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Etude des malformations congénitales cliniquement visibles à  la naissance à  Lubumbashi

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par Toni Kasole LUBALA
Université de Lubumbashi RDC - Spécialiste en médecine option pédiatrie 2012
  

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CHAPITRE QUATRIEME : DISCUSSION

Prévalence des malformations congénitales visibles

Prévalence globale : Des malformations congénitales ont été observées dans 58,3 pour 10000 naissances vivantes dans les onze maternités de Lubumbashi retenues pour l'étude. Six années plus tôt, dans leurs études réalisées à Lubumbashi et Kinshasa, Kalwaba et al. (2004) et Tabu (2004), avaient évalué la prévalence des malformations respectivement à 74 et 57 pour 10000 naissances vivantes.

La prévalence trouvée dans notre étude est significativement plus faible que celle de Kalwaba et al., en 2004 (X-score=2 >1.96, p<0.05). Cet état des choses s'expliquerait davantage par un sous-rapportage que par une réelle baisse de la prévalence des malformations à Lubumbashi.

Ceci est d'autant plus vraisemblable qu'aucune intervention n'a été réalisée entre

temps.

Cette faible prévalence pourrait en outre être mise en parallèle avec la baisse drastique de l'activité des industries extractives minières survenue de 2008 à 2010 consécutivement à la crise financière internationale ayant entrainé la chute du cours des principaux produits miniers extraits au Katanga.

Rappelons que notre étude s'est effectuée d'avril 2010 à avril 2011. Il est cependant important de souligner que cette dernière hypothèse est à considérer avec réserve car, à ce jour, aucune étude n'a établi de façon formelle une relation de cause à effet entre

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l'activité minière à Lubumbashi et la variation des prévalences des malformations congénitales.

En outre, il est intéressant de constater qu'il n'y a pas de différence significative entre la prévalence trouvée dans notre étude et celle de Kinshasa rapportée par Tabu en 2004 (X-score=0.239 <1.96, p>0.05).

Mise à part la possibilité de sous rapportage dans notre série, ceci pourrait s'expliquer par la présence à Kinshasa d'autres facteurs de risque tant environnementaux que parentaux.

Dans un tout autre contexte (pays industrialisé) le registre des malformations congénitales du Hainaut et Namur, en Belgique, qui porte sur 15000 naissances vivantes fait état d'une prévalence de 2.5 % nettement supérieure à celle de notre étude.

Ceci s'explique à la fois par le recrutement plus rigoureux des cas, mais aussi par le fait que ce chiffre englobe tant les malformations visibles que celles nécessitant pour leur diagnostic des examens complémentaires dont nous n'avons pas pu disposer.

Prévalences spécifiques :

Dans notre étude, les malformations du système nerveux étaient les plus fréquentes avec 20.29 pour 10000 naissances, suivies des malformations des membres avec 10.55 pour 10000 naissances et des fentes oro-faciales avec 8.11 pour 10000 naissances (Tableau IV). S'agissant des malformations du système nerveux central, le registre du Hainaut et Namur rapporte une prévalence quasi équivalente à la nôtre (24 pour 10000 naissances vivantes).

Le registre des malformations Eurocat, réalisé à l'échelle européenne, rapporte quant à lui une prévalence de 4 pour 10000 naissance vivantes, significativement inférieure à la nôtre.

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Dans ce groupe, les malformations par défaut de fermeture du tube neural (Anencéphalie, spina bifida) dont la pathogénie est liée aux carences en acide folique occupent une place importante.

Ceci relance le débat sur la supplémentation en acide folique chez la femme enceinte dans notre pays. En effet, il est admis aujourd'hui que l'acide folique est un cofacteur dans la majorité des réactions enzymatiques qui entrent en jeu dans la formation de nouveaux tissus.

Un faible taux de folates dans les globules rouges maternels en période périconceptionnelle a été fortement associé à la survenue de défects du tube neural. Il a été démontré que cette survenue était dose-dépendante (Pass, 2006; Thame et al., 2002).

Eu égard à l'apport de l'acide folique, nos résultats montrent que les attentes sont déçues.

En effet, malgré une supplémentation théoriquement inscrite dans les protocoles des consultations prénatales, les taux de prévalence des anomalies de fermeture du tube neural et singulièrement du spina bifida sont élevés.

Il y a donc lieu de s'interroger sur l'efficacité de la politique nationale de supplémentation en acide folique (Pass, 2006). Cette question est d'autant plus pertinente qu'en Irlande, la prévalence des défects du tube neural est passée de 46.9/10.000 naissances à 11.6/10.000 entre 1980 et 1994 (Thame et al., 2002).

Ces résultats sont attribués à la prise effective d'acide folique en période périconceptionnelle. En Suède, la prise d'acide folique en période conceptionnelle est une stratégie nationale et a permis de baisser de façon significative la prévalence des malformations du tube neural (Thame et al., 2002).

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The American Academy of Pediatrics, reconnue par l'US Public Health Service (USPHS) recommande la prise de 400 micros grammes d'acide folique par jour en période péri-conceptionnelle. Cette mesure permet de baisser la prévalence des malformations du tube neural de plus de 50 %.

Une étude multicentrique (11 centres) d'évaluation de la prise préventive d'acide folique entre 1987 et 1996 rapporte qu'il y a une diminution significative de la prévalence des défects du tube neural dans des centres comme ceux d'Atlanta, d'Angleterre, du Pays de Galles, de Hongrie ou du Japon (Wals et al., 2007).

L'application stricte de cette stratégie nécessite une planification des grossesses. Or, en Amérique du Nord et en Europe, près de 50 % de toutes les grossesses ne sont pas planifiées (Gillerot et Mols, 2009). La situation n'est guère meilleure à Lubumbashi, société pro nataliste.

Ceci pose la question d'une supplémentation systématique et effective dans l'alimentation, en rappelant que cette façon de procéder pourrait également avoir un effet protecteur pour d'autres malformations comme certaines cardiopathies, les fentes labiopalatines, l'atrésie anale et peut-être même la trisomie 21 (Gillerot et Mols, 2009).

Cependant, il est important de souligner que le taux de folates a un déterminisme génétique : il est sous le contrôle du gène C677T. Dans la forme homozygote d'anomalie de ce gène, le taux de folates érythrocytaire est de 20 % inférieur à la normale (Morrison et al., 1998).

Ceci explique que la prévalence du génotype TT est élevée de façon significative chez les enfants porteurs de spina bifida et chez leurs parents (Thamel, 2002). Dans d'autres études, d'autres gènes (PDGFRA, CBS, MS, MTHFR), seuls ou en interactions, sont impliqués dans la survenue des défects du tube neural (Pass, 2006).

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S'agissant des fentes oro-faciales, notre étude rapporte une prévalence de 8.1 pour 10000 naissances (Tableau V). Si on considère l'ensemble des fentes palatines observées de 1990 à 2004, on relève 132 cas dans le registre Hainaut-Namur, c'est-à-dire une prévalence de #177; 7 pour 10000 naissances.

Ces taux coïncident avec les chiffres globaux d'EUROCAT central. En effet, le registre central (Belfast) a enregistré 3.426 cas de 1980 à 1999, c'est-à-dire une prévalence globale de 5.8 pour 10000 naissances (Gillerot et Mols, 2009).

Ces malformations sont visibles dès la naissance et aisément identifiables. Corollairement, le risque d'un sous-enregistrement est faible. La prévalence des fentes oro-faciales est extrêmement variable dans les pays Africains : de 3 pour 10000 naissances au Nigeria a 16.5 pour 10000 au Kenya (Butali et Mossey, 2009).

Ces prévalences importantes tant à Lubumbashi que dans les autres pays Africains inquiètent compte tenu du poids psychosocial et économique considérable des enfants porteurs de fentes palatines.

Le manque d'infrastructure et de personnel qualifié allonge la liste des problèmes que posent ces enfants dans les pays en développement. Il convient en effet ici de souligner que l'équipe spécialisée multidisciplinaire devrait idéalement comprendre un chirurgien plastique, un pédiatre, un généticien, un otorhinolaryngologiste, un dentiste pédiatrique, une infirmière, un orthophoniste, un audiologiste et un psychologue (Turgeon et al., 2008).

Il est donc crucial d'identifier les facteurs associés à la survenue de ces fentes oro faciales afin de les prévenir.

L'hérédité est ici multifactorielle, et l'acide folique pourrait jouer un rôle « protecteur », l'apparition de fentes labio maxillo palatines étant elle aussi liée à la formation du tube neural au stade embryonnaire.

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En effet, les parties médianes du visage se forment à partir de la crête neurale qui, à l'instar du tube neural, se développe à partir de la plaque neurale (Eichholzer et al., 2008).

Dans notre série, les anomalies des membres figurent parmi les plus fréquentes, essentiellement représentées par les pieds bots avec 5.68 pour 10000 naissances, ainsi que la polydactylie avec 3.24 pour 10000 naissances (Tableau V).

Les malformations réductionnelles des membres n'ont, quant à elles, représenté que 0.8 pour 10000 naissances. Ce groupe d'anomalies est emblématique car il fut en quelque sorte le coup d'envoi d'EUROCAT par le truchement de l'épidémie de la Thalidomide.

S'agissant de la prévalence en fonction des maternités, il ressort des Tableaux II et III que les prévalences sont élevées dans les hôpitaux Universitaires de la Ville.

Ces résultats sont certainement influencés par la présence dans ces hôpitaux d'un personnel plus entrainé à la reconnaissance des malformations, par leur taux de fréquentation élevé, mais aussi par leur statut d'hôpitaux provinciaux de référence.

Dans l'analyse de la prévalence en fonction des Communes de provenance des patients porteurs de malformations congénitales, nous avons constaté que la Commune de Kampemba (30.6%) était la plus représentée suivie de la Commune de Katuba (22.2%). En outre il ressort de nos résultats que le fait de vivre hors des communes à forte activité minière de la ville de Lubumbashi (Ruashi : Usines Ruashi Mining ; Kampemba : Chemaf ; Annexe : Somika,...) semble être un facteur protecteur vis-à-vis du risque d'avoir un enfant porteur de malformations congénitales : OR=0.51 (0.28-0.94) p<0.05 (Tableau XIII).

Plusieurs hypothèses pourraient expliquer ces résultats, notamment une exposition répétée à des métaux toxiques ou à une radioactivité anormalement élevée.

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Parlant de cette dernière hypothèse, une étude publiée en 1983 rapporte la survenue d'un cluster (6 cas) de trisomies 21 chez des enfants dont les mères ont vécu leur adolescence à Dundalk, en Grande-Bretagne, village exposé selon les auteurs aux retombées radioactives de l'accident de Windscale survenu le 10 octobre 1957 (Doyle, 2000).

Cependant deux autres études concernant les malformations congénitales et les mutations germinales dans un rayon de 30 km autour de zones d'émanation radioactive en Hongrie (Doyle, 2000) et en Roumanie (Bembea, 2001) n'ont retrouvé aucun lien évident entre les taux de malformations avant et après la mise en service du site.

A Lubumbashi, le risque d'exposition aux produits miniers radioactifs, bien que considéré comme faible, n'a pas encore été évalué et documenté ; d'où la nécessité de rester prudent quant à son influence sur la prévalence des malformations congénitales dans la ville (Banza et al., 2009).

S'agissant de l'hypothèse relative à l'intoxication par les métaux, les taux élevés de cobalt et autres métaux toxiques mesurés dans les urines des sujets issus de la population générale au Katanga confirment que la population vivant près des usines de traitement de minerais est exposée à ces toxiques (Banza et al., 2009).

Reconnaissons cependant que la démonstration de la relation de cause à effet entre cette exposition aux métaux liée au contexte minier et la majoration de la prévalence des malformations congénitales est prématurée.

S'agissant de la répartition des cas en fonction du sexe, nous avons trouvé un sex ratio de 2. Kalwaba a, quant à lui, rapporté un sex ratio de 1.31 (Kalwaba et al., 2004) .D'autres études ont montré que le sex ratio est proche de 1 dans la majorité des malformations.

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Dans les malformations du système génital externe, une proportion plus importante de garçons va de soi (Gillerot et Mols, 2009).

Considérant le moment de la découverte, l'échographie prénatale est devenue une étape majeure dans la découverte et la mise au point des anomalies foetales. Elle s'intègre cependant dans un processus global qui « in fine » participe à la prévention de ces anomalies et parfois (mais rarement) à leur traitement.

Cette prévention peut s'entendre de 2 façons : celle d'une part d'éviter, lors d'une grossesse en cours, la naissance d'un enfant vivant atteint de malformations létales ou de malformations telles que la qualité de sa vie en sera gravement altérée, et celle d'autre part de prévenir, par l'intermédiaire du conseil génétique, la naissance ultérieure au sein du couple d'un enfant porteur de malformations identiques à celles du « cas princeps » (Gillerot et Mols, 2009).

Dans notre étude, seuls 4.2% des cas ont été diagnostiqués en anté natal (Tableau VIII). Ce chiffre représente également le nombre des seules gestantes ayant pu bénéficier d'une échographie durant leurs consultations prénatales.

Ces résultats posent avec acuité le problème d'accessibilité tant géographique que financière des services d'échographie obstétricale dans la ville de Lubumbashi.

Nous avons analysé la mortinatalité (Type de naissance) et les décès néonataux survenus avant la fin de la première semaine de vie des patients porteurs de malformations congénitales (Décès néonataux).

En effet, les malformations congénitales sont responsables de 7 % de l'ensemble des

décès néonataux dans le monde. Cette proportion varie cependant de 5 % dans la Région de l'Asie du Sud-Est à plus de 25 % en Europe.

Dans notre série, le risque pour un malformé d'être mort-né est de 2.13 (Intervalle de confiance : 0.69-6.58, X2 = 2.15, p = 0.142). La différence entre le groupe des malformés

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et des enfants sains n'est cependant pas statistiquement significative. Ici, il est possible qu'un biais de rapportage ait influencé nos résultats, les nouveaux nés malformés et mort nés n'étant probablement pas tous notifiés.

En période néonatale précoce, 32.9% des enfants nés vivants et porteurs de malformations congénitales sont décédés endéans les 7 jours. Ce chiffre reflète l'ampleur du problème mais ne permet cependant pas à lui seul de dégager la part relative des malformations dans la mortalité néonatale précoce, étant donné qu'il n'est pas comparé au taux de mortalité précoce des nouveau-nés non malformés.

Dans notre série, des complexes malformatifs ont été observés dans 6.5 cas pour 10000 naissances (Tableau VI), la principale part revenant aux malformations d'origine chromosomiques (environs 4 pour 10000 naissances). Ces résultats sont très différents de ceux obtenus dans une étude Roumaine où la prévalence était de 13.74 pour 10000 naissances vivantes (Bembea, 2001) et dans une autre étude réalisée dans les provinces Belges du Hainaut et Namur, avec 33 pour 10000 naissances (Gillerot et Mols, 2009) .

Cette nette différence s'explique probablement par un sous rapportage des cas, particulièrement des trisomies 21 qui, semble-t-il, passent encore inaperçus en période néonatale dans la plupart des maternités de la ville de Lubumbashi.

En outre, il est important de remarquer qu'avant l'apparition et les progrès des tests biochimiques (triple test) et de l'échographie anténatale, un certain nombre de trisomies 21, aujourd'hui diagnostiquées en Europe, passaient inaperçues et étaient éliminées sous la forme de fausses couches tardives, voire d'enfants mort-nés macérés. Il n'est donc pas exclu non plus qu'avant l'ère des tests biochimiques et de l'échographie précoce, un certain nombre de cas d'anomalies chromosomiques aient été « manqués » (Gillerot et Mols, 2009).

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Nous pensons que le développement de l'échographie anténatale à Lubumbashi pourrait permettre de réduire drastiquement le sous rapportage de nos cas.

Notons avec intérêt qu'un cas de malformation multiple de cause inconnue (MCA-eci) a été observé dans notre série. De tels cas sont de la plus grande importance en épidémiologie car ils traduisent souvent l'introduction d'un tératogène dans l'environnement.

Selon Yves Gillerot (Gillerot et Mols, 2009), il ne faut pas attendre qu'il y en ait des dizaines répertoriées pour tirer la sonnette d'alarme. Un ensemble inédit, non décrit, et retrouvé ne fût-ce qu'à 2 ou 3 reprises dans une région donnée doit être considéré comme très suspect.

Divers facteurs de risque potentiels ont été analysés dans ce travail.

Comme on le sait, l'âge de la mère constitue un facteur de risque foetal pour ce qui concerne la mortalité, la morbidité et les malformations congénitales, avec comme exemple emblématique la trisomie 21. De nombreuses études ont montré que ce risque augmente surtout après 35 ans (Gillerot et Mols, 2009).

Ces résultats concordent avec ceux de notre étude où 68% des mères porteuses de foetus malformés avaient plus de 35 ans. (Tableau X). En outre, nous avons trouvé que, dans notre milieu, le risque pour une mère âgée de plus de 35 ans de donner naissance à un enfant porteur d'une malformation congénitale est de 3.66 (Intervalle de confiance:1.93-6.98, X2 = 18.72, p = 0,00001).

Un consensus existe sur le fait que le risque de survenue de malformations congénitales augmente avec l'âge maternel. Néanmoins, des divergences demeurent encore quant à l'âge limite au-delà duquel ce risque est évident.

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Une étude saoudienne porte cette limite à 45 ans (Al Bu Ali, 2011), tandis que la plupart des études européennes, ainsi que celle réalisée dans nos conditions à Kinshasa (Tabu, 2004) la situent à 35 ans.

Nous avons également étudié la profession du père. En effet, la province du Katanga étant essentiellement minière, nous avons voulu évaluer le risque pour des parents travaillant dans les mines de cuivre et de cobalt d'engendrer un enfant malformé.

Nos résultats montrent que le risque pour un père minier ou ouvrier d'avoir un enfant malformé est très important : OR= 4.38, IC : 2.30-8.38, X2 = 24.46, p = 0,0000008 (Tableau XI).

Les métaux auxquels les artisans miniers sont exposés, tels qu'ils ressortent de la revue de la littérature sur la composition des minerais du Katanga, sont notamment : l'arsenic, le cadmium, le cobalt, le cuivre, le manganèse, le mercure, le plomb, le zinc,... (Banza et al., 2009).

Les traces de ces minerais, identifiées et quantifiées dans les cheveux des mineurs grâce à des techniques de spectrométrie, ont révélé des teneurs élevées et permis de matérialiser l'exposition aux métaux contenus dans la gangue minéralisée (Elenge, 2010).

Toutefois aucune étude n'a à ce jour formellement documenté un éventuel rapport entre cette exposition professionnelle à des métaux dans notre milieu, la toxicité de ces métaux et le risque de donner naissance à un enfant porteur de malformations congénitales.

En outre, le niveau d'exposition à la radioactivité des ouvriers des usines minières de Lubumbashi n'est pas non plus documenté. Il ressort cependant des rapports de géologues que la quasi-totalité des gisements exploités ces dernières décennies ont un faible potentiel radioactif. Leur effet délétère sur la lignée germinale masculine serait

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donc à priori négligeable dans notre milieu. Il convient néanmoins de rappeler ici que l'effet potentiellement tératogène de telles substances a été bien documenté.

En effet, une étude réalisée en 1989 (Rousseau, 1990) à partir de 640 caryotypes de spermatozoïdes de patients ayant reçu une radiothérapie et/ou une chimiothérapie montre une fréquence totale d'anomalies chromosomiques de structure significativement élevée.

Dans une autre étude, on a observé 23% de spermatozoïdes porteurs d'anomalies de structure chez un patient, 11 et 16 mois après une irradiation (dose testiculaire : 0,25 à 0,45 Gray) pour séminome testiculaire (Rousseau, 1990).

Des études spermatiques (Rousseau, 1990) chez des patients porteurs de translocations équilibrées ont montré que les spermatozoïdes à caryotype déséquilibré peuvent franchir toutes les étapes de la fécondation hétérospécifique : attachement à la membrane plasmique de l'ovocyte, entrée dans le cytoplasme ovocytaire, décondensation nucléaire, formation de pronucléus, synthèse d'ADN et condensation du matériel génétique en métaphase.

Il semble, selon ces études, que la présence d'anomalies chromosomiques multiples dans un spermatozoïde ne perturbe pas toujours nécessairement le processus de fécondation dans le système hétérospécifique.

Si on extrapole cette observation au système de fécondation homospécifique (qui n'en diffère essentiellement que par la présence de la zone pellucide), il en résulterait la constitution d'un oeuf fécondé à contenu cytogénétique très altéré.

S'agissant de la parité de la mère et des antécédents de malformation foetale évoqués dans d'autres études comme facteurs de risque de malformations congénitales (Tabu, 2004), aucune association statistiquement significative n'a été observée dans notre

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étude, probablement du fait de la petite taille de notre échantillon en comparaison, par exemple, avec l'étude de Tabu à Kinshasa (Tabu, 2004).

Quant aux antécédents de fausse couche/avortement, associés dans l'étude de Tabu (Tabu, 2004) à un risque plus élevé de malformation (OR=2.5, IC : 1.06-6.02), leur rôle n'a pas pu être mis en évidence dans notre étude.

En effet, l'analyse du risque pour une mère ayant au moins un antécédent d'avortement et/ou de fausse couche spontanée de donner naissance à un enfant porteur d'une malformation congénitale (Tableau X) n'a pas montré de différence significative (OR= 1.76 ; IC :0.94-3.29. X2 = 3.63, p=0.05).

S'agissant de la notion d'automédication au premier trimestre de la grossesse, elle est aujourd'hui admise comme facteur de risque de survenue de malformations congénitales. Tabu, à Kinshasa (Tabu, 2004), a montré qu'il existe près de 3 fois plus de risque pour une femme qui consomme des médicaments sans ordonnance durant sa grossesse de donner naissance à un enfant malformé.

On sait également que l'utilisation de médicaments pendant la grossesse est courante. Un sondage de l'OMS a en effet établi que 86 % des femmes prenaient des médicaments pendant leur grossesse. Ce chiffre prend bien évidement en compte tant les médicaments délivrés sur ordonnance que ceux disponibles en vente libre.

Dans notre série, seuls 15.3% des femmes avec enfants malformés ont avoué avoir pris des médicaments (hormis vitamines) durant le premier trimestre de leur grossesse, ce qui pourrait indiquer une peur de culpabilisation de leur part.

Il apparait néanmoins, au vu de nos résultats englobant également le groupe contrôle, que le fait pour les mères de ne pas s' « automédiquer » pendant la grossesse est un facteur protecteur vis-à-vis du risque de donner naissance à un enfant porteur de malformations congénitales (OR=0.22, IC : 0.1-0.47, p=0.00001).

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Parmi les médicaments en vente libre couramment utilisés pendant la grossesse, on trouve l'acétaminophène (65 %), l'ibuprofène (10 %) et la pseudoéphédrine (15 %). Mais il est bien inquiétant de reconnaitre qu'à Lubumbashi, tous les médicaments sont accessibles aux femmes enceintes sans qu'aucune ordonnance ne soit exigée.

S'agissant de l'hyperthermie, la fièvre maternelle au premier trimestre de la grossesse constitue le premier agent tératogène découvert initialement chez l'animal, puis chez l'homme, avec des conséquences identiques dans les deux groupes (Graham, 1998).

Elle est aujourd'hui reconnue comme étant un agent physique, à effets dose-dépendants, pouvant être responsable d'avortements et de malformations (Milunsky et al., 1992). Dans la littérature, elle est essentiellement incriminée dans la survenue des anomalies de fermeture du tube neural : RR= 6.2, CI : 2.2-17.2 (Daly et al., 1995) et des membres (Milunsky et al., 1992).

Ces effets peuvent cependant être atténués dans certaines circonstances par le « heat shock response » (HSR) qui confère à l'embryon une protection lorsqu'il est exposé à une dose initiale de chaleur (Graham, 1998).

Dans notre étude, l'absence de fièvre chez les mères constitue également un facteur protecteur vis-à-vis du risque de donner naissance à un enfant malformé (OR=0.31, IC : 0.16-0.62, p=0.001).

Il semble qu'un effort supplémentaire pourrait être fait dans le sens d'un meilleur suivi des grossesses, surtout dans les régions de paludisme stable où il sévit sur un mode hyper endémique, atteignant, au cours de la grossesse, des prévalences record de 40% (Ehiolé et al., 2008).

La prise d'alcool pendant le premier trimestre de la grossesse a aussi des effets connus sur le développement foetus (O'Leary et al., 2010). Mais les conséquences d'une consommation légère occasionnelle et d'une consommation importante régulière, bien

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que dépendant par la dose, ne sont pas toujours les mêmes dans tous les cas: c'est l'effet « dose et modulation » par susceptibilités individuelles variables (génome de la mère et du foetus).

L'alcool est responsable d'une dégénérescence neuronale par apoptose. Il perturbe notamment le métabolisme des neurotransmetteurs en bloquant les récepteurs N-Méthyl-D-Aspartate (NMDA) et en activant les récepteurs Acide-Gama-Amino-Byturique (GABA).

L'importance de l'apoptose dépend de la quantité totale d'alcool ingérée et de la durée pendant laquelle elle est ingérée. Les effets de l'éthanol sur le foetus peuvent se classer en 4 catégories : retard de croissance, anomalies neurologiques, dysmorphies faciales et autres malformations (Gillerot et Dan, 2005 ;Gillerot et Mols, 2009).

Dans notre étude, il apparait que le fait pour les mères de ne pas consommer d'alcool durant leur grossesse constitue un facteur protecteur par rapport au risque de donner naissance à un enfant malformé (OR=0.21, IC : 0.09-0.48, p=0.00002).

Il est à noter qu'ici également, seule une petite proportion (12.5 %) de femmes avec enfant malformé a reconnu, sans doute aussi par peur de culpabilisation, avoir consommé régulièrement de l'alcool durant la grossesse.

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