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Les Enjeux de l'emission obligataire par les Collectivites Territoriales Decentralisees: le cas de Communaute Urbaine de Douala

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par Christian Kuiate Sobngwi
Institut des Relations Internationales du Cameroun - DESS 2006
  

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ABSTRACT

INTRODUCTION GENERALE

I Généralités

Les questions de financement des entités publiques en Afrique sub-saharienne revêtent une importance particulière depuis quelques années, ceci en raison du désengagement progressif de l'Etat des secteurs productifs de l'économie. Ce désengagement s'inscrit dans un mouvement général de rationalisation et de transparence en matière de gestion publique. Ceci se traduit par une plus grande attention de la part des dirigeants en ce qui concerne l'application effective des principes de bonne gouvernance. Mais afin de leur faciliter la tâche et de réduire les éventuels goulots d'étranglements qui pourraient naître d'une telle situation, il s'est avéré nécessaire de procéder à une redistribution de rôles au sein de l'appareil étatique. Cette redistribution de rôles nécessite que soient clairement identifiés les domaines de compétence de chacun des futurs acteurs. De même, les fondements de cette redistribution se doivent d'être clairement définis afin qu'aucune confusion ne puisse naître et qu'aucun chevauchement d'autorités ne puisse exister.

C'est ainsi qu'a été initié au Cameroun1(*), la réforme relative à la décentralisation. Plus précisément, la décentralisation territoriale qui se distingue de la décentralisation par services. En effet, au sens de Finken2(*) (1996), la première fait référence à une technique administrative reposant sur la distribution de compétences entre plusieurs personnes morales sur une base géographique. Par contre, la seconde s'appuie sur la spécialisation technique des différents acteurs pour leur octroyer de nouvelles fonctions. Au travers dudit processus, deux niveaux de collectivités territoriales ont été clairement identifiés : il s'agit de la commune et de la région.

Cette distinction provient de la nécessité de répartir les responsabilités entre différents acteurs locaux suivant leurs natures respectives de façon à rapprocher au maximum le pouvoir des populations. En effet, ceci permettra de mettre en oeuvre un processus de développement participatif mieux à même de satisfaire les besoins de populations concernées. Cette redistribution de responsabilités conduit à une définition du champ de compétences de chacun des acteurs. A la commune, dont il est ici question, il a été dévolu des compétences en ce qui concerne le développement économique, le développement sanitaire et social, l'éducation, le sport et les activités culturelles3(*). Cette institution, s'est de ce fait vue attribuer un rôle central en ce qui concerne l'épanouissement des populations dont elle a la charge.

Mais, l'accomplissement d'une telle mission nécessite la possession de moyens adaptés à la nature et à l'ampleur de ladite mission. Ces moyens sont de plusieurs ordres, il peur s'agir des moyens humains, institutionnels ou financiers. De ce fait, il est nécessaire de s'attarder sur la question relative à l'adéquation entre les moyens mis à la disposition des acteurs et les objectifs qui leur ont été assignés.

Il serait illusoire de prétendre ici à une analyse exhaustive de chacune de ces ressources. A cet effet, nous nous appesantissons sur la ressource financière. La question des moyens financiers mis à la disposition de l'autorité locale en vue de l'accomplissement des objectifs à elle assignés pourrait conduire à une variété de débats. En effet, il est tout d'abord possible d'analyser la nature de ces moyens financiers. De plus, il semble tout autant important d'en évaluer la quantité et la qualité, mais au delà de tout cela, une analyse des méthodes d'acquisition et de renforcement de ces moyens nous semble pertinente.

En ce qui concerne la nature des ressources financières à la disposition des communes, d'après la loi d'orientation de la décentralisation, il est possible d'identifier deux principaux types de ressources : il s'agit des ressources fiscales et de la dotation générale de la décentralisation. De plus, l'examen du décret N°98/266/PM du 21 août 1998 portant approbation du plan comptable communal et adoption de la nomenclature budgétaire communale, nous amène non seulement à examiner en détail le contenu des ressources fiscales, mais aussi à nous rendre compte de l'existence d'une possibilité de financement des communes par l'emprunt.

Le budget communal est l'instrument au travers duquel il est possible d'obtenir une maîtrise de la nature des ressources de la commune. Il se définit comme étant l'acte par lequel sont prévues et autorisées les recettes et les dépenses des organismes publics4(*). Ledit budget est équilibré en recettes et dépenses. Chacune de ces rubriques est subdivisée en volets fonctionnement et investissement. Les recettes budgétaires de la commune sont de plusieurs ordres. Tout d'abord, les communes bénéficient d'un transfert de fiscalité plus ou moins effectif de la part de l'Etat. En effet, le transfert de fiscalité s'effectue au moyen de l'institution d'impôts locaux dont les opérations d'assiette, de recouvrement et de liquidation dépendent de la commune, mais dans le respect des limites légales. C'est à ce propos, que l'on peut noter l'existence de taxes communales directes telles que la taxe d'eau, la taxe d'éclairage public, la taxe d'enlèvement des ordures ménagères, la taxe de fonctionnement des ambulances municipales et la taxe d'électrification. Toutes ces taxes rémunèrent des services rendus par la commune aux habitants de l'agglomération dont elle a la charge5(*). L'impôt libératoire, les patentes, les licences, la taxe sur le bétail, la taxe sur les armes à feu, les droits de mutation à titre onéreux et une partie de la redevance forestière de par leur caractère local en ce qui concerne l'assiette et le recouvrement constituent aussi des sources de revenus sur lesquelles les communes ont un pouvoir assez étendu.

Il est aussi possible d'identifier des ressources fiscales locales de par le processus d'assiette, mais dont le recouvrement incombe à l'Etat qui par la suite se charge du processus de redistribution6(*) auprès des diverses autorités locales. Il s'agit ici principalement des revenus des centimes additionnels communaux. Ces derniers sont en fait des impôts représentant un pourcentage d'un autre impôt sur lequel ils sont greffés. Ainsi, sont générateurs de centimes additionnels communaux l'impôt sur les sociétés, l'impôt sur le revenu des personnes physiques, la taxe sur les jeux, la taxe sur la valeur ajoutée et la taxe foncière.

En plus des taxes communales directes et des autres impôts, il peut être voté par le conseil municipal la création de droits et taxes indirects. Il s'agit principalement des taxes d'abattage, d'inspection sanitaire, sur les spectacles, sur la publicité, sur les lots urbains non mis en valeur, de transhumance, de transit et la taxe douanière municipale. Il s'agit aussi des droits de timbre, de fourrière, de place sur les marchés, sur les permis de bâtir, d'occupation temporaire de la voie publique, d'occupation des parcs de stationnement, de stade et de la redevance pour dégradation de la chaussée.

Pour ce qui est de la dotation générale de la décentralisation, les textes devant préciser son mode de fonctionnement sont toujours attendus.

Enfin, il existe dans la rubrique des recettes budgétaires des communes, un volet consacré aux recettes diverses et accidentelles. Elles proviennent des emprunts, subventions, avances et dons. Elles sont de ce fait assimilables à des recettes d'investissement ou d'équipement.

Au vu de la multiplicité de ces ressources communales, il est possible d'émettre l'hypothèse de leur suffisance en ce qui concerne les besoins de l'entité locale. Mais seule une étude de leur volume et de leur qualité peut conduire à une opinion correcte concernant ces ressources.

A ce propos, Finken7(*) (1996) note que le talon d'Achille du processus de décentralisation au Cameroun se situe au niveau de l'aspect financier et plus précisément fiscal. Bien que durant la période allant de 1987 à 1992, les communes aient dégagé une épargne budgétaire nette excédentaire, cet auteur insiste sur la nécessité d'un transfert réel du pouvoir fiscal aux communes, surtout en matière de recouvrement. Dans le même ordre d'idée, Kom Tchuente (1996) relève comme frein à l'autonomie financière des communes, le manque de flexibilité dans la détermination du niveau de leurs recettes, la très forte dépendance vis à vis des services fiscaux de l'Etat, les problèmes de liquidités auxquels fait face le trésor Public et le mauvais recouvrement des taxes communales indirectes8(*). De plus, il ressort de ces analyses que le volet équipement des communes a été jusqu'ici assuré en grande partie par l'Etat au moyen du Fonds Spécial d'Equipement et d'Intervention Intercommunale (FEICOM)9(*) dont les subventions et les prêts ont servi à financer la majeure partie des besoins d'investissement des communes.

Il nous semble de ce fait intéressant de procéder au renforcement des capacités d'investissement des communes au moyen de l'ouverture sur d'autres sources de financement à savoir les ressources d'emprunt.

L'emprunt communal a une histoire qui remonte à plusieurs décennies. Pour ce qui est des pays occidentaux, il représente une part importante du financement des collectivités locales ; à savoir : 9% des recettes budgétaires totales en Allemagne, pareil en Belgique, et environ 12% en France10(*). Il relève de l'overdraft economy de Hicks ou de l'économie à découvert de Bourguinat11(*). A ce propos, Blanc et Rémond (1994) signalent la nécessité pour les collectivités locales de recourir à l'emprunt étant donnée la pérennité de leur besoin de financement. Les débats théoriques au sujet de l'emprunt communal sont le théâtre de contradictions, en effet, Thomas (2004)12(*) relève que « le choix d'un mode de gestion des finances locales basé sur une convention d'orthodoxie budgétaire agirait positivement sur le dynamisme économique de cette ville. Inversement, un management public local reposant davantage sur l'endettement et faisant référence à une convention de nature keynésienne influerait négativement sur l'attractivité communale. » Or, l'étude menée par Thomas s'applique dans une situation de réduction des dépenses de fonctionnement des communes, mais il faut noter que dans le cas du Cameroun, les communes ont vu ces dernières années l'étendue de leurs compétences s'accroître ostensiblement. De ce fait, il devient quasiment impossible pour ces entités de dégager une épargne en mesure de financer leurs besoins d'investissement.

Au Cameroun, l'emprunt des communes sur le marché est quasi-inexistant, les seules formes d'emprunt présentes jusqu'en 2004 étaient celles relatives aux financements concessionnels octroyés par le FEICOM et les organismes de financement multilatéraux tels que la Banque Mondiale. Pourtant, le décret N°94/232 du 05 décembre 1994 précisant le statut et les attributions des receveurs municipaux donne la possibilité à certaines communes13(*) d'ouvrir des comptes bancaires distincts de leurs comptes auprès du trésor public et donc échappant à la règle d'unité de trésorerie. Cette ouverture donnée par la loi aurait dû permettre le développement de l'activité de crédit envers les communes tout au moins à l'échelle des banques locales, sans espérer que ce soit en provenance du marché financier étant donné sa relative jeunesse. Mais, il s'est avéré que les communes n'avaient jusque là pas eu accès aux financements régis par les règles du marché. C'est donc à ce niveau que se situe le problème. Il faudrait savoir ce qui empêche les communes de réaliser leur potentiel en matière d'emprunt et dans quelles mesures l'on pourrait renforcer cette capacité.

Ceci peut donc susciter des inquiétudes en ce qui concerne l'emprunt obligataire émis par la communauté urbaine de Douala (CUD) auprès du marché financier camerounais. En effet, dans le cadre d'un programme d'émission de titres obligataire pour un montant total  de 16 milliards de francs CFA, la CUD a lancé par l'entremise de CUD Finance S.A. une première tranche d'un montant de 7 milliards de francs CFA le 26 avril 2005. Ceci est donc la première émission de titres obligataires sur le marché financier camerounais, qui plus est de la part d'un organisme municipal. Il s'agit de ce fait d'une émission d'obligations municipales. La particularité des obligations municipales est que celles-ci sont des titres de créance négociables représentatifs d'une fraction d'un emprunt émis par une collectivité locale14(*).

Cette émission est de nature à permettre à la CUD d'acquérir de nouvelles ressources devant lui permettre de réaliser des travaux d'investissement, mais la réussite de cette émission, ainsi que des futures émissions prévues dans le programme dépend en grande partie de la crédibilité de l'emprunteur. Cette crédibilité s'analyse en deux volets : tout d'abord, elle concerne la CUD en tant qu'institution, puis, elle concerne le titre CUD en tant qu'actif financier. Il est donc question de s'attarder sur les fondements de l'analyse du niveau de crédibilité de cette émission. C'est à ce propos qu'il peut être menée une analyse des « enjeux de l'émission obligataire par une collectivité territoriale décentralisée ». Cette émission impliquant l'existence d'un risque de défaut pour la communauté financière, les enjeux dont il est question se veulent être la représentation du défi de crédibilité pour la CUD.

A ce propos, Faerber15(*) définit la crédibilité d'un émetteur comme étant sa capacité à faire face aux paiements d'intérêts à temps et au remboursement du principal à l'échéance. De ce fait, le risque de défaut provient de l'incapacité à remplir l'une ou l'autre de ces obligations contractuelles. Il ressort des analyses en la matière que le niveau de risque de défaut propre à une émission est un élément essentiel de la décision d'investissement. De ce fait, il est important pour l'émetteur que ce risque soit maintenu au niveau le plus bas possible.

C'est pour cette raison que Finken (1996) relève que le risque de la commune est à la source des difficultés des communes en matière d'accès aux ressources d'emprunt. Le financement de l'investissement communal implique la prise en compte de la nature du projet à réaliser, or il a été dit plus haut que les compétences de la commune la cantonnent principalement dans un rôle social. La possibilité lui est donnée par la loi16(*) de mettre sur pied des activités auto-génératrices de revenus existe, mais elle est se heurte aussi à la nécessité de contribuer à l'épanouissement des populations. De ce fait les principes de gestion privée bien que lui étant applicables, devront être tempérés par un souci de bien être général. Ainsi, au vu de la complexité du contexte d'émission d'un titre obligataire municipal, il apparaît que l'évaluation du risque communal passe par une évaluation non seulement des aspects politiques, environnementaux, légaux et financiers de la commune, mais aussi un examen des caractéristiques du projet à financer17(*).

* 1 Au Cameroun, c'est la Loi N°2004/017 du 22 juillet, loi d'orientation de la décentralisation, qui organise ce processus et assoie les bases légales d'un processus entamé depuis les indépendances et même la période coloniale au travers de la création des communes dans diverses localités du Cameroun.

* 2 Finken, M., Communes et gestion municipale au Cameroun, édition à compte d'auteur, 1996, Yaoundé.

* 3 Articles 15 à 22 de la loi N°2004/018 du 22 juillet 2004 fixant les règles applicables aux communes.

* 4 Cathelineau, J., « Les finances locales » in Collectivités locales de Bénoit, F., P., (sous la direction de ), 1998, Paris.

* 5 Elles peuvent de ce fait être considérées comme des redevances

* 6 Ladite redistribution est précédée d'une centralisation par le Fonds Spécial d'équipement et d'intervention intercommunale.

* 7 Finken, Op. Cit. P.15

* 8 Kom Tchuente, B., Développement communal et gestion urbaine au Cameroun: les enjeux de la gestion municipale dans un système décentralisé, Editions Clé, Collection Documents, 1996, Yaoundé.

* 9 Le FEICOM a été crée en 1974 par l'Etat Camerounais en vue de promouvoir l'entraide entre les communes, financer les travaux d'investissement, couvrir les frais d'assiette et les charges de recouvrement des recettes fiscales destinées aux communes et couvrir les frais relatifs à la formation du personnel communal et du personnel d'état civil.

* 10 Dexia Banque, Les finances des pouvoirs locaux en 2003, Dexia Banque, Belgique, 2003.

* 11 Blanc, J. et Rémond, B., Les Collectivités locales, 3ème édition, Presses de Sciences Po et Dalloz, Paris, 1994, P. 549

* 12 Thomas, O., « Les finances locales influencent-elles la croissance des villes ? le cas des communes du département du Tarn », Cahiers du GRES N°2004-12, juin 2004, Toulouse, 2004.

* 13 Il s'agit des communes dont le dernier compte administratif accuse le recouvrement de recettes pour un montant au moins égal à 250.000.000 FCFA.

* 14 Adapté de la définition de Vernimmen , Vernimmen, P., Finance d'entreprise, 5ème édition, Dalloz, Paris, 2002.

* 15 Faerber, E., All about bonds and bond mutual funds, 2nd edition, McGraw-Hill, New York, 2000.

* 16 Articles 33 à 35 de la Loi d'orientation de la décentralisation.

* 17 Freire, M., Petersen, J., Huertas, M., et Valadez, M., Subnational capital markets in developing countries, from theory to practice. World Bank and Oxford university Press, Londres, 2003.

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