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Cancer, quand l'annonce du diagnostic au patient fait naître l'émotion chez le soignant.


par AnaàƒÂ¯s Lariouat Braulle
Institut de formation en soins infirmiers, croix rouge française  - Diplôme d'infirmière 2019
  

Disponible en mode multipage

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    BRAULLE LARIOUAT Anaïs

    Travail de Fin d'Etudes

    CANCER

    Quand l'annonce du diagnostic au patient fait naître l'émotion chez le soignant !

    Institut de Formation en Soins Infirmiers, CALAIS PROMOTION 2016 - 2019

    Remerciements

    Tout d'abord, je tiens à remercier, Madame HUE, ma référente mémoire pour son accompagnement et ses conseils pour la réalisation de mon mémoire ainsi que Madame HOUVET pour les différents apports théoriques.

    Ensuite, je remercie les huit infirmiers qui ont accepté de répondre à mes entretiens, +pour le temps qu'ils m'ont accordé afin de pouvoir mener à bien ce travail ainsi que les cadres des établissements qui ont accepté de m'accueillir.

    Enfin, je remercie toutes les personnes qui m'ont soutenu durant ces 3 années d'études, ma famille, mes collègues de travail de l'EHPAD où j'effectue des remplacements, les différents tuteurs que j'ai pu avoir durant mes stages et mes référentes pédagogiques Madame DERREPER et Madame POTTIER.

    « Le cancer nous affecte tous, que vous soyez une fille, une mère, une soeur, un ami, un collègue, un médecin, un patient », (Jennifer Aniston, 1969)

    « Lorsque l'émotion me déséquilibre, je ne peux pas écouter l'autre et me faire entendre en même temps », (Steve Lambert, auteur)

    « Une vie sans émotion est une vie perdue », (Roger Fournier, écrivain, 1929 - 2012)

    IDE 1 III

    SOMMAIRE

    I- Introduction 1

    II- Situation d'appel 1

    III- Question de départ 4

    IV- Cadre théorique 5

    A) L'annonce du diagnostic de cancer 5

    a- Le cancer 5

    1) Définition 5

    2) Epidémiologie 5

    b- Le dispositif d'annonce 7

    c- L'expérience 11

    B- La relation soignant - soigné 13

    a- La relation d'aide 15

    b- La juste distance 16

    c- Les émotions 17

    d- Le travail émotionnel 21

    e- Les mécanismes de défense 23

    C- Conclusion du cadre théorique 25

    V- Hypothèses de recherche 26

    VI- Méthode 26

    1) Outil utilisé 26

    2) Population ciblée 26

    3) Mise en place de l'enquête 28

    VII- Résultats 29

    1) Analyse quantitative et qualitative 29

    VIII- Discussion 54

    1) L'apprentissage permettrait de développer ses compétences dans la gestion

    des émotions. 54

    2) La maitrise permettrait de développer la capacité d'adaptation. 55

    3) Le repérage des émotions permettrait la connaissance de soi. 56

    4) Hypothèse générale : l'expérience aurait une influence sur la gestion des

    émotions du soignant suite à l'annonce d'un cancer. 56

    5) Conclusion de l'analyse 57

    IX- Conclusion 58

    Bibliographie 59

    Annexe 1 I

    Annexe 2 III

    IDE 2 VII

    IDE 3 XI

    IDE 4 XV

    IDE 5 XVIII

    IDE 6 XXIV

    IDE 7 XXVIII

    IDE 8 XXX

    1

    Introduction

    Dans le cadre de nos études en soins infirmiers, nous devons réaliser un travail de fin d'études.

    Durant mes différents stages, au cours de ma formation, j'ai pu rencontrer des situations qui m'ont plus ou moins touchées. J'ai plus particulièrement été touchée par l'annonce d'un diagnostic de cancer. En effet, les infirmiers sont de plus en plus confrontés à l'annonce de cette maladie qui touchent de nombreuses personnes, de nos jours. C'est pour cela que j'ai choisi comme thème la gestion des émotions du soignant suite à l'annonce d'un diagnostic de cancer. Ma question de départ est « en quoi l'annonce d'un diagnostic de cancer a un impact sur la relation soignant - soigné ? »

    Dans mon travail, premièrement, vous trouverez la situation qui m'a interpellé et m'a amené à un ensemble de questions. En seconde partie, j'ai réalisé des recherches qui s'articulent sur deux axes principaux : l'annonce d'un diagnostic de cancer et la relation soignant - soigné. A la suite de ces différentes recherches, j'ai formulé une hypothèse qui est « l'expérience aurait une influence sur la gestion des émotions du soignant face à l'annonce d'un cancer ». Afin de vérifier et d'analyser cette hypothèse, j'ai réalisé des entretiens semi-directifs auprès d'infirmiers travaillant en oncologie mais également en service de pneumologie.

    Enfin, en conclusion de ce travail de fin d'études, vous trouverez une perspective professionnelle ainsi qu'une ouverture éventuelle sur un autre sujet ...

    I. Situation d'appel

    La situation se passe durant mon stage du semestre 2, en qualité d'étudiante infirmière à l'hôpital en service de diabétologie qui accueille 16 patients diabétiques et 2 patients de polysomnographie, où, il y a 10 chambres individuelles et 4 chambres doubles. Pour respecter le secret professionnel, j'utiliserai la première lettre du nom de la patiente. La situation se passe le samedi 10 juin 2017 alors que j'étais de poste de l'après-midi. Une patiente Mme F. âgée de 67 ans, mariée et mère de deux filles doit normalement être transférée en service gériatrique, mais

    2

    est accueillie dans le service de diabétologie par manque de place dans l'autre service. Cette patiente est arrivée aux urgences le vendredi 9 Juin à 21 heures, accompagnée de son mari. Mme F. a eu un cancer du sein droit il y a maintenant 10 ans mais a été traité par radiothérapie et hormonothérapie. L'oncologue n'a pas mis en place de traitement de chimiothérapie et il n'y a pas eu de mastectomie d'effectuée non plus. Madame, depuis son cancer, effectue chaque année un contrôle par mammographie. Lors des derniers contrôles, tout était normal.

    La patiente a perdu 15 kilogrammes ces 6 derniers mois sans raison et a de nombreuses difficultés à se déplacer depuis 3 mois ainsi que des douleurs au niveau des hanches et des jambes. Elle consulte à plusieurs reprises son médecin traitant qui lui dit qu'il s'agit d'arthrose. L'état de la patiente se dégrade de jours en jours donc sa fille décide de l'emmener chez un autre médecin afin d'obtenir un second avis, celui-ci prescrit donc un bilan sanguin. Les résultats du bilan ne sont pas très bons. Il propose donc d'aller aux urgences. Son mari l'emmène, la patiente explique sa situation et l'urgentiste décide de faire quelques examens (radiographie, bilan sanguin...) afin d'essayer de diagnostiquer son problème. Quelques heures après, l'urgentiste est revenu pour lui annoncer le diagnostic, la patiente a donc des métastases osseuses au niveau des hanches.

    Le 10 Juin à 14H30 j'effectue le tour des constantes avec l'infirmière. J'entre dans la chambre de la patiente qui me dit « je suis trop stressée », je lui réponds donc « ne vous inquiétez pas » puis en sortant de la chambre, je transmets à l'infirmière que Mme F. se sent très angoissée suite à l'annonce de son cancer.

    L'infirmière et moi décidons donc de prendre du temps et de discuter avec la patiente afin de la calmer et de la rassurer. Madame F. est dans un déni total car elle parle de sa vie personnelle, de son adolescence jusqu'à aujourd'hui, en nous expliquant tout le parcours de sa vie.

    Je suis très à l'écoute face à cette patiente. Puis, l'infirmière aborde le sujet de sa maladie et demande ce que son mari pense de cela, la patiente répond « vous savez lorsque vous voyez votre mari pleurer ... ce n'est pas facile car il me dit qu'il a encore besoin de moi », étant très touchée par ce qu'elle dit je décide donc de sortir quelques minutes de la chambre. Je reviens 2 minutes après et l'infirmière propose à Madame de nous appeler lorsque son mari et sa fille arriveront pour que

    3

    l'on puisse discuter avec eux. 15 minutes après, alors que nous sommes encore dans la chambre avec la patiente, son mari et sa fille arrivent. Nous avons discuté avec eux et l'infirmière dit à la patiente : « restez forte Madame F., vous savez le moral joue beaucoup pour votre santé et si vous n'êtes pas bien moralement, cela ne fera qu'empirer les choses ». La famille est d'accord. Puis en plein milieu de la discussion, la patiente se met à pleurer et à dire en me regardant « j'ai tellement envie de voir mes petites filles encore au moins 1 ou 2 ans ». Sa fille la regarde, lui tient la main et se met à pleurer. Et là une difficulté totale se met en place pour moi, il m'est impossible de gérer mes émotions, je n'ai pas répondu à la patiente puis je me suis mise à pleurer également et je suis sortie rapidement de la chambre. Je suis restée quelques instants devant la porte de la patiente à me demander si j'allais rentrer à nouveau. Mais cette patiente était tellement attachante et disait des paroles très touchantes qu'il a été difficile pour moi de gérer cette situation sans montrer mes émotions (qui était là surtout la tristesse) et, pour moi, cela a donc eu un impact sur la relation que j'aurai pu créer avec la patiente. Quant à l'infirmière, elle est restée à discuter avec cette patiente pendant 1 heure environ.

    Je suis alors partie vers la salle de pause où étaient les deux aides-soignantes d'après-midi et qui ont tout de suite compris que je revenais de la chambre de cette patiente, puisqu'elles ne voulaient pas non plus aller dans la chambre car elles trouvaient la patiente très émouvante. J'ai donc décidé de parler sur ce sujet avec elles afin de ne pas garder en moi cette tristesse.

    Je me demande comment aurais-je pu réagir autrement face à cette situation ?

    Je me pose la question si c'est le fait d'être étudiante qui m'a empêché de retenir mes larmes puisque l'infirmière a réussi ?

    Je me demande également si l'expérience joue un rôle, par rapport à l'infirmière qui a réussi à accompagner cette patiente ?

    Est-ce que le fait d'avoir pleuré devant la patiente est un signe de faiblesse ? La patiente n'a-t-elle pas pris mes larmes comme une incompétence ?

    Est-ce que les soignants mettent en place des mécanismes de défense face à une telle situation ?

    4

    Ce qui m'a réellement posé problème dans cette situation est le fait d'avoir pleuré et montrer ma tristesse devant la patiente. Je suis une personne très sensible, il est difficile, pour moi, de réussir à gérer mes émotions. Ma crainte est de montrer à nouveau mes émotions devant des patients et j'ai peur qu'ils prennent cela comme une incompétence ou un signe de faiblesse mais également qu'ils pensent que je suis incapable de les prendre en charge.

    Durant mes différents stages, j'ai pu rencontrer une autre situation qui m'a également ému mais ce n'était pas face à l'annonce d'un cancer. Il s'agit de la situation d'un monsieur qui devait se faire amputer la 2ème jambe. Il s'est mis à pleurer face à cette annonce et m'a demandé pour que je m'occupe de lui jusqu'à son opération car après il sera trop tard selon lui.

    Ce qui me motive à réaliser mon travail de recherche sur le sujet de la gestion des émotions des soignants suite à l'annonce d'un diagnostic de cancer est que tout au long de ma carrière professionnelle, je serai confrontée à des annonces de diagnostic grave ou moins grave. Et pour moi, je pense qu'il est important de savoir gérer ses émotions devant le patient afin de le prendre en charge dans les meilleures conditions et de lui donner du courage mais également pour créer une bonne relation avec le patient.

    II- Question de départ

    Suite à cette situation, a découlé ma question de départ qui est : « en quoi, l'annonce d'un diagnostic de cancer a un impact sur la relation soignant - soigné ? »

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    III- Cadre théorique

    A) L'annonce du diagnostic de cancer

    a- Le cancer

    1) Définition

    Tout d'abord, le cancer est « une maladie qui est provoquée par la transformation de cellules devenant anormales et qui prolifèrent de façon excessive. Ces cellules déréglées finissent par former une masse qui est appelé tumeur maligne. Les cellules cancéreuses ont tendance à envahir les tissus voisins et à se détacher de la tumeur. Elles migrent alors par les vaisseaux sanguins et les vaisseaux lymphatiques pour aller former une autre tumeur appelée métastase. »1

    La cellule cancéreuse passe à l'état de cancer en plusieurs années. Chaque type de cancer est différent et unique. Par exemple, le cancer du sein et le cancer du poumon sont des maladies totalement différentes. Le développement se fera à une vitesse différente et les traitements seront donc différents.

    Ainsi, le cancer est caractérisé par :

    - Une prolifération anarchique de cellule - Une perte de l'apoptose

    - Une perte des capacités de différenciation - Une perte de l'inhibition de contact.

    2) Epidémiologie

    En France, la première cause de mortalité est le cancer et il s'agit d'un véritable problème de santé publique.

    En France, en 2017, le nombre de nouveaux cas de cancer étaient estimé à 400 000 : 214 000 cas chez les hommes contre 186 000 cas chez les femmes et le nombre de décès pour les patients atteints d'un cancer étaient de 150 000 avec 84 000 décès chez les hommes contre 66 000 chez les femmes.

    L'âge moyen concernant le diagnostic de cancer est de 68 ans pour les hommes et 67 ans pour les femmes. En ce qui concerne, l'âge moyen des personnes qui

    1 www.e-cancer.fr

    6

    décèdent, il est de 73 ans chez les hommes et 77 ans chez les femmes (données de 2015).

    Chez l'homme, en ce qui concerne les nouveaux cas, les cancers de la prostate, du poumon et du côlon-rectum sont les plus fréquents. Le cancer qui entraine le plus de décès est celui du poumon.

    Chez la femme, les nouveaux cas de cancer les plus fréquents sont les cancers du sein, du côlon-rectum et du poumon. Le cancer du sein entraîne le plus de décès.

    Le cancer ne touche pas seulement les adultes, il touche également les enfants et les adolescents avec environ 2 200 nouveaux chaque année. Ainsi, leur survie à 5 ans, est supérieure à 80% de nos jours. Les principaux cancers qui touchent les enfants et adolescents sont les leucémies, les lymphomes et les tumeurs du système nerveux central.

    Les personnes ayant déjà eu un cancer sont plus sujet à en développer un second, avec un taux de 36% de plus par rapport à la population générale.

    De manière générale, environ 3 millions de personnes ont déjà été atteint d'un

    cancer.

    De plus, environ 70% des cas sont dus aux modes de vie et aux comportements des personnes. C'est donc pour cela que la prévention et le dépistage sont importants et essentiels.

    Selon la Haute Autorité de Santé (HAS), la prévention « consiste à éviter l'apparition, le développement ou l'aggravation de maladies ou d'incapacités »2.

    Ainsi, il existe trois types de prévention :

    - Primaire : vaccination par exemple.

    - Secondaire : dépistages.

    - Tertiaire : ce type de prévention consiste à diminuer les complications ainsi que le risque de récidive.

    Selon l'OMS, le dépistage « consiste à identifier de manière présomptive, à l'aide de tests appliqués de façon systématique et standardisée, les sujets atteints d'une

    2 www.has-sante.fr

    7

    maladie ou d'une anomalie passée jusqu'à maintenant inaperçue »3. Par exemple : la mammographie pour dépister un cancer du sein ou l'hémoccult qui permet de dépister un cancer du côlon-rectum ...

    b- Le dispositif d'annonce

    Tout d'abord, l'obligation d'informer le patient ainsi que sa famille est régie par un ensemble de textes juridiques. L'annonce fera l'objet d'une relation unique ainsi que d'une phase d'observation où il sera important d'écouter le patient plutôt que de parler. Il est également primordial d'accepter le degré d'information que le patient peut entendre.

    L'annonce d'un diagnostic de cancer est parfois soudaine et peut être traumatique pour le patient. Pour améliorer cela, le plan cancer a mis en place un dispositif d'annonce afin de suivre au mieux les patients.

    Le dispositif d'annonce du cancer est la mesure 40 du plan cancer. Il a été mis en place afin de faire bénéficier aux patients et à sa famille de meilleures conditions d'annonce du diagnostic de leur maladie.

    Ce dispositif s'appuie sur deux grands principes :

    - Le patient qui est atteint d'un cancer doit bénéficier d'un dispositif d'annonce qui est mis en place dans les établissements de santé. Ceci doit être fait au début de la maladie du patient ou en cas de récidive.

    - La réussite de ce dispositif et l'amélioration du vécu du patient seront appréciées grâce à la coordination interprofessionnelle, à la communication qui sera dédiée aux patients et aux proches.

    Le dispositif d'annonce est composé de quatre temps :

    - Tout d'abord, il y a un temps médical qui consiste à l'annonce du diagnostic de cancer ainsi qu'à la proposition de traitements qui auront été définis durant une réunion de concertation pluridisciplinaire. Ce temps est réalisé par un médecin. Si lors de ce temps médical, le patient a compris en quoi consiste le traitement et l'accepte, la décision sera écrite et remise au patient sous

    3 www.has-sante.fr

    8

    forme « d'un programme personnalisé de soins ». Lors de ce temps médical, une infirmière peut être présente et son rôle sera d'écouter les différents termes médicaux employés par le médecin ou encore les termes que le patient ou sa famille va employer ; également, elle observera les différentes réactions et les comportements du patient et/ou de l'accompagnant.

    Ci-dessus, la notion de réunion de concertation pluridisciplinaire (RCP) est mentionnée. Il s'agit de la mesure 31 du plan cancer qui fait bénéficier d'une concertation pluridisciplinaire concernant le dossier de 100% des nouveaux patients atteints d'un cancer, afin de réaliser une synthèse sur le parcours thérapeutique qui est prévu afin de créer un « programme personnalisé de soins remis au patient. » Ce programme personnalisé de soins (PPS) est un document qui informe au patient la prise en charge qui sera mise en place. Ce document peut être modifié, complété ou remplacé à tout moment. Il permet également d'améliorer la prise en charge du patient en cas d'indisponibilité du médecin traitant. Sur ce papier, doit apparaître :

    - La proposition thérapeutique que le patient a acceptée ainsi que l'organisation de celle-ci.

    - Les bilans qui seront réalisés

    - Les coordonnées du médecin qui sera responsable du traitement

    - Les coordonnées des différentes associations que le patient pourra contacter.

    - En second temps, il y aura un temps d'accompagnement soignant qui est réalisé généralement par des infirmier(e)s. Celui consiste à accueillir le patient et sa famille afin d'écouter, de reformuler les différents termes médicaux employés par le médecin s'ils n'ont pas été compris mais également de donner des informations. Au cours de ce rendez-vous, le patient peut être orienter vers divers professionnels comme les services sociaux ou un psychologue par exemple. Le patient peut également être orienter vers des associations ou encore des espaces de dialogue. Ce temps d'accompagnement peut également être fait par des manipulateurs d'électroradiologie qui aident à la préparation du traitement par radiothérapie. Il faut savoir que ce temps d'accompagnement soignant n'est pas obligatoire et ne peut pas être imposé au patient.

    9

    - En 3ème temps, il y a l'accès à une équipe impliquée dans les soins de support. Ce temps permet de soutenir le patient et de l'accompagner dans ses différentes démarches sociales.

    - Enfin, en dernier temps, il s'agit d'un temps d'articulation avec la médecine de ville. Le médecin traitant peut être amené à annoncer des résultats d'examen au patient. Si ce n'est pas annoncé par le médecin traitant, celui-ci devra être informé immédiatement avec l'accord préalable du patient. Cette coordination est très importante notamment pour la demande d'exonération du ticket modérateur qui est réalisée par le médecin traitant.

    Il n'y a pas de « bonnes » ou de « mauvaises » manières d'annoncer un cancer mais certes, certaines annonces sont parfois moins brutales que d'autres.

    L'annonce est un moment difficile. Dans ces situations, il est important de faire attention au non-verbal qu'adopte les professionnels car le patient le voit. Le professionnel de santé devra également avoir conscience des mécanismes de défenses qui seront mis en place afin de combler son malaise suite à cette annonce.

    Les soignants qui sont impliqués dans le dispositif d'annonce ont une formation qui est un besoin souvent demandé. Des formations se déroulent auprès d'équipes expérimentées et volontaires. Ainsi les établissements de santé pourront profiter de leurs diverses expériences.

    Il faut savoir que tous les infirmier(e)s ne sont pas amenés à pratiquer la consultation d'annonce, même s'ils travaillent dans le service concerné par le dispositif d'annonce du cancer.

    Afin de pratiquer la consultation d'annonce, une formation minimale est demandée et celle-ci se fait sur la base du volontariat, elle n'est pas imposée. Pour pouvoir intégrer la consultation d'annonce, la condition la plus évidente est celle de l'ancienneté et du sentiment de maitrise des tâches. C'est une compétence personnelle et expérientielle qui pousse la personne à s'investir dans ce dispositif. La maitrise des tâches qui est liée à l'expérience ainsi qu'à l'ancienneté, est tout aussi liée à l'âge de l'infirmière. L'âge peut être considéré comme « une

    10

    compétence incarnée »4. Lors de l'annonce, il a été remarqué que les familles se sentaient plus en confiance face à une infirmière montrant une certaine expérience.

    Ainsi, des étudiantes infirmières ainsi que des jeunes infirmières fraichement diplômées ont assistées à des consultations d'annonce avec le médecin, et, implicitement l'expérience n'est pas une compétence essentielle pour pratiquer la consultation d'annonce. Mais, d'après le témoignage d'un médecin, « une bonne infirmière de consultation a la cinquantaine ! Au moins 40 ans ! Enfin ce n'est pas une infirmière qui sort de l'école ! ».5

    L'âge moyen des personnes pratiquant la consultation d'annonce est de 45 - 50 ans.

    Dans l'ouvrage « Regards d'infirmières, sur le dispositif d'annonce », une jeune infirmière a été confrontée à l'annonce d'un diagnostic de cancer, après que le médecin ait réalisé son annonce, il est parti et cette jeune infirmière s'est retrouvée seule face à la famille. Elle affirme s'être sentie « très démunie » face à cette famille et au patient. De ce fait, cette expérience a amené à la demande d'une formation.

    Pour les infirmières qui n'ont pas l'expérience dans la consultation, la crainte est présente. Elles ont la crainte de ne pas pouvoir répondre aux questions du patient. D'après ces infirmières, « c'est avant tout l'expérience qui peut aider à surmonter cette peur et à développer certaines stratégies.

    Toujours dans le livre « regards d'infirmières sur le dispositif d'annonce du cancer », une infirmière témoigne sur le fait qu'il est difficile d'annoncer un cancer surtout lorsqu'il s'agit d'une récidive ou d'un arrêt de traitement puisque le patient est un habitué du service et donc l'équipe s'est attachée à celui-ci. Pour elle, il s'agit d'un travail lourd et elle préférerait annoncer une bonne nouvelle comme une grossesse par exemple !

    Ainsi, pour accompagner au mieux le patient, il est important d'avoir une bonne relation avec celui-ci.

    4 Livre « Regards d'infirmières sur le dispositif d'annonce du cancer », éditions Lamarre, page 36.

    5 Livre « Regards d'infirmières sur le dispositif d'annonce du cancer », éditions Lamarre, page 37.

    6 « Regards d'infirmières sur le dispositif d'annonce du cancer », éditions Lamarre, page 43.

    11

    Enfin, lorsque j'ai vécu cette situation, je me suis demandé si l'expérience jouait un rôle essentiel dans la gestion des émotions et lors de la consultation d'annonce, l'expérience est aussi évoquée. C'est donc pour cela que j'ai donc décidé de traiter l'expérience dans mon travail.

    c- L'expérience

    L'expérience peut être définie comme une « connaissance ou pratique acquise au contact de la réalité, de la vie, ou par une longue pratique »7.

    Ainsi l'expérience professionnelle est « le fait de ressentir quelque chose comme un enrichissement du savoir, de la connaissance, des aptitudes 8».

    L'expérience peut être inné ou développée grâce à des acquis et des formations. La compétence professionnelle est singulière et est lié aux attitudes et aux aptitudes de chaque personne. Lorsque nous avons acquis une compétence, cela signifie que nous la maitrisons.

    Il faut savoir que l'expérience ne signifie pas forcément, le temps. Il s'agit également des nombreuses et différentes situations vécues et rencontrées.

    De plus, dans l'ouvrage « regards d'infirmières sur le dispositif d'annonce du cancer », il est noté que l'expérience « apprend à assumer ses propres limites, qu'elles soient ressenties à l'égard de la personnalité d'un patient ou comme une faiblesse personnelle passagère. 9»

    La maitrise professionnelle signifie que nous avons la capacité de faire une chose et que nous avons suffisamment de connaissance.

    L'expérience sera acquise grâce à la formation et à l'apprentissage durant la pratique.

    Selon les chercheurs, Benoît Grasser et José Rose, « l'expérience n'est pas acquise spontanément et toute situation vécue ne fait pas spontanément expérience. 10»

    7 www.universalis.fr

    8 www.unversalis.fr

    9 « Regards d'infirmières sur le dispositif d'annonce du cancer », éditions Lamarre, page 43

    10 Article « l'expérience professionnelle, son acquisition et ses liens à la formation »

    12

    D'après Margot Phaneuf, « en soins infirmiers, l'expérience habite la tête et la main, mais elle demeure sans valeur si elle n'implique pas aussi le coeur. 11»

    A ce sujet, les avis sont différents :

    - Pour Catherine Mercadier, au fil des années, au fil des situations vécues, le soignant devient fermé et se crée un caractère qui permet de faire face. Elle démontre également grâce à des entretiens réalisés auprès de jeunes diplômés, que la réaction n'est pas la même par rapport à une infirmière qui a de nombreuses années d'expérience. Ainsi la gestion des émotions est meilleure si on a de l'expérience.

    - Au contraire, Florence Michon qui est cadre de santé formatrice, pense qu'il ne s'agit pas de se refermer contre soi mais d'être soi. Même avec une grande expérience professionnelle, la gestion des émotions est difficile.

    Dans l'article « Soignants ... Soignés, un rapport complexe, une réflexion « chemin faisant » quant au statut émotionnel du soignant », écrit par M. Delhaye et F. Lotstra, le « développement vocationnel » est mis en évidence. Ainsi, ces deux auteurs, décrivent quatre stades :

    - Le stade d'immersion : en début de carrière et plus particulièrement pendant les stages, le soignant est confronté au monde hospitalier donc aux patients et aux pathologies parfois lourdes. Le professionnel se trouve donc affecté sur le plan émotionnel. Il entre ainsi dans une « pseudo-empathie ».

    - Le stade de l'empathie souffrante : le soignant montre une conscience plus fine, il se centre donc sur le soigné. Il est encore touché émotionnellement et entre donc dans une « empathie souffrante » ce qui freine sa prise en charge et complique donc la relation avec le patient.

    - Le stade de la mise à distance : ici « le soignant tente de sauver sa peau ». Il essaie de prendre une juste distance mais en mettant en place des

    11 Margot Phaneuf, « les savoirs d'expérience en soins infirmiers, une richesse à explorer : mentorat, pratiques exemplaires et benchmarketing », Novembre 2011.

    13

    mécanismes de défenses. La relation entre le soignant et le patient va donc à l'essentiel.

    - Le stade de maturation : le parcours professionnel du soignant est abouti. Ainsi, le soignant arrivera à maîtriser ses émotions et agira donc comme professionnel.

    B- La relation soignant - soigné

    Le premier contact avec le patient, sera un moment primordial. C'est le moment où la relation avec le patient va se créer. Le professionnel doit être capable de « laisser une distance, du temps, de maitriser ses propres réactions, savoir nommer ses émotions, les articuler avec ses propres représentations. »

    Au cours des soins infirmiers, les soignants vont entrer en relation avec les patients de manière parfois intime voir prolongée. Les soignants sont souvent amenés à gérer des situations complexes.

    Selon Alexandre MANOUKIAN, une relation est « la rencontre entre au moins deux personnes »12.

    Selon Margot Phaneuf, la relation soignant - soigné est « une relation qui suppose une intention, une préoccupation conduisant à se pencher vers l'autre, pour l'entourer de sollicitude, pour se mettre à l'écoute de ses besoins, pour le soutenir et faire des gestes servant à la préservation et à l'amélioration de son état »13.

    D'après le dictionnaire des soins infirmiers, la relation soignant - soigné est « un lien qui existe entre deux personnes de statut différent, donc le soignant et le patient. La relation soignant - soigné a pour but d'aider et de soutenir la personne soignée. »14

    L'objectif principal de la relation avec le patient est le soin.

    Dans son livre, « la relation soignant-soigné », Alexandre MANOUKIAN, dit que « tout acte, tout geste technique ou de confort se situe au sein d'une relation

    12 Manoukian, « La relation soignant - soigné », page 3

    13 Margot Phaneuf, « la relation soignant - soigné, rencontre et accompagnement », édition Chenelière Education

    14 Dictionnaire des soins infirmiers

    14

    soignant - soigné »15. La relation que nous avons avec le soigné est utilisé par différentes formes : par les mots, par les gestes, par les mimiques, par les positions du corps que nous avons et par les attitudes.

    Toujours selon Alexandre MANOUKIAN, la relation est « un phénomène d'ensemble » puisque l'on parle avec tout son corps.

    Hildegard PEPLAU définit la relation soignant - soigné selon 4 phases :

    - La phase d'orientation : Il s'agit de la découverte et de l'analyse des problèmes faite par le patient. Il y aura la première rencontre entre le soignant et le patient.

    - La phase d'identification : il s'agit de l'approfondissement de la relation entre le soignant et le patient. Le soigné va identifier que l'infirmière sera la personne la mieux placée pour diminuer son insécurité. Ainsi, elle lui posera des questions afin d'identifier ses problèmes.

    - La phase d'exploitation : ne sera accessible que si la « relation interpersonnelle » est construite. Le patient trouvera un réel bénéfice dans la relation d'aide.

    - La phase de résolution : le patient retrouvera son autonomie.

    Malgré les compétences des soignants, certaines situations peuvent être difficile. Cela va dépendre de la pathologie du patient, de son histoire de vie, de leur angoisse...

    Ainsi, la relation soignant - soigné se fait par des attitudes dans lesquelles nous retrouvons la relation d'aide, par des émotions mais également par un lien qui prend en compte la juste distance.

    Dans ma situation, avec la patiente, j'ai ressenti des émotions que j'ai eu du mal à gérer donc pour moi la relation n'a pas été faite correctement, d'où ma question de départ.

    15 Manoukian, « La relation soignant - soigné », page 3

    15

    a- La relation d'aide

    Selon Alexandre MANOUKIAN, la relation d'aide, dans les soins infirmiers, est « un moyen d'aider le patient à vivre sa maladie et ses conséquences sur la vie personnelle, familiale, sociale voir professionnelle. 16» La relation d'aide est construite sur la mise en place d'une relation de confiance entre le patient et le soignant. Ainsi la relation d'aide est basée sur certaines règles comme « la considération positive, l'authenticité, l'empathie et l'absence de jugement. »

    Dans la relation d'aide, il y a trois concepts principaux qui s'appuient sur deux postulats qui ont été nommés par Carl Rogers : « tout individu est unique et en évolution.17 »

    Le terme « en évolution » signifie que chaque individu change et cela peut être fait grâce à l'expérience, de l'âge ou des événements.

    Les concepts de la relation d'aide sont donc :

    · L'acceptation positive inconditionnelle : c'est-à-dire que le patient sera accepté tel qu'il est et aucun jugement ne sera tourné vers celui-ci.

    · L'authenticité : ce concept est basé sur une relation honnête, sans mensonge. Il est parfois difficile d'être authentique car il faut réussir à être soi-même.

    · L'empathie : il s'agit « d'un résultat d'une relation suffisamment proche entre deux personnes pour qu'elles ressentent, de l'intérieur, le vécu de l'autre.18 »

    Carl Rogers fait une distinction entre empathie et sympathie. Pour lui, la sympathie est plus tournée vers les émotions alors que l'empathie est « l'appréhension des aspects tant cognitifs qu'émotionnels de l'expérience de l'autre.19 »

    Selon Jean Decety, l'empathie est caractérisée par deux éléments primaires : une réaction affective envers l'autre et une capacité cognitive.

    16 A. Manoukian, « la relation soignant - soigné », page 53

    17 A. Manoukian, « la relation soignant - soigné » page 54

    18 A. Manoukian, « la relation soignant - soigné » page 55

    19 A. Manoukian, « la relation soignant - soigné » page 56

    16

    La relation d'aide est définie d'une différente manière par Jean WATSON qui pour elle, il s'agit d'une relation de « caring ». Il s'agit d'une relation que le soignant a développé afin d'accompagner le patient.

    Afin de réussir à créer une relation d'aide, il faut :

    · De l'écoute active c'est-à-dire, se concentrer sur ce que la personne dit, être disponible, porter de l'intérêt au patient, ainsi le soignant pourra reformuler au patient ce qu'il vient de lui dire.

    · De la compréhension empathique, ce qui veut dire que le soignant va se mettre à la place du patient afin de comprendre ce qu'il veut dire.

    · De la bienveillance, ce qui vise au bien-être et bonheur du patient. Le soignant aidera le patient à mobiliser ses capacités.

    · De l'authenticité

    Mais il est important de savoir qu'il y a des limites à la relation d'aide et notamment, il est important d'aborder une juste distance.

    b- La juste distance

    Ainsi, Edward Twitchell Hall a défini quatre types de distance :

    · La distance intime : va d'un contact physique et se terminera à 45 / 50 cm. Cette distance est celle qui est réalisée par l'infirmière lors des soins.

    · La distance personnelle : est d'environ 45 cm à 1m25. Il s'agit d'une distance séparent les membres. Si cette distance est respectée, l'infirmière va ainsi percevoir la communication non verbale du patient.

    · La distance sociale : de 1m20 à 3m60. Cette distance est acceptée pour des personnes inconnues l'une de l'autre. Il n'y a pas de contact physique possible.

    ·

    17

    La distance publique : de 3m60 à 9m voire plus. La prise de parole sera faite pour un groupe de personnes généralement.

    Le fait d'instaurer une bonne distance professionnelle nécessitera, de la part du soignant, une bonne connaissance de lui-même.

    Selon Florence Michon, « être dans la juste distance requiert de la part du soignant, une bonne connaissance de soi 20»

    Malgré la juste distance à respecter avec le patient, le soignant devra se tenir à hauteur du patient par exemple s'il est assis, l'infirmier devra également s'assoir ou s'accroupir afin d'échanger.

    c- Les émotions

    Des affects, des sentiments et des émotions sont mis en jeu dans la relation soignant - soigné. Cela peut être mis en place aussi bien du côté du patient que du côté du soignant. Les sentiments et les émotions sont propres à chacun, ils se manifestent et sont perçus de façon différente selon la personnalité de la personne.

    Un contexte de soin est un lieu où les émotions surgissent. Lors des soins nous réagissons à ce que nous voyons, entendons, ressentons concernant les patients. Selon Stéphanie DELROISSE, psychologue, les soignants qui travaillent dans un service d'oncologie ont une charge émotionnelle importante, qui pourrait même mener à un burn-out. Les émotions sont éprouvées selon le sujet, les circonstances mais également le contexte.

    Ferh et Russel (en 1984), psychologues : « Chacun sait ce qu'est une émotion, jusqu'à ce qu'on lui demande d'en donner une définition. A ce moment-là, il semble que plus personne ne sache 21».

    Selon Aristote, les émotions se définissent comme « tous ces sentiments qui changent l'homme en l'entraînant à modifier son jugement et qui sont accompagnés par la souffrance ou le plaisir22 ».

    20 Florence Michon, « Les relations interprofessionnelles avec la personne soignée et la notion de juste distance ».

    21 Ferh et Russel, Journal of Experimental Psychology

    22 www.universalis.fr ; psychologie des émotions

    18

    Une émotion est définie comme « un mouvement affectif soudain et intense, entrainant un débordement temporaire du contrôle réflexif sous l'effet d'une stimulation du milieu23 ».

    D'après le Larousse, une émotion est définie comme « un trouble subit, une agitation passagère causée par un sentiment vif de peur, de surprise, de joie ... C'est également une réaction affective transitoire d'assez grande intensité, habituellement provoquée par une stimulation venue de l'environnement24 ».

    Le terme « émotion » possède comme étymologie le verbe « mouvoir », ce qui signifie que les émotions que nous ressentons ne sont pas toujours les mêmes mais en constant changement et donc en constant mouvement.

    De plus, une émotion peut être positive ou négative. Un proverbe dit « on ne peut pas mettre le vent en cage », il s'agit donc de la même chose concernant les émotions, on ne peut pas les contrôler totalement.

    Les émotions se manifestent d'au moins 3 façons différentes qui sont :

    - La réaction physiologique

    - Une manifestation comportementale - Une manifestation subjective

    Selon Charles Darwin, il y a 6 émotions de bases qui sont dites « fondamentales » et elles sont héréditaires et innées :

    · La joie

    · La surprise

    · La peur

    · Le dégoût

    · La colère

    · La tristesse

    Lors de diverses situations rencontrées pour les soignants, ces émotions peuvent apparaître.

    23 Dictionnaire médical de l'académie de médecine (en ligne)

    24 Dictionnaire Larousse (en ligne)

    19

    Mais d'après James R. Averill, psychologue, il existe d'autres émotions comme :

    · La honte

    · La culpabilité

    · L'envie

    · La fierté

    · Le regret

    · L'émotion esthétique

    · Les états mystiques.

    En ce qui concerne les émotions du soignant, nous retrouvons souvent :

    · La tristesse qui est éprouvée suite au décès d'un patient, ou bien suite à la prise en charge d'une personne qui a une pathologie incurable ou lourde.

    · La colère, le soignant est en colère lorsqu'il reçoit des reproches ou bien lorsqu'il se retrouve face à un patient ayant un comportement agressif ou si le travail et le personnel ne sont pas respectés.

    · Le soignant, peut aussi éprouver de la joie. Cette situation se passe surtout lorsque l'état de santé d'un patient auquel le soignant s'était attaché s'est rétabli par exemple ou s'il y a une reconnaissance du soignant.

    · Enfin, le soignant peut également ressentir de la peur. Cette réaction survient s'il y a un danger. En ce qui concerne l'infirmière, la faute professionnelle est une cause de cette peur.

    Ainsi, nous pouvons retrouver différents types d'expériences émotives, qui sont au nombre de quatre :

    - Les émotions simples qui sont celles qu'il est nécessaire de ressentir afin de repérer ce qui est important pour nous, soignants.

    - Les émotions mixtes : elles sont constituées de multiples expériences émotives.

    20

    - Les émotions repoussées : il s'agit plus particulièrement d'expérience corporelle, elles se mettent en place lorsque nous repoussons une émotion.

    - Les pseudos-émotions : elles ressemblent à des émotions, elles représentent plutôt des « façons de dire les choses » en cherchant à traduire l'émotion.

    De plus, il est important de savoir que les émotions sont propres à chacun et sont importantes dans la relation avec autrui.

    Selon Rudolf Steiner, philosophe, il existe un concept qui est « l'alphabétisation émotionnelle » qui est composée de trois capacités :

    · « Comprendre ses émotions

    · Ecouter les autres et entrer en empathie avec leurs émotions

    · Exprimer des émotions de façon productive »

    Enfin, selon Formarier et Jovic, les émotions adoptent une place différentes dans la pratique de l'infirmier(e) :

    · Les émotions sont nécessaires ; il n'est pas possible de travailler sans elles.

    · Les émotions sont régulées et reconnues : il est normal d'avoir des émotions puisque nous travaillons face à des humains.

    · Les émotions sont réprimandées : il est important de lutter contre les émotions de la personne que l'on a en face de soi et ne pas se laisser dépasser par celles-ci.

    Dans la relation avec le patient, il est important que nous puissions percevoir les émotions, les comprendre et voir la répercussion qu'elles peuvent avoir sur les nôtres et sur notre comportement envers le patient que ce soit dans un sens positif ou péjoratif.

    Mais, le fait que le soignant exprime ses émotions peut être néfaste s'il n'est pas capable de les maitriser.

    21

    Selon Margot PHANEUF, « l'intelligence émotionnelle est primordiale pour la relation soignante car elle humanise les soins 25».

    Ainsi, nous pouvons gérer nos émotions grâce au travail émotionnel.

    Un des éléments clés pour réussir la relation, est le travail sur les émotions.

    d- Le travail émotionnel

    Dans le milieu professionnel, les émotions doivent être gérées par les travailleurs et dans les établissements de santé, les professionnels ont un travail émotionnel qui est encore mal reconnu malgré son importance pour la qualité des soins et pour leur santé. De ce fait, ils bénéficient de formations dans lesquelles ils apprennent des techniques afin de maitriser leurs émotions : on y retrouve de la relaxation par exemple.

    Ce travail émotionnel est primordial lors des soins.

    Il y a trois stratégies collectives de travail émotionnel qui sont mises en place par les soignants :

    - Premièrement, il y a « valorisé, donner du sens » : C'est-à-dire les contraintes et les difficultés rencontrées sont valorisées et ne deviennent plus si pénible.

    - Ensuite, la deuxième stratégie est « agir ensemble », elle correspond à l'entraide de l'équipe afin de résoudre les difficultés.

    - Enfin, la 3ème stratégie est « se positionner, contester ».

    Il est donc important de partager ses émotions afin d'y faire face, au sein d'un groupe de parole, et de construire un sens acceptable aux difficultés.

    Afin de se protéger en tant que soignant, il est donc essentiel de savoir mettre des limites à ses émotions. Ainsi Martine SCHACHTEL, ancienne infirmière, a dit « l'infirmière doit savoir discrètement retenir ses émotions, ne pas laisser paraître la peur, l'angoisse, le dégoût, la pitié 26».

    25 « L'intelligence émotionnelle, un outil de soins », Margot Phaneuf

    26 Martine Schachtel, « J'ai voulu être infirmière ». page 213

    22

    Lors de l'annonce d'un diagnostic, le soignant est donc le premier à être confronté à cette mauvaise nouvelle. Celui-ci se sent donc coupable de devoir annoncer cette mauvaise nouvelle au patient. Dans ces situations, le soignant se projette donc sur sa propre vie et donc va angoisser sur sa propre mort en tant qu'être humain, cela est donc un phénomène naturel. Il sera donc important de faire preuve de capacité d'adaptation afin de se préparer à ce qui pourrait arriver. Il faut s'adapter à chaque patient, à chaque pathologie, à chaque histoire de vie ...

    Dans le livre, « le travail émotionnel des soignants à l'hôpital », Catherine Mercadier, infirmière et sociologue évoque que « la maîtrise des émotions est une obligation implicite, intériorisée par le soignant au cours de sa sociabilisation professionnelle. 27» La gestion des émotions du soignant a besoin d'un véritable travail émotionnel afin que le soignant puisse être professionnel dans sa relation avec le patient et ainsi être neutre.

    Afin de travailler auprès des patients, il est important de développer des capacités émotionnelles. Tout d'abord, il faut s'intéresser à la gestion de nos propres émotions, ce qui veut dire la connaissance de soi et la gestion de soi.

    Ainsi, nous pouvons définir la connaissance de soi comme un « savoir » que la personne a appris sur elle durant ses diverses expériences de la vie donc celle-ci va permettre à la personne d'adapter ses réactions.

    Lors de soins difficiles, comme ici, l'annonce d'un diagnostic de cancer, le soignant aura des difficultés pour avancer s'il n'a pas de connaissance sur lui-même. En effet, selon ASPAR J., pédiatre, la connaissance de soi est donc importante afin de gérer des situations difficiles. L'infirmier doit être capable de connaître ses propres limites. Le fait de se connaitre est un processus qui sera acquis tout au long de notre vie. L'individu va apprendre à connaître ses propres réactions lorsqu'il aura vécu une situation, cependant, il sera plus facile pour lui de gérer les situations non prévues.

    Le soignant parait plus « compétent » dans l'anticipation de ses réactions lorsqu'il se connait. Selon FRENOT Jean-Yves, dans son livre « la process communication au service de la relation soignant-soigné », il déclare « la connaissance de soi nous

    27 Catherine Mercadier, « le travail émotionnel des soignants à l'hôpital ».

    23

    permet de situer nos forces et nos limites, et ainsi d'identifier le moment subtil où nos comportements s'altèrent sous l'emprise du stress 28».

    De plus, au quotidien, il existe différents moyens de gérer nos émotions. Les moyens les plus répandus avec plus de 50% sont :

    - Parler à quelqu'un

    - Combattre les pensées négatives

    Ensuite, il y a d'autres moyens comme écouter de la musique, rester seul, se reposer, faire du sport...

    Au fil de l'expérience vécue, le soignant régulera ses émotions soit de façon contrôlée donc consciente ou automatique c'est-à-dire inconsciente. La plupart des épisodes de régulation se déroulent inconsciemment, c'est-à-dire grâce à la mise en place de mécanismes de défenses.

    e- Les mécanismes de défense

    Selon Henri CHABROL, professeur en psychopathologie, des mécanismes de défenses sont « des opérations mentales involontaires et inconscientes qui contribuent à atténuer les tensions internes et externes 29».

    De plus, selon Anna FREUD, ce sont « des procédés inconscients employés principalement par le Moi dans différentes organisations psychiques30 ».

    Dans son livre « face à la maladie grave », Martine RUSZNIEWSKI dit que le fait de comprendre les mécanismes de défenses mis en place par les soignants est important pour « l'amélioration de la relation avec les patients, et pour une meilleure prise en charge thérapeutique, car identifier ses défenses, c'est aussi se révéler plus apte à reconnaitre celle du patient 31».

    Les mécanismes sont des moyens de se protéger contre une émotion.

    Il est important de savoir que le soignant utilise des mécanismes de défenses pour se protéger d'un événement pouvant lui procurer une angoisse, un malaise ou bien une souffrance. L'infirmier(e) est amené à mettre en place ces mécanismes inconscients afin de faire face à ses émotions. La mise en place de ces processus

    28 Frenot Jean-Yves, « La process communication au service de la relation soignant - soigné », page 7

    29 Henri Chabrol, « Recherches en soins infirmiers », les mécanismes de défense.

    30 Anna Freud, www.universalis.fr

    31 Martine Ruszniewski, « face à la maladie grave »

    inconscients change le comportement du soignant et donc cela peut impacter la relation soignant - soigné.

    Ainsi, les mécanismes de défenses les plus utilisés par les soignants seront :

    · La banalisation : le soignant ne va se concentrer que sur une seule partie du malade par exemple, il va traiter la maladie avant de traiter le patient.

    · Le mensonge : le soignant ne dira pas la vérité au patient, par exemple le soignant va plutôt employer le mot « polype » que « cancer ». Il s'agit d'un mécanisme de « l'urgence ».

    · L'esquive : le soignant va répondre au patient mais parlera d'un sujet différent. Il va s'éloigner du sujet.

    · La fausse réassurance : par exemple, le soignant va dire au patient que la chimiothérapie va très bien se passer qu'il ne faut pas s'inquiéter alors que le patient sera en phase terminale.

    · L'agressivité : le soignant va se sentir « agressé » par la souffrance du patient. Ce mécanisme de défense peut être dû à une culpabilité de la part du soignant. Il mettra en place cette attitude afin de s'éloigner du patient et cela mettra donc en difficulté la relation avec le patient.

    · L'évitement : le soignant va tout faire pour éviter le patient. Ce mécanisme de défense peut amener à créer une rupture de la relation avec le patient.

    · La dérision : le soignant va dire au patient qu'il y a une exagération de sa souffrance.

    · L'identification projective : le soignant ne mettra pas de distance avec le patient. Il va plutôt s'identifier à travers le patient.

    · 24

    La fuite en avant : le soignant va tout fuir.

    ·

    25

    Les stratégies de coping : il y aura les stratégies centrées sur le problème mais également celles centrées sur l'émotion.

    C- Conclusion du cadre théorique

    Pour conclure sur mon cadre théorique, le cancer est un véritable problème de santé publique et il est la première cause de mortalité en France. L'annonce d'un diagnostic de cancer est un moment traumatique pour le patient. Afin que cela soit moins traumatique pour le patient, le plan cancer a mis en place dans la mesure 40, un dispositif d'annonce afin de suivre et d'aider le patient dans cette étape difficile. Les infirmières travaillant dans ce dispositif ont une moyenne d'âge de 45 - 50 ans. Dans l'ouvrage, « regards d'infirmières sur le dispositif d'annonce du cancer », selon le témoignage d'un médecin, une jeune diplômée aura plus de difficulté à trouver les mots et sera plus touchée. Pour reprendre ma question de départ qui était « en quoi l'annonce d'un diagnostic de cancer a un impact sur la relation soignant - soigné ? », j'ai donc recherché ce qu'était également une relation soignant - soigné. Afin de créer une bonne relation avec le patient, le soignant adopte des attitudes comme la relation d'aide par exemple, il y a également des émotions et il doit respecter une « juste distance ».

    Ainsi, le fait d'exprimer nos émotions peut avoir des répercussions sur la relation avec le soigné, c'est pour cela que lors de l'annonce d'un diagnostic de cancer, il est important de faire preuve de capacité d'adaptation et d'avoir une connaissance de soi afin de mieux gérer les situations imprévues.

    Si je reprends ma situation d'appel, lorsque je discutais avec la patiente j'ai éprouvé des émotions dont elle s'est aperçue et j'avais mis en place un mécanisme de défense afin de me protéger qui était la fuite en avant ... C'est donc pour cela, que pour moi, la relation qui aurait dû se faire avec la patiente n'a pas pu être faite correctement.

    Mais, ma réflexion repose toujours s'il s'agit du fait que je n'avais pas d'expérience qui a fait que je n'ai pas su gérer mes émotions devant la patiente.

    26

    V. Hypothèses de recherche

    Après avoir effectué mon cadre théorique, mon hypothèse générale serait que l'expérience aurait une influence sur la gestion des émotions de l'infirmière lors de l'annonce d'un diagnostic de cancer. Je souhaite travailler sur cela parce que lors de la situation vécue avec la patiente, je n'ai pas réussi à gérer mes émotions alors que l'infirmière qui était présente avec moi à réussi.

    Ainsi cette hypothèse pourrait se décliner en 3 hypothèses :

    - L'apprentissage permettrait de développer ses compétences dans la gestion des émotions.

    - La maitrise professionnelle permettrait de développer la capacité d'adaptation.

    - Le repérage des émotions permettrait la connaissance de soi.

    VI. Méthode

    1) Outil utilisé

    Afin de valider mon hypothèse ou non, j'ai réalisé des entretiens semi-directifs auprès d'infirmiers dans différents services.

    J'ai souhaité faire des entretiens tout d'abord pour recueillir des données personnels, puisque les entretiens sont faits individuellement.

    De plus, durant des entretiens, il s'agit de questions ouvertes et donc l'infirmier(e) est libre dans ses réponses et peut aborder les thèmes qu'il veut.

    Enfin, j'ai choisi cette méthode afin de recueillir le plus d'informations possibles auxquelles je n'aurais peut-être pas pensé d'aborder, et cela permet également d'illustrer les différentes situations ou point de vue par des exemples ce qui permet une meilleure compréhension.

    2) Population ciblée

    Pour réaliser mes entretiens semi-directifs, j'ai décidé d'interroger des infirmier(e)s travaillant en service d'oncologie puisque le cancer est le sujet principal de mon travail de fin d'étude, j'ai également interrogé des infirmières travaillant dans un

    27

    service de pneumologie. Mon choix s'est tourné vers le service de pneumologie puisque j'avais déjà réalisé un stage en 2ème année dans un service de pneumologie et des annonces de cancer étaient réalisées. De plus, j'ai pu échanger avec une infirmière qui travaille dans ce service et elle était très intéressée par mon sujet de mémoire et m'a donc proposé de venir effectuer mes entretiens auprès d'elle et ses collègues puisqu'elles sont souvent confronter à l'annonce d'un diagnostic de cancer.

    De plus, j'ai interrogé des infirmier(e)s ayant plus ou moins d'expérience puisque mon hypothèse générale concerne l'expérience.

    J'ai donc interrogé 8 infirmier(e)s :

    · Un infirmier ayant 4 ans d'expérience, travaillant en service d'oncologie dans une clinique.

    · Une infirmière ayant 23 ans d'expérience, travaillant en service d'oncologie dans une clinique.

    · Une infirmière ayant 36 ans d'expérience, travaillant en service d'oncologie dans un hôpital.

    · Une infirmière ayant 9 mois d'expérience, travaillant en service d'oncologie dans un hôpital.

    · Un infirmier ayant 13 ans d'expérience, travaillant en service d'oncologie ainsi que dans le dispositif d'annonce du cancer, dans un hôpital.

    · Une infirmière ayant 18 ans d'expérience, travaillant en service de pneumologie.

    · Une infirmière ayant 9 mois d'expérience, travaillant en service de pneumologie depuis 1 mois.

    ·

    28

    Une infirmière ayant 6 ans d'expérience, travaillant en service de pneumologie.

    3) Mise en place de l'enquête

    Avant d'interroger les infirmiers, j'ai réalisé une grille d'entretien (cf annexe) en écrivant des questions en lien avec mes hypothèses.

    Une fois ma grille d'entretien terminée, je l'ai envoyé à ma référente mémoire afin de la valider. Ma référente me la validé et m'a donné son autorisation pour aller enquêter.

    Pour réaliser mes entretiens à la clinique, je suis allée sur internet pour rechercher les coordonnées de la personne à qui je devais m'adresser. J'ai envoyé un message électronique à une personne mais qui n'était pas la bonne. J'ai tout de même eu une réponse avec les coordonnées de la personne à contacter qui était la directrice des soins. Dans mon message, je me suis présentée, je lui ai fait part de mon sujet et je lui ai joints ma grille d'entretien pour qu'elle puisse la consulter avant mon passage.

    Le jour même de ma demande, j'ai eu l'accord de la directrice des soins pour venir effectuer mes entretiens dans le service d'oncologie comme je le souhaitais. Après avoir réaliser mes entretiens, je suis allée à sa rencontre afin qu'elle me signe l'autorisation.

    Pour mes entretiens au sein de l'hôpital, j'ai envoyé un mail à la cadre responsable des étudiants, comme pour la clinique, je me suis présentée et j'ai joints ma grille d'entretien. Comme je souhaitais les effectuer dans le pôle médecine, celle-ci a transféré ma demande à la cadre du pôle. Une semaine après, j'ai reçu une réponse, j'avais donc l'autorisation pour effectuer mes entretiens dans les services d'oncologie et de pneumologie. La cadre du pôle m'a, ensuite, donné les coordonnées de chaque cadre de service. J'ai contacté la cadre du service d'oncologie afin de l'avertir que je viendrais réaliser des entretiens pour mon mémoire dans son service, elle a tout de suite accepté et m'a donné une date pour venir. J'ai également contacté le cadre du service de pneumologie qui m'a demandé de recontacter la cadre de pôle puisqu'il partait en congé et ne serait donc pas

    29

    présent le jour de ma venue. J'ai donc de nouveau téléphoné afin de prévoir une date pour ce service.

    Le jour de mes entretiens, je me suis rendue dans le service directement et je suis allée me présenter auprès de la cadre. Celle-ci m'a donc orienté vers chaque infirmier qui était en poste ce jour et leur a demandé s'ils étaient d'accord pour répondre à mes questions.

    A chaque début d'entretien, je me suis présentée, j'ai rappelé à l'infirmier(e) que c'était totalement anonyme et j'ai également demandé l'autorisation de les enregistrer pour que cela soit plus facile pour moi de retranscrire ensuite et de pouvoir observer les réactions du soignant interrogé. Tous ont accepté.

    VII- Résultats

    1) Analyse quantitative et qualitative

    J'ai décidé d'analyser mes entretiens question par question.

    Question 1 : Depuis quand exercez- vous le métier d'infirmier ? Quel est votre âge ?

    Résultats

    IDE 1

    - Depuis 4 ans

    - Age : 26 ans

    IDE 2

    - Depuis 23 ans

    - Age : 46 ans

    IDE 3

    - Depuis 36 ans

    - Age : 57 ans

    IDE 4

    - Depuis 9 mois

    - 23 ans

    IDE 5

    - Depuis 13 ans

    - Age : 41 ans

    IDE 6

    - Depuis 18 ans

    - Age : 40 ans

    IDE 7

    - Depuis 9 mois

    - Age : 24 ans

    IDE 8

    - Depuis 6 ans

     

    30

    - Age : 29 ans

    Sur 8 infirmiers interrogés, 3 sont diplômés depuis moins de 5 ans dont 2 qui n'ont que 9 mois d'expérience et 5 ont plus de 5 ans dans le métier.

    En ce qui concerne l'âge, ça varie entre 23 ans et 57 ans. Ce qui veut dire que des infirmiers ont vécu plus de choses dans leur vie que d'autres ainsi nous pouvons constater que le panel d'infirmiers est élargi, ce qui va permettre une analyse de qualité et des réponses variées.

    Nous pouvons donc remarquer que l'IDE 4 et l'IDE 7 ont peu d'expérience contrairement à l'IDE 3 qui m'informe qu'elle partira en retraite la semaine suivant notre entretien.

    En effet, l'IDE 1 et l'IDE 4 ont commencé leur carrière en oncologie et le sont toujours. En ce qui concerne l'IDE 4, elle a également effectué 4 stages dans des services d'oncologie ou de chimiothérapie.

    Ainsi, nous pouvons dire que l'IDE 1 est un infirmier compétent dans le domaine de l'oncologie dû fait de son expérience depuis son diplôme c'est-à-dire il y a 3 ans.

    Concernant l'IDE 4, elle a effectué divers stages lors de sa formation en oncologie et en chimiothérapie ; mais elle n'a qu'environ 1 an d'expérience dans ce domaine. On peut alors dire qu'il s'agit d'une infirmière débutante dans le domaine de l'oncologie.

    L'IDE 8 travaille en pneumologie depuis qu'elle est diplômée. Dans ce service, des annonces de cancer sont réalisées également ainsi, cette infirmière a donc des connaissances et des compétences concernant ce sujet.

    L'IDE 5, avant, n'était pas dans le domaine du paramédical mais travaille en oncologie depuis quelques années déjà et intervient également dans le dispositif d'annonce. Ainsi, nous constatons qu'il a de l'expérience dans ce domaine.

    L'IDE 7 travaille dans le service de pneumologie depuis 1 mois uniquement. En effet, auparavant, elle travaillait en gériatrie ce qui permet de constater qu'elle n'a pas beaucoup d'expérience dans le domaine de l'annonce d'un cancer.

    31

    Enfin, les IDE 2, 3, 5 ont travaillé dans d'autres services avant d'intégrer les services d'oncologie ou de pneumologie. Ils ont travaillé aux urgences, en SSR, en EHPAD ... Ces infirmières ont donc acquis divers compétences et connaissances, nous pouvons dire qu'elles ont assez d'expérience.

    Nous pouvons donc constater que chaque infirmier a un parcours différent et donc des expériences différentes.

    Question 2 : pour vous, qu'est-ce qu'une émotion ?

    Résultats

    IDE 1

    - Un ressenti, tout ce que ne peut

    pas être visible

    IDE 2

    - Difficile à définir

    - Pleins de choses

    - Un ressenti

    - Peut être négatif ou positif

    IDE 3

    - Sentiment que l'on ressent plus

    ou moins facile à gérer

    IDE 4

    - N'a pas vraiment de définition

    - C'est quelque chose en nous

    - Propre à chacun

    - Ça va toucher une personne en

    fonction de son vécu

    IDE 5

    - Un ressenti

    - Peut prendre des proportions

    différentes selon les personnes

     

    32

    - Tous les sens sont en action

    IDE 6

    - Un sentiment que l'on ressent

    sur un moment, sur un instant

    devant une situation posant

    problème ou qui nous ravis

    IDE 7

    - Un ressenti qui peut être positif

    ou négatif

    IDE 8

    - Un ressenti positif ou négatif

    suite à une situation

     

    Pour 7 infirmiers sur 8, une émotion est un ressenti, un sentiment suite à une situation. Parmi les 7, il y en a 4 qui évoquent le fait qu'elle peut être négative ou positive et 1 infirmier dit qu'une émotion pourra prendre des proportions différentes selon l'individu.

    Pour 2 personnes, il s'agit d'un terme difficile à définir. En effet, une infirmière a eu des difficultés à donner une définition de ce terme en disant qu'il s'agit de « quelque chose en nous, que ça touchera la personne en fonction de son vécu » et qu'«il n'y a pas vraiment de définition mais c'est une chose propre à chacun. »

    Enfin, 3 infirmiers disent qu'une émotion peut être plus ou moins facile à gérer et que cela dépendra des personnes.

    Ainsi, selon mes différentes recherches, je retrouve qu'une émotion est quelque chose de difficile à définir selon Ferh et Russel (1984), et selon le Larousse il s'agit « d'un trouble subit, une agitation passagère causée par un sentiment vif de peur, de surprise, de joie ... C'est également une réaction affective transitoire d'assez grande intensité, habituellement provoquée par une stimulation venue de l'environnement32. »

    De plus, effectivement, une émotion peut être positive ou négative comme la joie, la tristesse, la colère ... et celle-ci serait gérée de façon différente selon la personne.

    32 Larousse (en ligne)

    33

    Enfin, malgré les réponses différentes de chaque infirmier, leur « définition » de l'émotion se rapproche de la théorie.

    Question 3 : êtes-vous souvent

    confronter à l'annonce d'un
    diagnostic de cancer ?

    Résultats

    IDE 1

    - Oui, tout le temps

    IDE 2

    - Peu mais annonce de

    métastases, de récidive oui !

    IDE 3

    - Oui, « je suis plus protégée que

    certains collègues »

    IDE 4

    - Oui

    IDE 5

    - Oui, tout le temps, plusieurs par

    jour

    IDE 6

    - Oui, régulièrement

    IDE 7

    - Très peu

    IDE 8

    - Oui, tout le temps

     

    6 infirmiers sur 8 sont tout le temps confrontés à l'annonce d'un diagnostic de cancer et 2 sont peu confrontés à ces annonces.

    En effet, un infirmier est confronté à ces annonces plusieurs fois par jour en ce qui le concerne, puisqu'il travaille au sein du dispositif d'annonce.

    Une infirmière rencontre tout le temps des annonces de diagnostic et généralement lorsque l'annonce est faite, le patient est déjà à un stade qui nécessite une hospitalisation, c'est donc à ce moment qu'elle est faite.

    L'IDE 3 est aussi confronté à ces annonces mais se sent « plus protégée » que certains collègues puisqu'elle reçoit plutôt les patients en 3ème ou 4ème cure.

    En ce qui concerne l'IDE 4, lorsque le patient arrive, il a déjà reçu son diagnostic mais une seconde annonce est réalisée afin de voir s'il a compris les différents termes. Elle est donc plus dans l'écoute et l'accompagnement.

    2 infirmiers disent qu'ils sont très peu confrontés à cette annonce. Il s'agit de l'IDE 2 et l'IDE 7 mais elles affirment qu'elles l'ont déjà vécu.

    34

    L'IDE 2 dit qu'elle est plus confrontée à l'annonce de métastases ou de récidives mais rarement à une première annonce et dit que généralement les annonces se font dans le bureau du médecin sans infirmière sauf si le patient doit être hospitalisé là, l'infirmière est présente. Contrairement à l'IDE 7 qui déclare qu'elle en voit peu puisqu'elle est jeune diplômée.

    Enfin, nous pouvons constater que chaque infirmier a déjà plus ou moins était confronté à l'annonce d'un diagnostic de cancer.

    Question 4 : comment réagissez- vous lorsque le patient reçoit son diagnostic de cancer ?

    Résultats

    IDE 1

    - Explications et reformulation au

    patient en étant calme

    - Accompagnement

    IDE 2

    - Touchée

    - C'est difficile

    IDE 3

    - Ecoute

    IDE 4

    - Explications

    - Ecoute

    - Heureux si le traitement est bien

    - Difficile si mauvais pronostic

    IDE 5

    - Ressent des émotions

    - Ecoute

    IDE 6

    - Touchée

    - Ne laisse pas insensible

     

    35

    - Ça dépend également de la

    relation entretenue avec le
    patient

    IDE 7

    - Comme avec tous les autres

    patients

    IDE 8

    - Compatissante

    - Reformulation

    - Ne pas pleurer

     

    5 infirmiers sur 8 reformulent, expliquent les termes aux patients et les écoutent. Ils sont donc dans une posture d'écoute active et d'accompagnement. Ils laissent le patient dire tout ce qu'il souhaite dire. Par contre, s'il n'emploie pas le mot « cancer » ou ne parle pas du tout de sa maladie, le soignant ne va pas lui parler de ça.

    Ainsi, nous pouvons remarquer que les soignants réalisent ce qu'il est important de faire durant le temps d'accompagnement soignant. En effet, durant ce temps, il faut accueillir le patient ainsi que sa famille pour les écouter mais également pour reformuler les différents termes que le médecin aurait pu employer.

    De plus, l'écoute active est un élément clé afin de créer une relation d'aide.

    5 personnes ressentent des émotions, elles trouvent que cela est un moment difficile et sont donc touchées. Une personne sur les 5 déclare ressentir des émotions négatives donc de la tristesse, lorsque le traitement ne fonctionne pas mais également des émotions positives qu'elle partage avec le patient lorsque le traitement fonctionne bien.

    Le fait que ce moment soit ressenti comme difficile par le soignant est normal mais toute fois, il sera important de faire attention au non verbal.

    Une infirmière déclare qu'elle a réussi à « se forger une carapace » avec le temps. Aussi, une infirmière dit qu'elle essaie de ne pas pleurer devant le patient puisqu'il a besoin de quelqu'un de « fort » pour l'accompagner. Dans mes recherches, je

    36

    retrouve effectivement qu'avec le temps, le soignant va « se forger » et sera toujours en évolution.

    Par contre, 1 infirmière, qui est jeune diplômée déclare de manière très spontanée qu'elle n'a pas de réaction particulière et évoque le fait qu'elle réagit comme avec tous les autres patients. Suite à cette réponse, j'ai essayé de prendre un peu de recul en me questionnant : peut-être que cette infirmière n'ose pas exprimer le fait qu'elle a des émotions par peur de jugement ou de honte ? Cela, ne serait qu'une hypothèse et non une certitude ... Pour le moment, au vu des diverses réponses, cette réponse n'est pas exploitable.

    Question 5 : bénéficiez-vous

    suffisamment de formation vous

    permettant d'être préparé à
    l'annonce d'un cancer ?

    Résultats

    IDE 1

    - Oui, grâce à une formation sur

    les soins palliatifs

    IDE 2

    - Non

    - Ne voit pas l'intérêt d'en avoir

    puisque difficile d'être préparé à cela

    IDE 3

    - Oui, formation sur

    l'accompagnement post-
    annonce

    - Jamais suffisant

    - Formé avec l'expérience

    IDE 4

    - Non, aucune formation depuis

    mon arrivée dans le service

    IDE 5

    - Non

     

    37

    - On ne peut jamais être préparé à

    tout

    - Formation pour rentrer dans la

    consultation d'annonce mais plus avec des exemples de situations

    IDE 6

    - « Je ne les ai pas faites »

    - Formée et habituée avec

    l'expérience

    - « Si j'en ressentais le besoin, je

    demanderais une formation »

    - Différentes formations

    reviennent à ce sujet

    IDE 7

    - Non

    IDE 8

    - Non, mais d'accord pour en avoir

    une.

    - A déjà demandé une formation

    de 3 jours mais n'a pas pu y aller

     

    Sur les 8 infirmiers qui ont été interrogés, 1 pense être suffisamment formé, notamment grâce à une formation sur les soins palliatifs où il a pu apprendre les différentes questions qui pouvaient être posées par le patient ou par la famille.

    2 sur 8 pensent qu'il n'y a pas de formation qui puisse permettre d'être préparé à ce genre d'annonce mais parmi ces 2 personnes, 1 a bénéficié d'une formation pour rentrer au sein du dispositif d'annonce. Ainsi, afin de rentrer au sein du dispositif d'annonce, il y a une formation minimale qui est demandée, celle-ci se fait sur la base du volontariat.

    38

    Enfin, des formations sont proposées par des professionnels expérimentés afin que les établissements de santé puissent bénéficier de celles-ci.

    De plus, 2 personnes évoquent le fait qu'elles ont été « formées » avec l'expérience. En effet, la maitrise des tâches lors de l'annonce d'un diagnostic de cancer peut être liée à l'expérience mais également à l'ancienneté et à l'âge de la personne. Lorsque l'infirmière montre une certaine expérience, les familles se sentent plus en confiance.

    Question 6 : avez-vous des

    émotions lors de l'annonce d'un diagnostic de cancer au patient ? Si

    oui, quelles sont les types
    d'émotions que vous éprouvez ?

    Résultats

    IDE 1

    - Oui, dépend de la situation du

    patient

    - Souvent de la tristesse

    IDE 2

    - Oui, toujours

    - De la tristesse

    - De l'empathie

    IDE 3

    - Toujours, car transfert et par

    rapport à son histoire de vie, sa famille, son âge

    - Un peu de tristesse et de colère

    IDE 4

    - Oui, mais plus s'il décède

    - Un peu de tristesse, de

    l'empathie

     

    39

    IDE 5

    - Oui, mais c'est le contexte de la

    personne qui fait que j'ai des émotions

    - Tristesse

    IDE 6

    - Oui, mais par rapport à son

    histoire de vie, son âge ...

    - De la tristesse, de la

    compassion, de l'empathie

    - Transfert

    IDE 7

    - Oui, mais lorsqu'il parle de sa

    famille ou par rapport à son
    devenir

    - Tristesse

    IDE 8

    - Oui, selon la personne, l'âge, s'il

    a encore des enfants

    - Tristesse, colère parce qu'ils ne

    méritent pas ça

     

    La totalité des personnes interrogées ont des émotions lors de l'annonce d'un diagnostic de cancer et tous éprouvent de la tristesse.

    Parmi les 8, il y en a 2 qui éprouvent également de la colère parce qu'elles pensent que le patient ne mérite pas cela.

    Il y en a 3 personnes qui éprouvent de l'empathie.

    5 personnes parmi les 8 qui ont des émotions lors de l'annonce d'un diagnostic de cancer, ne sont pas liées à l'annonce en elle-même. Celles-ci sont liées à l'histoire de vie de la personne, selon son âge, si la personne a des enfants ou non, selon son contexte de vie.

    40

    1 personne ressent des émotions surtout lorsque le patient décède et 1 infirmière lorsque le patient parle de sa famille ou s'intéresse à son devenir.

    2 infirmiers déclarent également être joyeux, ils partagent cela avec le patient, surtout lors des chimiothérapies. Une personne déclare « lorsque le traitement fonctionne bien, je suis contente avec le patient » et l'autre dit « on rigole beaucoup avec nos patients, c'est la joie de vivre ici ! » Au regard de ces réponses, nous constatons effectivement qu'il n'y a pas que des émotions négatives comme la tristesse ou la colère qui ressort. Par contre, les émotions positives sont partager avec le patient contrairement aux émotions négatives qui essaient d'être gérées ou cachées...

    En ce qui concerne les émotions, nous remarquons, en effet, qu'il y a 6 émotions de base selon Charles DARWIN : la joie, la surprise, la colère, la tristesse, la peur et le dégoût. Donc les infirmiers qui ont été interrogés ressentent des émotions de base.

    Selon mes différentes recherches, le soignant ressent de la tristesse suite au décès d'un patient ou bien lors de la prise en charge d'un patient ayant une pathologie incurable ou lourde, ici, le cancer fait donc parti d'une pathologie lourde donc il est normal que l'infirmier ressente de la tristesse.

    D'autres déclarent ressentir de l'empathie, il s'agit d'une capacité de s'identifier à l'autre afin de comprendre ce qu'il ressent. Ainsi, l'empathie est une réponse émotionnelle. Il s'agit d'un concept important dans la relation d'aide.

    Question 7 : lorsque vous avez des difficultés lors de la gestion de vos émotions, comprenez-vous ce qui pose problème ?

    Résultats

    IDE 1

    - Contexte du patient

    IDE 2

    - La façon dont, c'est annoncé

    - Identification possible

    IDE 3

    - Age du patient

     

    41

    - Identification

    IDE 4

    - Pas assez d'expérience

    IDE 5

    - Oui, contexte du patient

    IDE 6

    - Par rapport à l'âge du patient

    - Identification

    IDE 7

    - Devenir du patient

    IDE 8

    - Le vécu personnel

    - L'annonce brutale de la part du

    médecin

    - Histoire de vie de la personne

    (jeune, enfants...)

     

    Pour 5 infirmiers sur 8, ce qui pose problème dans la gestion de leurs émotions est le contexte du patient, son histoire de vie, son âge ... Et surtout lorsqu'il s'agit d'un patient jeune ou bien un patient qui a encore de jeunes enfants ...

    En effet, suite au témoignage d'une infirmière dans l'ouvrage « regards d'infirmières sur le dispositif d'annonce d'un cancer », l'histoire de vie du patient peut générer des émotions.

    3 personnes se trouve en difficulté puisqu'elles déclarent s'identifier au patient parmi les 3, il y en une qui évoque son vécu personnel également.

    1 infirmière dit que le problème est qu'elle n'a pas assez d'expérience et 1 autre dit que le devenir du patient lui pose problème dans la gestion de ses émotions, notamment lorsqu'il s'agit du décès.

    Enfin, 2 personnes pensent qu'elles pourraient avoir des difficultés à gérer leurs émotions, suite à une annonce trop brutale de la part du médecin.

    En effet, lors de l'annonce d'un diagnostic de cancer, il n'y a pas de bonne ou de mauvaise annonce ... Certes, dans mes recherches je retrouve comme certaines

    42

    infirmières peuvent le déclarer, des annonces qui sont réalisées de façon plus ou moins brutale.

    De plus, des infirmières déclarent s'identifier au patient. N'ayant pas exploiter cette notion dans mon cadre théorique, j'ai donc réalisé des recherches à ce sujet.

    L'identification est, selon Lalande (1968), « un processus psychologique par lequel un individu A transporte sur un autre B, d'une manière continue plus ou moins durable, les sentiments qu'on éprouve ordinairement pour soi, au point de confondre ce qui arrive à B avec ce qui lui arrive à lui-même33 ».

    Dans la psychanalyse, ce concept découle d'un attachement affectif à une personne, ici il s'agirait d'un attachement au patient. C'est donc pour cela, qu'il est important de respecter une distance professionnelle. Selon l'article « le mal-être quotidien du soignant », « bien soigner requiert une certaine dose d'identification au malade 34». Mais, l'identification peut en effet être considérer comme source de frein aux soins malgré qu'elle puisse générer de l'aide ou de la compassion.

    Question 8 : comment repérez-vous vos émotions ?

    Résultats

    IDE 1

    - « Je me connais » 4

    connaissance de soi

    - Reste calme

    IDE 2

    - « Je sais comment je suis » 4

    connaissance de soi

    IDE 3

    - « Je sens que je commence à

    rougir » 4 connaissance de soi

    IDE 4

    - « Je ne suis pas expressive du

    tout »

    IDE 5

    - « par la RAGE »

     

    33 https://www.cnrtl.fr/definition/identification

    34 Article « le mal-être quotidien du soignant » (Ethique et amp) ; santé, volume 1, n°2 - mai 2004, pp 77

    43

    - « J'ai repéré un problème

    émotionnel, quand j'ai besoin de parler »

    IDE 6

    - « Je me connais, ça me prend un

    peu à la gorge, j'aurai peut-être envie de verser une larme » 4 connaissance de soi

    - Marquée par la situation

    IDE 7

    - Ne sait plus quoi dire, ne parle

    plus 4 va communiquer par le

    non-verbal (prendre la main,
    faire un geste) ? connaissance de soi

    IDE 8

    - « Moi ça monte tout de suite ! Je

    pleure vite ... Puis je le sens tout de suite quand ça ne va pas aller ... » 4 connaissance de soi

     

    6 personnes sur 8 repèrent leurs émotions grâce à une connaissance de soi.

    En effet, dans mes recherches, selon Rudolf Steiner qui emploie le concept « d'alphabétisation émotionnelle », nous constatons qu'il faut être en capacité de comprendre nos propres émotions. Ainsi, le fait de se connaitre permet d'être plus compétent afin de gérer des situations difficiles comme ici l'annonce d'un diagnostic de cancer. Ainsi, puisque les soignants interrogés ont déjà été confronté à l'annonce d'un diagnostic de cancer à plusieurs reprises, cela leur a permis de connaître leur propre limite donc cela sera plus « facile » pour eux, ici de gérer au mieux leurs émotions.

    1 personne indique qu'elle n'est pas très expressive donc il est compliqué de repérer ses émotions.

    1 personne repère ses émotions surtout lorsqu'elle ressent le besoin de parler de la situation qui la touché.

    44

    Question 9 : faites-vous un travail émotionnel ? Si oui, comment faites-vous ?

    Résultats

    IDE 1

    - Non

    IDE 2

    - Non

    IDE 3

    - Non

    IDE 4

    - ?

    IDE 5

    - Faire activités après le travail

    (sport, courses, promenade ...)

    IDE 6

    - « C'est l'expérience qui le donne

    au fil du temps »

    - « Je le fais naturellement sans

    m'en rendre compte »

    IDE 7

    - Oui, ne parle plus. Utilisation de

    langage non verbal.

    IDE 8

    - « Avec le temps, on se forge »

    expérience

     

    La moitié des personnes dit qu'ils ne font pas de travail émotionnel.

    2 pensent que le travail émotionnel est fait avec le temps, grâce à l'expérience. En effet, le fait de vivre plusieurs fois des situations similaires ou de même type, la gestion sera plus facile et notamment nous pouvons revenir ici, sur le concept de la connaissance de soi, qui au fil des situations vécues, cela nous aura aidé à connaitre nos propres limites et donc une meilleure gestion de nos émotions.

    1 personne fait un travail émotionnel notamment en faisant des activités après sa journée de travail et 1 dit qu'elle ne parle plus et utilise un langage nos verbal (notamment par le regard et le toucher).

    Le fait de réaliser des activités sportives sont, en effet, de travail émotionnel. 1 personne n'a pas répondu à cette question.

    45

    En effet, si je rattache la question suivante (question 10) à cette question, toutes les personnes se sentent soutenues par leurs collègues si elles éprouvent des émotions négatives. Elles n'hésitent pas à en parler entre elles. Dans mes recherches, nous retrouvons que le fait de valoriser, de parler et de s'entraider entre collègues sont des stratégies de travail émotionnel. Donc chaque infirmier réalise un travail émotionnel en parlant de ses émotions à l'équipe, parfois même des infirmiers n'hésitent pas à « passer la main » à certains de leur collègue parce que la situation sera plus difficile.

    Question 10 : si vous éprouvez des

    émotions négatives durant votre
    poste de travail, êtes-vous soutenue par vos collègues ?

    Résultats

     

    IDE 1

    - Oui, énormément

    - Equipe soudée

     

    IDE 2

    - Oui

     

    IDE 3

    - Oui

    - Possibilité de remplacer

    quelqu'un a du mal à gérer

    si

    IDE 4

    - Oui, même par les médecins

     

    IDE 5

    - Oui

     

    IDE 6

    - Oui, discussion avec l'équipe

     

    IDE 7

    - Oui

     

    IDE 8

    - Oui

     
     

    Toutes les personnes sont soutenues par leurs collègues si elles éprouvent des émotions négatives. Elles n'hésitent pas à en parler entre elles.

    (Question rattachée à la question ci-dessus)

    46

    Question 11 : (IDE moins de 5 ans dans le domaine), pensez-vous que vous avez plus de difficultés à gérer

    vos émotions qu'une infirmière
    ayant plus d'expérience que vous lors de l'annonce d'un diagnostic de cancer ?

    Résultats

    IDE 1

    - Absolument pas

    - Mise en place d'une distance

    professionnelle suffisante

    IDE 4

    - Oui, « Moi je n'ai pas assez de

    recul »

    IDE 7

    - Dépend aussi du caractère de la

    personne

    - « L'expérience ça y fait c'est

    sur ! »

     

    Parmi les 3 infirmiers ayant moins de 5 d'expérience, 1 pense qu'il n'a pas plus de difficulté à gérer ses émotions qu'une personne ayant plus d'expérience. Ainsi, il déclare « j'ai même moins de difficulté à gérer mes émotions que certaines anciennes travaillant dans le service ». En effet, celui-ci évoque le fait qu'il arrive à mettre en place une distance suffisante avec le patient.

    Les 2 autres pensent qu'elles ont plus de difficulté qu'une personne ayant de l'expérience parce qu'elles n'ont pas assez de recul ... dont 1 qui pense également que le caractère de la personne joue un rôle dans la gestion des émotions.

    Pour revenir, à la réponse de l'infirmière qui avait déclaré de façon spontanée que sa réaction était la même qu'avec tous les autres patients. Ici, elle évoque que le caractère de la personne peut également être un atout dans la gestion des émotions, en plus de l'expérience. Ainsi, je me pose la question si cette infirmière, a peut-être une personnalité qui permet de se protéger face aux émotions ?

    47

    La personnalité, n'est pas un concept que j'ai développé dans mon cadre théorique. Ainsi, selon Le Larousse, la personnalité est « un ensemble des traits physiques et moraux par lesquels une personne est différente des autres ; aspect par lequel quelqu'un affirme une originalité plus ou moins accusée 35».

    Question 12 : (IDE plus de 5 ans dans le domaine), au fil de vos

    postes de travail, avez-vous
    remarqué une amélioration dans la gestion de vos émotions ? Si oui,

    quelle(s) peut(vent) être la (les)
    raison(s)

    Résultats

    IDE 2

    - Oui

    - Age, expérience

    IDE 3

    - Un peu (même caractère)

    - Connaissance de certaines

    choses 4 apprentissage au fil du temps

    IDE 5

    - Oui

    - L'expérience.

    IDE 6

    - Oui

    - Age, années de métier (4
    expérience)

    IDE 8

    - Oui

    - Expérience, apprentissage

     

    Sur les 5 infirmiers qui ont plus de 5 ans d'expérience, tous ont remarqué une amélioration dans la gestion de leurs émotions.

    35 Larousse (en ligne)

    48

    Pour les 5 personnes, la raison principale est l'expérience. Mais l'apprentissage ressort également, ainsi que l'âge. Ainsi, les années dans le métier font le soignant a réussi, petit à petit, à « se forger une carapace ».

    En effet, dans l'ouvrage « Regards d'infirmières sur le dispositif d'annonce du cancer », l'âge et l'expérience ressort dans les témoignages des différentes infirmières. De même, qu'un médecin déclare qu'une jeune infirmière sortant de l'école ne peut pas faire ce genre d'annonce, puisqu'elle n'a pas assez d'expérience et cela pourrait la toucher émotionnellement.

    Question 13 : pensez-vous que

    l'expérience est un point fort dans la gestion de vos émotions ?

    Résultats

    IDE 1

    - Non

    - Mais quand même un minimum

    d'expérience (pas en année !)

    IDE 2

    - Oui vraiment

    IDE 3

    - Oui

    IDE 4

    - Oui

    - Les plus anciens arrivent à

    mettre des barrières plus
    facilement

    IDE 5

    - Oui

    IDE 6

    - Oui ? indéniable

    - Rôle en tant que plus ancienne

    ? réassurer les jeunes « Ne t'inquiète pas, oui ça te fait mal au coeur mais tu verras avec le temps ... »

    IDE 7

    - Oui

    IDE 8

    - Oui

     

    49

    Pour 7 personnes sur 8, l'expérience est un point fort dans la gestion des émotions dont 1 qui insiste sur le fait que cela est indéniable et que son rôle en tant qu' « ancienne » dans le service est de rassurer les jeunes diplômés par rapport à ce sujet.

    Ainsi, une infirmière pense que les plus anciens arrivent à « mettre des barrières » plus facilement avec les patients grâce à leur expérience. Tandis qu'elle, elle n'arrive pas pour le moment à prendre du recul ...

    Et un infirmier déclare que lorsqu'il était jeune diplômé, il rentrait chez lui directement après le travail et il se retraçait sa journée de travail, il repensait aux patients et à tout ce qu'il avait fait, il affirme que petit à petit, il a réussi à mieux gérer cela, notamment en faisant des activités après sa journée de travail afin de différencier sa vie personnelle et sa vie professionnelle. Chose qui n'était pas faite lorsqu'il était jeune diplômé.

    De plus, une infirmière m'indique qu'au début de sa carrière, elle assistait aux enterrements des patients décédés dans le service mais qu'au fil du temps, elle a réussi à « se forger » et donc maintenant arrive à mieux gérer ses émotions et n'assiste plus aux enterrements.

    1 personne pense que l'expérience n'est absolument pas un point fort dans la gestion des émotions, même si elle indique qu'il faut un minimum d'expérience mais pas en année. Par rapport à cette réponse, j'aurai peut-être dû faire une question de relance en demandant à la personne ce qu'était vraiment pour elle l'expérience.

    En effet, l'expérience est « un savoir-faire, un savoir qui a été acquis par l'usage, par la pratique en dehors d'une connaissance théorique ». De plus, elle peut être inné ou développée grâce à des acquis ou des formations. Donc le fait d'avoir de l'expérience ne veut pas forcément dire qu'il faut avoir de nombreuses dans le domaine ...

    Donc pour tous, l'expérience est effectivement un point fort dans la gestion des émotions.

    50

    Question 14 : d'après vous, existe-il des moyens de gérer vos émotions lors de l'annonce d'un diagnostic de cancer ?

    Résultats

    IDE 1

    - Consulter le psychiatre

    - Direction compréhensive

    IDE 2

    - Ne sait pas

    IDE 3

    - Sophrologie, « mais moi je ne

    sais pas faire »

    IDE 4

    - Peut-être, mais ne connait pas

    IDE 5

    - Se préparer avant l'annonce

    - Pause entre entretien d'annonce

    et écrit du compte rendu

    IDE 6

    - Peut-être, mais ne sait pas

    lesquels

    IDE 7

    - Par le geste, par le regard,

    apaiser les mots

    IDE 8

    - Ne pense pas, « à moins d'avoir

    un coeur de pierre »

     

    3 personnes sur 8 ne connaissent pas ou ne savent pas s'ils existent des moyens de gérer les émotions. Une infirmière déclare « je ne pense qu'il en existe à moins d'avoir un coeur de pierre », ainsi cette réponse m'interpelle un peu, puisque ce n'est pas parce qu'une personne arrive à gérer ses émotions, qu'elle aura un « coeur de pierre », il est possible d'avoir des émotions tout en les gérant.

    Or, lorsque les infirmiers en parlent avec leur collègue de travail, ils effectuent une gestion de leurs émotions. Il existe différentes manières de gérer nos émotions : parler à quelqu'un donc ici les infirmiers le font, combattre les idées négatives ou encore se reposer, rester seul, faire du sport. En effet, un infirmier gère ses émotions en se préparent avant l'annonce et en prenant un temps de repos après l'annonce (se pose un peu entre l'annonce et l'écriture du compte rendu de la

    51

    consultation). Cette méthode permet de penser à autres choses et d'écrire l'essentiel des transmissions sans faire paraitre ses émotions.

    1 personne dit qu'elle pourrait gérer ses émotions en consultant le psychiatre de l'établissement mais ne le fait pas puisqu'il n'en ressent pas le besoin et une autre dit qu'il y a de la sophrologie qui fonctionne très bien pour gérer nos émotions mais elle déclare « moi je ne sais pas faire la sophrologie ». En effet, dans mes recherches, je retrouve qu'il existe des formations pour les soignants ayant des difficultés à gérer leurs émotions et on y retrouve de la relaxation.

    De plus, une infirmière pense qu'il est possible de gérer ses émotions par le geste, par le regard mais également par la parole notamment en apaisant nos mots. Par rapport à cette question, je n'ai pas effectué de question de relance afin de savoir ce qu'elle voulait dire par le geste et par le regard. Ainsi, il ne m'est pas possible d'exploiter cette réponse.

    Enfin, les mécanismes de défenses sont également des moyens qui sont mis en place inconsciemment, afin de gérer nos émotions. Et lorsque le soignant s'identifie au patient, il s'agit d'un mécanisme de défense qui est appelé l'identification projective et il s'agit en effet, d'un mécanisme qui est souvent utilisé par les soignants.

    Question 15 : avez-vous des

    informations supplémentaires à
    m'apporter à ce sujet ?

    Résultats

    IDE 1

    - Emotions dépendent vraiment de

    la situation du patient

    IDE 2

    - Patient entouré par associations

    IDE 3

    - Peut-être besoin d'un suivi

    psychologique

     

    52

    - Explication d'une situation vécue

    ? IDE pleure lorsqu'elle
    m'explique cela

    IDE 4

    - Plus touchés par les patients qui

    reviennent (récidive ou échec de traitement)

    IDE 5

    - « On pense être passé par toutes

    les émotions mais toujours des nouveautés »

    - Annonce au patient mais aussi

    au proche ? annonce à sa soeur 4 difficulté supplémentaire

    IDE 6

    - Importance d'être à l'écoute,

    accepter les émotions du patient (tristesse, colère ...)

    - Revient toujours sur

    l'expérience ! 4 mot clé de cet entretien

    - Transfert

    IDE 7

    - Débute donc sujet compliqué

    IDE 8

    - Aimerait qu'il y a des moments

    de paroles comme dans les

    unités de soins palliatifs
    (« palliatocafé »)

    - L'équipe subit le mal-être des

    familles

     

    - Présence d'une équipe mobile de soins d'accompagnement

    mais pas toujours présente

     

    53

    1 personne ajoute que les émotions dépendent vraiment de la situation du patient qui est présent en face de nous.

    2 personnes pensent qu'un suivi ne serait pas de refus, une infirmière parle d'un suivi psychologique alors qu'une autre évoque la mise en place d'un groupe de parole comme dans les services de soins palliatifs qui se nomme le « palliatocafé ».

    Une infirmière déclare qu'il faut également être capable d'accepter les émotions du patient selon nos capacités émotionnelles. Pour elle, le mot clé de cet entretien est l'expérience.

    Une infirmière explique une situation vécue avec un patient jeune et a des émotions lorsqu'elle raconte cela puisqu'elle pleure.

    Enfin, 1 infirmier dit que l'annonce d'un diagnostic de cancer ne se fait pas seulement qu'aux inconnus ! Il est possible de l'annoncer à un membre de sa famille ! Et donc, ce soignant dit que nous pensons que nous sommes passés par toutes les émotions mais qu'il y aura toujours une situation nouvelle qui fera que nous aurons des émotions. En effet, c'est pour cela qu'il est important de faire preuve de capacité d'adaptation lors des diverses situations. Et comme mentionné, ci-dessus dans mon cadre théorique, chaque situation sera unique et dépendra en effet de la personne qui se trouve en face de nous ou de son histoire de vie.

    Pour une infirmière, le fait de voir à nouveau les patients dont elle a déjà pris en soins, cela sera plus difficile et elle sera plus touchée parce qu'elle se dit que le patient devra « se battre à nouveau ». Effectivement dans « regards d'infirmières sur le dispositif d'annonce du cancer », une infirmière affirme qu'il est très difficile émotionnellement de prendre en charge un patient qui est déjà venu dans le service et à qui il faut annoncer des métastases ou une récidive ... Il serait préférable d'annoncer une bonne nouvelle !

    54

    VIII- Discussion

    1) L'apprentissage permettrait de développer ses compétences dans la gestion des émotions.

    Lors de la réalisation de mes entretiens, les infirmiers déclarent qu'ils ne bénéficient pas assez de formation qui permettrait une meilleure gestion des émotions ou que celle-ci ne serait pas nécessaire du fait qu'on ne peut être préparé à des annonces de cancer puisque l'on ne sait pas quelle sera la réaction du patient et chaque annonce est unique.

    Mais, par contre, pour les soignants le fait d'avoir vécu des situations similaires ou bien d'avoir des connaissances sur le cancer ici notamment, au fil du temps ou d'apprendre de nouvelles choses sur la maladie, a amélioré la gestion des émotions du soignant.

    Dans mon cadre théorique, on retrouve quatre stades concernant l'apprentissage et la gestion des émotions :

    - Le stade d'immersion : en début de carrière et plus particulièrement pendant les stages, le soignant est confronté au monde hospitalier donc aux patients et aux pathologies parfois lourdes. Le professionnel se trouve donc affecté sur le plan émotionnel. Il entre ainsi dans une « pseudo-empathie ».

    - Le stade de l'empathie souffrante : le soignant montre une conscience plus fine, il se centre donc sur le soigné. Il est encore touché émotionnellement et entre donc dans une « empathie souffrante » ce qui freine sa prise en charge et complique donc la relation avec le patient.

    - Le stade de la mise à distance : ici « le soignant tente de sauver sa peau ». Il essaie de prendre une juste distance mais en mettant en place des mécanismes de défenses. La relation entre le soignant et le patient va donc à l'essentiel.

    - Le stade de maturation : le parcours professionnel du soignant est abouti. Ainsi, le soignant arrivera à maîtriser ses émotions et agira donc comme professionnel.

    55

    Donc selon le panel d'infirmiers interrogés, nous constatons qu'il y a des soignants qui sont en stade de pseudo-empathie comme les jeunes diplômés et d'autres qui sont au stade de maturation.

    Mais également suite aux différentes expériences vécues par le soignant, il aura appris des choses et donc il va de façon consciente ou inconsciente réguler ses émotions.

    Donc, suite aux réponses des soignants interrogés et de mon cadre théorique, je peux valider cette hypothèse en disant que oui, l'apprentissage permet de développer ses compétences dans la gestion des émotions.

    2) La maitrise permettrait de développer la capacité d'adaptation.

    La maitrise professionnelle signifie que nous avons la capacité de faire une chose, que nous avons la connaissance.

    Lorsque l'annonce de diagnostic de cancer est réalisée, le soignant réagit cela est dû au fait, qu'il a les connaissances de la maladie. Il instaure une relation d'aide, ainsi il est en écoute active, il accompagne le patient et il est empathique. Ainsi, puisque chaque soignant a déjà été confronté à l'annonce d'un diagnostic de cancer, il sait comment réagir puisque ce sont parfois les mêmes questions qui reviennent donc il saura y répondre plus ou moins ; mais il faudra s'adapter à chaque patient, à chaque histoire de vie comme l'indique les soignants dans leur entretien : les émotions et les réactions ne seront donc pas les mêmes avec chaque patient. Comme un exemple qui a été donné dans un entretien : les émotions seront différentes si le patient est âgé puisqu'il aura vécu sa vie par rapport à un jeune patient qui sera atteint d'un cancer et qui aura encore des étapes de sa vie à découvrir.

    Le soignant comprend parfaitement ce qui pose problème lorsqu'il a dû mal à gérer ses émotions. Il s'agit principalement, du contexte de vie de la personne, de son histoire de vie, de son âge surtout s'il est jeune ... Il maitrise et comprend donc ce qu'il se passe cela va donc permettre pour les prochaines situations à s'adapter et donc la gestion des émotions sera meilleure.

    En effet, si le soignant ne maitrise pas ses propres émotions, cela pourra avec une influence sur la relation avec le patient.

    56

    Ainsi, cette hypothèse peut également être validée, nous pouvons constater que la maitrise permet de développer la capacité d'adaptation.

    3) Le repérage des émotions permettrait la connaissance de soi.

    Les soignants ont déclaré qu'ils repéraient leurs émotions grâce au fait, qu'ils ont une connaissance d'eux-mêmes.

    La connaissance de soi est, en effet, importante afin de gérer des situations difficiles. L'infirmier doit être capable de connaître ses propres limites et repérer se émotions. Les soignants les repèrent et sont capables de dire quelles émotions ils ressentent. Ainsi, celle qui est la plus ressentie est la tristesse.

    Le fait de se connaitre est un processus qui sera acquis tout au long de notre vie. L'individu va apprendre à connaître ses propres réactions lorsqu'il aura vécu une situation, cependant, il sera plus facile pour lui de gérer les situations non prévues.

    Ainsi, nous pouvons valider le fait que repérer nos émotions permet de se connaître soi-même.

    4) Hypothèse générale : l'expérience aurait une influence sur la gestion des émotions du soignant suite à l'annonce d'un cancer.

    Pour tous, l'expérience est un point de fort dans la gestion des émotions. Malgré qu'une personne nie ce fait, elle déclare qu'un minimum d'expérience pour que le vécu des situations soit moins difficile. Le terme expérience ne veut pas forcément dire avoir plusieurs années d'expérience. Le fait de voir des situations à répétition est une expérience, notre vécu personnel est une expérience.

    Ainsi, Catherine Mercadier déclare qu'au fil des années et des situations vécues, le soignant devient fermé et se crée un caractère qui permet de faire face. Elle démontre également grâce à des entretiens réalisés auprès de jeunes diplômés, que la réaction n'est pas la même par rapport à une infirmière qui a de nombreuses années d'expérience. Ainsi la gestion des émotions est meilleure si on a de l'expérience.

    Dans mes lectures, je retrouve que l'annonce d'un diagnostic de cancer est réalisée par des infirmières ayant une tranche d'âge entre 45 et 50 ans et ayant déjà rencontré de nombreuses situations et qui ont de nombreuses années d'expérience. Une jeune diplômée va se sentir plus « déminue » face au patient et sa famille.

    57

    En ce qui concerne la famille, la relation de confiance se fera plus facilement si l'infirmière montre qu'elle maitrise ce domaine et qu'elle a déjà une certaine expérience.

    En effet, le terme « expérience » a été évoqué par les soignants à plusieurs reprises dans les entretiens. Même les jeunes diplômées ont déclaré qu'elles n'avaient pas assez de recul et avaient moins de situations vécues par rapport à d'autres personnes.

    De plus, il est ressorti dans un entretien qu'il ne s'agit pas uniquement de l'expérience qui pourrait influencer sur la gestion des émotions du soignant mais également la personnalité de la personne peut être prise en compte.

    En ce qui concerne mon hypothèse, elle est en partie validée mais pas complétement. En effet, suite à mes recherches et mes entretiens, oui, l'expérience a une influence sur la gestion des émotions mais celles-ci ne sont pas en rapport direct avec l'annonce du cancer comme évoqué dans mon hypothèse. Elles sont liées au contexte du patient c'est-à-dire, à l'histoire de vie, à l'âge, si le patient est jeune les émotions seront différentes qu'un patient plus âgé. De plus, les émotions peuvent également être liées au fait que le soignant s'identifie au patient.

    5) Conclusion de l'analyse

    Suite à cette analyse, nous retrouvons l'importance des émotions dans les soins. Certaines prises en soins, comme l'annonce d'un diagnostic de cancer pour ma part, peuvent être difficiles pour le soignant. Chaque personne va se protéger de façon différente, en parlera à ses collègues et gérera donc ses émotions différemment. Le soutien de l'équipe ressort fortement. Il est donc important de comprendre nos émotions et de savoir les maitriser afin que la relation soit de qualité. Au fil des postes de travail et donc de situations vécues différentes, le soignant va se construire et peut-être même « se forger » avec le temps.

    Enfin, lors de mes entretiens, les professionnels ont clairement affirmé que l'expérience permettait une meilleure gestion des émotions donc également une meilleure connaissance de soi.

    58

    IX- Conclusion

    Grâce à ce travail de fin d'étude, j'ai pu acquérir de nombreuses connaissances concernant l'annonce d'un diagnostic de cancer mais également sur les émotions. J'ai également eu l'occasion de pouvoir échanger par rapport à ce sujet avec des professionnels ayant plus ou moins d'expérience et ainsi me faire une idée de ma future profession.

    Le fait d'avoir travailler mon mémoire sur ce sujet qui m'intéressait beaucoup, me permettra sans doute dans ma future profession d'avoir plus confiance en moi et d'être capable de gérer mes émotions afin que la prise en charge des patients soit de qualité.

    De plus, si je reviens sur ma situation d'appel, avec plus de recul, je m'aperçois que je me suis identifiée à la personne donc peut-être que pour de prochaines situations, je saurai prendre sur moi en repensant à ce travail et donc éviter de m'identifier.

    J'ai pu découvrir que le terme « émotion » était complexe à définir. La gestion des émotions sera différente selon chaque personne, chaque personnalité et des personnes arriveront à gérer plus que d'autres. En ce qui concerne cette notion, la connaissance de soi est également très importante !

    Le soignant va se construire tout au long de sa carrière, au fil des situations vécues.

    Enfin, suite à ma situation, d'autres thèmes auraient pu être abordés. Je m'étais également aperçue que la patiente s'était rendue compte de mes émotions face à elle ... De cette étude, pourrait découler une autre approche : celle du patient. Pourquoi ne pas s'intéresser à ce que ressent et pense le patient lorsqu'il perçoit les émotions du soignant.

    59

    Bibliographie

    Sites en ligne :

    https://www.universalis.fr/encyclopedie/psychologie-des-emotions/1-qu-est-ce-qu-une-emotion/ (consulté le 06-01-19)

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    http://dictionnaire.academie-medecine.fr/index.php?q=%C3%A9motion (consulté le 26-01-19) Edité en 2018

    https://www.e-cancer.fr/Professionnels-de-sante/Les-chiffres-du-cancer-en-France/Epidemiologie-des-cancers/Donnees-globales (consulté le 10/10/2018)

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    https://www.e-cancer.fr/Professionnels-de-sante/Parcours-de-soins-des-patients/Dispositif-d-annonce/Un-temps-fort-du-parcours-de-soins (consulté le 10/10/2018)

    http://www.prendresoin.org/?p=1049 (consulté le 11/12/2018)

    https://www.cairn.info/revue-recherche-en-soins-infirmiers-2005-3-page-31.htm (consulté le 09/12/2018)

    www.has-sante.fr (consulté le 06/01/2019)

    https://www.cnrtl.fr/definition/identification (consulté le 05/05/2019) www.universalis.fr ; psychologie des émotions (consulté le 06/01/2019)

    Dictionnaire Larousse

    Dictionnaire médical de l'académie de médecine

    Articles :

    · « L'expérience professionnelle, son acquisition et ses liens à la formation », Benoît Grasser et José Rose, année 2000.

    ·

    60

    « Les savoirs d'expérience en soins infirmiers, une richesse à explorer : mentorat, pratiques exemplaires et benchmarketing », Margot Phaneuf, Novembre 2011.

    · « Soignantes ... Soignés, un rapport complexe, une réflexion « chemin faisant » quant au statut émotionnel du soignant », M. Delhaye et F. Lotstra, dans cahiers de psychologie clinique, année 2007, numéro 28. Pages 49 à 59.

    · Journal of Experimental Psychology, 113, pages 464 - 486 ; Ferh et Russel (1984)

    · « Le partage social des émotions chez les soignants en oncologie », 11/05/2015, Sophie DELROISSE.

    · « Annoncer une mauvaise nouvelle », HAS

    · « Recherches en soins infirmiers », les mécanismes de défenses, Henri Chabrol, pages 31 à 42.

    · Les relations interprofessionnelles avec la personne soignée et la notion de juste distance », Florence Michon. Mars 2013.

    · « L'intelligence émotionnelle, un outil de soins », Margot Phaneuf. Avril 2013.

    · « Le mal-être quotidien du soignant », Ethique et AMP ; santé, volume1, n°2 - Mai 2004, Page 77.

    · Hildegard E. Peplau - « Relations Interpersonnelles en Soins Infirmiers » (1952)

    Ouvrages :

    · « Regards d'infirmières sur le dispositif d'annonce du cancer », éditions Lamarre, 151 pages.

    ·

    61

    « Le travail émotionnel des soignants à l'hôpital », Catherine Mercadier, 278 pages.

    · « J'ai voulu être infirmière », Martine Schachtel, 216 pages

    · « La process communication au service de la communication de la relation soignant - soigné », Jean-Yves Frenot. Broché 320 pages.

    · « Face à la maladie grave », Martine Ruszniewski. 206 pages.

    · « La relation soignant - soigné, rencontre et accompagnement », édition Chenelière Education. 280 pages.

    · « Les concepts en sciences infirmières » Formarier M. et Jovic L. 328 pages.

    · « La relation soignant - soigné », Alexandre Manoukian. 202 pages.

    Annexe 1

    Grille d'entretien semi-directif

    Actuellement étudiante infirmière en 3ème année, je réalise mon travail de fin d'études sur la gestion des émotions du soignant face à l'annonce d'un cancer. J'ai donc décidé d'effectuer des entretiens semi-directif afin de réaliser mon analyse.

    Tout d'abord, je vous remercie pour le temps que vous allez m'accorder durant cet entretien. De plus, cet entretien sera anonyme.

    Etes-vous d'accord pour que j'enregistre notre conversation ?

    1) Depuis quand exercez-vous le métier d'infirmière ?

    Quel est votre âge ?

    Pouvez-vous me parler de votre parcours professionnel ?

    2) Pour vous, qu'est-ce qu'une émotion ?

    3) Etes-vous souvent confronter à l'annonce d'un diagnostic de cancer ?

    4) Comment réagissez-vous lorsque le patient reçoit son diagnostic de cancer ?

    5) Bénéficiez-vous suffisamment de formation vous permettant d'être préparé à l'annonce d'un cancer ?

    6) Avez-vous des émotions lors de l'annonce d'un diagnostic de cancer au patient ? Si oui, quelles sont les types d'émotions que vous éprouvez ?

    7) Lorsque vous avez des difficultés lors de la gestion de vos émotions, comprenez-vous ce qui pose problème ?

    8) Comment repérez-vous vos émotions ?

    9) Faites-vous un travail émotionnel ? Si oui, comment faites-vous ?

    10) Si vous éprouvez des émotions négatives durant votre poste de travail, êtes-vous soutenue par vos collègues ?

    11) (Si l'IDE a moins de 5 ans dans le domaine), pensez-vous que vous avez plus de difficultés à gérer vos émotions qu'une infirmière ayant plus d'expérience que vous lors de l'annonce d'un diagnostic de cancer ?

    12) (Si l'IDE a plus de 5 ans dans le domaine), au fil de vos postes de travail, avez-vous remarqué une amélioration dans la gestion de vos émotions ? Si oui, quelle(s) peut(vent) être la(les) raison(s) ?

    13) Pensez-vous que l'expérience est un point fort dans la gestion de vos émotions ?

    14) D'après vous, existe-il des moyens de gérer vos émotions lors de l'annonce d'un diagnostic de cancer ?

    II

    15) Avez-vous des informations supplémentaires à m'apporter à ce sujet ?

    III

    Annexe 2

    IDE 1

    Depuis quand exercez-vous le métier d'infirmier(e) ?

    Quel est votre âge ?

    Pouvez-vous me parler de votre parcours professionnel ?

    Ça fait 4 ans que je suis infirmier, j'ai 26 ans, et parcours professionnel depuis que je suis infirmier, après le diplôme j'ai commencé ici à la clinique mais je travaillais ici à 100% et en plus de ça, comme j'étais en CDD je travaillais à côté donc j'ai fais HAD, plusieurs services dans pleins d'endroits, j'ai fais un peu de tout et au bout d'un an que je travaillais ici ils m'ont proposé de venir en onco et puis ça fais 3 ans et demi / 4 ans que j'y suis.

    Pour vous, qu'est-ce qu'une émotion ?

    Qu'est-ce qu'une émotion ... bah c'est les ressentis des ... c'est le ressenti, tout ce qui ne peut pas être vraiment visible.

    Etes-vous souvent confronter à l'annonce d'un diagnostic de cancer ?

    Tout le temps. Après je dis tout le temps, mais ... surtout en ce moment. Mais souvent ça se fait dans le bureau de l'oncologue. C'est l'oncologue qui ... enfin généralement c'est le médecin traitant qui voit le patient, qui fait faire des examens et ensuite c'est l'oncologue qui le reçoit qui voit les examens et qui annonce. Après, euh ... généralement, quand c'est déjà à un certain stade ou qu'il y a déjà des effets, il l'envoie dans notre service et c'est à ce moment là qu'on fait l'annonce.

    Donc vous êtes présent à ce moment ?

    Oui, sauf si c'est fait dans le bureau et qu'il n'y a pas besoin d'hospitalisation là on ne voit

    pas.

    Comment réagissez-vous lorsque le patient reçoit son diagnostic de cancer ?

    Bin avant on faisait l'annonce, il n'y avait pas de médecin. Maintenant c'est un petit peu plus réguler, le médecin l'annonce en notre présence. Généralement le médecin utilise des mots ... parce qu'on a deux médecins ici qui annoncent de façon totalement différentes il y en a un qui est assez ... bin quand il annonce, il annonce quoi, il ne va pas par 4 chemins alors que l'autre il part un peu dans toutes les directions pour essayer de faire comprendre au patient. Donc nous on essaie justement ... euh ... bin on est là, donc on est pas là pour rien donc on essaie de faire comprendre au patient tout en étant le plus calme possible parce que si on est déjà énervé nous même ça ne va pas, on essaie aussi de ...

    IV

    généralement ils le prennent pas trop trop bien donc, on essaie d'être présent. Généralement, ils sont hospitalisés donc on les connait déjà un petit peu avant l'annonce, et on est encore là après. Généralement c'est en présence de la famille quand il y a la famille, donc on donne des petites bouteilles d'eau, on essaie de les mettre le plus à l'aise possible parce qu'on sait que ce sont pas des annonces très facile à prendre quoi.

    Bénéficiez-vous suffisamment de formation vous permettant d'être préparé à l'annonce d'un cancer ?

    Oui, si si, je dirai oui. Avant de travailler ici, enfin ça fais déjà quelques mois mais, quand j'ai été pris en CDI ici, j'ai eu une formation sur Lille sur les soins palliatifs donc déjà ça nous prépare déjà à un certain type de questionnement et de réponses, donc oui l'annonce on est préparé assez. Après je pense, qu'il y a pas de formation pour dire de former à l'annonce ça se fait sur le terrain. La première fois, qu'on doit faire une annonce parce que malheureusement le collègue est ailleurs et tout ça bin, ça se fait naturellement puis il y en a qui n'y arrive pas. Après ça se fait naturellement puis au fur et à mesure qu'on le fait, ça évolue quoi.

    Avez-vous des émotions lors de l'annonce d'un diagnostic de cancer au patient ? Si oui, quelles sont les types d'émotions que vous éprouvez ?

    Oui, bin oui oui, c'est sur. On est quand même euh ... enfin c'est l'empathie. On est obligé de ressentir des émotions, on est pas des robots donc oui puis c'est déjà arrivé qu'on ressentait beaucoup beaucoup plus d'émotions. ça dépend de la situation du patient, c'est sur que l'annonce à une personne qui comprend et qui était déjà plus ou moins au courant ça se passe plutôt bien mais l'annoncer à un patient qui est là avec ses 2 filles de moins de 10 ans c'est un peu plus compliqué quoi donc euh on a des émotions c'est obligé.

    Mais du coup quels types d'émotions vous éprouvez ?

    Bin, c'est ce que je dis, ça dépend de la situation. Euh ... il y a des fois ça peut être de la tristesse c'est sur, euh ... bin c'est souvent la tristesse. Après ça serait un peu dégueulasse de dire autre chose.

    Lorsque vous avez des difficultés lors de la gestion de vos émotions, comprenez-vous ce qui pose problème ?

    Ça va mes émotions, je n'ai pas trop de mal moi... (rire)

    Bah non, comme je dis, il y a certains situations où on avait du mal à gérer nos émotions mais après pour moi, ce n'est pas mal de pleurer devant un patient avec lui, enfin je ne vais pas dire qu'ils sont contents mais ça leur fait quelque chose. Après c'est ce que je dis on

    V

    est des humains, il n'y a pas de raison qu'on cache nos émotions à fond non plus donc euh, pour moi c'est pas un problème.

    Comment repérez-vous vos émotions ?

    Bin, je me connais. En général, je reste assez calme pour mes annonces, on essaie d'être le plus compréhensible possible pour essayer de leur donner du courage et tout ça pour la suite. Mais euh ... repérer mes émotions, je reste à peu près toujours pareil donc ça va.

    Si vous éprouvez des émotions négatives durant votre poste de travail, êtes-vous soutenue par vos collègues ?

    Oui, énormément ici. On a une équipe très très soudée, on s'entend tous très très bien. Les 3/4 sont amis même à l'extérieur de l'équipe donc il n'y a aucun soucis, on a toujours le soutien et puis bin on se connait tous par coeur au niveau des émotions, enfin, on connait même le passé de nos collègues donc s'il y a quelque chose qu'on sait qui va pas aller on prend le relais. Pour ça franchement, il n'y a aucun soucis dans l'équipe.

    (Si l'IDE a moins de 5 ans dans le domaine), pensez-vous que vous avez plus de difficultés à gérer vos émotions qu'une infirmière ayant plus d'expérience que vous lors de l'annonce d'un diagnostic de cancer ?

    Absolument pas. Je gère même mieux que certains anciens. Il y en a beaucoup dans ce service qui ont du mal à faire l'écart avec le patient, je ne sais plus comment ça s'appelle ... ah une distance professionnelle ! Ils ont beaucoup de mal à faire ça donc je pense que ... bin après on est une équipe assez jeune on a 2 / 3 je dirais des anciennes mais on fonctionne tous bien ensemble après il y en a certains qui n'arrive pas trop à faire la distance mais moi je n'ai pas de soucis.

    Pensez-vous que l'expérience est un point fort dans la gestion de vos émotions ?

    Non. Il faut avoir un minimum d'expérience parce que quand on arrive ici, on le voit, c'est difficile et tout ça mais après euh ... il faut le voir quelque fois, après c'est pas au bout de 15 ans d'expérience qu'on ... après on en voit tous les jours et on change tous les jours mais je ne dirai pas que c'est forcément l'expérience qui change. Après, c'est mon point de vue à moi. Pour moi, l'expérience ça fais pas. J'ai déjà vu des annonces catastrophiques par des personnes qui avaient 25 ans d'expérience et qui en avaient ras-le-bol donc non pour moi c'est pas l'expérience c'est les personnes en elles-mêmes, les qualités d'infirmières ou d'infirmiers mais pas l'expérience du tout. Après c'est sur, c'est pas en arrivant que ça se fait tout de suite, il faut je dirai quelques expériences avant de le faire mais pas en années quoi ! Quelqu'un qui est là depuis 1 an, il sait le faire. Et on la ici, les

    VI

    CDD qui arrivent et qui sont là depuis même pas 1 an, ils font partis de l'équipe et ils savent faire et ça se fait au fur et à mesure mais je ne dirai pas que l'expérience fait quelque chose.

    D'après vous, existe-il des moyens de gérer vos émotions lors de l'annonce d'un diagnostic de cancer ?

    A l'intérieur ???

    Euh... bin déjà si jamais il y a des émotions, et c'est mit en place normalement ici on peut voir un psychiatre pour nous, on peut l'utiliser mais on en a jamais eu besoin car on arrive à gérer au sein de l'équipe après une équipe soudée ça fait mais des moyens autres que ça ... je dirai une direction compréhensive ça c'est pas tout le temps le cas, quoi que c'est des services quand même compliqués que même la direction sait que, puis il y a des moments aussi où on nous attaquait un petit peu, on répondait assez vite.

    Avez-vous des informations supplémentaires à m'apporter à ce sujet ?

    Ici, on a une psychologue, qui est normalement tout le temps là mais là elle est en arrêt. Elle est censée être tout le temps là. Une fois que l'annonce est faite on l'envoie tout de suite vers le patient et elle est là assez rapidement dans les chambres donc c'est hyper important et je pense que dans tout les services d'onco il y en a et il devrait y en avoir parce que ça permet de ... bin déjà nous on a le médecin qui passe, on repasse après pour remettre des mots sur la maladie on va dire pour leur réexpliquer, quelles sont les solutions s'il y en a et après il y a encore la psychologue qui vient avec ses mots et avec son expérience de psychologue parce que on est pas psychologue même si on le fait parfois.

    Après c'est aussi le médecin qui doit travailler sur lui-même pour dire de l'annoncer bien quoi.

    Après je pense que ça dépend vraiment des situations des gens, comment ils réagissent, s'ils sont plus ou moins fort psychologiquement.

    VII

    IDE 2

    Depuis quand exercez-vous le métier d'infirmière ?

    Quel est votre âge ?

    Pouvez-vous me parler de votre parcours professionnel ?

    Je suis ici depuis 23 ans. J'ai 46 ans et en faite j'ai commencé euh ... On est sorti avec notre diplôme en poche au mois de Décembre, il n'y avait pas de place dans tout le Nord-pas-de-Calais parce qu'en faite les Belges avaient pris un peu la place avant, c'était la 1ère reforme en faite. Donc je suis partie en géronto-psychiatrie quelques mois et puis après j'ai été embauché ici donc je suis revenue j'ai fais du SSR pendant 19 ans après j'ai passé un DU de soins palliatifs et donc maintenant je suis en oncologie depuis que c'est ouvert.

    Pour vous, qu'est-ce qu'une émotion ?

    Alors là ... C'est quelque chose de bien difficile à définir ... une émotion ... ça peut être tellement pleins de choses ... c'est un ressenti je dirai plus un ressenti en faite. Ça peut être négatif, ça peut être positif. Ça peut être pleins de choses et ça peut se traduire de pleins de façon différentes.

    Etes-vous souvent confronter à l'annonce d'un diagnostic de cancer ?

    Alors très peu, par contre on est souvent confronter à l'annonce de métastases, de pleins de choses qui sont plutôt négatives ... de récidive, mais la première annonce de cancer nous non puisque les gens sont déjà prévenus normalement. Donc c'est plus des récidives, des traitements qui ne fonctionnent pas très bien ... Après ça peut arriver quand c'est un tout début de prise en charge mais il est rare que le patient ne soit pas au courant mais il y en a certains qui n'ont pas compris, ça ça peut nous arriver. Il y a quand même des gens qui viennent de l'hôpital parce qu'ils ont eu des examens, on leur a peut être annoncé là-bas mais ils ont pas forcément entendu, voulu entendre ou bien compris les mots qui ont été utilisé, donc on reprend souvent avec eux ici quand c'est des débuts de prise en charge.

    Comment réagissez-vous lorsque le patient reçoit son diagnostic de cancer ?

    Euh ... Bin dans la mesure où on en a assez peu, ce qui peut être difficile pour nous c'est quand on annonce, bin, qu'il y a une métastase ou bien que la chimiothérapie n'a pas fonctionné donc c'est assez compliqué parce que là derrière, il y a des questions qui sont posées et c'est souvent à nous qu'ils le posent... On essaie souvent de les renvoyer vers le médecin mais en général le 1er acteur, c'est nous !

    VIII

    Mais du coup, quelle est votre réaction à vous ? Au niveau personnel ? Oui.

    Ça me touche à chaque fois. Même si maintenant avec les années, on a tendance un petit peu à « se blinder » comme on dit mais ...

    Bénéficiez-vous suffisamment de formation vous permettant d'être préparé à l'annonce d'un cancer ?

    Non, on n'a pas formation.

    Vous pensez qu'il devrait y en avoir ?

    Je ne sais pas si une formation peut permettre à quelqu'un d'être préparé à ce genre de chose. Je ne vois même pas ce qui pourrait nous aider en faite parce que c'est tellement compliqué ce genre de situation et chaque personne est différente, réagit différemment en plus ; que ça soit au niveau du personnel qu'au niveau du patient. Il y a des gens qui vont se taire et ne plus jamais en parler, il y a des gens qui vont tout de suite rebondir dessus et dire « je suis foutu ». il y a vraiment tout un éventail de comportement.

    Avez-vous des émotions lors de l'annonce d'un diagnostic de cancer au patient ? Si oui, quelles sont les types d'émotions que vous éprouvez ?

    Oui, je pense qu'on a toujours des émotions, tout au long de la journée, on a toujours des émotions même si on essaie parfois de ne pas les montrer. Parce que des fois, même il arrive que les médecins disent certaines choses et nous on le sait pas toujours. Donc quand c'est découvert, on le découvre en même temps que le patient, des fois c'est plus compliqué.

    Quels types d'émotions vous éprouvez ?

    Déjà de la tristesse. On essaie de ne pas trop se mettre à la place des gens mais de rester bien à côté d'eux et pas à leur place à eux parce que ça il y a personne qui peut se mettre à leur place. Donc on essaie vraiment de faire de l'accompagnement.

    Lorsque vous avez des difficultés lors de la gestion de vos émotions, comprenez-vous ce qui pose problème ?

    Moi, je n'ai pas trop de difficulté avec ça. Après on a du s'adapter au départ aux différents types d'annonce des médecins. Parce qu'il y a 4 médecins donc chacun l'annonce de différentes façons donc il a peut être plutôt fallu s'adapter à ça, la façon dont c'était annoncé. Certains personnes sont un peu plus ... pas brutale mais ... plus directive on va dire et d'autres c'est un peu plus dit en douceur ou les mots sont pas forcément dit mais on

    IX

    essaie de leur faire comprendre. Maintenant, une fois que l'on connait, il y a moins de soucis.

    Comment repérez-vous vos émotions ?

    Je sais comment je suis ... Je sais comment je vais réagir devant telle ou telle situation. Mais avec le temps ça va ...

    Faites-vous un travail émotionnel ? Si oui, comment faites-vous ? Je ne fais pas spécialement un travail là-dessus,

    Si vous éprouvez des émotions négatives durant votre poste de travail, êtes-vous soutenue par vos collègues ?

    Oui, en général, on en parle rapidement quand il y a quelque chose qui ne va pas, par rapport aux émotions, je parle, je ne parle pas par rapport au contexte du travail. On dit « on est eu du mal avec cette personne » parce que bin, on s'attache à certaines personnes donc il est certain que quelqu'un de jeune qui a des enfants, on va se transposer plus facilement parce que nous même on est jeune, on a des enfants donc là c'est plus compliqué, il faut faire attention de ne pas faire un transfert.

    (Si l'IDE a moins de 5 ans dans le domaine), pensez-vous que vous avez plus de difficultés à gérer vos émotions qu'une infirmière ayant plus d'expérience que vous lors de l'annonce d'un diagnostic de cancer ?

    (Si l'IDE a plus de 5 ans dans le domaine), au fil de vos postes de travail, avez-vous remarqué une amélioration dans la gestion de vos émotions ? Si oui, quelle(s) peut(vent) être la(les) raison(s) ?

    Je pense que quand on prend un petit d'âge, qu'on a un petit peu d'année derrière nous, on gère les choses différemment.

    Et donc du coup, pour vous, quelles peuvent être les raisons ?

    Je pense que c'est l'expérience en faite. L'expérience des relations humaines tout simplement.

    Pensez-vous que l'expérience est un point fort dans la gestion de vos émotions ?

    Oui, je pense vraiment que oui. Même les personnes soignées, on se rend compte que quand on est plus âgé, ils viennent plus facilement vers nous et nous poser des questions qu'à quelqu'un qui est plus jeune, peut être avec un peu moins d'expérience.

    X

    D'après vous, existe-il des moyens de gérer vos émotions lors de l'annonce d'un diagnostic de cancer ?

    (A ce moment, il y a une pause, une réflexion de la part de l'IDE)

    Je ne saurai pas dire ...

    Avez-vous des informations supplémentaires à m'apporter à ce sujet ? C'est tellement vaste que, ça me parait bien compliqué.

    Après, les patients sont biens entourés, enfin je parle par rapport à quand j'ai commencé. Il y a pas mal de structures à côté, beaucoup de réseaux, et tout ça pour le cancer donc les gens arrivent quand même a toujours avoir quelqu'un.

    Avant il n'y avait pas de psychologue et maintenant on en a, on a des associations.

    Si vous vous avez des problèmes au niveau des émotions, pouvez-vous consulter le psychologue ?

    Oui, on en parle. On ne va pas faire une séance exprès pour ça mais ne serait-ce que dans le bureau, durant les transmissions, même dans un couloir ... mais si c'est personnel après on peut lui en parler.

    XI

    IDE 3

    Depuis quand exercez-vous le métier d'infirmière ?

    Quel est votre âge ?

    Pouvez-vous me parler de votre parcours professionnel ?

    Alors, ça fait 36 ans que je suis infirmière. J'ai 57 ans. J'ai fais 29 ans en pôle nuit : 3 ans dans le roulement, 4 ans en réa et 22 ans en soins intensifs cardio. Et donc là, ça fait 7 ans que je suis dans le service d'oncologie. Je m'en vais en retraite la semaine prochaine !

    Pour vous, qu'est-ce qu'une émotion ?

    C'est un sentiment que l'on ressent qui est plus ou moins facile à gérer. Etes-vous souvent confronter à l'annonce d'un diagnostic de cancer ?

    Oui mais en général, c'est une autre équipe qui gère ça. Moi, je suis un petit plus « protégée ». On a plus les patients quand ils sont en 3ème ou 4ème cure, quand c'est un peu plus light.

    Comment réagissez-vous lorsque le patient reçoit son diagnostic de cancer ?

    Il faut l'écouter, moi je le laisse dire ce qu'il a à dire, lui laisser dire les mots qu'il veut dire, s'il emploi le mot cancer ou pas, tumeur ou pas, le laisser dire ce qu'il a envie de dire, le laisser dire ce qu'il ressent et de moins intervenir possible pour se laisser donner l'occasion de parler.

    Bénéficiez-vous suffisamment de formation vous permettant d'être préparé à l'annonce d'un cancer ?

    Oui, j'ai fais une formation sur l'accompagnement post-annonce. Après suffisante ... ce n'est pas jamais suffisant parce qu'on t'apprend des choses mais après il faut mettre tout les jours en place et ce n'est pas toujours évident quoi. Après, je pense que plus on en fait plus ça se passe, plus tu connais plus c'est facile enfin c'est pas facile mais t'es à l'aise. Ce n'est jamais facile. Après j'ai des collègues qui ont plus de facilité, parce qu'ils sont plus à l'aise que moi étant donné qu'ils en ont fait plus que moi.

    Avez-vous des émotions lors de l'annonce d'un diagnostic de cancer au patient ? Si oui, quelles sont les types d'émotions que vous éprouvez ?

    Il y en a toujours dans le sens où soit tu te mets à sa place, soit c'est quelqu'un qui pourrait avoir l'âge de ton père, ta mère ou tes enfants enfin voilà ... donc il y a toujours un moment

    XII

    où ça t'interpelle sur quelque chose. Enfin moi, c'est comme ça que je le vis. Après, il y a des gens avec qui on vit des choses différemment.

    Et donc, quels types d'émotions avez-vous ?

    Ça dépend comment la personne le vit aussi. Si elle se met à pleurer ... c'est quand même plus compliqué que si la personne a bien compris ou tu sens qu'elle va essayer d'y aller, elle est prête à jouer le jeu. Si il commence à s'effondrer ou s'il n'y a pas d'accompagnement, des fois, il n'y a pas de famille qui accompagne tout ça, c'est quand même compliqué. Tu sens qu'ils vont être tout seul.

    Je ne vais pas dire de la tristesse mais je me dis mince c'est pas possible qui est-ce qui va les aider quoi. Donc un petit peu de colère. Je n'ai pas de mot ...

    Lorsque vous avez des difficultés lors de la gestion de vos émotions, comprenez-vous ce qui pose problème ?

    Quelque fois, je m'identifie et surtout par rapport à l'âge du patient aussi ... Comment repérez-vous vos émotions ?

    Si je sens que je commence à rougir, c'est que je suis un peu embêtée quoi tu vois ... Je suis moins à l'aise.

    Faites-vous un travail émotionnel ? Si oui, comment faites-vous ? Non.

    Si vous éprouvez des émotions négatives durant votre poste de travail, êtes-vous soutenue par vos collègues ?

    Oui. On en parle. Parce que c'est vrai, qu'il y a des fois on est bien, donc ça va aller pour travailler, pour faire ce que tu as à faire et puis il y a des fois, tu es moins bien. Et on est pas non plus contre le fait de remplacer quelqu'un qui a du mal à gérer parce que ce jour on est pas bien et puis qu'on sent qu'il a besoin, bon on passe à l'autre. On est une équipe donc il y a toujours quelqu'un. On est pas des sauvages ... Il faut aussi se sentir épaulé par les collègues. On a de la chance, on s'entend bien dans l'équipe. Puis il y a la psychologue, je pense que si on a besoin elle peut aussi nous aider.

    (Si l'IDE a moins de 5 ans dans le domaine), pensez-vous que vous avez plus de difficultés à gérer vos émotions qu'une infirmière ayant plus d'expérience que vous lors de l'annonce d'un diagnostic de cancer ?

    XIII

    (Si l'IDE a plus de 5 ans dans le domaine), au fil de vos postes de travail, avez-vous remarqué une amélioration dans la gestion de vos émotions ? Si oui, quelle(s) peut(vent) être la(les) raison(s) ?

    Oui, parce qu'après on connait certaines choses, on sait comment on va réagir. Après quand on suit nos patients, à force les suivre, quand ils arrivent en bout de course, c'est parfois compliqué. Enfin, moi je sais qu'il y a certaines personnes à qui on s'attache. Après, c'est plus ou moins facile à gérer.

    Après quand j'étais jeune diplômée et maintenant, je ne peux pas dire qu'il y a forcément une différence, après on ressent toujours les mêmes choses. Après, il y a aussi notre caractère, notre tempérament. C'est pas parce qu'on a appris des choses qu'on a une carapace ... ce n'est pas vrai ! Moi je pense que chacun a aussi sa capacité à apprendre des choses et puis si tu es sensible, tu es sensible quoi ! Après c'est à nous à savoir gérer notre sensibilité pour ne pas en être malheureuse. Il faut savoir aussi se connaître pour savoir comment, et puis certaines situations, certains moments, ne pas se mettre dans des mauvais moments quand on est pas bien, si on sent qu'aujourd'hui ce n'est pas le moment il faut pas aller ! On est des êtres humains, on a vécu des choses chez nous aussi où on est pas prêt. Par exemple, dans sa famille, on a eu un cancer, la personne vient de mourir on est pas prêt à revivre la même chose. Je pense qu'il y a des moments où il faut savoir aussi dire bin écoute aujourd'hui je ne pourrais pas le faire !

    Pensez-vous que l'expérience est un point fort dans la gestion de vos émotions ?

    Certainement, je pense que oui ! après, il y a certaines situations qu'on a vécu et qu'on se dit bon bin ça, ça ne m'a pas été, peut être ne pas me remettre dans le même contexte ou là c'était pas top, je peux peut être faire ça, parce qu'on a réfléchit forcément sur ce qui s'est passé donc je pense que oui forcément, c'est comme pourtant dans la vie ! L'expérience peut aider aussi.

    D'après vous, existe-il des moyens de gérer vos émotions lors de l'annonce d'un diagnostic de cancer ?

    Ah bin certainement. Mais quoi, je ne sais pas ... Après, il y a des gens qui savent.

    Il y en a qui font de la sophrologie ou qui savent « se déconnecter » ... ça peut aider, mais moi je ne sais pas faire.

    Avez-vous des informations supplémentaires à m'apporter à ce sujet ?

    Bin je pense que quelque fois, on aurait besoin d'être suivi par la psychologue mais après c'est plus pour les patients. Peut être qu'on pourrait de temps en temps savoir quand on a

    XIV

    bien vécu une situation, qu'on puisse aller voir quelqu'un, après moi je ne sais pas si j'irai. Il y a 2 ans avec ma collègue, on a vécu un moment très difficile, on a eu du mal toutes les 2 à s'en remettre. C'est un monsieur qui était plus ou moins en fin de vie, qui a eu une transfusion et à la fin de sa transfusion, il nous a fait un arrêt. Il avait eu un nouveau protocole la veille. Mais tu vois, ça a été très difficile, on était en train de le changer quoi ! Il avait uriner, il nous a demandé de le changer, je le maintiens, ma collègue était en train de faire le change et il est resté dans mes bras quoi ... On a pas réussi à le réanimer, ça on a eu du mal à gérer. Au départ, on ne s'y attendait pas, on a eu du mal à gérer toutes les deux ... Un lendemain de Noël en plus, je vais te dire ... c'était un monsieur de 62 ans, on a eu beaucoup de mal. Et puis la femme était dehors quoi ... Non franchement, on a eu du mal à vivre ça. Tu cherches toujours ce qu'il se passe et puis bin ...donc là on aurait peut être eu besoin d'une prise en charge, pour nous aider. On a eu un petit peu mais peut être pas assez.

    Sinon, pour les annonces, c'est vraiment compliqué quand même. Le médecin ne dit pas toujours tout ...

    Comme un patient que j'ai encore vu ce matin, il a dit à la psychologue, c'est bon je suis arrivé au summum de ce que je peux entendre comme mauvaise nouvelle ! Moi, je ne leur en parle pas, après si c'est eux qui veulent en parler, on en parle. Ce n'est pas moi qui aborde le sommet la première.

    Pour ce monsieur... le médecin nous a dit qu'il en a plus que pour 1 mois ... et lui il croit qu'il va guérir, il espère, il a des jeunes enfants. On a parlé que j'allais partir en retraite la semaine prochaine et il m'a dit ah super vous allez faire quoi ! Donc je lui ai dis que j'allais profiter et voyager, il dit ah ! j'aimais bien voyager ... Ce que j'espère c'est guérir pour partir en voyage ! Bin qu'est ce que tu veux lui dire ! Je ne vais pas lui dire non non dans 1 mois vous êtes plus là ... Je suis restée sur une note positive, il parlait de ses voyages quand il faisait de la plongée ... donc je l'ai laissé parler dessus, tant qu'il souriait bin c'est bien ! Tu vois ça c'est très compliqué ! Parce que je pars du travail avec tout ça dans ma tête ! Il a des gamins de 8 ans et 10 ans ... Avec tout ça, on ne peut pas faire abstraction. J'essaie de me protéger comme je peux. C'est pas évident ! Il faut prendre une certaine distance !

    Lorsque l'infirmière me raconte cette situation, elle ne peut retenir ses larmes...

    XV

    IDE 4

    Depuis quand exercez-vous le métier d'infirmière ?

    Quel est votre âge ?

    Pouvez-vous me parler de votre parcours professionnel ?

    Je suis infirmière depuis le 27 Juillet 2018. J'ai commencé dans le service d'oncologie le 1er Aout 2018 et je n'ai pas bougé. Après je vais de temps en temps dans les étages mais sinon je suis attitrée à ce service. Sinon j'ai 23 ans.

    En stage, en 1ère année, j'ai fais SSIAD, ensuite j'ai fais chirurgie. En 2ème année, j'ai fais SSR, EHPAD et en 3ème année, j'ai fais chimiothérapie, chirurgie ambulatoire, oncologie et soins palliatifs. Donc ma 3ème année était vraiment fixée sur mon projet professionnel sauf chirurgie ambulatoire mais j'ai quand même vu tout ce qui était pose de PAC. C'était mon projet professionnel et du coup j'ai fais ma 3ème année en fonction.

    Pour vous, qu'est-ce qu'une émotion ?

    Alala ... bin ... c'est un truc en nous ! Qui provoque un ... comment dire ... j'arrive à dire, il n'y a pas vraiment une définition. C'est propre à chacun, et ... aaah elles sont dures quand même les questions !!! Euh ... bin c'est un truc qui va toucher une personne en fonction de son vécu et une chose qui ne va pas provoquer la même chose d'une personne à une autre. C'est propre à chacun quoi.

    Etes-vous souvent confronter à l'annonce d'un diagnostic de cancer ?

    Oui ! Après moi je ne fais pas les consultations d'annonce ! Donc moi les personnes quand elles arrivent, elles savent déjà qu'elles ont un cancer. Donc voilà, disons qu'il y a une consultation d'annonce aussi mais disons qu'elles ont déjà eu un premier abord avant.

    Comment réagissez-vous lorsque le patient reçoit son diagnostic de cancer ?

    Bin, pendant les 1ères cures, il y en a qui sont encore dans le déni donc on leur explique. Après ils sont dans le déni mais ... comment expliquer ... ils ne posent pas de question ! Puis après les patients qui ne sont pas dans le déni, ils ne posent pas de question, en faite, les gens qui sont ici ils ne posent pas de question. Si ils ne parlent pas de leur maladie, on ne leur en parle pas ou alors si on en parle c'est entre les chimios pour savoir comment ça s'est passé ou alors quand ils ont un scanner : « alors le scanner a donné quoi ? ». Quand on leur annonce que le traitement fonctionne bien, bin du coup, on est content avec eux ! Par contre quand ce n'est pas bon et du coup là c'est sur c'est moins évident, du coup ils sont plus négatifs on va dire.

    XVI

    Et du coup, quand le patient est négatif quelle est votre réaction face à lui ?

    Bin, on essaie de le rassurer. On lui explique que le médecin va tout faire pour trouver un autre traitement, qu'il n'est pas tout seul quoi ...

    Bénéficiez-vous suffisamment de formation vous permettant d'être préparé à l'annonce d'un cancer ?

    Bin personnellement, je suis là depuis Août et j'ai encore eu 0 formation sur ça donc je dirai non !

    Avez-vous des émotions lors de l'annonce d'un diagnostic de cancer au patient ? Si oui, quelles sont les types d'émotions que vous éprouvez ?

    Oui, parce qu'on est humain mais après on met des barrières.

    Je vais pas dire de la tristesse ou ... enfin ... comment dire ... euh ... je ne sais plus le mot exact ! Pas qu'on se met à leur place mais enfin ... Je suis empathique !

    Lorsque vous avez des difficultés lors de la gestion de vos émotions, comprenez-vous ce qui pose problème ?

    Après, je n'ai pas encore assez d'expérience ! Comment repérez-vous vos émotions ?

    Alors là ... ah et puis moi je ne suis pas expressive alors ... Moi je vais toujours dire tout va bien ! Moi je n'ai pas tellement d'émotions dans l'annonce d'un diagnostic de cancer, c'est plus lorsque j'apprends des décès de mes patients, tu vois comme cette semaine, j'ai appris deux décès de mes patients et donc là oui j'ai réagi, j'étais triste ! Mais sinon dans l'annonce d'un diagnostic, je n'ai pas l'impression d'avoir déjà eu des émotions. Après, je travaille ici en chimiothérapie et je sais très bien que le patient va mourir ! Donc ce n'est pas pareil comme si que tu travailles dans un service ou un EHPAD et que tu apprends qu'un de tes patients à un cancer ! Ce n'est pas la même chose ! On le sait là ! Puis on ne les connait pas vraiment, on les connait PARCE QU'ILS ont le cancer ! On ne les connait pas à l'avance en fait !

    Faites-vous un travail émotionnel ? Si oui, comment faites-vous ?

    Si vous éprouvez des émotions négatives durant votre poste de travail, êtes-vous soutenue par vos collègues ?

    XVII

    Ah oui ! Franchement ici oui ! Même les médecins !

    Je vais même expliquer une petite anecdote : j'ai un patient qui est décédé à cause d'une chimio, et c'était une chimio que j'avais posé donc je me sentais un peu coupable, et le médecin m'a carrément rassuré, puis il y a une psychologue et tout ici ! Donc le médecin m'a rassuré, il m'a dit que ce n'était pas de ma faute. Même si je le sais que ce n'est pas de ma faute mais pour déculpabiliser, il m'a dit de toute façon, ça aurait été toi qui l'aurait mis ou pas il serait décédé. Donc même les médecins ici sont bien franchement ici tout le monde est bien. C'est un bon service ici. Même avec les patients.

    (Si l'IDE a moins de 5 ans dans le domaine), pensez-vous que vous avez plus de difficultés à gérer vos émotions qu'une infirmière ayant plus d'expérience que vous lors de l'annonce d'un diagnostic de cancer ?

    Oui, parce que moi je n'ai pas encore assez de recul.

    (Si l'IDE a plus de 5 ans dans le domaine), au fil de vos postes de travail, avez-vous remarqué une amélioration dans la gestion de vos émotions ? Si oui, quelle(s) peut(vent) être la(les) raison(s) ?

    Pensez-vous que l'expérience est un point fort dans la gestion de vos émotions ?

    Oui ! Puisque moi comme je suis jeune diplômée, je prends encore toutes les choses à coeur qu'eux ils en ont tellement vus que à force, bin c'est pas qu'ils s'en foutent, je ne vais dire qu'ils s'en foutent mais ils prennent moins sur eux en faite. Il arrive à mettre des barrières. Alors que moi quand je rentre chez moi, je pense encore à mes patients tu vois ! Et eux ils rentrent chez eux, ils pensent à leur vie quoi.

    D'après vous, existe-il des moyens de gérer vos émotions lors de l'annonce d'un diagnostic de cancer ?

    Bin, peut-être sûrement, mais je ne les connais pas en tout cas.

    Avez-vous des informations supplémentaires à m'apporter à ce sujet ? Moi je n'annonce pas forcément le cancer.

    Ah pour contre là, oui, quand ce sont des patients qui sont déjà venus et qui reviennent là oui, ça me touche un peu plus ! Parce qu'ils ont été guéris et pour finir ils reviennent donc je les revois, je suis forcément un peu déçue de les revoir parce que je me dis ah punaise il va falloir se battre à nouveau. Que les nouveaux qui ont un premier cancer, bin on ne les connait pas donc ce n'est pas pareil. Que nos anciens qui reviennent euh ...

    XVIII

    IDE 5

    Depuis quand exercez-vous le métier d'infirmière ?

    Quel est votre âge ?

    Pouvez-vous me parler de votre parcours professionnel ? Je suis infirmier depuis 2006, j'ai 41 ans.

    Mon parcours professionnel, bon, déjà avant d'être infirmier, j'ai eu d'autres emplois, j'ai travaillé un peu dans l'enseignement mais pas beaucoup et beaucoup par contre en hôtellerie.

    Mon parcours infirmier donc, j'ai d'abord commencer aux urgences, puis en chirurgie uro-viscéral ensuite dans le pôle de remplacement médecine et en hôpital de jour ensuite donc oncologie, depuis maintenant, bin depuis le début d'année je suis infirmier de coordination en cancérologie. Donc dans la coordination, ça inclut le dispositif d'annonce.

    Pour vous, qu'est-ce qu'une émotion ?

    Une émotion, c'est un ressenti, enfin ça part toujours d'un ressenti qui peut plus ou moins prendre des proportions étrangères à d'habitude. Par exemple : en entendant quelque chose ou en voyant quelque chose, on ressent donc c'est ce que j'ai dis ça part d'un ressenti, on ressent quelque chose face à ce que l'on a vu ou entendu ou toucher enfin tous les sens sont en action et cette émotion peut prendre plus ou moins des proportions différentes selon les personnes.

    Etes-vous souvent confronter à l'annonce d'un diagnostic de cancer ?

    Ah bin oui, moi tout le temps, je rencontre chaque patient. Je rencontre plusieurs patients par jour.

    Comment réagissez-vous lorsque le patient reçoit son diagnostic de cancer ?

    Bin, moi mon rôle consiste à l'annonce et à l'explication donc alors je ne vais pas dire que je ne ressens pas d'émotion mais moi, ce n'est pas trop des émotions liées à l'annonce proprement dites, ce sont plus des émotions liées à l'histoire de vie, à l'histoire de la maladie. Alors l'histoire de vie bin ça peut être euh, alors ça va de tout, moi j'ai les confessions des patients dans ces moments-là ! Les gens transfèrent beaucoup lors d'une annonce, leurs problèmes personnels enfin ils font des transferts de leurs problèmes personnels vers leur maladie. Je prends deux exemples qui ce sont déroulés là ces jours-ci, une dame qui s'est écroulée, en pleurant, avec des signes de colère, qui peuvent être

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    associé à une des phase de la maladie, mais qui pour le coup était plus, en discutant avec elle bien-sûr, on s'aperçoit de ça ; elle c'était plus une libération de la parole parce que en faite, c'était une femme battue donc, elle s'est écroulée plus par rapport à son ... bin l'annonce de la maladie a fait qu'elle a eu besoin de parler de ça et de réagir par rapport à ce problème, qui, jusqu'à lors était un problème interne à elle, elle conservait tout en elle, ses enfants, sa famille, ses amis n'étaient pas au courant, les voisins non plus. Et là elle a eu le besoin d'exploser ça.

    Un autre exemple, c'est euh, une personne isolée qui vit dans la plus grande précarité voire plus que la précarité donc ça ce sont des éléments qui me touche. Et moi mes émotions, elles sont accès vers des choses comme ça que vers l'annonce en faite, proprement dites. Je pense que c'est pour ça, enfin ce n'est pas pour ça mais c'est une des raison je pense, pour laquelle j'ai été choisi à un moment donné pour faire ça. C'est que ... Alors je ne peux pas dire que je n'ai pas d'émotion en annonçant tout ça à des gens mais euh, je le fais de la manière la plus simple possible, adaptée à la personne mais moi c'est plus vraiment tout le contexte qui m'apporte des émotions mais pas l'annonce même. C'est bizarre de penser mais, c'est comme ça !

    Mais du coup vous avez quels types d'émotions ?

    Bin, c'est contrariant ! C'est triste quand même de voir tout ça et de voir que bin, euh, des gens ont la parole libérée justement, pas quand il le faudrait mais quand il y a un déclic comme la maladie qui fait que les gens ont besoin de parler de leur problème en faite ! C'est limite dommage d'attendre ça pour essayer de trouver des solutions et c'est toujours des contextes très délicats alors bon, bin heureusement on n'est pas tout seul, il y a des assistantes sociales, il y a des psychologues, voilà tout un tas de professionnels qui peuvent intervenir après c'est à moi, c'est une de mes fonction d'orienter le patient vers le bon professionnel qui va l'aider à régler les problèmes annexes pour pouvoir au mieux gérer sa maladie et son traitement après c'est ça, ça en découle finalement.

    Bénéficiez-vous suffisamment de formation vous permettant d'être préparé à l'annonce d'un cancer ?

    Non. Je crois qu'on ne peut jamais être préparé à tout. Ce n'est pas possible je pense. Et à chaque fois, moi j'ai souvent dit, moi je crois que là j'ai fais le tour, j'ai tout vu, j'ai tout entendu et bin j'ai toujours des surprises quand même. Il y a quelque temps aussi j'ai eu une patiente par exemple qui, euh... donc pareil c'était un conflit familial, et le mari téléphonait dans le service parce qu'il ne voulait pas croire que sa femme faisait de la chimio parce qu'avec son protocole, elle ne perdait pas ses cheveux. Et comme elle allait bien, tolérait bien ses cures et ne perdait pas ses cheveux, donc lui il pensait qu'elle mentait et

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    qu'elle voyait un amant ! Donc il a débarqué ici, pour voir si elle était vraiment là à son rendez-vous. Et bon, elle était vraiment là à son rendez-vous. Et voilà, et elle bin, forcément pareil quoi, elle nous a parlé de lui et ça ne se passait pas très très à la maison non plus. Il y a tout un contexte comme ça, nous les gens ici on a la chance c'est qu'on les connait, on les suit pendant tout leur parcours de l'annonce jusqu'à la guérison ou la rémission ou les deux ou bin jusqu'au décès par exemple aussi et on crée avec eux, une vraie relation et du coup les gens nous parlent plus facilement que lorsqu'ils sont hospitalisés dans un secteur conventionnel.

    Je voulais savoir aussi pour rentrer donc dans la consultation d'annonce, vous avez eu une formation ?

    Alors j'ai eu une formation il y a quelques années déjà : dispositif d'annonce mais en faite en formation, on nous a surtout appris, qu'il n'y avait pas de formation pour ça. Donc on a plus exploré des exemples, des choses un peu basiques qu'on peut apprendre par exemple : il y a des patients qui ne veulent pas entendre le mot cancer, bon bin voilà, on se met à leur niveau et on parle de ce que les gens connaissent et on ne va pas très loin et finalement je me suis rendu compte avec le temps que tout ça, ça n'existe pas en faite, les gens pour eux c'est très très clair au final. Et moi, je n'ai jamais eu de toute ma carrière depuis 2006, un patient, jamais un seul qui me dit qu'il n'était pas au courant.

    Avez-vous des émotions lors de l'annonce d'un diagnostic de cancer au patient ? Si oui, quelles sont les types d'émotions que vous éprouvez ?

    Comme j'ai dis tout à l'heure, c'est plus vraiment tout le contexte qui fait que j'ai des émotions.

    Lorsque vous avez des difficultés lors de la gestion de vos émotions, comprenez-vous ce qui pose problème ?

    Ah mais tout à fait ! Alors moi, quand j'ai commencé en 2006 dans le service, j'ai commencé en même temps qu'une autre personne, on a commencé à deux. Et, euh, quand on a commencé, donc la 2ème personne par exemple, c'est vrai qu'elle ne voulait pas venir travailler ici, ça c'était déjà très clairement exprimé. Et en sortant, elle pleurait beaucoup par exemple. Ce n'était pas du tout le service dans lequel elle se voyait. Donc forcément, oui je peux comprendre qu'il y a des gens pour qui c'est plus difficile de venir travailler ici émotionnellement oui, je peux le comprendre.

    Comment repérez-vous vos émotions ?

    PAR LA RAGE !!! (rires) Je crois qu'on peut le dire !

    XXI

    Euh, c'est un peu compliqué, je crois que c'est après, enfin je crois que c'est plus quand on en parle entre collègues. Quand on se raconte une anecdote avec les collègues, parce qu'on en parle, on fait le tour, et je pense que quand on en parle ça prouve qu'il y a un ... bin nous on discute beaucoup entre nous, dès qu'il y a un soucis par exemple on en parle, dès qu'il y a une situation problématique on s'en parle et je pense qu'à partir du moment où on est poussé à en parler, c'est que pour moi, c'est ça, c'est le côté j'ai repéré qu'il y a un problème émotionnel en moi euh, quand j'ai besoin d'en parler en faite.

    Faites-vous un travail émotionnel ? Si oui, comment faites-vous ?

    Oui, je déteste rentrer chez moi après le travail. Parce que chez moi je ne suis pas infirmier. Chez moi je suis chez moi quoi. Et donc du coup, quand j'ai terminé mon poste bin j'aime bien toujours faire une activité tous les jours. Je fais ça tous les jours. Après le travail, donc ça peut être des trucs basiques, je vais aller faire des courses ou je vais aller faire du sport ou je vais aller faire une promenade ou je vais aller voir quelqu'un de la famille, des amis ou je ne sais pas mais je ne rentre jamais chez moi directement chez moi après très rarement. Bon des fois oui, parce que comme tout le monde, j'ai rien envie de faire mais je coupe en faite. J'ai besoin d'un « SAS » un peu.

    Si vous éprouvez des émotions négatives durant votre poste de travail, êtes-vous soutenue par vos collègues ?

    Oui. Il n'y a pas de soucis avec ça.

    (Si l'IDE a moins de 5 ans dans le domaine), pensez-vous que vous avez plus de difficultés à gérer vos émotions qu'une infirmière ayant plus d'expérience que vous lors de l'annonce d'un diagnostic de cancer ?

    (Si l'IDE a plus de 5 ans dans le domaine), au fil de vos postes de travail, avez-vous remarqué une amélioration dans la gestion de vos émotions ? Si oui, quelle(s) peut(vent) être la(les) raison(s) ?

    Bin oui, euh, l'expérience fait que on gère ses émotions différemment. L'exemple qui se posait avant, bon, avant je terminais mon poste, je rentrais chez moi, j'étais en train de ressasser ma journée mais ça je pense qu'on la tous fait, jeune diplômé, on la tous fait ! Je rentrais chez moi, et je me refaisais le film de la journée dans la tête pour voir si je n'avais rien oublié, pour voir si ce qu'on m'avait dit été noté, si c'était bien compris. Déjà ça aujourd'hui, je ne fais plus. Et puis, bin les situations interpellantes me suivaient un petit peu à la maison par exemple et c'est pour ça que j'ai mis en place le fait de ne pas rentrer chez moi mais de m'occuper la tête à faire autre chose. Je l'ai fais assez rapidement, et ça a très bien marché. Don bin je continue ça et puis bin l'expérience oui bien sur fait que on

    XXII

    ... avant par exemple quand on parlait de cancer à quelqu'un, la personne pleurait parce que ça arrive souvent, enfin je ne savais pas forcément quoi dire puisqu'on est pas préparé à ça, on est pas formé à tout ça, et aujourd'hui, avec l'expérience, bin je sais que le patient a le droit de pleurer, je sais que alors voilà je parle plus des émotions du patient là. Donc du coup par rapport à ça comment moi je gère ses émotions et les miennes en même temps du coup, parce que moi les miennes c'étaient de « l'émotion du patient je pleure, l'émotion du soignant je ne sais plus quoi faire, quoi dire ». et bin l'expérience, au total, donne que bin les temps de pleurs et les temps de silence, bin c'est important ! Et bin, il faut laisser pleurer le patient, il faut laisser le temps de silence, si il ne parle pas il ne parle pas, voilà. Et ça c'est important et c'est comme ça qu'on gère nos émotions ensemble, le soignant et le soigné.

    Et ça vous ai déjà arriver d'avoir des émotions devant le patient et qu'il s'en rende compte ?

    Je n'en ai pas le souvenir. Mais je pense que ça a dû peut être arriver mais que je ne m'en suis pas rendu compte mais que peut être que la famille et/ou le patient s'est rendu compte de quelque chose. Parce que on reste humain je veux dire. Mais, là comme ça je n'aurai pas d'exemple, ou je ne l'ai pas remarqué ou je ne m'en souviens plus mais je pense que ça a dû arriver à tout le monde !

    Alors si ! Si c'est vrai, si ! Parce que l'on parle des émotions tristes, mais il y a aussi les émotions joyeuses aussi, donc ça dans les émotions joyeuses oui bin là, tout le temps. Nous on rigole beaucoup avec nos patients, c'est la joie de vivre ici, on me dit toujours tu travailles dans un service comme ça, ça doit être triste, bin je dis bin non c'est pas du tout triste quoi on rigole bien ! Et donc ça oui forcément, bon ça ils s'en rendent compte de cette joie de vivre, machin tout ça ... Par contre euh, il y a aussi des ... pas ici pas dans le service ici, mais dans d'autres secteurs par exemple, oui j'avais des moments de frustrations, de colère et ça je pense que oui, ils ont du se rendre compte de certaines choses.

    Pensez-vous que l'expérience est un point fort dans la gestion de vos émotions ? Oui, complétement.

    D'après vous, existe-il des moyens de gérer vos émotions lors de l'annonce d'un diagnostic de cancer ?

    Bin, je pense que la préparation avant, elle est importante. Alors, moi j'aime bien c'est, me préparer un peu avant une annonce, mais surtout après. Je ne vais jamais, alors, après

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    chaque annonce, on a un rapport à écrire, et je n'écris jamais mon rapport tout de suite après l'annonce. Alors est-ce que c'est lié aux émotions, bin oui peut être, c'est peut être pour rester le plus neutre possible. Mais c'est surtout qu'après une annonce on pourrait écrire un roman quoi et je pense qu'il faut être synthétique quand même parce que sinon bin, il faut penser à nos collègues après qui lisent justement le compte rendu de l'annonce et qui ont besoin de choses très concrètes. Et ça permet, pour moi en tout cas, c'est ma méthode, attendre un peu, alors quand je dis attendre un peu ce n'est pas 15 jours, ça se fait dans la journée bien-sûr. Attendre un peu ça permet aussi d'être un peu plus synthétique et de pouvoir écrire un rapport peut être un peu plus professionnel sans laisser transparaitre d'émotions et plus carrément des actions. Pour reprendre les actions de tout à l'heure, bon, bin, simplement noter que l'assistante sociale a été prévenue parce que la dame souhaite trouver un logement parce qu'elle est battue chez elle, enfin voilà. Donc qu'il y a des actions, en tout cas, sociales qui sont mises en place. Ce sont plus des choses comme ça.

    Avez-vous des informations supplémentaires à m'apporter à ce sujet ?

    Bin, je crois que, non c'est vraiment ça en faite, c'est ce que je disais tout à l'heure c'est vraiment d'insister sur le point que on croit toujours être passé par toutes les émotions et d'avoir tout entendu, et à chaque fois il y a des nouveautés et qu'on ne sait pas comment un jour on pourrait avoir, à gérer une émotion de quelques choses d'inconnu quoi.

    Bon, pour aller plus loin, on a nos patients mais on a aussi nos proches ... Et moi, j'ai dû annoncer le cancer de ma soeur par exemple aussi dans le cadre de ma profession mais c'est quand même ma soeur donc, et comme bin en coordination, bin on est tout seul, (petit soupir) bin ce n'est pas quelqu'un d'autres, ce n'est pas un de mes collègue qui peut le faire quoi donc voilà. Et du coup, bin oui il faut faire ça aussi. J'ai mis beaucoup plus de temps à lui annoncer et j'ai fais la consultation d'annonce dans son salon plutôt que dans mon bureau ça a été la seule différence après l'accompagnement a été très différent aussi parce que là on est plus infirmier, on est frère, on est accompagnant.

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    IDE 6

    Depuis quand exercez-vous le métier d'infirmière ?

    Quel est votre âge ?

    Pouvez-vous me parler de votre parcours professionnel ?

    Ça fais 18 ans que je suis infirmière, j'ai 40 ans et puis bin parcours professionnel, j'ai commencé en maison de retraite pendant une petite dizaine d'année, après j'ai intégré le pôle médecine de l'hôpital quand j'ai souhaité revenir et j'ai été en pneumologie sur l'ancien hôpital pendant 5 / 6 ans enfin jusqu'au déménagement et là je suis en cardiologie pneumologie depuis l'ouverture du nouvel hôpital.

    Pour vous, qu'est-ce qu'une émotion ?

    C'est un sentiment que l'on ressent sur un moment, un instant devant une situation qui peut nous poser problème, qui nous ravis. C'est difficile à dire une émotion, c'est difficile à décrire, c'est un ressenti, c'est une sensation plus ou moins bonne selon le type de situation.

    Etes-vous souvent confronter à l'annonce d'un diagnostic de cancer ?

    Oui, dans le service on en a régulièrement.

    Comment réagissez-vous lorsque le patient reçoit son diagnostic de cancer ?

    C'est différent, ça dépend si on est là le jour de l'annonce ou après si ça a été annoncé au matin et puis que je travaille l'après-midi. Après tout dépend aussi, moi je fonctionne beaucoup au « feeling » avec la personne donc il y a des situations qui vont me toucher certainement plus que d'autres ; selon la jeunesse, selon la gravité. C'est assez variable, c'est sur il y a certaines situations qui nous toucheront plus d'autres qui, ne nous laisserons pas insensible mais je serai moins marquée. Tout dépendra de la personne qui est dans le lit et de son vécu, de comment on l'a géré avant, quelle était notre relation avec elle avant cette annonce ...

    Bénéficiez-vous suffisamment de formation vous permettant d'être préparé à l'annonce d'un cancer ?

    Des formations, il y en a pas vraiment, il en existe mais moi je ne les ai pas vraiment faites. C'est surtout avec l'expérience, au fur et à mesure des années que je me suis formée et que je me suis « habituée », préparée à ce type d'entretien, de situations. Après oui, si j'en ressentais le besoin je pense qu'il y aurait certainement des formations qui sont proposées

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    par l'hôpital après il n'y a une formation spécifique « comment réagir face à l'annonce d'un cancer pour un patient ». Je ne m'y pas inscrite quoi, il y a différentes groupes, parfois différentes formations qui reviennent sur ce sujet.

    Avez-vous des émotions lors de l'annonce d'un diagnostic de cancer au patient ? Si oui, quelles sont les types d'émotions que vous éprouvez ?

    C'est que je disais un peu tout à l'heure, il y a des situations qui vont me marquer plus que d'autres ! Tout dépend si la personne c'est quelqu'un de jeune, une mère de famille, un père, enfin ils nous marquent tous plus ou moins mais ... les émotions vont être de différents degrés donc oui je ressens, on n'est pas insensible après on se protège par rapport à ça mais oui les émotions on les a, elles sont plus ou moins importantes et plus ou moins fortes en fonction de la personne qu'on a en face.

    C'est de la compassion, de la tristesse, de l'empathie vis-à-vis de la personne. Ce n'est pas de l'identification, on ne se met pas à la place de la personne mais ... on fait un transfert sans en être vraiment un car si on commence à faire des transferts, on ne s'en sort plus ... mais bon on peut se mettre pendant quelques minutes, quelques instants. Ça m'est déjà arrivé de me dire « bin mince, si c'est moi qui étais dans le lit, ou dans le fauteuil, et que j'avais le médecin en face de moi ... » donc oui c'est un transfert sur le coup parce que ... mais bon ... après il faut savoir passer à autre chose. Enfin moi j'arrive à le faire, tout le monde ne le fera peut-être pas pareil mais c'est surtout ça, de l'empathie, de la compassion et puis ne pas se retrancher que derrière le rôle de soignant, d'infirmière surtout pour les mauvaises nouvelles.

    Lorsque vous avez des difficultés lors de la gestion de vos émotions, comprenez-vous ce qui pose problème ?

    C'est par rapport à l'âge du patient, si le patient est jeune. Même si là ça fait un moment que je n'en ai pas vu vraiment des jeunes jeunes, c'est vrai que quand j'étais à l'ancien hôpital et que j'avais moi-même 33 ans et puis que tu te retrouves avec un patient qui a 33 ou 34 ans et bien tu te dis ça pourrais être moi, donc on s'identifie. Je suis plus frappée lorsque c'est quelqu'un de jeune.

    Comment repérez-vous vos émotions ?

    Je me connais et puis la situation me marque, ça me prend un peu à la gorge et j'aurai peut-être envie de verser une larme, mais après vraiment repérer une émotion, ce n'est pas évident.

    Faites-vous un travail émotionnel ? Si oui, comment faites-vous ?

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    Le travail émotionnel ... c'est l'expérience qui le donne au fil du temps. C'est abstrait pour moi, c'est l'expérience qui fait que oui au fil des années, tu te forges une carapace et puis voilà tu prends et tu rejettes certains choses. Je sais où sont mes limites, jusqu'où je peux aller dans une relation avec le patient qui a eu cette annonce. Quand c'est trop lourd ... et puis parfois tu n'as pas envie, tu n'es pas disposé à ça, parfois tu as plus envie de t'investir donc bon ... pour moi un travail émotionnel, c'est abstrait, je le fais peut-être naturellement sans m'en rendre compte. Je le vis au fil au feeling. Pour moi franchement, c'est l'expérience. C'est le feeling qui fait que je me lance sur certaines choses, d'autres je suis plus en retrait.

    Si vous éprouvez des émotions négatives durant votre poste de travail, êtes-vous soutenue par vos collègues ?

    Oui, si quelque chose nous touche plus qu'une autre oui c'est sûr que l'on trouvera toujours une collègue pour en discuter, une aide-soignante, une infirmière parfois même les médecins ... Après on est certaines à bien se connaitre depuis un certain temps donc on parle de toutes ces choses là naturellement et ça dédramatise la chose et parfois ça part sur le ton pas de l'humour, pas de la plaisanterie non plus parce qu'on ne peut pas rire de tout mais voilà on essaie de dédramatiser à fond sur ces situations là qui nous posent un peu problème parce que sinon on encaisse tout et la soupape saute tôt ou tard ! Il n'y a pas de soucis si on veut en discuter.

    (Si l'IDE a moins de 5 ans dans le domaine), pensez-vous que vous avez plus de difficultés à gérer vos émotions qu'une infirmière ayant plus d'expérience que vous lors de l'annonce d'un diagnostic de cancer ?

    (Si l'IDE a plus de 5 ans dans le domaine), au fil de vos postes de travail, avez-vous remarqué une amélioration dans la gestion de vos émotions ? Si oui, quelle(s) peut(vent) être la(les) raison(s) ?

    Oui oui. L'âge faisant et les années de métier font que ... bin oui, je m'améliore enfin améliorer c'est un bien grand mot mais on apprend à se protéger, on apprend à se préserver, on apprend à prendre les émotions des patients, à les accepter donc oui. Ou même si on apprend ça reste toujours quand même au moment ou la situation qui fait qu'il y aura toujours une mise en difficulté par rapport à une situation et là je me dis mince, je n'aurai pas du faire ça ou j'y réfléchis après. Parfois, il y a encore des choses plusieurs années après qui peuvent te faire réfléchir et te dire « ah bin oui si j'avais fait à l'époque ... ». Voilà, c'est l'expérience qui fait que...

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    Pensez-vous que l'expérience est un point fort dans la gestion de vos émotions ?

    Oui, pour moi ça c'est indéniable et maintenant même comme je suis l'une des plus ancienne du service en tant qu'infirmière, c'est vrai qu'on a beaucoup de jeunes diplômées et souvent c'est notre rôle aussi de leur dire « bin ne t'inquiète pas, oui ça te fait mal au coeur mais tu verras avec le temps, tu seras moins ... pas moins touché » parce qu'il faut quand même qu'il y est encore cette émotion-là, que ça nous touche quand même sinon après on devient insensible mais oui l'expérience c'est sur c'est quelque chose important.

    D'après vous, existe-il des moyens de gérer vos émotions lors de l'annonce d'un diagnostic de cancer ?

    Peut-être que oui, mais lesquels ...

    Avez-vous des informations supplémentaires à m'apporter à ce sujet ?

    Il n'y a pas vraiment de recette miracle, le tout c'est d'être bien à l'écoute et aussi accepter que le patient ne veuille pas discuter, ne soit pas capable de discuter parce que lui il a un trop plein d'émotions et il faut aussi accepter la colère du patient, mais il faut rester à sa place et selon toi tes capacités émotionnelles puisque c'est le sujet du jour, ta capacité toi d'acceptation et puis respecter le rythme de la personne sur le travail d'écoute, son temps de parole. Alors ce n'est pas toujours évident surtout dans des services de soins traditionnels comme nous, on n'est pas une unité dédiée à la cancéro ou aux soins palliatifs ou à l'annonce du diagnostic ... Il faut savoir ménager du temps, il n'y a pas de relation miracle et de prise en charge que l'on trouve dans ces services. Je reviens toujours sur ça, c'est l'expérience qui fera que tu respecteras le rythme de ton patient et ton rythme à toi et son rythme à toi et en principe ça devrait coller... Nous on est touché par certaines émotions, certains types comme je disais en début d'entretien des gens nous touchent plus que d'autres, qui nous rappellent quelqu'un de la famille, un ami ... et eux aussi on ne peut pas les obliger à se confier quand ils n'ont pas envie ou quand la relation n'est pas instaurée et fiable. Ça il faut avoir l'expérience, pour moi c'est le terme. C'est les années qui font ...

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    Depuis quand exercez-vous le métier d'infirmière ?

    Quel est votre âge ?

    Pouvez-vous me parler de votre parcours professionnel ? Depuis Août 2018, j'ai 24 ans.

    J'ai fais beaucoup de stages différents : en traumatologie, en EHPAD, aux urgences, en pédiatrie, en maternité, en néonat et ensuite j'ai travaillé en EHPAD pendant 2 mois, ensuite je suis allée en gériatrie et là je suis en pneumologie depuis 1 mois.

    Pour vous, qu'est-ce qu'une émotion ?

    C'est quelque chose que l'on ressent qui peut être positif comme négatif. Etes-vous souvent confronter à l'annonce d'un diagnostic de cancer ? Comme je suis jeune diplômée, j'ai très peu été confronté à cela.

    Mais ça vous ai déjà arrivé de rencontrer un patient qui avait reçu un diagnostic de cancer ou qui avait le cancer ?

    Oui.

    Comment réagissez-vous lorsque le patient reçoit son diagnostic de cancer ? Euh ... bin ... comme avec tous les autres patients.

    Bénéficiez-vous suffisamment de formation vous permettant d'être préparé à l'annonce d'un cancer ?

    Non, pas pour moi déjà.

    Avez-vous des émotions lors de l'annonce d'un diagnostic de cancer au patient ? Si oui, quelles sont les types d'émotions que vous éprouvez ?

    C'est plus des émotions lorsqu'il commence à parler de sa famille, de comment sa famille va devenir après si il décède ... C'est dur moralement quand même.

    Je ressens de la tristesse.

    Lorsque vous avez des difficultés lors de la gestion de vos émotions, comprenez-vous ce qui pose problème ?

    C'est le devenir du patient qui me pose problème.

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    Comment repérez-vous vos émotions ?

    Je ne sais plus quoi dire, je ne parle plus. Et je préfère prendre la main de la personne ou faire un geste plutôt que parler.

    Faites-vous un travail émotionnel ? Si oui, comment faites-vous ?

    Je pense que ça revient ce que je viens de dire, je ne parle pas, je fais des gestes.

    Si vous éprouvez des émotions négatives durant votre poste de travail, êtes-vous soutenue par vos collègues ?

    Oui, on en parle. On va boire un café et on en parle.

    (Si l'IDE a moins de 5 ans dans le domaine), pensez-vous que vous avez plus de difficultés à gérer vos émotions qu'une infirmière ayant plus d'expérience que vous lors de l'annonce d'un diagnostic de cancer ?

    Je pense que ça dépend aussi du caractère de la personne déjà. Après l'expérience c'est sur ça y fait mais je pense que c'est plutôt déjà la personne comment elle est à l'extérieur du travail.

    (Si l'IDE a plus de 5 ans dans le domaine), au fil de vos postes de travail, avez-vous remarqué une amélioration dans la gestion de vos émotions ? Si oui, quelle(s) peut(vent) être la(les) raison(s) ?

    Pensez-vous que l'expérience est un point fort dans la gestion de vos émotions ? Ça peut être oui.

    D'après vous, existe-il des moyens de gérer vos émotions lors de l'annonce d'un diagnostic de cancer ?

    Il y a toujours où l'on montre quand même ce que l'on ressent, on est quand même des personnes humaines donc ... mais oui par le geste, par le regard. Par la parole aussi, on peut apaiser les mots ...

    Avez-vous des informations supplémentaires à m'apporter à ce sujet ? Comme je débute c'est un peu compliqué.

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    IDE 8

    Depuis quand exercez-vous le métier d'infirmière ?

    Quel est votre âge ?

    Pouvez-vous me parler de votre parcours professionnel ?

    J'ai 29 ans, ça fait 6 ans que je suis infirmière. J'ai d'abord fait le CS c'est-à-dire que j'ai fais un peu tout les services pendant 2 ans et après je suis arrivée en cardio pneumo ç fais 4 ans maintenant.

    Pour vous, qu'est-ce qu'une émotion ?

    C'est un ressenti, ça peut être triste, heureux. C'est le ressenti sur une situation à un moment donné.

    Etes-vous souvent confronter à l'annonce d'un diagnostic de cancer ?

    Tout le temps ! Surtout en pneumo tout le temps.

    Comment réagissez-vous lorsque le patient reçoit son diagnostic de cancer ?

    Je suis compatissante tout en restant à ma place et j'essaie de reformuler les choses, réexpliquer au patient ce qu'il va lui arriver, quel traitement il va avoir, le pronostic, et toujours repasser derrière le médecin pour pouvoir bien lui expliquer ce qu'il va se passer après il ne faut pas non plus être la copine, il ne faut pas non plus pleurer tout ça parce que bon justement ils ont besoin de quelqu'un de costaud à ce moment là après ils vont devoir l'annoncer à leur famille.

    Bénéficiez-vous suffisamment de formation vous permettant d'être préparé à l'annonce d'un cancer ?

    Bin moi j'avoue que j'avais été accepté sur une formation qui se passait à Paris pendant 3 jours ce n'était pas forcément sur le cancer mais c'était sur l'annonce d'un diagnostic difficile mais bon j'ai été enceinte donc ce n'est pas moi qui y est allée, c'est un collègue à moi mais sinon si on le demande en général la formation est acceptée.

    Avez-vous des émotions lors de l'annonce d'un diagnostic de cancer au patient ? Si oui, quelles sont les types d'émotions que vous éprouvez ?

    En général, c'est plutôt la tristesse et un peu de colère quand même parce que les gens ne méritent pas ça et puis de l'incompréhension. Après, on en voit tellement que ... je ne dis pas qu'on est insensible ; il y a beaucoup de facteurs qui rentrent en compte, je ne dis pas

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    que si c'est une personne âgée c'est moins triste mais je veux dire l'impact n'est pas le même quand c'est un jeune qui a encore des enfants, qui va subir un traitement...qu'une personne âgée qui ne va pas subir de traitement et qui va continuer la fin de sa vie qui a déjà vécue 80 ans ... c'est différent pour moi.

    Lorsque vous avez des difficultés lors de la gestion de vos émotions, comprenez-vous ce qui pose problème ?

    Ça m'est déjà arrivé plusieurs fois, donc quand c'est comme ça, de toute façon on est seul, on est toujours avec le médecin, on ne comprend pas beaucoup de choses mais bon ... Parce qu'eux, ils sont plutôt stoïque quand ils annoncent un diagnostic. Donc heureusement qu'on a nos collègues tout ça parce que c'est vrai qu'on n'a pas d'aide nous les soignants parce que parfois on a quand même des situations assez difficile, après on a notre vécu aussi parce que le cancer ça n'arrive pas qu'aux autres ! Et donc c'est vrai que parfois ça nous rapporte à des situations un petit peu difficiles.

    Comment repérez-vous vos émotions ?

    (rires) Ah bin moi ça monte tout de suite ! Moi je pleure vite alors ... Puis je le sens tout de suite quand ça ne va pas aller donc j'ai le temps de sortir de la pièce et de laisser le médecin continuer ou de trouver une excuse et m'en aller.

    Faites-vous un travail émotionnel ? Si oui, comment faites-vous ?

    Je ne sais pas si je fais vraiment un travail émotionnel mais je pense qu'avec le temps déjà aussi on se forge mais parce qu'au début j'allais aux enterrements des décès et tout ... Donc je me suis fais un peu disputer par un médecin donc je tairais le nom parce qu'il m'a dit qu'il faut vraiment séparer ... bon c'est difficile eux, ils y arrivent plus que nous. Parce que déjà nous on a plus contact avec la famille et on connait plus l'intérieur, encore maintenant à l'extérieur, on rencontre des familles voilà, ils reconnaissent tout de suite, ce sont nous les derniers visages qu'ils voient au décès de leur proche donc c'est pas évident.

    Si vous éprouvez des émotions négatives durant votre poste de travail, êtes-vous soutenue par vos collègues ?

    Oui, on parle ensemble.

    (Si l'IDE a moins de 5 ans dans le domaine), pensez-vous que vous avez plus de difficultés à gérer vos émotions qu'une infirmière ayant plus d'expérience que vous lors de l'annonce d'un diagnostic de cancer ?

    XXXII

    (Si l'IDE a plus de 5 ans dans le domaine), au fil de vos postes de travail, avez-vous remarqué une amélioration dans la gestion de vos émotions ? Si oui, quelle(s) peut(vent) être la(les) raison(s) ?

    Oui c'est sûr, parce qu'avec l'expérience déjà et aussi avec l'expérience on apprend à faire la part des choses avec les pathologies qui peuvent être guéris et les pathologies où il ne faut pas faire souffrir les gens. Quand les gens nous disent je veux partir parce que j'ai vécu ça, ça et ça ... Donc on apprend à faire la différence surtout avec les cancers, les gens qui sont en bout de course, je ne dis qu'on préfère les voir partir mais c'est différent, c'est un accompagnement. Quand on les accompagne, c'est plus facile pour nous de gérer nos émotions que quand c'est un décès subit.

    Pensez-vous que l'expérience est un point fort dans la gestion de vos émotions ? Oui je pense qu'avec le temps on se forge.

    D'après vous, existe-il des moyens de gérer vos émotions lors de l'annonce d'un diagnostic de cancer ?

    Franchement je ne pense pas à moins d'avoir un coeur de pierre mais non je ne pense pas. Avez-vous des informations supplémentaires à m'apporter à ce sujet ?

    Ce qui serait pour nous les soignants c'est aussi d'avoir un ... ça existe dans les unités de soins palliatifs ils font des « palliatocafé » mais sur des moments difficiles on n'a pas trop le temps de voir claire et on n'a pas de suivi nous les soignants. Je trouve que parfois c'est bien aussi, puis nos collègues médicaux, les médecins, ils ne nous disent pas est-ce que ça a été ... On ne se sent pas très entouré quoi ... puis après eux ils sortent de la chambre puis c'est nous qui devons réexpliquer à la personne et toute la journée c'est nous qui « subissons » l'annonce à la famille donc, les pleurs des familles, les incompréhensions. C'est à nous de faire l'annonce à la famille, heureusement maintenant il y a l'équipe mobile de soins d'accompagnement qui permet aussi de faire les annonces aux familles, mais ils veulent toujours que l'on soit présent donc au final on est toujours là ...

    On peut consulter la psychologue mais il faut faire appel à la médecine du travail.

    Pour revenir à l'équipe mobile de soins d'accompagnement, après 17 heures, elle n'est plus là donc il faut gérer les gens, le week-end, elle n'est pas là non plus, donc ça fais beaucoup de moment où on se retrouve seul devant le patient qui est démuni.

    Résumé

    Abstract

    Durant mes trois années d'études, j'ai pu

    During my three years of study, I noticed that

    remarquer que j'étais plus ou moins affectée par des situations, notamment sur le plan

    I was more or less affected by situations,

    especially emotionally. Thus, the

    émotionnel. Ainsi, l'annonce d'un diagnostic

    announcement of a diagnosis of cancer

    de cancer m'a plus particulièrement touché, c'est donc pour cela que j'ai décidé de réaliser

    particularly affected me, so that's why I decided to do my final work on this topic.

    mon travail de fin d'étude sur ce sujet.

    So I asked the following question : "How

    J'ai donc posé la question de départ suivante :

    does the announcement of a cancer diagnosis

    « en quoi l'annonce d'un diagnostic de cancer

    have an impact on the patient - nurse

    a un impact sur la relation soignant -

    relationship ? "

    soigné ? »

    To carry out this work, I conducted research

    Pour effectuer ce travail, j'ai réalisé des

    on differents topic areas : cancer, the

    recherches sur différentes notions : le cancer, le dispositif d'annonce, la relation soignant-

    announcement device, the patient - nurse relationship, the emotions, the experience, the

    soigné, les émotions, l'expérience, la distance

    professional distance ...

    professionnelle ...

    As a result of this research, I was able to make

    À la suite de ces recherches, j'ai pu émettre

    a general hypothesis that "the experience

    une hypothèse générale qui est « l'expérience

    would have an impact on the caregivers

    aurait une influence sur la gestion des

    management of emotions, when announcing a

    émotions du soignant lors de l'annonce d'un

    cancer diagnosis".

    diagnostic de cancer ».

    To validate or reject this hypothesis, I

    Afin de valider ou de rejeter cette hypothèse,

    j'ai effectué des entretiens semi-directifs

    conducted semi-structured interviews with eight nurses with a little or a lot of experience.

    auprès de huit infirmiers ayant plus ou moins

    To concluded, the results show that having

    d'expérience.

    more experience, is a strong point in

    En effet, ceux-ci nous démontrent que

    caregivers being able to manage their own

    l'expérience est un point fort dans la gestion des émotions du soignant.

    emotions.

    Mots-clés : cancer, dispositif d'annonce,

    relation soignant-soigné, distance

    Keywords : cancer, announcement device, patient - nurse relationship, professional

    professionnelle, expérience, émotions.

    distance, experience, emotions.






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"Entre deux mots il faut choisir le moindre"   Paul Valery