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Les états et la construction de l'union africaine: le cas de la Libye et du Sénégal

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par Romaric TIOGO
Université de Dschang - Master II 0000
  

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B- La proposition des APD : contre la départementalisation économique de l'Union

Défenseur des choix économiques de l'Union, le Sénégal s'impose comme le protecteur du continent dans le cadre des négociations commerciales avec l'UE. Selon les accords de Cotonou de 2000, l'UE et les pays ACP devaient négocier des APE (Accords de Partenariat Economiques) visant à remplacer, au plus tard le 1er janvier 2008, le cadre de leurs relations commerciales en conformité avec celui de l'Organisation Mondiale du Commerce(OMC). La première phase des négociations a débuté entre 2003 et 2004 pour s'accélérer et s'intensifier en 2007 sous la pression de l'échéance de 2008245(*). Cette phase d'intensification a conduit à l'adoption de la « Déclaration de Lisbonne » (Portugal) le 9 décembre 2007 entre les 52 pays de l'UA plus le Maroc et les 27 pays de l'UE . Cette déclaration adoptait « une stratégie conjointe » dans le cadre d'un partenariat « d'égal à égal » à travers un plan d'action sur trois ans. Bien que les pays membres de l'UA aient réaffirmé leur volonté de continuer leurs relations avec l'Europe, ils se sont opposés à la nouvelle orientation que les APE entendent donner à ces relations commerciales. Au 1er janvier 2008, ces pays étaient censés ouvrir progressivement leurs frontières d'au moins 80% aux produits européens sur une période transitoire de 25 ans246(*), mettant ainsi fin au régime préférentiel autrefois accordé aux pays ACP. Ils devaient se conformer aux règles édictées par l'OMC. Or, depuis le début des négociations, il n'y a pas encore eu de suite probante. Cela est dû à la généralisation des négociations bilatérales de la part de l'UE qui préfère plutôt négocier avec les Etats et les CER qu'avec l'UA. Une erreur, estime Damien HELLY car, la commission de l'UE qui a divisé l'Afrique en zone géographique pensait qu'elle pourrait négocier ses nouvelles relations commerciales avec un groupe de pays homogène sur le modèle du groupe ACP247(*). Cette attitude de l'UE à vouloir compartimenter le continent a suscité l'opposition de certains chefs d'Etat africains dont le Président WADE qui déclare que, « nous sommes d'accords qu'il y ait des accords [...], toutefois ce que l'UE nous propose ne paraît pas acceptable. Elle ne veut pas discuter avec l'Union Africaine »248(*).

En effet, les fameux APE que veut imposer l'UE tendent à forcer une libéralisation des marchés africains en y instaurant entre autres la suppression des taxes d'exportation sur les matières premières, la suppression des droits de douane sur l'importation des produits européens et la libre concurrence. Or, en l'état actuel des choses, il existe un fossé entre le développement de l'Europe et celui de l'Afrique. Alors, libéraliser le marché conduit inévitablement à l'asphyxie des entreprises africaines qui ne sont pas loin du stade embryonnaire. La réplique du continent est venue du Sénégal qui a proposé les APD comme alternative aux APE. Les APD ont pour objectif de préserver l'économie des pays africains qui dépend foncièrement des extractions minières. Ils prônent la libéralisation sur certains produits uniquement. Il faut noter que lors du 3ème sommet UE-Afrique à Tripoli en novembre 2010, l'UE a proposé des « compensations financières » afin d'investir le marché Africain. Le Président WADE avait répliqué qu'on ne pouvait pas détruire une économie et la remplacer avec de l'argent. Ce serait dit-il « échanger ma jambe contre de l'argent »249(*).  Dans les rapports de forces qui structurent ces négociations, la Commission de l'UE avait intimé l'ordre de signer ces APE avant le 31 décembre 2007, sinon, « on allait voir ce qu'on allait voir »250(*). La même année, le responsable du commerce de l'UE avait fait preuve d'agressivité notoire envers l'Afrique du Sud et le Nigeria251(*). Ce qui a fait déceler trois types de comportements de la part des Etats de l'UA en novembre 2010 à Tripoli. On a pu ainsi constater une différenciation dans le régime de la relation commerciale252(*) : contrairement aux pays des Caraïbes et du Pacifique qui ont signé les APE, certains pays africains commercent avec l'Europe sous le régime d'APE intérimaires (SADC - Botswana, Lesotho, Swaziland -,ESA/EAC - Madagascar, Ile Maurice, Seychelles et Zimbabwe - Cameroun, Côte d'Ivoire), et les autres sous celui du système de préférences tarifaires généralisées (SPG), qui seront revues périodiquement ( Congo, Gabon, Ghana, Kenya, Namibie, Nigeria,) ou du régime « tout sauf les armes » (également couvert par le SPG) pour les pays les moins avancés(PMA)253(*) et qui consiste en un régime déjà avantageux libre de tarifs et de quotas .

D'un point de vue analytique, l'on peut constater que, conscients des avantages acquis dans les régimes préférentiels existants, les pays africains voient d'un mauvais oeil le nouveau cadre de relations commerciales proposées par l'UE, lesquelles risquent sans doute de leur faire perdre des recettes fiscales et autres revenus informels liés aux frontières. De plus, ces relations pourraient imposer des réformes aux gouvernements, destruction des économies et donc compromettre la stabilité socio-économique. Ceci conforte exactement le constat de P. MOREAU DEFARGES qui, évoquant la crise du multilatéralisme, trouve qu'il « ne serait qu'un instrument au service des puissances établies afin de ligoter économiquement les pays du Sud »254(*). Cela est d'autant évident que la nouvelle politique commerciale imposée par l'UE aux pays africains sous la houlette de la plus haute instance commerciale internationale permet de percevoir que « l'Organisation Mondiale du Commerce promouvrait dogmatiquement le libre-échange, sans prendre en considération les énormes inégalités de fait entre Etats »255(*). La politique libre-échangiste UA-UE fait face à plusieurs obstacles. L'avenir des relations commerciales serait visible sur le prisme d'un partenariat gagnant-gagnant. Pour cette raison, le cadre adéquat pour cette négociation ne serait ailleurs si ce n'est dans l'UA. Cependant, on peut remarquer que l'UE a pu profiter de la perte de vitesse de l'organisation panafricaine dont la force commune reste difficilement envisageable pour se tourner petit à petit vers le partenariat sous-régional établissant provisoirement un partenariat stratégique UE-SADC, UE-PMA, etc., et non plus UE-UA. Ce qui met actuellement en lumière une certaine faiblesse du multilatéralisme africain dans les négociations commerciales malgré les véhémentes réticences du Sénégal.

Toutes ces actions entreprises par ce pays ont pour finalité de construire ce qui est désormais convenu d'appeler « la maison commune » des Africains. A cet effet, il mobilise dans son discours d'autres moyens et méthodes propres.

* 245 Cf. DAMIEN Helly, L'Union Européenne et l'Afrique : les défis de la cohérence, Paris, Les Cahiers de Chaillot, Institut d'Etudes de Sécurité de l'Union Européenne, Novembre 2010, p. 46.

* 246 DIOP (D.), op. cit., p. 9.

* 247HELLY (D.), op. cit., p. 50,

* 248 Propos du président Wade tirés de l'interview réalisée par ROUAMBA Alexandre « A coeur ouvert avec Abdoulaye Wade », disponible sur http://www.rewmi.com/, consulté le 17 avril 2011.

* 249 Propos du président Wade tirés de l'interview réalisée par ROUAMBA (A.), disponible sur http://www.rewmi.com/, consulté le 17 avril 2011.

* 250Propos du président Wade tirés de l'interview réalisée par ROUAMBA (A.), précité.

* 251 Voir HELLY (D.), op. cit., p. 40.

* 252 Ibid, pp. 47-48.

* 253 Angola, Benin, Burkina Faso, Burundi, RD Congo, République Centrafricaine, Cap Vert, Djibouti, Erythrée, Ethiopie, Gambie, Guinée, Guinée Equatoriale, Guinée Bissau, Comores, Liberia, Lesotho, Madagascar, Malawi, Mali, Mauritanie, Mozambique, Niger, Ouganda, Rwanda, Sierra Leone, Sénégal, Somalie, Soudan, Tanzanie, Tchad, Togo, Zambie.

* 254 MOREAU DEFARGES (P.), op. cit, p. 579.

* 255 MOREAU DEFARGES (P.), op. cit, p. 582.

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"Il faudrait pour le bonheur des états que les philosophes fussent roi ou que les rois fussent philosophes"   Platon