Migrant malien blanchisseurs à Niamey: pratiques migratoires et réseaux d'insertion

5.2.2 Le coût de prestation de service

Le coût de prestation de service des blanchisseurs varie selon le type de prestation et d'un quartier à un autre. Ainsi, le nettoyage et le repassage d'un complet ou d'un drap varie de 100 francs à 250 francs CFA. Les coûts les moins chers se pratiquent autour des marchés de Katako, Petit Marché, Grand Marché et Wadata. Dans ces espaces les clients des blanchisseurs sont des commerçants ambulants, des transporteurs, des dockers. Or, avec ces clients les blanchisseurs disent qu'il n'y a pas de prix fixe, « on s'entend avec le client, en général, la lessive et le repassage d'un complet ou d'un drap est à 1 00 francs CFA ».^13(*)

La même prestation (lavage et repassage d'un complet) coûte 150 francs CFA dans les quartiers qui ne sont pas autour des marchés. C'est le prix qui est appliqué pour l'essentiel par les blanchisseurs. Mais on constate que dans les quartiers Plateaux et Recasement ce prix varie de 200 francs CFA à 250 francs CFA.

Le nettoyage et repassage avec gomme d'un boubou varient entre 400 et 500 francs CFA. Il coûte 400 francs autour des marchés et 500 francs CFA dans les autres quartiers de Niamey. Les prestations de services des blanchisseurs pour le lavage et repassage des grands boubous coûtent entre 1000 francs CFA-1500 francs CFA.

5.2.3 Revenu des blanchisseurs

L'analyse des coûts de prestation de services des blanchisseurs permet d'apprécier le revenu hebdomadaire des répondants. Pour l'essentiel, 43,4% des personnes interrogées affirment gagner entre 12 000 et 18 000francs CFA par semaine contre 11,6% qui gagnent plus de 24 000 francs CFA. Le revenu hebdomadaire moyen des blanchisseurs est de 15 235 francs. Cette somme n'est qu'une moyenne car le revenu minimum hebdomadaire d'un blanchisseur est de 12 000 francs CFA et le revenu maximum de 40 000francs. Dans l' ensemble le revenu mensuel d'un blanchisseur varie entre 60 000et 160 000francs CFA dans un pays où depuis 2013 le salaire minimum interprofessionnel garanti (SMIG) en vigueur est de 30 047 FCFA. C'est donc des ressources financières qui sont en jeu dans le secteur.

Il importe de noter que ce revenu est tout à fait théorique car 94,3% des répondants affirment accorder des crédits aux clients. Or, le paiement n'est pas toujours évident. En fait, le crédit n'est tout simplement que le résultat d'une familiarité entre le blanchisseur et son client. Surtout, que les résultats ont montré que la durée moyenne des blanchisseurs dans leur chambre est de 11 ans d'où une certaine sociabilité qui rentre dans le cadre de la fidélisation des clients.

5.2.4 Difficultés rencontrées par les blanchisseurs

Les difficultés que rencontrent les blanchisseurs dans le cadre de leur travail sont multiples et prennent plusieurs formes. On peut noter : le retard des clients pour chercher leurs vêtements après le linge et repassage. En effet, 50, 9% des répondants affirment que les clients mettent du temps pour récupérer leurs habits.

Pour mieux appréhender l'ampleur et la persistance de cette difficulté il importe d' analyser la répartition géographique du problème. Il est très ressenti par les blanchisseurs qui se trouvent autour des quartiers qui abritent les marchés (Grand Marché, Djamadgé, Katako, Wadata). Cela s'explique par le fait que les principaux clients des blanchisseurs dans ces quartiers sont des personnes flottantes et instables. Il s'agit de vendeurs ambulants, des dockers, des commerçants, des apprentis, des chauffeurs Or, ces personnes du fait de leur instabilité peuvent facilement mettre deux ou trois mois avant de venir chercher leurs habits. Les témoignages recueillis auprès des répondants font état des habits gardés pendants plus de 15 ans et qui attendent toujours d'être récupérés par leurs propriétaires. Dans cet espace géographique, il est difficile de trouver un blanchisseur qui n'a pas d'habits de clients depuis trois à quatre ans. La difficulté selon les répondants est qu'ils ne connaissent pas les familles des propriétaires de ces habits.

Dans les quartiers péri-urbains et périphériques la difficulté des blanchisseurs réside dans le retard que les clients accusent pour récupérer leurs habits. Ces clients en majorité fonctionnaires, ont des difficultés à partir de la 2eme moitié du mois à honorer leur engagement financier vis à vis des blanchisseurs.

L'autre difficulté c'est la cherté du sac de charbon. En effet, entre 2012-2015 le sac de charbon a presque doublé, passant de 7500 à 12000 francs CFA. Ce prix monte surtout pendant la saison des pluies où il peut atteindre 17 000 francs CFA en raison de sa rareté consécutive aux pluies fréquentes dans les pays d'importation (Ghana, RCI).

A ce problème s'ajoute la cherté de la location mais aussi les dommages que les blanchisseurs causent aux clients lors des repassages ou la perte des habits. Car, si un vêtement est endommagé le blanchisseur est tenu de dédommager le client. Or, ces dédommagements coutent chers car un seul complet peut coûter 50 000 francs CFA pour les basins.

5.3 Le réseau d'insertion des blanchisseurs maliens à Niamey

« En migration, un réseau est une structure sociale qui sert à l'accueil et à l'insertion

résidentielle et/ou socioprofessionnelle des migrants » (BA, 1995).Il s'agit, dans cette section, d'identifier les réseaux d'insertion professionnelle, résidentielle et sociale des migrants maliens blanchisseurs à Niamey.

* ¹³ Entretien réalisé le 20 Novembre 2014