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Le consensus en droit électoral camerounais


par Rodrigue Stéphane Agathon Ondoa
Université de Douala - Master 2 2017
  

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PARAGRAPHE 2: LE RENFORCEMENT DE L'« ÉTAT-NATION »

Le chantier de l'état-nation jadis engagé par le constituant camerounais de 1996171 est-il en phase d'être renforcé avec la recherche d'un « compromis politique »172 autour des règles électorales ? 173 Il existe donc une volonté étatique en ce sens qui, au gré des conjectures politiques, essaye tant bien que mal d'assoir un fondement juridique de l'adhésion de la société à l'idéal politique commun174.

Pour cette raison, le droit électoral est conçu aujourd'hui en référence aux valeurs démocratiques pour aider à la construction du « vouloir-vivre » ensemble des peuples (B) vu la relative adhérence des fondements matriciels175 de l'état-nation (A).

A- La relative adhésion des fondements matriciels de l'état-nation

Les sociétés politiques modernes se sont construites suivant des considérations différentes selon qu'on soit à tel ou tel point du globe. Ainsi, la littérature constitutionnelle des États met en lumière qu'à la base de cette unité politique existe un certain « fond » qui permet de les singulariser. Toutefois, notre propos n'est pas de refaire, encore moins de réévaluer l'histoire constitutionnelle de ses sociétés politiques 176 . Cependant, il serait utile pour aborder la préoccupation qui est la nôtre notamment la relative adhérence des fondements matriciels de l'état-nation, de s'attarder sur les points saillants de la dialectique État et nation.

L'état-nation est un État177 qui coïncide avec une nation178, c'est-à-dire, le sentiment

170 SABI (Kassere Afo), Thèse, op.cit., p.464.

171 Dès la lecture du préambule de la loi constitutionnelle de 1996, allusion est fait que « le peuple camerounais (...) proclame solennellement qu'il constitue une seule et même Nation (...) ».

172 Expression empruntée à ETEKOU (Bédi Yves Stanislas), Thèse, op.cit., p.41.

173 La construction de l'état-nation dépend d'un ensemble d'instruments, et le droit électoral se positionne désormais comme un prétendant sérieux à cette entreprise.

174 ETEKOU (Bédi Yves Stanislas), Thèse, op.cit., p.42.

175 Terme de construction ; celui qui sert de base à la fixation des cotes en matière de constructions directes. Dictionnaire Larousse, op.cit., p.

176 Lire à ce sujet SANDJE (Rodrigue Ngando), Etat et nation dans le constitutionnalisme africain : Etude thématique, Th. Doctorat en Droit Public, Université de Bourgogne, 17 juin 2013, 671 pages.

177 L'Etat fait l'objet de définition plurielle. Nous en donnons quelles unes.

Le Littré. Le dictionnaire de référence de la langue française, Varese, Editions Garnier, 2004, p.519, « la forme du gouvernement d'un peuple, d'une nation (...) ».

Pierre AVRIL, Jean GICQUEL, Lexique droit constitutionnel, Paris, PUF, 8e édition, 2001, p.55, « organisation politique et juridique de la nation qu'elle personnifie. L'Etat est une personne morale caractérisée par la détention

Le consensus en droit électoral camerounais

d'appartenance à un groupe (nation) structuré autour d'une institution politique et administrative (État). Sa naissance n'est donc pas un fait hasardeur. Dans un premier cas de figure, l'État préexiste à la nation, et ensuite on cherche à développer un sentiment national 179 : c'est

l' « état-nation ». Dans une seconde illustration, des individus se reconnaissant d'une même nation et manifestent leur volonté de vivre ensemble en se dotant d'un État : on parlera alors de « nation-état ». De toutes les théories formulées autour de « l'état-nation » ou de la « nation-état » selon les cas, il est frappant de constater la récurrence de l'idée d' « appartenance à une communauté » où les individus auraient en partage certaines valeurs existentielles.

Une fois ceci dit, il convient à présent d'évaluer l'adhésion de ces valeurs à l'aune de l'évolution des sociétés humaines. En rappel, les développements qui ont précédés montre bien que l'état-nation est un construit. Il est comparable à ce que l'on pourrait qualifier de « phénomène de psychologie collective ». En ce sens, il est laissé à la merci du temps et peut donc s'élargir, s'approfondir et même se désagréger180. Si on prend les critères développés par la tradition allemande on se rend bien compte qu'à ce jour, des individus peuvent avoir en commun la langue, la race sans pour autant manifester l'envie de vivre ensemble : les français et les québécois partage la langue française et la race, cela n'a pas suscité en eux l'envie de se rattacher. Bien plus, aucune contrée n'a en commun une religion unique quand bien même certains constituants revendiquent l'islam comme religion de l'État. Au pire certaines sociétés se sont polarisées malgré ce fond qu'ils avaient en commun (cas de la Corée, du Soudan). Quid de la logique développée par la France? Là encore les idées émises se heurtent à la dure réalité du genre humain. De la sorte, le « vouloir-vivre ensemble » dépend de ce qui lie les hommes à un moment donné. Ce lien fondé parfois sur des considérations sociales, idéologiques, politiques, économiques ne manquent pas de s'évanouir tôt ou tard. Les exemples évoqués supra témoignent de la fragilité des valeurs qui sont censés constituer la base de l'état-nation. Au Cameroun la situation est encore plus complexe où l'État a bien du mal à créer et à maintenir durablement ce vouloir-vivre ensemble. On se souvient encore du fameux plébiscite qui permit à une partie du

de prérogatives de puissance publique et par sa soumission aux sujétions correspondantes. Sujet du droit international public caractérisé par un territoire, une population et l'existence d'un ordre juridique souverain. »

178 Selon MICHEL DE VILLIERS, Dictionnaire de droit constitutionnel, 2e éd., A. Colin, Paris, 1997, p.149, le terme nation avec « n » minuscule représente l'élément humain. Cité par SANDJE (Rodrigue Ngando), Thèse, op.cit., p.35. Tandis que nation avec « N » correspond davantage à l'Etat.

179 Ce fut le cas en France, avec « l'obligation d'utiliser le français dans tous les actes administratifs » imposée par FRANÇOIS Ier par l'ordonnance de Villers-Cotterêts en 1539 ; la création d'une école gratuite laïque et obligatoire par JULES FERRY à la fin du XIXe siècle ; la création des symboles nationaux.

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« Cameroun anglophone » de se rattacher définitivement au Nigéria voisin. C'est dire toute la fragilité et le dynamisme du vivre ensemble. Dans ces conditions, face à la peine des traditionnels fondements de l'état-nation comment ne pas envisager la piste du droit électoral dans la réanimation du vouloir vivre ensemble camerounais ?

De tout évidence, le droit électoral tel qu'envisagé aujourd'hui dans l'État, regorge une potentialité certaine mais attendue.

B À Les prouesses du droit électoral dans la construction de la nation

Le doit électoral camerounais n'a cessé de s'enrichir de la sève nourricière des valeurs internationales depuis la période dite des « transitions politiques ». Même s'il peine encore aujourd'hui à faire l'unanimité ou tout au moins à marquer un niveau d'accord satisfaisant au sein de la classe politique, un travail de fond est néanmoins en train d'être abattu. Ce travail qui se situe entre autres dans la logique de la recherche d'un compris autour des règles électorales a-t-il pris un tournant décisif au lendemain de la ratification de la CADEG. En tout cas, il nous semble que tous les regards sont désormais portés sur ce droit quant à la pertinence d'une plus-value dans le laborieux chantier de l'état-nation, tâche à laquelle les instruments traditionnellement admis ont, en toute vraisemblance, montré leur limite.

Pour autant que cet apport soit encore rangé au musée des probabilités eu égard à sa quête de légitimation, le droit électoral se donne pour ambition de célébrer à l'hôtel de la diversité l'unité de la nation et de la société politique. Au risque donc de muer cette attente à de vains espoirs, la hardiesse doctrinale préconise qu'un « consensus politique »181 soit formulé autour des règles du jeu politique, auquel cas il faudrait à l'inverse se remettre au hasard du « miracle ». De toute évidence selon ETEKOU, ce consensus impliquerait au stade ultime de la construction de la communauté, des choix politiques fondés sur l'adhésion et la faveur des acteurs politiques et civils de la société182. Le droit électoral qu'il s'agit donc d'analyser dans cette perspective serait un excellent instrument de cohésion sociale, à condition que ses promoteurs et notamment étatiques soient capable d'y ajouter une dose suffisante de légitimité acquise au terme d'une « négociation politique » avec les acteurs de l'opposition. Une telle

180 Réflexions opérées par JEAN RIVERO sur le « Consensus et légitimité », op.cit.

181 Lire ETEKOU (Bédi Yves Stanislas), Thèse, op.cit.

182 ETEKOU (Bédi Yves Stanislas), Thèse, op.cit., p.47.

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entreprise s'avère impérieuse pour faire du droit électoral la lanterne du vouloir vivre ensemble dans une société camerounaise étrillée par des divergences multiformes. Au mieux, ce droit, s'il est produit dans des conditions propres à promouvoir les valeurs de la société politique dans toute sa diversité, pourra sans difficulté transcender les clivages idéologiques qui minent l'unité nationale.

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CONCLUSION CHAPITRE 2

Nous avons entrepris dans ce chapitre qui s'achève de réfléchir sur la confirmation significative dont le consensus fait l'objet en droit électoral.

Cette quête a mis de mettre en évidence des éléments juridiques caractéristiques, lesquels attestent de l'inscription du consensus au boulevard du processus électoral. De ce fait, si le consensus de trouve désormais justifier sur le terrain du droit électoral, sa reconnaissance comme fondement de ce droit particulier révèle la volonté du constituant camerounais à redéfinir les contours de la politique électorale. Le droit électoral consensuel, du moins envisagé d'un point de vue théorique tend à se positionner alors comme un instrument incontournable dans l'édification et la consolidation de la démocratie en générale et électorale en particulier. Aussi se propose-t-il dans une perspective plus grande de réanimer le vouloir-vivre ensemble des peuples qui se trouve particulièrement en sursis au Cameroun.

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CONCLUSION PREMIÈRE PARTIE

Au terme de la réflexion opérer dans cette partie qui portait sur la construction certaine du consensus en droit électoral camerounais, nous avons entrepris restituer dans l'ordre théorique la noblesse d'une idée qui, tant bien que mal s'est imposée comme une exigence normative dans la construction démocratique d'une société politique enquête de légitimité. La Charte africaine de la démocratie, des élections et de la gouvernance qui a permis de planter ce décor devait définitivement engager les États d'Afrique noire francophone et particulièrement ceux réunis au sein de l'UA dans le chantier d'une démocratie ancrée des valeurs de l'international.

Le Cameroun, site principal à partir duquel s'est structuré notre analyse nous a permis de faire valoir dans un premier temps que l'émergence de l'idée de consensus dans la matière électorale a été rendue possible à la conjugaison des dynamiques externe et interne. Dans cette trajectoire, ces dynamiques souterraines devaient-elles préparer en seconde articulation la confirmation significative du consensus dans le champ normatif des élections. Aussi a-t-il fallu sur ce dernier point mettre en lumière des marques distinctives pour lever le doute sur la pertinence juridique de cette valeur qui se trouve désormais célébré au plus haut niveau de l'architecture juridique de l'État.

Toutefois, si l'effectivité du consensus se conçoit aisément sous l'angle théorique, sa mise en oeuvre révèle d'étranges résistances. C'est que le consensus, valeur constitutionnelle confirmée, reste encore confinée dans les belles lettres de la constitution. De la sorte lorsqu'il ne tombe pas dans l'oubli d'une attente messianique du décret d'application, il est tout simplement laissé à la merci des mécanismes complexes qui, en dernière analyse le range définitivement au rayon « des voeux pieux ».

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PARTIE II :

LA MISE EN OEUVRE INCERTAINE DU CONSENSUS EN
DROIT ÉLECTORAL

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Dans un ordre électoral qui se réclame démocratique, l'élaboration du cadre juridique183 des élections doit être une préoccupation majeure pour une Nation en pleine construction. Il est donc dans l'intérêt des acteurs politiques actants ou non de s'assurer que les règles encadrant la compétition électorale, ainsi que la façon dont elles sont appliquées, garantissent que de véritables élections démocratiques aient lieu184. Dès lors il se forme au sein de ces sociétés politiques une certaine sacralisation de la fonction du droit électoral, qu'on a d'ailleurs vite fait de considérer comme un ensemble normatif différent des autres185, qui plus est, à lui seul une constitution pour reprendre ROYER-COLLARD186.

Vu le contexte de construction démocratique et de renforcement du lien social auquel le Cameroun et plus globalement l'Afrique noire s'emploi depuis quelque temps, on peut être surpris de la méthodologie juridique adoptée pour assurer l'effectivité du consensus dans le processus de création des règles électorales. En effet, l'analyse des mécanismes usités pour produire le droit électoral révèle certaines indiscrétions à la fois techniques et politiciennes qui entravent considérablement le cours de la mise en oeuvre du consensus. La combinaison de ces deux paramètres permet-elle de comprendre toute l'ambiguïté du mécanisme d'implémentation du consensus (Chapitre1), laquelle occasionne une incertitude sur sa continuité (Chapitre 2).

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183 Selon le RESEAU DU SAVOIR ELECTORAL ACE, le terme cadre juridique pris sous l'angle électoral s'entend à un double sens large et technique. Respectivement, il réfère d'une part à l'« ensemble des règles constitutionnelles, législatives, réglementaires, jurisprudentielles et managériales qui, ensemble, établissent les droits relatifs au vote utilisés par les citoyens pour l'élection des représentants ». Et comme « un groupement de techniques procédurales », d'autre part. P.8.

184 RESEAU DU SAVOIR ELECTORAL ACE, Cadre juridique, op.cit., p.8.

185 OLINGA (Alain Didier), « Politique et droit électoral au Cameroun (...) », op.cit., p.37.

186 Cité par OLINGA (Alain Didier), « Politique et droit électoral au Cameroun (...) », op.cit., Ibid.

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"Entre deux mots il faut choisir le moindre"   Paul Valery