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Une lecture de la coopération américano-camerounaise depuis 2001:contribution à l'étude des dimensions pétrolière et militaire

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par Alexis NZEUGANG
Université de Yaoundé II (Soa) - Master II 2005
  

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REPUBLIQUE DU CAMEROUN

----------

Paix -Travail -Patrie

-----------

UNIVERSITE DE YAOUNDE II-SOA

----------

FACULTE DES SCIENCES JURIDIQUES ET POLITIQUES

----------

DEPARTEMENT DE SCIENCE POLITIQUE

----------

REPUBLIC OF CAMEROON

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Peace-Work-Fatherland

--------

UNIVERSITY OF YAOUNDE II-SOA

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FACULTY OF JURIDICAL AND POLITICAL SCIENCES

---------

DEPARTMENT OF POLITICAL SCIENCE

----------

UNE LECTURE DE LA COOPERATION AMERICANO-CAMEROUNAISE DEPUIS 2001 : CONTRIBUTION A

L' ETUDE DES DIMENSIONS PETROLIERE ET

MILITAIRE

Mémoire présenté et soutenu comme condition partielle d'obtention du

Master II en science politique

Par

Alexis NZEUGANG

Maître en Science Politique

E-mail : alex070303@yahoo.fr  ; Tel. 77 19 86 83

Sous la Direction de Avec la collaboration de

Pr Paul NTUNGWE NDUE Dr John W. FORJE

Associate Professor Senior Lecturer

Année académique 2005-2006

DEDICACE

Je dédie ce document à deux personnes qui me sont particulièrement chères : Papa Tonguembo Emmanuel et mon beau-frère Talla Sob Victor. Qu'ils trouvent en ce modeste travail le début de ma récompense à leurs multiples sacrifices.

REMERCIEMENTS

Ceux qui ont contribué à l'aboutissement de ce travail sont si nombreux qu'il nous est quasi-impossible de les citer de façon exhaustive. Qu'ils trouvent tous ici l'expression de notre profonde gratitude.

Mes remerciements vont tout d'abord au Professeur Paul Ntungwe Ndue et au Docteur John W. Forje ; lesquels ont accepté de guider mes premiers balbutiements dans le monde de la recherche.

Je remercie tout particulièrement le Professeur Luc Sindjoun (chef de Département de Science Politique) qui s'est investi profondément afin de susciter davantage en nous l'amour du travail et la détermination à réussir.

Mes remerciements vont ensuite à ma famille toute entière dont mon feu Oncle Tagne Isaac qui m'a aimé, soutenu et conseillé jusqu'à ses derniers jours ; ma Maman bien-aimée Toukam Marie pour son soutien permanent, Maman Ngoubissi Jacqueline et Maman Mabe Lucienne ; notre aîné Armand Noupin dont je garde bien les conseils, mes aînés Arnaud Fogouho et Bertrand Ntakam pour leur soutien, ma petite soeur Clarisse Chiéko pour son soutien multiforme, mon frère Honoré Simo pour son soutien, ma petite soeur Ida Sikati, ma tante Mefeu Kamga, mon petit frère Alan Totseu qui m'a apporté l'ultime chance.

A tous mes enseignants de Science Politique, mais particulièrement au Docteur Mathias Eric Owona Nguini et au Professeur Joseph .V . Ntuda Ebodé pour leur orientation, les Docteurs Alain Fogue .T et Yves Alexandre Chouala pour leurs conseils.

Au Diplomate Martial Tchenzette pour son soutien amical et permanent.

Au Colonel Metogo Atangana Gabriel pour son orientation.

Au Colonel Melly Joseph pour ses conseils.

Au Capitaine Mabally Christian pour son orientation.

Au Caporal Kibuh Mathilda pour son soutien.

A mes amis dont Jules Mazarin Djohou et Sandrine Mafouo pour leur soutien.

A tous mes camarades de classe pour leur sympathie.

SIGLES ET ABREVIATIONS

AACD  : Agence Américaine pour le Commerce et le Développement.

ACBSP : African Coastal and Border Security Programm.

ACOTA : African Contingency Operation Training Assistance.

ACRI : African Crisis Response Initiative.

AES/SONEL  : American Energy Society/ Société Nationale d'Electricité.

AGOA : African Growth Opportunity Act.

AOPIG : African Oil Policy Initiative Group.

CEEAC  : Communauté Economique des Etats de l'Afrique Centrale.

CEMAC  : Communauté Economique et Monétaire de l'Afrique Centrale.

CEREMS  : Centre d'Etude et de Recherche de l'Enseignement Militaire Supérieur.

CGG : Commission du Golfe de Guinée.

CIJ  : Cour Internationale de Justice.

COPAX  : Conseil de Paix et de Sécurité d'Afrique Centrale.

CRTV  : Cameroon Radio and Television.

DGSE  : Direction Générale de la Sécurité Extérieure.

DII  : Diamond International Inc.

DSCA : Defence security Cooperation Agency.

EDA : Excess Defence Article.

EMIA : Ecole Militaire Inter Armées.

FAA : Foreign Asistance Act.

FCFA  : Franc de la Communauté Financière Africaine.

FMF : Foreign Military Financing

FMI  : Fond Monétaire International.

FMS : Foreign Military Sales.

FY : Fiscal Year.

GSPC : Groupe Salafiste pour la Prédication et le combat.

IASPS : Institute for Advance Strategic and Political Studies.

IFES : International Foundation for Election System.

IMET : International Military Education and Training.

INS  : Institut National de la Statistique.

MDJT  : Mouvement pour la Démocratie et la Justice au Tchad.

NDI : National Democratic Institute.

OCDE : Organisation de Coopération et de Développement Economique.

OMC : Organisation Mondiale du Commerce.

OMS  : Organisation Mondiale de la Santé.

ONG  : Organisation Non Gouvernementale.

ONU  : Organisations des Nations Unies.

PIB  : Produit Intérieur Brut.

PPTE  : Pays Pauvres Très Endettés.

RDPC : Rassemblement Démocratique du Peuple Camerounais.

RECAMP  : Renforcement des Capacités Africaines de Maintien de la Paix.

REDEEU  : Revue Electronique du Département d'Etat des Etats-Unis.

RFI  : Radio France Internationale.

SCNC : Southern Cameroon National Congress.

SMP  : Société Militaire Privée.

TBC : Tome Broadcasting Corporation.

UA  : Union Africaine.

UE : Union Européenne.

UN : United Nations.

US EIA : United States Energy Information Administration.

US PS : United States Private Sales.

US  : United States.

US-AFRICOM : United States African Command.

USAID : United States Agency for International Development.

US-EUCOM : United States European Command.

TABLE DES MATIERES

DEDICACE i

REMERCIEMENTS ii

SIGLES ET ABREVIATIONS iii

TABLE DES MATIERES v

RESUME 1

INTRODUCTION GENERALE 2

A-SUJET ET SES INTERETS 3

1-PRESENTATION DU SUJET 3

2- INTERETS DU SUJET 4

B-QUELQUES PRECISIONS TERMINOLOGIQUES 6

C-REVUE DE LA LITTERATURE 7

D - PROBLEMATIQUE 8

E-HYPOTHESE 9

F- METHODOLOGIE 10

1-LIEUX DE RECHERCHE 10

2-ANALYSE DE LA COLLECTE DES DONNEES 11

3-INTERPRETATION THEORIQUE DES DONNEES 11

PREMIERE PARTIE : LE CAMEROUN : POINT D'APPUI DU DISPOSITIF DE LA GEOSTRATEGIE AFRICAINE DES ETATS-UNIS 13

CHAPITRE 1 : LE CAMEROUN DANS LA PETROSTRATEGIE AFRICAINE DES ETATS-UNIS 16

SECTION 1 : LE CAMEROUN : UNE PORTE D'ENTREE STRATEGIQUE EN AFRIQUE 18

A-LES FONDEMENTS DE LA CONVOITISE : LES ATOUTS INTERNES DU CAMEROUN : ........................................................................................ 18

1-LES ATOUTS POLITICO-ECONOMIQUES 19

2-LES ATOUTS SOCIO-CULTURELS 20

B - LA POSITION GEOGRAPHIQUEMENT STRATEGIQUE DU CAMEROUN : OBJET DE LA CONVOITISE 21

1 - UNE OUVERTURE MARITIME DANS LE GOLFE DE GUINEE 21

2 - LE CAMEROUN ET LE HEARTLAND AFRICAIN 22

SECTION 2 : L'APPORT MULTIDIMENSIONNEL DU CAMEROUN A LA PETROSTRATEGIE AFRICAINE DES ETATS-UNIS 23

A-L'IMPERATIF AMERICAIN DE DIVERSIFICATION DE SON APPROVISIONNEMENT EN ENERGIE 23

1 - LES ECHANGES PETROLIERS AVEC LE CAMEROUN 24

2 - LE CAMEROUN ET LES «PETRO-ETATS» D'AFRIQUE SUBSAHARIENNE 26

B - L'EXPLOITATION DES RESSOURCES ET LA STRATEGIE DE L'EQUILIBRE IMPERIAL 27

1 - UNE ZONE HISTORIQUEMENT ACQUISE AUX EX-PUISSANCES COLONIALES.................................................................................... 27

2 - LE SOUTIEN DU CAMEROUN AU NIVEAU DES INSTANCES INTERNATIONALES 28

CONCLUSION 30

CHAPITRE 2 : LE CAMEROUN DANS LA STRATEGIE MILITAIRE DES ETATS-UNIS 31

SECTION 1 : LA POLITIQUE AMERICAINE DE SECURITE EN AFRIQUE : UNE ERE NOUVELLE 32

A-LA SECURITE PETROLIERE 33

1-LA SECURISATION DES INFRASTRUCTURES PETROLIERES CONTINENTALES 33

2-LA SECURITE MARITIME 35

B-LE CAMEROUN DANS LA CROISADE AMERICAINE DE LUTTE CONTRE LE TERRORISME 36

1-TERRORISME ET RAISONS OFFICIELLES DU RENFORCEMENT DE LA PRESENCE AMERICAINE AU CAMEROUN 37

2 - LE CAMEROUN ET LA LUTTE CONTRE LE TERRORISME 39

SECTION2 : LE CAMEROUN DANS LA STRATEGIE AMERICAINE DE CONSOMMATION MILITAIRE 40

A-L'ORIENTATION DU CAMEROUN VERS LE MODELE AMERICAIN DE CONSOMMATION MILITAIRE 41

1 - UN MARCHE POTENTIEL ? 41

2 - UNE STRATEGIE D'EXTENSION DE LA CULTURE AMERICAINE ? 42

B-UNE COOPERATION MILITAIRE A VISEE HEGEMONIQUE 43

1-LE PRE CARRE FRANÇAIS EN CAUSE ? 43

2-LA SUSTENTATION DE L'HEGEMONIE AMERICAINE FACE AUX PUISSANCES EMERGENTES 44

CONCLUSION 45

DEUXIEME PARTIE : L'APPUI AMERICAIN : MOYEN DE LA GEOSTRATEGIE CAMEROUNAISE ? 46

CHAPITRE 3 : LA PETROSTRATEGIE AMERICAINE A L'ERE DE LA RELANCE CAMEROUNAISE 48

SECTION 1 : LE SOUTIEN DES ETATS-UNIS SUR LA SCENE INTERNATIONALE 49

A-LA QUESTION DE LA SECURITE SOUS-REGIONALE 50

1 - L'APPUI A LA SECURITE DE LA SOUS-REGION 50

2 - LA MISE EN OEUVRE DE L'ARRET DE LA CIJ : LA QUESTION DE BAKASSI 51

B - LES ETATS-UNIS DANS LA STRATEGIE CAMEROUNAISE DE DESENDETTEMENT 52

1 - LE SOUTIEN AMERICAIN AUPRES DES INSTITUTIONS DE BRETTON WOODS 53

2 - L'AMELIORATION DE L'IMAGE DU CAMEROUN SUR LA SCENE INTERNATIONALE 53

SECTION 2 : LES ETATS-UNIS DANS LA STRATEGIE CAMEROUNAISE DE DEVELOPPEMENT ET DE COHESION NATIONALE 55

A -L'IMPERATIF DU DEVELOPPEMENT 55

1 - L'ACCROISSEMENT DES INVESTISSEMENTS ET DES ECHANGES COMMERCIAUX ENTRE LES DEUX PAYS 55

2 - LES RETOMBEES DU PIPELINE TCHAD-CAMEROUN 58

B-LES ETATS-UNIS DANS LA STRATEGIE CAMEROUNAISE DE RENFORCEMENT DE LA STABILITE POLITIQUE ET DE CONSOLIDATION DEMOCRATIQUE 59

1-L'ACCOMMODATION DE LA POLITIQUE AMERICAINE DE PROMOTION DE LE DEMOCRATIE EN AFRIQUE 59

2-LE RAFFERMISSEMENT DE LA STABILITE POLITIQUE 61

CONCLUSION 62

CHAPITRE 4 : UNE COOPERATION MILITAIRE RICHE D'OPPORTUNITES POUR LE CAMEROUN 63

SECTION 1 : LES INITIATIVES AMERICAINES DE MAINTIEN DE LA PAIX EN AFRIQUE 64

A-LE CAMEROUN DANS LES PROGRAMMES MILITAIRES DES ETATS-UNIS EN AFRIQUE 64

1-LE CAMEROUN DANS L'IMET 65

2-LE CAMEROUN DANS L'EDA 66

B-L'AIDE MILITAIRE MULTIFORME DES ETATS-UNIS AU CAMEROUN .... 67

1-L'AIDE TECHNIQUE 68

2-L'ASSISTANCE HUMANITAIRE 68

SECTION 2 : LES NOUVELLES PRIORITES DE SECURITE AMERICAINE ET LES INTERETS DU CAMEROUN 69

A-LA LUTTE CONTRE LE TERRORISME AU CAMEROUN 70

1 - LE RENFORCEMENT DE LA SECURITE FRONTALIERE 70

2- L'AMELIORATION DE LA SECURITE MARITIME ET AEROPORTUAIRE 70

B-LE SYSTEME AMERICAIN DE DEFENSE AU PROFIT DU CAMEROUN ? 72

1 - COOPERATION ET TRANSFERT DE TECHNOLOGIE MILITAIRE 72

2 - LA QUESTION DU RENSEIGNEMENT MILITAIRE 73

CONCLUSION GENERALE 75

REFERENCES 79

PROTOCOLE DE RECHERCHE 87

ANNEXES 89

RESUME

L'intense activité diplomatique observée ces dernières années entre le Cameroun et les Etats-Unis a suscité notre curiosité et donc notre désir de conduire une étude sur ce thème. Cette envie est devenue déterminante au moment où nos travaux liminaires nous ont révélé la quasi-inexistence d'une étude scientifique portant notamment sur les relations militaires entre les deux Etats. Aussi croyons-nous par le biais de ce travail apporter une contribution à l'éclairage de ces aspects de la coopération américano-camerounaise. En fait, notre ambition est de savoir, mais aussi de partager les motifs du renforcement constaté ces dernières années de la coopération militaire et pétrolière entre les deux acteurs. L'importance des intérêts escomptés par les Etats-Unis tels ; la sécurité, la diversification de leur approvisionnement en énergie, les affaires, la puissance... face à ceux du Cameroun à l'instar du désendettement, du développement, de la sécurité et de la santé nous a permis d'envisager cette lecture en terme d'interdépendance. C'est grâce au néoréalisme tenant lieu de théorie d'analyse, soutenu par les méthodes positiviste et comparative que nous sommes parvenus à l'analyse des données recueillies en vue de la démonstration de cette hypothèse. La croissance des intérêts réciproques des deux acteurs les met effectivement dans une situation d'interdépendance. Mais, une interdépendance somme toute asymétrique du fait de leur disproportion criarde.

ABSTRACT

The intense diplomatic activity observed these last years between Cameroon and the United States aroused our curiosity and therefore, our desire to work on this theme. This desire became decisive when our introductory works revealed the quasi-non-existence of a scientific survey conducted notably on the military relations between the two States. Therefore, we want through this work, to bring a contribution in clarifying certain aspects of the Cameroonian and American cooperation. In fact, our ambition is to know, but also to share the motives of the reinforcement noted these last years of the military and oil cooperation between the two actors. The interests shown by the United States in the area of; security, the diversification of their provision in energy, the business, the power... vis a vis those of Cameroon, like getting out of debt, development, security and health, permitted us to consider this work in terms of interdependence. It is thanks to the neorealism theory, sustained by the positivist and comparative methods that we arrived at the analysis of the data collected to justify this hypothesis. The growth of the reciprocal interests of the two actors puts them effectively in a situation of interdependence. Bu,t an asymmetric interdependence.

INTRODUCTION GENERALE

En guise de rappel historique, retenons que les Etats-Unis ont entretenu des relations assez timides avec l'Afrique en général pendant les premières décennies qui ont suivi les indépendances. (Schraeder, 1994 : 1 ; Leriche, 2003). Cette situation s'explique par plusieurs raisons au nombre desquelles la conjoncture internationale dominée par la guerre froide, la sous-traitance stratégique (Ntuda, 2003 :131-154) et l'intérêt stratégiquement mineur de ce continent aux yeux des Etats-Unis (Aicardi, 1989). C'est dans cette atmosphère qu'a évolué la première phase de la coopération américano-camerounaise ; celle qui va de 1960 à 1989.

La deuxième phase qui va de 1990 à 1996 est marquée par une diplomatie assez tendue entre les deux Etats. Situation qui trouve son explication dans les exigences américaines de gouvernance à un moment où le Cameroun est en plein balbutiement démocratique (Rapport MINREX, 2005). Dans les faits, cette détérioration s'est traduite par un certain nombre d'actes tels que : la suspension de l'aide de l'Agence Américaine pour le Développement International (USAID) (19 Novembre 1993), le recul du rang du Cameroun parmi les pays africains bénéficiaires de l'aide américaine, le soutien apporté à « l'opposition radicale » par l'Ambassadeur des Etats-Unis au Cameroun Mme Frances  Cook, les rapports jugés particulièrement sévères du National Democratic Institute (NDI) sur l'état de la démocratie au Cameroun (Ebolo, 1998). C'est ainsi qu'à la tête de plusieurs rapports revenaient avec une certaine récurrence les termes suivant : «République multipartite seulement de nom, le Cameroun continue à être gouverné en réalité par le Président Biya et son cercle de conseillers, issus principalement de son groupe ethnique et de son parti le Rassemblement Démocratique du Peuple Camerounais » (Ebolo, 1998).

Cette turbulence va connaître une accalmie vers la fin des années 90 donnant naissance à une nouvelle ère dans la relation Américano-camerounaise. Cette relance trouve en partie son origine dans deux élections : celle de Kofi Annan à la tête de l'ONU1(*), et l'élection présidentielle de 1997 au Cameroun. Cette dernière élection donne en effet l'occasion à l'organisme américain, « International Foundation for Election System » (IFES) de publier un rapport positif sur l'avancement démocratique du Cameroun. La suite sera ponctuée en juillet et novembre 1998, respectivement de la visite du ministre américain des transports, Rodney Sloter et d'une importante délégation conduite par le maire de New York, D C. M Marion Barryere (Rapport MINREX, 2005).

Cette phase sera accélérée à la suite des attentats du 11 septembre 2001, lesquels obligent les Etats-Unis à repenser leur stratégie globale (REDEEU, 2002). Mieux, c'est notamment l'année 2003, dans la mesure où elle suit le passage du Cameroun à la présidence tournante du conseil de sécurité de l'ONU, sustentée par la visite du Président Paul Biya à Washington à la veille de l' « opération liberté pour l'Irak », qui marque l'âge d'or de la relation américano-camerounaise ainsi que nous allons le développer plus loin.

A-SUJET ET SES INTERETS

Il convient d'abord de présenter le sujet avant de s'appesantir sur ses intérêts.

1-PRESENTATION DU SUJET

Le débat au sujet de l' [afro-péssimisme] et du désengagement stratégique des grandes puissances en Afrique entre dans une nouvelle phase à la fin des années 90. A partir de cette période en effet, on assiste paradoxalement à un redéploiement spectaculaire des grandes puissances en Afrique. Les richesses naturelles de ce continent, les questions de sécurité et d'affaires, notamment dans le Golfe de Guinée présenté comme le nouvel [eldorado pétrolier], l'impératif de la redistribution des cartes portant sur la géopolitique d'un continent de plus en plus précieux sont en partie à l'origine de cette convoitise (Awoumou, 2005 :15-20).

Délimitation spatiale : La coopération américano-camerounaise met en oeuvre deux acteurs aux limites territoriales bien déterminées. Il s'agit d'abord des Etats-Unis qui, d'une superficie d'un peu plus de 9 500 000 Km2 et peuplés d'environ trois cent millions d'habitants, se situent géographiquement en Amérique du Nord. Première puissance du monde dans de nombreux domaines (militaire, économique, technologique, politique...), ce pays est limité au nord par le Canada, au sud par le Mexique, à l'est par l'Océan Atlantique, et à l'ouest par l'Océan Pacifique. D'autre part, il s'agit du Cameroun : d'une superficie de 475 442 Km2 et peuplé d'environ 16 millions d'habitants, le Cameroun est un pays d'Afrique centrale, situé pour sa zone sud-ouest dans le Golfe de Guinée. Classé au rang des pays pauvres très endettés en 2000, mais hégémon de l'Afrique centrale (CEMAC, voir annexe 1), ce pays est depuis quelques années en pleine relance économique. Ce sont principalement ces deux acteurs qui nous intéressent dans le cadre de cette étude. Toutefois, nous garderons un regard permanent sur l'Afrique en général et le Golfe de Guinée en particulier, considérés comme le théâtre du jeu et des enjeux des différents acteurs.

Quant à la délimitation temporelle, relevons comme l'annonce déjà le thème que notre analyse prend son départ en 2001. Bien sûr qu'il n'est pas question d'une rupture rigoureuse de nature à faire fi du passé. Cette coupure tient à deux raisons principales : l'amélioration du processus démocratique camerounais, laquelle a pour corollaire le renforcement de sa coopération avec les Etats-Unis (Ebolo, 1998) ; puis les attentats du 11 septembre 2001 qui ont conduit les Etats-Unis à réviser leur politique étrangère en général et leur stratégie africaine en particulier (REDEEU, 2002).

Délimitation thématique : Notre étude porte sur les aspects pétrolier et militaire. Chacun des deux peut être traité individuellement. Mais le lien qui existe entre les intérêts pétroliers et les exigences de sécurité étant très fort, nous avons cru logique de les étudier parallèlement.

Ce thème peut être analysé de différentes manières. Il peut s'agir d'une étude comparative des deux dimensions (pétrolière et militaire), ou d'une étude des institutions qui régissent ou encadrent cette coopération, de la légalité ou de la mise en application des accords, de l'historique de cette coopération avec en perspective le rapport de force et de domination. Ces orientations ne manquent pas d'intérêts. Mais, guidés par les exigences épistémologiques, nous-nous sommes donnée une orientation précise : l'interdépendance.

Nous focaliserons donc notre attention sur la coopération militaire et pétrolière en tant que vecteur potentiel d'une interdépendance entre les deux acteurs. Walter C. Clemens définit l'interdépendance comme une relation dans laquelle deux ou plusieurs acteurs sont vulnérables, ou du moins sensibles quant à leur bien-être (Walter, 1998 :20). Peuvent contribuer à l'interdépendance, les conditions telles que la vulnérabilité mutuelle, les échanges commerciaux, le partage des informations et de certaines exigences de sécurité (Walter, 1998 :20). La mondialisation de ces dernières années et la naissance d'enjeux de plus en plus aigus ont davantage contribué à l'élargissement du sens, du théâtre et du contexte de l'interdépendance entre acteurs du jeu international de plus en plus nombreux.

2- INTERETS DU SUJET

Les intérêts de ce sujet sont à notre avis, aussi bien scientifiques que stratégiques.

L'intérêt scientifique peut s'entendre comme l'apport que l'étude d'un fait social donné confère à la science. Dans le cas d'espèce, l'exposé des rapports d'intérêt et de dépendance mutuelle entre le Cameroun et les Etats-Unis permet de comprendre la relativité de la puissance et la complexité de la réalité parfois difficilement concevable des relations internationales actuelles. Les critères de la puissance n'étant opérants que par rapport à une époque, à un fait quelconque ou à un acteur donné. C'est la relative autonomie de la politique qui suppose la latitude de chaque acteur d'agir quelque soient ses faiblesses qui est ici mise en évidence. En apportant un éclairage supplémentaire sur les relations militaires et pétrolières entre les deux Etats, cette étude nous permet de combler l'une des exigences de l'épistémologie qu'est la connaissance cumulative.

C'est aussi une hypothèse d'école de la théorie soutenue par Robert Kéohane et Joseph Nye dans leur ouvrage intitulé power and interdependance et publié en 1977. Ces auteurs enseignent en effet que, l'entrée en jeu de nouveaux acteurs crée une situation d'interdépendance asymétrique dans laquelle les asymétries constatées sont «source d'influences mutuelles». Alors qu'elle relativise le paradigme «centre-périphérie» développé par les Marxistes, cette étude renforce cependant la tendance selon laquelle aucun déterminant n'est jamais définitivement acquis chez un acteur. Toutefois, compte tenu du rôle prépondérant que nous accordons aux acteurs étatiques dans cette étude, nous la voulons plus proche de la démarche de Waltz (1979) qui suppose davantage une relative dépendance des souverainetés.

Enfin, l'importance scientifique de cette analyse réside dans la mise en relief de la nécessité de la coopération à l'heure de la globalisation. Cette dernière situation débouche en fait sur la diminution du pouvoir de contrôle sur les territoires, les hommes, les idées et les biens ; rendant ipso facto les Etats un peu plus vulnérables que par le passé.

Intérêt stratégique : Cette étude se donne pour ambition de déceler l'arrière-plan des actes posés par chacun des acteurs en jeu. En fait, la coopération ne serait qu'un moyen pour les uns et les autres de combler leurs propres déficits. Cette posture rejoint la démarche des réalistes qui trouvent dans les Etats des «monstres froids» ne coopérant que lorsque leurs intérêts sont en jeu (Morgenthau, 1948). Ainsi, tout acte posé par chacun des acteurs, fut-il d'apparence altruiste, est toujours rationnel. Cette analyse nous permettra donc d'ouvrir autant que faire se peut l'agenda caché des acteurs, afin d'en partager le contenu.

B-QUELQUES PRECISIONS TERMINOLOGIQUES

La coopération, selon le Lexique de politique, est « une politique d'entente, d'échange et de mise en commun des activités culturelles, économiques, politiques et scientifiques entre Etats de niveau de développement comparable...ou politique d'entente et d'aide entre Etats de niveau de développement inégaux » ( Dalloz, 2001). Une définition qui nous semble peu adaptée au contexte actuel des relations internationales. La présente analyse met bien en évidence deux Etats de niveau de développement inégaux. Mais, serait-on pour autant fondé à réduire leur coopération à l'aide, à l'assistance, ou à la charité ? Le second pan de la définition suscitée présente la coopération comme « ...une politique d'entente et d'aide entre Etats de niveau de développement inégaux ». Or il est d'usage que dans le jargon international, l'on ne parle d'aide que lorsqu'elle va des pays riches vers les pays pauvres. C'est donc dire suivant l'esprit de cette définition, qu'entre pays riches et pays pauvres, la coopération se réduirait aux actes de bonne volonté, de bienfaisance et de charité. Prendre cette définition telle quelle, c'est assurément infirmer cette pensée de George Washington selon laquelle « aucune nation ne doit être crue au-delà de son intérêt »2(*). Comment donc comprendre cette définition alors qu' Henry Kissinger déclare sans équivoque que « la coopération n'est pas une faveur qu'un pays concède à un autre ... [Mais qu'elle] sert les intérêts des deux parties » (Kissinger, [2001] 2003 :63) ? Et que dire de cette maxime chère aux américains : « trade not aid » ? Ou de cette pensée du Général De Gaulle devenue populaire : [entre Etats, il n'y a pas d'ami, mais seulement les intérêts].

Ainsi compris, la « dialectique des intelligences » (Coutau-Bégarie, 1999 :70) qui prévaut dans les relations entre Etats nous commande une démarche ponctuée de réserve. Cette réserve est d'autant plus nécessaire qu'il est vrai que nous sommes dans l'ère de la globalisation, de l'érosion des frontières et de l'intensification des échanges entre acteurs internationaux de plus en plus diversifiés. Est-il permis de croire qu'en dehors de l'aide apportée par les Etats-Unis au Cameroun, ce dernier n'a rien de significatif à offrir à celui là ? Au delà des considérations d'ordre matériel, n'est-il pas permis d'envisager d'autres types d'apport à caractère stratégique et non nécessairement symboliques ou insignifiants ? Sinon, comment comprendre l'importance stratégique d'un pays comme le Djibouti aux yeux des grandes puissances, telles la France et les Etats-Unis, alors qu'il est classé parmi les plus pauvres du monde ? N'est-ce pas là une manière à peine dissimulée de réaffirmer l'importance de tout territoire ? L'apport d'un Etat, mieux, d'un pays n'est-il que technologique, militaire ou industriel ? Et que dire des richesses naturelles, des apports d'ordre politique et des considérations d'ordre stratégiques, géopolitiques et géostratégiques d'un territoire ? Cette vision à travers laquelle chaque pays a quelque chose à échanger, quelque soit sa taille, son emplacement et sa nature nous conduit à lire les relations entre Etats en termes d'interdépendance.

Le terme militaire se rapporte selon Larousse (2000) à tout ce qui est «propre à l'armée et à son organisation».L'armée quant à elle se définit comme l'ensemble des forces de défense d'un territoire. Ceci peut s'étendre à tout organe officiel ou officieux chargé des questions de sécurité.

Quant au domaine pétrolier, il se rapporte à son sens industriel : toute  personne ou société qui travaille dans la recherche, la prospection, l'exploitation, le transport, la transformation ou la distribution des produits pétroliers3(*). Philippe Mareau ajoute que « le pétrole est à la fois une source majeure d'énergie et une matière première à partir de laquelle s'est développée la pétrochimie...Le pétrole émerge comme ressource vitale à l'aube du XXème siècle » (Mareau, 2002 :161). Plus loin souligne t-il encore, « Celui qui contrôle le pétrole, contrôle l'économie mondiale » (Mareau, 2002 :162).

C-REVUE DE LA LITTERATURE

Sur la question de la coopération militaire et pétrolière entre les Etats-Unis et le Cameroun, il n'existe pas à notre connaissance des travaux proprement scientifiques. Néanmoins, un certain nombre de travaux de portée générale ont été commis sur les questions militaires et pétrolières dans le monde, en Afrique ou plus précisément dans le Golfe de Guinée. Ils peuvent être classés en plusieurs catégories : ceux qui traitent de la question pétrolière et militaire de façon globale, ceux qui traitent de la politique africaine des Etats-Unis et ceux qui traitent de la position stratégique du golfe de guinée et du Cameroun.

Pour ce qui est du premier point, relevons que, suite aux travaux confiés à l'organisme «  the institute for advanced strategic and political study », la Maison Blanche a publié en Septembre 2002, le nouveau guide de référence de la politique globale des Etats-Unis. Le contenu de ce document a été revu et codifié dans la Revue Electronique du Département d'Etat, sous le titre : La stratégie de sécurité nationale des Etats-Unis : une nouvelle ère (REDEEU, Décembre 2002). Après y avoir dégagé les grandes lignes de la nouvelle stratégie américaine, cette revue mentionne que « l'Afrique occupe une place de premier plan dans la nouvelle stratégie de sécurité nationale ».

L'ouvrage Géopolitique du pétrole : un nouveau marché, de nouveaux risques, des nouveaux mondes, commis en 2005 par Cédric De Lestrange, Zélinko et Paillard, nous renseigne davantage sur cette question. En effet, après avoir dégagé les risques de la nouvelle géopolitique, les auteurs en présentent les enjeux actuels (conflits, projection de la puissance, émergence des marchés, domination...), suivi de l'ascension de l'Afrique et du Golfe de Guinée en particulier.

Quant aux travaux qui ont trait à la politique africaine des Etats-Unis, relevons la Revue Afrique contemporaine dans laquelle Frédéric Leriche présente la politique africaine des Etats-Unis comme prenant une nouvelle dimension à la fin de la guerre froide (Leriche, 2003). Jean Christophe Servant quant à lui souligne dans le monde diplomatique que « le pétrole africain est devenu un intérêt stratégique pour les Etats-Unis  »

Pour ce qui est des travaux qui se rapportent directement au Golfe de Guinée et au Cameroun, mentionnons Yves Alexandre Chouala qui relève dans la crise diplomatique de 2004 entre le Cameroun et la Guinée Equatoriale, l'importance croissante du Golfe de Guinée aux yeux des Etats-Unis ainsi que la position stratégique du Cameroun,  leader potentiel de la sous-région (Chouala,  : 2005). Les travaux commis par Joseph .V . Ntuda Ebode (2004b :44-47), Wullson Mvomo Ela (2005 :7-11), et Damien George Awoumou (2005 :15-20) sur cette zone militent dans la même direction. En effet, ces auteurs relèvent chacun dans leurs travaux respectifs, les enjeux, la convoitise et le positionnement des puissances dans cette sous-région ô combien convoitée. Ce sont ces travaux qui ont ouvert la brèche qui tient lieu de problématique qui suit.

D - PROBLEMATIQUE

La dialectique des intelligences propre aux relations humaines s'est affirmée sur la scène internationale. Composante de la stratégie, elle confère un caractère conscient et calculé aux décisions et aux actes que posent les acteurs dans leur jeu. Cette hypothèse se vérifie davantage chez les Etats occidentaux qui jouissent d'une certaine maturité en matière de relations internationales. La doctrine réaliste à laquelle le néoréalisme emboîte le pas enseigne que les Etats sont essentiellement matérialistes et ne se rapprochent que lorsque de cela dépend leur intérêt national.

La coopération Américano-camerounaise met en évidence deux Etats qui manifestent une volonté certaine de donner un poids croissant à leurs relations. Au-delà des raisons apparemment flagrantes ou souvent clairement exprimées, l'indispensable [agenda caché] de ces acteurs peut sembler assez riche de révélations. D'où cette préoccupation lancinante qui s'emble mériter un peu plus d'attention : qu'est-ce qui justifie depuis quelques années le renforcement de la coopération militaire et pétrolière entre les Etats-Unis et le Cameroun ? Ce resserrement n'est-il pas de nature à mettre les deux acteurs dans une situation d'interdépendance ? Mieux, comment le Cameroun et les Etats-Unis en tant qu'unité diplomatique et stratégique entrent-ils dans une situation d'interdépendance par le biais de la coopération pétrolière et militaire? Quels sont les intérêts stratégiques et souvent non avoués que chacun recherche en entrant en coopération avec l'autre ?

E-HYPOTHESES

L'intérêt est au coeur du rapprochement des deux Etats. Le renforcement de la coopération américano-camerounaise constaté ces dernières années trouve son fondement dans l'intérêt national escompté par chacun des deux acteurs. Ces intérêts sont nombreux et variés. En effet, pour les Etats-Unis, il s'agit entre autres du besoin de sécurité, de la diversification de leur approvisionnement en hydrocarbures face à la demande de plus en plus croissante d'énergie et à un Golfe persique de plus en plus instable et donc de moins en moins sûr ; de la sustentation de leur hyperpuissance face aux puissances dites émergentes, des échanges commerciaux, etc. Dit [pays pauvre très endetté], le Cameroun sait pouvoir tirer parti de la réorientation de la politique africaine des Etats-Unis. En effet, en coopérant avec la première puissance du monde, le Cameroun viserait un certain nombre d'objectifs parmi lesquels le désendettement, le développement, la sécurité, la lutte contre certaines maladies, l'amélioration de l'image du pays...Vraisemblablement, les deux acteurs ont compris qu'ils ont besoin de se rapprocher pour atteindre leurs intérêts mutuels. Nanti d'une riche diversité en ressources naturelles à laquelle s'ajoutent de nombreux atouts internes, le Cameroun jouit d'une position stratégique en Afrique et dans le Golfe de Guinée. Il y'a là de quoi susciter la convoitise des grandes puissances au rang desquelles figurent les Etats-Unis. Inversement, le Cameroun bénéficie et peut continuer à compter sur l'appui multidimensionnel des Etats-Unis. Il s'agit bien là, à notre regard, d'un schéma d'interdépendance ; lequel mérite d'emblée quelques éclairages.

Nous ne manquons pas de détermination. Mais loin de nous la prétention d'épuiser un thème aussi vaste que la coopération militaire et pétrolière entre les Etats-Unis et le Cameroun. Notre tâche consistera à recenser dans ces deux dimensions un certain nombre d'arguments susceptibles de conforter cette lecture d'interdépendance. Dire qu'une hyperpuissance comme les Etats-Unis dépend du Cameroun peut sembler assez curieux ; car le degré d'inégalité qui existe entre les deux acteurs est extrêmement grand. Certes, c'est la Maison Blanche qui a établi que le pétrole du Golfe de Guinée est « un intérêt vital » pour la sécurité nationale des Etats-Unis (Awoumou : 2005 :15-20). Ce sont encore les Américains qui soulignent le leadership du Cameroun dans la sous-région. Mieux, précisent-ils, « le Cameroun est une destination essentielle pour la diplomatie américaine en Afrique »4(*). Tous arguments susceptibles d'attirer notre curiosité et donc, de fonder notre lecture d'interdépendance. Toutefois, nous ne pouvons pas perdre de vue l'hyperpuissance imposante et multidimensionnelle des Etats-Unis qui dépendraient plus symboliquement du Cameroun qu'il n'en serait inversement.

F- METHODOLOGIE

Il s'agit des lieux de recherche, de l'analyse de la collecte des données, et de l'interprétation théorique des données.

1-LIEUX DE RECHERCHE

Nous avons utilisé dans le cadre de ce travail la technique classique de recherche; à savoir l'enquête documentaire. Nous l'avons effectué à travers l'Internet et dans des bibliothèques telles que la Fondation Paul Ango Ela de Géopolitique en Afrique Centrale, le Centre Culturel Américain, l'Institut National de la Statistique, et les bibliothèques centrales des Université de Yaoundé I et II. La jeunesse relative de la coopération militaire entre les Etats-Unis et le Cameroun ne nous a pas permis de travailler avec un très grand nombre d'ouvrages. Suivant les conseils du Général Pierre Samobo que nous avons rencontré dans le cadre de ces travaux, nous avons collecté et analysé des articles scientifiques et les propos exprimés dans les médias par les officiels des deux Etats. Nous avons mené une enquête de terrain qui nous a conduit tour à tour au Ministère de la Défense, au Ministère des Relations Extérieures, à la Gendarmerie Nationale, et à l'Ambassade Américaine où malheureusement notre demande d'enquête n'a pas eu une suite favorable. Cette enquête nous a néanmoins permis à travers des entretiens simples et non directifs, de recueillir quelques informations ; lesquelles sont restées à certains égards limitées par la nature «sensible» du thème.

2-ANALYSE DE LA COLLECTE DES DONNEES

Nous pensons, fort de notre objet d'étude que la méthode positiviste nous permettra de prendre le recul épistémologique nécessaire pour analyser et expliquer les faits dans une neutralité axiologique. La jeunesse actuelle de la coopération Américano-camerounaise nous conduira aussi vers la méthode comparative. Celle-ci nous permettra en effet de faire un rapprochement entre les actes, les faits et propos d'ici et d'ailleurs, afin d'en dégager certaines similitudes et donc certaines conclusions.

3-INTERPRETATION THEORIQUE DES DONNEES

Comme mentionné plus haut, les réalités internationales sont devenues si complexes qu'il est presque impossible de prétendre les cerner à partir d'un seul paradigme. Cette difficulté ne justifie pas pourtant le recours au [cocktail méthodologique] qui ne brille pas non plus par une efficacité reconnue. Toutefois, dès lors que l'on a ciblé un angle précis, il devient plausible de mobiliser la théorie qui semble la plus pertinente pour en rendre compte.

Au regard de la problématique qu'il dégage, ce thème commanderait naturellement que nous fassions recours à l' « interdépendance complexe » comme grille d'analyse. Telle que développée en effet par Robert Kéohane et Joseph Nye (1977), l'interdépendance est une théorie qui permet d'expliquer les Relations internationales comme une discipline caractérisée essentiellement par l'effritement de la place de l'Etat en tant qu'acteur unique et l'accroissement des échanges entre des acteurs placés en des pôles différents et difficilement maîtrisables. Elle suppose une certaine complémentarité entre ces acteurs qu'elle considère comme des partenaires. Ce travail prête bien à un schéma similaire. Mais compte tenu de la place prépondérante que les Etats y occupent, nous envisageons lui donner une orientation légèrement différente, mieux, complémentaire.

Au regard de la nature des acteurs en présence, on pourrait étudier ce thème à partir du paradigme « centre-périphérie » tel que proposé par les Marxistes. Ce dernier (paradigme) se donne en effet pour vocation d'expliquer les relations internationales en terme de stratégie d'influence et de domination des Etats occidentaux dits du « nord » et généralement riches sur les Etats du « sud » généralement pauvres et facilement malléables. Ces orientations ne manquent pas de pertinence. Bien au contraire, elles permettraient de cerner davantage les contours du thème afin de le rendre encore plus intelligible. Mais nous avons opté pour le réalisme dans sa version révisée : le néoréalisme. Ce choix tient à notre avis, non seulement à l'objet de notre étude qui met en jeu deux acteurs majeurs de la scène internationale (deux Etats) ; mais également à la nature de leurs relations essentiellement dominées par la quête rationnelle de l'intérêt national.

Comme le réalisme, le néoréalisme se proposent d'observer les faits internationaux avec une certaine objectivité et d'en rendre compte tels qu'ils sont. Mais en corrigeant le réalisme du type classique (tendance soutenue au lendemain des deux guerres mondiales par des chercheurs d'obédience réaliste tels que Hans Morgenthau et Raymond Aron), le néoréalisme qui reconnaît d'ailleurs l'accès de nouveaux acteurs sur la scène internationale, ne fonde plus substantiellement les relations internationales sur la quête d'intérêts égoïstes via le recours anarchique à la force. Il (néoréalisme) présente le besoin d'intérêt via la sécurité comme le principe directeur des relations entre Etats (Waltz ,1979). Cet avis est aussi le notre et c'est dans cette optique que nous entendons conduire cette analyse.

Ce travail tiendra sur deux parties. La première porte sur le Cameroun comme point d'appui du dispositif de la géostratégie africaine des Etats-Unis, tandis que la seconde s'interroge sur l'appui Américain comme moyen de la géostratégie camerounaise.

PREMIERE PARTIE :

LE CAMEROUN : POINT D'APPUI DU DISPOSITIF DE LA GEOSTRATEGIE AFRICAINE DES ETATS-UNIS

Il n'existe pas à ce jour une définition arrêtée et unanimement partagée de la géostratégie (De Montbrial et Klein, 2000 :263). Cette situation s'explique par la nature encore élémentaire d'une discipline qui se reconstruit après avoir été diabolisée suite à son mauvais usage par certains Etats totalitaires occidentaux et orientaux au lendemain de la première guerre mondiale. Néanmoins, l'on peut partager cette ébauche de définition proposée par Hervé Coutau-Bégarie pour qui, « la géostratégie est une stratégie fondée sur l'exploitation systématique des possibilités offertes par les grands espaces en terme d'étendu, de forme, de topographie, de ressources de tous ordres » (Coutau-Bégarie, 1999 :367). C'est dans cet ordre d'idées que s'inscrit l'actuelle stratégie africaine et donc camerounaise des Etats-Unis.

La présence américaine au Cameroun s'inscrit dans la nouvelle stratégie de sécurité nationale définie par l'administration Bush en septembre 2002 (REDEEU, 2002). Les attentats du 11 septembre 2001 et l'insécurité grandissante du golfe persique ont en effet amené les Etats-Unis à redéfinir leur politique étrangère. Il se pose à la première puissance du monde deux problèmes majeurs : la diversification des marchés d'importation du pétrole et son corollaire qu'est la sécurité (REDEEU 2004). C'est précisément dans cette optique que s'inscrit la politique africaine des Etats-Unis dont les objectifs pétroliers et sécuritaires du : sahel, Maghreb, Afrique de l'Est, Afrique Centrale et Golfe de Guinée5(*).

Au-delà de ces considérations d'ordre global, les Etats-Unis ont bien une stratégie qu'on peut qualifier de local. C'est le cas au Cameroun où les objectifs officiellement affichés sont entre autres la promotion de la démocratie, des droits de l'Homme, et la lutte contre certaines maladies chroniques6(*). Loin de se limiter à ces aspects officiellement substantiels, la présence américaine au Cameroun s'inscrit dans une vaste stratégie qui n'exclut pas les dimensions pétrolière et militaire (Bouché, 2006).

Parler aujourd'hui de la coopération militaire entre les Etats-Unis et le Cameroun n'est pas a priori un problème. Mais elle peut paraître relativement précoce dans la mesure où il n'existe à ce jour aucun accord rigoureux et formel portant sur la coopération militaire entre les deux Etats (entretien, Colonel Abba et capitaine Tsanga, octobre 2006). Toutefois, au regard de la nouvelle orientation donnée à la stratégie de sécurité nationale des Etats-Unis par le Président George .W. Bush en Septembre 2002, et en considération du rapprochement constaté ces dernières années entre les deux Etats, il y'a lieu de s'interroger.

Dans ce sens, quelques remarques méritent un peu plus d'attention. En effet, les Etats-Unis ont inauguré en février 2006 leur nouvelle chancellerie au Cameroun. Un [véritable joyau architectural] qui leur a coûté environ 24 milliards de Fcfa. C'est la première fois que les plus hautes autorités de l'Etat assistent à l'inauguration d'une ambassade au Cameroun7(*). C'est aussi la première fois depuis une vingtaine d'années qu'un secrétaire d'Etat adjoint aux affaires africaines prend part à une cérémonie d'une telle envergure. « La nouvelle ambassade [souligne le communiqué de presse du jeudi 16 février 2006], véritable reflet de l'excellence des relations entre le Cameroun et les Etats-Unis, est une preuve de plus de l'engagement clair et ferme des Etats-Unis aux cotés du Cameroun »8(*). L'Ambassadeur Niels Marquardt quant à lui souligne que les Etats-Unis ont « l'intention d'être ici pour toujours »9(*).Ce gigantesque bâtiment est par ailleurs l'une des plus grandes ambassades en Afrique subsaharienne.

Par ailleurs, la visite des officiels américains de haut rang au Cameroun, ainsi que la redondance de leurs propos nous semblent très édifiants. Entre le mois de février 2004 et août 2006, on peut dénombrer près d'une dizaine de visites de ce genre. Il s'agit entre autres, des sénateurs, diplomates, généraux et colonels d'armée, voire des conseillers à la sécurité du Président George Bush sans oublier de nombreux investisseurs et hommes d'affaires. Les points qui reviennent avec récurrence au sujet des entretiens étant la sécurité, les échanges commerciaux, le leadership du Cameroun dans la sous-région et le besoin d'investissement.

La politique africaine des Etats-Unis, plus précisément dans les sous-régions Afrique Centrale et Golfe de Guinée requiert un point d'appui. Le rapprochement vis-à-vis du Cameroun semble témoigner de leur volonté à faire jouer ce rôle à ce pays (entretien, Colonel Abba). L'avancement de ce projet dépend de la volonté politique des deux Etats (entretien, Colonel Abba). Mais en attendant, les Américains qui ne cessent de rappeler le «  leadership du Cameroun » dans la sous-région se sont manifestés. «Les Etats-Unis (...) nourrissent actuellement une stratégie de copartage de l'influence régionale avec le Cameroun » (Chouala, 2005). Le Cameroun joue et peut encore jouer «un grand rôle» (entretien, Colonel Abba) au profit des Etats-Unis en Afrique en général et dans les sous-régions Afrique Centrale et Golfe de Guinée en particulier.

CHAPITRE 1 

LE CAMEROUN DANS LA PETROSTRATEGIE AFRICAINE

DES ETATS-UNIS

Issu étymologiquement du mot grec «stratêgos» (chef d'armée), le terme stratégie est originellement lié à l'art de la guerre. Aujourd'hui, malgré quelques discordances d'importance mineure, il a évolué pour s'appliquer à toutes les branches de la vie sociale (de Montbrial et Klein, 2000 :531-542). La stratégie peut ainsi se définir comme « un ensemble d'actions coordonnées, d'opérations habiles, de manoeuvres en vue d'atteindre un but précis » (Coutau-Bégarie, 1999 :68). C'est dans cette lancée que s'inscrit le déploiement actuel des Etats-Unis au Cameroun.

Les Etats-Unis sont de plus en plus dépendants des produits pétroliers, quoiqu'ils soient de grands producteurs de pétrole (de Lestrange, Zélinko et Paillard, 2005: 87). Le ravitaillement des industries locales est fortement tributaire des importations. En 2002, les Etats-Unis importent 53 % de leur pétrole et 16 % de leur gaz naturel. Les experts estiment qu'en 2025, les Etats-Unis importeront 70 % de leur pétrole et 23 % de leur gaz naturel (Caruso et Doman, 2004 :31). En cette période, 25 % de ces importations en pétrole devront provenir du Golfe de Guinée, contre 15 % actuellement (Lotte, Colomban, Dorgeret, 2005).

Le pétrole africain présente de nombreux avantages. Il est essentiellement offshore. C'est-à-dire exploité en haute mer et généralement à l'abri de certaines turbulences continentales. Il est proche des côtes Est des Etats-Unis, ce qui implique une économie des frais de transport. Les Etats concernés sont assez ouverts aux investissements étrangers (Lotte, Colomban et Dorgeret ,2005).

C'est en partie grâce à ces avantages que le groupe de travail «African Oil  Policy Initiative Group » a demandé que «  le pétrole africain soit érigé en priorité pour la sécurité nationale des Etats-Unis après les évènements du 11 septembre 2001». Bref, que le Président George W Bush fasse du Golfe de Guinée une « zone d'intérêt vital (...) pour la sécurité nationale des Etats-Unis » (Awoumou, 2005).

Dès lors, on peut s'interroger sur le rôle que peut jouer le Cameroun dans la stratégie pétrolière des Etats-Unis en Afrique. Le Cameroun est membre de la commission du Golfe de Guinée (CGG). Sa production quoique dite marginale, s'élève à 62 000 barils par jour en 2004 (Lotte, Colomban et Dorgeret, 2005) et environ 80 000 barils par jour en 2006. En 2001, il occupe le 37e rang mondial parmi les pays producteurs du pétrole10(*). Aujourd'hui, avec le retour de la région de Bakassi (dit potentiellement riche en pétrole et en ressources halieutiques) sous la souveraineté camerounaise, ce pays peut espérer un accroissement notable de sa production.

L'ensemble du Golfe de guinée est dit stratégique (Lotte, Colomban et Dorgeret, 2005), certes, mais c'est une sous-région névralgique, en proie à de nombreux problèmes tels que la contrebande, la piraterie, les trafics de toute sorte, les conflits internes, les activités terroristes... (James, 2006). D'où la nécessité d'obtenir la coopération des Etats de la zone, mais surtout d'un point d'appui en vue d'assurer la sécurité des investissements effectifs et ceux qui sont envisagés dans la région.

Par sa position stratégique11(*) (Chouala, 2005), le Cameroun se présente non seulement comme une porte d'entrée en Afrique, mais aussi comme un [fleuron] pour la stratégie pétrolière des Etats-Unis sur ce continent.

SECTION 1 : LE CAMEROUN : UNE PORTE D'ENTREE STRATEGIQUE EN AFRIQUE

Dit stratégique, le Golfe de Guinée fait l'objet de nombreuses convoitises depuis la fin des années 90. Traditionnellement vu comme une zone d'influence française, et notamment dominé par la société Elf, le Golfe de Guinée connaît aujourd'hui la ruée de nombreuses puissances à la tête desquelles trônent les Etats-Unis (Ntuda, 2004). Le Cameroun dont les côtes sud-ouest s'ouvrent dans l'océan Atlantique, présente de nombreux atouts ; lesquels font particulièrement de lui une porte d'entrée et d'assise dans le Golfe de Guinée (Chouala, 2005). Il s'agit aussi bien de ses atouts internes que de sa position géographique, par rapport aux autres grands ensembles géopolitiques du continent africain.

A-LES FONDEMENTS DE LA CONVOITISE : LES ATOUTS INTERNES DU CAMEROUN 

Les mots ou expressions généralement employés à l'intérieur ou à l'extérieur pour désigner le Cameroun sont assez nombreux. Pour exprimer la vision qu'ils ont de ce pays, les observateurs ont l'habitude d'utiliser des expressions du genre : pays béni des dieux, un havre de paix dans un îlot tourmenté, Afrique en miniature, plate-forme en Afrique ou hégémon de l'Afrique centrale. Tout ceci semble témoigner d'un certain nombre de qualités exceptionnelles que rassemble ce pays d'Afrique centrale. En effet, le Cameroun présente sur le plan interne de nombreux atouts ; lesquels seraient à la base de la convoitise dont il fait l'objet actuellement. Il s'agit entre autres des atouts politico-économiques et des atouts socio-culturels.

1- LES ATOUTS POLITICO-ECONOMIQUES

Sur le plan politique, la Cameroun brille par une stabilité exceptionnelle en Afrique en général et subsaharienne en particulier. C'est notamment cet aspect qui séduit l'observateur (rapport GAFC, 2003). Le Cameroun est aux yeux des américains un pays stable, un îlot de paix dans une sous-région tourmentée (Zinga ,24 août 2005), une destination essentielle pour leurs investissements en Afrique. Depuis son indépendance obtenue le 1er janvier 1960, c'est-à-dire pendant plus de quatre décennies d'existence, le Cameroun n'a connu que deux régimes politiques. Il a essuyé une tentative de coup d'Etat en 1984, mais aucun changement anticonstitutionnel au sommet de l'Etat. Cette stabilité semble avoir été encore plus maintenue sous le régime de Paul Biya actuellement en cours (Hugon ,2005 : 402).

Cette situation est appréciée par les Etats-Unis qui y trouvent une raison fondamentale à renforcer leur coopération avec le Cameroun. En ce sens, Madame Jendayi Frazer12(*) au cours d'une conference de presse au Cameroun soutient que «the United States has a great interest in the central Africa and Cameroon because it is a country that has been doing extremely well. This has been in terms of a country with political stability» (Amayena, 17 février 2006).

Le Cameroun n'a connu aucune guerre civile, ni interétatique. La crise frontalière qui l'opposait au voisin Nigeria est aujourd'hui résolue. Le vent de la démocratisation du début des années 90 a suscité quelques agitations civiles. Mais la vague a été maîtrisée et le régime maintenu. Depuis lors, le Cameroun a organisé des élections qui se sont déroulées avec plus ou moins de transparence et de contestation, mais jamais de soulèvement notable (rapport GAFC, 2003). Aussi soutient-on que «  la venue des chefs d'entreprises ayant fui la Côte d'Ivoire confirme bien, avec éclat, que la stabilité politique dont bénéficie le Cameroun crée, à l'évidence un climat propice aux affaires » (Rapport GAFC,2003).

Sur le plan économique, le Cameroun est incontestablement l'hégémon de l'Afrique Centrale. Par Afrique centrale, nous faisons allusion aux pays membres de la CEMAC 13(*) (Cameroun, Tchad, République Centrafricaine, le Gabon, le Congo et la Guinée Equatoriale). Le Cameroun fournit à lui seul presque la moitié de la population et du PIB14(*) de toute l'Afrique centrale (Hugon ,2005), (Cf. annexe 1). Son économie est en pleine croissance, avec un taux qui oscille entre 4 et 5 % depuis une dizaine d'années (Hugon, 2005 ; GAFC ,2003). Complété par la diversification économique et l'implantation de certaines industries de base (Chouala, 2005), le dynamisme économique dont jouit le Cameroun fait de ce pays un vaste marché dans la sous-région. Ces atouts sont bien de nature à attirer des investisseurs. C'est dans cet ordre d'idées que Jendayi Frazer déclare: «Cameroon (...) has a strong economy (...) Cameroon's leadership role in Africa and globally is very much appreciated by the United States and president Bush. That is why he asked me to come here» (Amayena, 17 février 2006).

2-LES ATOUTS SOCIO-CULTURELS

Le Cameroun est un pays bilingue. L'article1 al 3 de la loi N° 96-06 du 18 janvier 1996 portant révision de la constitution du 02 juin 1972 fait du français et de l'anglais les langues officielles de la République du Cameroun. Elles sont d'égale valeur et bénéficient d'une égale protection constitutionnelle. (Constitution camerounaise, 1996 :3). Ce facteur présente toute son importance, tant il est vrai que la culture, voire la langue, participent des critères qui justifient l'orientation géographique des investisseurs. D'où la promotion de la francophonie et du Commonwealth dont le Cameroun est membre. Le biculturalisme de ce pays fait donc de lui un enjeu non négligeable (Ebolo, 1998).

Ensuite, le Cameroun rassemble la quasi-totalité des cultures d'Afrique noire. Il compte une multitude de groupes ethniques et de langues nationales. En effet, ici on dénombre près de 270 langues nationales et environ 250 groupes ethniques. Il s'agit des peuples venus des quatre coins d'Afrique15(*). Par ailleurs, le Cameroun est traversé par une diversité de religions. Les plus en vue sont le christianisme (53 %), l'Islam (22 %) et les cultes africains (25 %)16(*). Toutes ces cultures se dissolvent et s'interpénètrent pour ne former au final qu'un seul peuple, mieux, une même nation vivant pacifiquement sur le même territoire. Grosso modo, le Cameroun a su maîtriser sa diversité culturelle. Selon le « paradigme américain de la diversité dans l'union » (Sindjoun citant P. Raynaud (1997 :152-157), 2000 : 4), le multiculturalisme dont jouit le Cameroun peut être un terrain fertile, un véritable catalyseur pour la promotion de la démocratie et des droits de l'Homme ; lesquels sont officiellement présentés comme raisons d'être de la présence américaine dans ce pays.

B-LA POSITION GEOGRAPHIQUEMENT STRATEGIQUE DU CAMEROUN : OBJET DE LA CONVOITISE

Le Cameroun n'attire pas seulement par ses atouts internes. Il bénéficie naturellement d'une bonne position en Afrique en général et dans le Golfe de Guinée en particulier. Il s'agit notamment de son ouverture dans l'Océan Atlantique, potentiellement exploitable, et de sa position par rapport au heartland africain.

1 - UNE OUVERTURE MARITIME DANS LE GOLFE DE GUINEE

Bien sûr que le Cameroun n'est pas la seule porte d'entrée en Afrique, ni le seul pays bénéficiant d'une position stratégique sur ce continent ou dans le Golfe de Guinée. D'autres zones de ce continent Afrique sont également considérées comme stratégiques en raison de leur position. Il s'agit par exemple de la partie sud-est vers Madagascar, de la [corne de l'Afrique], du Nord-Ouest vers le Cap Vert (Hugon, 2005), (Cf. annexe 2).

Le Golfe de Guinée quant à lui est présenté en gros comme ayant une position stratégique en Afrique (Hugon, 2005) ; au point où certains en viennent à dire que « qui tient le golfe de guinée tient l'Afrique » (Awoumou, 2005). Cependant, toute analyse faite, l'on se rend compte que la position stratégique d'un pays ne se réduit pas uniquement à son emplacement géographique. Tout dépend de l'enjeu géopolitique, voire géostratégique que l'on lui porte et notamment de la réalisation des objectifs escomptés. En ce sens, le Cameroun paraît être une réelle porte d'entrée et d'assise en Afrique par sa position géographiquement stratégique et ses atouts internes susmentionnés.

Par ses côtes sud-ouest, le Cameroun s'ouvre dans l'océan Atlantique. Ce qui lui confère une position stratégique (Ntuda, 2004a :38). Il jouit de plusieurs façades maritimes (plusieurs centaines de Km de côte) qui octroient de nombreuses facilités aux échanges de toute nature sur le continent. Cette position a été parfois présentée par les autorités camerounaises pour séduire les investisseurs, tout comme elle a été invoquée par certains officiels américains pour justifier leur intérêt à renforcer leur coopération avec le Cameroun17(*)

Cette ouverture permet par ailleurs aux autres zones géographiquement peu avantageuses d'écouler leurs produits à l'importation et à l'exportation via le Cameroun. (Rapport GAFC, 2003). Elle profite principalement au Tchad et à la République Centrafricaine qui n'ont pas de façade maritime.

2 - LE CAMEROUN ET LE HEARTLAND AFRICAIN

Développée par le géographe britannique Halford Mackinder en 1904, le heartland renvoyait à la zone d'Europe centrale et orientale dont le contrôle donnait accès à la domination du monde. Mais aujourd'hui, ce terme se ramène davantage à la partie centrale ou intérieure d'un pays, d'une région ou d'un continent18(*) . Par heartland africain, nous faisons donc ici allusion aux pays du centre et à ceux du sahel en allant vers le Nord Ouest et l'Est de ce continent.

Suivant une analyse faite par Damien Awoumou (2005 :15-20) et Joseph Ntuda E (2004a :38) dans leurs travaux respectifs, «le Golfe de Guinée, et notamment sa composante Afrique centrale, bénéficie d'une position géostratégique qui le met en contact avec toutes les autres sous-régions» d'Afrique. Or, déjà hégémon de l'Afrique centrale, le Cameroun est présenté par le premier analyste ci-dessus mentionné comme le leader potentiel du Golfe de Guinée. Pourtant, poursuit-il, « qui tient le Golfe de Guinée tient l'Afrique ». C'est donc dire l'importance stratégique du Cameroun dans la scène de projection des puissances en Afrique. Aussi pourrait-on au terme d'une analyse extensive s'abuser de dire que [qui tient le Cameroun tient l'Afrique]. En fait, à partir de l'Afrique centrale dominée par le Cameroun, plusieurs opérations sont possibles : l'accès en Afrique de l'ouest et la remontée du sahel, l'accès à la corne de l'Afrique (considérée comme porte d'entrée et poste avancé des terroristes en Afrique) en passant par la Centrafrique, le Tchad et le Soudan ; puis la descente vers les pays des grands lacs dont bon nombre sont membres de la Communauté Economique des Etats de l'Afrique Centrale (CEEAC). Les Etats-Unis y apprécient le «  leadership » du Cameroun et pensent que ce pays est un «partenaire de choix» sur lequel ils peuvent compter dans la sous-région (Zinga, 24 Août 2005 ; Amayena, 17 février 2006), (voir annexe 3). Les atouts internes du Cameroun auxquels s'ajoute sa position géographiquement stratégique lui permettent donc d'offrir des possibilités réelles d'accès au coeur ainsi qu'aux différentes régions du continent.

SECTION 2 : L'APPORT MULTIDIMENSIONNEL DU CAMEROUN A LA PETROSTRATEGIE19(*) AFRICAINE DES ETATS-UNIS

Les Etats-Unis n'ont pas une politique pétrolière visant uniquement le Cameroun. Ceci est d'autant plus vrai que le Cameroun est dit [producteur marginal] de pétrole. Sa production ayant parfois baissé20(*)ces dernières années. Ce qui n'en fait pas moins un producteur. Les perspectives sont encourageantes lorsqu'on sait que le Cameroun est situé dans le Golfe de Guinée ; zone où les découvertes des gisements de offshore ont été les plus prometteuses ces dernières années dans le monde (de Lestrange, Zélinko et Paillard, 2005 :153). Bien plus, comme d'autres pays de cette zone, le Cameroun a relancé depuis quelques années les recherches pétrolières sur son territoire. Le code des investissements a été revu afin d'encourager les investisseurs à s'engager davantage dans ce domaine (Ntuda, 2004). Ainsi compris, le Cameroun, comme d'autres producteurs des sous-régions Afrique centrale et Golfe de Guinée s'inscrit globalement dans les «défis de la sécurité énergétique» définis par les Etats-Unis en 2004 (REDEEU, Mai 2004). La valeur de ce producteur aux yeux des Etats-Unis n'est pas insignifiante. En fait, le rapprochement suscité par les intérêts pétroliers est bien de nature à accoucher d'autres bénéfices. Ainsi, en plus des échanges pétroliers qu'on observe entre les deux Etats, le Cameroun, de par sa position stratégique joue un rôle important dans les échanges sous-régionaux, autant qu'il coopère avec les Etats-Unis au niveau du concert des Nations.

A-L'IMPERATIF AMERICAIN DE DIVERSIFICATION DE SON APPROVISIONNEMENT EN ENERGIE

Les attentats du 11septembre 2001 et l'insécurité sans cesse grandissante du golfe persique ont révélé l'ampleur du risque que les Etats-Unis couraient à ne compter que sur quelques zones d'approvisionnement stratégiques. Aujourd'hui encore plus qu'hier, il devient urgent non seulement d'accroître l'approvisionnement en multipliant les marchés d'importation du pétrole, (REDEEU, Mai 2004) mais aussi de nouer des alliances avec des Etats amis capables de contribuer à la protection des dits marchés ainsi que des routes de transport du pétrole . C'est dans cette logique que s'inscrit le Cameroun dont l'importance tient, non seulement à ses échanges pétroliers avec les Etats-Unis, mais aussi à son rôle vis-à-vis des autres « pétro-Etats »21(*) de la sous-région.

1 - LES ECHANGES PETROLIERS AVEC LE CAMEROUN

Les statistiques concernant les transactions pétrolières sont assez rares. Nos recherches ne nous ont pas permis de savoir avec exactitude le volume d'exploitation journalière du pétrole camerounais, ni exactement quelle quantité est acheminée vers les marchés américains ces trois dernières années. Toutefois, on peut constater au vu des chiffres publiés par l' OCDE et l'INS que, Jusqu'en 2002, les échanges commerciaux entre les Etats-Unis et le Cameroun vont croissants. Il en est ainsi des exportations du pétrole brut du Cameroun vers les Etats-Unis, ainsi qu'en témoigne le tableau ci-après.

Variable

Année

Quantité (en tonne)

Valeur (en F CFA)

2000

107 079

9 764 000 000

2001

122 542

10 950 000 000

2002

532 475

59 518 000 000

Source : Institut National de la Statistique, Annuaire statistique 2004.

La vente du pétrole camerounais à destination des Etats-Unis représente en 2002 les 70 % du total des exportations vers ce pays (Cf. annexe 5). Le marché pétrolier américain occupe le troisième rang derrière l'Espagne et l'Italie (Annuaire statistique du Cameroun, 2004 : 241-243).

Le Cameroun encourage et facilite de nouvelles recherches pétrolières. L'octroi des licences de recherches a permis en octobre 2004, la découverte d'un gisement à Bakingili. De même, la licence octroyée en 2005 par le gouvernement camerounais aux sociétés Total et Pecten Cameroon a permis à ces sociétés de découvrir en juin 2006, un nouveau puit de pétrole dans le gisement offshore de Dissoni, région du Rio Del Rey22(*).

L'exploitation du pétrole de la région de Bakassi sur laquelle le Cameroun a récemment rétabli sa souveraineté n'est pas en reste des projets américains. Lors de leur passage au Cameroun en Août 2004, le sénateur républicain Nebraska. C. Hagel et le général d'armée Charles Wald ont rencontré le Ministre délégué à la présidence de la République en charge de la défense et le ministre des mines, de l'eau et de l'énergie. Face à la presse, ces visiteurs de haut rang révèlent qu'ils visent les objectifs qui intéressent particulièrement leur pays. Ils poursuivent qu'il s'agit entre autres de la lutte contre le terrorisme, du Sida, des problèmes humanitaires, du pétrole et des opportunités d'affaires (Ngogang, 29 Août 2004).

Les Etats-Unis se sont donné pour objectif depuis le 11 septembre 2001, l' «acquisition de nouvelles réserves de pétrole destinées à répondre à la hausse de la demande intérieure pour les 25 ans à venir» (Harbulot, 2003:63). Ils s'intéressent aux resources naturelles de Bakassi ainsi qu'en témoigne cette citation de David Applefield: «American oil executives and diplomats are intensely interested in the 250 square-mile Bakassi peninsula and its offshore oil and gas deposits».23(*)

D'une superficie d'environ 1000 km2, Bakassi est dit potentiellement riche en pétrole et en ressources halieutiques. Les recherches actuelles font état d'une réserve estimée à environ 215 millions de barils de pétrole et 208 milliards de m3 de gaz naturel.24(*)

Le lundi 30 octobre 2006, l'Ambassadeur des Etats-Unis au Cameroun, Niels Marquardt est reçu en audience par le Ministre de l'énergie et de l'eau. Au menu de leur entretien, on pouvait retenir les nouveaux projets d'investissement de l'AES /SONEL et des échanges à propos de Bakassi.25(*)L'exploitation du gaz naturel est aussi envisagée par les américains.

2-LE CAMEROUN ET LES «PETRO-ETATS» D'AFRIQUE SUBSAHARIENNE

Le terme « pétro-Etats » est utilisé pour désigner les pays d'Afrique subsaharienne dont le budget dépend en grande partie du pétrole. A l'exception du Cameroun dont les recettes pétrolières ne contribuent qu'à concurrence de 4,9 % au PIB26(*), tous les autres pays membres de la commission du Golfe de Guinée dépendent essentiellement du pétrole (Colomban, Lotte et Dorgeret, 2005), (Cf. annexe 4).

Les sociétés pétrolières américaines, à l'instar de Texaco, d'Exxon Mobil et de Chevron ont d'énormes intérêts dans ces pays. Aussi ont-elles besoin, par le biais de leur gouvernement, d'un leader qui puisse contribuer à la défense de leurs investissements dans la sous-région. Abuja a été au départ sollicité par Washington «pour faire office de gendarme dans la sous-région». De nombreux arguments pesaient en sa faveur en tant que leader naturel (puissance économique, démographique et politique sur le continent, grandeur territoriale et influence régionale). Mais ce géant est en perte de fiabilité à cause de la récurrence des problèmes tels que la montée du fondamentalisme religieux, la mafia, les blanchiments des capitaux, le trafic régulier des stupéfiants, prises d'otages et sabotages quotidiens des installations pétrolières dans le Delta du Niger. L'Angola qui aurait pu assurer le leadership de substitution est un pays en ruine et profondément miné, car traversé par 27 années de guerre civile (Awoumou, 2005: 15-20).

Les autres Etats ne semblent pas assez crédibles pour permettre aux Etats-Unis de défendre leurs intérêts dans la zone. Cette observation semble d'autant plus vraie que le Gabon abrite déjà une base militaire française, le Congo Brazzaville n'a pas achevé sa reconstruction après plusieurs années de guerre civile. La Guinée Equatoriale est menacée d'instabilité, en plus d'être trop proche des côtes de Sao Tomé (Chouala, 2005).Toute analyse faite, le Cameroun se retrouve en tête de liste, du moins parmi ceux qui présentent le moins de risques. Soit qu'il partage le leadership avec le Nigeria et l'Angola suivant le schéma qu'Awoumou (2005 :15-20) appelle «l'axe Abuja-Yaoundé-Louanda » ; ou avec le Tchad suivant l'analyse de Joseph Ntuda .E (2004a :38) ; soit qu'il le partage directement avec les Etats-Unis (Chouala, 2005). Le ballet diplomatique observé ces dernières années entre les deux pays semble conforter cette logique.27(*)A l'observation, on constate que le Cameroun figure sur tous les schémas. C'est donc dire que sa position fait l'unanimité.

Au demeurant, cette position sert actuellement à l'exploitation et l'acheminement du pétrole tchadien jusqu'au terminal de Kribi où il est embarqué en direction du marché mondial. Cette exploitation est assurée grâce à un pipeline de 1070 km de long. Il traverse le territoire camerounais sur une longueur de 890 km et assure l'acheminement de 225 000 barils de pétrole tchadien par jour (Tsafack, 2003 :17). Ce pipeline qui constitue l'un des deux plus grands axes de la pensée stratégique américaine en Afrique (Abramovici 2004 : 14-15), contribue par ailleurs au renforcement de la coopération tchado-camerounaise et à l'encouragement des investissements américains au Cameroun.

B - L'EXPLOITATION DES RESSOURCES ET LA STRATEGIE DE L'EQUILIBRE IMPERIAL

Au sortir de la Deuxième Guerre mondiale, les Etats-Unis se sentent investir d'une nouvelle mission, celle de tenir les reines du monde. La puissance comme objectif de la politique africaine des Etats-Unis n'est donc pas nouveau. L'intérêt de l'Afrique aux yeux des Etats-Unis est bien souvent passé par cet impératif (Whitaker, 1981).

Aujourd'hui, face aux nouvelles priorités, les Etats-Unis veulent contrôler les réserves stratégiques du monde (Harbulot, 2003 : 63), érigées en «intérêt vital» pour la sécurité nationale (REDEEU, 2004). Leur souci étant de diminuer l'influence des puissances historiques, et bénéficier du soutien des Etats de la sous-région. C'est dans cette logique que s'inscrit le renforcement de la coopération pétrolière avec le Cameroun.

1 - UNE ZONE HISTORIQUEMENT ACQUISE AUX EX-PUISSANCES COLONIALES

Les régions Golfe de Guinée et Afrique centrale sont historiquement dominées par les ex-puissances coloniales. Il s'agit notamment de l'Espagne, de la Belgique, de la Grande Bretagne et de la France ; puissance qui ont bénéficié de la colonisation pour asseoir leur domination dans la région. L'influence de ces deux dernières a en partie été soutenue par leurs grandes Compagnies pétrolières. C'est le cas de la Compagnie Britannique Shell qui a investi dans plusieurs pays de la sous-région. L'ex compagnie française Elf était considérée comme l'un des relais de l'influence de la France dans la sous-région.

Dès leurs indépendances, la France, par la personne du Général De Gaulle fait signer aux jeunes Etats africains encore immatures des accords de coopération multiformes qui lui permettent de pérenniser sa présence en Afrique en toute quiétude28(*). Les accords de coopération militaire et ceux portant sur les matières premières et les ressources stratégiques sont considérés comme les leviers de cette stratégie. Ces zones d'influences françaises, généralement appelées «pré carré», lui permettent de défendre ses intérêts stratégiques dans la sous-région comme ailleurs, et généralement en bonne intelligence avec l'élite politique en place.

Au Cameroun par exemple où ce pré carré est menacé par l'implantation grandissante d'autres puissances dont les Etats-Unis, la France a toujours gardé une certaine influence (GAFC, 2003). En effet, jusqu'en 2003, la France était le premier investisseur étranger au Cameroun, ainsi que son 2e client dans la zone franc après l'Italie. On compte à cette date près de 160 filiales françaises et environ 200 entreprises privées sur le sol camerounais. Ces structures emploient près de 30 000 personnes au Cameroun (GAFC, 2003).

2 - LE SOUTIEN DU CAMEROUN AU NIVEAU DES INSTANCES INTERNATIONALES

Le renforcement de la coopération Américano-camerounaise permet à ces deux acteurs de se soutenir mutuellement au niveau du concert des nations. Nous ne soulignerons ici que le soutien apporté par le Cameroun aux Etats-Unis. Les deux Etats « travaillent ensembles », précisait Colin Powell en 2003 (Essomba, 24 mars 2003). Mention doit être faite de ce que chaque Etat a droit à une voix lors des votes au sein des organisations intergouvernementales telles l'UA, l'OMC , l'OMS, l'Assemblée Générale et le Conseil de Sécurité de l'ONU... D'où, le recours aux alliances et aux soutiens ; lesquels sont nécessaires lorsque l'on veut parvenir au vote d'une résolution favorable. C'est cela qui a en partie justifié le renforcement du rapprochement américano-camerounais à partir de l'année 2002.

Sur le plan global, il ne nous semble pas encombrant de rappeler que les deux Etats ont renoué leur collaboration au milieu des années 90, à l'occasion de l'élection du nouveau Secrétaire Général de l'ONU. Ce renouveau tient donc en fait au soutien apporté par le Cameroun à l'élection de Kofi Annan, candidat appuyé aussi par les Etats-Unis29(*). Mais davantage, l'importance du Cameroun aux yeux des Etats-Unis acquiert une nouvelle dimension à partir du mois de Janvier 2002, lorsque le Cameroun accède au rang des pays membres non permanents du Conseil de Sécurité de l'ONU pour 2 ans renouvelables. Au plus fort des discussions au sujet de l'engagement des forces onusiennes en Irak, les Etats-Unis ont dû solliciter le soutien du Cameroun. C'était notamment au moment où le Cameroun devait présider le Conseil de Sécurité de l'ONU en Octobre 2002. C'est dans cet ordre d'idée que s'inscrit la déclaration de Colin Powell qui suit: «Relation between our two countries, I think are excellent (...) we'll be working with Cameroon in the Security Council as we move forward (...) »30(*). Le soutien apporté par le Cameroun aux Etats-Unis justifie la reconnaissance qui suit: «the United States and Cameroon work together in the United Nations and a number of a multilateral organisation. While in the UN Security Council in 2002, Cameroon worked closely with the United States on a number of initiatives»31(*). C'est encore l'apport du Cameroun qui justifie le message de remerciement que le Président George Bush adresse le 19 mai 2003 à son homologue Paul Biya en ces termes «  Au nom du peuple américain, je vous prie d'accepter nos voeux les meilleurs en ce jour spécial, ainsi que l'expression de notre gratitude pour le soutien que vous-même et le république du Cameroun avez apporté aux Etats-Unis tout au long de cette année décisive »32(*). Les deux Etats coopèrent aussi au sein de nombreuses autres organisations multilatérales.

Sur le plan régional et sous-régional, les deux Etats travaillent sur des sujets d'intérêts communs. Les Etats-Unis considèrent le Cameroun comme «un partenaire de choix dans la lutte contre l'insécurité dans la sous-région» (Zinga, 24 août 2005). Ils apprécient le leadership du Cameroun dans la sous-région et encouragent ses engagements en faveur des missions de sécurité et de maintien de la paix (Amayena, 17 février 2006). Les deux Etats travaillent ensembles au niveau des institutions telles que la CEMAC et le COPAX (conseil de paix et de sécurité de la CEEAC). Par ailleurs, comme nous l'avons mentionné plus haut, le Cameroun, en sa qualité de membre de la commission du Golfe de Guinée et potentiel leader peut être d'un précieux soutien aux intérêts Américains dans la sous-région.

CONCLUSION

Au regard de ce qui précède, il ressort que les Etats-Unis, bien qu'étant hyperpuissants, ont bien besoin du Cameroun pour accomplir certains de leurs objectifs géostratégiques. Ces arguments qui militent en faveur de l'interdépendance entre le Cameroun et les Etats-Unis, ne signifient nullement aliénation de l'un vis-à-vis de l'autre. Il ne s'agit en réalité que d'une fibre, mettant en relief l'enchevêtrement des liens observés depuis quelques années entre acteurs du jeu international. La dépendance des Etats-Unis vis-à-vis du Cameroun n'exclut donc pas d'autres relations de même nature à travers le monde, tout comme l'interdépendance n'épuise pas la souveraineté des Etats. L'intérêt des uns vis-à-vis des autres accroît leur dépendance ainsi qu'en témoigne le renforcement de la coopération miliaire entre le Cameroun et les Etats-Unis.

CHAPITRE 2

LE CAMEROUN DANS LA

STRATEGIE MILITAIRE DES ETATS-UNIS

Ainsi qu'en témoigne la récurrence des visites des militaires américains de haut rang au Cameroun, les questions militaires semblent occuper une place croissante sur l'agenda des deux acteurs. Entre 2004 et 2006, on peut noter environ sept visites des personnalités américaines chargées des problèmes de sécurité au Cameroun. Nous aurons l'occasion de les mentionner plus amplement au cours des développements. Mais en attendant, l'on peut s'interroger sur l'inscription du Cameroun dans la nouvelle stratégie militaire des Etats-Unis. En effet, quelle est la place, voire le rôle que peut jouer le Cameroun dans la stratégie militaire des Etats-Unis en Afrique et plus précisément dans les sous-régions Afrique centrale et Golfe de Guinée ?

En l'état actuel de cette coopération, les Etats-Unis ne semblent pas avoir une stratégie militaire spécifiquement camerounaise. La présence militaire américaine au Cameroun s'inscrirait dans la nouvelle stratégie africaine des Etats-Unis, ainsi que l'a soutenu le colonel Metogo (entretien, octobre 2006). Ceci pourrait laisser entendre que les Etats-Unis ont un certain nombre d'intérêts au Cameroun. Bien plus, au-delà de cet aspect global, l'émergence du Golfe de Guinée comme nouvel [eldorado] pétrolier (Mvomo Ela, 2005 :7-11 ; Awoumou, 2005 :15-20 ; Ntuda, 2004b : 44-47), en corrélation avec un certain nombre de problèmes semble susciter la révision de la géopolitique sous-régionale. Situation susceptible de rehausser la valeur géopolitique et géostratégique du Cameroun. Dans ce sens, le colonel Abba (entretien, octobre 2006) pense que «les Etats-Unis considérant que le Cameroun peut jouer un grand rôle pour la sécurité de la sous-région». Avis que partage le capitaine de vaisseau Tsanga (entretien, octobre 2006), ainsi que d'autres autorités militaires camerounaises.

SECTION 1 : LA POLITIQUE AMERICAINE DE SECURITE EN AFRIQUE : UNE ERE NOUVELLE

La question de sécurité n'a jamais occupé une place aussi abondante sur l'agenda des politiques américains que ces dernières années. Certes, par le passé, du moins avant l'effondrement de l'empire soviétique, les Etats-Unis connaissaient une présence minimale en Afrique. (Schraeder, 1994 :1). Celle-ci se limitait à quelques intérêts d'importance mineure tels que le maintien de l'influence américaine dans un climat dominé par l'affrontement est-ouest (guerre froide), la communication au monde des valeurs américaines (démocratie libérale, droits de l'homme, technologie, la puissance...) (Whitaker, 1981 : 189). Cette présence se manifestait aussi par une certaine coopération militaire marquée par une sous-traitance stratégique dont l'objectif fut l'endiguement du communisme à travers le monde. Situation qui explique le commerce d'armes que les Etats-Unis (quoique relativement timide) entretenaient avec certains pays africains, comme tel fut le cas avec le Cameroun dans les années 60 et 70 (Duignan et Gann, 1990 :382).

Aujourd'hui par contre, l'impératif de diversification de l'approvisionnement en énergie (REDEEU, 2004), la mondialisation du terrorisme (Colomban, Lotte et Dorgeret, octobre 2005), les exigences de sécurité dans le monde en général et dans le Golfe de Guinée en particulier (James, 2006) ont amené les Etats-Unis à réviser leur géostratégie africaine en général. Le Cameroun se trouve au centre de la stratégie de sécurité pétrolière sous-régionale en même temps qu'il est un  allié de choix dans la croisade américaine contre le terrorisme dans cette sous-région et même en Afrique33(*).

A-LA SECURITE PETROLIERE

Le Cameroun faut-il le rappeler, est dans une sous-région où les Etats-Unis comptent importer 25 % de leur pétrole d'ici 2015, contre 15 % actuellement (REDEEU, mai 2004). Bénéficiant des atouts susmentionnés, le Cameroun peut être d'un grand apport aussi bien au niveau de la sécurité des infrastructures continentales que maritimes.

1- LA SECURISATION DES INFRASTRUCTURES PETROLIERES CONTINENTALES

Par infrastructures pétrolières continentales, nous faisons allusion à toute structure ou édifice érigé sur terre, en vue de la prospection, de l'exploitation ou de l'acheminement du pétrole. Eu égard à certains problèmes rencontrés en Amérique Latine et parfois en Afrique, on peut étendre ce besoin de protection aux bureaux du personnel exploitant pétrolier et même à leur propre personne.

Le pipeline Tchad-Cameroun est un gigantesque investissement qui a coûté environ 3,5 milliards de dollars ; soit un peu plus de 2 500 milliards de francs CFA (Tsafack, 2003 : 17). Il permet d'acheminer le pétrole exploité dans 300 puits situés à Doba (Sud du Tchad), jusqu'au terminal de Kribi, situé au sud du Cameroun. Cet investissement qui traverse le Cameroun sur une longueur de 890 km est assurément l'un des plus coûteux d'Afrique subsaharienne. (Tsafack 2003 :17). C'est donc à juste titre qu'il mérite d'être protégé. Le pipeline est exploité par plusieurs sociétés dont la société malaisienne Pétronas. Mais le gros du pourcentage revient aux géants américains Exxon-Mobil Corporation (40 %) et Chevron Corporation (25 %).

Les sabotages perpétrés sur les pipelines à travers le monde (Ladouceur, 2003) ont obligé les sociétés pétrolières à procéder à la militarisation de ces corridors, généralement appuyées par le « pouvoir militaire des Etats-Unis » (Ladouceur, 2003). Les Etats-Unis disent vouloir investir au Cameroun, c'est pour cette raison qu'ils ont besoin de la paix, de la sécurité et de la stabilité. D'où leur appui à la sécurisation de l'oléoduc Tchad-Cameroun34(*). Abramovici (2004 :14-15) soutient que « deux voies stratégiques sont au centre de la pensée militaire américaine en Afrique : « à l'ouest, l'oléoduc Tchad-Cameroun, à l'est l'oléoduc Higleig-port Soudan ». Ceci justifie davantage l'intérêt des Etats-Unis à soutenir la protection de ces investissements.

Lors des travaux de construction du pipeline Tchad-Cameroun, c'est une société militaire privée (SMP) qui était chargée d'en assurer la sécurité. Il s'agissait de la SMP française Géos qui le faisait pour le compte des pétroliers américains35(*). Cette société  compte plus d'une centaine de personnes, toutes anciens membres de la DGSE (Direction Générale de la sécurité Extérieure) française.

Les actes terroristes perpétrés contre les pipelines déjà opérationnels sont divers. Il arrive que les terroristes incendient le corridor en utilisant des bombes. Ils peuvent aussi utiliser la technique du «bunkering» qui consiste à cibler les points névralgiques du pipeline, Siphonner ensuite le tuyau, y extraire du pétrole, puis revendre sur le marché noir (CEREMS, juillet 2006). Situations courantes dans le Delta du Niger (sud du Nigeria) depuis quelques années. C'est pour ces raisons que le pipeline nécessite une protection rapprochée, généralement assurée par les forces gouvernementales, parfois appuyées par l'extérieur. En ce sens, le pipeline Tchad-Cameroun est assuré dans le cadre de la coopération militaire Américano-camerounaise par un bataillon d'intervention rapide, bénéficiant de l'appui technique des partenaires extérieurs (entretien, capitaine Mabally, octobre 2006).

Par ailleurs, la protection continentale s'étend aussi sur les infrastructures telles que les bureaux, les raffineries, les stations services et même le personnel36(*). Le Nigeria est devenu le théâtre quotidien des prises d'otages (qui servent d'objet de chantage contre rançon) et des sabotages des infrastructures pétrolières à cause de la faiblesse de ses moyens de sécurité. Les Etats-Unis sont en train de procéder, en collaboration avec les forces locales à la sécurisation de l'ensemble de la région. C'est dans cet ordre d'idée qu'un responsable du Département d'Etat rapporte : « Les entreprises américaines prolifèrent dans la région et nous avons besoin de protéger leurs intérêts et ceux de nos nombreux ressortissants qui s'y installent progressivement des attaques terroristes qui pourraient subvenir » (Ngogang, 5 mars 2004).

2- LA SECURITE MARITIME

62 % des échanges pétroliers du monde transitent par les mers et océans. (Lestrange, Paillard, Zélenko, 2005 :210). Or il se pose un véritable problème de sécurité dans les eaux du Golfe de Guinée (Ntuda, 2004 :44-47). Trafics de tout genre, piraterie, prise d'otages, sabotage des plates-formes pétrolières, non délimitation des espaces maritimes...sont autant de maux qui minent la sous-région. Il devient nécessaire, ainsi que l'a souligné le Général James (2006), d'aider les Etats de la zone à assurer leur sécurité. C'est dans cette optique qu'après avoir honoré l'invitation du Président Bush en 2002, le Cameroun a pris part à la conférence de Naples37(*) qui s'est tenue en Italie au cours du mois d'Octobre 2004 (Awoumou, 2005 :15-20).

En raison de ses atouts susmentionnés, le Cameroun est en passe de jouer un rôle encore plus soutenu dans ce sens. D'où la visite de certains officiers de l'armée américaine visant à s'assurer de l'état de protection de nos ports, aéroports et de nos côtes (entretien, colonel Abba, octobre 2006). Etant donné qu'aucun navire étranger n'a le droit d'accéder aux eaux territoriales d'un autre Etat sans autorisation, la coopération de l'Etat camerounais via la marine nationale permet aux Etats-Unis de sécuriser leurs intérêts dans le domaine maritime de ce pays. Cette coopération leur permet également de bénéficier de l'appui des forces maritimes camerounaises (Entretien, capitaine Mabally, octobre 2006). Le Cameroun a pris une part active à la mise en oeuvre en 2004 d'une brigade régionale en attente de l'Afrique Centrale (Njako 2006 : 32). Cette initiative qui a pour elle de maintenir la paix et de prévenir les conflits dans la zone est saluée et encouragée par les Etats-Unis qui comptent bénéficier du leadership du Cameroun dans la sous-région afin d'assurer la sécurité de leurs intérêts. C'est ce qui ressort des propos du sénateur James Inhofe qui, en visite au Cameroun au mois d'octobre 2005, se confie à la presse. En effet, le sénateur de l'Etat américain d'Oklahoma précise que sa visite rentre dans le cadre d'une « mission du comité des services de la marine, services que les Etats- Unis veulent développer en Afrique en comptant sur le leadership du Cameroun » (Amayena, 10 octobre 2005). Le Cameroun semble donc avoir un rôle important à jouer dans la sécurisation des infrastructures pétrolières maritimes.

Ce besoin de sécurité devra s'étendre à la protection des routes de transport du pétrole. Il s'agit des chemins maritimes empruntés par les tankers depuis l'embarcation jusqu'à leur destination. Ceci se fait en prévision des activités des pirates qui attaquent généralement les cargaisons (CEREMS juillet 2006 :6). Les Etats-Unis ont l'habitude de faire appel aux forces locales chargées d'appuyer leurs propres hommes en matière de sécurité maritime. C'est dans cette logique qu'ils ont disséminé près d'un million d'hommes au Moyen-orient. Ce n'est que quand la situation s'aggrave qu'ils prennent d'autres mesures38(*). Cette perspective comparative nous permet d'envisager un scénario sinon pareil, du moins similaire dans le Golfe de Guinée.

Relevons enfin que c'est dans le cadre de cette sécurité maritime que du 6 au 9 février 2005, un navire de guerre américain a navigué dans les eaux camerounaises jusqu'au port de Douala. Sous le commandement du Colonel Barry Gronin, il s'agissait de la USS Emory S. Land. Ce gigantesque navire de guerre avait à son bord 1400 marines. Selon son commandant, l'objectif de cette expédition était d'apporter une « assistance technique à la marine Camerounaise dans le cadre de la coopération et des relations militaires qui existent entre les deux pays » (Massoussi, 10 février 2005).

B-LE CAMEROUN DANS LA LUTTE AMERICAINE CONTRE LE TERRORISME

Le terrorisme est devenu un problème mondial (REDEEU, 2002). La menace terroriste plane sur tous les continents et sur tous les Etats du monde (CEREMS, juillet 2006). L'Afrique n'en est pas épargnée. Bien plus, elle connaît un lot quotidien de problèmes qui peuvent faciliter l'implantation des terroristes. Au nombre de ces maux, on peut citer les maladies chroniques, la pauvreté galopante, le fondamentalisme religieux, le dysfonctionnement des Etats, la corruption, le trafic d'enfants, de femmes, d'organes , de drogue , le blanchiment d'argent, faiblesse du contrôle policer et frontalier, circulation mafieuse des capitaux...(Mair, 2003 ; Esposti , 2004 :139). Cette menace est d'autant plus sérieuse que certains pensent que les raisons qui auraient justifié l'installation du réseau terroriste en Asie sont réunies en Afrique. D'ailleurs, le réseau terroriste Al Qaïda semble avoir déjà implanté une de ses antennes en Afrique. Se revendiquant branche Al Qaïda du Maghreb, le réseau algérien dit Groupe Salafiste pour la Prédication et le Combat (GSPC) sème depuis quelques années la terreur dans certains pays de la région, notamment au Maroc et en Algérie. D'où le projet de création d'un centre autonome de commandement africain des forces américaines stationnées sur ce continent (US-AFRICOM). Devant être opérationnel en 2008, le Quartier Général de cette force se situerait entre les sous-régions Afrique centrale et Golfe de Guinée.

C'est dans cette lancée que s'inscrit la lutte américaine contre le terrorisme au Cameroun. Colin Powell n'a-t-il pas déclaré que le Cameroun est un partenaire de choix dans la croisade antiterroriste ? Avant de présenter le Cameroun dans la lutte contre le terrorisme, il convient d'abord de s'appesantir sur le lien qui existe entre le terrorisme et les raisons officielles du renforcement de la présence américaine au Cameroun.

1- TERRORISME ET RAISONS OFFICIELLES DU RENFORCEMENT DE LA PRESENCE AMERICAINE AU CAMEROUN

Comme nous l'avons mentionné plus haut, les Etats-Unis soutiennent qu'ils sont essentiellement au Cameroun pour promouvoir la démocratie, les droits de l'Homme, la bonne gouvernance, la lutte contre le SIDA et le développement. Soit ! Mais comment comprendre alors ce lien que le Président George Bush a établi si clairement en 2002 entre certains maux et le terrorisme ? En effet, dans sa nouvelle stratégie de sécurité nationale publiée en septembre 2002, le Président américain ressort un rapport assez logique entre la pauvreté, mal gouvernance, trafics, SIDA et terrorisme. Ces propos on été revus et codifiés par des experts dans «  la stratégie de sécurité nationale des Etats-Unis : une ère nouvelle » publiée dans la Revue Electronique du Département d'Etat des Etats-Unis en Décembre 2002.

-Démocratie, bonne gouvernance et terrorisme.

La bonne gouvernance suppose notamment ici le respect des droits et libertés de l'Homme et une gestion saine et transparente des ressources publiques. Alan Larson mentionne dans la REDEEU (Décembre, 2002 :19-23) que les terroristes «  financent leurs opérations par le biais d'activités criminelles courantes, comme la fraude, l'extorsion, les enlèvements et la corruption». Ainsi compris, la lutte contre la corruption et le détournement des deniers publics tout comme la promotion de la démocratie viseraient d'abord à lutter contre le terrorisme, et donc à protéger les intérêts américains. Cet idéal n'est pas totalement nouveau ; car quelques années auparavant, il avait déjà été soutenu par l'ex-président Bill Clinton en ces termes: «La défense de la liberté et la promotion de la démocratie dans le monde entier ne sont pas seulement le reflet de nos valeurs les plus profondes, elles sont aussi d'une importance vitale pour nos intérêts nationaux» (Ebolo, 1998).

- Pauvreté, trafics et terrorisme.

«L'Afrique occupe une place de premier plan dans la nouvelle stratégie de sécurité nationale» est un article que Fisher Thompson a publié en décembre 2002 dans La Revue Electronique du Département d'Etat des Etats-Unis. Il y cite les propos du Président George Bush tenus dans son rapport de septembre 2002. En effet, [souligne le Président des Etats-Unis], «La pauvreté ne transforme pas les pauvres en terroristes et en meurtriers. Cependant, la pauvreté, la faiblesse des institutions et la corruption peuvent rendre les Etats faibles vulnérables à l'égard des réseaux terroristes et des Cartels de la drogue se trouvant sur leur territoire». Or, les Etats-Unis ont fait de la lutte contre le terrorisme leur cheval de bataille. L'on comprend par ricochet pourquoi ils s'engagent à lutter contre la pauvreté en Afrique et donc au Cameroun. Blaise Pascal Talla quant à lui, soutient dans Jeune Afrique Economie (Novembre 2004 :108) que «la pauvreté qui fait le lit de la désespérance et de la colère fournit des recrues potentielles aux organisations terroristes ». C'est dans cette logique qu'en 2002, l' AOPIG propose après étude que les Etats-Unis oeuvrent en faveur de l'annulation de la dette des pays les plus pauvres (Servant, Janvier 2003). Ces arguments témoignent à suffisance de l'intérêt qu'ont les Etats-Unis à lutter contre la pauvreté au Cameroun.

-Sida et terrorisme.

La lutte contre le Sida participe de la stratégie américaine de lutte contre le terrorisme. Dans un article qu'il a consacré à la «place de la coopération internationale dans la stratégie de sécurité nationale », Richard Armitage (2002 :10) soutient que les Etats-Unis ont augmenté leur aide dans le cadre de la lutte contre le Sida pour éviter  l'impact que ce fléau risque d'avoir sur les pays et leurs populations. Une analyse similaire est faite par le général James Jones (2006) dans le rapport qu'il présentait devant le comité des services armés du sénat le 07 mars 2006. Le Sida serait donc d'après cette lecture une cause éventuelle du terrorisme. Blaise Pascal Talla, dans Jeune Afrique Economie (Novembre 2004 :109) leur emboîte le pas lorsqu'il relève le lien qu'il peut avoir entre le Sida et le terrorisme. En fait, La désespérance qui anime le malade du Sida qui s'estime condamné à mort est bien de nature à justifier son adhésion aux organisations de malfaiteurs. Ainsi compris, le Sida serait favorable aux réseaux terroristes dans la mesure où il leur fournit d'éventuelles recrues.

2 - LE CAMEROUN ET LA LUTTE CONTRE LE TERRORISME

Hormis la lutte interne contre le terrorisme, le Cameroun, de par sa position est en passe de servir de tremplin dans la lutte contre le terrorisme en Afrique.

Les liens que nous avons établis plus haut entre le terrorisme et la stratégie de la [soft power] américaine au Cameroun participent par ricocher de la lutte contre ce fléau. Bien entendu que le Cameroun brille par sa paix et sa stabilité. Mais il compte quand même environ 22 % de musulmans. Cette frange de la population n'est pas offensive. Mais on sait que les Américains ont l'habitude de se méfier des musulmans à travers le monde ; car il va sans dire que la majorité des terroristes se recrutent généralement dans les pays musulmans et arabes. Le scénario semble assez simpliste au Cameroun. C'est justement pour canaliser leur conscience afin d'éviter à ces populations ce genre de dérive que l'Ambassade américaine organise souvent à leur intention des séminaires et vidéoconférences portant sur des thèmes tels que la liberté et la tolérance religieuse39(*).

Les Etats-Unis ont fait don au Cameroun d'un important lot de matériels destiné à assurer la sécurité aéroportuaire40(*). C'est également dans le cadre de la lutte conte le terrorisme que le ministre des transports Dakolé Daissala a installé le 25 septembre 2006 une commission de sécurité aéronautique. Profitant ainsi de l'occasion à lui offerte, Sama Juma, Directeur Général de l'aviation civile camerounaise souligne que «terrorists have divided differents means of getting at the aviation field .A recent example was the use of liquid explosives in Britain. All these have to be checked to make air transport the safest means of transportation» (Lukong, 26 septembre 2006).

Le Cameroun peut aussi servir de tremplin dans la lutte contre le terrorisme international. Le Général William E. Ward n'a-t-il pas dit que les Etats-Unis veulent renforcer le rôle du Cameroun aux fins d'assurer la sécurité de la sous-région ? (Ndjabun, 21 juillet 2006). D'une part, le Cameroun est entouré d'Etats peu stables (Nigeria, Tchad, République Centrafricaine...) Ensuite, les Etats-Unis nourrissent un grand projet ; celui d'atteindre la Somalie et le Djibouti situés à l'est (Awoumou, 2005 :15-20), en maîtrisant le bassin du Niger et le Sahel en général, sans oublier la région des grands lacs dominée par l'insécurité. Pour parvenir à leurs objectifs, les Etats-Unis ont institué en 2002 l'opération pan sahel de lutte contre le terrorisme. En 2004 le Nigeria et le Tchad ont été joints à cette initiative devenue trans-sahélienne de lutte contre le terrorisme (Servant, janvier 2003). Or ces deux derniers pays partagent de très longues frontières avec le Cameroun. Qui pis est, une partie du Cameroun septentrional se situe dans cette région du Sahel.

Le scénario consiste donc, sinon à assurer la sécurité de l'ensemble de ces régions, du moins à éviter que le fondamentalisme qui a déjà atteint le Tchad ne vienne aggraver la situation du Golfe de Guinée. En outre, les Etats-Unis se soucient de la sécurité de l'Afrique centrale. Or quand ils parlent de l'Afrique centrale, ils font généralement allusion aux 11 pays membres de la CEEAC dont le Cameroun serait à leurs yeux le leader. A l'évidence, le Cameroun qui se trouve au carrefour de ces régions jouit, en plus de ses atouts internes, d'une position stratégique. Au regard de l'évolution actuelle de la situation, le Cameroun semble devoir être d'un précieux apport à ces projets géostratégiques, à en croire l'analyse personnelle de certains officiers camerounais.41(*) Au reste, l'autorisation accordée aux forces américaines de survoler le territoire, de se poser et de se ravitailler au niveau des aéroports camerounais témoigne bien du soutien apporté par le Cameroun dans la lutte contre le terrorisme en Afrique (entretien, Colonel Abba et Colonel Mélly, octobre et novembre 2006).

SECTION2 : LE CAMEROUN DANS LA STRATEGIE AMERICAINE DE

CONSOMMATION MILITAIRE

 Symboliquement ébranlés  par les attentats du 11 Septembre 2001, les Etats-Unis se sont jetés dans une stratégie de sustentation de leur hyperpuissance. Cet impératif passe entre autres par ce que Christian Harbulot (2003 : 63) appelle la «volonté de puissance américaine». La Coopération militaire qu'ils entretiennent avec le Cameroun s'inscrit en partie dans la stratégie globale de maintien et de pérennisation de l'hyperpuissance américaine. De ce fait, elle passe par l'orientation du Cameroun vers le modèle américain de consommation militaire ; laquelle n'est pas sans effets.

A-L'ORIENTATION DU CAMEROUN VERS LE MODELE AMERICAIN DE CONSOMMATION MILITAIRE

La coopération militaire américano-camerounaise aujourd'hui encore fragile ne s'inscrit pas que dans la logique pétrolière via la lutte contre le terrorisme international. Elle se veut également culturelle et s'annonce riche d'affaires ainsi qu'en témoignage le ballet diplomatique des officiels américains au Cameroun. Les américains ne cachent pas leurs intentions. Ils disent vouloir investir, faire des affaires au Cameroun.

En plus de la conquête d'un marché potentiel en Afrique centrale, cette coopération américano-camerounaise permettrait aux Etats-Unis d'étendre la culture militaire américaine.

1 - UN MARCHE POTENTIEL ?

La Coopération militaire entre le Cameroun et les Etats-Unis permet à ces derniers de vendre du matériel militaire au premier. Cet aspect n'est pas nouveau ; car dans les décennies 60 et 70, les factures des armes payées par le Cameroun n'étaient pas négligeables. En effet, entre 1966 et 1975, la valeur des armes importées par le Cameroun aux Etats-Unis s'élève à 3 000 000 de dollars. Entre 1975 et 1980, elle est de 20 000 000 de dollars (Duignan et Gann 1990 : 382).

En visite au Cameroun en Août 2004, le Sénateur républicain N.Chuck Hagel et le général d'armée Charles Wald confient que leur présence porte sur les domaines qui intéressent particulièrement leur pays. Il s'agit entre autres du pétrole, des opportunités d'affaires, de la lutte contre le terrorisme (Ngogang, 29 Août 2004). En dehors du commerce pure et simple, la lutte contre le terrorisme et la protection des intérêts pétroliers dans le Golfe de Guinée nécessitent des moyens généralement matériels. Moyens qui manquent parfois cruellement aux Etats pauvres de la sous-région. Le scénario consiste donc à mettre d' abord en oeuvre des programmes d'aide, d'assistance et d'appui aux opérations de maintien de la paix et de prévention des conflits tels, l'ACRI devenu ACOTA, l'EDA etc. Ensuite, le gouvernement et parfois les personnes ou sociétés privées mettent en oeuvre d'autres programmes chargés de la vente du matériel militaire à l'extérieur.

Ainsi, la Defense Security Cooperation Agency (DSCA) utilise la Foreign Military Financing (FMF) pour accorder des prêts à faible taux d'intérêt aux gouvernements étrangers afin qu'ils achètent les armes américaines. C'est dans cette optique que s'insèrent les programmes Foreign Military Sales (FMS) et la United States Private Sales (USPS) destinés à la vente des armes à l'étranger (Volman, 2005).42(*)

Dans le cadre de la Foreign Military Sales, le Cameroun a déboursé en 2005 une somme d'environ 150 000 dollars, soit a peu près 95 millions de francs CFA. Sa facture en 2006 est estimée à une somme similaire. Quant aux frais déboursés dans le cadre de la US Private Sales, ils s'élèvent en 2005 à 90 000 dollars, soit environ 57 millions de francs CFA (Volman, 2005). Ces sommes relativement faibles sont censées lui permettre d'acquérir du matériel militaire américain.

Vraisemblablement, le meilleur reste à venir ; car, l'Afrique dont le Cameroun restent pour les Etats-Unis « un vaste marché où ils n'ont pas encore réellement investi » (Nghermani, 2006).

2 - UNE STRATEGIE D'EXTENSION DE LA CULTURE AMERICAINE ?

A en croire Joseph Vincent Ntuda .E, la domination est davantage culturelle aujourd'hui. Elle s'inscrit dans la « dialectique des intelligences »43(*). Les Etats-Unis ont mis en oeuvre une stratégie dite de « shaping » qui consiste à « façonner l'environnement international par la diffusion des normes, des valeurs et des standards américains» (Nghermani, 2006). Les programmes militaires des Etats-Unis en Afrique visent selon Abramovici (2004 : 14-15)  «... à moderniser et à adapter aux normes américaines, les forces armées locales».

Le Cameroun n'échappe donc pas à cette logique, puisqu'il est inscrit dans certains programmes de formation Américaine. Qui plus est, les Etats-Unis ont crée à l'école Militaire Inter armées (EMIA) un laboratoire de langue anglaise destiné à améliorer le niveau des officiers camerounais et l'usage des standards américains (Njako, 2006). Il s'agit au mieux d'enseigner aux officiers camerounais l'Anglais opérationnel tel qu'il est utilisé par les forces Américaines. A l'analyse, le Cameroun s'intègre dans ce que Philippe Hugon (2005 :405) appelle les deux principes guidant l'aide américaine en Afrique. C'est-à-dire «le shaping (façonner l'Afrique aux normes et standards américains) et la civilisation (développer les forces démocratiques)».

Par ailleurs, la formation des officiers camerounais dans les écoles Américaines aurait pour effet l'exportation de la culture stratégique américaine. Ils rentrent nantis d'une façon de voir, de concevoir, de penser et d'agir proprement américain. Cette manière d'importer la culture stratégique américaine peut faire la fierté des Etats-Unis dans un environnement historiquement considéré comme zone d'influence des ex-puissances coloniales. [Pour la petite histoire, nous avons rencontré dans le cadre de nos entretiens un officier supérieur camerounais qui venait à peine de retourner au pays après avoir reçu une formation aux Etats-Unis. Il nous a semblé tout à fait différent par l'orientation qu'il donnait à son raisonnement et la compréhension de l'environnement géostratégique international44(*).]

B-UNE COOPERATION MILITAIRE A VISEE HEGEMONIQUE

Comme nous l'avons annoncée plus haut, le rapprochement américano-camerounais s'inscrit dans une stratégie globale qui consiste au final à sustenter sinon préserver l'hégémonie américaine.

1-LE PRE CARRE45(*) FRANÇAIS EN CAUSE ?

Au sortir de la colonisation à la fin des années 50, la France a obtenu des jeunes Etats encore indécis des accords de coopération stratégiques qui lui assurent son influence et sa pérennité en Afrique et notamment dans ses ex-colonies (Fogue, 2002). La division idéologique du monde a dû favoriser cette stratégie française ; puisque les [Super grands] ne traitaient généralement avec leurs partenaires africains que par alliés interposés (Aicardi, 1989 : 139 ; Ntuda, 2004 :131-154).

Depuis la fin de la guerre froide au début des années 90, on assiste à un redéploiement spectaculaire des grandes puissances en Afrique. Cette période marque le repositionnement de la France, inquiète du positionnement des autres puissances à la tête desquelles trônent les Etats-Unis (Escandell, 1997). A en croire Clara Pulido Escandell, la France serait en perte d'influence, déclassée au profit des Etats-Unis dans son pré carré Afrique Centrale. Elle serait réduite à «  une phase essentiellement défensive de son pré carré » (Escandell, 1997). Selon cet auteur, un ambassadeur américain disait à Kinshasa46(*)que «  la France n'est plus capable de s'imposer en Afrique ». L'heure semble être à la redistribution des cartes à propos de la géopolitique africaine. Nous vivrions aujourd'hui un nouveau partage de l'Afrique entre les grandes puissances.

L' Afrique Centrale et donc le Cameroun est une zone historiquement acquise à la France. Mais comme le Golfe de Guinée par extension, elle est devenue une zone de projection de la puissance Brésilienne, Japonaise, mais surtout Chinoise et Américaine (Awoumou, 2005 :15-20 ; CEREMS, Octobre, 2005 ; Ntuda, 2004 :44-48). C'est du moins ce qu'on peut lire dans les exercices de démonstration de force que les Etats-Unis font dans la zone depuis quelques années. La France est en « recul » dans l'ensemble du Golfe de Guinée (Mvomo Ela, 2005 :9). D'ailleurs, en 2002, les Etats-Unis ont déclaré le Golfe de Guinée  «  zone d'intérêt vital» pour leur sécurité nationale (Lestrange, Zélenko et Paillard, 2005 :159).

«Le complexe de Fachoda » suppose que la France trouve en la présence américaine en Afrique une menace à ses intérêts (Thompson, 2002 :30-34). Yves Alexandre Chouala (2005) quant à lui, soutient que la coopération du Cameroun permettrait aux Etats-Unis d'utiliser ce pays comme « contre balancier de l'influence Française dans la sous-région...» C'est dire la valeur du Cameroun dans le jeu d'influence des puissances et donc des Etats-Unis dans la sous-région.

2-LA SUSTENTATION DE L'HEGEMONIE AMERICAINE FACE AUX PUISSANCES EMERGENTES

Le pouvoir corrompt, disait Montesquieu. C'est une expérience éternelle que tout homme qui arrive au sommet veuille y assurer sa pérennité47(*). C'est dans cette lancée qu'opère l'une des stratégies actuelles des Etats-Unis. Ils ont besoin de nourrir leur hégémonie afin de garder l'écart vis-à-vis des autres puissances, notamment celles qui sont dites émergentes (Chine, Brésil, Inde, Afrique du Sud, Nigeria...) A en croire le Docteur Mvomo Ela (2005 :11), « la prise de position des Etats-Unis dans le Golfe de Guinée constitue « un pas » supplémentaire vers « l'empire ».

Les Etats-Unis pourraient utiliser le Cameroun comme contre balancier à la prédominance nigériane dans le bassin Ouest Africain. «Le Cameroun offre une carte politique supplémentaire aux Etats-Unis dans la géostratégie à l'échelle du continent » (Nono, 2003).

A une autre échelle, nous avons la Chine dont la projection actuelle fait dire aux experts qu'elle est en passe de devenir la première puissance mondiale (Chauprade, 2003 :43-49). La chine est « ...l'Etat qui a le plus de chance de se poser en rival des Etats-Unis à un moment quelconque du siècle nouveau » (Kissinger, [2001] ,2003 :159). D'où «la nécessité de trouver dès à présent des stratégies de blocage en contrôlant et en sécurisant les principales zones pétrolières du globe» (Ngogang, 2004). La présence américaine au Cameroun s'explique bien par cette logique. Aymeric Chauprade (2003 :43-49) quant à lui expose dans, « la stratégie globale des Etats-Unis face à l'émergence ne la Chine», l'impressionnant dispositif développé par les Etats-Unis pour parvenir à cette fin. Il s'agit entre autres du Contrôle des zones et des ressources stratégiques du globe, de la multiplication des alliances et de la coopération militaire avec les Etats situés en des zones stratégiques du monde etc. Eu égard de ces arguments, le renforcement de la coopération militaire avec le Cameroun s'inscrit dans la stratégie de l'hégémonie américaine.

Par ailleurs, la Maison Blanche a publié en Septembre 2002 un document intitulé  «Stratégie de sécurité nationale des Etats-Unis». A certain égard fidèle au passé américaniste, ce document élabore quatre grands points dont le deuxième souligne ostensiblement que les Etats-Unis ne permettent pas que leur hégémonie militaire soit concurrencée par quelque puissance que ce soit (Keir Lieber et Robert Lieber, 2002 :35-39).

CONCLUSION

Somme toute, la coopération militaire et pétrolière entre les Etats-Unis et le Cameroun témoigne dans cette première partie de la dynamique des relations internationales. Elle nous montre à un stade encore élémentaire combien les Etats-Unis ont besoin du Cameroun pour concrétiser leur stratégie globale et atteindre leurs Intérêts nationaux. Il s'agit bien là d'un cas d'interdépendance, notamment dans la mesure où le Cameroun a besoin de l'appui américain comme moyen de sa géostratégie.

DEUXIEME PARTIE :

L'APPUI AMERICAIN : MOYEN DE

LA GEOSTRATEGIE CAMEROUNAISE ?

Le Cameroun, pays pauvre très endetté a fait le pari de la modernité et du développement. Le président de la République Paul Biya a fait des " grandes ambitions" son principal slogan lors de l'élection du 11 octobre 2004, et son cheval de bataille au cours du second Septennat. Au nombre des grands défis à relever figurent la lutte contre la pauvreté, les maladies chroniques, l'arrimage à la modernité démocratique et le Pari de la sécurité. Pour sa part, le développement a toujours été un des objectifs de la politique étrangère du Cameroun (Mouelle, 1996). L'atteinte de ces objectifs nécessite la mise en oeuvre d'un certain nombre de moyens. Basées essentiellement sur la  «dialectique des intelligences» (Coutau-Bégarie, 1999 :70), les relations internationales supposent que chaque acteur dans la quête de l'intérêt national choisisse rationnellement ses amis.

En quoi est-ce que le redéploiement stratégique des Etats-Unis en Afrique peut servir les intérêts du Cameroun ? «Le Cameroun a de grandes ambitions [...] Nous rapprocher des Etats-Unis ne ferait que nous rapporter des bénéfices» ; nous faisait entendre un officier supérieur des armées camerounaises48(*). En effet, les Etats-Unis peuvent être d'un appui précieux à l'atteinte de l'intérêt national escompté par le Cameroun. Cela est valable aussi bien au niveau de la pétrostratégie américaine, qu'à celui de la coopération militaire.

CHAPITRE 3 :

LA PETROSTRATEGIE AMERICAINE A L'ERE DE LA RELANCE CAMEROUNAISE

Le 17 mai 2001, le vice-président Américain D. Cheney a publié un rapport constatant la croissance de la dépendance énergétique des Etats-Unis (Lestrange, Zélenko et Paillard, 2005 :87). La projection actuelle des Etats-Unis, y compris leur engagement militaire en Irak sont intimement liés aux intérêts pétroliers (Lestrange, Zélenko, Paillard 2005). Rappelons également ces propos du président George Bush à la suite des attentats du 11 Septembre 2001 : [Qui n'est pas avec nous est avec les terroristes (...) l'Amérique se souviendra de tous ceux qui, en ce moment particulier seraient restés passifs].

Attentif à la gestion des grands dossiers internationaux, mais aussi conscient du caractère rationnel de sa démarche, le Président de la République du Cameroun était en «visite d'amitié et de travail » aux Etats-Unis lorsque commençait l' «opération liberté pour l'Irak» (20 mars 2003). Grégoire Owona, secrétaire général adjoint du RDPC49(*) et par ailleurs Ministre délégué chargé des relations avec les Assemblées, trouve dans cette visite «  une des premières fenêtres ouvertes sur le monde qui se recompose, un nouvel ordre international où l'amitié garde un sens (...) Dans ce nouveau monde qui se dessine sous nos yeux, il s'agit de ne pas rater le train de l'après guerre » (Nouvelle Expression, 26 mars 2003 :5).

C'est donc dire qu'en répondant à l'invitation du Président Bush, son homologue du Cameroun opère un calcul stratégique. Celui de tirer parti de la nouvelle stratégie des Etats-Unis dans le monde et particulièrement en Afrique. En effet, à la suite de ce voyage, George Bush célèbre le «Cameroun comme pays stable et bien gouverné...» (Chouala, 2005), tandis que Colin Powell annonce le soutien multiforme que les Etats-Unis pourraient apporter au Cameroun50(*).

SECTION 1 : LE SOUTIEN DES ETATS-UNIS SUR LA SCENE INTERNATIONALE

Les Etats-Unis disposent d'une capacité impressionnante de projection et d'un puissant appareil de propagande (Richardot, 2003 :38-42). A ce titre, ils maîtrisent des facilités pouvant leur permettre de soutenir le Cameroun tant en ce qui concerne les questions de sécurité sous- régionales que le problème de désendettement.

A-LA QUESTION DE LA SECURITE SOUS-REGIONALE

Le Cameroun est un pays stable, certes, mais il est dans une sous-région en proie à de nombreuses tensions politico-sociales et économiques. La Guinée Equatoriale et le Sao Tomé venaient d'éviter des tentatives de déstabilisation. La République Centrafricaine est en pleine agitation politique, le Tchad et le Soudan sont en proie à la rébellion et s'accusent mutuellement des tentatives de déstabilisation. Le Nigeria est le théâtre quotidien des sabotages des infrastructures pétrolières et des prises d'otages dans le Delta du Niger. L'Angola connaît une accalmie après 27 ans de guerre civile. Le Congo Brazzaville est en pleine reconstruction après des années de guerre civile. La République Démocratique du Congo vient d'expérimenter dans la violence ses premières élections pluralistes depuis son indépendance. Présenté comme un [un havre de paix dans une sous-région tourmentée], le Cameroun ressent un besoin impératif de préserver cette stabilité exceptionnelle, ce [miracle camerounais]. Aussi a-t-il besoin de l'appui multidimensionnel de la première puissance du monde.

1 - L'APPUI A LA SECURITE DE LA SOUS-REGION

Le risque de conflit est aggravé ici par la convoitise que suscite la sous-région Afrique Centrale et Golfe de Guinée (Mvomo Ela, 2005 :15-20). Le Cameroun peut compter sur l'appui américain dans la mesure où l'un de leurs objectifs est de sécuriser une région où ils comptent importer 25 % de leur de pétrole dans les décennies à venir. (Lestrange, Zélenko et Paillard 2005 : 159 ; Didier Olinga, 2006 :3). Certes, les tensions ne sont pas généralement complètement éradiquées. Mais la présence américaine ainsi que son impressionnant dispositif de sécurité est souvent considérée comme pacificatrice. Nombreuses sont les régions du globe qui accueillent favorablement la présence militaire américaine afin de profiter de leur bouclier. En ce sens, Keir Lieber et Robert Lieber (2002 :35-39) soutiennent que «  la motivation des Etats de diverses régions du monde peut aller de la possibilité de bénéficier gratuitement du bouclier de la sécurité américaine à l'effet pacificateur ou stabilisateur de la présence américaine ». Si ce n'est gratuit, le Cameroun peut néanmoins bénéficier d'une sécurité à moindre coût.

Le Cameroun a participé en 2004 à la mise en oeuvre d'une brigade régionale en attente de l'Afrique Centrale (Njako, 2006). Cette initiative dont le but est de préserver la paix et lutter contre l'insécurité dans la sous-région est encouragée par l'Union africaine et soutenue par les Etats-Unis (Zinga, 21 Août 2005).

A la tête d'un déploiement de la marine américaine qui a séjourné au port de Douala du 6 au 9 février 2005, le colonel Barry Gronin confie que leur mission a pour but de renforcer la coopération entre les deux Etats aux fins de sécuriser la sous-région.51(*)

2 - LA MISE EN OEUVRE DE L'ARRET DE LA CIJ : LA QUESTION DE BAKASSI

Il ressort de la «  stratégie de sécurité nationale » publiée par la Maison Blanche en Septembre 2002 ; qu'une Afrique «  stable  » revêt une importance capitale pour l'administration Bush (Thompson, 2002 :30-34). Les Etats-Unis s'accommodent mal des crises au sein d'un continent dont la valeur stratégique ne cesse de s'accroître. C'est pour marquer leur volonté à oeuvrer pour la paix dans « une région considérée désormais comme d'intérêt stratégique majeur », que les Etats-Unis ont soutenu la signature de l'accord de Greentree le 12 juin 2006 ; laquelle a eu lieu à New York (aux Etats-Unis) (Didier Olinga, 2006 :3).

Le Cameroun et le Nigeria sont opposés depuis plusieurs décennies au sujet de la délimitation de leurs frontières maritimes et terrestres, notamment au niveau de la région de Bakassi, potentiellement riche en ressources naturelles. Fidèle à ses options pacifistes, le Cameroun a porté le problème devant la Cour Internationale de Justice (CIJ) au milieu des années 90. Par son Arrêt rendu le 10 octobre 2002, cette Cour a tranché en reconnaissant la [camerounité] de la région de Bakassi. Mais le Nigeria n'a pas respecté assez promptement l'Arrêt de la Cour comme il l'avait promis un mois plus tôt.

Aussi, le Cameroun a-t-il sollicité à maintes reprises l'appui de la première puissance mondiale pour la mise en oeuvre effective de cet Arrêt (Lukong, 20 Février 2006). Paul Biya a reçu en audience le vendredi 17 Février 2006 la secrétaire d'Etat adjointe aux affaires Africaines. La question de Bakassi était au menu des entretiens. Par la voie de Jendayi Frazer, les Etats-Unis ont réaffirmé leur soutien à la mise en oeuvre de l'Arrêt da la CIJ (Lukong, 20 Février 2006).

Sous l'égide des Nations Unies, il s'est tenu à Greentree (une banlieue de New York aux Etats-Unis) le 12 juin 2006 une rencontre entre les deux principaux protagonistes. Etaient présentes en qualité de témoins, certaines puissances telles que la France, la Grande Bretagne, l'Allemagne et les Etats-Unis. Il s'en est dégagé ce que l'histoire a retenu sous le nom d' « Accord de Greentree ». Au terme de l'échéance fixée (14 Août 2006), les mêmes acteurs, soutenus par les mêmes témoins ont pris part, dans la localité d'Akwa (située aux pourtours de la zone litigieuse) à la cérémonie de retrait des forces nigérianes de la péninsule de Bakassi.

C'est en reconnaissance de cet appui que lors de l'audience qu'il a accordée à l'Ambassadeur des Etats-Unis au Cameroun le 4 Octobre 2006, le Président Paul Biya a remercié les pays amis dont les Etats-Unis pour le concours qu'ils ont apporté à la mise en oeuvre de l'Arrêt de la CIJ (Monda, 4 Octobre 2006). Mais auparavant, par un communiqué signé du Ministre d'Etat, Secrétaire Général à la Présidence le 17 août 2006, le Cameroun a exprimé sa gratitude à tous les acteurs qui ont contribué à l'heureux dénouement de ce différend.

B-LES ETATS-UNIS DANS LA STRATEGIE CAMEROUNAISE DE DESENDETTEMENT

Face aux nombreux problèmes socio-économiques qu'il rencontre depuis le début des années 80, le Cameroun, comme beaucoup d'autres pays Africains, a eu recours aux institutions financières internationales que sont le FMI et la Banque Mondiale. Vers la fin des années 90 (1996), ces institutions ont mis en oeuvre un nouveau programme à l'attention des pays dits pauvres très endettés. Il s'agit de l'initiative PPTE qui a pour but d'annuler une partie de leur dette extérieure, et d'accorder des facilités économiques aux pays qui en ont atteint le point d'achèvement.

Les Etats-Unis ont une influence sur les institutions de Bretton Woods en tant que principaux contributeurs. De ce fait, ils peuvent êtres d'un précieux soutien pour le Cameroun qui a par ailleurs besoin de soigner son image sur la scène internationale52(*).

1 - LE SOUTIEN AMERICAIN AUPRES DES INSTITUTIONS DE BRETTON WOODS

Le Cameroun a atteint le point de décision de l'initiative PPTE en 2000. Ce fut le début d'un long programme économique suivi par le FMI et la Banque Mondiale, lequel aboutira en partie grâce au soutien des Etats-Unis. La quête de l'intérêt national américain semble passer ces dernières années par la diminution du niveau de pauvreté dans certaines régions du monde. Cet impératif trouve sa racine dans le rapport de l'African Oil Policy Initiative Group (AOPIG) qui a proposé en 2002 « un engagement prudent et contrôlé des Etats-Unis en faveur d'une annulation de la dette » de certains pays (Servant, Janvier 2003).

En ce sens, le Cameroun sait pouvoir bénéficier du soutien des Etats-Unis (Lotte, Colomban et Dorgeret, octobre 2005). D'où la demande de soutien qu'il a exprimée plusieurs fois en direction de la première puissance du monde. Tel en a été le cas le 5 mai 2005 lors du passage de Mme Cindy L. Courville53(*) au Cameroun (Amayena, 6 Mai 2005). Le président a profité une fois de plus du passage de la Secrétaire d'Etat ajointe au Cameroun pour réitérer sa demande. L'une comme l'autre, les deux américaines ont répondu positivement à la demande du Cameroun. D'où l'intervention du Département d'Etat en Avril 2006 pour convaincre le président du groupe de la Banque Mondiale d'examiner favorablement le dossier du Cameroun, afin qu'il franchisse le point d'achèvement de l'initiative PPTE.54(*)

C'est donc la conjugaison de ces efforts qui a permis au Cameroun d'atteindre le point d'achèvement de l'initiative PPTE le 28 avril 2006. Et c'est pour cette raison que le Président Paul Biya exprime son remerciement à l'Ambassadeur des Etats-Unis, Niel Marquardt au cours de l'audience à lui accordée le 04 octobre 2006.

2 - L'AMELIORATION DE L'IMAGE DU CAMEROUN SUR LA SCENE INTERNATIONALE

Les Etats-Unis disposent d'un puissant appareil de propagande. Ils notent les Etats en fonction des critères que les observateurs trouvent pour les moins subjectifs. Du regard qu'ils portent sur un pays dépend son image sur la scène internationale. La « diplomatie publique » est un puissant instrument de propagande au service des Etats-Unis. Ils font usage d'un langage riche et généralement fluctuant pour exprimer leur inimitié à l'égard des Etats peu aimables. Il n'est pas rare d'entendre ou de voir dans les médias les officiels américains utiliser des termes et expressions du genre [Etats tricheurs, Etats voyous, axe du mal55(*), dictature, postes avancés de la tyrannie...)

Le Cameroun n'a certainement pas encore perdu le souvenir de la turbulence diplomatique qu'il a traversée entre 1992 et 1996 lorsque les Etats-Unis l'accusaient de déficit démocratique56(*) (Ebolo, 1998). L'image du pays en est sortie ternie. D'où la mise en oeuvre dans la même période d'une politique qu'on pourrait qualifier de réouverture et dont le but aurait été, sinon de préserver, du moins de soigner l'image du pays sur la scène internationale. Des exigences démocratiques somme toute curieuses lorsqu'on sait que les Etats-Unis s'accommodent parfaitement du régime d'Obiyan Nguema de la Guinée Equatoriale, nonobstant sa démocratie minimale (Boniface 2006 :443). Ce troisième producteur africain de pétrole a ainsi été rayé de la liste des 14 pays africains mal notés en matière de démocratie et des droits de l'Homme (Servant, Janvier 2003). Bien plus, il attire de plus en plus l'aide et les investisseurs américains. Un scénario à peu près similaire est en train de se produire avec la Corée du Nord qui est en passe d'être rayée de la liste des pays de l' « axe du mal ». Ce revirement semble trouver son origine dans les négociations au sujet de l'abandon par ce pays de ses activités nucléaires à but militaire. En fait, les exigences de démocratie, des droits de l'Homme et de bonne gouvernance semblent en passe d'être sacrifiées sur l'autel des marchandages politico-économiques et militaires57(*); alors même que ce pays ne semble pas avoir amorcé un pas notable dans ces domaines.

Le Cameroun a donc parfaitement conscience des implications de la nature des relations qu'il peut entretenir avec les Etats-Unis. Pour avoir déjà connu une expérience, il sait pouvoir soigner son image sur le plan international et même interne en entretenant d'excellentes relations avec la première puissance du monde. La célébration par George Bush du Cameroun comme «  pays stable et bien gouverné » à la suite de la visite de Paul Biya en mars 2003 est à cet égard très édifiant (Chouala, 2005).

SECTION 2 : LES ETATS-UNIS DANS LA STRATEGIE CAMEROUNAISE DE DEVELOPPEMENT ET DE COHESION NATIONALE

En dépit de la relativité de la puissance et de l'interdépendance croissante des économies, les Etats-Unis demeurent une hyperpuissance dans presque tous les domaines : culturelle, idéologique, historique, militaire, économique...(Richardot, 2003 : 40-42). Après la dislocation de l'URSS et sa réorientation idéologique, la démocratie libérale, modèle américain, est aujourd'hui le plus partagé du monde. Le Cameroun, pays pauvre très endetté, sait pouvoir amorcer le pari du développement et de sa cohésion nationale en coopérant avec les Etats-Unis58(*).

A - L'IMPERATIF DU DEVELOPPEMENT

Il s'agit essentiellement des investissements américains au Cameroun et des échanges commerciaux entre les deux pays. Compte tenu de son caractère économique assez particulier, nous présenterons les retombées du pipeline Tchad-Cameroun à l'écart des autres investissements.

1 - L'ACCROISSEMENT DES INVESTISSEMENTS ET DES ECHANGES COMMERCIAUX ENTRE LES DEUX PAYS

Depuis la tournée de George Bush en Afrique en juillet 2003, l'accroissement des investissements est l'une des priorités des Etats-Unis sur ce continent (Hugon, 2005 : 405). Le Cameroun a dû réviser son code d'investissements afin d'attirer les investisseurs étrangers (Ntuda, 2004 : 44-48). Les investissements américains au Cameroun vont croissant. En effet, selon une étude menée par le Cabinet Development Finance International en accord avec le gouvernement camerounais, les investissements Américains occupent le premier rang devant ceux de la France et de la Malaisie parmi les Investissements Directs Etrangers au Cameroun. Ces trois premiers partenaires totalisent en 2003 les 89% des Investissements Directs Etrangers au Cameroun ; soit 982,7 milliards de F CFA. Cette primauté des Etats-Unis en matière d'investissement au Cameroun a été soulignée par l'Ambassadeur Niels Marquardt le 04 juillet 2006 en ces termes : « ...des investisseurs américains fiables et bien connus comme la société AES, Coca-cola, Exxon-mobil, Chevron Texaco, Hilton, Mariotte, Caterpillar et des douzaines d'autres ont fait des Etats-Unis le principal investisseur étranger au Cameroun au cours de la dernière décennie »59(*). Cette intervention vient conforter la démarche de la Secrétaire d'Etat adjointe aux affaires africaines qui faisait savoir en Février 2006 que le Cameroun est une «  destination essentielle pour la diplomatie américaine en Afrique »60(*).

Marquons un temps d'arrêt pour relever quelques investissements américains faits ou annoncés en 2006 au Cameroun. Le 22 mars 2006, l'Agence Américaine pour le Commerce et le Développement (AACD) a octroyé à la société SHO Tractafric Cameroun, une subvention dont le but est d'accroître sa capacité à construire des infrastructures de commerce au Cameroun et dans les pays voisins. L'AACD compte aussi financer à hauteur de 360 152 dollars (environ 230 millions de FCFA), l'étude de faisabilité et de mise sur pied d'une société du type «  Joint venture » spécialisée dans le crédit-bail des équipements lourds du genre Caterpillar. La «joint venture» est créée entre la SHO Cameroun et Diamond International Inc (DII), une société Américaine basée à Chicago61(*).

Lors de l'audience accordée à l'Ambassadeur Américain le 12 mai 2006, ce dernier a confié au Président Paul Biya que le group américain Mariott comptait construire un hôtel de classe international à Douala.

La réalisation du projet Cobalt/Nickel de Nkamouna (province de l'Est) par la société américaine Géovic-Cameroon SA commence en 2007.62(*) Il s'agira pendant les deux premières années d'aménager le site. L'exploitation proprement dite et donc les retombées n'étant envisageables qu'à compter de 2009.

L'exploitation du gaz naturel figure aussi parmi les projets des américains. Ces investissements sont susceptibles d'octroyer de milliers d'emplois aux camerounais63(*).

Le 25 Septembre 2006, la société américaine «le bus» a relancé le transport urbain par bus au Cameroun. Elle annonce la mise en circulation d'autres bus dans le cadre du transport interurbain Yaoundé- Douala-Bafoussam (Mouliom, 2006 :209).

Le Premier Ministre a reçu le 3 octobre 2006 une délégation d'investisseurs américains. Conduite par le Vice Président de la société Cisco, ce groupe spécialisé dans la télécommunication à haut débit, est venu explorer les possibilités d'affaires au Cameroun (Monda, 4 octobre 2006).

Le 30 octobre 2006, le Ministre camerounais de l'énergie et de l'eau a reçu en audience, l'Ambassadeur des Etats-Unis au Cameroun. Les entretiens portaient entre autres sur l'amélioration des services de AES/ SONEL au Cameroun et des réflexions à propos de Bakassi.

Par ailleurs, les Etats-Unis accordent de plus en plus la possibilité aux camerounais ainsi qu'à leurs produits d'accéder sur le marché américain. A cet égard, un accord ciel ouvert a été signé le 17 février 2006 entre le Ministre camerounais des transports et la Secrétaire d'Etat adjointe aux affaires africaines, Jendayi Frazer. Cet accord permet désormais d'assurer les vols directs entre le Cameroun et les Etats-Unis, sans faire escale en France comme par le passé64(*) .

Le Cameroun a été élu à l'AGOA (African Growth and Opportunity Act) en octobre 2000. C'est une initiative américaine qui consiste à encourager les exportations africaines en direction des Etats-Unis grâce à une exonération des droits de douane. Les exportations camerounaises en direction des Etats-Unis sont croissantes ainsi qu'en témoigne le tableau ci-après.

Année

Pays

2002

2003

2004

Cameroun

172 100 000

214 000 000

308 200 000

NB : les chiffres sont en dollars.

Source : Département du commerce des Etats-Unis.

Voir Annexe V

En outre, un certain nombre d'établissements bancaires et d'Agences de financements américains mettent à la disposition des pays africains dont le Cameroun, des crédits à l'importation des produits américains. C'est le cas de l'Ex-Im-Bank (Banque export-import) qui, chaque année met à la disposition des importateurs camerounais un découvert de 30 milliards de FCFA pour encourager les importations aux Etats-Unis. Les prêts sont accordés à un taux d'intérêt préférentiel de 8 % remboursable en 5 ans (Bowa, 3 juillet 2006).

2 - LES RETOMBEES DU PIPELINE TCHAD-CAMEROUN

Le pipeline est un oléoduc qui permet d'acheminer le pétrole exploité depuis Doba (sud du Tchad), jusqu'au terminal de Kribi (sud du Cameroun), où il est traité et exporté vers le marché mondial. L'exploitation est assurée par les sociétés américaines Exxon-Mobil (40 %), Chevron (25%), et la société malaisienne pétronas (35%). Ce pipeline est devenu opérationnel en juillet 2003 et génère aux acteurs concernés de substantiels revenus (Lestrange, Zélinko et Paillard 2005 :159). Les gains qu'en tire le Cameroun sont multiformes.

Pour ce qui est des gains financiers, relevons que pendant les travaux de construction, les employés camerounais ont gagné environ 18,9 milliards de FCFA. Durant les 30 années pendant lesquelles le pipeline est censé être exploité, les employés camerounais sont supposés percevoir environ 99 milliards de FCFA (Tsafack, 2003 :19). L'Etat du Cameroun quant à lui est censé percevoir une taxe de passage qui s'élève à 12 % du prix du pétrole exploité pendant la durée de vie du pipeline (Lestrange, Zélinko et Paillard, 2005 : 159). Ainsi, le Cameroun a gagné environ 137 milliards de FCFA pendant la construction. Soit une augmentation de 2 % sur le PNB. Les activités indirectes sont supposées octroyer au Cameroun un gain de 375 milliards de FCFA. Soit une augmentation de 1% du PNB (Tsafack, 2003 :21) pendant la durée de vie du pipeline.

Les gains infrastructurels : le passage du pipeline n'a pas fait que détruire les propriétés et les biens. Il a aussi contribué à la construction de nombreuses infrastructures. En effet, on peut citer entre autres la construction d'une route principale qui relie le Tchad au Cameroun. Elle est censée oeuvrer pour le renforcement de l'intégration régionale et l'intensification des échanges entre les deux pays. Une fibre optique a été installée le long du pipeline pour améliorer le service du pays en matière de télécommunication (Tsafack, 2003 : 19). Certaines lignes de chemin de fer ont été retouchées. Il y'a eu intensification du trafic au port de Douala et à Kribi. Des écoles, des points d'eau, des dispensaires et des forages ont été construits pour les besoins de la cause.

A-LES ETATS-UNIS DANS LA STRATEGIE CAMEROUNAISE DE RENFORCEMENT DE LA STABILITE POLITIQUE ET DE CONSOLIDATION DEMOCRATIQUE

Ainsi qu'en témoigne leur engagement en Europe et en Asie après la deuxième guerre mondiale, les Etats-Unis ont fait preuve du rôle pacificateur de leur présence. En qualité d'ami des Etats-Unis, le Cameroun s'accommode de l'impératif américain de promotion de la démocratie en passant par le raffermissement de sa stabilité politique.

1- L'ACCOMMODATION DE LA POLITIQUE AMERICAINE DE PROMOTION DE LE DEMOCRATIE EN AFRIQUE

L'inscription de la promotion de la démocratie et des droits de l'Homme sur l'agenda de politique étrangère des Etats-Unis date du milieu des années 70. Cette priorité est une initiative du Congrès à la suite, non seulement des problèmes rencontrés au Vietnam une décennie plutôt, mais également du scandale de Watergate (Cingranelli, 1993 : 173). Il convient d'étudier le soutien américain à la lutte contre la corruption au Cameroun avant de s'appesantir sur la promotion de la démocratie proprement dite.

Le soutien américain à la lutte contre la corruption : classé au premier rang parmi les pays les plus corrompus du monde par l'ONG allemande transparency international entre 1998 et 1999, le Cameroun occupe aujourd'hui la 26eme position sur un total de plus d'une centaine de pays65(*). Cette amélioration tient en partie au soutien apporté par les Etats-Unis dans la lutte contre ce fléau. Lors de son passage au Cameroun en Février 2006, la Secrétaire d'Etat adjointe aux affaires africaines a répété plusieurs fois que leur gouvernement comptait coopérer avec le Cameroun dans le cadre de la lutte contre la corruption (Lukong ,20 février 2006 ; Amayena,25 février 2006). Un impératif qui viserait comme nous l'avons démontré plus haut à protéger les intérêts Américains ; car au lendemain des attentats du 11 septembre 2001, les Etats-Unis ont établi un lien assez logique entre la corruption et le financement des activités terroristes.

Pour sa part, l'Ambassadeur des Etats-Unis au Cameroun joue un rôle actif dans la lutte contre la corruption. Ses discours et conférences sont en ce sens très significatifs (voir annexe 8). Le fait que l'arrestation des fonctionnaires accusés d'avoir distrait des fonds dans les caisses publiques fît suite à ces discours ne semble pas avoir été un fait du hasard. Au sortir de l'audience que le Président de la République lui a accordée le 24 février 2006, l'Ambassadeur des Etats-Unis se confie à la presse en ces termes : «  J'ai dit au chef de l'Etat qu'il peut compter sur le soutien moral et matériel des Etats-Unis dans ce sens » (Amayena, 25 février 2006). Une sorte d'assurance apportée au Président de la République quelques temps seulement après l'arrestation de certains gestionnaires indélicats des biens publics.

L'appui à l'amélioration des institutions démocratiques au Cameroun : Les Etats-Unis interviennent à plusieurs niveaux pour promouvoir la démocratie au Cameroun. C'est dans ce sens qu'ils soutiennent que: «The US strategy to promote democracy and human rights focused on strengthening the institutions necessary for a stable democratic Cameroon, such as a transparent electoral process and a free, fair and professional press».

Les Etats-Unis encouragent la création et l'enseignement dans des écoles et collèges des programmes portant sur les droits de l'Homme, les droits des travailleurs et la lutte contre le trafic des personnes en particulier. 

En préparation des élections municipales et législatives de 2007, les Etats-Unis négocient avec les officiels camerounais pour la mise en oeuvre d'un «réel» observatoire national des élections. La question des élections a été abordée par le Président de la République et Jendayi Frayer, au cours de l'audience du 17 février 2006. Leurs entretiens portaient entre autres sur l'amélioration de la gouvernance, du système électoral et l'usage des urnes transparentes. La Secrétaire d'Etat a réaffirmé le soutien de son pays au Cameroun (Lukong, 20 février 2006).

En 2003, les Etats-Unis ont mis en oeuvre un système de soutien financier aux élections. Cette initiative est également soutenue par l'Union Européenne (UE), le Canada et le Japon.

Les Etats-Unis encouragent la décentralisation au Cameroun. C'est dans cette optique qu'ils ont organisé en Avril 2005, un séminaire auquel prenaient part 10 maires, 6 ministres et 5 parlementaires Camerounais.

Les Etats-Unis soutiennent la liberté des médias à travers la sponsorisation des associations des médias. L'Ambassade américaine a financé à Douala la création de la société pour le développement des médias en Afrique. Cet organisme s'étend sur 23 pays et a pour rôle de protéger les droits des journalistes. Les Etats-Unis soutiennent les ONG locales engagées dans la promotion et la protection des droits de l'Homme.

Les Etats-Unis suscitent et encouragent les projets d'éducation des parents et des enfants ; car suivant une enquête menée auprès de 2000 personnes, 90 % d'enfants sont battus à la maison et 97 % à l'école. Les Etats-Unis oeuvrent en faveur de la promotion des droits de la femme et de la jeune fille au Cameroun. Ils travaillent par ailleurs avec les responsables de la défense et de la sécurité afin d'améliorer les relations entre les forces armées et la société civile.

Les Etats-Unis ont en outre organisé des séminaires de discussion et des vidéoconférences sur le thème : «islam et tolérance religieuse». Le but étant d'apaiser les consciences et de promouvoir la tolérance et la liberté de religion66(*).

2- LE RAFFERMISSEMENT DE LA STABILITE POLITIQUE

Ainsi qu'il ressort de la citation ci-dessus mentionnée, la promotion de la démocratie au Cameroun a pour objectif de garantir la stabilité politique du pays. Ceci peut sembler d'autant plus légitime que l'on sait les pays les plus stables de la planète sont ces qui brillent par leur maturité démocratique. A contrario, l'instabilité sociopolitique qui caractérise un grand nombre d'Etats africains trouve son fondement dans la tendance à l'autoritarisme qui caractérise la plus part des pays africains. Au terme de la visite du Président Paul Biya aux Etats-Unis en Mars 2003, le chef du Département d'Etat d'alors faisait savoir que the «Cameroon is a place of stability in that part of Africa and we want to do every thing we can to strengthen the government and to strengthen our relationship with Cameroon»67(*). C'est dire que les Etats-Unis s'engagent sinon à renforcer, du moins à maintenir la stabilité politique du Cameroun. Pour y parvenir, ils disent vouloir faire tout ce qu'ils peuvent pour renforcer le gouvernement. Ce qui semblerait normal dans la mesure où les investisseurs ont généralement besoin d'un environnement sociopolitique calme et stable pour leurs affaires.

Il est vrai qu'en considération du rapport présenté par le général James Jones devant le sénat américain le 7 Mars 2006, les Etats-Unis le font d'abord pour leur propre intérêt. Qui plus est, les investissements Américains au Cameroun ces dernières années sont croissants. Mais au passage, le Cameroun gagne la paix, le développement et le progrès social. C'est donc dire que le soutien de la stabilité politique au Cameroun s'inscrit en partie dans la stratégie globale des Etats-Unis en Afrique : celle d'une Afrique stable et démocratique, mieux, celle d'un environnement calme et propice à leurs sécurité et à leurs investissements.

CONCLUSION

En somme, si la pétrostratégie américaine est d'abord une manoeuvre visant à protéger l'intérêt national des Etats-Unis, on peut dire qu'elle ne profite pas moins au Cameroun. Non pas que ce dernier en profite passivement, car il est encore libre de refuser la main des Etats-Unis, mais davantage parce qu'il pose des actes rationnels de nature à atteindre des fins d'intérêts national. C'est un cas d'interdépendance à la mesure des effets qu'implique la coopération militaire entre le Cameroun et les Etats-Unis.

CHAPITRE 4 :

UNE COOPERATION MILITAIRE RICHE

D'OPPORTUNITES POUR LE CAMEROUN

Le Cameroun n'entretient pas encore une coopération militaire rigoureuse et fondée sur des textes concrets avec les Etats-Unis. Toutefois, au regard des actes actuels et des perspectives qui s'annoncent, on peut envisager l'avenir avec un peu plus d'enthousiasme. Tout dépend actuellement de la volonté des décideurs politiques, ainsi que pensent certains officiers des armées camerounaises (Abba, Mabally, Tsanga, Octobre 2006). En attendant, interrogeons-nous sur ce qui est déjà fait ou en passe d'être fait. En effet, qu'est-ce que la coopération militaire américano-camerounaise apporte au Cameroun ? Mieux, quel est l'intérêt du Cameroun à coopérer militairement avec les Etats-Unis ?

A l'évidence, pourrait-on dire, le Cameroun gagne beaucoup à accentuer sa coopération militaire avec l'hyperpuissance mondiale. Celle-ci lui permet de bénéficier non seulement de ses initiatives de maintien de la paix en Afrique, mais également de ses nouveaux impératifs de sécurité.

SECTION 1 : LES INITIATIVES AMERICAINES DE MAINTIEN DE LA PAIX EN AFRIQUE

Les Etats-Unis s'engagent de plus en plus dans des missions de sécurité et de maintien de la paix en Afrique. Certes, l'Afrique représentait déjà dans les années 60 et 70 un intérêt stratégique par rapport à l'atlantique nord, au golfe persique et à ses matières premières (Whitaker, 1981 : 101). Mais davantage aujourd'hui, elle «  occupe une place de premier plan dans la nouvelle stratégie de sécurité nationale » (Thompson, 2002 :30-34). C'est pour cette raison que les Etats-Unis multiplient et raffermissent leurs programmes de sécurité et de maintien de la paix sur ce continent. Ces opportunités sont susceptibles d'apporter un certain nombre d'intérêts aux pays africains et donc au le Cameroun. En effet, le Cameroun est inscrit dans certains programmes militaires des Etats-Unis en Afrique et bénéficie par ailleurs d'un certain nombre d'aides.

A-LE CAMEROUN DANS LES PROGRAMMES MILITAIRES DES ETATS-UNIS EN AFRIQUE

Tous les Etats africains ne bénéficient pas également de tous les programmes militaires américains. Les Etats-Unis sélectionnent les Etats en direction desquels vont leurs initiatives. Le Cameroun quant à lui s'inscrit dans l'IMET, dans l'EDA et dans une certaine mesure dans l'ACOTA.

1-LE CAMEROUN DANS L'IMET

L'International Military Education And Training est un programme militaire américain qui se charge depuis près d'un demi-siècle d'éduquer et de former les militaires des pays étrangers. Au Cameroun, cette formation est placée sous l'autorité de l'attaché militaire auprès de l'Ambassade des Etats-Unis68(*). La formation reçue est de deux natures : initiale et continue. Dans le premier cas, les militaires camerounais sont formés pour une période de quatre ans. Il s'agit de ce qu'on appelle formation académique ; car elle ne concerne généralement que de jeunes aspirants qui reçoivent pour leur première fois une formation militaire. Dans le second, ils suivent un stage de perfectionnement dont la durée varie et dépend généralement du besoin exprimé (entretien, Mabally, octobre 2006).

La formation est suivie au sein de certaines écoles militaires américaines, telles que :

- Le War Collège ou école de guerre ;

- Le Staff and Command où sont formés les officiers d'Etat-major ;

- L'Ecole de Commandement d'Unités où sont formés les officiers commandants d'unité.

Faisons par ailleurs mention d'autres écoles de formation spécialisées telles que :

- Westpoint située dans l'Etat d'Alabama où sont formés les officiers de l'armée de terre ;

- La U S Air Force Academy située dans le Colorado, où sont formés les officiers de l'armée de l'air ;

- Nous avons aussi la US Navy Academy située dans le Naculis où sont formés les officiers de la marine nationale (entretien, Mabally, octobre 2006).

Ces écoles forment les officiers camerounais depuis près de vingt ans (entretien, Colonel Abba, octobre 2006). Entre 2002 et 2006, une dizaine d'officiers camerounais ont reçu une formation académique aux Etats-Unis (entretien, Capitaine Mabally, Octobre 2006). Par ailleurs, au cours des mois qui précèdent Août 2005, 27 soldats et officiers camerounais ont reçu une formation spéciale aux Etats-Unis (Zinga, 21 Août 2005).

Le programme IMET compte former 1400 officiers africains en 2006 pour un coût total de 15,6 millions de dollars69(*) ; soit environ 10 milliards de FCFA. La formation est reçue dans des domaines aussi variés que la médecine, l'application, le haut commandement, la mécanique...

Cette formation vise des objectifs tels que : l'amélioration des relations entre civils et militaires, permettre au Cameroun de participer plus efficacement aux opérations de maintien de la paix dans la sous-région et ailleurs, améliorer le niveau de langue anglaise des militaires camerounais70(*). Lors de sa visite au Cameroun le 20 Juillet 2006, le général William Ward a manifesté le souhait des Etats-Unis de renforcer la formation des officiers camerounais dans le cadre de l'IMET71(*). Ces propos confirment ceux de la sous secrétaire d'Etat aux affaires africaines énoncés en février 2006 à l'occasion de l'inauguration de la nouvelle chancellerie des Etats-Unis au Cameroun. Le budget alloué à la formation des officiers camerounais depuis quelques années est croissant, ainsi qu'on peut le constater dans le tableau qui suit :

Année

Pays

2005

2006

2007

Cameroun

236 000

248 000

295 000

NB : ces sommes d'argent sont en dollars américains.

Sources : www.state.gov , www.defenselink.mil , et www.fms.org .

2-LE CAMEROUN DANS L'EDA

L'Excess Defense Article est un programme militaire américain chargé plus spécifiquement des questions de sécurité intérieure aux Etats africains. Comme son nom l'indique, il vient en surplus aux autres programmes. Ses frontières ne nous semblent donc pas clairement définies, notamment par rapport au programme IMET.

Néanmoins, on peut retenir que l'article 516 de la Foreign Assistance Act (FAA) intègre le Cameroun dans le budget de la Fiscal Year (FY ou Année fiscale) 2007 en ce qui concerne l'EDA72(*). Les objectifs de ce programme sont divers et variés. En effet, l'EDA vise le renforcement de la sécurité intérieure du pays. Pour ce faire, il octroie des moyens de lutte contre certaines activités criminelles telles que le narcotrafic, le trafic des organes et des êtres humains... D'autres moyens sont alloués aux déploiements des forces locales en vue du maintien de la paix, à la professionnalisation et la modernisation de l'armée, ainsi que des efforts militaires du Cameroun73(*). L'on peut mentionner ici le soutien que les Etats-Unis apportent au Cameroun dans le cadre de la protection de la forêt du bassin du Congo. Ils contribuent à y protéger les ressources naturelles, marines, et les espèces menacées de disparition.

Enfin, on peut s'interroger sur la nature de la formation donnée par les Etats-Unis aux militaires camerounais à Koutaba, il y'a de cela quelques années. En effet, au terme d'un entretien que nous avons eu avec un officier camerounais au Ministère de la Défense, nous avons appris que des militaires Américains ont accordé une formation d'une durée limitée aux forces camerounaises stationnées à Koutaba. Cette initiative a l'air d'une formation isolée. Aussi se demande-t-on si elle s'inscrit dans le cadre de l'ACOTA (car l'avantage de ce programme est de former les forces africaines sur leur propre sol :entretien, Capitaine Mabally, octobre 2006); ou dans l'IMET ? En tout état de cause, on peut retenir que le besoin ardent qu'éprouvent les américains à contrôler le Golfe de Guinée est bien de nature à justifier l'extension des théâtres de l'ACOTA (RECAMP, Octobre 2005), comme par ailleurs ceux de l'OTAN (Ntuda, 2004 :44-47). ACOTA compte former 40 000 hommes en Afrique d'ici à 2010.

B-L'AIDE MILITAIRE MULTIFORME DES ETATS-UNIS AU CAMEROUN

L'assistance militaire que les Etats-Unis apportent au Cameroun est multidimensionnelle. Sans avoir à en constituer un répertoire complet, nous en identifierons un certain nombre que nous rangerons sous deux rubriques : l'aide technique et l'assistance humanitaire.

1-L'AIDE TECHNIQUE

L'aide technique consiste à apporter un savoir faire artistique ou scientifique, relatif au bon fonctionnement d'un objet donné. Sur ce plan, les Etats-Unis manifestent leur volonté de soutenir le Cameroun. En effet, lors de leur passage au Cameroun, certains militaires américains de haut rang ont dit en faire un de leurs objectifs. C'est le cas du Colonel du corps de la marine R Barry Gronin qui, pendant son séjour du 6 au 9 février 2006 à bord du navire de guerre USS Emory S. Land, déclare: «  le navire est au Cameroun dans le but d'une assistance technique à la marine camerounaise dans la cadre de la coopération et des relations qui existent entre les deux pays » (Le Messager, 10 février 2005).

Dans le même ordre d'idées, les Etats-Unis ont apporté leur assistance technique à la sécurité aéronautique camerounaise. C'était lors d'un séminaire organisé le 26 Février 2004 entre l'administration aéronautique camerounaise et son homologue américain, dans le cadre du projet «  safe skies for Africa initiative ». Pendant plusieurs jours, des instructeurs américains ont formé le personnel de l'autorité aéronautique camerounaise (Cameroon Tribune, 27 Février 2004). Ainsi qu'a déclaré le Directeur Général de l'autorité aéronautique camerounaise, Ignatius Sama Juma, l'administration de l'aviation civile camerounaise a «  bénéficié de trois séminaires ateliers de formation de très haut niveau en sûreté de l'aviation civile ».

2-L'ASSISTANCE HUMANITAIRE

L'assistance humanitaire peut être définie comme tout soutien dont le but est de venir en aide à certaines catégories de populations camerounaises. Il s'agit généralement des malades, des populations villageoises etc. Cette aide est octroyée par les militaires américains. Toutefois, en raison de leur rapprochement, nous avons tenu à développer dans ce titre l'assistance fournie par les membres du corps de la paix.

L'attaché militaire auprès de l'ambassade des Etats-Unis est chargé d'utiliser les fonds octroyés par le département d'Etat, via la défense pour soutenir l'aide humanitaire ainsi que la protection de la biodiversité au Cameroun74(*). En juillet 2005, une équipe de 80 marines américains parmi lesquels 50 médecins ont offert des soins gratuits à certaines populations du Nord Cameroun. Dirigée par le capitaine de Vaisseau Elisabeth Wolfe, la présence de cette équipe s'inscrit dans le cadre du programme «  West Africa Training Curse Medical All rich Programm ». Les maladies ciblées sont le paludisme et les infections cutanées (Cameroon Tribune, 12 Juillet 2005).

Par ailleurs, des américains membres volontaires du corps de la paix aident certains pays africains sur un certain nombre de questions à coloration humanitaire. Ils sont environ 2200 dispersés dans 38 pays africains, dont à peu près 130 au Cameroun. Ils s'investissent dans des domaines aussi variés que l'éducation scolaire et sexuelle, la sensibilisation sur des questions de santé telles que le Sida, la formation et le recyclage des enseignants ; les échanges culturels entre le Cameroun et les Etats-Unis75(*). Le 24 Août 2005, 23 membres du corps de la paix ont prêté serment dans la salle des conférences de Bandjoun, à l'ouest du Cameroun. Le budget alloué par les Etats-Unis au corps de la paix est aussi croissant que les autres. Le constater dans le tableau qui suit :

Année

Pays

F Y. 2005

F Y .2006

F Y. 2007

Cameroun

2,827

3,028

3 ,043

NB : FY (fiscal Year ou année fiscale)

Les chiffres sont en milliers de dollars.

Sources : www.state.gov , www.defenselink.mil et www.fms.org.

SECTION 2 : LES NOUVELLES PRIORITES DE SECURITE AMERICAINE ET LES INTERETS DU CAMEROUN

Comme nous l'avons souligné plus haut, les Etats-Unis se sont données de nouvelles priorités de sécurité nationale dans lesquelles l'Afrique jouerait un rôle de première place. L'Afrique dont le Cameroun ne peut y parvenir que si des moyens conséquents lui ont été affectés. De ce fait, on peut envisager la coopération américano-camerounaise en matière de lutte contre le terrorisme comme étant mutuellement bénéfique aux deux Etats.

A-LA LUTTE CONTRE LE TERRORISME AU CAMEROUN

Une coopération américano-camerounaise dans le cadre de la lutte contre le terrorisme peut avoir plusieurs corollaires au nombre desquels le renforcement de la sécurité frontalière, l'amélioration de la sécurité maritime et aéroportuaire.

1 - LE RENFORCEMENT DE LA SECURITE FRONTALIERE

«  Les frontières du Cameroun sont très poreuses ». Remarque le capitaine Mabally (Octobre, 2006). Cet officier de l'armée camerounaise souligne aussi qu'il n'existe pas, à proprement parler en l'état actuel des choses, une action conjointe entre les Etats-Unis et le Cameroun, allant dans le sens de la protection des frontières. Propos soutenus aussi par le Colonel Abba de la direction des relations militaires internationales (Octobre, 2006).

Toutefois, au regard de la densité des problèmes frontaliers que connaissent le Etats Africains et de l'impératif américain de sécuriser ce continent en général et le Golfe de Guinée en particulier, on peut envisager une aide en direction de la protection des frontières. Chassés de leur base en Afghanistan, les terroristes se réfugient en Afrique parce qu'ici, les frontières sont mal protégées. D'où le concours des Etats-Unis à la protection des frontières (Lotte, Colomban et Dorgeret, Octobre 2005). Par ailleurs, les Etats-Unis ont lancé en 2003 l' «  African coastal and border security Programm » (ACBSP). Il s'agit d'un programme consistant à aider certains pays à protéger leurs frontières en luttant contre des actes tels que la piraterie, la contrebande, les trafics... (Volman, 2005). Il ne serait donc pas surprenant de voir l'aide des Américains orientée dans ce sens. Tant il est vrai que le Cameroun, pays de Golfe de Guinée, est une « destination essentielle de la diplomatie Américains  en Afrique» (Lukong, 2006).

2- L'AMELIORATION DE LA SECURITE MARITIME ET AEROPORTUAIRE

Ainsi que nous l'avons vu plus haut, le Golfe de Guinée abrite de nombreux intérêts Américains. C'est pour cette raison qu'ils encouragent et soutiennent la coopération entre les marines de la sous-région afin qu'elles parviennent à une sécurité plus efficace. En témoigne les conclusions de la conférence de Naples en Octobre 2004. La force navale des Etats-Unis stationnée en Europe a élaboré une stratégie d'une durée de 10 ans pour sécuriser le Golfe de Guinée. Pour y parvenir, ils envisagent d'augmenter la sécurité physique des ports nationaux, améliorer le contrôle des zones côtières, encourager la sécurité collective au-delà des bandes littorales (James76(*), 2006).

Sur le plan de la sécurité aéronautique, il semble utile de souligner d'abord que le Cameroun ne dispose que d'un seul aéroport proprement militaire : la base 101 de Yaoundé. Cela dit, l'armée de l'air partage avec les civils les mêmes aéroports (entretien, Colonel Abba, octobre 2006). En 2003, les Etats-Unis ont fait au Cameroun un don de matériel destiné à assurer la sécurité aéroportuaire et aérienne. Propre à lutter contre le terrorisme, ce matériel est destiné aux aéroports de Douala et de Yaoundé Tsimalen. La liste du matériel reçu figure dans le tableau suivant.

Nature du matériel

Aéroport de Douala

Aéroport de Yaoundé Tsimalen

Appareils au rayon X pour contrôle des bagages de soute

2

4

Appareils au rayon X pour le contrôle des bagages de cabine

4

4

Détecteurs d'explosifs

2

1

Portiques détecteurs de métaux ou magnétomètre

6

4 portiques

8 magnétomètres

Les accessoires d'accompagnement tels les régulateurs de tension

Non déterminés

Non déterminés

Sources : Cameroon Tribune, 27 février 2004.

Au moment où il recevait ce matériel, le ministre des transports John Begheni Ndeh déclarait : «  cette acquisition est à n'en point douter l'une des plus importants qu'aucun pays d'Afrique noir n'avait jamais reçue à ce jour en matière de sécurité de l'aviation » ( Cameroon Tribune, 27 février 2004).

B-LE SYSTEME AMERICAIN DE DEFENSE AU PROFIT DU CAMEROUN ?

Nous-nous appesantirons dans ce titre sur deux questions : le transfert de la technologie et la question du renseignement militaire. Si la haute technologie militaire permet aux américains de se hisser au rang de première puissance du monde, l'intense activité de renseignement qu'ils mènent partout leur permet de recueillir les informations nécessaires à la prise de décisions utiles.

1 - COOPERATION ET TRANSFERT DE TECHNOLOGIE MILITAIRE

Les Etats-Unis sont aujourd'hui incontestablement la puissance la plus avancée en matière de technologie militaire. Des recherches sont encouragées dans ce sens grâce à un budget titanesque qui s' élève en 2003 à 379 milliards de dollars (Richardot, 2003 : 38-42) ; soit plus de 250 mille milliards de FCFA.

Des avantages dans ce sens ne semblent pas encore avoir été acquis au Cameroun. Mais, ils s'annoncent dans la mesure où des arguments y relatif ont été avancés. En effet, deux faits nous confortent dans cette logique. Suite à la transformation de l'African crisis Response Initiative (ACRI) en African contingency operation and Training Assistance (ACOTA) par le Président Bush au printemps 2002, l'on assiste à un changement de tactique. Il y'a extension des zones d'intervention de l'ACOTA. Le matériel affecté aux forces africaines n'est plus non létal, mais de véritables armes de combat. Un programme régional de maintien de la paix est mis en oeuvre. Il vise un entraînement aux tactiques offensives et un transfert de technologie militaire (Abramovici, 2004 : 14-15). Dans une perspective comparative, on peut envisager cet apport au Cameroun dans une échéance plus ou moins brève77(*).

Au surplus, lors de sa visite au Cameroun le 05 mai 2005, Madame Cindy L. Courville78(*) déclare que le Cameroun occupe une position de leader au sein du COPAX. Qu'en tant que tel, les Etats-Unis comptaient coopérer avec lui pour assurer la sécurité et la paix dans la sous-région. Afin d'y parvenir, les Etats-Unis entendent mettre à la disposition des forces armées locales des capacités technologiques nécessaires pour assurer leur propre sécurité ainsi que celle de la sous-région (Amayena, 06 mai 2005).

2 - LA QUESTION DU RENSEIGNEMENT MILITAIRE

Nonobstant les failles constatées à la suite des attentats du 11 Septembre 2001, les Etats-Unis disposent à n'en point douter du système de renseignement le plus perfectionné du monde. Des milliers d'hommes disséminés sur leur territoire et partout dans le monde sont chargés à travers différents organismes de recueillir les informations nécessaires aux politiques. Des moyens conséquents sont alloués à ce service ô combien important (Balthazar, Vaisse et David, 2003 : 193-200). Bien entendu que ce système est développé essentiellement pour assurer la sécurité des Etats-Unis. Mais, il bénéficie aussi aux pays amis dans lesquels les Etats-Unis ont des intérêts. Leur ambassade leur sert généralement de relais de recueil, de traitement et de transmission des informations comme ce fut le cas au Gabon, au Zaïre, ou au Congo Brazzaville pour le problème Angolais dans les années 80 et 90 (Cohen, 2000 : 221).

Les exigences scientifiques ne nous permettent pas d'aller jusqu'à affirmer avec la Nouvelle Expression (Bambou, 8 février 2006) le rôle de la Central Intelligence Agency (CIA) sur la sécurité personnelle du président du Cameroun, ni la mise à sa disposition de la liste des gestionnaires indélicats des fonds publics. Néanmoins, on peut s'interroger sur l'engagement que les Etats-Unis ont pris en Mars 2003 par la voix du Secrétaire d'Etat Colin Powell lorsqu'il déclarait : « Cameroon is a place of stability in that part of Africa and we want to do every thing we can to strengthen the government and to strengthen our relationship with Cameroon »79(*). Renforcer leurs relations avec le Cameroun ne pose a priori aucun problème majeur. Mais, comment parviendront-ils donc à maintenir la stabilité politique, mieux, à renforcer le gouvernement du Cameroun s'ils ne disposent pas d'assez d'informations ? Cette préoccupation est d'autant plus lancinante qu'on sait que les Etats-Unis réitèrent qu'ils veulent investir au Cameroun qu'ils considèrent comme un partenaire de choix, qu'ils en ont les moyens et que cette initiative peut être mutuellement bénéfique aux deux Etats.

Qui plus est, l'information est un précieux instrument d'aide à la décision politique. Le mythique secret d'Etat oblige les autorités militaires à être très parcimonieuses, voire réservées sur cette question pourtant possible80(*). En tout état de cause, retenons que les Etats-Unis, comme d'ailleurs d'autres grandes puissances ont l'habitude d'affecter leurs agents de renseignement au service des pays dits amis. Il en est ainsi lorsque de cela dépendent les intérêts nationaux des deux partenaires.

Au demeurant, l'Israël entretient une coopération militaire assez pointue avec le Cameroun. Or en qualité d'allié stratégique des Etats-Unis, cet Etat dispose aussi d'une capacité de renseignement très avancée. L'Israël prend une part importante dans la formation de la garde présidentielle du Cameroun, tout comme il intervient en matière de renseignement. Il pourrait travailler en collaboration avec les Etats-Unis dans cette optique. En tout cas, cela ne nous semble pas utopique (entretien avec un Officier supérieur des armées camerounaises, octobre 2006).

CONCLUSION GENERALE

Somme toute, la coopération militaire et pétrolière entre les Etats-Unis et le Cameroun peut être considérée comme un vecteur potentiel d'interdépendance entre les deux Etats. Notre attention est restée focalisée non seulement sur les deux acteurs principaux en quête d'intérêt national, mais également sur l'Afrique en général et le Golfe de Guinée en particulier. Ces zones étant considérées comme le théâtre de projection de la puissance et de confrontation des intérêts des différents acteurs. Les deux partenaires dont le rapprochement contribue à augmenter une fibre supplémentaire au tissu complexe d'interdépendance observé dans les relations internationales actuelles recèlent d'énormes intérêts réciproques. Nous l'avons déjà mentionné, certes ; mais il ne semble pas superflu de rappeler que l'interdépendance telle que nous venons de le démontrer ne signifie ni aliénation, ni épuisement de la souveraineté des Etats, ni impossibilité d'une pareille dépendance vis-à-vis d'un autre acteur ou d'autres Etats. Il ne s'agit en réalité que de la mise en évidence d'un cas de dépendance mutuelle entre deux Etats aux intérêts réciproquement croissants.

Les Etats-Unis savent pouvoir tirer parti de la position stratégique dont jouit le Cameroun sur ce continent. De multiples intérêts nationaux commandent en fait que la première puissance du monde élabore une stratégie dont la mise en oeuvre dépend en partie de sa liaison avec l'Afrique et donc le Cameroun. Face en effet aux puissances dites émergentes et toujours plus consommatrices d'énergie, à la nécessité pour les Etats de se rapprocher en vue de gérer les grands dossiers internationaux, à l'inquiétude causée par l'ascension spectaculaire d'une Chine difficilement contrôlable, à l'érosion avancée des frontières nationales profitant aux réseaux terroristes toujours plus menaçants, l'action, sinon la réaction passe par la reconfiguration des grands espaces stratégiques du monde au mieux des intérêts de l'hégémon. Voilà où se situe l'intérêt de l'hyperpuissance américaine à se rapprocher, puis à solliciter l'apport d'un pays dit « pauvre très endetté » : le Cameroun.

Si le Cameroun doit servir de point d'appui à la stratégie des Etats-Unis en Afrique en général et dans les sous-régions Afrique Centrale et Golfe de Guinée en particulier, il faut bien que la cause en vaille la peine. En relations internationales, nous l'avons vu, les intérêts des différents acteurs ne sont pas conciliables ; fussent-ils des alliés. Chaque Etat étant également rationnel, met en oeuvre les moyens à lui acquis pour atteindre des fins d'intérêt national. A en croire Hervé Coutau-Bégarie (1999 : 68), c'est ça, la stratégie. La coopération, souligne Henry Kissinger ([2001] 2003 :63), « n'est pas une faveur qu'un pays concède à un autre. Elle sert les intérêts des deux parties ». C'est ainsi qu'avide d'un certain nombre d'intérêts, le Cameroun se rapproche des Etats-Unis. Il sait pouvoir bénéficier de l'apport multidimensionnel de la première puissance du monde. Ainsi que nous l'avons vu, la coopération ici étudiée n'a rien d'un jeu à somme nulle. Bien au contraire, c'est un jeu à somme variable. Il a permis au Cameroun d'engranger à ce jour un certain nombre de bénéfices. Le bilan que cette coopération permet de dégager actuellement, tel que nous venons de voir, permet d'envisager l'avenir avec un peu plus d'enthousiasme.

C'est bien là, à notre lecture, un schéma d'interdépendance. Une interdépendance non pas essentiellement économique telle que développée par Robert Kéohane et Joseph Nye (1977), mais davantage stratégique et symbolique. En effet, elle se veut plus stratégique du côté des Etats-Unis dans la mesure où, disposant d'impressionnants moyens divers et variés, ils élaborent subtilement une stratégie dont la mise en oeuvre dépend en partie de leur déploiement sur le terrain. Les Etats-Unis dépendent stratégiquement du Cameroun dans la mesure où ce dernier est intégré dans leur nouvelle pensée stratégique.

Le Cameroun par contre est plus déficitaire en terme de moyens que de rationalité. Ce qui le réduit à une stratégie plus réactive sinon passive, qu'active. C'est pour ces raisons qu'il recherche l'appui américain, nécessaire à l'atteinte de ses fins d'intérêt national. L'interdépendance semble pour ainsi dire, plus symbolique que stratégique.

Aussi, sans se munir du manteau du prophète, mais au risque de sombrer dans l' [afro-péssimisme], il nous semble important de jeter un regard prospectif sur cette coopération. Il s'agit de s'interroger sur son éventuel revers sur le Cameroun en jetant un flash sur l'ensemble de la sous-région. La tendance actuelle de la situation impose une dose non pas de pessimisme, mais de vigilance par rapport à l'avenir. L'on peut légitimement craindre un certain nombre d'ennuis naissant directement ou non du renforcement de la coopération américano-camerounaise. En effet, nonobstant les mécanismes qui ont déjà été ou sont en passe d'être mis en place pour maintenir la paix et prévenir les conflits, la sous-région n'est pas à l'abri de tous les risques. Les richesses naturelles du Golfe de Guinée suscitent des convoitises (Awoumou, 2005 :15-20). Les puissances qui convergent vers la zone déploient des moyens pour asseoir leur stratégie. Le [positionnement] français et américain au Cameroun est à cet égard très révélateur. Il y a risque d'instrumentalisation de l'Etat. Le refroidissement des relations, voire les conflits observés entre les Etats de la sous-région en quête de leadership sont aussi à craindre (Lestrange, Zélenko et Paillard, 2005 : 53-56). C'est en partie pour attirer l'attention positive des Etats-Unis afin de pouvoir relayer leur leadership sous-régional que la Guinée Equatoriale a développé une propagande de dénigrement de l'image du Cameroun en 200481(*) (Chouala, 2005).

La bousculade des grandes puissances pour le contrôle des ressources pétrolières, la mal gouvernance née du fait que quelques unes d'entre elles soutiennent certains [pétro-Etats] autoritaires et peu soucieux des valeurs démocratiques, les conflits inhérents aux ressources pétrolières, la gestion calamiteuse qu'en font les Etats africains ont fait demander à certains observateurs si le pétrole n'est pas une malédiction en Afrique. Vincent Ntuda Ebodé (2004 :44-47) constate pour sa part que «  la vocation pétrolière du Golfe de Guinée n'est donc en soi ni une garantie de développement, ni une assurance de sécurité, moins encore de gouvernance ou de souveraineté ».

En dehors de ces perspectives d'ordre global, une coopération militaire accrue avec les Etats-Unis risque d'accentuer la dépendance du Cameroun vis-à-vis de la première puissance du monde. Que l'on ne perde pas de vue cette idée selon laquelle la domination et la quête de la puissance sont au coeur de la stratégie des Etats (doctrine soutenue par Raymond Aron). C'est en tout cas ce que constatent Lestrange, Zélenko et paillard lorsqu'ils écrivent : «  les pays producteurs dépendent aussi des principales puissances militaires pour leur sécurité intérieure et extérieure » (Lestrange, Zélenko, Paillard, 2005 :90). Certes, à l'heure de la mondialisation, la souveraineté des Etats est encore plus qu'hier, proche de la fiction (Badie, 1999). Mais elle fait sens, et en son nom, les Etats invoquent leurs droits vis-à-vis de l'extérieur. Alors, où est l'autonomie stratégique de l'Etat ? Que fait-on du secret d'Etat ? Le Cameroun ne risque t-il pas de sombrer davantage dans l'extraversion82(*) ?

Par ailleurs, le Cameroun risque fort d'accroître sa dépendance vis-à-vis des investisseurs américains. Comme nous l'avons vu en effet, depuis quelques années, les investisseurs américains affluent au Cameroun. Il est vrai que, dans le cadre d'une coopération mutuellement bénéfique, le Cameroun en tire des dividendes certains. Néanmoins, on peut à cet égard craindre une extraversion encore plus accrue de l'économie nationale. Cet aspect peut sembler d'autant plus inquiétant qu'on sait que les investisseurs locaux n'ont pas assez de moyens, du moins pour supporter un environnement concurrentiel dominé par les multinationales Américaines. Celles-ci peuvent être tentées d'abuser de leurs positions dominantes. D'autre part, il est à craindre une inflation dans certains secteurs de nature à sacrifier le consommateur. L'on sait par exemple que depuis l'acquisition par voie de privatisation de la SONEL par la société américaine AES, les factures d'électricité ont pris un grand coût, devenant par là même difficilement supportables par le camerounais de bourse moyenne.

D'éventuels ennuis peut être ; mais, le stratège les aurait intégré qu'ils seraient circonscrits et donc maîtrisés, en ce sens qu'ils doivent servir plutôt que desservir. Vivement que les richesses africaines cessent  d'être vues simplement comme une « malédiction » et deviennent réellement un facteur de coopération, d'intégration de développement et d'ordre dans les relations internationales et stratégiques (Mvomo Ela, 2005 :11), où chacun trouverait son juste intérêt.

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THESE ET AUTRES SOURCES

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CRTV (radio). Journal de 13 heures. 20 juillet 2006.

CRTV (Télé). Journal de 20 heures. 20 juillet 2006.

Fogue. A. 2002 Histoire diplomatique, extraversion étatique et conflits politiques en Afrique noire. Approche stratégique des conflits politiques africains et analyse des enjeux autour de la sécurité en Afrique noir. Thèse de Doctorat. Université Robert Schuman de Strasbourg. Decembre.381.

Joannidis . M. 2002. « Pétrole africain : un boom à gérer » RFI Service pro .27 juin.

Loi N° 96-06 du 18 Janvier 1996 portant révision de la constitution du 2 Juin 1972.

PROTOCOLE DE RECHERCHE

Le thème de ce mémoire s'intitule : une lecture de la coopération américano-camerounaise depuis 2001 : contribution à l'étude des dimensions pétrolière et militaire.

La nature relativement nouvelle de ce thème a suscité de nombreuses difficultés au nombre desquelles l'accès à l'information. En effet, en plus de la réticence de certaines personnes rencontrées, l'accès aux ouvrages portant sur la question a été notre principale difficulté. C'est pour ces raisons que nous avons été obligés de nous référer plus souvent aux articles publiés dans les revues, magasines, l'Internet, et les quotidiens.

Nos recherches nous ont conduit à visiter tour à tour des milieux tels que le Ministère des Relations Extérieures. Ici, nous avons été à la direction des affaires d'Amérique et des Caraïbes, et plus précisément au Bureau des affaires d'Amérique du Nord.

Nous avons ensuite été au Ministère de la Défense : ici, nous avons visité tour à tour l'Etat-Major de l'armée de l'air, la Direction de la sécurité militaire, la Direction de la coopération internationale, la Direction des ressources humaines. Nous avons en outre été à la Gendarmerie Nationale, à l'Etat-Major de l'Armée de terre et à l'Etat-Major de la Marine Nationale. Enfin, nous nous sommes rendus à l'Ambassade Américaine où nous avons déposé auprès de l'attaché militaire une demande d'accès aux informations restées malheureusement sans suite favorable. Notre passage à l'Institut National de la Statistique nous a permis d'obtenir quelques données sur les échanges commerciaux entre le Cameroun et les Etats-Unis.

Nos recherches documentaires ont été principalement effectuées dans des bibliothèques telles la Fondation Paul Ango Ela de Géopolitique en Afrique Centrale, le Centre Culturel Américain et les bibliothèques centrales des Universités de Yaoundé I et II.

Les personnes avec lesquelles nous avons eu des entretiens officiels au cours de ces recherches se situent notamment au niveau des forces armées et de la Gendarmerie Nationale. Il s'agit entre autres de :

1- Général Pierre Samobo (Major Général des armées).

2- Colonel Abba Yagana (division de la coopération militaire).

3- Capitaine de Vaisseau Tsanga (Etat-Major de la marine Nationale).

4- Colonel Metogo Atangana Gabriel (Etat-Major de l'armée de terre).

5-Lieutenant-colonel Ndam Bayard (Gendarmerie Nationale).

6- Lieutenant Colonel Melly Joseph (Etat-Major de l'armée de l'air).

7-Chef de bataillon Onguéné Nérée (MINDEF : Sécurité militaire).

8- Capitaine Mabally Christian (MINDEF : Direction des ressources humaines).

Nous avons eu avec ces autorités des entretiens simples et non directifs. Ce qui suppose qu'aucun questionnaire n'était préparé à l'avance. Néanmoins, notre préoccupation portait notamment sur un certain nombre de questions telles :

-Le Cameroun entretient-il une coopération militaire avec les Etats-Unis ?

-Quel est l'état actuel de la coopération militaire entre le Cameroun et les Etats-Unis.

-Qu'est-ce qui justifie ces dernières années la visite des militaires américaines de haut rang au Cameroun ?

-Quels seraient les intérêts des Etats-Unis à coopérer avec le Cameroun ?

-Le Cameroun a-t-il un projet militaire avec les Etats-Unis ?

-Le Cameroun a-t-il une politique militaire, une stratégie de sécurité en Afrique Centrale ? et en Afrique en général ?

-Comment le Cameroun assure t-il sa sécurité frontalière, maritime, aéroportuaire ?

-Quel est l'apport des partenaires extérieurs dans cette tâche ?

-Existe-t-il une action conjointe entre le Cameroun et les Etats-Unis à propos des problèmes de sécurité ?

-Quel est le rôle de l'armée camerounaise par rapport aux enjeux du Golfe de Guinée ?

-Comment jugez-vous la position du Cameroun dans la Golfe de Guinée ?

-En quoi peut-elle être utile à la nouvelle stratégie africaine des Etats-Unis ?

-Le Cameroun participe t-il de la lutte contre le terrorisme ? quel est, ou peut être son apport dans ce sens ?

-Le Cameroun a-t-il un intérêt à coopérer militairement avec les Etats-Unis ? Lequel ?

-L'armée camerounaise utilise t-elle du matériel américain ? Lequel ? Depuis combien d'années ?

-Comment l'obtient-il ? par voie de don, ou d'achat ? Quels en sont les coûts ?

-Quelle est la nature de l'aide militaire des Etats-Unis au Cameroun ?

-Que dire du transfert de technologie militaire, et des questions de renseignement ?

-Les officiers Camerounais reçoivent-ils des formations militaires aux Etats-Unis : Depuis combien d'années en est-il ainsi ?  Quel genre de formation reçoivent-ils ? Dans quel but se font-ils former ? Dans quelles écoles ?

ANNEXES

ANNEXE I : Les atouts socio-économiques du Cameroun en Afrique Centrale

ANNEXE II : Les portes d'entrée de Afrique

Source : (Hugon, 2005 :401)

ANNEXE III : Carte politique de l'Afrique

Source : http://go.hrw.com/atlas/norm-htm

ANNEXE IV : Statistiques sur la dépendance pétrolière des pays du golfe de Guinée.

Pays

% PIB

% Exportation

% Revenus

Nigeria

40

95

83

Angola

45

90

90

Congo Brazzaville

67

97

80

Guinée Equatorial

86

90

61

Gabon

73

81

60

Cameroun

4,9

60

20

Source : CEREMS, les enjeux africains : quelles conséquences pour la politique de défense ? Octobre 2005, p 20.

ANNEXE V : Tableau des échanges commerciaux entre le Cameroun et les Etats-Unis (1999 -2002)

Produits

1999

2000

2001

Poids

Valeurs

Poids

Valeurs

Poids

Valeurs

Huiles brutes de pétrole

439 015

36 848

107 079

9 764

122 543

10 952

Carburants et lubrifiants

 
 
 
 

103 209

8 988

Bois sciés

6 808

2 199

8 501

2 839

7 855

2 676

Pâtes de Cacao

3 090

1 859

3 896

4 082

1 134

999

caoutchouc

5 766

2 184

2 392

1 151

1 895

877

Café

1 571

1 369

915

1 128

588

687

Feuilles de placages

898

763

284

229

620

478

compresseur, ventilateurs

2

3

 
 

18

298

Traverses en bois

80

14

947

176

667

145

Turbines et leurs parties

 
 
 
 

1

71

Coton

 
 
 
 

80

65

Avions et véhicules aériens

 
 
 
 

2

33

Total des produits retenus

457 230

45 239

124 014

19 369

238 612

26 267

Total

457 991

47 190

124 324

19 542

238 743

26 352

Source : Annuaire statistique du Cameroun 2004 (INS).

ANNEXE VI : CARTE DE LA PRODUCTION ET DES RESERVES PETROLIERES D'AFRIQUE EN 2005

Source : Alternatives Economiques N° 250, septembre 2006, p. 67.

ANNEXE VII : CARTE D

ES RICHESSES PETROLIERES DU GOLFE DE GUINEE

Source : Lestrange, Zélinko & Paillard, 2005 : Géopolitique du pétrole, un nouveau marché, de nouveaux risques, de nouveaux mondes, Paris, Technip.

ANNEXE VIII

EXTRAIT DU DISCOURS PRONONCE PAR L'AMBASSADEUR DES ETATS-UNIS AU COURS DE LA CONFERENCE DE PRESSE DU 19 JANVIER 2006 A YAOUNDE (CAMEROUN)

Conférence De Presse De L'ambassadeur Des Etats Unis Au Cameroun  S.E Niels Marquardt

Yaoundé  19 Janvier 2006

Bonjour Mesdames et messieurs,...

A présent, parlons sérieusement de la corruption. Le gouvernement camerounais, et le président Paul Biya lui-même, ont déclaré une guerre ouverte contre la corruption. Vous, les médias, avez un rôle très important à jouer dans ce combat, ceci en recherchant la vérité, en recherchant et en rapportant fidèlement les faits, en faisant preuve de courage en informant le public - et en évitant d'exploiter l'accès qu'ils ont au public pour régler des comptes ou pour assouvir des desseins politiques. Les médias ont déjà abordé avec succès la formidable question de transparence publique, et  ceci est tout à votre honneur.

C'est avec une grande tristesse que je déplore le fait qu'une culture de corruption bien développée semble avoir pris ses racines au Cameroun ces dernières années Aucune institution ne semble immunisée contre ce dangereux virus, et la corruption est pratiquée et justifiée par le commun des camerounais, c'est à dire par de petits enfants, leurs parents, leurs grands-parents, les fonctionnaires, bref, tout le monde. Les actes de corruption sont devenus si communs et si banals que certains observateurs se demandent si le sens du  mot « corruption » a une connotation différente au Cameroun. Offrir quelque chose à l'enseignant de votre enfant avant la période des examens est un acte de corruption ; Offrir de l'argent contre un service dans une administration est un acte de corruption ; Prendre de l'argent en échange d'un marché ou d'un contrat relevant de votre service est un acte de corruption.

La corruption existe dans tous les pays, et il revient à chaque gouvernement de le combattre. La notion de base ici est que le service public est une confiance publique. Par conséquent, aucun employé, fut- il hautement qualifié, ne devrait bénéficier d'une gratification personnelle, autre que sa rémunération officielle, suite a un travail effectué dans le cadre de son emploi. Dans mon pays, la corruption demeure une préoccupation, et la guerre contre ce mal continue. Le Bureau d'Ethique du Gouvernement  des Etats-Unis est une organisation puissante qui prend cette question très au sérieux. Au mois d'avril de chaque année, mes collègues et moi devons remplir cette fiche SF-278, dans laquelle nous déclarons nos biens et leur provenance. Je suis heureux de me livrer à cet exercice tous les ans parce que je sais  que de nombreux autres officiels font la même chose que moi. Par ailleurs, nous recevons, chaque année, une formation en  éthique, ceci pour nous rappeler continuellement les défis et aussi les tentations qui pourraient, même par inadvertance, nous amener à franchir la ligne entre rendre un service publique et violer la confiance publique.

Loin d'être une simple théorie, cet examen minutieux se traduit dans les faits. Le mois dernier, mon membre du congrès, Randy (Duke) Cunningham, de San Diego en Californie, a été surpris en flagrant délit de corruption et de trafic d'influence dans le cadre d'une affaire liée à l'immobilier. Ces faits ont été révélés et il a du démissionner à la fin de l'année. Il est aussi inculper pour des délits criminels  qui pourraient déboucher sur un emprisonnement ferme de dix ans. L'argent et le business ont été confisqués. Des poursuites légales vont être engagées contre ses corrupteurs. On voit donc que le système peut ne pas fonctionner à 100%, mais les mécanismes de protection des biens publics existent.

A mon avis, le Cameroun a les mécanismes nécessaires pour assurer cette protection des biens publics, dans l'article 66 de sa constitution. Le texte est court et efficace. Je vous le lis « Le Président de la République, Le Premier Ministre, les membres du gouvernement et assimilés, Le Président et les membres du bureau de l'Assemblée nationale, Le Président et les membres du bureau du sénat, les  députés, les sénateurs, tout détenteurs d'un mandat électif, les Secrétaires Généraux des Ministères et Assimilés, Les Directeurs des Administrations Centrales, Les Directeurs Généraux des Entreprises Publiques et parapubliques, Les Magistrats, les personnels des administrations chargées de l'assiette, du recouvrement et du maniement des recettes publiques, tout gestionnaire de crédits et des biens publiques, doivent faire une déclaration de leurs biens et avoirs au début et à la fin de leur mandat ou de leur fonction.

Une loi détermine les autres catégories de personnes assujetties aux dispositions du présent article et en précise les modalités d'application. »

Comme vous devez le savoir, l'article 66 fait partie des articles de l'actuelle constitution  qui n'ont pas encore été mis en application. J'ai de bonnes raisons de croire que cet article sera mis en application en 2006. Avec la bonne volonté et l'engagement du gouvernement camerounais et l'attention des médias, d'énormes progrès peuvent être réalisés cette année. Nous espérons pour le mieux que les biens publics vont revenir au public auquel ils appartiennent. Je ne parle pas seulement de quelques cas d'individus qui acceptent des dessous de tables dans le cadre de  leur travail, mais je parle également et surtout de nombreux cas de personnalités qui se servent de leur poste pour distraire des millions de FCFA, en vue de leur enrichissement personnel. Comme l'a si bien noté le président Paul Biya, il est impossible de lutter contre la pauvreté quand une poignée de camerounais détournent les fonds publics.

Maintenant que la guerre est déclarée, les autorités doivent avoir les moyens pour la mener. Ce n'est pas assez de publier les noms des personnes suspectées de corruption, ou de les relever de leurs fonctions.  Les personnes accusées de corruption doivent être officiellement inculpées, poursuivies et condamnées si leur culpabilité est établie. Dans le même temps, leurs biens mal acquis doivent être confisqués et retournés au trésor public. Le Cameroun doit montrer à son peuple et  au reste du monde que ce genre de crime ne paie pas. Pour réussir dans cette démarche, les tribunaux doivent être indépendants et à l'abri de toute interférence, pour pleinement exercer leurs responsabilités dans la poursuite des cas de corruption et autres crimes. L'autre aspect fondamental de la démocratie est que personne n'est au dessus de la loi. Cette mesure peut être difficile à appliquer,  mais autant tout le monde est soumis au droit, tout le monde devrait bénéficier d'un traitement juste et équitable sous la loi. Le Cameroun a les structures nécessaires pour assurer cette justice. Reste à les mettre entièrement en pratique.

FIN

Source : www.french.cameroon.usembassy.gov

NB : Ce site est géré par le Département d'Etat des Etats-Unis.

100

ANNEXE IX

CARTE GEOPOLITIQUE DE LA SOUS-REGION AFRIQUE CENTRALE

* 1 Au terme d'un entretien que nous avons eu avec un politologue camerounais, enseignant à l'Université de Soa, nous apprenons que le deux Etats se sont rapprochés davantage à cette époque à la faveur de l'élection du Secrétaire Général de l'ONU. Le Cameroun et les Etats-Unis auraient coopéré afin de soutenir la candidature de Kofi Annan.

* 2 Voir George Washington cité par Alain (Fogue), 2002, Histoire diplomatique, extraversion étatique et conflits politiques en Afrique noire, Thèse de Doctorat.

* 3 Voir Encarta.fr.bizrate.com

* 4 Propos retenu par les médias camerounais lors de la visite en février 2006 de la secrétaire d'Etat adjointe aux affaires africaines, Madame Jendayi Frazer au Cameroun.

* 5 Entretien avec un officier supérieur des armées camerounaises.

* 6 Voir le site de l'Ambassade américaine au Cameroun. www.french.Cameroon.usembassy.gov

* 7 Voir les propos de l'Ambassadeur Niels Marquardt sur le site de l'Ambassade des Etats-Unis au Cameroun: www.french.cameroon.usembassy.gov .

* 8 Citation tirée du communiqué de presse publié le jeudi 16 février 2006 sur www.french.cameroon.usembassy.gov

* 9 Citation tirée du discours prononcé par l'ambassadeur des Etats-Unis lors de l'inauguration de la nouvelle chancellerie. www.french.cameroon.usembassy.gov .

* 10 Source: United States Energy Information Administration (EIA).

* 11 Position stratégique soutenue par certains officiers supérieurs des armées camerounaises, tout comme quelques officiels américains en visite au Cameroun.

* 12 Le Docteur Jendayi Frazer est la secrétaire d'Etat adjointe des Etats-Unis aux affaires africaines. En ce moment, elle est en visite au Cameroun à l'occasion de l'inauguration de la nouvelle chancellerie des Etats-Unis.

* 13 La CEMAC est la Communauté Economique et Monétaire de l'Afrique Centrale. Instituée en 1994, elle entre en vigueur en 1999.

* 14 Produit Intérieur Brut.

* 15 Voir site du département d'Etat www.state.gov Bureau of african affairs, January 2006.

* 16 Voir www.state.gov op. Cit.

* 17 Voir à cet égard les journaux CRTV radio de 13 h et CRTV télé de 20h, du 20 juillet 2006 au sujet de la visite de William E. Ward, Commandant adjoint des forces des Etats-Unis en Europe au Cameroun.

* 18Voir Encarta fr.bizrate.com

* 19 Nous empruntons ce néologisme au Dr W Mvomo Ela dans son article intitulé « Pétrostratégie et appel d'empire dans le golfe de guinée » Il renvoie à la stratégie pétrolière.

* 20 Selon la USEIA, le Cameroun qui exportait environ 107 000 barils/jour en 2001, n'exporte plus que 62 000 barils/jour en 2004.

* 21 Nous empruntons ce néologisme à Stefan Mair dans son article « terrorisme et Afrique, sur les dangers de nouveaux attentats en Afrique subsaharienne ». Par pétro-Etats, il fait allusion aux Etats dont l'économie repose essentiellement sur la commercialisation des produits pétroliers. (Cf. annexe 4).

* 22 Voir RFI service pro, 27 juin 2006 par joannidis.

* 23 Voir David Applefield sur le site http://insider.washingtontimes.com

* 24 Voir David Applefield, op. Cit.

* 25 Cf. Journal CRTV, télé, 30 octobre 2006, 20h30.

* 26 PIB signifie Produit Intérieur Brut. C'est le volume de richesse produit à l'intérieur d'un pays pendant une période donnée. Cette période est généralement d'un an.

* 27 Suite à un entretien que nous avons eu avec un officier de la marine camerounaise, nous avons appris que les Etats-Unis cheminent dans ce sens, même si des accords ne sont pas encore signés.

* 28 Voir Fogue (Alain), Histoire diplomatique, extraversion étatique et conflits politiques en Afrique noire, Thèse de Doctorat, 2002. 381pp.

* 29 Information obtenue au cours d'un entretien que nous avons eu avec un politologue, enseignant à l'Université de Soa.

* 30 Voir www.state.gov

* 31 www.state.gov

* 32 Ce message a été lu à la CRTV télé le 19 mai 2003.

* 33 Propos de Colin Powell, publiés sur le site www.afritude.net le 22 mars 2003 lors de la visite du Président Paul Biya aux Etats-Unis.

* 34 Voir RT 18 MAI 2006, le messager, «  Cameroun : géostratégie, les américains démentent tout projet de base militaire au Cameroun ».

* 35 Voir ENS.CG (Ecole Normale supérieure, centre de géostratégie de paris), sur www.géostratégie.ens.fr, et www.hydrocarbures/fichier .

* 36 Voir www.géostratégie.ens.fr .

* 37 Cette conférence regroupait un certain nombre de pays ayant des intérêts dans le golfe de Guinée. L'objectif était de réfléchir sur les moyens à mettre en oeuvre pour y assurer la sécurité maritime.

* 38 Voir le site www.géostratégie.ens.fr .

* 39 Voir le site de l'Ambassade Américaine au Cameroun : www.french.cameroon.usembassy.gov .

* 40 Voir Cameroon Tribune du 27 février 2004 sous le titre «Sécurité aérienne : l'appui des Etats-Unis au Cameroun».

* 41 Anonymat requis.

* 42 Daniel Volman est le Directeur du programme de la recherche pour la sécurité en Afrique, au Département d'Etat.

* 43 Ce terme est utilisé par Hervé Coutau-Bégarie dans Traité de stratégie Paris, économica, 1999, P.70.

* 44 Nous n'avons pas eu l'autorisation de citer le nom et le grade de cet officier supérieur.

* 45 Le pré carré est une zone d'influence politico-économique et culturelle, composée d'un ou de plusieurs pays et généralement acquise à une puissance étrangère. Tel est le cas de l'Afrique centrale pour la France.

* 46 Kinshasa est la capitale de la République Démocratique du Congo.

* 47 Nous paraphrasons ici les propos du Docteur Hilaire de Prince Pokam prononcés au 2003 lorsqu'il dispensait le cours de institutions et relations internationales.

* 48 Il ne nous a pas été permis de révéler l'identité de cette source.

* 49 Le RDPC (Rassemblement Démocratique du Peuple Camerounais) est le principal parti politique au Cameroun.

* 50 Voir le site www.state.gov du 22 mars 2003 sous le titre : «  Remarks after meeting with Cameroon President Biya ».

* 51 Voir Le Messager du 10 février 2005 sous le titre « l'armée américaine aux portes du Cameroun ».

* 52 Cf. le site www.state.gov

* 53 Le Docteur Cindy L. Courville est le Directeur du Conseil National de Sécurité en charge de l'Afrique et conseillère du Président George Bush.

* 54 Voir Le Messager du 18 mai 2006 : « Cameroun : Géostratégie ; les Américains démentent tout projet de base militaire au Cameroun ».

* 55 Cf. Hilaire de prince Pokam, Institutions et relations internationales, 2003.

* 56 Voir infra (introduction).

* 57 Information obtenue sur RFI (Radio France Internationale) le 14 février 2007 au lendemain de l'accord de Pékin entre la Chine, le Japon, la Russie, les Etats-Unis et la Corée du Nord à propos du programme nucléaire de ce dernier.

* 58 Nous tenons cette information d'un cadre de l'administration camerounaise, lequel a requis l'anonymat.

* 59 Cette citation est tirée du discours prononcé par Niels Marquardt, le 4 juillet 2006 lors de la célébration pour la première fois de la fête nationale des Etats-Unis au sein de leur chancellerie au Cameroun.

* 60 Voir le site www.isf.net

* 61 Ces informations sont disponibles sur le site de l'ambassade américaine au Cameroun : www.french.cameroon.usembassy.gov

* 62 Voir le site www.rdpcnrw.org et Cameroon Tribune du 9 février 2007.

* 63Nous tenons cette information de l'entretien que l'Ambassadeur américain a accordé à Canal 2 Internationale dans le cadre l'émission télévisée « Au rythme du monde », février 2007.

* 64 Voir le site www.isf.net

* 65 Information retenue du journal de la CRTV télé du 8 Novembre 2006 à 20h 30, présenté par Ibrahim Shérif .

* 66 Toutes ces informations sont disponibles sur le site de l'ambassade des Etats-Unis au Cameroun : www.french.Cameroon.Usembassy.gov

* 67 Voir ces propos sur le site du Département d'Etat Américain : www.state.gov , « remarks after meeting with Cameroon president Biya ».

* 68 Voir «  ambassade, bureau de l'attaché militaire sur le site www.french.cameroon.usembassy.gov

* 69 Voir site du Département d'Etat et de la défense : www.state.gov et www.defense.link.mil .

* 70 Il s'agit ici en particulier de ceux qui sont formés en Anglais dans le laboratoire de langue mis en oeuvre par les Etats-Unis à l'EMIA.

* 71Information tirée du journal de 20h30, CRTV (télé), 20juillet 2006.

* 72 Voir le Site de Foreign Military Sales : www.fms.org .

* 73 www.fms.org op. Cit.

* 74 Voir www.frenh.cameroon.embssy.gov : « l'ambassade, bureau de l'attaché militaire ».

* 75 Voir www.french.cameroon.usembassy.gov: «  l »ambassade : le corps de la paix ».

* 76 Le général James .Jones est le commandant des forces des Etats-Unis en Europe. Il présentait ce rapport devant le comité des services armés du Sénat le 7 Mars 2006.

* 77 Cette idée vient d'un officier des armées camerounaises qui a requis l'anonymat.

* 78Le Dr Cindy L. Courville est alors conseillère du Président George Bush.

* 79 Voir le site du Département d'Etat www.state.gov Sous titre: « Remarks after meeting with Cameroon president Biya » 22 Mars 2003.

* 80 Entretien avec un officier qui a requis l'anonymat.

* 81 La Guinée Equatoriale accusait le Cameroun d'abriter une base de mercenaires chargés de renverser son pouvoir. Ce qui a entraîné l'expulsion massive de la diaspora camerounaise vivant dans ce pays.

* 82Voir Fogue (Alain) ,2002 Histoire diplomatique, extraversion étatique et conflits politiques en Afrique noire, Thèse de Doctorat, Université Robert Schuman de Strasbourg, 381 p.






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