale de l'entreprise (PSE) est au détriment de la performance économique (qui est la seule activité légitime de l'organisation), la corrélation entre performance économique et sociale est alors négative.

Cette diversité des résultats théoriques nous amène à considérer plusieurs types de risques économiques qui découlent de la responsabilité de l'entreprise envers ses parties prenantes économiques (actionnaires, investisseurs, prêteur etc.). La nature des risques dépend alors de l'intérêt que l'entreprise porte à sa responsabilité envers la société.

Ainsi, selon S. D. AYADI (2007) une entreprise qui porte un faible intérêt au sujet de le RSE court des risques économiques liés à la perte de marché ; la baisse des ventes ; le boycott ; L'engagement d'actions en justice induisant le payement de pénalités et bien d'autres.

Cependant, nous pensons qu'une entreprise fortement engagée court également des risques économiques liés à l'augmentation des coûts de production ; l'accroissement des prix. Ce qui engendre la diminution des dividendes ; la diminution des salaires ; la perte de compétitivité par rapport aux concurrents ; des investissements supplémentaires liés à des engagements en matière environnementale et sociale etc.

I - 2 - 2 - Les risques sociaux : la GRH comme source de risque pour l'entreprise

L'homme est la ressource la plus riche de l'entreprise, mais la moins favorisée dans les stratégies de réduction des coûts, surtout dans le contexte actuel de crise financière internationale marqué par les suppressions d'emplois. La gestion des ressources humaines est donc une source de risques majeurs pour l'entreprise. Les situations de risque social sont nombreuses. Ils sont volontaires ou involontaires et rattachés essentiellement aux défaillances des politiques de recrutement, aux mauvaises conditions de travail, au non-respect de la réglementation, aux sabotages, aux erreurs, aux incompétences etc. Les conséquences de ce type de risques pourraient être graves pour l'entreprise. Toute tension sociale (référendum et autres regroupements) pourra affecter la productivité de l'entreprise.

Ainsi, la responsabilité sociale envers les employés et les organismes sociaux (syndicats, ONG) signifie que l'entreprise devra faire face aux risques suivants : baisse de productivité ; perte de personnel ; absence de motivation ; opposition aux pouvoirs publics ; augmentation des accidents, des grèves, des sabotages ; augmentation de l'attention des groupes de pressions tels que les syndicats.

I - 2 - 3 - Tenir compte des évènements imprévisibles : Les risques environnementaux

Les risques environnementaux sont généralement liés aux périls naturels (tels que les incendies, tremblement de terres, inondations, humidité, sécheresse etc.) que l'entreprise pourrait supporter. Ce genre de risques ne dépend pas directement de l'action de l'homme. Mais face au développement du domaine de la RS, l'entreprise doit tenir compte également des risques d'atteinte à l'environnement. Par exemple, après le dernier tremblement de terre qui a récemment eu lieu en Chine, on s'est rendu compte que plusieurs bâtiments (commerciaux ou non) avaient été construits sans tenir compte des normes sismiques. Tout est donc à refaire, ce qui n'aurait pas été le cas si la dimension environnementale de la RSE y avait été respectée et appliquée.

Vu sous un autre angle, l'opinion publique et les consommateurs sont de plus en plus soucieux de favoriser les entreprises qui élaborent leurs produits selon des procédés respectueux de l'environnement. Les partenaires financiers (banques et autres établissements de crédit) ont également tendance à favoriser les entreprises qui ont une politique appropriée de gestion des risques environnementaux.

Les entreprises courent alors des risques liés à : l'atteinte à la réputation ; l'atteinte à l'environnement ; l'impact négatif des activités sur l'environnement écologique (émission de déchets et effluents etc.) ; la mauvaise utilisation des ressources naturelles (eau, sol, énergie etc.) ; au non-respect de la réglementation.

Afin de réduire l'effet de ces risques et améliorer leur image, les entreprises développent de manière croissante le dialogue avec les acteurs susceptibles de générer ces risques. Ce dialogue est favorisé à travers la publication d'informations sociétales justifiant l'engagement de la société envers sa responsabilité sociale. L'approche RSE peut permettre de mettre en oeuvre, entre autres, de nouvelles régulations et une meilleure gouvernance d'entreprise, que l'entreprise soit grande, moyenne ou petite, dans les pays dits développés, comme dans les pays en développement. Les critères sur lesquels se fonde toute pratique de RSE sont de quatre types et fortement corrélés à ceux du développement durable.

I - 3 - L'irruption de la RSE dans le gouvernement d'entreprise : les critères

de gouvernance

La RSE se fonde sur quatre types de critères qui sont directement liés à ceux du développement durable à savoir les critères environnementaux, les critères sociaux, les critères économiques et désormais, les critères de gouvernance.

En effet, le développement durable s'appuie sur les trois piliers que sont l' environnement, le social, et l' économique. Ces trois piliers sont coiffés par la gouvernance d'entreprise qui peut intégrer parallèlement et de manière indirecte, des principes éthiques ou de déontologie des affaires. Nous nous proposons de ne développer que les critères de gouvernance, les trois premiers ayant déjà été examinés dans les paragraphes précédents.

Les aspects de la gouvernance en matière de RSE peuvent être regroupés dans les rubriques suivantes : entreprise et Partie prenante, perception de l'environnement, gouvernance d'entreprise, veille sociétale, risque et vulnérabilité. Du point de vue de la gouvernance, la RSE se traduit ou devrait se traduire de différentes manières :

- La définition d'une éthique, formalisée dans une charte ;

- La mise en place de programmes de gestion des risques ;

- Une surveillance accrue des principes de sécurité ;

- Une veille, notamment sociétale ;

- Des projets de gestion des connaissances en support à l'innovation qui impliquent également plusieurs types d'agents économiques : les acteurs publics territoriaux de l'enseignement et de la recherche (pôles de compétence) ;

- Des programmes d'assurance qualité, avec la mise en oeuvre de nouvelles normes ;

- Une communication interne et externe.

Bien que pertinents, ces critères ne trouvent pas tous leur application au sein de l'entreprise subsaharienne. En effet, s'il est vrai qu'on retrouve des programmes de gestion des risques, d'assurance qualité ou de communication interne et externe au sein de certaines entreprises camerounaises, tel n'est pas le cas pour les chartes, normes et autres veilles sociétales qui ne sont propres qu'aux économies occidentales. Ce qui circonscrit en quelque sorte, la zone d'applicabilité des critères de gouvernance dans leur ensemble.

Nous venons de présenter les enjeux, les risques et la typologie des critères, notamment les critères de gouvernance, inhérents à la RSE. La mise en oeuvre des politiques de Responsabilité Sociétale au sein de l'entreprise prend de plus en plus d'importance. Outre le libéralisme économique, plusieurs autres facteurs sont explicatifs de cette importance.

I - 4 - L'Importance croissante de la RSE dans un contexte de mondialisation

Plusieurs facteurs sont responsables de l'importance accrue accordée à la responsabilité sociale au sein des pratiques managériales des entreprises :

· La mondialisation suscite, en matière de RSE, de plus en plus de préoccupations, notamment aux chapitres des pratiques de gestion des ressources humaines, de la protection de l'environnement, de la santé et de la sécurité ;

· Des gouvernements et des organismes intergouvernementaux, comme les Nations Unies, l'Organisation de coopération et de développement économiques et l'Organisation internationale du Travail, ont élaboré des pactes, des déclarations, des lignes directrices, des principes et d'autres instruments qui exposent les grandes lignes des normes sociales de conduite acceptable ;

· Les progrès de la technologie des communications, comme Internet, les téléphones cellulaires et les assistants numériques, facilitent la surveillance des activités commerciales et la diffusion de l'information à leur sujet. Par l'entremise de leurs sites Web, les organisations non gouvernementales attirent maintenant régulièrement l'attention, sur les pratiques commerciales qu'elles jugent problématiques ;

· Les consommateurs et les investisseurs sont de plus en plus intéressés à appuyer des pratiques commerciales responsables. Ils exigent plus d'information sur la manière dont les entreprises réagissent aux possibilités et aux risques qui sont liés aux enjeux sociaux et environnementaux ;

· Les nombreux manquements graves et notoires à l'éthique d'entreprise ont accru la méfiance du public envers les compagnies et ont mis en évidence la nécessité d'améliorer, au sein de celles-ci, la gouvernance, la transparence, la reddition de comptes et les normes déontologiques ;

· Dans de nombreux pays, les citoyens disent clairement que les entreprises doivent respecter les normes de diligence sociale et environnementale, peu importe où elles exercent leurs activités ;

· On est de plus en plus conscient de la capacité limitée des initiatives législatives et réglementaires gouvernementales à s'attaquer efficacement à tous les enjeux englobés dans la responsabilité sociale des entreprises ;

· Les entreprises saisissent que l'adoption d'une approche efficace en matière de RSE peut diminuer les risques de perturbation de leurs activités, offrir de nouveaux débouchés et améliorer la réputation de l'entreprise et de ses marques ;

· Par-dessus tout, l'engagement sociétal engendre la responsabilité économique de l'entreprise en jouant un rôle important dans la réduction des coûts de production. Cette responsabilité économique consiste par exemple à produire des biens et des services fiables, tout en fournissant des emplois, en générant des richesses pour les actionnaires et en utilisant des technologies peu polluantes de sorte que les prix des biens et services reflètent les vrais coûts de production et qu'il n'y ait pas d'externalités produites.

L'importance croissante de la RSE, telle que développées ci-dessus, illustre et explique l'engagement volontaire croissant des entreprises dans la mise en oeuvre des actions socialement responsables. Toutefois, même s'il affiche à première vue une attitude volontariste, cet engagement est aussi dû à la présence d'organismes internationaux et d'agences de notations internationales. En effet, les lois et prescriptions internationales en matière de RSE, influencent de manière notoire les attitudes des dirigeants d'entreprises, à l'égard des pratiques de responsabilité sociale.

Nous allons donc présenter ces organismes et dégager leurs prescriptions en matière de RSE.

Section II : L'IMPLICATION DES INSTANCES INTERNATIONALES ET DES

ORGANISATIONS NON GOUVERNEMENTALES DANS LES

PRATIQUES DE RESPONSABILITE SOCIALE DES ENTREPRISES

La responsabilité sociale des entreprises (RSE) est désormais au coeur des initiatives de nombreuses instances internationales comme les Nations Unies (initiative Global Compact lancée en juillet 2000), l'Organisation Internationale du Travail (déclaration sur les pratiques sociales dans les multinationales) ou encore l'Union Européenne (Livre Vert consacré à la RSE en juillet 2001). Leur éruption dans le domaine de la RSE date des années 1960 aux États Unis.

De manière générale, en matière d'intervention publique, les initiatives se distinguent selon qu'elles sont contraignantes (réglementations nationales) ou non (à l'initiative d'organisations internationales et/ou au niveau sectoriel). Les organisations internationales ont été pionnières dans la promotion de la RSE, particulièrement en ce qui concerne les Nations Unies (sommets de Rio en 1992, Kyoto en 1997, Johannesburg en 2002 ; principes pour le contrôle des pratiques anticoncurrentielles en 1980 ; Global compact en 1999) et l'Europe (livre vert de la commission européenne en 2001), mais aussi l'OCDE (principes directeurs de 1976, révisés en 2000), le BIT (déclaration tripartite de 1977, amendée en 1998) et la GRI/CERES (1997).

Étant donné que nous ne pouvons prétendre examiner les organismes internationaux de manière exhaustive, nous allons présenter quelques uns, dont les contributions dans le domaine de la RSE sont notoires.

II - 1 - Contribution des Nations Unies à l'ancrage de la RSE dans les activités de

l'entreprise

A travers le Programme des Nations Unies pour l'Environnement (PNUE), les Nations Unies ont initié le Global reporting initiative et le pacte mondial (Global compact).

· Le GRI (Global Reporting Initiative) : cette initiative a été initiée en 1997 par le Programme des Nations unies pour l'environnement (PNUE) et de la Coalition for Environmentally Responsible Économies (CERES). L'objectif est d'élaborer des lignes directrices et une standardisation de normes pour la rédaction de rapports environnementaux et sociaux.

· Le Global Compact ou Pacte mondial : lancé en janvier 2000 lors du Forum économique mondial par Kofi Annan. Le pacte mondial est un code de conduite qui comprend 10 principes que les entreprises doivent s'engager à respecter. Sans les énumérer, deux de ces principes concernent les droits de l'homme, quatre les normes de travail, trois l'environnement et le dernier la lutte contre la corruption.

La contribution des Nations Unies à l'ancrage de la RSE au sein des activités de l'entreprise est notoire. A travers leurs initiaves (GRI), les Nations Unies proposent un référentiel d' indicateurs qui permet de mesurer l'avancement des programmes de développement durable des entreprises. Reste à savoir s'il est appliqué pour le cas typique des entreprises camerounaises.

II - 2 - La sensibilisation des entreprises : le rôle de la Banque mondiale

Le Banque Mondiale ou BM : la BM a également publié des recommandations, et propose un cours pour sensibiliser les entreprises en vue de leur permettre de mettre en oeuvre le concept de RSE. Ce cours a déjà été donné à 12 000 personnes partout dans le monde. La Banque mondiale se présente ainsi comme un formateur des dirigeants sur le sujet de la responsabilité sociale des entreprises.

Compte tenu des statistiques exposées ci-dessus, le résultat n'est pas encore satisfaisant. Car, si le cours en question n'a été dispensé qu'à 12 000 personnes dans le monde sur une population totale allant à plus de six milliards, la proportion (12 000 / 6 000 000 000) est peu signifiante et l'échantillon très peu représentatif de la population mondiale. Sans remettre en cause l'initiative de BM de sensibiliser les dirigeants d'entreprise sur la RSE, on est enclin de dire que, compte tenu des données quantitatives ci-dessus, beaucoup reste à faire en matière de sensibilisation.

II - 3 - Conception moderne de la RSE : la position de la l'Union Européenne

La Commission européenne défend une politique volontariste dans le domaine de la RSE ou CSR (Corporate Social Responsibility) via sa Direction générale entreprise depuis son premier livre vert en 2001, suivi d'une communication en 2002 renouvelée en 2006. L'approche interactive entre toutes les parties prenantes est promue avec l'insistance de la pratique de la RSE comme acte volontaire.

Les PME sont désormais également impliquées et deviennent des acteurs à part entière compte tenu de leur omniprésence dans le tissu économique. Un programme spécifique leur est dédié, ce qui est d'ailleurs en phase avec la proposition de Sandrine Berger-Douce. d'envisager la RSE en milieu PME comme un élément de la rentabilité.

Enfin, la Commission Européenne a contribué énormément à la modernisation du concept de responsabilité sociale de l'entreprise. En effet, elle propose une définition qui souligne l'importance pour les dirigeants d'entreprises, d'envisager leurs activités extra économiques au delà des aspects légaux.

II - 4 - La définition des normes internationales du travail : implication de

l'Organisation Internationale du Travail dans la RSE

La Conférence internationale du Travail, qui réunit une fois par an les mandants de l'Organisation Internationale du Travail (OIT) (représentants gouvernementaux, représentants travailleurs et représentants employeurs), oriente les travaux de l'Organisation. Elle adopte également de nouvelles normes internationales du travail ainsi que le programme et le budget de l'Organisation. Entre deux sessions de la Conférence, c'est le Conseil d'administration, composé de 28 membres gouvernementaux, de 14 membres employeurs et de 14 membres travailleurs, qui oriente les activités de l'OIT.

Il existe actuellement 188 conventions et 199 recommandations, dont certaines remontent à la création de l'OIT en 1919. Le Conseil d'administration du Bureau International du Travail (BIT) a qualifié de fondamentales huit conventions qui traitent de questions considérées comme des principes et des droits fondamentaux au travail : liberté syndicale et reconnaissance effective du droit de négociation collective ; élimination de toute forme de travail forcé ou obligatoire ; abolition effective du travail des enfants ; élimination de la discrimination en matière d'emploi et de profession.

A vu de ce qui précède, on peut dire que la contribution de l'Organisation Internationale du Travail (OIT) se situe essentiellement en interne, notamment les employés ou collaborateurs (parties prenantes internes). Autrement dit, l'intervention de l'OIT dans le domaine de la RSE relève uniquement du social, ce qui n'est pas satisfaisant pour l'acception moderne du concept de RSE. Il faut donc aussi envisager la RSE en externe.

A cet effet, plusieurs autres organisations proposent d'examiner la RSE en externe :

- Le World Wide Fund for Nature (WWF)

- L'Organisation de Coopération et de Développement Économiques (OCDE)

- L'Observatoire sur la Responsabilité Sociale des Entreprises (ORSE)

- Loi sur les Nouvelles Régulations Économiques (Loi NRE)

- Le Mouvement des Entreprises de France (MEDEF)

- L'Organisation Internationale de Normalisation (ISO)

Étant donné que nous ne pouvons pas examiner toutes ces organisations dans les détails, nous allons nous focaliser sur celle qui regroupe en moyenne, les caractéristiques des autres organisations : il s'agit de l'Organisation Internationale de Normalisation (ISO).

II - 5 - Établir un consensus sur les domaines de la RSE : l'Organisation Internationale

de Normalisation ISO (International Standardization Organization)

L'ISO est le plus grand producteur et éditeur mondial de Normes internationales. L'ISO est un réseau d'instituts nationaux de normalisation de 159 pays, selon le principe d'un membre par pays, dont le Secrétariat central, situé à Genève, Suisse, assure la coordination d'ensemble.

L'ISO est une organisation non gouvernementale qui jette un pont entre le secteur public et le secteur privé. Bon nombre de ses instituts membres font en effet partie de la structure gouvernementale de leur pays ou sont mandatés par leur gouvernement, et d'autres organismes membres sont issus exclusivement du secteur privé et ont été établis par des partenariats d'associations industrielles au niveau national.

L'ISO permet ainsi d'établir un consensus sur des solutions répondant aux exigences du monde économique et aux besoins plus généraux de la société. L'une des nombreuses normes ISO, applicable au strict domaine de la RSE est la norme ISO 26000.

La norme ISO 26000 est une norme ISO en cours d'élaboration. Elle portera sur la responsabilité sociétale des organisations. Elle devrait être publiée en 2010, le processus de normalisation prenant du retard. Ce projet de normalisation est ambitieux, la « communauté internationale » n'ayant toujours pas réussi à se prononcer par consensus sur le sujet. Cette démarche historique doit donc aboutir fin 2010 à la publication d'un guide, autrement dit, il s'agit de la première norme internationale de lignes directrices sur la responsabilité sociétale. L'ISO se propose donc d'y répondre par des lignes directrices nommées ISO 26000, afin d'avoir un document de référence sur lequel les organisations pourront s'appuyer pour démarrer la mise en place d'une démarche socialement responsable.

En plus des organisations, plusieurs sommets ont contribué à ancrer les pratiques de RSE au sein des activités d'entreprises. C'est le cas par exemple du Sommet de Rio de Janeiro instigué par les Nations Unies et tenu du 03 au 14 Juin 1992, qui a été marqué par l'adoption d'un texte fondateur de 27 principes, intitulé « Déclaration de Rio sur l'environnement et le développement » qui précise que les être humains sont au centre des préoccupations relatives au développement durable. On peut aussi citer le cas du Protocole de Kyoto. Celui-ci va plus loin, car il propose un calendrier de réduction des émissions des 6 gaz à effet de serre qui sont considérés comme la cause principale du réchauffement climatique des cinquante dernières années. Il comporte des engagements absolus de réduction des émissions pour 38 pays industrialisés, avec une réduction globale de 5,2 % des émissions de dioxyde de carbone d'ici 2012 par rapport aux émissions de 1990.

Cette première partie sur la nécessité et la mise en oeuvre de le RSE nous a permis d'appréhender les contours inhérents à la pratique de responsabilité sociale de l'entreprise. En effet, après avoir développé les domaines, les instruments, les enjeux, les risques et les avantages inhérents à la RSE, nous avons exposé quelques instances internationales exerçant une influence notable sur les pratiques de RSE par les entreprises.

Nous nous sommes inspirés du contenu de cette première partie pour formuler et développer la deuxième partie intitulée : Spécificités et logiques de la Responsabilité Sociale des Entreprises dans les Entreprises au Cameroun.

DEUXIÈME PARTIE :

SPÉCIFICITÉS ET LOGIQUES DE LA RESPONSABILITÉ SOCIALE DES ENTREPRISES AU CAMEROUN

La première partie de notre mémoire a passé en revue, l'essentiel de la littérature au sujet de la responsabilité sociale de l'entreprise. Les deux chapitres qui ont constitué cette partie ont apporté des éclaircissements théoriques sur la thématique de la responsabilité sociale de l'entreprise. Nous y avons présenté sa genèse, son évolution, une définition consensuelle, son approche par les parties prenantes, ses domaines d'application, ses instruments de mise en oeuvre et de contrôle, ses domaines d'application, ses enjeux et risques, et ses avantages dans un contexte de mondialisation. Nous y avons également développé l'implication et le rôle des instances internationales dans l'ancrage des démarches socialement responsables au sein des pratiques et activités quotidiennes des entreprises.

La seconde partie de notre mémoire est essentiellement centrée sur l'étude empirique que nous avons menée en deux étapes auprès de trente-deux (32) entreprises de la place, dont quatre sous forme d'études de cas et vingt-huit sous forme de questionnaires. Cette partie retrace le cheminement que nous avons suivi tout au cours de notre recherche, depuis la constitution de notre échantillon jusqu'à l'aboutissement aux résultats. Elle est également subdivisée en deux chapitres : l'un décrit entièrement la démarche adoptée lors de la collecte, de l'analyse et de l'interprétation des résultats (chapitre 3). L'autre représente le cadre factuel de notre recherche en ce sens qu'il développe et interprète le contenu des différents entretiens que nous avons menés (chapitre 4). Il s'en suit une conclusion générale dans laquelle nous revenons sur les difficultés rencontrées lors de notre recherche en général et lors de la collecte des données en particulier.

Chapitre III 

DEMARCHE ADOPTEE : CONCOURS CONJOINT

DES MÉTHODES QUALITATIVES ET QUANTITATIVES

Le présent travail de recherche vise principalement à déterminer les réalités des pratiques de RSE par les entreprises camerounaises. Pour atteindre cet objectif, nous avons mené une étude exploratoire sur plusieurs entreprises du secteur industriel. Le présent chapitre présente et justifie la démarche méthodologique qui nous a permis d'aboutir aux résultats que nous présenterons au prochain chapitre (sections 1), et effectue une présentation de l'échantillon d'entreprises du secteur industriel retenu (section 2). Le choix de ce secteur relevant du fait que les entreprises qui y opèrent sont concernées aussi bien par les problèmes sociaux qu'environnementaux.

Section I : PRESENTATION ET JUSTIFICATION DE L'APPROCHE

METHODOLOGIQUE

Nous nous proposons, avant de présenter et justifier la démarche méthodologique que nous avons adoptée, de faire un briefing de l'ensemble des documents que nous avons parcourus et qui nous ont inspiré tout au cours de notre travail.

En effet, au bout de nos multiples lectures, nous avons constaté que, malgré les contextes de mondialisation et de libéralisme économique actuels, les pratiques de RSE restent dominées par deux grands penchants. D'un coté, nous avons des entreprises qui pratiquent des activités de RSE par ce qu'elles sont régies par des lois : on dit alors que la RSE a une dimension légale qu'on a attribué à l'origine aux entreprises européennes. De l'autre, nous avons des entreprises qui mènent leurs activités de manière volontaire soit par culture, soit par citoyenneté : on dit alors que la RSE a une dimension normative qu'on attribue aux entreprises américaines. Nous avons aussi constaté que, de toutes les catégories de RS proposées par différents auteurs, celles proposées par A.B. CARROLL en 1979 sont les plus génériques et englobent toutes les autres. Il s'agit des responsabilités discrétionnaires, éthiques, légales et économiques. En outre, nous avons constaté que la RSE pouvait être appliquée aussi bien en interne (politique des ressources humaines) qu'en externe (ensemble de toutes les parties prenantes et l'environnement dans son ensemble).

Ainsi, après avoir constaté un certain nombre d'actions contradictoires aux exigences de responsabilité sociétale, pour le cas typique des entreprises étudiées, nous nous sommes fixés pour objectif principal, de caractériser la responsabilité sociale des entreprises au Cameroun. Cet objectif repose sur le fait qu'une entreprise qui se veut socialement responsable doit pouvoir intégrer dans ses comportements et ses politiques, de manière délibérée, le progrès économique et social dans le respect et la préservation de l'environnement.

Cependant, les entreprises confondent très souvent ces trois notions qui en fait sont les piliers du DD (économique, social et environnemental). Cette confusion proviendrait de la difficulté éprouvée, aussi bien par les chercheurs que par les praticiens, à assumer les paradoxes générés par le management responsable. Que dire par exemple, d'une entreprise qui met ses ouvriers ou employés en chômage technique et se livre paradoxalement à des activités de mécénat et de philanthropie ?

La démarche méthodologique que nous avons adoptée a donc pour objet, de découvrir la réalité de la responsabilité sociale au sein des entreprises et d'en ressortir les spécificités pour le cas typique des entreprises étudiées. Mais avant, nous présentons d'abord le canevas de notre recherche.

I - 1 - Méthode d'investigation et justification du choix de la méthode

Un travail de recherche, quelque soit le domaine, doit pouvoir répondre à trois questions fondamentales : Quoi ? Pourquoi ? Et comment ? Dans le cadre notre recherche, nous avons déjà apporté une réponse à la première question, car il s'agit des pratiques de responsabilité sociale des entreprises camerounaises. S'agissant du « pourquoi », l'étude qualitative est la mieux indiquée pour apporter des éléments de réponse. A cet effet, nous avons ciblé les entreprises du secteur industriel comme champ d'investigation.

I - 1 - 1 - La recherche qualitative : Comprendre les comportements des entreprises

camerounaises en matière de responsabilité sociale

En général, la recherche en sciences de gestion est marquée principalement par deux grandes approches : une approche positiviste qui prône les méthodes quantitatives et une approche constructiviste qui repose sur les méthodes qualitatives. Le choix de l'une ou l'autre méthode n'est pas le fruit du hasard, il est fonction des objectifs poursuivis par le chercheur. La méthode quantitative sera plus appropriée lorsque l'objectif de la recherche sera de quantifier et représenter les résultats obtenus. Par contre, on fera appel à la méthode qualitative lorsque le but de la recherche sera de comprendre un phénomène que l'on se sera proposé d'étudier.

I - 1 - 2 - Vers un éclaircissement contextuel du choix de la méthode

Ainsi, pour comprendre les comportements des entreprises camerounaises en matière des RSE, nous avons opté pour la méthode qualitative. D'autres raisons sou tendent le fait que nous ayons opté pour ce type de recherche :

· La Responsabilité Sociale de l'Entreprise est une thématique récente qui n'a pas encore fait l'objet de nombreuses publications dans le contexte camerounais. Notre souci est donc plus de comprendre et décrire ce phénomène que de le représenter ou le quantifier.

· Notre étude étant exploratoire, nous nous sommes arrimés aux cinq postulats d'utilisation des recherches exploratoires proposés par l'ESOMAR (European Society for Opinion and Marketing Research) pour qui une étude qualitative est menée :

- Pour déterminer les causes d'un comportement qu'on ne peut exprimer soit par méconnaissance, soit par refus de reconnaitre ces causes ;

- En prélude à une étude quantitative pour déterminer les questions à poser ;

- Pour explorer le milieu qu'on se propose d'étudier ;

- Pour obtenir une meilleure perspective là où d'autres méthodes traditionnelles d'enquête ont échoué ;

- Pour favoriser la créativité.

Toutes ces propositions, même la seconde, sont applicables à notre cas. En effet, dans le but de proposer des résultats généralisables au Cameroun, nous avons en plus des entretiens menées auprès de quatre entreprises, administré des questionnaires dans vingt-huit autres entreprises. D'où la nécessité de faire la distinction entre recherche qualitative (constructiviste) et recherche quantitative (positiviste).

Tableau 3.1 : Études qualitatives et quantitatives

Éléments de comparaison

Étude qualitative

Contextualisation

Étude quantitative

Généralisation

Objectifs

Comprendre en termes de qualité les raisons et les motivations sous-jacentes

Quantifier les données et généraliser les résultats à partir de l'échantillon de la population concernée

Échantillon

Petit nombre de cas non représentatif

Grand nombre de cas représentatifs

Collecte de données

Non structurée

Structurée

Analyse de données

Non statistique

Statistiques

Résultats

Élaborer un début de compréhension

Recommander une ligne d'action définitive

Source : adapté de Naresh et al. (2004)

L'ensemble des informations que nous voulons ainsi obtenir nécessite des méthodes précises que nous décrirons après avoir déterminé et présenté les entreprises qui répondent au mieux aux exigences de notre thème sur les pratiques de responsabilités sociales dans leur ensemble.

I-2- Champ d'investigation : le secteur industriel camerounais

Il est important de rappeler que notre recherche vise principalement à découvrir la réalité des pratiques de responsabilité sociale au sein des entreprises situées au Cameroun. Nous mettons un accent particulier sur les entreprises industrielles parce qu'elles répondent au mieux aux trois piliers fondamentaux de la RSE à savoir : l'aspect social (sponsoring, mécénat, dons), l'aspect économique (recherche du gain pécuniaire), et l'aspect environnemental (lutte contre la pollution).

En ce qui concerne le nombre de cas étudiés, les quatre entreprises qui ont constituées le volet constructiviste de notre recherche, satisfont pleinement le critère de saturation théorique. Dans le but de confirmer ou d'infirmer les résultats de nos différents entretiens en vue de les généraliser, nous avons en plus des quatre entreprises qui ont fait l'objet d'une recherche qualitative, administré des questionnaires dans vingt-huit autres entreprises du même secteur. Nous présenterons principalement les entreprises qui ont fait l'objet d'une étude de cas, après avoir présenté les stratégies de collecte et d'analyse des données.

I-3- Collecte et analyse des données

Le but de notre travail étant d'identifier et de caractériser les pratiques de responsabilité sociale des entreprises camerounaises, nous avons opté pour une étude exploratoire. Nous avons choisi de mener une recherche exploratoire parce que le problème des pratiques de RSE au Cameroun est un problème flou qu'il est nécessaire de clarifier et de comprendre en profondeur.

Notre recherche a démarré par un examen profond de la littérature sur la RSE et d'autres domaines qui lui sont parallèles tels que le Développement Durable, l'Investissement Responsable, l'Éthique et la Citoyenneté d'entreprise, la Business and Society, et bien d'autres. Nous nous sommes donc familiarisés à la RSE à travers les développements antérieurs sur le sujet, tels que ceux de H. Bowen, J-P. Gond, A.B. Carroll, Mc Guire, F. William, E. Persais et bien d'autres auteurs célèbres, sans oublier la Commission Européenne dont la contribution sur le sujet s'est enrichie en 2001 avec la publication du Livre Vert.

Nous avons ensuite administré un questionnaire à vingt-huit entreprises du même secteur afin de vérifier la pertinence des informations recueillies lors des entretiens.

En bref, la collecte des données s'est faite par exploration pure et simple ; en ce qui concerne la technique de collecte des données, nous avons procédé par entretien et par questionnaire. Les données recueillies ont premièrement été analysées par la technique de l'analyse du contenu pour les entretiens et par analyse des contingences pour les questionnaires.

I - 3 - 1 - L'étude de cas : vers une vision aussi complète que possible du problème.

En effet, pour avoir une vision aussi complète que possible du phénomène, on cherche à obtenir des précisions en vue de reformuler le problème. Cette situation intervient notamment lorsqu'une enquête exploratoire sous forme d'entretien approfondi auprès des experts est nécessaire. Elle répond ainsi à plusieurs situations parmi lesquelles ont peut citer : le souci de mieux reformuler le problème et entreprendre ensuite une investigation plus précise ; le souhait d'éliminer certaines éventualités ou certains aspects du problème qui ont déjà été vérifiés ; le souci d'élaborer un questionnaire ou un guide d'entretien intégrant toutes les situations possibles et le code linguistique en vigueur dans le contexte étudié.

Selon Evrard, Pras, et Roux (1998), cités par Lépineux (1992), L'étude de cas est « particulièrement recommandée lorsqu'on aborde des champs nouveaux, complexes, où les développements théoriques sont faibles et où la prise en compte du contexte est déterminante pour l'élaboration d'un processus de compréhension ». La littérature au sujet de la RSE étant très pauvre au Cameroun, il nous a fallu rencontrer les responsables de certaines entreprises de la place, de recueillir les données primaires qui nous ont permises de mieux nous renseigner sur la nature du phénomène que nous étudions. Ainsi, la stratégie d'étude de cas que nous avons adoptée, s'adapte non seulement à une démarche qualitative, mais nous a aussi permis de mettre en relief les spécificités des pratiques de RSE au Cameroun.

Dans l'ensemble de ces situations, des entretiens en profondeur auprès des experts, ont été nécessaires, dans le but de déterminer les aspects critiques du sujet.

I - 3 - 2 - La technique de collecte des données : l'entretien

Dans le cadre d'une recherche qualitative, il existe principalement trois méthodes de collecte des données : l'observation la réunion et l'entretien. Le choix et l'application de l'une de ces trois méthodes n'est pas le fruit du hasard, il dépend en effet des objectifs poursuivis par le chercheur et de la nature de la population à étudier entre autres.

En effet, en ce qui concerne la population de notre étude, elle est essentiellement constituée d'entreprises industrielles qu'il serait difficile, sinon impossible d'interroger par réunion. De plus, une simple observation du phénomène, qu'elle soit participante ou non, ne nous aurait pas permis d'étudier le phénomène en profondeur. Afin de recueillir des données originales et spécifiques à chaque entreprise, nous avons opté pour la méthode de collecte de données par entretien. Une raison fondamentale est que les entretiens sont classiquement utilisés dans les études exploratoires et parfois même, à certaines études explicatives.

De plus, pour (Frisch, 1999) cité par (Jolibert et Jourdan, 2006), « L'entretien est aussi plus adapté lorsque l'étude porte sur le relevé de pratiques individuelles : mettre à jour des logiques d'appropriation, des processus, des mécanismes de décision ou bien encore, identifier les phénomènes de compréhension ». L'entretien étant une technique d'extraction de l'information auprès des sujets (les entreprises industrielles dans notre cas), elle répond au mieux à notre objectif qui est d'identifier et de caractériser les pratiques de RSE des entreprises de la place.

Il existe plusieurs types d'entretiens : l'entretien en profondeur (ou non directif), l'entretien centré (ou semi directif), l'entretien directif (ou questionnaire ouvert). Dans un entretien non directif, le degré de liberté du répondant est très élevé, ce qui pourrait l'amener à sortir du sujet pour donner des avis personnels qui ne seront nécessairement plus en phase avec les pratiques réelles de l'entreprise. Pour cette raison, nous avons écarté l'entretien en profondeur. A l'opposé de l'entretien en profondeur, on retrouve l'entretien directif qui est constitué d'un ensemble de questions ouvertes et fermées, ce qui oriente le répondant dans ses réponses et par conséquent restreint le cadre d'analyse.

Par contre, l'entretien semi directif laisse au répondant, un degré de liberté assez élevé réduisant ainsi le risque non seulement d'introduire des biais dans les données (entretien non directif), mais aussi, d'éviter les conséquences d'un entretien directif. C'est la raison pour laquelle nous avons opté pour l'entretien semi directif comme type d'entretien.

I - 3 - 2 - 1 - Souplesse et flexibilité dans la collecte des données : l'entretien semi directif

L'entretien semi directif ou entretien centré est mené à l'aide d'un guide d'entretien. Cet entretien se caractérise par la souplesse dans la conduite de la conversation et par la présence d'un guide d'entretien, véritable support et fil conducteur de l'échange. Son utilisation est la garantie que la totalité des thèmes de l'entretien seront abordés de façon identique avec tous les répondants. Le rôle de l'enquêteur consiste alors à approfondir chaque élément important du discours de l'interlocuteur, en s'appuyant sur le guide qui fournit un cadre général du déroulement de l'entretien, une expression ordonnées des sujets à aborder et une suggestion des techniques de relance et / ou d'approfondissement à utiliser.

L'entretien centré a pour principal atout le guide d'entretien qui introduit un cadre structuré, accroit la compréhension des informations et confère à la collecte un caractère systématique. L'échange reste ainsi proche d'une conversation non-programmée.

Nous retraçons d'abord l'élaboration du guide d'entretien avant de développer le processus de collecte des informations telle qu'il s'est réellement déroulé.

I - 3 - 2 - 2 - L'élaboration du guide d'entretien : Vers une appréhension des méandres

du problème posé

Le guide d'entretien est un document qui précise à l'enquêteur, en plus de la consigne initiale (identique à celle d'un entretien en profondeur), que l'ensemble des facettes du thème à étudier doivent être abordées avec détail au cours de l'entretien.

Le guide d'entretien que nous avons élaboré est structuré en thèmes. Les titres de ces thèmes ont été formulés en phase avec les besoins en informations qui nous permettrons d'atteindre nos objectifs. De ce fait, après avoir opéré un bref détour sur la notion de RSE et sur les objectifs poursuivis par notre étude, l'essentiel de l'entretien a porté sur les six thèmes suivants :

- La responsabilité sociale de l'entreprise : afin d'amener le répondant à définir la RSE, l'identifier au sein de son organisation et tester ses connaissances des instances impliquées dans la RSE ;

- Engagement sociétal de l'entreprise : afin d'identifier les politiques de RSE de l'entreprise, ses démarches et les domaines couverts par ses actions ;

- Place de la RSE et implication dans la stratégie d'entreprise : afin de déterminer la place tant interne qu'externe qu'occupe la RSE dans le management d'entreprise ;

- Évaluation des conséquences des activités de RSE : afin de déceler l'incidence et les avantages inhérents à la mise en oeuvre d'une politique responsable au sein l'entreprise ;

- Difficultés rencontrées lors de la mise en oeuvre de la RSE : afin de discerner les types de difficultés rencontrées par l'entreprise camerounaise dans la mise en oeuvre d'une politique de RSE ;

- Identification de l'entreprise.

Le guide d'entretien ayant été élaboré, nous avons procédé à la collecte des données proprement dite. C'est ce qui fera l'objet du sous-paragraphe suivant.

I - 3 - 3 - La collecte des données proprement dite : le déroulement des entretiens

En général, toute collecte de données se fait sur la base d'un certain nombre de critères. En ce qui nous concernent, les critères sur lesquels nous avons fondé la collecte de nos données ont été résumés en deux modèles : un premier modèle qui n'est autre que le modèle des stakeholders proposé par M. Friedman en 1984, et un second modèle que nous avons nous-mêmes conçus, et qui reflète les différentes dimensions de la RSE. Ces modèles sont les suivants :

Tableau 3.2 : Modélisation de l'approche des Stakeholders

Entreprise

Communauté locale

Clients

Concurrents

Ecologistes

Associations commerciales

Employés

Medias

Gouvernement

Propriétaires

Défenseurs des consommateurs

Fournisseurs

Est considéré comme stakeholder, tout individu ou groupe qui peut affecter ou être affecté par la réussite de l'entreprise.

Source : A. ACQUIER et F. AGGERI (2008), Inspirés de Freeman (1984)

Tableau 3.3: Essai de modélisation des activités de RSE au Cameroun

Réglementaire

Responsabilité Sociale de l'Entreprise

Volontaire

Mixte

 

Chaque entretien a commencé par une description succincte de notre thème. Nous commencions donc par une définition très brève de ce l'on entend par responsabilité sociale, puis nous exposions les objectifs visés par notre travail de manière concise, et expliquions enfin le but visé par la recherche. Nous nous sommes rendu compte que cette phase était primordiale, car la plupart des répondants ne sachant pas ce qu'est la RSE, prétendaient même ne pas là pratiquer. Mais une fois qu'ils avaient été édifiés sur ce concept, leurs commentaires sur le sujet devenaient aussi nombreux que riches en contenu.

En effet, lors du déroulement de la plupart des entretiens, les différents thèmes du guide d'entretien n'ont pas été abordés dans l'ordre. Car, dans leurs argumentations, les interviewés donnaient des réponses aux thèmes à venir. Ce qui ne nous a pas empêchés, dans certains cas, de revenir sur les points qu'ils avaient déjà évoqués à leur insu, afin de s'assurer de la qualité et de la fiabilité des réponses fournies. Lors de la collecte des données, le facteur temps a joué un rôle très important.

A cet effet, JOLIBERT et JOURDAN (2006) soulignent que la durée d'un entretien semi directif est d'au moins trente (30) minutes et ne saurait excéder une heure trente minutes (1h30mn). Nos entretiens ont pour la plupart, excédé les quarante-cinq (45) minutes. Ce qui rend nos entretiens valides, du point de vue de JOLIBERT et JOURDAN. A cet effet, nous avons résumé la durée de chacun de nos entretiens dans le tableau ci-après :

Tableau 3.4 : Déroulement des entretiens

Sociétés

Secteur d'activités

Nombre d'entretiens

Responsables rencontrés

Dates des entretiens

Durée de l'entretien

S.A.B.C

Agro

Alimentaire

3

Adjoint au DRH

13 / 04 / 09

51 min

22 / 04 / 09

89 min

Centre médical

22 / 04 / 09

85 min

ALUCAM

Métallurgie

3

DAF Adjoint

15 / 04 / 09

90 min

RH et Formation

15 / 04 / 09

87 min

DAF Adjoint

20 / 04 / 09

89 min

NESTLE

Agro Alimentaire

2

Conducteur des travaux

02 / 05 / 09

72 min

Conducteur des travaux

15 / 05 / 09

62 min

TOTAL

Hydrocarbures

1

Adjoint au DRH

06 / 05 / 09

86 min

Totaux (nombre et durée)

9

-------------------------

----------

711 min

Durée Moyenne des entretiens

 

Le tableau ci-dessus nous donne une durée moyenne des entretiens de 79 minutes soit, une heure dix-neuf minutes (01 heure 19 minutes). Ce qui est nettement supérieur à 45 minutes et inférieur à 1h30mn. Ce qui nous permet de conclure que, du point de vue de Jolibert et Jourdain, nos entretiens sont valides.

Dans le but de vérifier la crédibilité des informations recueillies, nous avons chaque fois pris la peine, avant de quitter les sites qui nous avaient accueillis, de vérifier la crédibilité de ces informations en reprenant partiellement ou totalement les thèmes du guide d'entretien avec un employé rencontré au hasard. Bien qu'informelle, cette façon de procéder permet de rendre plus fiables, les résultats de la recherche, l'objectif étant de minimiser voire d'annuler les biais dans la recherche et d'inférer ces résultats sur une population plus large. Nous nous sommes rendu compte qu'à chaque fois, les argumentations des nouveaux interviewés étaient en phase avec ceux fournis par leurs prédécesseurs. Ce qui fut d'ailleurs très rassurant.

Une fois les données collectées, il ne nous reste plus qu'à les analyser afin d'en tirer les conclusions nécessaires quant aux réalités de la RSE dans les entreprises industrielles camerounaises. Pour ce faire, plusieurs méthodes d'analyse des données ont été utilisées, afin d'affiner les résultats de la meilleure des façons possibles.

I - 3 - 4 - L'analyse des données : concours conjoint des méthodes qualitatives et

quantitatives

L'objectif de notre étude étant non seulement de décrire les comportements RSE des entreprises camerounaises, mais aussi de les classer par types, il s'est avéré nécessaire de recourir à la méthode traditionnelle propre aux recherches qualitatives exploratoires : il s'agit de l'analyse du contenu. Mais pour atteindre notre second objectif (ressortir la spécificité des entreprises camerounaises en matière de RSE et généraliser les résultats), nous avons dû recourir aux méthodes quantitatives (analyse uni variée et tableaux de contingence). Lors de l'analyse des données, nous avons d'abord procédé par analyse du contenu des entretiens avant de passer à l'analyse quantitative des questionnaires.

I - 3 - 4 - 1 - La description des données recueillies par l'analyse factorielle du contenu

Il existe plusieurs techniques d'analyse des données qualitatives qui reposent toutes sur le savoir-faire du chercheur, qui découle à la fois de sa formation, de son expérience, mais aussi de son intuition (I. Desbordes, 1998) cité par (Jolibert et Jourdan, 2006, p 49). Les deux techniques les plus employées sont le résumé et l'analyse du contenu.

Le résumé est la forme d'analyse la plus simple en matière d'études qualitatives. Il s'agit pour le chercheur, à partir d'un matériel d'étude souvent très volumineux, de produire une synthèse comprenant les principaux enseignements de l'étude, tout en ressortant la richesse et les nuances des entretiens jugés plus significatifs.

L'analyse du contenu que nous avons jugée adéquate pour notre étude a été définie par WEBER (1985) comme « une procédure de réduction de données qui consiste à classifier dans un nombre restreint de catégories, un grand nombre de mots et d'expressions », cité par (Jolibert et Jourdan, 2006). Ainsi, il s'agira pour nous de déceler des mots clés et des concepts importants, afin de quantifier leur fréquence d'occurrence, l'objectif étant d'aboutir à une description du contenu des données qui réponde à trois caractéristiques primordiales : l'objectivité, l'exhaustivité ou la systématisation et la quantification.

En effet, l'objectivité est obtenue en faisant analyser les mêmes données par plusieurs chercheurs, ou en analysant plusieurs fois les mêmes données (ce que nous avons fait), afin d'éviter l'introduction de biais. La description est systématique ou exhaustive dans la mesure où tous les mots prononcés par les interviewés sont pris en compte. Il est essentiel que la totalité des mots utilisés par le répondant, pendant toute la durée de l'entretien, soit prise en considération. Cette nécessité vise à répondre aux exigences de rigueur et d'impartialité et que le chercheur ne procède pas à un choix arbitraire des informations les plus évidentes, parce que en relation avec le sujet de l'étude. Enfin, elle est quantitative puisqu'on va compter les fréquences d'apparition des thèmes ou des mots. Les informations une fois classées, le chercheur procède à la détermination des fréquences d'apparition des différentes catégories. Toutefois, la généralisation des résultats obtenus ne peut avoir lieu que si le nombre de personnes interrogées est assez élevé.

Dans le cadre de notre étude, nous avons premièrement procédé par analyse du contenu dans le but de quantifier les résultats obtenus (fréquence d'apparition des informations) au terme de nos différents entretiens. Mais, compte tenu du nombre de cas étudiés (04) et de l'objectif visé par notre recherche (généralisation des résultats), cette méthode, certes nécessaire et quasi incontournable pour ce type d'étude, s'est avérée insuffisante pour nous permettre de restituer des résultats généralisables. Pour ce faire, nous avons administré un questionnaire à vingt-huit autres entreprises également issues du secteur industriel.

I - 3 - 4 - 2 - Le questionnaire : constitution de l'échantillon, méthode de recueil et

d'analyse des données et opérationnalisation de la RSE.

Le questionnaire est un outil indispensable au recueil de différents types d'informations, notamment sur les comportements, les attitudes et opinions, les connaissances et sur des données sociodémographiques (âge, sexe, revenu, ...). C'est un ensemble de questions qui peuvent des questions ouvertes, fermées ou les deux. En ce qui concerne notre questionnaire, nous avons utilisé en grande partie des questions fermées (dichotomiques et multiples) dans le but de faciliter leur codification.

Nos questionnaires ont été administrés à un ensemble de 28 entreprises, toutes du secteur industriel. Dans le but de constituer un échantillon représentatif de la population des entreprises industrielles, nous avons utilisé la méthode dite probabiliste plus précisément le sondage aléatoire stratifié. Pour ce faire, nous avons utilisé deux variables de stratification ou critères de constitution des groupes à savoir la situation géographique et le secteur d'activité. La situation géographique permet de répartir notre échantillon de manière équitable sur les trois principales zones industrielles des la ville de Douala : Douala-Bassa, Magzi-Bonaberi, Ndobo-Bojongo.

Questionnaire

En ce qui concerne le recueil des données, on distingue deux modes d'administration de questionnaires auprès des interviewés : il peut être auto-administré ou présenté par un enquêteur. On peut les résumer dans le schéma ci-après :

Enquêteur

Auto-administré

Face à face

Postal

Téléphone

Minitel

Comme le montre le schéma ci-dessus, nous avons effectué nous-mêmes les entretiens et les questionnaires ont été remplis suivant le mode d'administration « face à face » pour nous assurer de la fiabilité des réponses et expliquer le contenu des réponses non comprises par l'enquêté ou l'interviewé.

Enfin, les données recueillies ont été analysées grâce au logiciel de traitement de données statistiques SPSS, à partir duquel nous avons effectué deux analyses. Premièrement, l'analyse uni-variée ou tri à plat afin de présenter question par question, les solutions obtenues pour chacune des modalités de réponse. Puis, nous avons, à travers l'analyse des tableaux de contingence croisant les variables pertinentes du questionnaire, interprété le coefficient de contingence qui en résulte.

Le RSE se manifeste aussi bien en interne qu'en externe. Au plan interne, il s'agit de la responsabilité envers les PP internes (employés et shareholders) ; en externe, il s'agit des PP externes (la société civile, les clients, les fournisseurs, l'État, les ONG ...).

Tableau 3.5 : Opérationnalisation du concept de RSE

Concepts

Dimension

Indicateurs

Engagement social ou sociétal

La RS en interne

-Climat social en entreprise

-Parité Homme-femmes

-Équilibre régional

-Conditions de travail et de sécurité

-Hygiène et salubrité

-Processus de carrière

-Politiques de formation des employés

-Rémunération du personnel

-Affiliation du personnel à la CNPS

-Qualité des produits

La RS en externe

-Relations avec les fournisseurs

-Relations avec les clients

-Respect des délais et des normes de

fabrication

-Relations avec les autres tiers

-Activités philanthropiques (dons)

-Activités de sponsoring et de mécénat

-Reporting sociétal

Engagement environnemental

L'environnement

-Engagement dans le développement de

la communauté locale

-Lutte contre la pollution

-Activités de protection environnement

-Gestion des déchets et autres rejets

-Politiques de prévention et de gestion

des risques environnementaux

Responsabilité économique

Objectifs visés

-Impact sur la capacité de production

-Productivité des employés

-Horizon des retombées

-Maitrise des coûts de production

-Impact sur le chiffre d'affaires

-Rentabilité économique (profit)

Section II : PRÉSENTATION DES CAS ÉTUDIÉS : LES ENTREPRISES DU

SECTEUR INDUSTRIEL CAMEROUNAIS

Le Cameroun recèle d'importantes ressources naturelles minières (pétrole, gaz naturel, bauxite, cobalt, nickel, fer) et agricoles (banane, cacao, café, thé, huile de palme, coton, bois). Cette diversité et la situation stratégique du pays qui permet le désenclavement des économies du Tchad et de la République Centrafricaine, lui ont permis à partir de 1995, et à la faveur de la dévaluation du Franc CFA, de reprendre le chemin de la croissance économique, à un rythme 3 à 4 % l'an.

Avec une base agro-industrielle, une filière de transformation de bois de plus en plus intégrée, et une industrie de matériaux de construction (fer à béton, plastiques, ciment, peintures) et de biens de consommation (plastiques, savons, produits de beauté), le tissu industriel du Cameroun est le plus diversifié d'Afrique Centrale. Les industries sont implantées essentiellement sur la zone littorale : Douala, Limbé, Edéa. Les statistiques industrielles font état d'environ 200 entreprises industrielles pour un effectif de quelque 53 000 personnes. La plupart de ces entreprises travaillent exclusivement pour le marché intérieur ; les exportations manufacturières sont peu développées, et représentent moins de 10% de l'ensemble des exportations.

Ainsi, les principaux acteurs du secteur industriel sont les suivants : SABC, Sodecoton, Socusam, Camlait, Sic Cacaos/Chococam, Cameroon Tea Estate, Socapalm, SCR Maya, Hevecam, CDC, Safacam Icrafon, Groupe Batoula, Cameroon Packing Company, Scimpos, CCC, SOC, NOSA, CCO, CCIC, Parfumerie Gandour, Vital Cosmetics, Tacicam, SEEF, Vicwood, Paul Khoury, Patrice Bois, Pallisco, CIAC, CICB, FME Gaz, La Pasta, OK Plast, Groupe IBC, Six International, Soticam, Wijma, Ecam Placage, Ingenierie Forestière, Alpicam, Cimencam (qui renforce ses capacités de production pour faire face à la croissance de la demande) et Alucam (qui envisage le triplement de sa production à l'horizon 2012). A ces entreprises, on peut ajouter entre autres, Cameroun Continu, BRIC, AUBAC, Littocol, SAFCA, Bocam, Bocom, Samco papers ltd.

Ces entreprises ont constitué pour l'essentiel, notre population de recherche. L'objectif initial était de toucher le maximum parmi les entreprises sus citées. Objectif presque atteint dans la mesure où nous avons pu toucher un nombre assez élevé d'entreprises, dans des sous-secteurs d'activités différents.

II - 1 - Place du secteur industriel dans l'économie camerounaise

Le secteur secondaire (industrie manufacturière et production de pétrole brut) emploie 15% de la population active et sa contribution au PIB est de l'ordre de 28% (dont 5,3% pour le pétrole), soit environ 2 500 Milliards de FCFA (4,3 Mds EUR). Raison pour laquelle nous avons intégré parmi les entreprises prospectées, la société TOTAL.

Les agro-industries sont le groupe le plus représentatif du secteur industriel avec plus de 40% de la valeur ajoutée industrielle. Dominent dans cette branche, l'industrie brassicole, de rhums, liqueurs et d'eau minérale, l'industrie sucrière, l'industrie laitière, la confiserie et la transformation de cacao, de café, de thé, de coton. On retrouve également des huileries. Raison pour laquelle, nous avons tenu à rencontrer les responsables de deux (02) entreprises du sous-secteur des agro-industries, notamment la SABC et NESTLE.

II - 2 - Champ d'investigation et Présentation des cas étudiés : les entreprises

industrielles de la ville de Douala

L'intérêt particulier que nous portons aux entreprises industrielles de la ville de Douala est double. Premièrement, les entreprises industrielles de la ville de Douala sont très fortement représentatives de la population des entreprises industrielles au Cameroun. Ensuite, pour faire face aux contraintes techniques, temporelles et financières, nous avons préféré nous concentrer sur les entreprises qui nous sont les plus proches, en l'occurrence les entreprises de la ville de Douala.

Le choix des entreprises industrielles, nous l'avons dit, relève du fait qu'elles sont les seules à répondre parfaitement aux piliers du développement durable, également intégrés aux considérations managériales de la RSE : le volet social, le volet environnemental, le volet économique. Autrement dit, les entreprises industrielles sont concernées aussi bien par la réalisation des oeuvres sociales qu'environnementales, dans la recherche du profit, et ce quelque soit sa dépendance (étrangère ou nationale).

Il est question pour nous, de présenter dans cette section, les quatre entreprises qui ont fait l'objet de nos différents entretiens, en exposant à chaque reprise, leur identité, leurs activités, leur engagement responsable et si possible, leur perspective. Nous présentons donc tour à tour, la SABC, ALLUCAM, TOTAL et NESTLE.

II - 2 - 1 - La Société Anonyme des Brasseries du Cameroun (SABC)

· Identité de la SABC

Les Brasseries du Cameroun, société agro alimentaire spécialisée dans la fabrication et la distribution des boissons hygiéniques, est le leader du secteur industriel au Cameroun. Créée à Douala, le 03 février 1948, elle devient filiale du groupe Castel en 1990. Avec une production annuelle de 3 300 000 hectolitres de bière, soit 510 millions de bouteilles, et  de 1 350 000 hectolitres de boissons gazeuses, soit 240 millions de  bouteilles, Les Brasseries du Cameroun sont le numéro 1 de l'industrie brassicole au Cameroun. Avec 70% du marché des bières, 85% de celui des boissons gazeuses, 75% du marché de l'eau minérale naturelle. Leur chiffre d'affaires hors taxes de 165 milliards de FCFA avec 360 actionnaires camerounais. Un effectif de près de 2000 salariés et plus de 50 000 emplois indirects. Un parc de 220 camions pour la distribution. 34 000 points de vente au détail14(*).

· Engagement responsable

Les Brasseries du Cameroun participent pleinement à la formation et à l'épanouissement de la jeunesse camerounaise. En effet, les Brasseries du Cameroun organisent chaque année, une compétition de football pour jeunes connue sous le nom de « Coupe Top ». La « Coupe Top » est une compétition sportive qui rassemble pendant les vacances scolaires, autour du football, les jeunes sportifs des Lycées, collèges et même les jeunes qui ne fréquentent aucun établissement scolaire, âgés de 12 à 14 ans, dans le but de créer une saine émulation chez les jeunes sportifs, constituer une pépinière pour l'École de Football des Brasseries du Cameroun et promouvoir le football, sport roi au Cameroun. Chaque  année,  la Coupe Top  rassemble  plus de 5 000 enfants des dix provinces du Cameroun. Chaque année, les Brasseries du Cameroun recrutent une dizaine de jeunes talents, futurs représentants du Cameroun sur la scène internationale en matière de football.

Dans le domaine du sport, Créée le 12 mars 1989, l'école de football brasseries du Cameroun poursuit trois objectifs fondamentaux : Former gratuitement de jeunes joueurs en leur inculquant dès leur bas âge, toutes les qualités sportives, humaines et morales nécessaires à l'émergence de leurs talents ; Favoriser l'intégration des jeunes footballeurs dans les équipes civiles (ligue, 2e division, 1ère division, équipes professionnelles), et assurer une véritable pépinière des différentes sélections nationales ; Participer à l'amélioration du niveau d'ensemble du football camerounais et à sa promotion. Depuis la création, elle a formé près de 1 000 élèves dont 24 ont évolué au sein de l'équipe nationale du Cameroun, les Lions Indomptables (Rigobert Song Bahanag, Pierre Womelen, Ngom Kome, Samuel Eto'o, Gérémi Ndjitap, Salomon Olembe).

Cependant, l'engagement des Brasseries du Cameroun ne se limite pas qu'au seul domaine sportif : « Notre contribution dans ce domaine est dirigée vers les établissements scolaires et universitaires, les orphelinats, ainsi que les centres hospitaliers. Les Brasseries du Cameroun accompagnent chaque année, plus de 1000 élèves et étudiants, par le biais de stages d'imprégnation et académiques ; et surtout à travers la mise à leur disposition du matériel didactique. ».

Sur le plan culturel par exemple, pour les enfants âgés de 8 à 12 ans, les Brasseries du Cameroun organisent chaque année dans ses cinq agences une action éducative et culturelle dénommée « Dessine-moi ton univers avec D'jino Cocktail de Fruits». Cette action a pour objectifs de former les jeunes  aux techniques de dessin, déceler et canaliser chez les tout petits les vocations en art plastique.

Dans le but de participer pleinement au développement social et culturel des camerounais, Les Brasseries du Cameroun organisent chaque année depuis l'année 2000, un grand concours national de chant amateur dénommé « Concours National de la Chanson Mutzig ». Ce concours a pour objectifs de promouvoir les artistes camerounais amateurs évoluant dans le domaine de la chanson, produire sur la scène internationale une star de la musique chaque année, Il a produit depuis sa création plusieurs artistes dont le plus célèbre, Longue Longue et lauréat 2000, est l'auteur de l'album intitulé « Ayo Africa »

La responsabilité sociale en interne chez SABC est palpable. Il existe ici une direction des ressources humaines qui s'occupe de façon individuelle de la gestion des hommes au sein de l'entreprise, de la gestion des carrières, du suivi des employés et traite par anticipation des problèmes de départ en retraite, par l'affiliation à la CNPS des employés.

II - 2 - 2 - ALUCAM

· Identité du Groupe Alucam

Alucam est l'une des plus anciennes entreprises du Bassin de la Sanaga-Maritime et l'une des plus importantes du Cameroun. Elle exerce ses activités depuis 1954, date à laquelle elle fut créée, à travers un partenariat entre la société d'Aluminium Pechiney et le Gouvernement de la République du Cameroun. Suite au rachat par des actionnaires successifs, Alucam fait aujourd'hui partie du Groupe Mondial anglo-australien Rio Tinto.

· Ses Activités

Les principales activités d'Alucam reposent sur la production et la transformation de l'aluminium. Ces activités sont réalisées dans deux zones à savoir la zone industrielle d'EDEA et la zone portuaire de Douala. La production annuelle de Alucam est passée de 55 000 tonnes en 1957, à une capacité nominale de 100 000 tonnes aujourd'hui, résultat palpable d'une évolution en technologie de production et de l'extension de l'usine en 1981. Avec un chiffre d'affaires de 149 milliards de francs CFA, Alucam emploi 820 personnes et constitue à elle seule 7% de la production industrielle au Cameroun, 5% des recettes d'exportation du Cameroun, 3% du PIB national et contribue de manière directe et indirecte au budget de l'État à hauteur de 53 milliards de francs CFA (Rapport d'activités 2006).

· Engagement responsable

Alucam a toujours pris en compte ses parties prenantes, notamment dans son environnement immédiat. Mais l'exigence actuelle de gouvernance a amené l'entreprise à travailler autrement à l'usine et à l'extérieur. Cette nouvelle approche vise à être à l'écoute et à la prise en compte des préoccupations prioritaires des populations, chaque fois que celle-ci est possible.

Dans le souci croissant de sa responsabilité sociale, Alucam s'est engagée dernièrement dans quatre axes prioritaires que sont l'environnement, la santé/l'hygiène ; l'éducation et le développement local. En effet, les dépenses annuelles de gestion de l'environnement et de la sécurité sont passées de 1 666 Millions de Francs CFA en 2001 à 4 703 Millions de Francs CFA en 2006 traduisant la volonté managériale d'Alucam de participer au développement durable, de garantir la sécurité et de maitriser la santé sur le site industriel.

En plus, Alucam suit rigoureusement toutes ses sources d'émissions de gaz à effet de serre et de fluor qui ont diminué considérablement depuis quelques années. Son centre de stockage des Déchets Ultimes est le premier de ce genre en Afrique Subsaharienne.

· Enjeux futurs

Les projets et ambitions futurs d'Alucam se cristallisent dans un projet d'extension qui lui permettra de tripler la capacité de production actuelle par la construction d'une deuxième usine sur le site d'EDEA avec une technologie de pointe AP 37 et d'une centrale hydroélectrique d'environ 330 MW à Nachtigal. Avec l'appui de son partenaire Rio Tinto, Alucam mène en ce moment des négociations avec AES Sonel pour un nouveau contrat d'énergie, l'actuel contrat se terminant en fin 2009. « La bonne santé actuelle du marché des métaux en générl et celui de l'aluminium en particulier, participe de manière significative, aux bons résultats financiers du Groupe Alucam. Seulement, les années qui viennent nous obligent à concrétiser les projets envisagés, condition nécessaire pour la survie de notre unité industrielle ».

II - 2 - 3 - Nestlé Cameroun

· Identité de Nestlé

Née de la fusion en 1983 entre CAMAD Nestlé et SOPRAL, société dans laquelle Nestlé détient 49% du capital, Nestlé Cameroun est à rayonnement sous régional offrant une gamme de produits alimentaire diversifiés (lait, cubes...). Bénéficiant ainsi de la popularité de ses produits, Nestlé peut se réjouir d'être un acteur majeur dans le tissu industriel Camerounais, notamment dans l'agroalimentaire où Nestlé est reconnu comme leader mondial. Nestlé Cameroun compte à ce jour 350 employés permanents et réalise un chiffre d'affaires annuel d'environ 35milliards de FCFA.

· Son engagement responsable

Nestlé Cameroun n'a pas eu de mal à se positionner aujourd'hui comme une entreprise responsable. « La conviction de Nestlé est faite depuis toujours que le développement à long terme vaut mieux que le profit à court terme. Dans cette l'optique, la création de valeurs est notre leitmotiv ». Ainsi, Nestlé oeuvre de manière active dans l'éducation, l'hygiène et la santé. Il participe ainsi à la croisade globale contre le paludisme en distribuant des moustiquaires imprégnées aux segments de la population les plus touchés par la maladie, les femmes enceintes et les enfants de moins de cinq ans.

Nestlé prend en charge la scolarité et l'alimentation des enfants déshérités : de NIDO (qui sensibilise les mamans sur la bonne alimentation) à MILO (qui sponsorise les activités dans les écoles) en passant par Nescafé (qui offre un véritable tremplin aux artistes en herbe) ou encore MAGGI (qui participe activement au développement, à la journée internationale de la femme et sponsorise les projets des associations féminines). « Nous sommes également partenaire de la société Camerounaise de pédiatrie via Nestlé Nutrition Institute Africa. »

Sur le plan environnemental, Nestlé a pris un certain nombre d'engagements en faveur de la protection de l'environnement, de la santé et de la sécurité de son personnel, y compris les tierces parties. Ceci est évidement visible au travers de sa politique santé, sécurité et environnement.  Dans cette perspective, Nestlé a initié, puis implémenté plusieurs projets dont le but est de réduire, au quotidien, son empreinte carbone tout au long de ses activités. Il a aussi investi dans le traitement des eaux usées afin d'en améliorer la qualité avant leur rejet dans la nature.

Nestlé a ensuite investi dans le secteur de la lutte contre les incendies, afin d'être prêt à répondre aux situations d'urgence.

« Afin de maintenir puis d'améliorer continuellement nos acquis à travers un système intégré de gestion de la sécurité, la santé et l'environnement, nous avons initié la démarche de certification de notre usine par rapport aux standards internationaux OHSAS 18001 version 2007 et ISO 14001 version 2004 »

II - 2 - 4 - Total Cameroun

· Identité de Total Cameroun

Ayant commencé ses activités de production au Cameroun en 1947, Total Cameroun comprend aujourd'hui en réalité deux filiales Total Cameroun S.A et Total E&P Cameroun. A la tète d'un réseau de distribution de 160 station réparties sur toute l'étendue du territoire national, Total Cameroun S.A distribue l'ensemble des produits pétroliers nécessaires à la bonne marche de l'économie nationale. Elle assure en outre l'assistance technique de la SONARA15(*) et compte environ 1700 employés. Total Cameroun est aujourd'hui le leader de la distribution des produits pétroliers avec 45% de parts de marché. Quant à Total E&P, il est opère les deux tiers de la population pétrolière au Cameroun et contribue de façon majeure au produit intérieur brut du pays; Cette filiale compte un réseau de 200 employés et un réseau de sous traitants d'environ 1500 personnes.

· Son engagement responsable

Le groupe Total entend assurer pleinement sa responsabilité sociale notamment aux actions qu'il mène dans les domaines de la santé, l'environnement, la sécurité, l'éducation, le développement local.

Dans le domaine de la santé, Total peut s'illustrer par la sensibilisation de son personnel, de leurs familles et des entreprises partenaires au travers des semaines santé, campagnes d'information. Il soutient en outre le projet de recherche de l'institut pasteur sur la transmission du SIDA de la mère à l'enfant, pour ne citer que ces actions.

Sur le plan environnemental Total agit dans le recyclage des eaux usées au travers de son unité Ecolube (collecte et traitement), s'occupe de la collecte et de l'incinération des déchets industriels, de la réduction du torchage et de la valorisation du gaz, Il participer aussi pleinement au travers de sa fondation au projet de gestion communautaire des écosystèmes de mangroves. En ce qui concerne la sécurité en interne et en externe, il dispose d'un centre fonctionnel de perfectionnement à la conduite pour les transporteurs de produits pétroliers avec près de 300 chauffeurs formés en fin 2008. Il sensibilise aussi les populations sur les dangers des hydrocarbures par un déploiement d'une caravane de sécurité dans les zones rurales.

En éducation, Total oeuvre pour un parrainage d'élèves-ingénieurs. Il a en outre initié un programme de sensibilisation des jeunes sur les dangers de la route. A cet effet, 2500 élèves ont été formés en 2008 dans les écoles primaires le long de l'axe routier Douala-Bafoussam. Cette opération a été baptisée « opération princesse de la route ».

Dans le cadre du développement local, Total brille par son soutien aux manifestations culturelles et traditionnelles : « Nous entretenons en outre un dialogue permanent avec les différentes parties prenantes autour de nos sites industriels et avons très souvent recours aux entreprises de sous-traitance locale ».  Total Cameroun entend ainsi assurer une performance économique de ses activités par la maitrise et la réduction de l'impact de leurs activités sur l'environnement physique et humain, par la contribution au développement économique et social du pays, par l'anticipation des besoins en énergie.

Les développements effectués ci-dessus peuvent être généralisés dans le tableau ci-dessous afin de permettre une meilleure visualisation des pratiques de RSE dans les entreprises étudiées.

Tableau 3.5 : Récapitulatif de l'engagement responsable des entreprises prospectées

Entreprises

Domaines de RSE identifiés

Cadre des actions menées

Certifications identifiées

S.A.B.C

- Environnement

- Santé

- Éducation

- Sécurité

- Développement local - Culture et loisirs

- Protection de l'environnement

- Lutte contre SIDA, sensibilisation.

- Programmes d'enseignement, stages.

- Stabilité et sécurité de l'emploi, du personnel,

des consommateurs, stages académiques.

- Construction écoles, hôpitaux.

- Sponsoring et mécénat, sport, musique...

 

Alucam

- Environnement

- Santé

- Éducation

- Sécurité

- Développement local

- Culture et loisirs

- Développement

durable

- Consommation d'énergie, traitement des

déchets, sensibilisation;

- Prise en cpte des préoccupations des populations

- Suivi rigoureux d'émission de gaz à effet de

serre

- Offres de stages de vacances

- Conditions, de travail, climat social.

- Sponsoring, mécénat...

 

Nestlé

- Environnement

- Santé

- Éducation

- Sécurité

- Développement local

- Culture et loisirs

- Traitement des eaux usées, réduction de déchets

de carbone.

- Lutte contre le paludisme, sensibilisation

mamans.

- Scolarisation et alimentation des enfants

déshérités, stages.

- Sécurité du personnel, parties prenantes,

consommateur, processus de lutte contre les

incendies;

- Hygiène et salubrité

- Sport dans les écoles, participation à la journée

de la femme, émissions télé...

ISO 14001 Version 2004

OHSAS 18001 Version 2007

Total Cameroun

- Environnement

- Santé

- Éducation

- Sécurité

- Développement local

- Culture et loisirs

- Recyclage huiles usées, incinération déchets

industriels, réduction torchage et valorisation

gaz, gestion écosystèmes de mangroves,

développement énergie solaire.

- Sensibilisation personnel, leurs familles et

entreprises partenaires sur les maladies, prises en

charge, SIDA, dons dans hôpitaux...

- Protection personnel, création centre de

perfectionnement à la conduite des engins,

sensibilisation dangers hydrocarbures.

- Parrainage d'élèves-ingénieurs, stages

académiques, sensibilisation,

- Dialogue permanent, recours à la sous-traitance

- Sponsoring, mécénat, excursions,

 

Les activités de responsabilité sociale identifiées dans le tableau ci-dessus sont celles de grandes entreprises, notamment, des multinationales dont la prise en compte de préoccupations extra économiques relève généralement de l'initiative de leurs sociétés-mères. Il s'agit notamment des entreprises dont les préoccupations sociales sont au coeur des inquiétudes des dirigeants.

Ce chapitre intitulé « démarche adoptée », s'est intéressé au cheminement qui a marqué l'exploration sur le terrain, le choix de la population d'étude, le choix de l'échantillon, les stratégies et les techniques de collecte des données, les techniques d'analyse et les méthodes d'interprétation des résultats. La tache qui nous incombe à présent est de découvrir dans un premier temps, les principales sources d'inspiration des activités RSE identifiées (volontarisme ou régulationnel), puis, dans un deuxième temps, de concevoir et proposer une modèle de RSE pour le cas typique des trente-deux (32) entreprises prospectées.

Chapitre IV

VERS UNE TYPOLOGIE DE LA RESPONSABILITE SOCIALE DES ENTREPRISES AU CAMEROUN

Notre travail, avait pour objectif principal, de découvrir la réalité de la RSE au Cameroun. Pour y parvenir nous devions tour à tour caractériser la responsabilité sociale des entreprises au Cameroun, en ressortir la spécificité, pour enfin proposer un modèle de RSE au Cameroun.

Pour y parvenir, nous avons dû combiner deux méthodes d'analyse à savoir l'analyse factorielle du contenu que nous avons employée dans le cadre des études de cas, et les analyses uni-variée et bi-variée dont nous ferons usage dans ce chapitre pour analyser les résultats obtenus à travers les questionnaires. Toutefois, nous avons effectué une descente au Ministère de l'Environnement et de la Protection de la Nature pour mieux appréhender la dimension légale de la RSE.

Nous allons dans un premier temps, caractériser les pratiques de RSE des quatre entreprises étudiées (section 1), puis dans un deuxième temps, nous analyserons les informations collectées par questionnaire afin de ressortir un modèle de RSE, propre aux entreprises du secteur étudié (section 3).

Section I : CARACTÉRISATION DES PRATIQUES DE RESPONSABILITÉ

SOCIALE DES QUATRE ENTREPRISES ÉTUDIÉES

Comme nous l'avons mentionné précédemment, les activités de RSE se déclinent en deux dimensions : une dimension volontaire qui intègre tous les membres de la société, et une dimension légale qui, pour l'entreprise, représente un impératif ou une contrainte. Dans les entreprises étudiées, les pratiques de RSE sont tantôt purement volontaires, tantôt tachetées de pratiques réglementaires.

I - 1 - La Responsabilité Sociale des Entreprises prospectées : Une RSE mixte

Au terme de l'analyse du contenu de nos différents entretiens, nous avons identifié au sein des entreprises qui ont fait l'objet de notre étude, des pratiques revêtant à la fois des aspects volontaristes et légaux que nous qualifions ici de démarche mixte.

En effet, tel que nous l'avons appris à la Délégation Régionale de l'Environnement et de la protection de la nature, chaque année, la brigade régionale du Littoral, chargée des inspections environnementales effectue chaque année, une descente sur le terrain afin de contrôler le respect des normes et procédures en matière de responsabilité sociale et environnementale des entreprises de la place. Le rapport fait état d'une nette amélioration chaque année. Tout porte doc à croire qu'en l'absence de telles mesures de contrôle, il y aurait un risque de retour à la case de départ. Ces actions légales sont couplées à la dimension volontaire indéniable des activités socialement responsables des entreprises au Cameroun.

I - 1 - 1 - Le volontarisme : d'une RSE réactive à une RSE proactive

En effet, nous avons constaté que les activités de RSE volontairement pratiquées au sein des entreprises étudiées, sont passées de la réaction à l'action. Elle se traduit en interne par des activités de prévention visant à répondre aux besoins socio-économiques des pp internes. A titre d'exemple, ALUCAM et TOTAL mettent sur pied un dispositif sanitaire et médico-social adapté aux besoins éventuels des employés et cadres de leur structure. Notamment par la sensibilisation de leur personnel et même des familles de leurs employés, sur les pandémies telles que le VIH SIDA. NESTLE s'est volontairement engagée dans la sécurité de son personnel en mettant sur pied, une politique de lutte contre les incendies. Le volontariat se traduit également en interne par des programmes de formation tels que ceux initiés par TOTAL en envisageant la création d'un centre de perfectionnement à la conduite des engins.

En externe, dans le but de répondre aux attentes des collectivités nationales et étrangères, ces entreprises s'illustrent également à travers des investissements dans les domaines de la santé, l'éducation et le développement local. C'est le cas par exemple de la S.A.B.C qui s'engage depuis plus de vingt ans dans la construction d'hôpitaux et d'écoles. A contribution majeure dans le domaine de l'éducation est la création d'une école de football qui a pour objectif de former des talents tout en les resocialisant (pour les enfants abandonné) et en contribuant à leur éducation.

NESTLE s'illustre également dans ce domaine à travers sa très forte participation à des journées internationales telles que la journée de la femme ou encore la journée de l'enfant. En effet, NESTLE est fortement impliqué dans la lutte contre le paludisme, dans la scolarisation et l'alimentation des enfants déshérités à travers des émissions télé, et surtout, dans le sponsoring des activités sportives dans les établissements scolaires de la place.

Par-dessus tout, les quatre entreprises étudiées parrainent les élèves-ingénieurs et autres étudiants à travers des stages académiques qu'elles organisent dans le but de faciliter l'insertion professionnelle des jeunes camerounais.

C'est dire qu'en pratiquant une RSE proactive (anticipation des risques liés à l'environnement externe), les entreprises sont plus aptes à faire faire face aux risques sociaux (chômage), aux accidents industriels ou écologiques, aux changements brutaux et imprévisibles de la réglementation, aux risques juridiques et en interne, aux grèves de leur personnel. Toutes ces actions rappelons le, restent dans un cadre volontaire. Toutefois, les actions volontaires de l'entreprise peuvent être guidées par deux mobiles : pour des raisons économiques ou par déontologie (guidées par des valeurs morales et éthiques uniquement). La troisième section de ce chapitre aura pour objectif de qualifier les raisons pour lesquelles les entreprises mènent volontairement des activités de RSE.

I - 1 - 2 - Le respect de la réglementation : une RSE sous l'influence de l'État

Au sein des entreprises étudiées, nous avons constaté que la RSE est pratiquée non seulement par respect de la réglementation nationale, mais aussi par respect des normes et règles internationales en la matière. Ceci se justifie par la présence au Cameroun, d'entreprises certifiées par des organismes internationaux. C'est le cas par exemple de Nestlé dont les activités sont en phase avec les exigences des normes de standardisations internationales, et qui est standardisé OHSAS 18001 version 2007 et ISO 14001 version 2004. En dehors des cas étudiés, plusieurs autres entreprises situées au Cameroun obéissent désormais aux normes et standards internationaux : HYDRAC est certifié ISO 9001 version 2008, PLASTICAM est certifié ISO 9001 version 1994, 2000 et 2005.

Sur le plan national, nombreuses sont les entreprises qui adoptent une démarche RSE. Ceci est en phase avec la loi nationale camerounaise, loi fondamentale du MINEP selon laquelle, « tout producteur de déchets est responsable de ses déchets jusqu'à leur élimination ». Autrement dit, la RSE est principalement régie par des lois sur la protection de l'environnement, notamment la Loi N° 96 / 12 du 05 Août 1996 portant Loi - Cadre relative à la gestion de l'environnement. À cet effet, le MINEP a innové en instituant le concept de « environnement gris ». Ce concept, par rapport à celui de « environnement vert », a ceci de spécial qu'il intègre dans la protection de l'environnement, toutes les parties prenantes (la société civile incluse). Février 2008 Toutefois, les multinationales doivent également faire face à des « exigences de contrat » (Performance requirements) qui leur sont imposées par le gouvernement (emploi d'un grand nombre de nationaux).

C'est dans cette perspective que Total Cameroun, Nestlé et la SABC s'investissent d'avantage dans le traitement des déchets de leur activités et la réduction au maximum de leur production de carbone. D'autres entreprises, telles que la SCR Maya, PROLEG, PLASTICAM, CHOCOCAM et bien d'autres, investissent dans le recyclage et le retraitement des eaux, cartons et papiers avant de les rejeter dans la nature. En effet, Total Cameroun investi de plus en plus dans le recyclage des huiles usées, l'incinération des déchets industriels, dans la réduction et la valorisation des gaz, dans la gestion écosystèmes et des mangroves, et dans le développement énergie solaire. À ALUCAM, le cadre réglementaire de la RSE est marqué par un suivi rigoureux d'émission des gaz à effet de serre.

I - 2 - Les pratiques de responsabilité sociale et sociétale identifiées

Cette sous-section a pour but de présenter l'apport de l'un des modèles théoriques qui nous ont servi de base de collecte de données lors de nos différents entretiens. Il s'agit de la modélisation de l'approche des stakeholders présenté au chapitre 3 (Tableau 3.1). Cette vision de la RSE suppose la prise en compte des parties prenantes internes et des parties prenantes externes.

Nous exposons tour à tour, la prise en compte des parties prenantes internes et des parties prenantes externes au sein des entreprises étudiées.

I - 2 - 1 - Prise en compte des parties prenantes externes : vers une GRH plus efficace

L'homme est la ressource la plus riche de l'entreprise, mais aussi la moins favorisée dans les stratégies de réduction des coûts, surtout dans le contexte actuel de crise financière internationale marquée par des suppressions accrues des emplois et des postes à travers le monde. La gestion des ressources humaines se présente donc comme une source de risque que les entreprises peuvent désormais maitriser (même partiellement), à travers des politiques de responsables qu'elles mettent en oeuvre en interne. De telles politiques ont été identifiées dans les entreprises que nous avons prospectées et ce, dans plusieurs domaines.

Dans le domaine de la santé, l'on note au sein de SABC, ALUCAM, Nestlé et TOTAL, une sensibilisation des personnels et de leurs familles sur les maladies présentant un intérêt particulier (MST, SIDA ...) et une prise en charge des malades séropositifs. On note aussi au sein de toutes ces entreprises, l'existence des assurances maladies pour le personnel de l'entreprise et leurs familles ou encore des infirmeries destinées au personnel. Il faut cependant préciser que le degré d'implication et de couverture sanitaire n'est pas le même pour toutes ces entreprises.

Les rémunérations au sein de ces entreprises sont régulières et il y existe des pratiques complémentaires comme des primes, des gratifications, des trophées, des médailles entre autres prix offerts aux employés lors des différents anniversaires de ces sociétés.

Il faut aussi relever que dans toutes ces entreprises, les employés ont droit à des réductions sur leurs achats internes, et même, certaines bénéficient gratuitement des produits de leur exploitation. C'est le cas de Nestlé où les employés reçoivent souvent des packages de la part de l'entreprise, et de Total Cameroun où les employés reçoivent le plus souvent des bons de carburant.

Pour assurer l'épanouissement de son personnel, il existe au sein de ces entreprises, des tournois de football organisés entre employés et même ouverts à des rencontres avec des tiers. On note à cet effet l'existence de centres de loisirs autonomes, de salles de fêtes, terrains de football, basketball. Des cérémonies d'arbre de noël à Total Cameroun et même des excursions de courte durée (2 - 3 jours) pour les employés et leurs familles (Total Cameroun).

En ce qui concerne le développement des ressources humaines, il existe aujourd'hui au sein de chacune de ces entreprises un service de ressources humaines qui est de plus en plus à l'écoute du personnel employé et gère les problèmes de suivi de carrières, octroie des stages de perfectionnement et de formation à l'étranger à certains employés. Le cas de Total Cameroun qui organise des perfectionnements à la conduite des engins. Toutes ces entreprises, soucieuses de l'avenir et du bien être de leur personnel, sont affiliées à la CNPS afin d'assurer à leur personnel une retraite paisible.

Les actions menées en faveur du personnel employé ne peuvent être énumérées sur une liste exhaustive, car la GRH est dynamique et nécessite des nouvelles techniques de conciliation du personnel au jour après jour.

I - 2 - 2 - La RSE comme outil de conciliation des attentes divergentes des PP externes

Les actions de RSE en externe sont relatives à la protection de l'environnement, aux actions envers la communauté, à une meilleure prise en compte de l'individu. On peut alors évoquer ici de manière concrète les campagnes de lutte, de sensibilisation, sur les maladies sexuellement transmissibles comme c'est le cas avec Nestlé, SABC, TOTAL, bien que chacun s'y investisse à sa manière.

Toutes les quatre entreprises prospectées offrent aux jeunes camerounais, la possibilité de financer leurs études à travers de nombreux stages payants (stages académiques et stages de vacances). Elles sont également toutes engagées dans des activités de sponsoring et de mécénat des activités des célébrations des journées nationales internationales comme la Journée Internationales de la Femme, la Journée Mondiale de Lutte contre le VIH SIDA, la Journée Internationale de l'Environnement, la Fête du travail, la Fête de l'Unité, la Fête de la Jeunesse entre autres. Chacune des entreprises étudiées ont des secteurs prioritaires. C'est le cas par exemple d'Alucam qui privilégie le dialogue avec la communauté locale en apportant son soutien aux cérémonies traditionnelles des populations d'EDEA.

Sur le plan académique, toutes ces entreprises sont également impliquées. On peut alors citer ici les dons d'ordinateurs octroyés par toutes ces entreprises dans des orphelinats, dans les établissements d'enseignement secondaire, notamment. Par exemple le Groupe Total soutien l'Institut Technologique d'Afrique centrale (ISTAC) par le parrainage des élèves-ingénieurs. On peut aussi énoncer le cas du projet de sensibilisation des enfants des écoles primaires de certaines villes du Cameroun sur les dangers de la route dans le cadre de l'opération dénommée « princesse de la route ».

Dans le domaine de la gestion des produits, toutes ces entreprises veillent, chacune à sa manière à la satisfaction de sa clientèle. A Nestlé par exemple, les attentes du consommateur sont prises en compte pour améliorer les produits qui leur sont offerts et satisfaire leurs exigences : le consommateur y est au centre de la politique de développement. A la SABC, il faut sans cesse veiller sur la qualité des produits que offerts aux clients et s'assurer que les retombées positives des activités profitent aussi à la communauté. La mise à disposition de la communauté, d'un forage et le traitement des déchets militent alors dans ce sens. La SABC est aussi soucieuse de l'avenir de la nation et c'est pourquoi elle offre des stages, des bourses d'étude, et même des emplois à la jeunesse camerounaise.

En ce qui concerne la préservation de l'environnement, toutes les entreprises étudiées (SABC, ALUCAM, Nestlé, Total) prennent en compte l'impact écologique de leurs activités et limitent au maximum la consommation de l'énergie et des matières premières dans le processus de production. En effet, elles ont toutes mis sur pied des processus de recyclage de leurs eaux usées, un service de collecte et d'incinération de leurs déchets industriels. Total s'investit en outre dans le développement de l'énergie solaire (photovoltaïque), tandis que Nestlé innove en mettant sur pied un processus de lutte contre les incendies.

Les relations avec les fournisseurs et les sous-traitants sont de plus en plus élaborées et des mécanismes de communication adaptés à chaque catégorie de fournisseur sont mis sur pied. Total sous-traite actuellement avec HYDRAC S.A qui s'occupe du contrôle, des analyses et du traitement de certains de ses déchets et investit dans des programmes de formations en conduite défensive de leurs employés spécialisés dans la conduite des engins industriels.

Dans leurs relations avec l'État, l'on peut noter des relations particulièrement bonnes d'autant plus que l'État Camerounais trouve dans ces entreprises des partenaires incontournables dans le processus d'emploi de la main d'oeuvre nationale et ce dans le cadre des « performance requirements ». En plus, ces entreprises constituent pour l'État des vecteurs de l'économie nationale et des sources de recettes considérables dans le paiement des impôts, principale source de revenus de l'État.

Au bout de cette section, nous pouvons conclure que la RSE est bel et bien une réalité au Cameroun. Elle y revêt une dimension mixte, c'est-à-dire, une combinaison des dimensions légales et volontaires. De plus, les entreprises mènent des activités qui visent à satisfaire les attentes de toutes leurs parties prenantes (internes comme externes).

Toutefois, ces activités telles que décrites, ne sont propres qu'aux quatre entreprises qui ont fait l'objet d'entretiens semi-directifs. L'objectif de ce travail étant de proposer un modèle généralisable à l'ensemble des entreprises situées Cameroun, notamment celles du secteur industriel Camerounais, nous avons en outre administré un questionnaire auprès de vingt-huit autres entreprises. Ceci a été fait dans le but de confirmer ou d'infirmer les résultats obtenus sur les quatre entreprises initialement prospectées.

Section II : MODÉLISATION DE LA RESPONSABILITÉ SOCIALE DES

ENTREPRISES AU CAMEROUN

Cette section a pour principal objectif, de concevoir et proposer un modèle de responsabilité sociale des entreprises au Cameroun. Pour ce faire, nous allons dans un premier temps exposer les réalités de la RSE au Cameroun à travers l'analyse des résultats fournies par le logiciel statistique d'analyse des données : le logiciel SPSS. Puis, sur la base des résultats d'analyse des données, nous allons aboutir à une typologie de la responsabilité sociale des entreprises au Cameroun.

II - 1 - Essai d'identification des pratiques de responsabilité sociale des entreprises au

Cameroun

Nous avons procédé à une analyse des tendances moyennes des comportements RSE de 28 entreprises toutes issues du secteur industriel. L'analyse consiste dans un premier temps, en un tri à plat pour chaque item ayant fiat l'objet d'analyse parce que jugé important pour une meilleure compréhension du phénomène étudié. Par la suite, nous effectuons un tri croisé afin de déterminer la dimension de RSE qu'on pourra attribuer à l'ensemble des entreprises ayant constitué l'échantillon. Le tri croisé qui donnera la plus grande valeur du coefficient de contingence sera retenu.

II- 1 - 1 - Appréciation de la responsabilité sociale pour le cas typique des entreprises

étudiées

Il est question ici de décrire les pratiques de l'entreprise à l'égard de ses parties prenantes internes et externes. En interne, nous nous limiterons uniquement aux employés, les actionnaires étant principalement motivés par les profits. En externe, nous aborderons uniquement les clients et les fournisseurs, la prochaine sous-section étant réservée à l'environnement.

II- 1 - 1 - 1 - Connaissance du concept de Responsabilité Sociale de l'Entreprise

Il a été demandé aux responsables rencontrés, après leur avoir défini le concept de Responsabilité Sociale de l'Entreprise, s'ils avaient déjà entendu parler de ce concept auparavant. Le tableau ci-dessous résume les réponses des 28 cadres rencontrés.

En effet, il ressort du tableau ci-dessus que, des 28 responsables rencontrés, six (06) seulement (tous issus des multinationales) avaient déjà entendu parler du concept de RSE. Autrement dit, 78.6% des responsables rencontrés n'en avaient pas encore entendu parler.

Ce qui tout au moins, surprenant car, un regard du tableau ci-dessous nous fait comprendre que ces responsables reconnaissent quand même qu'ils mènent leurs actions dans une perspective RSE. Ce qui nous permet de tirer une première une première conclusion : les entreprises camerounaises pratiquent la RSE à leur insu.

Toutefois, une fois que le concept de RSE leur avait été bien défini, 75.0% d'entre eux pensent que les enjeux sociaux et environnementaux sont du domaine des managers. Ce qui, du point de vue pratique, ne serait pas suffisant. Car les 25.0% des responsables retissant aux activités de RSE représentent un danger important pour l'environnement dont ils sont les principaux pollueurs.

II- 1 - 1 - 2 - Appréciation du climat social qui prévaut au sein des entreprises

Le tableau ci-dessus nous montre que le climat social est serein dans 75.0% des entreprises prospectées (soit 21 entreprises sur 28), et l'est moyennement à hauteur de 25.0%. Si ce tableau fait état d'un résultat positif, il ne va pas sans dire que la sérénité ne peut pas encore être considérée comme un acquis dans nos entreprises, la marge de 25.0% représentant le nombre de tensions sociales que l'entreprise doit continuer de manager.

II- 1 - 1 - 3 - Appréciation des parités et disparités entre employés

Il s'agit pour nous à ce niveau, de vérifier si la parité Homme-Femme, l'équilibre régional, et l'équité des tranches d'âges sont respectés au sein des entreprises prospectées.

En effet, le tableau ci-dessus montre que beaucoup reste encore à faire en ce qui concerne la parité Homme-Femme dans nos entreprises. En effet, la parité y est relative à hauteur de 71.4% (soit 20 entreprises sur 28) et inexistante à hauteur de 28.6% (soit 8 entreprises sur 28). L'une des principales raisons avancées par les dirigeants est que la plupart des travaux industriels ont grand besoin de forces masculines.

Aussi, l'équilibre régional est à déplorer au sein de nos entreprises. En effet, 60.7% des entreprises de notre échantillon ne respectent pas du tout l'équilibre régional dans leurs pratiques de recrutement. Résultat d'autant plus ahurissant, que les responsables en question privilégient les autochtones plutôt que les immigrants. Dans une telle perspective, que deviennent les individus originaires de métropoles non industrielles où la main-d'oeuvre n'a aucune valeur pécuniaire ?

Par contre, comme l'atteste le tableau ci-dessus, les tranches d'âge sont équitablement réparties dans les entreprises étudiées à hauteur de 35.7% (soit 10 entreprises sur les 28 prospectées) et relativement réparties à hauteur de 42.9% (soit 12 entreprises sur 28). Ce qui, comparativement aux deux premiers indicateurs de parité des emplois, n'est pas mal comme résultat, même si le problème reste posé dans six entreprises (21.4% de notre échantillon).

II- 1 - 1 - 4 - Qualification des conditions de travail, d'hygiène et de sécurité

Nous dirons que les conditions de travail au sein des entreprises prospectées sont admirables. En effet, elles sont bonnes à hauteur de 57.1%, très bonnes à hauteur de 21.4% et assez bonnes à hauteur de 21.4%. Ainsi, nous recommandons aux entreprises au sein desquelles les conditions de travail sont assez bonnes (bas de l'échelle), de fournir plus d'efforts afin d'améliorer les conditions de travail de leurs employés.

Aussi, les conditions d'hygiène, telles que le montre le tableau ci-dessous, sont pour l'essentiel bonnes (50.0%) et assez bonnes (50.0%). Le caractère admirable de ce résultat devrait tout de même interpeler les entreprises dont les conditions d'hygiène ne sont qu'assez bonnes, à faire d'avantage.

Enfin, les conditions de sécurité telles que décrites ci-dessous, présentent les meilleurs résultats, comparativement aux deux premiers indicateurs, dans le mesure où les entreprises y parviennent à toucher le sommet de l'échelle. En effet, les conditions de sécurité sont très bonnes dans 28.6% des entreprises prospectées (soit, 8 entreprises sur 28), bonnes dans 46.4% d'entre elles (13 entreprises sur 28) et assez bonnes dans 25.0% d'entre elles (soit 7 sur 28).

II- 1 - 1 - 5 - Profil de Carrière et rémunération du personnel

Le profil de carrière est constitué de l'ensemble des échelons que peut gravir un employé dans une entreprise, des postes inférieurs aux postes les plus élevés en responsabilité, tout au long de sa carrière. Il peut être dû à l'ancienneté ou à la compétence. À la question de savoir si elles poursuivent un profil de carrière, les entreprises interrogées nous ont donné les résultats synthétisés dans le tableau ci-dessous :

Il en ressort que 67.9% des entreprises prospectées suivent désormais un profil de carrière. Ces entreprises reconnaissent d'ailleurs qu'elles ont innové dans ce sens par rapport aux années antérieures où les résultats auraient été mitigés.

Nous avons également interrogé les responsables rencontrés sur la justesse et la régularité des salaires de leurs employés. Les résultats sont généralisés dans les deux tableaux ci-dessous :

A cet effet, les rémunérations sont jugées justes dans 78.6% des entreprises prospectées (soit 22 entreprises sur 28). Elles sont également régulières dans 64.3% d'entre elles (soit 18 entreprises sur 28).

Nous dirons que les résultats sur les rémunérations sont les moins satisfaisants qui soient, car on observe un taux de régularité plus faible que le taux de justesse. Nous interpellons donc les entreprises concernées, à rémunérer convenablement leurs employés et avec une fréquence relativement constante, car par-dessus tout, le facteur pécuniaire reste l'une des principales sources de motivation du personnel.

II - 1 - 2 - Responsabilité sociale des entreprises envers les tiers

Il s'agit ici d'apprécier la responsabilité sociétale des entreprises envers les deux grands groupes de PP que sont les clients et les fournisseurs.

II - 1 - 2 - 1 - Appréciation de la responsabilité sociale envers les clients

Pour appréhender cet item, nous avons jugé nécessaire d'interroger les entreprises sur la régularité de leurs clients et le respect par elles, des normes de fabrication. Les résultats sont présentés dans les tableaux ci-dessous :

En effet, les clients ne sont réguliers et croissants que dans 28.6% des entreprises touchées (soit 8 entreprises sur 28). Et le sont moyennement dans 71.4% des entreprises touchées. Ce qui revient à dire que beaucoup d'efforts restent à fournir dans ces entreprises. Notamment en respectant d'avantage les normes de fabrication.

Le tableau-dessus montre que 35.7% des entreprises ne respectent pas toujours les normes de fabrications. Ce qui pourrait, en partie, expliquer le résultat mitigé de la régularité et de la croissance des clients.

II - 1 - 2 - 2 - Appréciation de la responsabilité sociale envers les fournisseurs

Pour ce faire, nous avons demandé aux entreprises concernées, si elle respectent les délais des fournisseurs. Il en résulte que :

Seulement 53.6% des entreprises prospectées respectent toujours les délais des fournisseurs, ce qui n'est pas suffisant lorsqu'on sait que les fournisseurs du secteur industriel sont d'autant plus exigeants en termes d'échéances, que le montant des transactions est élevé.

II- 1-3- Appréciation de la responsabilité environnementale des entreprises prospectées

La responsabilité environnementale de l'entreprise est la relation que l'entreprise entretien avec son environnement. Il s'agit en d'autres termes de sa participation dans le développement de la communauté, de la gestion qu'elle fait de ses déchets, eaux usées, rejets, bruits et autres nuisances. A cet effet, les responsables rencontrés ont été interrogés sur leurs engagements dans le développement de la communauté, et sur la gestion qu'elles font des déchets, eaux usées et autres nuisances liées à leurs activités.

II - 1 - 3 - 1 - Implémentation des oeuvres sociales et développement de la communauté

Le tableau ci-dessous fait état d'un engagement à 100%, des entreprises prospectées, dans la réalisation des oeuvres sociales. S'il est vrai que toutes ces entreprises ne sont pas imprégnées de la même façon, il convient tout de même d'encourager de telles initiatives.

Le tableau ci-dessous fait également état d'un engagement à 100%, des entreprises, dans le développement de la communauté locale. Reste plus qu'à apprécier l'engagement des entreprises prospectées, dans la lutte contre la pollution.

II - 1 - 3 - 2 - Appréciation de la gestion des déchets

Il s'agit d'apprécier le degré d'engagement de la société dans la gestion ou le retraitement de ses nuisances avant leur rejet dans la nature. Cette gestion est bonne lorsque les répondants sont tout à fait d'accord ou d'accord, mitigée lorsqu'ils sont un peu d'accord, et mauvaise lorsqu'ils ne sont pas d'accord.

En effet, 28.6% des responsables rencontrés sont tout à fait d'accord sur le fait que l'entreprise assure une bonne gestion des déchets et rejets (soit 8 entreprises sur 28) ; 50% des responsables rencontrés sont d'accord sur ce point et 21.4% ne le sont pas.

Autrement dit, la gestion des déchets est bonne dans 78.6% (28.6% responsables tout à fait d'accord + 50.0% responsables d'accord). Ce qui n'est pas déplorable comme résultat. Mais il convient de rappeler qu'en matière de pollution, les pourcentages, même les plus élevés, ne représentent pas grand-chose s'il y a des entreprises qui continuent de polluer. Autrement dit, il faudrait inciter les entreprises qui n'assurent pas une bonne gestion de leurs déchets, de s'engager fortement à cet effet.

II - 1 - 3 - 3 - Engagement des entreprises dans la prévention et la gestion des risques

Environnementaux

Il s'agit ici de savoir si les entreprises ont prévu dans leurs politiques multiples, une politique de prévention et de gestion des risques.

En effet, le tableau ci-dessus fait état de 75.0% entreprises engagées dans la prévention et la gestion des risques environnementaux (soit 21 entreprises sur 28), contre 25.0% entreprises non encore engagées.

La traduction managériale de ce résultat est que, au Cameroun, 75% des entreprises industrielles sont engagées dans une RSE proactive contre 25% engagées dans une RSE réactive.

Reste plus qu'à ressortir les spécificités et les logiques de la RSE au Cameroun, afin de concevoir un modèle de responsabilité sociale, qui serait propre aux entreprises camerounaises.

II - 3 - Spécificités et Logiques de la RSE au Cameroun

Les développements qui vont suivre relèvent du constat selon lequel, toutes les entreprises installées au Cameroun ne sont pas toutes des entreprises camerounaises. Bon nombres d'entre elles sont en effet des filiales ou des multinationales dont les activités menées au Cameroun, sont le reflet de la culture des pays d'origine de leurs sociétés-mères. C'est la raison pour laquelle, nous avons voulu que notre échantillon soit constitué à la fois d'entreprises camerounaises et de multinationales, comme le montre le tableau ci-dessous :

En effet, notre échantillon est constitué de 28 entreprises dont 16 entreprises camerounaises et 12 multinationales. Il est donc question d'évaluer l'incidence de la nature de la propriété sur l'approche ou la dimension de la RSE appliquée au sein des entreprises.

II - 3 - 1 - Test de l'influence de la nature de la propriété sur l'approche de RSE

appliquée au Cameroun

Il s'agit en effet d'analyser la relation qui existe entre la nature de la propriété de l'entreprise, et l'approche RSE adoptée par cette entreprise. L'objectif étant d'aboutir à une spécificité pour ce qui est des entreprises camerounaises. Rappelons à cet effet que, par approche RSE, on entend la dimension volontaire, légale ou mixte de la RSE.

L'analyse consiste à opérer un tri-croisé qui s'apparente à une Analyse Factorielle des Correspondances (AFC) sans toutefois l'être dans la mesure où, dans ce cas précis, on ne croise pas un groupe de variables à un autre, mais on croise plutôt :

· Une variable : La nature de la propriéte

· À un groupe de variables : La dimension légale, La dimension volontaire et La dimension mixte de la RSE.

Compte tenu de la petite taille de notre échantillon, nous retenons un seuil de risque á = 5%. Le croisement a donné les résultats suivants :

Tableau récapitulatif

Le tableau récapitulatif ci-dessus fait état d'aucune case manquante, notre échantillon y est valide à 100% et à tous les niveaux. Nous allons tour à tour, présenter les résultats entre la nature de la propriété et la dimension réglementaire de la RSE, la nature de la propriété et la dimension volontariste, et enfin la nature de la propriété et l'approche mixte de la RSE.

II - 3 - 1 - 1 - Nature de la propriété et Respect de la réglementation

À partir du tableau ci-dessus, on peut déduire les interprétations suivantes :

- Parmi les 19 entreprises qui opté pour une démarche réglementaire de la RSE, 73.7% sont des entreprises camerounaises (soit 14 entreprises sur 19)

- Parmi les 9 entreprises qui n'on pas opté pour une démarche réglementaire de la RSE, 77.8% sont des multinationales

La valeur du coefficient de contingence, telle que déterminée dans le tableau ci-dessous, est positive et proche de 0.5. De plus, le seuil asymptotique de signification y est déterminé et d'une valeur de 0.010 largement inférieur au seuil de signification á = 0.05. Donc, notre test est statistiquement valide. Autrement dit, l'approche réglementaire est majoritairement pratiquée par les entreprises camerounaises.

II - 3 - 1 - 2 - Nature de la propriété et Approche Volontariste de la RSE

À partir du tableau de contingence ci-dessus, on peut dire que :

- 77.8% des entreprises qui pratiquent volontairement la RSE sont des multinationales (soit 7 entreprises sur 9) ;

- De manière analogue, les 73.7% des entreprises qui n'optent pas pour une approche volontariste de la RSE sont des entreprises camerounaises.

Ce résultat est également confirmé par un seuil asymptotique de signification de 0.010, largement inférieur à á = 0.05. Nous pouvons donc conclure sans risque de nous tromper que la dimension volontariste de la RSE est beaucoup plus employée par les multinationales.

II - 3 - 1 - 3 - Nature de la propriété et Démarche RSE mixte

À partir du tableau ci-dessus, on peut conclure que :

- Parmi les 28 entreprises qui constituées notre échantillon, 20 entreprises adoptent une démarche mixte dans leurs pratiques de responsabilité sociale. Les huit (0) autres ne pratiquant la RSE que soit de manière uniquement volontaire, soit uniquement parce qu'elle est régie par des lois.

- Parmi les 20 entreprises qui ont opté pour une démarche RSE mixte, 75.0% sont des entreprises camerounaises, soit 15 entreprises sur 20 ;

- Parmi les 20 entreprises qui ont opté pour une démarche RSE mixte, 25.0% sont des multinationales, soit 05 entreprises sur 20 ;

Les résultats ci-dessus nous sont confirmés par le tableau ci-dessous qui nous donne un coefficient de contingence de 0.496, et un seuil asymptotique de signification de 0.003, largement au seuil de risque á = 0.05.

On peut donc conclure que, au Cameroun, l'approche de la RSE est principalement une approche mixte qui revêt à la fois les aspects volontaristes et les aspects mixtes.

Toutefois, il existe un dernier volet de la RSE presque toujours négligé :

II - 3 - 2 - Le Conventionnalisme : sortir de l'ombre les pratiques quotidiennes de RSE

L'approche conventionnaliste tire son origine du fait que toutes les activités de l'entreprise ne sauraient être régies par des lois, des règlements ou des contrats. Certaines activités des entreprises passent inaperçues, parce que non susceptibles d'attirer l'attention, ou bien parce qu'elles sont analysées dans un autre sens. En interne, le fait pour une entreprise d'affilier ses employés à la CNPS ou en externe, de marquer la date d'expiration des produits sur leurs emballages, constituent autant d'activités RSE que les entreprises mènent et qui passent généralement inaperçues.

En effet, le tableau ci-dessus fait état de 71.4% entreprises qui ont affilié leurs employés à la CNPS. les affiliations à la CNPS, généralement considérées comme normales pour une entreprise, sont autant d'activités qui relèvent du domaine du conventionnel.

Il en est de même pour les entreprises qui marquent les dates d'expirations sur leurs produits et dont de tels actes passent souvent inaperçues, comme le montre le tableau ci-dessus. Comme autres activités de RSE qui relèvent du conventionnel, on peut citer les réductions sur achats, les cérémonies d'arbres de noël, les mentions par la Citabac ou les sociétés brassicoles, du caractère nocif de leurs produits.

C'est dire que le modèle conventionnel est un modèle à part entière qu'il faut désormais aborder dans les préoccupations RSE de l'entreprise.

Les développements ci-dessus nous ont permis de concevoir et de construire un modèle de RSE applicable au Cameroun.

II - 3 - 3 - Modèle de Responsabilité Sociale des Entreprises au Cameroun

Le modèle ci-dessous constitue le schéma de synthèse des résultats de notre recherche. Il nous permet d'illustrer schématiquement, les pratiques de responsabilité sociale des entreprises au Cameroun.

La lecture de ce modèle nous permet d'arriver à la conclusion selon laquelle, les pratiques de responsabilité sociale des entreprises sont à dominante mixtes, mais avec quelques exceptions de volontarisme pur, propres aux entreprises filiales, et de dimensions légales pures, propres aux entreprises camerounaises. En plus, ce modèle a ceci de particulier qu'il reconnait en toute entreprise, une dimension conventionnelle de la RSE omni présente qui relève de l'implicite et qui rentre dans les pratiques quotidiennes des entreprises.

MODÈLE DE RESPONSABILITÉ SOCIALE DES

ENTREPRISES AU CAMEROUN

APPROCHE MIXTE DE LA RSE

Légal seulement

Volontarisme seulement

Volontarisme Légal

Conventionnalisme

En sommes, le présent chapitre nous a permis de découvrir les réalités de la responsabilité sociale des entreprises au Cameroun. On a ainsi pu remarquer que toues les entreprises situées au Cameroun pratiquent la responsabilité sociale, même à leur insu (approche conventionnaliste de la RSE). Aussi les activités de RSE au Cameroun revêtent un caractère mixte, à la fois institutionnel et volontaire. Mais avec quelques exceptions d'entreprises qui ne mènent leurs activités que dans une perspective purement volontariste (les multinationales) tandis que d'autres ne là mènent que parce que régie et régulée par la loi (entreprises nationales). Parmi les entreprises qui ont optées pour une démarche RSE mixte, 75 % sont des entreprises camerounaises et 25 % des multinationales. Ceci a d'ailleurs été attribué au fait que les multinationales, conformément à la culture de leurs sociétés-mères, pratiquent la RSE de manière volontaire.

Ainsi, le présent travail de recherche nous a permis de découvrir des faits allant au-delà de ceux que nous escomptions découvrir. Nous ferons donc, en guise de conclusion générale, un briefing de nos préoccupations et des enseignements tirés au terme du présent travail de recherche.

CONCLUSION GÉNÉRALE

Cette recherche s'interrogeait au départ sur les réalités des activités de responsabilité sociale des entreprises au Cameroun. Elle a donné lieu à une analyse qui a abouti à la caractérisation des activités de RSE au Cameroun en quatre approches dont une principale et trois auxiliaires. Ce résultat est le fruit du concours conjoint d'une méthode qualitative (l'analyse factorielle du contenu) et d'une méthode quantitative (tri à plat et tris croisés). La seconde méthode venant confirmer les résultats de la première.

La thématique de ce travail est la responsabilité sociale des entreprises au Cameroun. La problématique que nous avons particulièrement traitée est celle des réalités des activités extra économiques des entreprises situées au Cameroun. Cette préoccupation nous a amené à retenir comme objectif principal, la caractérisation des pratiques de RSE au Cameroun.

Pour y parvenir, nous avons effectué une étude exploratoire auprès de trente-deux (32) entreprises industrielles de la place, après avoir obtenus un entretien à la délégation régionale de l'environnement et de la protection de la nature. Entretien au bout duquel nous avons constaté à notre grande surprise, une forte implication du MINEF dans la lutte contre la pollution. À l'issu de nos différentes analyses, on abouti à des résultats propres au système économique camerounais souvent qualifié d'économie mixte.

En effet, on a abouti au résultat selon lequel, les activités de responsabilité sociale des entreprises au Cameroun présentent un caractère mixte c'est-à-dire, une combinaison du volontariat et du légal. Ce résultat nous a permis de concevoir et construire le modèle de la page 108, modèle que nous proposons de généraliser à l'ensemble des entreprises camerounaises du secteur industriel.

De plus nous nous sommes rendu compte que le dénominateur commun à toutes les pratiques de responsabilité sociale identifiées est la composante économique. En effet, nombreuses sont les entreprises de la place, qui pensent que la RSE est un outil stratégique qui assure la compétitivité et la rentabilité de l'entreprise dans le moyen et long terme. Mais il convient tout de même de rappeler que les responsables rencontrés nous ont fait comprendre qu'ils rencontrent de sérieuses difficultés tant en externe qu'en externe lors de la mise en oeuvre de leurs démarches RSE.

En interne, on les difficultés sont relatives à la mise en place d'une culture d'entreprise. En effet, dans certaines entreprises, nombreux sont les employés qui refusent de s'arrimer aux prescriptions établies par la direction. C'est ainsi qu'on peur témoigner l'entrée en atelier de certains ouvriers, sans mesures de sécurités, la raison avancées étant que les vêtements et autres casquettes de protection empêchent l'exécution rapide du travail. On assiste même dans certaines entreprises de la place, au refus catégorique de la part de certains employés de s'affilier à la CNPS. C'est dire qu'en interne, tout réside dans la culture individuelle de chaque employé qu'il faut concilier à la culture d'entreprise, car « la responsabilité sociale de l'entreprise c'est aussi la somme des responsabilités individuelles des personnes qui là constitue ».

En externe, les difficultés sont principalement relatives à l'absence de moyens techniques et financiers permettant soit d'évacuer les déchets, soit de les traiter en vue de leur recyclage. Mais, qu'elle soit appliquée en interne ou externe, la responsabilité sociale de l'entreprise doit affronter de nouveaux défis. Ces défis sont relatifs à :

· La règle implicite des affaires qui veut que les cadres dirigeants s'empêchent de s'impliquer dans une activité qui pourrait réduire les profits ;

· Pour certains, telle ou telle des parties prenantes peut se trouver en position dominante et privilégier ses objectifs propres.

Dans cette perspective, les résultats de la présente recherche peuvent être élargis à un échantillon plus grand et plus représentatif de la population des entreprises industrielles situées au Cameroun. C'est dans cet ordre d'idées que nous pourrons par la suite, envisager, comme c'est déjà le cas sous d'autres cieux, une étude visant à établir la relation entre RSE et performance.

Enfin, compte tenu du fait que la RSE est un phénomène très peu connu, bien que largement pratiqué, nous proposons aux responsables des programmes académiques d'insérer la Responsabilité Sociale des Entreprises parmi leurs différents programmes académiques afin de favoriser une meilleure compréhension du problème. Aux dirigeants d'entreprises, nous proposons de mettre sur pied, au sein de leurs structures, des programmes de formation sociétale en vue d'inculquer la culture d'entreprise à leurs différents employés qui semblent jusqu'ici privilégier leurs cultures individuelles au détriment de la culture d'entreprise.

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* 1 Livre vert de la Commission européenne sur la responsabilité sociale des entreprise (2001).

* 2 Freeman (1984) accorde la paternité de la notion de stakeholder à une note interne du Stanford Research Institute (SRI, organisme de recherche et de conseil) de 1963.

* 3 SUCHMAN M.C. (1995), Managing legitimacy: strategic and institutional approaches, Academy of Management Review, vol 20, n°3, p 571 - 610.

* 4 Eric PERSAIS (2007), La RSE est-elle une question de convention ? Lavoisier, Paris, p 79 - 95.

* 5Les auteurs font référence pour cette typologie à A. Savage et A. J. Cataldo : « a multicase investigation of environmental legitimation in annual reports », research paper, 1993

* 6 Capron et Quairel-Lanoizelée (2004) illustrent ce type d'intégration par les politiques de développement d'éco-conception (pneus par Michelin par exemple).

* 7 Conférence des Nations Unies pour le Commerce et le Développement

* 8 L'exemplarité consiste à partir des cas d'entreprises précis qui ont fait preuve de succès en matière de rentabilité dans leurs démarches RSE et d'inciter leur généralisation pour en ressortir des modèles et des grilles applicables à toute entreprise.

* 9 Mouvement des Entreprises de France

* 10 La norme ISO 26000 est une norme ISO en cours d'élaboration. Elle portera sur la responsabilité sociétale des organisations et devrait être publiée en 2010.

* 11 Patricia Crifo et Jean-Pierre Ponssard (2008), RSE et/ou performance financière : points de repères et pistes de recherche, Laboratoire d'économétrie, Ecole Polytechnique.

* 12 Le Balanced Scorecard (Kaplan et Norton, 1996) répond au double objectif de gérer les demandes des différentes parties prenantes de l'entreprise et traduire les stratégies en actions opérationnelles. La notion de sustainable balanced scorecard est une extension `naturelle' du Balanced Scorecard dans la mesure où ce concept reste ouvert à l'intégration de toutes les perspectives ou parties prenantes pertinentes, notamment la perspective environnementale et sociale. La référence à la RSE (ou à la citoyenneté d'entreprise) y est d'ailleurs explicite mais il faut attendre le début des années 2000 pour qu'une attention plus importante lui soit réellement consacrée (Zingales, O'Rourke et Hockerts, 2002).

* 13 Barthélemy B. (2000), Gestion des risques, Ed les Organisations, p 15

* 14 Source : Notre étude sur le terrain

* 15 Société Nationale des Raffineries






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