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La problématique de l'efficacité de l'aide internationale en Haà¯ti pour la période allant de 1995 à  2018


par Elga EXIL
Université Quisqueya - Licence en Sciences Economique 2022
  

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INTRODUCTION

L'aide étrangère trouve principalement sa justification dans une hypothèse formulée par l'économiste américain Jeffrey Sachs, selon laquelle les pays pauvres sont pris dans une trappe à pauvreté. Cette trappe est expliquée par l'inadéquation d'agrégats macroéconomiques tels que le niveau de l'épargne globale et les rendements croissants des investissements. A cette inadéquation qui freine la capacité de ces pays à financer des projets porteurs de croissance, l'aide internationale apparaît comme une alternative incontournable. Dans ce contexte, la communauté de l'aide est inondée de plans, de stratégies et de cadres de travail visant à rencontrer les réels besoins du monde des pauvres. En transférant des modèles de développement, accompagnés de moyens humains, financiers et matériels, Easterly (2006) constate que depuis les années cinquante, les pays riches ont dépensé 2300 milliards de dollars US pour l'aide au développement sans pour autant éradiquer la pauvreté. Mais, on pourrait se demander si ce montant dépensé est insuffisant pour éradiquer la pauvreté ou c'est la façon dont l'allocation se fait qui pose problème. L'échec de ces différentes tentatives va mettre en exergue la limite de la théorie purement économique du développement.

Les experts en développement s'accordent pour dire que la croissance ne dépend pas seulement de l'investissement, de la consommation, de la technologie, du capital humain et autres mais aussi de l'infrastructure institutionnelle. Les travaux de North (1990, 1995), Alesina et Perotti (1996), Acemoglu et al. (2004) soutiennent que les institutions, qui d'après la définition généralement acceptée (celle de Douglas North), sont les règles du jeu, plus formellement les contraintes humaines conçues qui façonnent les activités économiques d'une nation seraient une condition nécessaire aux succès économiques des nations. Dans le cadre des institutions formelles, on les regroupe en institutions économiques et institutions politiques. Celles qui sont économiques organisent les interactions économiques et celles qui sont politiques déterminent les contraintes et les incitations des acteurs dans la sphère politique. L'absence totale ou le dysfonctionnement des institutions entrave certainement le processus de développement de tout pays même avec le budget des Etats-Unis.

Comme le prétendait les partisans de l'aide, elle n'a pas eu les mêmes effets dans tous les pays. Parmi les pays aidés, rares sont ceux qui ont su profiter de l'aide pour renouer avec la croissance et faire un saut vers le développement.En ce sens, Lemay-Hébert et Pallage (2012, p.1), affirment que : « L'aide internationale peut être un moteur formidable de développement. Mais elle peut aussi en être le plus grand frein ». Dans certains pays, au lieu de déclencher la croissance, elle entraîne la dépendance. C'est ainsi que DambisaMoyo (2009) déclare que l'aide internationale provoque plus d'effets néfastes qu'autre chose pour les pays pauvres en général. Des pays comme le Botswana, la Corée, l'Indonésie, le Taiwan et, plus récemment, la Mozambique et l'Ouganda ont tiré un excellent parti de l'aide reçue.  Dans ces pays, l'aide stimule la croissance et leur permet d'afficher de meilleures performances économiques. Par contre, des pays comme la Zambie, la République démocratique du Congo, la Papouasie-Nouvelle-Guinée et particulièrement Haïti, qui ont bénéficié des montants d'aide importants, ont des bilans désastreux en matière de croissance économique (Perkins, Radelet et Lindauer, 2008). Mais, pourquoi ce constat d'échec dans ces pays et plus particulièrement en Haïti ?

Haïti demeure un des pays au monde recevant le plus d'attention de la communauté internationale, avec un bond manifeste de l'aide publique au développement surtout après le tremblement de terre de 2010. L'aide publique au développement en Haïti est passée de 167 millions de dollars en 1990 à 1.3 milliard en 2012, avec un pic à près de 3 milliards de dollars après le séisme de 2010. En 2011, l'Aide publique au développement (APD) d'Haïti a représenté 16% du PIB (Rapport OMD Haïti, 2013). Selon Doura (2003), entre 1994 et 2001,Haïti demeure le pays qui reçoit le plus d'aide par habitant malgré la diminution de l'aide bilatérale et multilatérale. La moyenne de l'aide annuelle par habitant en Haïti était de 57.5 dollars (toute forme d'aide, y compris l'aide alimentaire), tandis que les autres pays de la périphérie capitaliste ont reçu en moyenne 12 dollars par habitant (WDID, cité dans Doura, 2003). Toutefois, de nombreux défis demeurent, et les progrès enregistrés dans certains secteurs restent trop faibles pour avoir un impact significatif sur le développement et la réduction de la pauvreté.

La communauté internationale est présente en Haïti dans toutes les sphères du développement depuis plus d'un demi-siècle. Il est surprenant de constater que malgré l'injection de plusieurs millions de dollars d'aide dans l'économie haïtienne, on assiste à une dégradation accrue de la qualité de vie des Haïtiens qui rend le pays de plus en plus dépendant. Un rapport de la Banque mondiale (2014) mentionne que 6.3 millions d'Haïtiens ne sont pas en mesure de satisfaire leurs besoins essentiels, donc vivants sous le seuil de pauvreté et 2.5 millions vivent en dessous du seuil d'extrême pauvreté. En termes relatifs, le pays comptait 58.5% de pauvres et 23.8% d'extrême pauvres. Selon le rapport sur le développement humain (PNUD, 2015), sur une échelle de 0 à 1, Haïti accuse un score de 0.493, ce qui la place à la 163e place sur 188 pays. Une manière claire d'expliquer que le niveau d'éducation, le revenu par habitant et l'espérance de vie à la naissance dans le pays est très faible. Ce qui nous laisse comprendre qu'en Haïti, la multiplication des projets de coopération et l`affluence de l'aide internationale depuis les dernières décennies ont entraîné peu ou pas de changements notables dans les conditions socio-économiques des destinataires officiellement définis (Paul, 2012).

En effet, certains secteurs accusent un retard très important. Dans tous les pays de la CARICOM, Haïti est celui qui accuse le plus grand retard dans la qualité des routes, des infrastructures portuaires et aériennes (Rapport OMD Haïti, 2013). En raison d'infrastructures maritimes inadaptées, Haïti ne peut exploiter pleinement l'accord établi entre les pays de la CARICOM. Tous ceux-ci expliquent que l'assistance bilatérale et multilatérale n'a pas permis à la situation sociale et économique du pays de s'améliorer.

L'APD à Haïti fait face à de nombreux enjeux sociaux, politiques, économiques et environnementaux. Sans être exhaustif, on peut citer : une instabilité socio-politique récurrente, la carence institutionnelle, la corruption, la mauvaise gouvernance économique et la vulnérabilité face aux catastrophes naturelles. Est-ce là les principaux obstacles à son efficacité ?

Un rapport du MPCE paru en avril 2011 mentionne que l'APD représente en moyenne 60% du budget de l'état Haïtien et plus de 85% de ses programmes d'investissement public. En ce sens, (Deshommes, 2014) relate quel'état de cette économie fait que l'on ne peut se passer de l'aide internationale. Vu que les problèmes institutionnels et la corruption empêchent le pays de recueillir les ressources internes nécessaires, l'aide est donc un enjeu crucialcar elle semble être notre seul et unique recours pour trouver les ressources nécessaires lui permettant de financer certains projets d'investissement. Cependant pour certains, l'aide à Haïti est un échec flagrant. Pour Ricardo Seitenfus (2010), Haïti est la preuve de l'échec de l'aide internationale1(*). Ces affirmations semblent être fondées et validées par les indicateurs socio-économiques. En tant que futurs économistes, il nous paraît intéressant d'identifier les principaux obstacles qui empêchent à l'aide d'atteindre ses objectifs. Constatant le contraste existant, nous sommes amenés à réfléchir sur l'aide publique au développement en Haïti. Ainsi, notre thématique de recherche est intitulée : « la problématique de l'efficacité de l'aide internationale en Haïti pour la période allant de 1995 à 2018. »

? Question de recherche

Il est évident que le poids de l'APD dans l'économie haïtienne est assez considérable. Compte tenu de la contribution substantielle de celle-ci et les piètres performances de l'économie du pays, il nous est important de se questionner sur les causes qui empêchent à l'APD de donner de meilleurs résultats en termes d'efficacité. Ainsi notre question de recherche est formulée comme suit : Pourquoi l'aide octroyée à Haïti n'arrive pas à la mettre sur la voie de la croissance ?

? Hypothèse du travail

Avec un score moyen de 19 pour les dix dernières années, le pays s'installe de façon quasi permanente dans la zone des plus corrompus du monde. On comprend vite que depuis bon nombre d'années, l'aide est fournie dans le cadre d'un système corrompu. Ainsi, les ressources nationales pour le développement et l'aide elle-même en sont affectées. Là où règne la corruption, le gaspillage et la mauvaise utilisation des ressources sont toujours présents. La corruption peut compromettre de manière significative les résultats des programmes de développement. Au sein des pays bénéficiaires, la corruption peut gravement nuire à la réalisation des résultats escomptés, de manière directe, en détournant un pourcentage de l'aide des objectifs et des bénéficiaires initialement visés, ou de manière indirecte, en encourageant l'utilisation impropre de l'aide. Dans un tel contexte, les fonds disponibles ne sont jamais utilisés à bon escient pour soulager la misère des plus pauvres. Au lieu d'investir dans des projets sociaux pour améliorer les conditions de vie des démunis, les autorités se tournent souvent vers des stratégies leur permettant de détourner les ressources à leurs profits et à ceux de leurs proches. Donc en situation de grande corruption, comme c'est le cas en Haïti, quel que soit le niveau de l'aide reçue, fort probablement elle sera détournée de ses vrais objectifs et n'aura pas d'impact sur la croissance et la réduction de la pauvreté.

L'instabilité politique est un autre fléau qui met en déroute l'efficacité de l'aide en Haiti. En 1960, avec un PIB réel par habitant de 1018 dollars américains, un haïtien était cinq fois plus riche qu'un chinois dont le PIB était d'à peine 192.3 dollars américains. Pour cette même année, les deux républiques partageant l'île d'Haïti avaient un PIB réel par habitant sensiblement égal. Soixante ans plus tard, la République dominicaine est devenue onze fois plus riche qu'Haïti avec un PIB par habitant de 8630 dollars. L'instabilité politique chronique a certainement plombé le décollage économique du pays et explique en grande partie pourquoi il n'arrive pas à épouser la même trajectoire économique que la Chine et la République dominicaine. Ainsi, on comprend aisément qu'en situation de crise permanente, les apports d'aide n'auront pas de retombées économiques significatives. Ces apports, au lieu d'être investis dans la construction des infrastructures, la santé et l'éducation, sont détournés vers des secteurs n'ayant pas d'impact sur le développement. Donc, autant que l'instabilité politique freine la croissance dans un pays, autant que l'objectif de l'aide ne sera pas atteint.

Plusieurs autres facteurs peuvent influencer les résultats de l'aide en Haïti. Ne pouvant pas tous les énumérer, on se focalise sur ces deux qu'on estime être incontournables et on formule l'hypothèse du travail de la manière qui suit. «L'aide publique au développement n'est pas efficace en Haïti. Et que la corruption généralisée et l'instabilité politique chronique en sont des causes».

? Objectif et intérêt du travail

Cette démarche de recherche ne vise pas à étudier l'impact de l'aide publique au développement sur la croissance économique d'Haïti. Mais elle se concentre à produire une réflexion sur la problématique de l'efficacité de l'aide publique en Haïti pour la période allant de 1995 à 2018. Pour être plus précis, ce travail se donne pour objectif de comprendre pourquoi l'aide publique au développement ne donne pas de résultats probantsen Haïti.

Les travaux sur l'efficacité de l'aide sont nombreux, mais rares sont ceux qui s'intéressent à chercher les causes de son inefficacité là où elle est vue comme un échec. Approfondir notre connaissance sur cet aspect témoigne tout l'intérêt de notre étude.

? Structure du travail

Notre démarche de recherche comporte quatre chapitres. Le premier chapitre présentera les généralités de l'aide publique au développement. On y fera un survol historique de l'APD sur le plan international. Dans ce chapitre nous présenterons l'évolution de l'aide tant au niveau mondial que local. Les différents acteurs internationaux et nationaux qui oeuvrent dans le domaine de l'APD seront aussi présentés.

Le deuxième chapitre est relatif à la mesure de l'efficacité de l'APD. On fera une revue de littérature autour de l'efficacité de l'aide publique au développement. On abordera aussi la déclaration de Paris avec ses cinq piliers sur l'efficacité de l'aide.

On enchaîne au chapitre trois en se focalisant exclusivement sur Haïti. Après avoir présenté l'APD et sa traçabilité, nous présenterons l'évolution des indicateurs macroéconomiques. Ainsi, l'efficacité de l'APD sera analysée en se basant sur des faits comme le PIB, l'investissement, l'inflation et le chômage. Ce qui va nous permettre de mieux nous situer sur la problématique de l'efficacité de l'APD en Haïti. A la fin du chapitre des obstacles à l'efficacité de l'APD en Haïti seront présentés.

Le quatrième chapitre concerne la partie empirique de notre étude. Après avoir analysé et interprété les résultats du modèle, on aura à conclure en présentant des limites du travail suivi de quelques recommandations.

* 1 Interview accordé à Ricardo Seitenfus, Représentant de l'OEA en Haïti, par Arnaud Robert, paru dans les colonnes du quotidien suisse Le Temps en date du 21 décembre 2010.

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"I don't believe we shall ever have a good money again before we take the thing out of the hand of governments. We can't take it violently, out of the hands of governments, all we can do is by some sly roundabout way introduce something that they can't stop ..."   Friedrich Hayek (1899-1992) en 1984