CHAPITRE III : POLITIQUE D'ADAPTATION OU POLITIQUE DE
DÉVELOPPEMENT DURABLE ET DE GESTION DE RISQUE « CLASSIQUE
»?
Ce troisième chapitre a pour objet d'étudier la
temporalité qui est visée par les discours et les mesures
d'adaptation. L'objectif est de voir s'il y a une prise en compte du long terme
et une véritable anticipation d'un changement climatique. L'enjeu de
cette hypothèse est de distinguer ce qui serait de l'ordre de
l'adaptation climatique, qui repose sur une anticipation, de ce qui serait de
l'ordre d'une politique "classique" de gestion de problèmes actuels et
de développement durable.
I- Une politique d'adaptation partielle et
tournée vers le présent
1) La prise en compte d'aléa existant encore non
traité : l'îlot de chaleur urbain
La politique d'adaptation climatique lyonnaise a pour
particularité d'être centrée exclusivement sur l'effet de
réchauffement et le risque d'îlot de chaleur urbain. Les autres
risques naturels potentiellement susceptibles d'être renforcés par
le changement climatique ne sont pas réévalués en fonction
de ce changement. Ainsi, seuls les territoires centraux prennent en compte
l'objectif d'adaptation sous l'angle de l'îlot de chaleur urbain.
Deux éléments peuvent expliquer cette
focalisation sur l'ICU : son caractère avéré et l'effet
d'opportunité. Tout d'abord, l'îlot de chaleur urbain est un
phénomène caractéristique des milieux urbains denses et
est déjà avéré dans les espaces centraux. Si ce
phénomène ne présente pas de conséquences
négatives en période hivernale, en période estivale
l'îlot de chaleur urbain crée un inconfort thermique et peut avoir
des conséquences sanitaires importantes comme l'a montré la
canicule de 2003. Avec la perspective d'un réchauffement climatique et
d'une augmentation de la fréquence et de la durée des canicules
au cours du siècle, l'enjeu est encore réaffirmé. La
première raison expliquant le « succès » de
l'îlot de chaleur urbain est donc qu'il s'agit d'un
phénomène avéré qui a déjà produit
des effets négatifs majeurs, à la fois des situations de crise
(canicule 2003) et à la fois une situation d'inconfort thermique qui
nuit à la qualité de vie et donc à l'attractivité
de la métropole
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Partie II : Étude du cas lyonnais et focus sur quatre
communes
lyonnaise. Un autre élément d'explication est le
caractère novateur de l'îlot de chaleur urbain : cette
nouveauté est une occasion pour l'agglomération lyonnaise de
faire valoir sa position de précurseur sur les questions d'environnement
au sens large. Les différents travaux engagés au niveau de
l'agglomération en termes de caractérisation de l'ICU sont ainsi
une manière de se positionner sur un sujet émergeant, en
créant un noyau d'experts locaux sur la question (Rocher, 2012).
La focalisation sur l'îlot de chaleur urbain s'explique
aussi par sa prise en compte relativement aisée par le Grand Lyon.
L'approche problem-solving que forme le couple
ICU-végétalisation présente l'avantage d'associer à
un problème avéré une solution aisée à
mettre en oeuvre pour la collectivité qui en a la compétence, et
qui constitue de plus une stratégie « sans regret ». En effet
les mesures de végétalisation présentent des avantages non
seulement en termes climatique, mais aussi en termes esthétique,
environnemental, de qualité de vie, ou encore de gestion des eaux
pluviales. Cette mesure à gains multiples permet ainsi de traiter
différents enjeux.
Pour autant, comment expliquer cette focalisation exclusive
sur l'îlot de chaleur urbain, au détriment des autres impacts
potentiels, à la fois existants (risques naturels) mais aussi nouveaux
(raréfaction de la ressource en eau actuellement abondante) ?
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