Chapitre 1: Développement
théorique et conceptuel.
Le concept de co-crétaion s'est développé
au début des années 2000 avec les travaux de « Prahalad et
Ramaswamy ». Les auteurs se sont intéressés aux
consommateurs en tant qu'acteurs qui participent à la création,
qui échangent les informations et qui s'engagent dans des dialogues
explicites avec les entreprises (Prahalad et Ramaswamy 2000). Ces
dernières ne
se contentent plus d'une relation unilatérale
(entreprise client). Aujourd'hui et de plus en plus, les interactions entre
les consommateurs et les entreprises ou encore les interactions des
communautés des marques avec les marques sont au coeur des pratiques et
font l'objet de nombreux travaux de recherche.
Dans le cadre de ce premier chapitre, nous avons essayé
de passer en revue les différents aspects du concept de
co-création. Dans un premier temps, nous sommes remontés un peu
dans le temps pour mieux comprendre l'histoire du concept de son
émergence. Dans un second temps, nous avons tenté d'expliquer la
co-création et de la distinguer des notions qui lui sont proches.
Ensuite, nous avons traité les fromes de la co-création. Enfin,
nous discutons du rôle des communautés de marque dans la
création de valeur pour la marque.
I. Une approche historique : Genèse du concept de
Co-création
Le courant de recherche sur la participation paraît si
récent, et pourtant, le phénomène est beaucoup plus
ancien. Il remonte aux années 30 avec l'apparition du libre service. La
littérature sur le libre service est initiée dans les
années 50 avec les travaux de (Teitelman, 1951) « le terme
"participation" n'est alors pas mobilisé en tant que concept.»
(Florence Benoit-Moreau, Audrey Bonnemaizon, Sandrine Cadenat, Valérie
Renaudin, 2011).
Deux courants de recherche ont vu le jour. Le premier est
celui du libre service des années 50 qui a ensuite évolué
et a repris de l'intérêt dans les années 2000 avec le
développement des technologies de libre service "TSS : Technologies of
self-service". Le deuxième courant s'attache directement au concept de
"participation" et il a pris un essor important vers la fin des années
80 (Audrey Bonnemaizon, Florence Moreau, Sandrine Cadenat, Valérie
Renaudin, 2011) : ce sera l'objet de notre premier paragraphe. Suite à
cela, le courant de recherche sur la
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logique dominante des services de Vargo et Lush, (2004) et
dans lequel s'inscrit le concept de co-création a émergé
(ce sera l'objet du second paragraphe)
I.1. Focus sur la « participation » et
émergence de « la co-cération »
Afin de mieux cerner « la co-création », il
s'est révélé pertinent de se pencher sur la notion de
« participation » au sens large du terme, qui a paru bien avant dans
les travaux de recherche et dans la littérature.
a) Participation et marketing participatif
La participation désigne « l'action de participer
à quelque chose, une part prise à quelque chose » Larousse.
Il faut signaler également que les termes collaboration,
coopération et contribution sont des synonymes et sont employés
indistinctement, donc le marketing participatif ou encore le marketing
collaboratif a pour principe « de faire participer les consommateurs de
façon active à l'élaboration de la communication d'un
produit, au développement de nouveaux services ou encore à la
promotion de l'actualité d'une marque ». La participation prend
aussi deux formes : la participation comportementale ou physique par exemple
l'engagement dans une activité (Harris, Harris et Baron,
2001)2 et la participation mentale tel que le partage des
connaissances.
Vers la fin des années 70 et le début des
années 80, les chercheurs se sont penchés sur la notion de «
la participation ». Les premières recherches s'articulent autour de
la participation du client à la production du service ou encore la
co-production qui n'est qu'une forme de co-création. En effet, le client
ou le consommateur peut être considéré comme une partie
intégrante dans le processus de production de l'entreprise; c'est un
employé partiel dans les services de l'organisation et son rôle
participatif constitue un atout majeur pour l'entreprise (Peter K.Mills et
James H. Morris, 1986).
Les travaux de Von Hippel (1986) se sont concentrés sur
la participation des clients à la conception des produits «
co-conception ». Les travaux s'intéressent aux « leader users
» définis comme les utilisateurs actuels et pionniers qui expriment
des besoins assez forts, ces mêmes besoins peuvent se
généraliser sur le marché dans les mois ou les
années qui suivent. Les « leader users » peuvent donc aider
les managers dans la conception des produits. Leur
2 Audrey Bonnemaizon, Florence Moreau, Sandrine Cadenat,
Valérie Renaudin (2011) ; « "Au boulot, cher client !" Une approche
interprétative de la participation ordinaire du consommateur. »
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perception et leur préférence sont fort
importantes puisqu'elles permettent d'identifier les futurs besoins et donc
contribuer à l'émergence de nouveaux produits, processus ou
encore services (Von Hippel, 1986).
Les recherches de Von Hippel (1986, 1999, 2005) ont
souligné l'importance de ces « utilisateurs leaders » dans les
processus d'innovation et la définition des nouvelles offres. « La
démarche dite ainsi d'innovation collaborative consiste à
définir a priori les caractéristiques des utilisateurs leaders,
à sélectionner les individus sur la base de ces
caractéristiques et à les solliciter pour faire émerger de
nouveaux concepts de produits. »3
b) Emergence de la notion de
"co-création"
Vers la fin des années 90 et le début des
années 2000, les travaux de Ramaswamy et Prahalad, introduisent la
notion de co-création et tentent d'exposer l'importance d'une telle
technique, qui permet de créer de la valeur conjointement entre
l'entreprise et le consommateur. Ainsi, ils remettent en cause la dissociation
des rôles respectifs du client "consommateur" et de l'entreprise
"productrice". Jusqu'alors, le consommateur restait en dehors de l'entreprise.
Aujourd'hui, le client est considéré en tant qu'un membre actif,
capable de s'impliquer dans le processus de conception, de production,
d'innovation et de contribuer à la création de la valeur. Le
rôle du consommateur est en mutation et nombreux termes ont
été utilisés pour saisir les nouveaux consommateurs:
prosumers (producteur-consommateur), protagoniste, post-consommation ou encore
consom-acteurs. Tous ces termes convergent pour décrire des
consommateurs plus actifs et constructifs, ainsi que leurs expériences
sur le marché et les relations qu'ils entretiennent avec les
entreprises. (Cova, B et Dalli, D. 2009)
Le marché est vu comme un forum de co-création
d'expériences, il transforme la nature même de la relation
consommateur-entreprise. En effet, l'interaction est devenue source de
création de valeur, elle ne se fait plus uniquement à
l'intérieur de l'entreprise, elle se fait via des dialogues continus
entre les consommateurs et les entreprises. (Prahalad et Ramaswamy, 2004).
Armés de nouveaux outils (le web 2 et internet), parfois
mécontents de choix disponibles sur le marché, les consommateurs
ont aujourd'hui les moyens d'interagir avec les entreprises et de participer
à la co-création de valeur (Prahalad & Ramaswamy, 2004)
3 Bernard Cova ; Pascale Ezan (2008) ; « Le
consommateur-collaborateur : activités, attentes et impacts. Le cas du
passionné de Warhammer » ; Source : 13èmes Journées
de Recherche.
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Cette nouvelle vision du consommateur actif dont le rôle
va au-delà de la simple consommation des produits, s'inscrit dans le
paradigme de la logique dominante de service de Vargo et Lush. Une logique
basée sur les ressources intangibles, sur la co-création de
valeur ; une logique de service selon laquelle la prestation de services est
fondamentale pour les échanges économiques.
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