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Un champ scientifique à l'épreuve de la Seconde guerre mondiale les revues de géographie françaises de 1936 à 1945

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par Laurent Beauguitte
Université Paris 7 - Master 1 2007
  

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Conclusion

Ce travail avait un double objectif : déterminer les conséquences matérielles de la guerre, évaluer les conséquences idéologiques du régime de Vichy sur le contenu des revues universitaires françaises de géographie.

Les conséquences matérielles sont flagrantes : réduction quasi générale de la pagination, nombreux retards de publication, baisse du nombre d'articles, du nombre de collaborateurs, du nombre d'ouvrages reçus et chroniqués. Les deux revues basées à Paris ont plus souffert des restrictions que celles basées en zone libre : les Annales de géographie diminuent de moitié et ne paraissent pas en 1944, le BAGF paraît avec des mois voire des années de retard. Quelles que soient les difficultés, tous les directeurs de revue s'efforcent de continuer la parution. Maintenir une science active est vécu comme un acte de patriotisme, voire de résistance. L'étude des archives des différentes revues et des instituts de géographie permettraient de compléter ces données. Ainsi, les informations sur les tirages et la diffusion seraient un complément précieux à ce travail.

Les conséquences idéologiques sont beaucoup moins nettes. Le flou idéologique qui marque le régime de Vichy ne facilite pas la tâche. La continuité des discours et des pratiques paraît l'avoir emportée, et ce quel que soit le domaine d'étude. Le retour à la terre n'est pas considéré par les géographes comme une solution viable, et ils n'hésitent pas à l'écrire. Le développement de l'industrie, l'aménagement urbain apparaissent au contraire comme des nécessités. Le discours sur la « grande France » ne change pas de nature. La question démographique continue à obséder les esprits avant comme après la guerre. Les dérapages xénophobes, les marques de soutien au régime de Vichy se comptent sur les doigts d'une main. Plus surprenant, les marques d'hostilité, parfois à peine voilées, au régime en place, sont régulières et explicites. Le souci d'impartialité, d'objectivité propre aux scientifiques semble donc avoir beaucoup plus joué dans un sens que dans l'autre.

Nous sommes tout à fait conscient des limites de la méthodologie utilisée. Dix, vingt ou trente citations ne font pas preuve, et la citation de Bruno Latour mise en exergue de la deuxième partie n'est ni décorative ni cynique. Prétendre que ce travail a été mené avec rigueur et honnêteté est un argument scientifiquement peu probant. J'espère cependant avoir apporté quelques éléments de réponse à la question posée.

Il est peut-être un sujet qui apparaît en filigrane en ces années d'occupation. Les restrictions au déplacement ont pu amener certains géographes à développer une réflexion épistémologique. La science géographique des années 1930 est souvent décrite comme une géographie monolithique, tenue en main par les vidaliens (Pinchemel, Sanguin, 1996, p.13) , sûre d'elle-même et de ses méthodes et souffrant de paresse méthodologique (l'expression est de Numa Broc). Sans vouloir adopter l'attitude consistant à prendre le contre-pied systématique de ce qui a été écrit par les générations précédentes, cette description cadre mal avec la teneur de certains textes publiés à l'époque. André Allix s'interroge beaucoup en ces années sur la géographie, ses méthodes, son enseignement, et les résultats qu'elle produit. Que ce soit dans son compte rendu de la thèse de Lucien Gachon (Allix, 1943a) ou dans ses « Souvenirs d'un correcteur à l'agrégation » (Allix, 1943b), le questionnement domine sur les certitudes. Ce sujet n'a pas été développé car son étude nécessiterait un corpus de textes différent de celui considéré dans ce mémoire. Certains géographes ont véhiculé dans les années 1970 l'image d'une « science normale », ruraliste, conservatrice et ignorante des soucis épistémologiques. Il est sans doute temps de revenir aux textes publiés dans les années 1930 et 1940 pour nuancer cette image.

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