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Patrimoine culturel Bandjoun. Destruction et stratégies de protection (1904-2005).


par Jacques Simo Djilo
Université de Dschang Cameroun - Master 2 2018
  

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3.1.4 L'administration coloniale

Le rapprochement que nous faisons entre la destruction du patrimoine culturel Bandjoun et l'administration coloniale est très clair. Cet argument a pour ambition de prouver que l'administration coloniale précisément française a joué un rôle fondamental dans la rupture de l'ordre successoral considéré comme legs culturel de Bandjoun. A Bandjoun comme dans les autres monarchies Bamiléké, la transmission du pouvoir se faisait selon la loi de l'hérédité c'est-à-dire de père en fils. Seulement pour le cas de Bandjoun, l'administration coloniale française s'ingéra de manière significative. Louis Perrois et Notué nous renseigne ceci : «  Fotso II avant de mourir avait choisi comme successeur le prince Bopda formé à Bali. La désignation de Bopda pro-allemand et protestant n'arrangea guère les autorités françaises. Elles avaient pour favori Kamga Manewa , très populaire et formé à l'école française de Bana Catholique et interprète . Les notables respectant les souhaits de feu Fotso II avaient déjà interné Bopda comme héritier au la'a kamquand les autorités coloniales intervinrent, envahirent l'enclos rituel, chassèrent Bopda et proclamèrent Kamga comme chef légitime de Bandjoun ». 169(*) Cette situation plongea le pays Bandjoun dans une guerre civile opposant le clan de Bopda à celui de Kamga Manewa qui portera le titre de Kamga II.

3.1.5 La guerre d'indépendance au Cameroun

De 1955 à 1962, Bandjoun et le pays Bamiléké furent ravagés par une guerre provoquée par des luttes politiques lors de l'accession du Cameroun à l'indépendance. Des chefferies dans le pays bamiléké furent brûlées et des objets détruits ou pillés. Pour le cas spécifique de Bandjoun, faisant un rapprochement avec l'incendie de 2005, Jean Paul Notué affirme : « L'incendie du même quartier royal en 1959 fut six fois plus dévastateur (la grande case nemo de l'époque et des dizaines de maisons en plus d'objets furent consumés) plus meurtrier (plusieurs morts) et dans un contexte plus explosif (guerre civile et d'indépendance au Cameroun et surtout en pays bamiléké où certaines sources avancent plus de 400 000 morts »170(*).

3.1.6 Le modernisme

Avec l'avènement de la mondialisation et ses exigences, le patrimoine culturel Bandjoun se trouve pratiquement condamné à disparaitre. A titre illustratif :

La mondialisation nous impose l'urbanisation c'est-à-dire le processus de création et de développement des villes. Ce processus doublé de la croissance démographique ne peut s'accomplir que par la mise en place des infrastructures routières, des logements et biens d'autres. Ces réalisations obligent la destruction d'une bonne partie du couvert végétal qui constitue pourtant le lieu par excellence de production des oeuvres d'arts. A titre d'exemple, le site d'implantation actuel des unités administratives de Bandjoun (sous-préfecture, la préfecture et la mairie) était un lieu autrement sacré car c'est là que le fondateur de la chefferie Bandjoun était décédé. 171(*)

Par ailleurs, l'un des chariots transporté par la mondialisation est la concurrence. Cette concurrence qui s'opère également dans le domaine patrimonial et plus spécifiquement dans la dimension de la sculpture, de la forge et même du mobilier. En effet, face à la ruée des produits importés, les productions artisanales locales sont phagocytées. L'usage de la paille, du bois, du bambou ont cédé place au ciment, aux tôles... Ainsi, il en résulte de fois une architecture mixte. A ce sujet, l'artiste Emmanuel Tchoupo spécialiste du bambou nous rapporte ceci. «  Actuellement combien sont ceux qui s'offrent des matelas en herbe ? Construisent des maisons avec des toitures en paille ? » 172(*)

Photo 30: Entrée de la chefferie Bandjoun après l'incendie 2005

Source : https://www.google.com/search?q=musée+de+bandjoun

Ces deux photographies présentent l'entrée principale de la chefferie Bandjoun au lendemain de l'incendie qui avait ravagé la chefferie en 2005. On peut remarquer l'ultra domination des matériaux modernes. Alors, on comprend que le patrimoine culturel rapidement tente de survivre aux assauts que lui impose le rythme de la modernité. C'est pourquoi en paraphrasant Sylvain Djache Nzefa on peut dire que les chefferies traditionnelles Bamiléké en général et Bandjoun en particulier en voulant l'adaptation au rythme croissant de la mondialisation ont fini par perdre la substance culturelle originale qui faisait leur particularité et leur spécificité173(*).

En outre, la révolution des TIC, est devenue le principal mobile de recul du patrimoine culturel Bandjoun tant pour le patrimoine matériel que pour l'immatériel. L'avènement des téléphones, des radios, des télévisions et surtout d'internet a primé sur l'utilisation des moyens de communication traditionnel qui prévalaient à la chefferie Bandjoun. Aussi ces TIC ont importé et ont facilité l'intégration de certaines valeurs occidentales à Bandjoun qui sont diamétralement opposées aux valeurs du royaume telles : l'usage faible de la langue nationale, l'adultère, la soumission aux dérives de la mode... A ce niveau on peut comprendre pourquoi plusieurs artistes musiciens originaires du village Bandjoun dans leurs productions musicales insistent sur un retour aux valeurs culturelles174(*).

* 169 Perrois, L et Notué J-P., Rois et Sculpteurs de l'Ouest Cameroun : la panthère et la mygale, ... p.43.

* 170Notue J.P., « Le royaume Bandjoun (Leng Djo ou Gung Djo) : Histoire, contexte de la création artistique, arts et traditions dynamiques » ..., p.56.

* 171Tchoutezo, P., les royaumes Bamiléké des origines à la mondialisation, ..., p.178.

* 172 Entretien avec Emmanuel Thoupo à Bafoussam, le 04-04-2019.

* 173 Djache Nzefa, S., les chefferies Bamiléké dans l'enfer du Modernisme..., P.54.

* 174 Parlant de ces artistes les plus célèbres sont Tagne Guy Rostand auteur compositeur de plusieurs albums sous forme de proverbes et de conseils. Les titres sont d'ailleurs très évocateurs. Exemple. Douon (le paresseux) ,po gouo'ole (les enfants d'aujourd'hui), mnam (avarisme). Un autre est Talla André Marie qui revient sur les valeurs telles que nomtema (le fo ou roi), pe le be'e koungne (si nous nous aimions).

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"Là où il n'y a pas d'espoir, nous devons l'inventer"   Albert Camus