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Le traitement des défaillances bancaires des établissements de microfinance

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par Grégoire TCHOMGUI KOUAM
Université de Dschang Cameroun - Master II recherche 0000
  

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CHAPITRE 1 : LES TECHNIQUES DE RESTRUCTURATION D'UN ETABLISSEMENT DE MICROFINANCE DEFAILLANT

Le législateur communautaire n'a pas expressément règlementé les opérations de restructuration des EMF. Ce mutisme est aussi constaté pour les banques classiques305(*). Pourtant, à y voir de près, la restructuration, si elle est possible, est une technique efficace de traitement des défaillances des EMF. Devant ce mutisme, on ne peut s'en ternir qu'aux dispositions nationales expressément consacrées à ce sujet306(*) car ce recours à la loi nationale est implicitement permis par le juge communautaire de la CEMAC307(*).

La restructuration n'est possible que si les conditions de l'exploitation ne sont pas définitivement compromises. C'est ce qui ressort de l'article 3 de l'Ordonnance camerounaise de 1996308(*). Ce texte bien que ne parlant que des établissements de crédit peut être appliqué aux EMF en l'absence de texte spécifique semblable. Ainsi, les EMF en difficultés peuvent saisir la COBAC pour un avis de restructuration en lui proposant un plan de restructuration dont la crédibilité sera appréciée par elle. A défaut, l'autorité monétaire est la principale détentrice de l'initiative de restructuration. Dans ce cas, soumettre cette initiative à l'avis conforme de la COBAC évite d'y recourir abusivement309(*) et les observations de la COBAC permettront de corriger les carences du plan de restructuration.

La restructuration consiste donc à réorganiser l'établissement selon de nouveaux principes et avec de nouvelles structures ce qui est devenu inadapté310(*). Les mesures de réorganisation sont d'ordre financier notamment la reconstitution des fonds propres altérés, ou d'ordre social impliquant par exemple des licenciements afin de réduire les frais généraux311(*). Mais certaines opérations de restructuration permettent de maintenir les emplois et surtout la survie de la structure, et doivent être privilégiées car répondant au souci d'assurer la pérennité des EMF tant recherchée. La restructuration a donc l'avantage de permettre dans un contexte de graves difficultés d'éviter une liquidation pure et simple312(*).

Nous ne nous limiterons pas à présenter les opérations de restructuration qui sont, nous l'avons dit, des palliatifs à la liquidation des EMF313(*). Nous montrerons en revanche l'intérêt qu'il y a à prendre en compte le plan de redressement interne très souvent minimisé pour le traitement des défaillances (section 1). L'échec du plan de redressement interne doit conduire inéluctablement à l'intervention d'un mandataire de la COBAC dans le cadre de l'administration provisoire (section 2).

SECTION 1 : L'IMPORTANCE DE LA PRISE EN COMPTE DU PLAN DE REDRESSEMENT INTERNE DANS LA PHASE DE RESTRUCTURATION D'UN EMF DEFAILLANT

Si la COBAC dispose d'une maîtrise autonome sur le fonctionnement normal des EMF, elle est appelée à partager sa compétence de restructuration avec les autorités nationales lorsque la structure est défaillante314(*). En effet, le traitement des défaillances bancaires est depuis l'entrée en vigueur de la Convention de 1992 soumis non pas à un régime particulier, mais à un régime hybride qui emprunte au droit commun des entreprises en difficultés, admettant une intervention prépondérante de la COBAC dans la recherche des solutions de traitement des défaillances. L'intervention de l'autorité judiciaire est règlementée par l'AUPCAP en ses articles 25 et suivants. Il faut surtout relever ici la possibilité d'envisager le redressement par concordat judiciaire315(*). Il s'agit en réalité d'une convention passée entre le débiteur (l'établissement défaillant) et ses créanciers et soumise par la suite à l'homologation de la juridiction compétente. Elle permet à l'établissement défaillant de bénéficier non seulement des délais de grâce, mais aussi de toutes mesures juridiques, techniques et financières susceptibles de réaliser le rétablissement des conditions de fonctionnement normal316(*). Le concordat de redressement est exécuté sous la surveillance des contrôleurs désignés par la juridiction compétente ou du syndic317(*).

Toutefois, avant l'intervention de toute tierce personne, il faudrait faire confiance au plan de redressement interne qui envisage le plus souvent le renflouement des caisses de l'établissement en cause et dont la mise en oeuvre est contrôlée par la COBAC (paragraphe 1). L'appui de la COBAC doit être aussi nécessaire pour la réussite de l'opération de restructuration (paragraphe 2).

PARAGRAPHE 1 : LES MESURES DE RENFLOUEMENT DES CAISSES DES EMF DEFAILLANTS

Une fois l'équilibre financier de l'EMF ébranlé, la structure pour sa survie doit être recapitalisée. Les mesures d'accroissement des ressources financières, pour être efficaces, doivent être consolidées par d'autres actions, notamment la réduction des charges directes telles que les frais généraux de fonctionnement ainsi que la masse salariale318(*) et le recentrage de l'activité si nécessaire319(*). Quoi qu'il en soit, les mesures de renflouement des caisses passent par la redynamisation de la solidarité financière entre les EMF (A) et l'augmentation du capital social (B).

A. La redynamisation de la solidarité financière des EMF

La défaillance des EMF n'est pas une question isolée et son traitement doit prendre en compte les risques d'expansion du phénomène. Un EMF en difficulté est susceptible d'entrainer par une crise systémique les établissements en bonne santé dans les difficultés. D'où la nécessité d'une mobilisation du secteur pour le sauvetage de l'établissement défaillant. Cette mobilisation, si elle est effective, permet de sauvegarder sans doute la pérennité du secteur. Elle est perceptible dans la réglementation communautaire par la solidarité financière qui lie les EMF affiliés à un même réseau320(*). Mais cette solidarité semble être mise à mal à cause de la concurrence qui anime le secteur de la microfinance en Afrique Centrale. Il est donc urgent de redynamiser cette valeur et il revient aux réseaux (1) ainsi qu'aux organes financiers (2) de jouer pleinement leur rôle.

1. Le rôle de l'organe faitier du réseau

Le Règlement n° 01/02/CEMAC/UMAC/COBAC du 13 avril 2002 portant sur les conditions d'exercice et de contrôle de l'activité de microfinance dans la CEMAC fait obligation à l'organe faitier d'un réseau d'EMF d'organiser la solidarité financière entre les établissements affiliés en cas de défaillances321(*). En instituant cette solidarité entre les EMF, la COBAC souhaite contribuer à la recherche des solutions amiables pour le traitement efficace et sans grand incident des difficultés des EMF. Telle que consacrée, cette obligation à la charge des organes faitiers confère le droit à l'établissement défaillant d'exiger de l'organe faitier le bénéfice de la solidarité financière des autres membres du réseau. L'organe faitier se doit donc de tout faire pour que l'établissement défaillant bénéficie de ce droit. Si cet organe ne le fait pas, il se montrerait coupable d'un manquement à une obligation réglementaire et pourrait voir sa responsabilité engagée à cet effet. Par la consécration de la solidarité financière, le législateur CEMAC a voulu rendre plus efficace le traitement des défaillances financières des EMF.

Il revient donc aux organes faitiers d'élaborer un plan de refinancement de la structure défaillante par les autres membres du réseau. Ce plan doit nécessairement prendre en compte la taille de chaque structure dans la répartition des parts contributives. Cette mesure de discrimination positive est d'autant plus nécessaire qu'il faudrait au final préserver l'équilibre du réseau et une détermination forfaitaire des contributions est de nature à ébranler cet équilibre.

Pour que l'organe faitier joue pleinement son rôle, il faudrait que les EMF membres du réseau s'acquittent de leurs obligations envers lui322(*). Les membres du réseau doivent comprendre que les contributions sont le prix à payer pour bénéficier à court, à moyen ou à long terme des mesures de sauvetage de cet organisme en cas de défaillances.

Vu l'importance de la solidarité financière, il aurait été loisible pour le législateur communautaire de faire de l'affiliation à un réseau une obligation et non une faculté comme c'est malheureusement le cas. Mais, si les EMF affiliés à un réseau peuvent facilement bénéficier de la solidarité financière, qu'en est-il des EMF indépendants ?

En l'état actuel de la réglementation, seuls les établissements affiliés au réseau peuvent bénéficier de la solidarité financière en cas de défaillances. Même dans ce cas, le risque de crise systémique impose que les autres structures en bonne santé ne se désolidarisent pas du traitement des difficultés de l'établissement défaillant. Les réseaux de même que les autres structures indépendantes devraient se mobiliser pour voler au secours de l'établissement en crise. L'ANEMCAM pourrait relayer l'organe faitier dans ce cas pour organiser la solidarité financière au profit de l'établissement défaillant comme c'est d'ailleurs le cas dans le secteur bancaire323(*). Il est donc nécessaire pour tous les EMF sans exception d'adhérer à l'association professionnelle du secteur de la microfinance. Tel n'est malheureusement pas le cas en pratique car les EMF ne perçoivent pas le bien-fondé de cette association, reprochant très souvent pour le cas du Cameroun à l'ANEMCAM d'être absent sur le terrain. L'ANEMCAM doit s'efforcer de jouer pleinement son rôle dont l'importance est immense afin d'être plus acceptée par les praticiens. Elle doit plus que jamais orienter ses actions dans le sens d'impulser la solidarité entre les EMF.

Pour pérenniser la solidarité financière, les EMF sont condamnés à resserrer davantage leurs liens de collaboration et de coopération afin de minimiser les rivalités qui peuvent réduire le résultat des efforts escomptés pour le traitement efficace des défaillances.

En tout état de cause, l'établissement en défaillance attend le secours des autres établissements afin de trouver les ressources nécessaires pour restaurer son équilibre financier, ce qui dénote de la gravité de la crise qui en réalité n'a pas pu être résorbée par le système d'assurance interne324(*). Les organes financiers contribuent aussi par leur rôle au rétablissement de l'équilibre financier des EMF en difficultés.

2. Le rôle des organes financiers

Au sens de la réglementation sur les EMF, l'organe financier est un établissement de crédit créé par un réseau d'EMF, agréé par l'autorité monétaire sur avis conforme de la COBAC, chargé de recycler les excédents de ressources du réseau325(*). Il joue pour le réseau le même rôle que ce dernier joue pour les établissements qui y sont affiliés. Bien que la réglementation ne fasse pas obligation au réseau de créer un organe financier, le réseau gagnerait beaucoup à le faire326(*).

La timide création des organes financiers par les réseaux d'EMF pousse les EMF à recourir au parrainage des banques classiques. Cette démarche au demeurant ne s'oppose pas à la règlementation et laisse voir un regain d'intérêt pour le traitement curatif des défaillances des EMF. En effet, alors que la création des organes financiers est du seul apanage des réseaux d'EMF et le recours à lui limité aux établissements affiliés, le recours au parrainage des banques classiques peut être fait tant par les réseaux que par les établissements indépendants. L'intérêt pratique de cette technique est donc indéniable. Cet intérêt se prolonge dans le renforcement du traitement curatif des difficultés des EMF puisque le lien de parrainage permet à la banque de voler au secours de l'EMF en difficulté. L'intérêt est qu'aucune forme d'EMF n'est exclue de cette mesure qui se conçoit aisément pour les sociétés commerciales en difficultés327(*). S'il est donc constant que les banques classiques aident les sociétés commerciales à sortir de leurs crises financières, il faut admettre a fortiori qu'elles accordent dans la même lancée leur aide aux EMF en difficultés.

Mais en pratique, seuls les réseaux d'EMF et quelques structures indépendantes à grande échelle réussissent relativement dans leur relation avec les banques classiques328(*) qui en majorité reste encore conflictuelle329(*), ce qui est déplorable. Cet état de choses est du à la concurrence entre les deux secteurs, mais aussi au regard de discrédit que les banques jettent sur les EMF à cause de leur mode opératoire, d'où l'impérieuse nécessité pour le législateur communautaire de formaliser la relation banque/microfinance afin que le financement des EMF en difficultés par les banques ne reste plus un voeu pieux.

Au total, la solidarité financière qui se veut être un important outil de traitement des défaillances financières des EMF ne doit sa véritable valeur qu'à une redynamisation salutaire. Bien plus, il faudrait inviter les sociétaires à une recapitalisation de l'établissement en difficultés.

* 305 V. KALIEU Y., « Notes sous CJ/CEMAC, Arrêt n° 010/CJ/CEMAC/CJ/09 du 13 novembre 2009, Affaire SIELINOU Christophe et autres c/ Décision COBAC n°D-2008/52, Amity Bank Cameroon PLC, Autorité monétaire du Cameroun », in Juridis Périodique n° 83, Juillet-Août-Septembre 2010, p.35 et s.( v. surtout la note de bas de page n° 6).

* 306 Au Cameroun, ces dispositions sont contenues dans l'Ordonnance n°96/003 du 24 juin 1996 relatif à la restructuration des établissements de crédit.

* 307 KALIEU Y., Notes précitées, p. 36 et s.

* 308 Qui dispose : « lorsque les conditions normales d'exploitation d'un établissement de crédit ne sont plus réunies, à l'initiative de l'autorité monétaire ou à la demande d'un ou de plusieurs établissements de crédit, l'autorité monétaire peut, après avis conforme de la Commission Bancaire de l'Afrique Centrale, décider par arrêté de la restructuration dudit établissement  de crédit».

* 309 Cela empêche que la restructuration soit utilisée comme une mesure dilatoire.

* 310 V. MEDAMKAM TOCHE S. J., op. cit., p.44.

* 311 V. NYAMA J.-M., OHADA, Droit des Entreprises en Difficultés, CERFOD, éd. 2004, p. 368 et s. ; art. 5 al. 1er de l'Ordonnance de 1996 précitée.

* 312 V. NGUIHE KANTE P., op. cit., p. 101.

* 313 V. infra.

* 314 KALIEU Y., article précité sur le contrôle bancaire, p.460 et s.

* 315 Pour plus de développements sur la notion de concordat judiciaire, v. POUGOUE P. G., KALIEU Y., L'organisation des procédures collectives d'apurement du passif OHADA, collection Droit Uniforme Africain, PUA, 1999.

* 316 NGUIHE KANTE P., thèse précitée, p.140.

* 317 Art. 128 de l'AUPCA qui dispose : « La juridiction compétente peut désigner ou maintenir en fonction les contrôleurs pour surveiller l'exécution du concordat de redressement ou, à défaut de contrôleurs, le syndic. Les fonctions de contrôleurs sont gratuites, sauf si elles sont assurées par le syndic ; la rémunération du syndic en qualité de contrôleur est fixé par la juridiction compétente ».

* 318 La réduction de la masse salariale se fait par le biais de la diminution des salaires et des licenciements pour motif économique qui doit être fait selon les dispositions du Code de Travail et des conventions collectives.

* 319 KENMOGNE SIMO A., op. cit., p. 240 et s.

* 320 V. art 14 du Règlement n° 01/02/CEMAC/UMAC/COBAC du 13 avril 2002.

* 321 Art. 14 (9ème tiret) du Règlement précité.

* 322 V. art. 15 du Règlement du 13 avril 2002 précité.

* 323 L'association professionnelle des établissements de crédit organise la solidarité financière au profit de l'établissement de crédit défaillant. Cette solidarité financière ne souffre d'aucune entorse puisque l'adhésion d'un établissement de crédit à l'association professionnelle est obligatoire.

* 324 Il s'agit des politiques de provisionnement grâce aux différents fonds constitués.

* 325 V. art. 16 du Règlement n° 01/02/CEMAC/UMAC/COBAC du 16 avril 2002.

* 326 Au Cameroun, seul le réseau CamCULL a pu créer la Union Bank dont il détient 70% d'actions. Voir Rapport COBAC 2007.

* 327 V. MAGUEU KAMDEM J. D., Les banques et les entreprises en difficultés, op. cit., p.3 et s.

* 328 C'est par exemple le cas de COMECI, Crédit Mutuel et Financial House S.A. qui ont pu maîtriser leur partenariat avec la CBC, le cas aussi de CamCULL avec la UBC et de MC2 avec Afriland First Bank.

* 329 MBOUOMBOUO NDAM J. , op. cit. Cet auteur pense qu'en majorité, les banques acceptent le parrainage des EMF seulement pour leur argent.

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"Je ne pense pas qu'un écrivain puisse avoir de profondes assises s'il n'a pas ressenti avec amertume les injustices de la société ou il vit"   Thomas Lanier dit Tennessie Williams