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Le consensus en droit électoral camerounais


par Rodrigue Stéphane Agathon Ondoa
Université de Douala - Master 2 2017
  

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B- L'approche complémentaire : l'herméneutique

Le mot « herméneutique » vient du grec « hermeunèo » c'est-à-dire interpréter. C'est la partie de la critique consistant à déchiffrer, traduire et à interpréter les textes. Dans De l'art de philosopher avec sobriété et précision, ANTOINE GUILLAUME AMO, philosophe de la côte de l'Or (actuelle Ghana), indiquait en 1738 que « l'art d'interpréter ou herméneutique est une attitude de l'intelligence théorique qui, par des règles logiques et des moyens appropriés mis en oeuvre, dégage le sens d'un texte assez spécial »48. Pour cet auteur, toutes les choses sont déterminées selon une intention et une fin. Mais dans la mesure où celles-ci sont souvent cachées, il incombera alors au chercheur d'adopter une attitude féconde pour les révéler.

Dans notre étude, l'approche de l'herméneutique déployée dans un contexte marqué à la fois par le rejet des règles électorales et le relâchement du lien social, permettra de mettre en lumière les fins poursuivies par les autorités étatiques lorsqu'elles envisagent un « consensus en droit électoral » : D'un point de vue « spécial », c'est-à-dire, ce qui se rapporte à un dessein déterminé, le consensus vise à la fois la légitimation du droit électoral et la modulation des antagonismes politiques. D'un point de vue « universel », c'est-à-dire, ce qui est commun à tous, le consensus en droit électoral vise la construction de la démocratie. Le philosophe français JEAN PAUL SARTRE49 n'avait-il donc pas vu juste lorsqu'il affirmait dans son Etre et néant

48 MENDA (Azombo) et KOSSO (Enobo), Les philosophes africains par les textes, Editions Fernand Nathan, 1978, p.14.

49 Cité par MBALLA OWONA (Robert), Les délais de distance en contentieux administratif camerounais , Mémoire de DEA, Droit Public Interne, Université de Douala, 2003-2004, p.

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que les choses sont conçues et destinées à une fin précise avant d'être matérialisées. En tout cas, il faut reconnaitre que l'herméneutique nous a permis de nous rendre compte avec FREEMAN que « le droit n'est pas un ensemble normatif de règles simplement imposé à la société, mais une part intégrale de cette société, qui plonge des racines profondes dans les habitudes sociales et économiques et les attitudes de ses membres passés et présent »50. Celui-ci autrement « se conforme probablement de manière large et générale aux schèmes de comportements qui sont largement approuvés, ou du moins acceptés, dans cette société »51.

Partant de ces considérations, nous avons effectué des enquêtes empiriques sur les contours du consensus avec pour instrument de collecte d'informations « l'observation documentaire » constituée de l'analyse des ouvrages, des textes en vigueur, de la production doctrinale et des rapports relatifs aux pratiques électorales. Leur regroupement a donc soutenu la réalisation de cette étude. Loin de nous de dire que cela s'est fait sans difficulté. Il en est ainsi parce que « la notion de consensus est assez difficile à saisir par les instruments d'analyse les plus raffinés de la science juridique et politique, c'est qu'elle se situe à un niveau supérieur ou inférieur, comme on voudra, à celui de l'organisation constitutionnelle et de la vie politique »52. En tout état de cause, « selon que le consensus est un bien dont une société est consciente de jouir, un idéal dont elle rêve ou un équilibre instable qu'elle cherche à atteindre ou à conserver, il prend la forme d'un principe permanent d'organisation sociale, d'une expression culturelle de l'imaginaire collectif ou d'une limite de tolérance des tensions sociales »53. Si l'on admet aujourd'hui que le consensus politique autour des règles électorales est nécessaire pour une société comme la nôtre, cette idée novatrice n'aura véritablement revêtu de signification juridique qu'au prix d'une combinaison de dynamiques dont les incidences ont été certaines. Notre étude a donc pour ambition de montrer que si, le consensus a fait l'objet d'une construction juridique certaine (Partie I), sa mise en oeuvre reste toutefois incertaine au regard des méthodes usitées (Partie II).

50 FREEMAN, 2001, cité par Baudouin DUPRET, op.cit., p.7.

51 Ibidem.

52 RIGAUD (Jacques), op.cit., p.10.

53 Ibid.

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PREMIÈRE PARTIE :

LA CONSTRUCTION CERTAINE DU CONSENSUS EN DROIT ÉLECTORAL

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L'observation des dynamiques électorales sur le jeune continent montre que l'Afrique noire francophone particulièrement est en pleine ébullition. En effet la question du consensus politique autour des règles du jeu électoral n'a cessé d'alimenter le débat politique tant sur la scène nationale qu'internationale. Elle est devenue aujourd'hui une préoccupation majeure pour les États enclins de construction démocratique. À la lumière de ces dynamiques, le constat qui se dégage après tant d'années d'efforts du moins depuis la réactivation du processus démocratique en 1990, est que la proclamation normative du consensus est le résultat d'une lente et ingénieuse évolution juridique qui remonte bien au-delà de 1990. Par construction, il faut entendre au sens du Dictionnaire Larousse l'« action de construire, de disposer les parties d'une bâtisse ». En rapport avec notre étude, la construction du consensus est relative à la manière dont l'État a, à travers l'agencement des textes et d'autres mouvements juridiques, procédé à l'édification du consensus dans la matière électorale.

Perçu comme un réengagement de la société démocratique, la construction juridique du consensus dans le domaine des élections peut être assimilée à « une volonté de retour au constitutionnalisme définissant et encadrant les nouvelles règles du jeu politique » 54 . Son investissement en droit électoral s'est donc progressivement affirmé (chapitre1) pour finalement s'imposer dans le système de régulation des élections (chapitre2).

54 ETEKOU (Bédi Yves Stanislas), L'alternance démocratique dans les Etats d'Afrique francophone, Thèse, Paris-Est/Cocody-Abidjan, 18 décembre 2013, p.8.

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CHAPITRE 1 :

L'AFFIRMATION PROGRESSIVE DU CONSENSUS DANS LE
CADRE LÉGAL DES ÉLECTIONS

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La doctrine a presque toujours observée une attention particulière sur le déroulement des opérations électorales, en isolant très souvent la question de l'adhésion des règles du jeu. Très peu de recherches y sont d'ailleurs consacrées. Ce parent pauvre de la littérature doctrinale se trouve encore plus dépouillé lorsque les textes cadres tel la CADEG55 qui, en consacrant les principes de ce qu'elle appelle élection démocratique56, n'a réservée qu'une infime place à celui devant régir l'établissement des règles électorales à savoir le consensus.

Or nul ne doute que pour qu'une élection se déroule dans un climat apaisé avec toutes les qualités démocratiques qu'on a pu dégager, il est nécessaire que les acteurs politiques s'accordent au minimum sur les règles du jeu. Dans la mesure où il n'est plus une surprise pour personne de savoir qu'à ce jour, les crises électorales enregistrées sur le continent africain ont pour l'essentiel une origine bien plus profonde que la simple contestation des résultats, il devient dès lors impératif de se pencher sur la question du consensus qui de toute évidence a su s'imposer sur le terrain de la politique électorale. Et pour preuve, l'analyse de l'émergence du consensus en droit électoral camerounais montre bien que l'idée même de consensus, intimement liée aux « luttes souterraines » qui ont émaillées le processus électoral camerounais, est le fruit d'une construction juridique dont les dynamiques tant bien internes (Section 2) qu'externes (Section1) ont été déterminantes.

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55 CHARTE AFRICAINE DE LA DEMOCRATIE, DES ELECTIONS ET DE LA GOUVERNANCE.

56 Le chapitre VII de la C.A.D.E.G relatif à l'élection démocratique dispose en son article 17 que « les Etats parties réaffirment leur engagement à tenir régulièrement des élections transparentes, libres et justes conformément à la Déclaration de l'Union sur les principes régissant les élections démocratiques en Afrique ».

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"Là où il n'y a pas d'espoir, nous devons l'inventer"   Albert Camus