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Facteurs de vulnérabilité et expansion de l'extrémisme violent au nord du Togo


par Yawo Dodji Mandela DJAHO
Institut Régional d'Enseignement Supérieure et de Recherche en Développement Culturel (IRES-RDEC) - Master Professionnel en Développement Culturel (Culture, Paix et Développement) 2023
  

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1.3 De l'évaluation des facteurs de vulnérabilité et lien avec l'extrémisme violent

Tableau n°13 : Répartition des enquêtés selon l'existence de vulnérabilités dans la région des savanes

Effectif

Pourcentage

Pourcentage
valide

Pourcentage
cumulé

Oui 121

100.00

100.00

100.00

Non 0

0.00

0.00

100.00

Total 121

100.00

100.00

 
 

Source : Mandela DJAHO, juillet 2023

L'analyse des données de ce tableau montre que 100% des enquêtés affirment que la région des savanes fait face à des vulnérabilités. Ces données montrent que les populations ont conscience qu'ils vivent dans une situation de vulnérabilité par rapport aux autres régions.

41

Tableau n°14 : Répartition des enquêtés selon la connaissance des facteurs de vulnérabilité auxquels fait face la population dans la région des savanes

Facteurs de vulnérabilité Effectif

Pourcentage

Pourcentage
valide

Pourcentage
cumulé

Fort taux de pauvreté

26 21.49 21.49 40.49

Défis d'accès aux soins de santé

23

19.01

19.01

57.85

Défis d'accès à l'éducation

21 17.36 17.36 57.85

Chômage

21 17.36 17.36 75.21

Changement climatique

20 16.53 16.53 91.74

Autres (Insécurité

alimentaire, Toxicomanie et l'usage des drogues chez les jeunes, manque d'activités économiques)

10

8.26

8.26

100.00

Total

121

100.00

100.00

 

Source : Mandela DJAHO, juillet

2023

 

Au regard des résultats de ce tableau, il ressort que la région des savanes est confrontée à diverses types de facteurs de vulnérabilité. En effet, 21,49% des enquêtés estiment qu'il existe un fort taux de pauvreté dans région. Par ailleurs, 19,01% des enquêtés ont évoqués des défis d'accès aux soins de santé alors que 17,36% ont fait cas des défis d'accès à l'éducation. 17,36% des enquêtés ont également évoqué le chômage des jeunes comme défis et 16,53% ont parlé du changement climatique. Enfin, 8,26% des enquêtés ont évoqué d'autres défis comme le manque d'activités économiques, la toxicomanie et l'usage des drogues chez les jeunes ou encore l'insécurité alimentaire).

Selon l'Analyse Commune de Pays des Nations Unies (CCA UN 2021), l'extrême pauvreté touche près de la moitié (49,1 %, incidence de la pauvreté monétaire) de la population des savanes au Togo et près des deux tiers (65,1%) vivent sous le seuil de pauvreté. Une femme a confié : « Nous avons souvent une insuffisance du personnel de santé et un manque de certains produits pharmaceutiques ; souvent il faut aller à Dapaong »4. Une autre femme a confié : « Pour nous les adultes, ont se soigne comme on peut, souvent avec la médécine

4 Entretien anonyme : sanfatoute, le 23 juillet 2023

5 Idem

42

traditionnelle. Mais pour les enfants, c'est un souci pour nous. On n'a pas de pédiatrie ici. Il faut aller à Korbonkou ou à Dapaong pour ça »5.

La répartition géo spatiale des sinistrés selon les aléas en 2018 (ANPC) a permis d'identifier 1322 sinistrés dans le Kpendjal dans la région de savanes. L'évaluation des situations d'urgence 2021 de l'ANPC montre que 7 ha de superficie cultivée dans la région des savanes ont été ravagés par les inondations et 106,5 ha ont été touchées par les pluie diluviennes.

Graphe n°5 : Répartition des enquêtés selon la connaissance des facteurs de vulnérabilité auxquels fait face la population dans la région des savanes

Source : Mandela DJAHO, juillet 2023

Tableau n°15 : Répartition des enquêtés par rapport à l'exploitation des vulnérabilités par les

GANE

Effectif

Pourcentage

Pourcentage
valide

Pourcentage
cumulé

Oui

121

100.00

100.00

100.00

Non

0

0.00

0.00

100.00

Total

121

100.00

100.00

 

Source : Mandela DJAHO, juillet 2023

 
 
 

Dans un contexte d'insécurité liée à l'extrémisme violent, les femmes font face à des défis spécifiques et souvent complexes. Elles sont touchées de manière disproportionnée par les

43

Les données de ce tableau montrent que 100% des enquêtés estiment que les GANE peuvent exploiter les vulnérabilités. Ces données nous montrent qu'il existe un lien entre les facteurs de vulnérabilité et l'expansion de l'extrémisme violent.

Les facteurs de vulnérabilité susmentionnés constituent ainsi des portes d'entrées et de persistance des actes terroristes. Les facteurs de vulnérabilité jouent en effet un rôle clé dans l'expansion de l'extrémisme violent, car ils créent un terreau propice au recrutement, à la radicalisation et à la propagation des idéologies extrémistes. Les groupes extrémistes exploitent ces facteurs pour attirer de nouveaux membres et consolider leur base de soutien.

Tableau n°16 : Répartition des enquêtés par rapport aux défis spécifiques auxquels les femmes et les filles font face dans leur localité

Défis spécifiques aux femmes

Effectif

Pourcentage

Pourcentage
valide

Pourcentage
cumulé

Mariage précoce

31

25.62

25.62

25.62

Défis d'accès aux ressources

24

19.83

19.83

45.45

Défis d'accès à l'éducation

23

19.01

19.01

64.46

Violences basées sur le Genre

19

15.70

15.70

80.17

Grossesse précoce en milieu 13

scolaire

10.74

10.74

90.91

Décès pendant 11

l'accouchement

9.09

9.09

100.00

Total

121

100.00

100.00

 
 
 
 
 
 
 

Source : Mandela DJAHO, juillet 2023

L'analyse des données de ce tableau montre que les femmes et les filles font face à plusieurs défis spécifiques à elles dans la région des savanes. En effet, 25,62% des enquêtés ont identifié le mariage précoce comme défi spécifique majeur aux filles dans la région des savanes, 19,83% des enquêtés ont évoqués les difficultés d'accès aux ressources et 19,01% d'entre eux ont fait cas des défis d'accès à l'éducation. Par ailleurs, 15,70% des enquêtés ont abordé les violences basées sur le genre, 10,74% ont fait cas de grossesse précoce en milieu scolaire et 9,09% ont évoqué le décès pendant l'accouchement.

44

conséquences de la violence extrémiste. Une femme agricultrice interrogée a confié : « La terre que j'exploite ne m'appartient pas. Nous avons du mal à avoir des terres cultivables en tant que femme, alors qu'il y a plus de femmes qui cultivent la terre dans notre localité. Ça a toujours été ainsi. C'est notre culture qui est ainsi et nous le respectons. Parfois lorsque les femmes deviennent veuves, elles perdent le droit de propriété des parcelles cultivables après le décès de leurs maries »6. Une autre femme interviewée nous a confié : « Plusieurs cas de femmes battus existent effectivement dans notre localité. Nous subissons des violences de la part de nos maris. Il peut s'agir des insultes, de la privation d'argent ou même des viols. »

Graphe n°6 : Répartition des enquêtés par rapport aux défis spécifiques auxquels les femmes et les filles font face dans leur localité

Mariage précoce Défis d'accès aux ressources

Défis d'accès à l'éducation Violences basées sur le Genre

Grossesse précoce en milieu scolaire Décès pendant l'accouchement

Défis spécifiques aux femmes

Source : Mandela DJAHO, juillet 2023

Tableau n°17 : Répartition des enquêtés par rapport à l'exploitation des vulnérabilités

Exploitation des

vulnérabilités Effectif

Pourcentage

 

Pourcentage valide

Pourcentage
cumulé

 
 
 
 

Oui

104

85.95

85.95

85.95

 

Non

17

14.05

14.05

100.00

 
 

Total

121

100.00

100.00

 
 
 
 
 
 
 

Source : Mandela DJAHO, juillet 2023

6 Entretien anonyme : cinkassé, le 19 juillet 2023

45

L'analyse des données de ce tableau nous montre que 85,95% des enquêtés estiment que les GANE peuvent exploités les défis spécifiques aux femmes alors que 14,05% estiment que ces défis ne peuvent pas être exploités. Les femmes sont souvent exposées à des niveaux accrus de violences basées sur le genre dans les zones touchées par l'extrémisme violent. Les groupes extrémistes peuvent imposer des normes et des lois discriminatoires à l'encontre des femmes, entraînant des abus physiques, sexuels et psychologiques. Les femmes peuvent être victimes de mariages forcés, de violences domestiques, d'esclavage sexuel et d'autres formes de violence. Pour éviter de subir ces pressions et avoir une vie meilleure, les femmes peuvent décider de ralier les GANE. Un chauffeur a confié ceci : « Nous prenons plusieurs femmes de Dapaong vers le Burkina Faso. Ces femmes sont des commerçantes et elles passent plusieurs jours de l'autre côté de la frontière. Moi je suis sûr que des propositions sont faites à ces femmes. Les extrémistes leur promettent des mariages, de l'argent bref une vie meilleure. Les femmes sont facilement manipulables »7.

Tableau n°18 : Répartition des enquêtés par rapport aux répercussions des défis sur les populations

Répercussions des défis Effectif

Pourcentage

Pourcentage
valide

Pourcentage
cumulé

Frustrations des populations

42 34.71 34.71 34.71

Impression d'être laisser pour compte par rapport aux autres régions

31

25.62

25.62

60.33

Problèmes

sécuritaire/banditisme

28

23.14

23.14

83.47

Déplacement des populations

20

16.53

16.53

100.00

Total

121

100.00

100.00

 

Source : Mandela DJAHO, juillet

2023

 

Les défis d'une population dans un contexte d'insécurité liée à l'extrémisme violent peuvent entraîner une série de répercussions complexes sur une population. En effet, sur la question des répercussions des défis sur les populations, l'analyse de ce tableau nous montre que 34,71% des enquêtés estiment que les défis entraînent la frustration des populations, 25,62% pensent que la population à l'impression d'être laissée pour compte par rapport aux autres régions. Par ailleurs, 23,14% des enquêtés ont évoqués des problèmes sécuritaires dans la région, 16,53% ont fait cas des déplacements des populations.

7 Entretien anonyme : dapaong, le 20 juillet 2023

8 Entretien anonyme : namaré, le 17 juillet 2023

46

L'insécurité grandissante dans certaines zones entraine effectivement des déplacements de populations vers des zones plus paisibles. Cette situation entraine la fragilisation de la cohésion sociale liées aux rivalités pour l'exploitation des ressources naturelles entre populations autochtones et les déplacés.

Un jeune agriculteur nous a confié : « On dirait que nous ne sommes pas des Togolais. Le Gouvernement nous a oublié ici par rapport aux autres régions. Franchement les autres régions sont mieux que nous. Nous notre préoccupation est à deux niveaux. La recherche de la sécurité et la paix ; et de quoi vivre ou se nourrir. Les autres régions sont en paix. Les gens au sud par exemple sont mieux que nous. Ils vivent dans la paix et la sécurité. On a parfois envie de rejoindre le Bénin pour voir si c'est mieux là-bas. Plusieurs de nos amis ont déjà quitté pour la Côte d'Ivoire. Quand ils reviennent on sent que leur vie a changé et ça nous énerve. Même quand les gens vont à Lomé, ils nous disent que c'est mieux là-bas et nous avons envie d'aller aussi »8. On note clairement un sentiment d'abandon ou de laisser pour compte dans les propos de certains enquêtés. Même s'ils reconnaissent que des alternatives existent, ils auraient souhaité bénéficier directement des solutions. La population se retrouve dans une situation de résilience alliant pauvreté et insécurité.

Graphe n°7 : Répartition des enquêtés par rapport aux répercussions des défis sur les populations

Source : Mandela DJAHO, juillet 2023

47

Tableau n°19 : Répartition des enquêtés selon le fait que des individus au sein de la

population ont rejoint les GANE

Effectif

Pourcentage

Pourcentage
valide

Pourcentage
cumulé

Oui

108 89.26

89.26 89.26

Non

13 10.74

10.74 100.00

Total

121 100.00

100.00

Source : Mandela DJAHO, juillet 2023

 
 
 

Les données de ce tableau nous montrent que 89,26% des enquêtés estiment que des individus au sein de la population ont rejoint les GANE et 10,74% pensent le contraire.

Un commerçant nous a confié : « Nous avons eu des échos comme quoi des gens ont déjà été arrêté par les militaires par ce qu'ils sont soupçonnés de contribuer aux activités terroristes. Vous-même quand vous voyez les attaques, vous pouvez comprendre qu'il y a des gens parmi nous qui donnent des informations à ces gens là. Comment ils savent quand poser les mines pour qu'ils ne soient pas attrapés ou bien comment ils savent que les militaires passent par ici ou par-là ? C'est clair qu'il y a des gens qui les aident et en retour on leur donne de l'argent, on leur promet des choses »9.

Tableau n°20 : Répartition des enquêtés selon les types de conflits dans la région des savanes

Types de conflits

Effectif

Pourcentage

Pourcentage
valide

Pourcentage
cumulé

Conflits de transhumance

42

34.71

34.71

34.71

Conflits de chefferie

29

23.97

23.97

58.68

Conflits fonciers

17

14.05

14.05

72.73

Conflits culturels

19

15.70

15.70

88.43

Conflits politiques

14

11.57

11.57

100.00

Total

121

100.00

100.00

 

Source : Mandela DJAHO, juillet 2023

 
 
 
 
 

L'analyse de ce graphe montre que 34,71% des enquêtés ont fait cas des conflits de transhumance, 23,97% ont évoqué des conflits de chefferie, 14,05% ont parlé de conflits

9 Entretien anonyme : sam-naba, le 20 juillet 2023

48

fonciers. Par ailleurs, 15,70% des enquêtés ont évoqué des conflits culturels et 11,57% ont parlé des conflits politiques.

La région des savanes est effectivement sujette à des conflits intercommunautaires. Selon le Plan national d'urgence (2021), de 2013 à 2019, 30.107 personnes ont été déplacées par ces conflits. Ces conflits communautaires ont été particulièrement aigus en 2019 avec 17.596 déplacés.

À partir du moment où deux ou plusieurs entités cohabitent, elles peuvent avoir des points de vue divergents, ce qui est déjà un premier pas vers le conflit qui peut avoir plusieurs dimensions variant de simples échanges verbaux à la violence physique (KAMISSOKO S., 2008). C'est justement le cas de figure qu'on observe entre les paysans (autochtones) et les éleveurs peulhs dans la région des savanes. La liste des causes des déchirures qui surviennent entre agriculteurs et éléveurs dans la région est longue : pistes de bétail occupées par les champs, berges de cours d'eau inaccessibles aux animaux pour cause d'exploitation à but de production maraichères, animaux abattus, etc.

Selon Koudzo sokemawu (2014),

Chez les paysans Moba, Gourma ou Tchokossi (groupes ethniques autochtones du milieu), le rapport à la terre est fortement marqué par la force mystique qui lui est attribuée. Selon les propos du chef de la localité de Nagbéni, « chez le Moba, prendre un morceau de terre dans la main constitue une protection contre les esprits maléfiques. Ainsi, le non-respect de certaines pratiques propitiatoires se solde par les mauvaises récoltes. De plus, certains interdits tels que les rapports sexuels qui ont lieu en brousse et à même le sol sont des pratiques qui rendent les sols infertiles et conduisent à de mauvaises récoltes ». Les discussions menées avec les bouviers (locaux et étrangers rencontrés) ont permis de recueillir leurs points de vue sur la question. Pour eux, le troupeau est au centre de leurs préoccupations quotidiennes. La terre est vue comme un simple support des ressources naturelles indispensables à la survie des animaux élevés.

Un représentant d'une organisation de la société civile nous a confié : « C'est en saison sèche surtout que nous faisons le plus face à ce type de conflit parce que c'est la période de la grande transhumance pendant laquelle on note une véritable surcharge de l'espace régional par les troupeaux transhumants, nomades et sédentaires à la recherche des points d'eau et des pâturages. Alors que durant la saison agricole, les conflits sont plus liés à la mauvaise gestion des animaux qui, lors de leur déplacement, détruisent les cultures et les récoltes »10.

10 Entretien anonyme : dapaong, le 22 juillet 2023

49

Le non respect des couloirs de passage des animaux aussi bien par les éleveurs que par les agriculteurs reste l'une des causes de ces conflits. L'obstruction des couloirs de passage par les champs des agriculteurs oblige les éleveurs à faire entrer les troupeaux dans les exploitations détruisant les cultures sur leur passage, ainsi que les mouvements précoces ou irréguliers des troupeaux hors des couloirs de transhumance posent des risques pour la récolte des agriculteurs.

Ces conflits communautaires trouvent une explication dans le fait, qu'à cause de l'insécurité dû aux actions des GANE, certains couloirs de transhumance riches en ressources naturelles (herbes et eau notamment), ne sont plus accessibles. Ce qui force, aussi bien les éleveurs et les agriculteurs à migrer vers des zones difficiles d'accès et moins riches en ressources naturelles, provoquant une compétition plus élevée et des conflits récurrents.

Un jeune agriculteur nous a confié : « Aujourd'hui l'augmentation des populations fait que nous n'avons plus beaucoup d'espace pour les champs. Les gens veulent également agrandir leur champ pour pouvoir nourrir et subvenir aux besoins de leur famille. Ce qui amène certaines personnes à aller jusqu'à faire le champ sur les couloirs de transhumance »11.

Tableau n°21 : Répartition des enquêtés selon le fait que les conflits peuvent favoriser l'expansion de l'extrémisme violent

Effectif

Pourcentage

 

Pourcentage valide

Pourcentage
cumulé

 
 
 
 
 

Total

121

100.00

100.00

 
 
 
 
 
 
 

Oui

116

95.87

95.87

95.87

 
 
 
 
 

Non

5

4.13

4.13

100.00

 
 
 
 
 
 

Source : Mandela DJAHO, juillet 2023

D'après les données de ce tableau, 95,87% des enquêtés pensent que les conflits peuvent favoriser l'expansion de l'extrémisme violent et 4,13% pensent le contraire.

Les GANE peuvent exploitent les tensions intercommunautaires existantes ou créent de nouvelles divisions pour favoriser leurs intérêts. Boko Haram a par exemple exploité les

11 Entretien anonyme : sanfatoute, le 23 juillet 2023

50

tensions ethniques, religieuses et socio-économiques existantes entre les musulmans du nord et les chrétiens du sud du Nigeria pour recruter des membres et mener des attaques.

Un jeune nous a confié : « Ceux qui nous attaquent peuvent prendre parti entre les groupes en conflits et s'infiltrer dans la population. Ça fait que nous nous posons des questions sur certaines attaques passées. On accuse les étrangers mais on se demande si les gens ne profitent pas des conflits pour opérer »12.

Tableau n°22 : Répartition des enquêtés selon le fait que la menace extrémiste dans les zones frontalières constitue un risque pour la région des savanes.

Effectif

Pourcentage

Pourcentage
valide

Pourcentage
cumulé

Oui 121

100.00

100.00

100.00

Non 0

0.00

0.00

100.00

Total 121

100.00

100.00

 
 

Source : Mandela DJAHO, juillet 2023

L'analyse des données nous révèle que 100% des enquêtés estiment que la menace extrémiste dans les zones frontalières constitue un risque pour la région des savanes.

En effet, le Burkina Faso, le Bénin, le Ghana et le Togo partagent de longues frontières, respectivement le sud pour l'un et le nord pour les autres. La zone de jonction entre les quatre pays est sujette à de nombreuses préoccupations tant sociales que sécuritaires. La porosité des frontières facilite la circulation des criminels, les trafics de toutes sortes ainsi que les mouvements des GANE.

Un chauffeur nous a confié : « Ici nous conduisons les femmes revendeuses de tomates au Burkina-Faso pour l'achat de tomates auprès des cultivateurs. En 2022, certains de nos collègues chauffeurs étaient kidnappés par les groupes extrémistes pas très loin de la frontière. Certains ont été libérés après, d'autres on ne sait pas où sont-ils jusqu'à ce jour. Les groupes extrémistes ont emportés six (6) véhicules de nos collègues »13.

12 Entretien anonyme : korbongou, le 27 juillet 2023

13 Entretien anonyme : dapaong, le 28 juillet 2023

51

Tableau n°23 : Répartition des enquêtés selon leurs appréciations des relations entre les civils et les militaires

Relations entre civils

et militaires Effectif

Pourcentage

 

Pourcentage valide

Pourcentage
cumulé

 
 
 
 
 

Bonne

78

64.46

64.46

64.46

 

Mauvaise

43

35.54

35.54

100.00

 
 
 
 
 

Total

121

100.00

100.00

 
 
 
 
 
 
 

Source : Mandela DJAHO, juillet 2023

D'après les données de ce tableau, 64,46% des enquêtés estiment que les relations entre les civiles et les militaires sont bonnes alors que 35,54% pensent que ces relations sont mauvaises.

L'analyse des retours des enquêtés, les avis sont partagés sur les relations civilo-militaires. Pour certains, depuis l'accentuation des attaques, les relations se sont considérablement améliorées parce que de plus en plus la population a confiance aux forces de sécurité.

Un Chef canton d'une localité a confié : « Nous sommes tous concernés par cette situation. Les militaires aussi sont attaqués. Depuis un moment il y a des morts parmi militaires, donc il n'est plus question de ne pas aimer les militaires. Ils sont là pour notre défense et donc la population collabore avec eux. Le travail qu'ils sont en train de faire est risqué. Ils se sacrifient pour nous protéger »14. Une autre dame nous a confié : « Ici les militaires font un bon travail. Ils arrêtent les individus appartenant aux groupes terroristes en fuite vers le Togo. Les patrouilles des FDS nous rassurent »15.

Néanmoins, une partie des enquêtés pense que les FDS ont du mépris envers la population parce qu'ils sont méfiants et considèrent qu'il y a des complices au sein de la population. En réalité les relations entre les civils et les militaires dans la région ont connu des fragilités depuis quelques années déjà.

Un commerçant nous a confié : « Les problèmes avec les militaires ne datent pas d'aujourd'hui. Mais avec les attaques, la situation s'est aggravée. Ils nous soupçonnent

14 Entretien anonyme : dapaong, le 28 juillet 2023

15 Entretien anonyme : sam-naba, le 27 juillet 2023

52

d'être avec les méchants. Même si on a tendance à penser qu'ils sont plus proches de nous, c'est juste l'apparence. Au fonds il y a du mépris »16.

1.4 De la stratégie de prévention de l'extrémisme violent

Tableau n°24 : Répartition des enquêtés selon la connaissance des mesures ou actions en cours pour prévenir l'extrémisme violent

Actions en cours pour prévenir

l'EV Effectif

Pourcentage

Pourcentage
valide

Pourcentage
cumulé

Renforcement de la sécurité 49

40.50

40.50

40.50

Subvention des groupements 41

33.88

33.88

74.38

Mise en place des 21

CPPLEV&CCPLEV

17.36

17.36

91.74

Sensibilisation 10

8.26

8.26

100.00

Total 121

100.00

100.00

 
 

Source : Mandela DJAHO, juillet 2023

L'analyse des données de ce tableau nous montre que 40,50% des enquêtés ont évoqué le renforcement de la sécurité comme mesures de prévention de l'extrémisme violent en cours. Pour 33,88% des enquêtés, il y a eu la subvention des groupements. Par ailleurs 17,36% des enquêtés ont évoqué les CPPPLEV & CCPLEV et 8,26% ont fait cas des sensibilisations.

Pour prévenir l'extrémisme violent le Togo a pris une série de mesures juridiques, institutionnelles et programmatiques. Au rang des mesures institutionnelles, un Comité interministériel de prévention et de lutte contre l'extrémisme violent (CIPLEV) par décret du Président de la République (décret PR n°2019-076/PR du 15 mai 2019), avec des démembrements aux niveaux préfectoral et cantonal est mis en place.

16 Entretien anonyme : mango, le 25 juillet 2023

53

Par arrêté interministériel n° 0245 / MSPC / MATDCL portant mise en place, organisation et fonctionnement des comités locaux de prévention et de lutte contre l'extrémisme violent (CLPLEV), chaque préfecture et chaque canton, sur l'étendue du territoire national, disposent respectivement d'un comité préfectoral de prévention et de lutte contre l'extrémisme violent et d'un comité cantonal de prévention et de lutte contre l'extrémisme violent. Ces deux comités constituent des démembrements du comité interministériel de prévention et de lutte contre la prévention et la lutte contre l'extrémisme violent.

Graphe n°8 : Répartition des enquêtés selon la connaissance des mesures ou actions en cours pour prévenir l'extrémisme violent

45

40

35

30

25

20

15

10

5

0

Renforcement de la sécurité

Actions en cours pour prevenir l'EV

Subvention des groupements

Mise en place des CPPLEV&CCPLEV

Sensibilisation

Source : Mandela DJAHO, juillet 2023

Tableau n°25 : Répartition des enquêtés selon l'appréciation des mesures de prévention

Appréciation des

mesures de prévention Effectif

Pourcentage

Pourcentage
valide

Pourcentage
cumulé

Non 121

100.00

100.00

100.00

Oui 0

0.00

0.00

100.00

Total 121

100.00

100.00

 
 

Source : Mandela DJAHO, juillet 2023

54

L'analyse des données de ce tableau montre que 100% des enquêtés estiment que les mesures de prévention développées actuellement ne sont pas suffisantes. Au regard de l'appréciation mitigée des enquêtés sur les relations civilo-militaires, il s'avère important de renforcer ces relations pour améliorer la confiance entre les acteurs.

Au Togo il y a de toute évidence, une volonté d'ouverture et donc un terreau fertile pour prévenir efficacement l'extrémisme violent en promouvant la collaboration entre les forces de défense et de sécurité et les populations. Le défi majeur reste à briser durablement le mur de la méfiance, voire de la défiance pour construire une relation de proximité et de confiance entre les forces de défense et de sécurité et les populations, car il y a une méconnaissance mutuelle.

Des insuffisances ont également été relevé au niveau des CCPLEV et CPPLEV. En effet, dans le cadre de la mise en oeuvre du Projet : « Engagement des Jeunes et des Femmes pour la Participation Citoyenne et la Cohésion Sociale dans les savanes (ENJEF-PACS), un diagnostic organisationnel et fonctionnel des CCPLEV et CPPLEV de la région des savanes a été réalisé en 2021. Les résultats de cette étude ont relevé les forces, faiblesses, opportunités et menaces des CCPLEV et CPPLEV (Confère annexe 4).

Tableau n°26 : Répartition des enquêtés par rapport à l'atténuation des facteurs de vulnérabilité pour prévenir l'extrémisme violent

Effectif

Pourcentage

Pourcentage
valide

Pourcentage
cumulé

Oui 121

100.00

100.00

100.00

Non 0

0.00

0.00

100.00

Total 121

100.00

100.00

 
 

Source : Mandela DJAHO, juillet 2023

L'analyse des données de ce tableau nous montre que 100% des enquêtés pensent que l'atténuation des facteurs de vulnérabilité permettra de prévenir l'extrémisme violent. Ces données montrent que la population est consciente qu'en adressant les questions de vulnérabilité, l'expansion de l'extrémisme violent dans la région des savanes sera réduite.

55

Tableau n°27 : Répartition des enquêtés par rapport à ce qu'il faut faire d'autre pour éviter la propagation de l'extrémisme violent

Actions en cours pour prévenir

l'EV Effectif

Pourcentage

Pourcentage
valide

Pourcentage
cumulé

Développer des AGR 29

23.97

23.97

23.97

Renforcer les groupements 26

21.49

21.49

45.45

Renforcer la confiance entre la 23

population et les FDS

19.01

19.01

64.46

Renforcer la cohésion sociale et 22

le vivre ensemble

18.18

18.18

82.64

Sensibiliser les populations 21

17.36

17.36

100.00

Total 121

100.00

100.00

 
 

Source : Mandela DJAHO, juillet 2023

L'analyse des données du tableau montre que 23,97% des enquêtés estiment qu'il faut développer des AGR, 21,49% ont évoqué le renforcement des groupements, 19,01% ont proposé le renforcement de la confiance entre la population et les FDS. Par ailleurs, 18,18% des enquêtés ont proposé de renforcer la cohésion sociale et le vivre ensemble et 17,36% ont évoqué la sensibilisation des populations.

Graphe n°9 : Répartition des enquêtés par rapport à ce qu'il faut faire d'autre pour éviter la propagation de l'extrémisme violent

23.97

Stratégie pour éviter la propagation de

l'extrémisme violent

Sensibiliser les populations

Développer des AGR

Renforcer les groupements

Renforcer la confiance entre la population et les FDS Renforcer la cohésion sociale et le vivre ensemble

21.49

19.01

18.18

17.36

Source : Mandela DJAHO, juillet 2023

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La prévention de l'expansion de l'extrémisme violent implique une approche intégrée et multidimensionnelle qui aborde les facteurs sous-jacents qui contribuent à sa montée. En renforçant la résilience communautaire, comme l'examine l'étude "Countering Violent Extremism : Developing an Evidence-Base for Policy and Practice" dirigée par Eric Rosand (2010), on engage les communautés locales dans la prévention de l'extrémisme violent.

L'éducation et la sensibilisation, comme le met en évidence l'ouvrage "Preventing Violent Extremism through Value-Based Education : A Peaceful Path to Human Flourishing" de M. Ershadul Karim (2019), jouent un rôle crucial pour promouvoir la compréhension interculturelle et la tolérance. Par ailleurs, la promotion de l'inclusion et de la cohésion sociale, ainsi que la gestion efficace des conflits et de la gouvernance, telles que discutées dans les études "Cohesion and Coercion : International and Local Dimensions of Conflict and Community" (2013) édité par Timothy Allen et Jean-Louis Triaud, s'avèrent des piliers cruciaux pour contrer les divisions exploitées par les extrémistes et pour créer des sociétés plus résilientes et harmonieuses.

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