3.3. Confiance
Le marketing des cosmétiques masculins a une
très mauvaise image pour la plupart des interrogés. Il s'agit
même parfois d'un sujet sensible, les hommes disent se sentir
manipulés par le marketing « c'est du vent toutes ces pubs
marketing », « pour moi ce n'est que du blabla et je n'y crois pas
», « le publicitaire est chargé de faire son travail ».
Bien qu'ils regardent quelques publicités à la
télévision, sans vraiment les regarder, ils n'y croient pas, et
ne sont pas convaincus. Ils ne se retrouvent pas dans les publicités de
cosmétiques, pour bon nombre d'entre eux (figure 27). Plus les hommes
sont jeunes, moins ils se retrouvent dans les
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campagnes de publicités mettant en scène des
sportifs ou des acteurs. Ils se sentent très éloignés de
ces hommes à l'allure parfaite, probablement retouchée. Ils
aspirent à voir des hommes comme eux, imparfaits et avec des
problèmes de peau, pour les plus jeunes. Les plus jeunes rejoignent
l'homme de 61 ans et s'accordent à dire qu'ils ne sentent pas
visés, puisque les hommes sur les photos n'ont pas leur âge. Ils
se sentent totalement déconnectés de ces publicités, ces
produits ne sont pas pour eux. Un retour à l'authenticité serait
le bienvenu, plus de naturel, plus de « vrai ».
La crédibilité des campagnes publicitaires
« Ça me concerne pas vraiment. Y en a aucune qui
m'attire. » Lucas, 16
« On sait qu'on est pas comme ça et qu'on sera jamais
comme ça. » Lucas, 16
« J'aimerais voir un mec de mon âge (É) qui en
a vraiment besoin. » Lucas, 16
« C'est des mecs qu'existent pas. Ils font pas vrais. »
Yann, 17
« Je m'y retrouve pas des masses. » Valentin, 19
« Rien nous prouve que les images sont pas
retouchées, trafiquées » Valentin 24
« c'est plus des beaux gosses, des sportifs, c'est plus
vendeur, j'y crois moins » Gwenaël, 30
« je me rase pas donc je me retrouve pas (É) se
maquiller ça ne me ressemble pas » Joseph,
32
« J'aimerais bien lui ressembler mais je m'y retrouve pas
forcément » Yoan, 39
« Le côté mannequin pur et dur... Moi je dis
non. Ça me le fait pas de trop » Bruno, 48
« Je me sens pas concerné par les hommes qui mettent
sur les pubs » Lionel, 51
« Déjà c'est pas ma tranche d'âge
(É) Je me sens pas visé par ces publicités. »
Jean-François,
61
Figure 27. La perception des campagnes
publicitaires de cosmétiques masculins.
L'image sportive fonctionne pour certains hommes qui
pratiquent ou affectionnent le sport. Plusieurs d'entre eux pratiquent ou
regardent le football, et apprécient la référence au
joueur de la coupe du monde 1998, Bixente Lizarazu. Un jeune homme n'a
même pas reconnu le joueur et pensait que c'était un surfeur. Il
est possible d'établir un lien entre le personnage et l'affect des
hommes. Ce joueur a contribué à remporter la coupe du monde de
football en 1998, un grand moment dans les souvenirs des hommes. Les
répondants qui se souviennent de ce moment étaient à
l'adolescence, d'autres avaient la trentaine. C'était un moment heureux
de leur jeunesse, et cela explique l'attachement fort au joueur et donc la
sensibilité à la publicité. Pour les hommes qui ont choisi
cette publicité sans évoquer le football ont
apprécié la nature,
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et la mer, « c'est plus sympa, ça change. Les
autres c'est toutes les mêmes. ». Dans la quasi-totalité des
cas, le produit est totalement éclipsé par le personnage et la
mise en scène utilisés. Les publicités
télévisées sont mêmes parfois analysées dans
leur construction, et sont tournées en ridicule ; « un
garçon ou une fille qui a un problème, qui met de la crème
et ça va mieux. Je trouve ça drôle ». La relation
entre les hommes les marques semble difficile à établir, sauf si
l'affect rentre en jeu.
L'offre de produits cosmétiques paraît souvent
floue pour les jeunes générations. Ils déclarent «
s'y perdre » dans trop de produits différents. Ils aimeraient plus
de clarté et ne serait pas contre un peu d'aide. Ils ne savent pas
vraiment quoi utiliser et ce qui les concerne vraiment. Contrairement à
ce qu'a démontré la revue littéraire, les hommes
n'adhèrent pas aux produits multi actions 2 en 1, qu'ils ne jugent pas
digne de confiance. Ils se méfient profondément de ces produits
et sont d'avis qu'il ne s'agit que d'une manipulation marketing ; « les
déodorants 5 en 1 (É) Je n'y crois pas une seconde. (É)
c'est du marketing », « Je ne crois absolument pas les produits 2 en
1 », « J'ai un peu de mal avec les produits 2 en 1, j'y crois pas
trop ». Ils ne conçoivent pas qu'un produit puisse avoir plusieurs
actions. Encore une fois, un produit est destiné à corriger un
problème. Un produit pour une solution.
Les hommes des autres générations ne font
confiance qu'à une figure médicale. Il n'y a qu'un dermatologue
qui selon eux peut leur dire s'il y a un réel problème, mais
surtout leur donner une solution. Si un dermatologue leur dit d'utiliser cette
crème, les hommes lui feront confiance et achèteront cette
crème. A l'inverse, les vendeuses n'ont pas beaucoup de
crédibilité auprès des hommes. Pour eux, la «
vendeuse » vend tel ou tel produit pour toucher une commission. Dans un
cas, même le pharmacien est perçu comme un vendeur, qui gagnera
lui aussi une marge sur le produit qu'il vendra. Les hommes ne font confiance
qu'à eux-mêmes et ne valideront un produit que s'ils l'ont
testé et approuvé. Ils sont demandeurs de tests, ils
préfèrent mettre le produit à l'épreuve avant de
débourser une certaine somme. Le test peut représenter une
certaine pédagogie par l'apprentissage autodidacte. Ils désirent
en apprendre plus sur les soins mais n'ont confiance qu'en les dermatologues,
ils se considèrent seuls juges et savent ce dont leur peau a besoin
mieux que quiconque, hormis le dermatologue. L'ignorance et le manque de
confiance freine bon nombre d'hommes et les rendent méfiants face au
monde de la beauté
Les hommes sont tous différents, ils ont tous un
rapport bien particulier à la beauté. Ils proviennent d'univers
différents, ont chacun une histoire, mais il est possible de
dégager des critères communs et des comportements spéciaux
face au cosmétiques. L'utilisation de soins
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peut être inexistante comme passionnée, tous
semblent méfiants au discours du marketing des cosmétiques
masculins. L'utilisation d'un produit de beauté n'est jamais due au
hasard, l'efficacité passant avant tout. Ils savent ce qu'ils veulent,
et sont seuls juges de ce qui leur convient. Même si bien souvent, la
femme a un rôle prépondérant dans l'utilisation voire
l'achat de cosmétiques, ce sont tout de même les hommes qui les
utilisent et ils restent seuls décideurs. Tous les hommes ont en commun
la fidélité. Une fois qu'ils ont trouvé le produit qui les
satisfait, ils n'en changent que rarement. Les hommes sont difficiles à
séduire, mais une fois qu'ils ont trouvé leur compte dans un
produit, ils y restent fidèles. Ils ne se tourneront vers un autre
produit que s'ils trouvent plus efficace. Si leur produit remplit ses fonctions
et tient ses promesses, alors il sera adopté par l'homme. Une femme sera
bien moins fidèle à un produit qu'un homme. Mais un homme a
besoin d'essayer le produit, de se l'approprier avant de l'adopter totalement.
Les hommes sont globalement plus fidèles à un produit qu'à
une marque. La qualité et l'efficacité le séduiront bien
davantage qu'un discours. A l'inverse, les jeunes générations
sont plus sensibles au discours qu'au produit, et se reconnaitrons plus
aisément dans une marque avec qui ils ont des valeurs communes.
Les hommes sont encore une cible à conquérir,
mais c'est un marché hétérogène, et long à
séduire. L'homme aussi est maintenant soumis à des diktats et
à une course à la jeunesse et à la beauté.
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