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Internet : Une nouvelle dimension du Système International

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par Arnaud GARRIGUES
Université des Sciences Sociales - Toulouse 1 - Master 1 De Science Politique 2006
  

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Prolégomènes

L'objectif de cette partie sera de mettre en valeur plusieurs points déterminants : le cadre d'analyse choisi, la problématique et les hypothèses qui ont été construites, la justification et l'annonce du plan et les outils de recherche utilisés et méthodologiquement justifiés et expliqués.

Le but est ici de mettre en avant tous les choix méthodologiques qui ont été faits que ce soit dans le choix du type d'analyse ou bien des outils de recherche utilisés. Par ailleurs, cela permet de construire l'articulation logique de ce mémoire, de donner aux analyses qui seront développées plus de pertinence et ainsi donner à ce travail un caractère plus scientifiq ue.

Analyse Stratégique :

Analyser Internet conduit à se poser des questions entrant dans des dimensions multiples. Actuellement, une simple recherche sur Internet dans les catalogues des facultés permet de voir que l'aspect social ou économique d'Internet (blogs, nouvelles formes de démocratie,...) est très en vogue. Or ici, l'intérêt est porté uniquement sur une vision stratégique d'Internet et dans les relations internationales plus précisément. Ainsi, il est donc nécessaire de bien définir le sens de l'analyse dans laquelle nous allons inclure cette recherche.

Le type d'analyse choisi est donc l'analyse stratégique. En effet, Raymond Aron a affirmé que

« toute étude concrète des relations internationales est une étude sociologique »5. Or, ici, il

est question d'analyser un objet social (Internet) dans une optique de Relations Internationales. Une analyse de type sociologique paraît donc pertinente. L'intérêt porté aux enjeux et aux relations de pouvoirs, de dominations...renvoie de façon immédiate à une analyse stratégique. Cependant, Il semble nécessaire à ce niveau de justifier une telle affirmation qui, sans cela, serait péremptoire et pour ce faire, de décrire plus précisément les fondements et la méthode de l'analyse stratégique.

5 ARON, R. (1967). Qu'est ce qu'une théorie des Relations Internationale, Revue Française de Science Politique, 17 (5), Octobre 1967, p. 837-861.

Les travaux de Michel Crozier et de Francis Pavé6 ont livré une méthode et une description de l'analyse stratégique permettant de fixer le cadre d'analyse et les modèles logiques liés à ce type d'analyse.

Tout d'abord, l'analyse stratégique se situe dans une logique heuristique : elle a pour but de découvrir un objet social. La pratique du raisonnement, les techniques d'investigation lui sont propres et sont bien particulières.

Elle repose sur divers postulats, qui peuvent être contestés ainsi que le disent les auteurs, mais qui permettent de fonder une représentation de l'objet social en vue d'un but bien particulier. Dans le cadre de ces idées, elle met en place trois notions fondées sur des postulats :

L'Acteur. C'est l'objet central de l'analyse. Il est capable de calcul et de choix : il est rationnel au moins en partie. L'analyse ne se pose pas de questions sur la nature de l'acteur : il est acteur simplement parce qu'il appartient à un contexte d'action (il agit sur Internet ou sur la nature, l'évolution d'Internet), c'est presque un agent. L'étude permet de reconstruire empiriquement l'acteur et c'est pourquoi on ne se pose pas de questions sur lui : seules ses caractéristiques par rapport à l'objet social intéressent. L'acteur est l'élément de premier plan de l'analyse et selon les auteurs, cela s'explique par le fait qu'il est le seul à avoir la capacité à mobiliser et faire exister les contraintes, les problèmes, les solutions et les opportunités.

Le Pouvoir : c'est la seconde notion pertinente de l'analyse. Le postulat lié à cette notion est une vision des rapports humains « médiatisés » par des relations de pouvoir. Si, pour des relations humaines, le postulat est contestable, il paraît en revanche, parfaitement adapté à l'étude du système international. L'objet est ici de montrer que cette vision est adaptée à l'étude d'Internet. Cette façon de voir permet d'introduire différents éléments : l'existence de conflits, d'accords ou d'alliances et évite une vue trop consensuelle. Par ailleurs, son plus grand avantage est de considérer l'instabilité et la conflictualité comme normales et de chercher à expliquer la stabilité, la régularité. L'adaptation de cette vision à un système international considéré comme anarchique, hobbesien est manifeste. L'intuition la rapproche d'une certaine vision d'Internet, apportée notamment par les éléments que j'ai pu citer au début du résumé de la phase exploratoire (inflation normative, lien entre le terrorisme et le réseau...). Par ailleurs, une telle vision a le mérite d'expliquer l'absence de

6 Voir Bibliographie en fin de mémoire

« comportements à logique linéaire » de certains acteurs en lien avec la considération du pouvoir comme une motivation : il s'agit tout simplement d'expliquer les « stratégies » entendues ici au sens commun. Cette vision concentre aussi le raisonnement sur les relations entre les acteurs, l'existence de minorités et de volonté de domination et la capacité des acteurs à créer des compétences et des capacités pour répondre à leur motivation. Cette vision n'est pas sans rappeler la guerre de l'information à laquelle fait référence Jean Guisnel7.

Système : adopter une analyse stratégique, c'est sous-entendre l'existence d'un système. En effet, l'étude du pouvoir comme motivation absolue est un postulat qui entraîne l'existence de relations d'interdépendances entre les acteurs. Cela veut donc dire que l'on fait un « pari » sur l'existence de ces relations dans la réalité sans quoi, il est impossible de faire une telle analyse. Le postulat donc, ou « hypothèse heuristique », est qu'il existe un ordre ou une interdépendance des acteurs. Les conséquences d'un tel postulat sont que l'on s'abstient de rechercher la cause de cet ordre (bien que l'on puisse le faire dans un autre cadre d'analyse) au bénéfice du « comment ».

Problématique et Hypothèses :

Au final, l'enchaînement des postulats donne le raisonnement suivant : la motivation est le pouvoir, ce qui entraîne une interdépendance des acteurs dans la recherche de pouvoir, ce qui donc explique les phénomènes. On parle alors d'endogénéisation des phénomènes : on trouve leur explication dans les relations entre les acteurs. C'est pourquoi la notion de système s'intègre à l'analyse stratégique. La relation avec le système international est donc immédiate : la vision réaliste s'adapte tout particulièrement bien à ce type d'analyse et l'objet du mémoire est donc de montrer l'existence d'un tel système. Or précisément, la délimitation du système est un objet de recherche comme disent les auteurs. Cela permet donc de constituer une partie de la problématique.

Après avoir décrit les principaux fondements de l'analyse stratégique, il est alors possible de donner la problématique de mon mémoire :

7 GUISNEL, J. ((2005).Guerres dans le Cyberespace - Services secrets et Internet : La Découverte

La question principale que l'on peut se poser est la suivante : En quoi Internet est-il certes un univers nouveau mais où les dynamiques observables sont comparables à celles du système international contemporain et où les acteurs impliqués dans ces dynamiques sont aussi ceux du système international ?

Cette problématique a plusieurs mérites. Le premier est qu'elle rappelle qu'Internet est un « univers nouveau », ce qui renvoie à la fois à sa spécificité qu'il faudra expliquer mais aussi aux capacités des acteurs à créer des compétences, des moyens et à faire surgir les opportunités comme il a été dit plus haut à propos de l'analyse stratégique. Le second aspect est qu'elle permet à la fois de revenir sur les acteurs, cela est dit de façon explicite mais aussi de revenir sur les relations de pouvoir. En effet, la mise à jour des « dynamiques » évoquées dans la problématique devrait, pour autant que les hypothèses soient justes, mettre en avant des relations entre acteurs basées sur un besoin de pouvoir et de contrôle. Enfin, le dernier atout d'une telle problématique est de permettre de reconstruire un système, que ce soit en premier lieu, un système Internet ou bien encore une fois, si les hypothèses sont justes, le Système International d'aujourd'hui. Si l'on peut reconstruire un tel système en étudiant Internet, c'est que ce dernier est intégré dans un système plus général et donc, qu'il constitue bien une nouvelle dimension du Système International.

Evoquant les hypothèses, il paraît judicieux de les développer rapidement. Ayant amplement développé la méthode et les caractéristiques de la problématique, énoncer ces hypothèses est dorénavant aisé.

La première et la plus évidente est qu'Internet constitue un système bien particulier qui va au-delà d'un simple outil. Il a été fait référence dans l'Introduction à une comparaison avec le nucléaire ou le pétrole en raison des « débordements » ayant lieu au-delà de la simple nature d'outils. La première hypothèse est donc celle-ci : Internet est un objet social en plus d'un outil dont les conséquences issues de l'utilisation de masse et du développement vont bien au-delà de sa nature simple d'outil de communication.

La seconde concerne l'existence d'un système Internet que l'on peut décrire stratégiquement. La vision « cachée » derrière cette hypothèse est plutôt « réaliste » au sens des théories des Relations Internationales et peut être dédoublée en deux sous-hypothèses : l'existence de relations de pouvoirs d'une part et d'acteurs d'autre part tels que définis dans la méthodologie de l'analyse Stratégique.

La dernière hypothèse repose sur la définition des acteurs et des dynamiques ou des relations mises à jour. Cette étude prétend montrer que les identités des acteurs en présence sont les mêmes que celles des acteurs du Système International et que les relations de pouvoir y sont de même nature. C'est-à-dire qu'elles prétendent défendre ou obtenir les mêmes choses et ce pour les même raisons : du contrôle, de la sécurité, une capacité de réponse voire de contrainte plus forte en raison de la souveraineté.

La démonstration de ces hypothèses entend montrer par corollaire qu'Internet est devenu un enjeu du Système International, qu'il est intégré dans le Système International et doit donc être considéré comme tel pour les politiques futures.

Justification du Plan :

Le fonctionnement d'Internet est relativement complexe et ce, pour plusieurs raisons. Toutes ces raisons n'ont pas forcément pour corollaire immédiat de créer des enjeux mais il est nécessaire de maîtriser les concepts et les termes pour comprendre les analyses qui suivront. Il s'agit aussi de décrire « l'univers nouveau » évoqué dans la problématique.

Cependant, certains aspects du fonctionnement sont effectivement en tant que tels des enjeux et, afin d'éviter des descriptions plus tardives, la description sera faite de telle manière que ces problématiques apparaîtront clairement.

Internet est une structure multidimensionnelle par nature. En premier parce que le fonctionnement n'est pas abordable de façon linéaire, la plupart des actions de base de l'internaute débutant déclenchant des réactions en chaîne à plusieurs « étages » nécessaires à la réalisation de l'opération envisagée. Cela veut donc dire que le fonctionnement technique du réseau est difficile à expliquer et nécessite déjà un travail important.

Ensuite, il y a l'aspect administratif et politique correspondant à la gestion d'Internet, à sa gouvernance. Les interactions entre l'ICANN8, le gouvernement américain, celui des autres états, les entreprises se font dans un cadre précis qu'il convient de décrire. Ces relations en tant que telles seront abordées dans la seconde partie.

Pour respecter ce premier double aspect, la division la plus pertinente paraissait être la suivante : « l'Architecture du réseau » où seront expliqués le fonctionnement technique et l'aspect « Administration » où sera développée et définie la gouvernance d'Internet.

8 Voir la Première Partie pour un exposé sur l'ICANN.

Tout cela constitue donc une première partie qui sera nommée : « Histoire et fonctionnement d'Internet d'un point de vue stratégique ». On décrira donc les éléments cités plus haut en insistant sur l'aspect stratégique qui leur sont liés.

Une fois les concepts et l'histoire maîtrisés, l'analyse en tant que telle peut débuter. La problématique du mémoire consistait à relever les principaux enjeux stratégiques de l'objet et à montrer que malgré les aspects nouveaux (dus principalement à l'aspect technique, ce qui donne tout son sens à la première partie), les acteurs et les dynamiques fondamentales de la prise de pouvoir ne changeaient pas par rapport à ce que l'on pouvait trouver dans le système international contemporain. Au final, les lectures, les interviews et la veille stratégique faite sur Internet m'ont conduit à recenser diverses problématiques et différentes façons de les expliquer ou de les concevoir. C'est ce qui va être développé dans la seconde partie.

Aussi, adopter un outil utilisé dans les théories de relations internationales semble pertinent et c'est pourquoi la seconde partie se fonde sur les niveaux d'analyses. En effet, le propre de ce type d'outil est de considérer la multicausalité des phénomènes sociaux comme évidente et de proposer des explications les plus larges possibles. C'est ce qu'affirme Barry BUZAN dans son article : « The level of analysis problem is about how to identify and treat different types of location in which sources of explanation for observed phenomena can be found».9 Autrement dit : « Le problème des niveaux d'analyses est de savoir comment identifier et traiter différentes sources auprès desquelles on peut trouver des explications aux phénomènes observés ».

Pour cette raison, le choix de cet outil apparait des plus pertinents lorsque l'on considère qu'Internet est un phénomène mondial qui conserve pourtant des caractéristiques bien particulières aux niveaux des états ou des individus.

Le choix du nombre des niveaux d'analyse et de leur signification relève d'une seconde réflexion. Une fois, le choix de cet outil méthodologiquement justifié, il faut savoir comment s'en servir. Plusieurs théoriciens des relations internationales ont travaillé sur le nombre de niveaux d'analyse, leurs significations et leurs distinctions.

K. WALTZ retenait trois niveaux : systémique, étatique et individuel. J.ROSENAU, quant à lui retient 5 niveaux (systémique, sociétal, gouvernemental, rôle de l'individu, particularités de

9 BUZAN B., (2001), The level of Analysis Problem Reconsidered, Theories in International Relations : University of Pennsylvania Press

10 Ibid.

l'individu) et PAPP en adopte 6 en rajoutant un niveau, les sous-systèmes.10L'approche défendue par WALTZ paraît ici la plus à même de permettre de traiter l'objet dans l'optique choisie. Cependant, c'est en quelque sorte la qualité des développements qui permettront de justifier définitivement ce choix.

Cette approche veut respecter les particularités d'Internet, à savoir l'importance de l'individu par rapport au groupe auquel il peut appartenir (terroriste, criminel...) et le fait que l'anarchie au sens littéral du terme (absence de pouvoir central) caractérise particulièrement bien ce système.

Tout cela constitue donc une seconde partie qui sera nommée : « Analyse des enjeux ». Les subdivisions seront au nombre de 3 : une première pour le Système, une seconde pour l'Etat et une dernière pour l'Individu.

Concernant la dernière partie, son but est double : montrer une approche critique du travail réalisé auparavant et pouvoir apporter des éléments récoltés notamment au niveau des entretiens ou des lectures de tous les « bords » politiques ou encore idéologiques.

Par ailleurs, considérant que le lecteur est maintenant averti des différentes problématiques, dynamiques et tendances se développant sur ou autour du réseau, il est possible de montrer un affrontement de nature plus philosophique derrière ses développements stratégiques.

Enfin, comme dit précédemment, la question de la validité, de la généralisation des observations et peut-être même des prénotions imposées, doit être posée. C'est l'objet de cette partie.

Par ailleurs, ce développement aura pour objectif de reprendre les différents outils utilisés et de montrer que par nature, ils induisent des biais de compréhension et de représentation de la réalité. Il faut noter aussi que l'utilisation de ces outils conduit à définir certaines variables et ces définitions peuvent conduire à des erreurs de compréhension.

Ce seront donc ces deux aspects qui seront développés ici. La démonstration de l'utilisation des outils et le choix des variables seront, eux, développés dans la suite de cette partie.

Un second développement à l'intérieur de cette partie aura pour objet de développer les philosophies ou les grandes idées sous-tendant les actions et les prises de positions des différents acteurs d'Internet.

En effet, et c'est la première critique, le rédacteur n'a pas été totalement exempt de partispris et ses opinions ont sans doute influencé les développements précédents. Il sera donc intéressant d'essayer de donner un écho à certaines opinions ou prises de positions afin de permettre une plus grande objectivité des éléments déjà exposés. Il s'agit de faire « parler les acteurs ». Par ailleurs, il faut bien voir que l'étude a deux biais relativement importants que l'on ne peut ignorer :

- Un temps d'étude trop court : cela a pour conséquence une sorte d'étude à partir d'une « photographie » d'Internet. A la fois parce que l'objet est très jeune et parce qu'il évolue à une vitesse impressionnante, un tel mémoire ne peut bien rendre des enjeux, des stratégies et des développements. Certains évènements ont eu lieu pendant l'étude et les étudier est particulièrement difficile à ce niveau de temps et d'expérience de recherche.

- L'objet est réellement vaste et l'appréhender à la fois, dans sa généralité et dans ses particularismes est de l'ordre de l'impossible en si peu de temps et de place. Cela dit, cela permet d'avoir des axes de recherche et de poser des questions pour des recherches ultérieures.

Outils méthodologiques de recherche :

Après avoir défini la problématique et justifié le plan, il convient de justifier les méthodes utilisées pour l'étude et la résolution de ce problème. Pour cela, il semble pertinent de faire à nouveau un rapide retour méthodologique sur l'analyse stratégique et surtout ses implications en termes de modèle de logique.

Selon M. CROZIER, la posture intellectuelle naturelle liée à une telle analyse est une posture d'induction. Il s'agit effectivement de reconstruire un modèle représentant la logique et les propriétés d'un « ordre local »11.

11 CROZIER M., &PAVE F. (1994), Analyse stratégique - Colloque de Cerisy: Ed. Du Seuil, p. 133 -153

Cela implique plusieurs éléments fondamentaux. Le premier est qu'une posture d'induction entraîne la construction d'un modèle mimétique fondé sur des observations empiriques. Il s'agit ici uniquement des idées tirées d'une reprise du cours12.

Le second élément est propre à l'analyse stratégique. En effet, selon les auteurs, reconstruire sous forme de modèle un ordre local a une première implication : la nécessité d'avoir une description et une analyse des faits poussées. La seconde implication est l'utilisation de la comparaison afin de mettre en exergue les faits significatifs et d'avoir à disposition des résultats d'études faites à proximité du sujet.

Au final, la méthode utilisée est donc une méthode inductivo-comparative. Le lien avec mon sujet est fait sans effort car il postule l'existence d'un « Système Internet » et l'induction va permettre de construire ce système ou alors d'infirmer cette hypothèse. Quant à la comparaison, elle est satisfaite par le rapport au système international tel que présenté dans nos cours et en empruntant des éléments au paradigme réaliste (les relations liées au pouvoir) et au transnationalisme (un certain dépérissement de l'Etat et des relations dépassant les frontières étatiques habituelles).

Ce retour méthodologique permet donc d'avoir des précisions quant aux méthodes les plus adaptées pour fournir des réponses.

La méthode utilisée est bipartite : elle a un aspect comparatif et un aspect inductif. L'aspect comparatif et les sujets de comparaison amènent logiquement à considérer l'analyse documentaire comme un moyen privilégié d'acquérir les outils, notions et connaissances nécessaires à cette étape de l'analyse.

L'aspect inductif a plusieurs conséquences : la première est qu'étant donné que les hypothèses sont empiriques, formulées à partir de constatations faites en recherche préliminaire sur Internet, il faut se confronter au réel pour pouvoir les tester. De plus, les indicateurs permettant de s'orienter dans l'analyse et de confirmer ces hypothèses sont données par le réel : ce n'est qu'une conséquence de ce qui a été dit plus haut. Il faut donc un « aller-retour » entre le réel et le conceptuel pour pouvoir dégager des hypothèses, construire un modèle testé par les réponses aux hypothèses et enfin obtenir par le biais des indicateurs, les résultats des tests des hypothèses et donc la validité du modèle.

Dans ce cadre là, c'est l'entretien semi-directif qui paraît être la meilleure façon de se confronter au réel. En effet, l'analyse stratégique met en avant les acteurs et l'entretien

12 Cours de Travaux Dirigés de Mr LEFEVRE.

permet de rencontrer ces acteurs. De plus, cela permet de recueillir un matériau de recherche précis et de qualité, permettant ainsi de construire le système.

Par ailleurs, il paraît intéressant de noter que si l'entretien semi-directif est performant, il a besoin d'une grille précise, préalablement préparée, pour obtenir les informations souhaitées13. Or, la recherche documentaire effectuée dans le cadre de la comparaison permet de réduire le champ des investigations, de constituer les indicateurs de comparaison et donc de construire une partie de la grille de questions.

Ayant ainsi justifié les méthodes au regard du cadre d'analyse, il convient maintenant de les confronter au terrain. Il faut donc dans un premier temps, faire un point rapide sur la nature et les caractéristiques du terrain.

Le terrain choisi est donc Internet. Cependant, la problématique postule une analyse stratégique d'Internet, à la fois phénomène et objet. Cela a pour conséquence d'avoir des acteurs ayant entre eux des relations liées au pouvoir. Cela modifie donc le terrain qui devient donc à la fois Internet mais aussi tous les acteurs ayant des comportements stratégiques sur Internet. Par ailleurs, le type d'analyse choisi amène à la constitution d'un système et l'aspect comparatif de cette méthode est lié au système international. En résumé, il s'agit donc d'étudier Internet en se demandant en quoi il s'intègre dans le Système International et donc d'étudier les acteurs ayant des menées stratégiques dans le Système International et à fortiori, Internet. On a donc la définition du terrain et il ne reste plus qu'à montrer que les méthodes choisies sont parfaitement adaptées à un tel terrain.

Premièrement, la comparaison avec le système international nécessite une bonne documentation sur ce sujet. Cela nécessite de bien connaître les différentes actions se menant sur le réseau ou autour, de même que les tendances, les dynamiques. Tout cela conduit à se documenter sur les analyses réalisées par des spécialistes des Relations Internationales ou d'Internet ou bien des spécialistes dans les deux matières. L'analyse documentaire paraît donc être la méthode la plus indiquée.

Deuxièmement, la confrontation avec le réel est, on l'a vue, nécessaire pour pouvoir tester les hypothèses. Or, le « réel » de ce terrain est constitué principalement d'acteurs qui sont prépondérants dans cette analyse. La confrontation au réel passe donc par la confrontation avec ces acteurs. On a ainsi la seconde méthode : l'entretien semi-directif qui permet de tester les hypothèses et de faire produire de l'information à l'acteur d'Internet.

13 Voir la Grille en question en annexe

Les méthodes ainsi justifiées par rapport au cadre d'analyse et au terrain, il faut maintenant préciser les conditions d'utilisation de ces méthodes.

La nature du terrain est bien particulière et le cadre d'analyse choisi également : il s'agit d'une analyse stratégique d'Internet avec une orientation certaine dans le domaine des relations internationales.

De cela, on tire plusieurs conséquences : la première est qu'il ne s'agit pas d'analyse du type de celles que peut proposer la sociologie électorale par exemple. On est dans le cadre d'une analyse stratégique : on observe les acteurs, de quelque nature qu'ils puissent être, et leurs relations de pouvoir. Donc, étant donné la diversité des acteurs (états, individus, firmes multinationales...), il est très difficile de recourir à certains outils que sont par exemple les questionnaires ou même les focus groups. Cela est corroboré par la nature des relations étudiées : les relations de pouvoirs sont par nature discrètes et les acteurs, peu enclins à les divulguer où à les expliciter. Donc, certains outils sont à proscrire de par leur caractère inadéquat.

La seconde conséquence est la complexité du terrain. En effet, Internet reste quand même à la fois un espace vaste mais aussi un monde extrêmement complexe et notamment, en termes de relations internationales ou d'acteurs ayant pour objectif un relatif contrôle de cet objet. Aussi, en raison des contraintes de temps de cette étude, de l'évolution très rapide de l'objet et des contraintes liées à la nature des acteurs, il était nécessaire à la fois de trouver des sources fiables et préalablement renseignées, d'essayer d'avoir une vision de l'intérieur de certains des acteurs et enfin de maintenir une connexion avec l'évolution de l'objet très rapide. Il aurait été dommage de rendre une étude dont certaines informations étaient périmées alors qu'il aurait été possible de les mettre à jour.

Tout cela a pour conséquence de valoriser certains outils et ce sont ceux qui ont été utilisés : l'analyse bibliographique, l'entretien semi-directif et le processus de veille stratégique qui constitue une analyse bibliographique bien particulière. Un retour rapide sur ces outils s'impose maintenant.

Concernant l'analyse bibliographique, le corpus choisi a été surtout celui des périodiques de langue française et anglo-saxonne. Plusieurs raisons à cela : la première est que si le nombre d'ouvrages consacrés à Internet commence à devenir important, la plupart s'intéresse à la sociologie d'Internet dans le monde du travail ou encore de l'éducation pour ne citer que ceux-là. En effet, peu d'entre eux s'intéressent à la configuration des pouvoirs dans ou autour d'Internet et étant donné à la fois, la relative jeunesse de l'objet et l'intensité actuelle

de la question stratégique, les périodiques paraissaient tout indiqués. Le choix des périodiques résulte d'une « stratégie » simple tenant essentiellement à des questions pratiques : le corpus a été limité aux revues de la Bibliothèque Universitaire de l'Université Toulouse 1 traitant des questions de relations internationales, de stratégique, de sécurité et de défense. Ainsi construit, ce corpus paraissait à même d'apporter une conscience relativement large du sujet et en même temps, de respecter une certaine diversité de points de vue (Europe, Etats-Unis), de façon de travailler (France, Etats-Unis) ou encore d'aspects du sujets (défense, sécurité...).Concernant les choix bibliographiques, tout paraît avoir été explicité mais les défauts de la méthode et les défauts dans l'utilisation de la méthode seront explicités en partie 3.

Les entretiens semi-directifs ont été réalisés à partir d'une grille d'entretien basée sur les hypothèses de travail. Idéalement, il aurait été souhaitable de rencontrer des représentants de tous les types d'acteurs sur Internet : l'ICANN, les états, les hackers, les firmes multinationales, l'ONU... Au final, trois entretiens ont été réalisés en direct et un dernier par e-mail. Le premier a été fait avec un membre de l'ICANN, Mme INNE, ayant un travail politique de liaison avec une région bien particulière du monde, l'Afrique. Le second a été réalisé avec une personne ayant réalisé un mémoire de DEA sur l'incitation au terrorisme et ayant travaillé pour l'ONUDC, notamment en relation avec l'informatique, Internet et le terrorisme, Mr BREHAM. Le dernier a été réalisé avec un spécialiste de l'informatique, Mr POUZIN ayant participé à la création de réseaux dans les années 70, réseaux à structure proche de celle d'Internet. Dernièrement, il a participé aux travaux préparatoires du SMSI14 et au sommet lui-même. Il milite actuellement au sein d'une association pour la promotion des langues dites naturelles au sein d'Internet. Enfin, l'entretien par e-mail s'est déroulé avec un officier de la Marine spécialisé dans la communication, Mr BALLANCHO.

La grille d'entretien a été réalisée notamment en se basant sur les cours et sur des ouvrages méthodologiques15. Elle a donc été construite de façon à permettre à la fois d'obtenir des informations sur l'acteur interrogé et sur ces relations de pouvoir tout en jouant avec les contraintes du « non-dit » de ces relations de pouvoir. Au final, elle s'est articulée autour de deux grands thèmes : les tendances, les dynamiques sur Internet en premier et les acteurs participant à ces dynamiques en second. Une subdivision était apportée afin d'éviter les biais : il était demandé une vision professionnelle et une vision plus personnelle de la

14 Sommet Mondial de la Société de l'Information qui s'est tenu pour la première fois à Genève en 2003.

15 Cités dans la bibliographie.

situation. Enfin, des éléments plus libres de considération générale étaient également demandés à la fois pour des questions d'intérêt général et aussi, afin d'avoir un meilleur aperçu de la personne interrogée.

Le dernier outil, la veille stratégique, a été réalisé sur 6 sites web d'informations générales ou spécialisées16. Le choix de ces sites témoigne de deux considérations. La première est que ces sites ont été désignés par des spécialistes en informatique et Internet comme les meilleurs, informations recoupées par le simple fait que toutes les données relevées ailleurs ont toujours été retrouvées par la suite sur ces mêmes sites. Par ailleurs, des sites d'informations générales comme Google News dont le fonctionnement simple consiste à afficher les informations statistiquement les plus répandues dans le cadre de sujets généraux, ont toujours donné ces sites comme sources. Ces 6 sites ont donc été consultés très régulièrement (entre 3 et 5 fois par semaines) et ont été relevées toutes les informations relatives à l'aspect stratégique des évolutions d'Internet. Ce relevé présente donc chaque information, datée, résumée et la ou les sources. Il a permis beaucoup de découvertes et une meilleure compréhension de certains évènements.

Voilà donc, développés les outils méthodologiques de recherche utilisés. Bien évidemment, chacun présente des failles en tant que tel ou dans leurs utilisations mais comme il a déjà été dit, la dernière partie traitera de ces différents biais ou problèmes.

16 Les sites sont dans la partie Bibliographie. La veille est disponible à cette adresse : http://arnaudgarrigues.blog.com

Plan

Introduction p. 4

Prolégomènes p. 6

Partie 1 : Histoire et fonctionnement d'Internet d'un point de vue stratégique p. 21

I- Histoire p.21

A- 1969-1998 : le temps des professionnels p. 21

B- 1998 à nos jours : l'apparition du reste du monde p. 24

II- Fonctionnement p. 26

A- Architecture du système p.26

a) Infrastructures p. 27

b) Protocoles Techniques Basiques p. 29

B- Administration, Gouvernance et Politique p. 34

a) Une structure contestée : l'ICANN p. 35

b) SMSI et FGI p. 37

Partie 2 : Analyse des enjeux p. 39

I- Le système Internet et le système International p. 40

A- Internet : Une égale répartition de la Ressource ? p.40

B- Eléments de Gouvernance et de Contrôle p. 42

a) Economie Mondialisée p. 42

b) Démocratie et Cultures p. 45

C- Internet : un Système Stable ? p.46

II- Les Etats : Du Nord au Sud, une préoccupation désormais commune p. 48

A- Les Etats et Internet : La souveraineté p. 48

B- Les Etats et Internet : Sécurité et Contrôle p. 52

III- Les Individus et Internet : activisme, cybercriminalité, terrorisme p. 57

A- Activisme et Internet p. 57

B- Cybercriminalité p. 59

C- Terrorisme p. 61

Partie 3 : Vision critique méthodique et quelques éléments d'évolutions envisageables p. 64

I- Des outils de recherche biaisés par nature et par utilisation p. 64

A- Biais Norm atifs p. 64

B- Biais Méthodologiques p. 66

II- Que faut-il attendre des évolutions d'Internet ? p. 68

Conclusion p. 71

Bibliographie p. 74

Annexes p. 78

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"Entre deux mots il faut choisir le moindre"   Paul Valery