WOW !! MUCH LOVE ! SO WORLD PEACE !
Fond bitcoin pour l'amélioration du site: 1memzGeKS7CB3ECNkzSn2qHwxU6NZoJ8o
  Dogecoin (tips/pourboires): DCLoo9Dd4qECqpMLurdgGnaoqbftj16Nvp


Home | Publier un mémoire | Une page au hasard

 > 

La souveraineté de l'état et l'integration sous-regionale en Afrique centrale : le cas de la CEMAC

( Télécharger le fichier original )
par Anderson OUAMBA-DIASSIVY
Université de YAOUNDE II - Institut des Relations Internationales du Cameroun (IRIC) Stage Diplomatique (Master I) - Master I 2009
  

Disponible en mode multipage

Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy

UNIVERSITE DE YAOUNDE II

THE UNIVERSITY OF YAOUNDE II

INSTITUT DES RELATIONS INTERNATIONALES DU CAMEROUN

B.P.: 1637 Yaoundé

Tel: 22 31 03 05

Fax: (237) 22 31 89 99

E-mail: iric@uycdc.unicet.cm

 

INTERNATIONAL RELATIONS INSTITUTE OF CAMEROON

P.O Box: 1637 Yaoundé

Tel: 22 31 03 05

Fax: (237) 22 31 89 99

E-mail: iric@uycdc.unicet.cm

STAGE DIPLOMATIQUE

RAPPORT DE STAGE

THEME : LA SOUVERAINETE DE L'ETAT ET L'INTEGRATION

SOUS-REGIONALE EN AFRIQUE CENTRALE :

LE CAS DE LA CEMAC

Pour l'obtention du Diplôme de Stage Diplomatique

Réalisé par :

Anderson OUAMBA-DIASSIVY

Sous la direction de :

Docteur Emmanuel WONYU,

Chargé de cours à l'IRIC

Année Académique 2008-2009

SOMMAIRE

II

III

IV

V

p. 1

p.11

p.12

p.14

p.18

p.21

p.21

p.24

p.30

p.31

p.32

p.36

p.41

p.42

p.44

p.48

VII

XIII

XVII

DEDICACE.............................................................................................

REMERCIEMENTS..................................................................................

ABREVIATIONS ET SIGLES.......................................................................

REPERES CHRONOLOGIQUES.................................................................

INTRODUCTION GENERALE...............................................................

PREMIERE PARTIE : Les Etats et l'intégration en Afrique centrale.................

CHAPITRE I : La spécificité de la Souveraineté des Etats d'Afrique centrale.........

Section 1: Aperçu général de la Souveraineté des Etats de la CEMAC..................

Section 2: Les limites de la Souveraineté des Etats de la CEMAC.......................

CHAPITRE II : L'intégration sous-régionale en Afrique Centrale : la CEMAC.......

Section 1: La réforme de l'UDEAC ou naissance de la CEMAC.....................

Section 2: Présentation et état des lieux du processus d'intégration dans la zone

CEMAC..................................................................................

DEUXIEME PARTIE : La CEMAC et la politique interne de ses Etats

membres..............................................................

CHAPITRE III : L'égoïsme des Etats membres de la CEMAC : véritables

obstacles au processus d'intégration ?............................................

Section 1: La pomme de discorde de l'intégration sous régionale en zone

CEMAC..................................................................................

Section 2: La Souveraineté, les Chefs d'Etat et l'intégration en zone CEMAC...........

CHAPITRE IV : La CEMAC : vers une intégration sous-régionale ?.......................

Section 1: La problématique de l'intégration dans la zone CEMAC.....................

Section 2: Perspectives d'une véritable intégration dans la zone CEMAC...............

CONCLUSION GENERALE..................................................................

ANNEXES...........................................................................................

BIBLIOGRAPHIE.................................................................................

TABLE DES MATIERES........................................................................

DEDICACE

A la mémoire de mon très regretté père, l'Aviateur, Capitaine de l'Armée de l'air des Forces Armées Congolaises (FAC), le feu Gabriel OUAMBA « Beaucas ».

Merci Papa pour tes précieux conseils et orientations dans ma vie.

REMERCIEMENTS

Comme tout travail de cette envergure, l'ouvrage que voici est avant tout une somme de dettes. Notre reconnaissance va, en premier lieu, à nos encadreurs : le Docteur Emmanuel WONYU, chargé de cours à l'IRIC, d'une part, qui nous a fait l'honneur de diriger cette étude et d'autre part, le Professeur Narcisse MOUELLE KOMBI II, Directeur de l'IRIC.

Ensuite, nous remercions très chaleureusement le corps enseignant et le corps administratif de l'IRIC pour avoir bien voulu nous encadrer et nous accompagner pendant toute notre formation à l'IRIC. Nous pensons particulièrement au Professeur Alain-Didier OLINGA, au Docteur Wullson MVOMO ELA, au Docteur Pascal Charlemagne MESSANGA NYAMDING, au Docteur Yves Alexandre CHOUALA, à Mesdames Valérie MAMBOUNE MEMOUNA et Corentie NYEGA du Service de la Scolarité, et à Monsieur IBRAHIM NGOU ISSAH du service de la comptabilité.

Nous ne saurions clore ce chapitre des remerciements sans témoigner notre gratitude à la promotion IRIC-Stage Diplomatique 2008-2009, pour l'ambiance, la compagnie et les échanges. Spécialement Mademoiselle Preciosa MUNDI KANGUDIE, Mesdames Sidonie BOUKOULOU et HAOUA BRAHIM AHMED KOULAMALLAH ainsi que Monsieur Michel KAMDEM FOTSO et les Pasteurs Victor-Marie TIOZANG et DJEHA MAWULAWOE qui, en outre, nous ont fait l'honneur et l'amitié de relire notre manuscrit.

Enfin, nous portons nos sincères remerciements à Monsieur le Premier Ministre, chargé de la Coordination de l'Action du Gouvernement et des Privatisations de la République du Congo, son Excellence Isidore MVOUBA, qui, pour son dévouement et son abnégation à faire prévaloir le développement de la jeunesse et la promotion des jeunes cadres congolais, a permis la réalisation de cette formation. Qu'il trouve ici, l'expression de notre profonde reconnaissance. Aussi, à Monsieur Edgard Laurent BASSOUKISSA, Conseiller à la Francophonie et à l'Intégration Sous-Régionale du Premier Ministre de la République du Congo. Puissent vos conseils et votre encadrement professionnel à notre égard au Département de la Francophonie et de l'Intégration Sous-Régionale, trouver ici notre profonde gratitude.

ABREVIATIONS ET SIGLES

BVMAC : Bourse Régionale des valeurs Mobilières de l'Afrique Centrale

CEMAC : Communauté Economique et Monétaire de l'Afrique Centrale

CFA : Coopération Financière d'Afrique

COBAC : Commission Bancaire d'Afrique Centrale

EAC : Communauté de l'Afrique de l'Est

Hab. /km² : Habitant par kilomètre carré

IRIC : Institut des Relations Internationales du Cameroun

Km² : Kilomètre carré

OMC : Organisation Mondiale du Commerce

ONU : Organisation des Nations Unies

OUA : Organisation de l'Unité Africaine

PIB : Produit Intérieur Brut

RCA : République Centrafricaine

RGDIP : Revue Générale de Droit international Public

SADC : Communauté de Développement de l'Afrique Australe

UA : Union Africaine

UDE : Union Douanière Equatoriale

UDEAC : Union Douanière et Economique d'Afrique Centrale

UE : Union Européenne

UEAC : Union Economique de l'Afrique Centrale

UEMOA : Union Economique et Monétaire Ouest Africain

UMAC : Union Monétaire de l'Afrique Centrale

REPERES CHRONOLOGIQUES

Juin 1959 : Création de l'Union Douanière Equatoriale (UDE) regroupant la Centrafrique, le Congo, le Gabon, et le Tchad

1961 : Adhésion de l'Etat du Cameroun à l'UDE

08 décembre 1964 : Signature du traité instituant l'Union Douanière et Economique d'Afrique Centrale (UDEAC)

1972 : Signature par les gouvernements de la convention sur la libre circulation

1973 : Adoption du consensus dit de Fort-Lamy

1974 : Révision du traité créant l'UDEAC

1983 : Adhésion de la Guinée Equatoriale à l'UDEAC

16 octobre 1990 : Convention portant création d'une Commission Bancaire Sous-Régionale (la Commission Bancaire d'Afrique Centrale ou COBAC)

17 janvier 1992 : Convention portant harmonisation de la réglementation bancaire

1994 : Instauration du marché monétaire comprenant en son sein un compartiment interbancaire et un compartiment pour les interventions de la Banque Centrale

16 mars 1994 : Signature du traité instituant la Communauté Economique et Monétaire de l'Afrique Centrale (CEMAC)

5 Février 1998 : 33ème sommet des Chefs d'Etat et annonce de la dissolution de l'UDEAC afin de céder la place à la CEMAC

Fin 1998 : Echéance des procédures de ratification du Traité de la CEMAC par les Parlements nationaux

1999 : Entrée en vigueur du Traité instituant la CEMAC, définition des orientations de travail de l'organisation et adoption du Programme Sous-Régional de Redressement Economique et Financier des Pays de la CEMAC

24-25 juin 1999 : Premier Sommet des chefs d'Etat et de gouvernement de la CEMAC et l'achèvement du processus de ratification du Traité marquant le véritable démarrage de la CEMAC

24 février 2000 : Sommet extraordinaire des Chefs d'Etat réunis en vue d'arrêter les bases d'une politique commune de sécurité

Avril 2000 : Installation solennelle de la Cour de justice de la CEMAC à N'Djamena

22 juin 2000 : Installation solennelle de la Commission Interparlementaire de la CEMAC à MALABO

14 décembre 2000 : Deuxième Sommet des Chefs d'Etat de la CEMAC et agrément d'un nouveau mécanisme de financement de la CEMAC à N'Djamena

8 décembre 2001 : Troisième Sommet ordinaire des Chefs d'Etat de la CEMAC à Yaoundé

28 janvier 2004 : Cinquième Sommet ordinaire des Chefs d'Etat de la CEMAC

1er juin 2004 : Sommet extraordinaire des chefs d'Etat de la CEMAC à Libreville

11 février 2005 : Sixième Sommet ordinaire des Chefs d'Etat de la CEMAC à Libreville

29 juin 2005 : Sommet extraordinaire des Chefs d'Etat de la CEMAC à Malabo

14-15 mars 2006 : Septième Sommet ordinaire des chefs d'Etats de la CEMAC à Bata

25 avril 2007 : Huitième Sommet ordinaire des Chefs d'Etat de la CEMAC à N'Djamena au cours de laquelle a eu lieu la Création d'une Commission, composée d'un Commissaire par Etat membre et dirigée par un Président, en lieu et place du Secrétariat Exécutif actuel et d'autre part, d'élargir le Gouvernement de la Banque des Etats de l'Afrique Centrale, en y créant trois (3) postes de Directeurs Généraux, et de porter à douze le nombre de Directions Centrales.

24 Juin 2008 : Neuvième Sommet ordinaire des Chefs d'Etat de la CEMAC à Yaoundé

INTRODUCTION GENERALE

L'analyse de la Société Internationale révèle que celle-ci est composée de plusieurs acteurs parmi lesquels les Etats qui entretiennent des relations entre eux d'une part et avec les autres acteurs de ladite société d'autre part. L'Etat est donc l'acteur principal ou primordial selon que l'on s'inspire de certaines théories des relations internationales ou un acteur essentiel ou régulateur pour d'autres.

L'Etat, perçu comme la forme la plus évidente du pouvoir, classiquement, peut donc être défini à partir de ses éléments constitutifs à savoir : un territoire, une population, un gouvernement souverain et reconnu par la communauté internationale. L'État est une des formes d'organisation politique et juridique d'une société (en tant que communauté de citoyens ou de sujets) ou d'un pays et sa légitimité repose sur la Souveraineté (du peuple ou de la nation par exemple).

La Souveraineté est un critère reconnu à l'Etat. Ce critère peut être récusé à une entité territoriale dépendant d'une autre. C'est ce qui a conduit la doctrine à la considérer comme le synonyme de l'indépendance politique1(*). Toute entité à laquelle est attribué le qualificatif d'« Etat » peut ne pas être souveraine par absence de la personnalité morale sur la scène internationale, corollaire de cette indépendance. Cette Souveraineté systématisée en Occident, en l'occurrence sur le vieux continent, a été exportée de par le monde dans toutes ses conquêtes. « La Souveraineté est la puissance absolue et perpétuelle d'une République2(*) ».

Dans les régimes despotiques, la Souveraineté est le plus souvent détenue par un seul homme. Dans les démocraties, elle est détenue par le peuple, constitué en un corps politique, la nation : on parle dès lors de Souveraineté nationale.

La dimension du pouvoir despotique de l'État est pour ce faire la plus manifeste en Afrique. Dans tous les pays africains, il existe un centre qui engage l'essentiel des moyens de contrainte physique légale. Autrement dit, les forces armées, les forces de l'ordre et les services de sécurité dépendent de ce centre de commandement connu sous l'appellation d'État. Avec l'amorce du processus de démocratisation en Afrique, le contrôle du pouvoir despotique est plus que jamais l'enjeu de nombreux tiraillements au sein des classes dirigeantes des pays africains. Ce moyen permet effectivement aux dirigeants de mater les manifestations populaires lorsque celles-ci leur paraissent porter atteinte à leurs propres intérêts.

Le pouvoir despotique de l'Etat se doit d'être complété par la dimension normative de l'Etat. En clair, il s'agit pour l'Etat d'élaborer les normes devant régir la vie dans la société en même temps qu'il se charge de faire respecter les règles ainsi édictées. Il arrive parfois que les dirigeants légifèrent essentiellement dans le sens favorable à leurs propres intérêts et ce, au détriment de l'intérêt général. Penser par exemple aux dispositions légales ou réglementaires tendant à assurer une plus large protection des dignitaires du régime devant la justice ou encore celles qui leur accordent des avantages fiscaux. Dans ce cas, le rôle normatif de l'Etat est en quelque sorte détourné au profit des animateurs de l'appareil étatique.

La problématique de la Souveraineté des Etats d'Afrique, et plus précisément, celle des Etats de la zone CEMAC est de mise dans cette étude. En effet, ces Etats sont pour près de 90% des anciennes colonies françaises. Leur Souveraineté, découlant du processus de décolonisation, semble être une forme d'Etat importé. Le processus de la mondialisation, qui fait de nos jours, de plus en plus, l'objet de plusieurs débats, entraîne les Etats du sud dans un cercle vicieux, dans lequel, d'ailleurs, ils y sont depuis la période postcoloniale. Comme le souligne Bertrand BADIE, dans son ouvrage intitulé l'Etat importé, il est aisé de constater que « le processus de la mondialisation marque en fait les limites en laissant apparaître plusieurs inconséquences : activant l'importation des modèles occidentaux dans les sociétés du Sud, il en révèle l'inadéquation ; incitant les sociétés périphériques à s'adapter, il suscite des espoirs d'innovation tout en risquant de les tromper ; précipitant l'unification du monde, il encourage la renaissance et l'affirmation des individualités ; dotant l'ordre international d'un centre de pouvoir plus structuré que jamais, il tend à le conflictualiser davantage. En cherchant à mettre un terme à l'Histoire, il lui redonne soudain des sens multiples et contradictoires.3(*) ». Cette assertion explicite la manière dont est calqué le modèle étatique des pays africains en général et ceux de la zone CEMAC en particulier.

En Afrique, et plus précisément en zone CEMAC, on constate une accaparation de la Souveraineté de l'Etat par le pouvoir exécutif, plus particulièrement par le Chef de l'Etat. En effet, la zone CEMAC est l'une des zones au monde dans laquelle l'histoire du pouvoir politique est celle de sa confiscation, de sa privatisation et de sa sacralisation par un individu ou groupe d'individus. On y retrouve des Chefs d'Etat qui cherchent à « s'éterniser » au pouvoir, manipulant la constitution à leur guise, ayant une influence considérable sur les autres pouvoirs d'un Etat, outre le pouvoir exécutif (pouvoirs législatif et judiciaire voire même les médias qui semblent être le quatrième pouvoir). Dans ces Etats, le Chef de l'Etat semble incarner en lui seul la Souveraineté de l'Etat sinon l'Etat-même.

Au lendemain des indépendances, les pays africains adoptèrent la forme d'organisation de leurs anciennes métropoles : l'État. Deux arguments expliquaient ce choix. D'une part, les pays africains comptaient sur l'assistance de leurs anciennes métropoles pour pouvoir installer et surtout maîtriser l'État naissant. D'autre part, les organisations internationales (ONU, Banque Mondiale, FMI, etc.) ne reconnaissent d'autres acteurs que les États. Alors pour participer à la vie de ces organisations, les pays africains étaient obligés d'adopter l'État. Cette participation leur permettait par ailleurs de défendre leur Souveraineté internationale, longtemps défendue et sauvegardée individuellement par les Etats africains. Ceux-ci, optant pour un mimétisme et un suivisme de leurs anciennes métropoles, vont prendre conscience de la défense de leur Souveraineté de manière collective.

Face aux différents enjeux qui se présentent à eux, il est récurrent, de nos jours, que les Etats soient contraints de se regrouper en union, en communauté ; bref en des organisations tant régionales que sous-régionales en vue de faire un bloc en commun et défendre ensemble leurs intérêts communs. C'est le cas des Etats africains regroupés pour former l'Union Africaine (UA). Et plus restrictivement les Etats d'Afrique Centrale ayant une monnaie unique qu'est le Franc CFA (Coopération Financière d'Afrique) et pour l'essentiel ayant en commun une même métropole qu'est la France, par conséquent une même langue officielle, le français (au moins pour les trois quart de ces Etats), en une Communauté Monétaire des Etats d'Afrique Centrale (CEMAC). Pour ce faire, les Etats membres de ladite Communauté, dans le prolongement de l'action de l'Union Douanière et Économique de l'Afrique Centrale (UDEAC) et dans le souci de consolider les relations entre eux et d'accroître la côte part de la sous région sur la scène internationale, se voient l'obligation d'accélérer les mécanismes qui conduiraient à une intégration sous-régionale digne d'elle.

Aussi, l'intégration comme moyen susceptible de lutter contre la pauvreté des populations de la sous-région repose sur le développement économique qui renferme trois composantes : la libre circulation des biens, celle des capitaux et des paiements et la libre circulation des personnes. Cela n'est envisageable que par l'interaction des différents acteurs présents dans la sous-région. Mais, au regard de la place de choix qu'occupent les Etats, il est vraisemblable que le monopole lui revient de mettre en oeuvre tous les mécanismes nécessaires à l'effectivité de ladite intégration.

Seulement, force est de constater que l'intégration sous-régionale en zone CEMAC semble emboîter le pas d'« escargot » car en fait, au regard des autres communautés ou unions monétaires, à l'instar de l'Union Economique et Monétaire Ouest africain (UEMOA), nous constatons un grand retard de la part de la CEMAC tant au niveau de la circulation des personnes et des biens qu'au niveau des politiques sous-régionales communes. Laquelle Communauté constitue l'objet de notre étude.

I. Objet de l'étude

Conservant les liens qui les unissaient sous l'Administration coloniale, les Etats de la Centrafrique, du Congo, du Gabon et du Tchad vont créer en juin 1959, l'Union Douanière Equatoriale (UDE) à laquelle adhérera en 1961 l'Etat du Cameroun.

Dès leur accession à l'indépendance, certains pays d'Afrique Centrale (Cameroun, République Centrafricaine, Congo, Gabon et Tchad) prennent conscience de créer une institution de coopération régionale. A ce titre, ils signent le 08 décembre 1964 le Traité instituant l'UDEAC. Par la suite, les 22 et 23 novembre 1972, ces États signent deux conventions de coopération monétaire, l'une entre eux, l'autre avec la France, et se dotent ainsi d'une monnaie commune (le franc de la coopération financière en Afrique). La Guinée Equatoriale adhère à l'UDEAC le 1er janvier 1985, devenant ainsi le sixième membre.

La coopération monétaire a fonctionné à la satisfaction des États membres, mais elle est restée déconnectée de la coopération économique. En effet, le bilan de trente années de coopération sous l'enseigne de l'UDEAC paraît modeste et les États membres doivent faire face à de nouveaux défis internationaux. Dans cette optique, la CEMAC, qui remplace l'UDEAC, voit le jour le 16 mars 1994 à N'djamena. Les Chefs d'État et de gouvernement des pays membres, ont officiellement lancé les activités de la Communauté Économique et Monétaire de l'Afrique Centrale le 25 juin 1999, avec la nomination des responsables des divers organes créés et l'adoption d'un plan d'action dit « Déclaration de Malabo ».

Depuis le lancement officiel des activités de la CEMAC, cette union ne semble pas prendre son envol pour multiples causes évoquées, parmi lesquelles on citerait les égoïsmes des Chefs d'Etat, les obstacles forestiers qui empêchent la connexion des différentes capitales des Etats membres devant favoriser la libre circulation des personnes et des biens. La Souveraineté des Etats d'Afrique Centrale constitue également un véritable frein au processus d'intégration.

Notre étude prétend donc à analyser les alentours de ces égoïsmes, les raisons des Etats et leurs motivations à être égoïstes ou à faire prévaloir leur intégrité et leur Souveraineté au détriment de la sous région. D'où le thème : « la Souveraineté de l'Etat et l'intégration sous-régionale en Afrique Centrale : cas de la CEMAC».

II. Intérêt, motivation et Objectif de l'étude

Le processus d'intégration en zone CEMAC est la première des intégrations enregistrées en Afrique. En effet, de par ses diverses facettes qu'elle a revêtues, cette intégration ne semble pas se concrétiser pour diverses causes. L'enjeu d'un regroupement des Etats d'Afrique Centrale ayant en commun une même monnaie qu'est le Franc CFA est majeur, car plusieurs acteurs interagissent tant pour l'aboutissement que le ralentissement et/ou le freinage de ladite intégration. C'est dans cette optique qu'une réflexion approfondie sur ce phénomène est intéressante, surtout à une époque où la mondialisation bat son plein et la course au regroupement est accélérée à l'instar de l'Union Européenne (UE). Il est donc indispensable de pendre conscience des enjeux que comporterait la mise effective sur orbite de la CEMAC sur la scène internationale.

Cette étude invite tant les responsables, dirigeants ou personnalités influentes que les populations de la zone CEMAC à une rétrospection quant à la volonté de s'intégrer.

Par ailleurs, cette étude nous interpelle personnellement. En effet, nous terminons notre formation à l'IRIC en Stage Diplomatique et la maîtrise des enjeux inhérents au processus d'intégration en zone CEMAC s'impose à nous, afin de répondre efficacement aux nombreuses exigences qui jalonneront notre parcours professionnel. De même, au regard de notre appartenance à la sous-région et en rapport avec nos emplois antérieurs qui consistaient à porter une étude sur le processus d'intégration en Afrique Centrale ainsi que ceux dans l'avenir, les motivations sont immenses en vue de mieux appréhender cette intégration dans la CEMAC en qui la réalisation semble être problématique.

L'objectif de l'étude s'agit ici, pour nous, de répondre, avec les outils des sciences sociales et en prenant appui, autant que faire se peut, sur des observations directes et indirectes, aux questionnements soulevés par les obstacles au processus d'intégration en zone CEMAC. Lesquels obstacles sont tant objectifs que subjectifs. La problématique de l'intégration en zone CEMAC étant d'actualité, nombre d'ouvrages, articles et bien d'autres documents scientifiques furent réalisés et d'autres sont en cours de réalisation en vue de stigmatiser lesdits obstacles. Dans la perspective de mieux assermenter notre étude, nous nous proposons de passer en revue quelques ouvrages que nous avons eu l'occasion de consulter, la liste n'étant sans doute pas exhaustive.

III. Revue de la littérature

Il s'agit de faire un tour d'horizon sur les études portant sur le processus d'intégration dans la zone CEMAC. En effet, force est de constater qu'au regard de l'encours même de la question, la problématique sur l'intégration en zone CEMAC recense une très peu abondante littérature. A cet effet, au nombre d'ouvrages consultés, nous avons celui écrit par Jean-François BAYART, « L'Etat en Afrique » qui mène une analyse sur les groupes sociaux qui se disputent l'Etat postcolonial et des différents scénarios qui ont prévalu depuis la proclamation des indépendances en vue d'avancer des hypothèses neuves sur : la formation d'une classe dominante, la dépendance des sociétés africaines vis-à-vis de leur environnement international, la place déterminante en leur sein des stratégies individuelles et des modes populaires d'action politique, l'importance des réseaux d'influence et des territoires historiques dans le déroulement des conflits, la récurrence des conduites, souvent religieuses, de dissidences sociales, et l'émergence de cultures politiques originales. De même, le livre de Bernard BADIE intitulé « L'Etat importé, l'occidentalisation de l'ordre politique » ou l'ouvrage écrit par Philippe HUGON « Géopolitique de l'Afrique », ouvrages qui nous relatent la forme et le type d'Etat qu'on retrouve en Afrique et donc en zone CEMAC.

Une autre catégorie d'ouvrages nous a permis d'appréhender le processus d'intégration en zone CEMAC. Entre autres, nous avons le livre écrit par Alain BECART intitulé « Intégration et Développement : Bilan et Perspectives de la zone Franc en Afrique », ou encore l'oeuvre de Marc-Louis ROPIVIA intitulé « Géopolitique de l'intégration en Afrique », ouvrage qui examine d'abord les carences conceptuelles et méthodologiques, puis déconstruit les postulats sur la base desquels les premières élites dirigeantes et intellectuelles avaient voulu édifier l'unification politique de l'Afrique noire.

Une plus ample compréhension de la problématique de la CEMAC nous a été possible grâce à la consultation de certains ouvrages concernant directement le processus d'intégration en Afrique Centrale (CEMAC). Au titre de cette catégorie, nous pouvons citer le livre de Daniel ABWA « Dynamique d'intégration Régionale en Afrique Centrale », en deux (2) Tomes. Cet ouvrage fait la synthèse des travaux de réflexion réalisés par des scientifiques des universités d'Afrique centrale, en vue d'aider les décideurs à prendre des options positives pour une intégration africaine ou une unité africaine. L'intégration régionale est en effet chose trop sérieuse pour être laissée aux mains des seuls politiques. Dans cet ouvrage, il est question de répondre à nombre de questions que l'on pourrait se poser à perpétuité sur l'Afrique centrale : l'Afrique centrale dispose-t-elle d'atouts historiques, physiques et humains pour réaliser son intégration régionale ? Quels en sont les obstacles ? Quel bilan peut-on faire des 35 années de l'UDEAC ? Quelles solutions peut-on proposer pour une meilleure intégration régionale en Afrique centrale ?

Nous avons aussi le livre de HAKIM BEN HAMMOUDA, « L'Intégration régionale en Afrique centrale. Bilan et Perspectives ». Cet ouvrage constitue une contribution à la réflexion sur les questions d'intégration régionale en Afrique Centrale. Il reprend les travaux du Bureau de l'Afrique Centrale de la Commission Economique des Nations Unies pour l'Afrique qui a appuyé le processus d'intégration dans la sous-région. Nous pouvons citer également les ouvrages comme « L'Afrique Centrale » de Philippe DECRAENE, « Les Avatars de l'Etat en Afrique » de GEMDEV, « La Zone Franc à l'heure de l'Euro » de Philippe HUGON, « La Question de la Souveraineté. Droit naturel et contrat social » de Robert LEGROS ou « L'Intégration économique. Les Enjeux pour l'Afrique Centrale » de Claude NKODIA. Ouvrages qui nous ont permis d'aborder notre étude.

Cependant, force est de remarquer que tous ces ouvrages ne relatent pas la vrai corrélation qu'il y ait entre la Souveraineté de l'Etat, l'égoïsme des Chefs d'Etat et le processus d'intégration en zone CEMAC. Ainsi s'articule le dépassement de notre centre d'intérêt dans cette étude. Outre quelques travaux et revues sur la question, la particularité de notre recherche réside dans l'explication, l'analyse même de ce qui lie la Souveraineté des Etats et le processus d'intégration en zone CEMAC. Afin de réaliser cet objectif, il sied de poser la problématique générale de l'étude.

IV. Problématique

Contrairement à l'UEMOA qui bat son plein et avance dans le bon sens dans son processus d'intégration, la CEMAC, elle, marche à « pas d'escargot », d'autant plus que son intégration, malgré les changements des différents modes de gestion, ne semble pas évoluer.

De ce fait, ne peut-on pas envisager une autre lecture du processus d'intégration dans la zone CEMAC en mettant l'accent sur le mode de renonciation d'une partie de la Souveraineté des Etats membres de la CEMAC ? Dans cette optique, existe-t-il concrètement un lien entre l'égoïsme de ces derniers et le retard au processus d'intégration en zone CEMAC ? En d'autres termes, les obstacles inhérents à ce processus d'intégration ne peuvent-ils pas être levés par d'autres moyens ? Comme nous pouvons le voir, une telle problématique doit reposer sur des hypothèses précises.

V. Hypothèses

Ce sont des réponses provisoires aux questions fondamentales de la recherche. Celles-ci pourront être confirmées ou infirmées au terme d'une analyse approfondie des faits. Les hypothèses de cette étude se déclinent ainsi qu'il suit :

1. Le processus d'intégration en zone CEMAC aurait du mal à suivre son chemin car en fait, les Etats de la sous-région ont la ferme crainte quant à la cession d'une partie de leur Souveraineté d'une part, et d'autre part en fonction de leur mode de gestion respectifs tout en étant des véritables chasses-gardées des anciennes métropoles. Ils développent une forme d'égoïsme subjective et personnelle au détriment du bien-être de la population de leurs pays et par conséquent de la sous-région.

2. Les obstacles à l'intégration sous-régionale en Afrique centrale, et précisément en zone CEMAC, ne sauraient être seulement le simple fait du refus à la renonciation d'une partie de la Souveraineté des Etats membres mais aussi l'absence d'une véritable conscientisation des peuples et des brassages culturels. Plus encore, l'hypothèse selon laquelle une certaine maniaquerie des responsables et grands hommes de décision de la sous-région envers les idéologies des anciennes métropoles.

VI. Choix Théoriques

Ce sont les diverses théories qui seront convoquées pour analyser cette problématique au processus d'intégration dans la zone CEMAC dans la mesure où elles montrent les diverses facettes d'une seule réalité faite à la fois, à l'instar de toute réalité sociale, d'harmonie et de conflit, d'équilibre et de changement. Étant donné que les acteurs dont il faudra décrire les comportements sont des Etats, nous feront appel à la théorie réaliste pour illustrer notre propos.

1. Le réalisme

Le réalisme est l'approche traditionnelle des relations internationales. Elle privilégie l'Etat et en fait l'acteur essentiel, voire exclusif4(*), de la Société Internationale. Dans cette perspective ouverte par l'Etat et ses gouvernants, les relations internationales se définissent comme des relations entre sociétés politiques organisées dans le cadre d'un territoire déterminé. Parallèlement, l'histoire diplomatique est réduite à l'histoire des relations entre Etats.

La scène internationale reste encore, en bien des points, tributaire de la marque des acteurs étatiques. Ils sont affaiblis certes, mais ils restent incontournables5(*). Le réalisme permettra de comprendre le comportement et le positionnement de certains Etats quant à la préservation de leur Souveraineté nationale au détriment de la sous-région. Toutefois, bien circonscrire le cadre théorique de cette étude passe aussi par la conceptualisation d'une méthodologie.

VII. Méthodologie

Notre cheminement a alterné réflexion théorique et travail empirique. Nous ne nous sommes pas dispensés de faire l'économie de tout ce qui jusqu'à présent est su sur le processus d'intégration en zone CEMAC. Nous nous sommes appuyés pour cela sur deux types de supports.

Le premier, essentiellement des documents, est composé d'une part des ouvrages généraux, des traités et additifs, des règlements et directives de la CEMAC, des comptes rendus et des communiqués finaux des rencontres de la CEMAC, et les travaux académiques. Le second est constitué des sources électroniques : Internet, les bases de données spécialisées, notamment celles de la Commission de la CEMAC et autres supports.

Au-delà des supports sus-cités, nous nous sommes appuyés également sur nos propres réflexions et expériences professionnelles pour comprendre ce phénomène.

VIII. Plan

L'ossature de ce travail est binaire, chaque partie comprenant deux chapitres. La première partie, mettant l'accent sur la corrélation entre les Etats et le processus d'intégration en zone CEMAC, analyse d'une part, la spécificité de la Souveraineté des Etats d'Afrique Centrale, notamment ceux de la zone CEMAC en y évoquant leurs limites, et d'autre part, étudie le processus même de l'intégration en zone CEMAC en faisant une historicité du passage de l'UDEAC à la CEMAC, de même qu'une présentation et un état des lieux. Dans une seconde partie analysant la CEMAC et les politiques internes de ses Etats membres, nous porterons notre étude dans un premier chapitre, sur l'éventuel rôle que jouerait l'égoïsme des Etats membres de la CEMAC et, dans un second chapitre, nous nous focaliserons sur la problématique de l'intégration sous-régionale ainsi que sur les perspectives d'une véritable intégration dans ladite zone.

PREMIERE PARTIE :

LES ETATS ET L'INTEGRATION EN AFRIQUE CENTRALE

Pour la plupart des Etats d'Afrique et plus précisément ceux de la CEMAC, il est à noter que leur création fait suite à une décolonisation. Cependant, il existe une particularité dans ces nouveaux Etats (Cameroun, Centrafrique, Congo, Gabon, Guinée Equatoriale et Tchad) nés au lendemain des indépendances, qui se regroupent en une Communauté par le biais d'une monnaie unique qu'est le Franc CFA (monnaie à essence coloniale).

Depuis sa création, force est de constater que, malgré qu'elle soit l'une des Communautés la plus ancienne, la CEMAC ne semble pas réaliser tout au moins ses objectifs. Elle tarde à se concrétiser ou à s'affirmer. Elle demeure l'une des intégrations les moins effectives.

Pour ce faire, peut-on assimiler cette non-effectivité à l'altérité des Etats membres de ladite Communauté ? Ou peut-on croire que c'est du fait du bornage de la Souveraineté de ces Etats ? Ou encore, est-ce le mode de gestion de cette Institution avec ces diverses facettes (UDEAC hier et CEMAC aujourd'hui) qui favorise ce ralentissement ?

Répondre à cette série d'interrogations passera d'abord par l'étude et l'historicité de la Souveraineté de ces Etats regroupés au sein de la CEMAC de manière générale en vue de mieux appréhender la spécificité de la Souveraineté de ces Etats ainsi que les exceptions à cette dernière (chapitre I). Cette réponse ne saurait expliquer à elle seule ce phénomène. Il nous revient aussi le soin d'expliciter ce que l'on entend par « CEMAC » dans la perspective de montrer la différenciation dans ses diverses facettes (passage de l'UDEAC à la CEMAC ou du Secrétariat Général de la CEMAC à la Commission, etc.) et faire un état des lieux du processus d'intégration dans la zone CEMAC (chapitre II).

CHAPITRE I :

LA SPECIFICITE DE LA SOUVERAINETE DES ETATS D'AFRIQUE CENTRALE DE LA ZONE CEMAC

Selon la définition de Jean- Pierre Magnant, l'État est « l'une des formes de domination d'un groupe social sur les autres groupes qui constituent avec lui une société. Cette forme se distingue des autres par l'existence d'un appareil constitué d'individus retirés de la production et qui vivent du surproduit social prélevé chez les producteurs sous forme d'impôt. Cet appareil d'État, chargé de la gestion de la société, du maintien de son ordre interne et de la garantie de sa sécurité extérieure, est dirigé par un gouvernement 6(*) ». L'Etat a été précédé par la Polis grecque, la res publica romaine, le Saint Empire romain germanique etc. Il est délimité par des frontières territoriales à l'intérieur desquelles ses lois s'appliquent et est constitué d'institutions par lesquelles il exerce autorité et pouvoir.

Max WEBER, quant à lui, écrit ce qui suit : « Comme tous les groupements politiques qui l'ont précédé historiquement, l'État consiste en un rapport de domination de l'homme sur l'homme fondé sur le moyen de la violence légitime7(*) ». L'Etat est « le droit gouvernement de plusieurs ménages et de ce qui leur est commun avec puissance souveraine » dira Jean Bodin.

L'État que l'on rencontre dans la quasi-totalité des pays africains ne peut être cependant confondu avec celui que les pays occidentaux connaissent. Il est en effet le produit de l'histoire et de l'environnement spécifiquement africains. Bien que l'État postcolonial ait été initié et mis en oeuvre sur les cendres des Administrations coloniales, cet État se distingue néanmoins du modèle d'État occidental par une somme de caractéristiques qui en font tout compte fait un État différent8(*).

A vrai dire, l'État postcolonial d'Afrique, et précisément en zone CEMAC, s'est constitué par imitation ou plutôt par mimétisme à l'État occidental. Tout comme celui-ci s'était à son tour remodelé en copiant une bonne partie des pratiques en vogue dans l'Église catholique. Bertrand BADIE et Guy HERMET appuient cette thèse en énumérant notamment : « le droit moderne emprunté au droit canon ; les administrations territoriale, fiscale et judiciaire de l'État calquées sur celles de l'Église ; la théorie de la Souveraineté monarchique copiée de la Souveraineté pontificale ; les techniques électives et représentatives élaborées dans l'Église de Rome comme mode de gouvernement reprises dans l'espace politique étatique9(*)».

Au surplus, l'État en Afrique s'est doté des instruments utilisés par l'État occidental10(*) : les appareils législatif, exécutif et judiciaire; les administrations territoriale et fiscale; l'armée et la police; la diplomatie ; etc. C'est justement en partant de la manière dont fonctionnent ces instruments empruntés dans le quotidien de la vie politique africaine que certains observateurs de l'État postcolonial implanté en Afrique le qualifient de faible, d'État en voie de disparition ou carrément d'État inexistant.

La Souveraineté, quant à elle, est donc conçue comme étant un pouvoir de commandement. C'est une faculté internationalement reconnue d'exercice de ce pouvoir11(*) que l'Etat lato sensu, voire une société, applique à ses rapports personnels. En ce sens, le pouvoir est constitué par l'ensemble de facteurs qui expliquent la faculté d'une personne d'influencer ou de déterminer la conduite d'autrui dans le domaine social12(*). Il y a un lien étroit entre la Souveraineté et une collectivité humaine. En effet, ce concept pris dans le sens de commandement, c'est-à-dire la puissance exercée entre deux individus en relation réciproque, est inhérente à l'espèce humaine. Elle se définit, en droit, comme la détention de l'autorité suprême, c'est-à-dire d'un pouvoir absolu (dont tous dépendent) et inconditionné (qui ne dépend de qui que ce soit).

Au sens strict, la Souveraineté (Souveränität en allemand) est une autorité suprême. Celui qui est titulaire de la Souveraineté, le souverain (Herscher) n'a donc pas d'autorité au dessus de lui ; sa compétence ne relève d'aucune autorité supérieure. En conséquence, le souverain est complètement libre ou indépendant. Cependant, la Souveraineté n'appartient pas à un individu, mais à l'État, représenté par un ou plusieurs individus.

Selon la définition de Louis Le Fur énoncée à la fin du XIXe siècle et retenue aujourd'hui en droit, « La Souveraineté est la qualité de l'État de n'être obligé ou déterminé que par sa propre volonté dans les limites du principe supérieur du droit et conformément au but collectif qu'il est appelé à réaliser ». L'État souverain n'agit que selon sa propre volonté, c'est le corollaire du droit à l'autodétermination (droit des peuples à disposer d'eux-mêmes).

En zone CEMAC, le constat semble plutôt être différent de la réalité. En effet, les Etats de ladite zone agissent-ils selon le corollaire du droit de l'autodétermination ou selon le vouloir et le désir subjectif des Chefs d'Etat, incarnant leur Souveraineté ? Tel est le principal centre d'intérêt pour lequel nous porterons un aperçu général de la Souveraineté des Etats de la zone CEMAC.

Section 1 : Aperçu général de la Souveraineté des Etats de la zone CEMAC

La Souveraineté (du latin médiéval superanus qui dérive du latin classique superus "supérieur" ; et du concept grec Basileus) est le droit exclusif d'exercer l'autorité politique (législative, judiciaire et/ou exécutive) sur une zone géographique ou un groupe de peuples. Le concept émerge pour la première fois avec Jean Bodin dans Les Six Livres de la République (1576), même si Machiavel y fait allusion dans son oeuvre, sans toutefois l'expliquer ouvertement. La Souveraineté sert de pilier à l'analyse de l'État et constitue le critère de distinction des différentes formes de gouvernement qu'il décrit. La Souveraineté est la puissance absolue et perpétuelle d'une République (la République étant prise ici au sens d'État).

En zone CEMAC, comme partout ailleurs en Afrique, l'Etat est une importation occidentale. Comme nous pouvons le constater, le principe de Souveraineté est une assimilation pour laquelle l'origine et la portée diffèrent de celles des Etats occidentaux. Aussi, analyserons-nous l'origine et la portée de la Souveraineté des Etats de la zone CEMAC.

Paragraphe 1 : Origine et portée de la Souveraineté des Etats de la CEMAC

A. Origine de la Souveraineté des Etats de la CEMAC

La Souveraineté, comme principe cardinal des Etats, a le même âge que l'Etat lui-même13(*). Cependant, en zone CEMAC, le cas n'est pas le même du fait de la création et de l'existence de l'Etat au lendemain des indépendances mais pas d'une véritable Souveraineté. En effet, comme le souligne Philippe HUGON dans son ouvrage intitulé Géopolitique de l'Afrique : « l'accession à l'indépendance politique a fait des Etats africains disposant d'une Souveraineté des acteurs internationaux mais elle n'a pas radicalement, au début, changé leur système économique. L'Afrique était dans une situation de grande dépendance économique... »14(*)

Au moment où les pays africains accédèrent à l'indépendance, la priorité que les leaders politiques se fixèrent fut la construction d'une véritable nation à l'intérieur des frontières nationales. L'implantation de l'État durant les premières années de l'indépendance fut motivée principalement par cet objectif, bien que le développement économique ne tarde pas à prendre également une place de choix parmi les priorités des États d'Afrique. De fait, l'État-Nation15(*) fut un objectif que la plupart des pays africains cherchaient à atteindre en s'appuyant sur le leader politique à la tête de l'État et également sur le monopartisme (parti unique).

Un des raisons des difficultés rencontrées par les Etats africains tient de la non-coïncidence entre leur territoire et les aspirations des populations qui y furent rassemblées par l'arbitraire des puissances coloniales. Le problème posé est celui du fonctionnement d'institutions étatiques souvent calquées sur le modèle d'un Etat-nation composé de citoyens unis par un sentiment d'appartenance commune, né d'une longue histoire partagé. Or les situations concrètes de l'Afrique en sont généralement très éloignées. Alors qu'en Europe, l'Etat et la nation se sont formés dans un même mouvement, « l'Afrique se caractérise par l'antériorité de l'Etat, un Etat issu des dynamiques coloniales exogènes que les sociétés africaines ne contrôlaient pas 16(*) ».

Contrairement à celle des Etats occidentaux, la Souveraineté des Etats de la CEMAC, calquée, certes, sur le modèle occidental, trouve ses origines sans fondements c'est-à-dire tenant non compte des réalités environnementales de ses Etats. En effet, lors de la Conférence de Brazzaville de 1944 au cours de laquelle le Général De GAULLE prononça le discours annonçant l'indépendance imminente des colonies françaises, les africains se mobilisèrent à accueillir par simple assimilation non seulement le concept de l'Etat mais surtout celui de l'Etat souverain qui, au sens réel, constitue un véritable slogan pour eux. La Souveraineté des Etats de la CEMAC tire donc ses origines sur l'Occident qui fut son ancienne métropole. En effet, le mimétisme formel s'accommode cependant d'une africanisation des pratiques. « Derrière les discours sur la démocratie et la bonne gouvernance, la réalité de l'exercice du pouvoir fait la part belle aux réalités sociologiques, aux solidarités ethniques, aux rapports d'allégeances de types clanique 17(*)».

B. Portée de la Souveraineté des Etats de la CEMAC

Les théoriciens révolutionnaires du droit constitutionnel au XVIIIème siècle ont essayé de distinguer soigneusement entre l'autorité souveraine et les organes d'Etat. Selon eux, l'État n'est pas le titulaire réel de la Souveraineté. Le souverain est bien le Peuple ou la Nation dont la volonté est une, indivisible, intransmissible. L'Etat ne fait que donner force, effectivité à cette volonté. Il en est ainsi pour Rousseau selon lequel le Peuple est seul détenteur de l'autorité souveraine (la « Volonté générale ») ; les pouvoirs de l'Etat ne sont que des « émanations » de cette autorité. Si c'est le peuple ou la Nation qui sont le souverain, alors l'État ne peut parler ou agir qu'au nom du Peuple et de la Nation. Il ne peut s'identifier à eux. Dès lors l'État trouve toujours une limite interne à son action. Si la volonté souveraine est indivisible et inaliénable, il n'est pas de même du pouvoir d'Etat qui peut être partagé et cédé en partie. Les Etats totalitaires au XXème siècle, tel est l'ossature de ceux de la CEMAC, n'ont pas retenu la leçon de Rousseau : ils ont confondu Souveraineté et pouvoir d'Etat. Ces États étaient des États dans lesquels l'État incarné par son chef qui, non seulement exerçait la Souveraineté, mais prétendait être le souverain.

Paragraphe 2 : Typologie de la Souveraineté des Etats de la CEMAC

Aujourd'hui, on dégage le plus souvent trois dimensions de Souveraineté. Le mot Souveraineté, utilisé tout court ou dans sa monographie, traduit donc à la fois la notion de Souveraineté dans l'Etat ou Souveraineté domestique ou interne en transitant par une Souveraineté westphalienne ou indépendance, voire interdépendance, et celle de la Souveraineté de l'Etat ou Souveraineté internationale légale.

A. La Souveraineté dans l'Etat ou Souveraineté domestique

Celle-ci se réfère à l'administration qu'un gouvernement organise à l'intérieur d'un État et fait appel autant à l'autorité (reconnaissance de la légitimité d'un gouvernement et de ses actions par la population sur laquelle s'exerce cette autorité, par exemple) qu'au contrôle (la police et l'application des lois). Cette acception se rapporte à la Souveraineté intérieure qui se définit en droit interne par son contenu positif de plénitude des pouvoirs que l'Etat exerce sur ceux qui lui sont soumis, c'est-à-dire ses sujets. Il n'admet point de collectivité à lui supérieure. C'est en quelque sorte la portée du principe de non-ingérence dans les affaires internes de l'Etat ou des peuples à disposer d'eux mêmes.

Elle est difficilement observable dans la quasi-totalité des Etats de la CEMAC. En effet, la plupart des Etats de cette zone est sujet à des troubles internes et où la sécurité et l'ordre ne sont pas respectés notamment au Tchad, en RCA ou encore au Congo Brazzaville. Dans cette même optique, il est à relever l'interdépendance ou Souveraineté westphalienne qui se traduit par l'exclusion des acteurs extérieurs dans le processus domestique de gouverne. Cette exclusion est, en principe, réciproque entre les États, même si la tendance naturelle est d'affirmer son indépendance au niveau interne tout en cherchant à influer sur l'État voisin. Et le cas est totalement différent pour ce qui est des Etats de la CEMAC. En effet, au regard des différentes poches de tensions entretenues dans ces Etats, le soutien tant informel que formel des Etats voisins est souvent prisé pour restaurer l'ordre et la sécurité chez le « voisin ».

B. La Souveraineté de l'Etat ou Souveraineté internationale légale

Elle confère à un État sa reconnaissance internationale. En pratique, ce sont les autres États qui reconnaissent cette Souveraineté, par la conclusion de traités internationaux. Cette acception se rapporte à la Souveraineté extérieure qui ne s'analyse pas en des termes positifs, comme un ensemble des pouvoirs que l'Etat détiendrait sur ses sujets ou sur les autres, mais se définit négativement comme la non-soumission à une autorité supérieure ; le fait de n'être le sujet (au sens d'assujetti) d'aucun autre sujet (au sens juridique). L'idée de Souveraineté-indépendance comporte comme corollaire immédiat l'égalité des Etats; tous sont égaux, et à cet titre, négocient et discutent leurs accords sur la base de l'égalité et de la liberté contractuelle. En zone CEMAC, ce principe se voit respecter d'autant plus qu'au sens strict du droit, il est à constater que tous les Etats membres sont égaux entre eux, même si certaines imperfections et incohérences sont évoquées par d'autres Etats longtemps marginalisés dans le cadre de la gestion des instances de la Communauté.

Cependant, tout Etat, en adhérant à une organisation régionale (comme l'union africaine) ou sous-régionale (comme la CEMAC), doit en adopter la charité qui contient des devoirs et obligations auxquels l'Etat est tenu de se soumettre : ce qui est une limite considérable audit principe dont nous examinons.

Section 2: Les limites de la Souveraineté des Etats de la CEMAC

Depuis la fin de la Guerre froide en 1989, la mondialisation, surtout en matière économique, transforme la notion de Souveraineté en ne la faisant plus dépendre exclusivement des États. Au XXIème siècle, la mondialisation bouleverse la perception de la Souveraineté

La Souveraineté, par le biais de transferts de compétences, est de plus en plus attaquée, à la fois au niveau international, mais aussi au niveau national et régional. Les Etats de la CEMAC trouvent leur compte quant aux limites à leur Souveraineté tant dans le processus d'intégration que dans l'appartenance à d'autres Organisations ou Institutions Internationales et c'est d'ailleurs le risque à craindre pour les Chefs d'Etat de ces pays qui constitue l'un des centres d'intérêt de cette étude.

Paragraphe 1 : Les Organisations internationales

Les Organisations Internationales, notamment intergouvernementales, prennent de plus en plus de l'ampleur dans la gouvernance de la société internationale. En effet, elles finissent par développer leurs propres compétences et à se détacher de la simple volonté propre de leurs composants, les États-membres. Cette tendance remet en cause dès lors la primauté de l'Etat sur la scène internationale et par conséquent constituerait une forme de limitation aussi de la Souveraineté des Etats. A cet effet, nous constatons par exemple l'Organisation des Nations Unies, qui depuis la fin de la Guerre froide, mène une véritable politique de contrôle des États, voire une politique d'ingérence. Cependant, il ne peut toujours y avoir aucun contrôle sur les cinq Grands (les cinq membres permanents du Conseil de sécurité). De même que l'Organisation Mondiale du Commerce (OMC), qui dès sa création en 1994, n'a eu aucun mal à asseoir ses compétences en matière de commerce international à l'encontre des États, en particulier à l'encontre des États occidentaux qui se sont vus obligés d'appliquer les règles de commerce libéralisé (suppression du protectionnisme sous toutes ses formes). En réaction à ce phénomène, les États mettent souvent en place des systèmes de protection qui s'avèrent plus ou moins efficaces. Cependant, de tels systèmes sont condamnés par l'Organisation Mondiale du Commerce, qui s'évertue à mettre en place un commerce libéralisé, la libre concurrence étant représentée, dans l'économie libérale, comme ce qui permet d'atteindre le plus de profits pour tout le monde. En outre, la clause contraignante établie par l'article XVI-4 (dite « clause de conformité ») de l'accord instituant l'OMC, qui précise que « chaque membre assurera la conformité de ses lois, réglementations et procédures administratives avec ses obligations telles qu'elles sont énoncées dans les accords figurant en annexe », entraîne une véritable perte de Souveraineté étatique, puisqu'elle contraint les États à légiférer, et ce de manière conforme aux règles de l'OMC. Ce système est unique à l'OMC au niveau international (bien qu'on le retrouve dans le système régional de l'Union européenne) ; les traités ne pouvaient qu'interdire de légiférer dans un sens contraire aux obligations définies.

Dès leur accession à l'indépendance, tous les Etats membres de la CEMAC optèrent cependant pour l'adhésion à l'une ou l'autre organisation tant internationale que régionale. Tel aura été le cas de leur adhésion à l'Organisation des Nations Unies (ONU) ou encore en créant l'Organisation de l'Unité Africaine (OUA) aujourd'hui Union Africaine (UA). Plus loin même, il est à remarquer une organisation à caractère sous-régionale, les Etats de l'Afrique centrale ayant le Franc CFA en commun décidèrent de créer l'UDEAC à l'époque et CEMAC aujourd'hui, dans la perspective de conjuguer leurs efforts ensemble pour rehausser la croissance de la sous-région. En instituant la CEMAC, les Etats membres de cette communauté vont responsabiliser cette organisation et donc donner toute leur confiance à ses instances dans la gestion de ladite communauté. La création de celle-ci et la libéralisation dans la gestion des domaines de droit exclusif en principe à l'Etat remettent en cause sinon limite le principe de Souveraineté de ces Etats membres de la CEMAC.

Paragraphe 2 : L'intégration sous-Régionale

Elle constitue une limite par excellence au principe de la Souveraineté. Grâce aux multiples avantages qu'elle présente, les Etats sont obligés, dans certaines mesures d'aliéner une partie de leur Souveraineté aux fins de permettre à l'organisation de mieux réaliser ses objectifs et ceux assignés à l'Etat. En effet, une communauté revêt le caractère de ce qui est commun à plusieurs personnes ou à plusieurs groupes sociaux c'est-à-dire un groupe de personnes vivant ensemble et partageant les intérêts, une culture et un idéal commun. Alors que la caractéristique fondamentale d'un Etat est sa Souveraineté, pour prétendre une véritable intégration un Etat est censé renoncer à une partie de sa Souveraineté en faveur de l'organisation, ce qui n'est pas souvent le cas et est totalement difficile pour la CEMAC. En effet, dans cette zone, le principe de Souveraineté ne semble pas trouver ses entraves dans celui de l'intégration sous-régionale car en fait il est vrai que les organisations n'y sont pas « toutes puissantes » à l'image de l'ONU ou de l'UE et force est de constater que, contrairement aux dirigeants des ces dites organisations, qui ont une certaine influence sur les chefs des Etats membres à ces organisations et par conséquent en partie sur leurs Souverainetés, les dirigeants des instances de la CEMAC, eux, n'ont en réalité aucune influence sur les Chefs des Etats membres de cette communauté qui demeurent « tout puissant » dans leur pays et maîtres de leur Souveraineté entière, dans la mesure où lorsqu'une proposition rationnelle et importante pour la communauté est formulée par les instances dirigeantes de la CEMAC, elle ne peut trouver satisfaction si elle porte préjudice aux intérêts soi-disant d'un Etat mais en réalité c'est à cause des intérêts d'un Chef d'Etat. Tel est le cas que nous illustre le problème de la création d'une compagnie aérienne de la sous-région.

La dualité intégration régionale-Souveraineté dans la CEMAC est en effet la principale cause au freinage sinon au ralentissement au processus d'intégration constatés dans cette Communauté. Cependant, de nombreux mesures et mécanismes pris par les autorités de ladite Communauté en vue de favoriser l'intégration, il est à constater une réticence de la part des Chefs d'Etat qui craignent de voir leur pouvoir politique réduit. Le problème de l'intégration dans la CEMAC est d'autant plus pointu qu'il est important de se demander si le mode institutionnel et fonctionnel de cette communauté n'entraverait pas à sa bonne marche ou encore devrions-nous faire une rétrospection en analysant le dépassement enregistré par le passage de l'UDEAC à la CEMAC avant de présenter cette dernière et en faire un Etat des lieux.

CHAPITRE II :

L'INTEGRATION SOUS-REGIONALE EN AFRIQUE CENTRALE : LA CEMAC

« L'intégration régionale est le processus par lequel deux ou plusieurs pays réduisent progressivement et suppriment les obstacles aux échanges entre eux et les disparités entre leurs économies de manière à constituer à terme un espace économique homogène. Ce processus implique autant des aspects commerciaux et macroéconomiques que les politiques sectorielles18(*) ».

Une ère nouvelle est cependant entrain de voir le jour en matière d'intégration régionale en Afrique. Les Etats d'Afrique centrale se sont résolument engagés dans l'accélération de l'intégration. On peut souligner à cet effet le renforcement des efforts de convergence macroéconomique entre les différents pays. Il faut également mentionner en matière de libre circulation des personnes les avancées réalisées afin de faciliter la liberté de déplacement des citoyens. L'ensemble de ces mesures et de ces initiatives permettra de renforcer l'intégration et favorisera la construction d'un destin commun en Afrique centrale préalable à une intégration dynamique et compétitive dans la globalisation.

Section 1: La réforme de l'UDEAC ou naissance de la CEMAC

L'UDEAC a d'abord mis l'accent sur une stratégie d'intégration par le marché fondée sur le désarmement douanier entre pays membres et la mise en place d'un système tarifaire unique. Par la suite, et en particulier par la révision du traité intervenue en 1974, la coopération régionale a été élargie à d'autres domaines avec pour objectif de progresser sur la voie de l'union économique. Cette stratégie peut être examinée à travers trois mécanismes : l'unification douanière et fiscale, l'union économique et les fonds de solidarité.

Paragraphe 1 : La longue et difficile marche vers l'intégration

Au lendemain des indépendances, des dispositifs destinés à favoriser la circulation des biens, des services et des capitaux furent élaborés. C'est dans cet esprit que l'Union Douanière et Economique de l'Afrique Centrale (UDEAC) fut créée en 1964. En 1972, les pays membres de l'UDEAC signèrent la «Convention Commune sur la libre circulation des personnes et le droit d'établissement» mais, dans les faits et en dehors du Tchad et de la République Centrafricaine (RCA), les autres pays privilégient leurs réglementations nationales : visa d'entrée, permis de séjour, visa du Ministère chargé du travail pour les contrats, etc. Cet aspect constitua, dès le début, l'une des pierres d'achoppement de l'intégration sous-régionale. Minée par ce type de problèmes, l'UDEAC devint progressivement une union moribonde qui n'avait pas réussi dans la quasi-totalité des objectifs qu'elle s'était fixés. Quoique fragilisée par des problèmes de financement et en dépit des exceptions parfois importantes apportées par plusieurs Etats membre au tarif extérieur commun en vigueur jusqu'en décembre 1993, l'UDEAC put néanmoins lancer tant bien que mal le chantier de la réforme fiscalo-douanière. Le commerce au sein de la zone était par ailleurs très peu développé. De fait, force est de constater que, parce que l'on oubliait toujours dans le passé que le « E » du sigle signifiait « Economique » et non « Etats », l'échec de l'UDEAC était devenu patent. Alors que nombre de réalisations avait une destination et une capacité sous régionales, chaque Etat tenait à se doter par exemple de sa propre raffinerie de pétrole, de sa propre cimenterie, de sa propre usine de sucre, etc. Il en découla des problèmes de rentabilité d'autant plus graves qu'à leurs débuts, les entreprises des secteurs concernés étaient parapubliques ou exceptionnellement gérées selon des normes peu orthodoxes. L'UDEAC, après plus de trois décennies de fonctionnement, se verra de loin s'accomplir ses objectifs pour diverses causes. En effet, « les appréciations divergentes des coûts et avantages d'intégrations ont conduit dès 1968 à une grave crise de l'institution marquée par le retrait de la Centrafrique et du Tchad qui créent avec l'ex-Zaïre une organisation relativement éphémère l'UEAC (Union des Etats de l'Afrique Centrale) qui n'a duré que deux ans seulement, la Centrafrique réintégrant l'UDEAC en 1970 et le Tchad en 198419(*) ».

Paragraphe 2 : De l'UDEAC à la CEMAC

Avec le recul, il est aujourd'hui possible de soutenir que même l'organisation structurelle de l'Union n'était pas adaptée à ses missions : le secrétariat général était en effet peu outillé en moyens financiers, humains et matériels et il existait une sorte d'absence d'échelon intermédiaire entre les Chefs d'Etat et le secrétariat général. En fait, cette inadaptation des structures constitua un facteur aggravant supplémentaire. Ainsi, compte tenu non seulement des mutations de l'économie internationale mais aussi du bilan mitigé des résultats de cette Union, le Conseil des Chefs d'Etat, décida à l'unanimité, en décembre 1991, de donner une nouvelle impulsion au processus d'intégration sous-régionale. Mandat fut donc donné au Gouverneur de la BEAC de piloter un groupe de travail et chargé d'étudier et de proposer une nouvelle approche de l'intégration économique et sociale dans la Sous-région. Les conclusions de ce groupe de travail aboutirent au remplacement de l'UDEAC par la Communauté Economique et Monétaire de l'Afrique Centrale (CEMAC). Ces conclusions suggérèrent en outre d'une part, la création d'une intégration économique susceptible de consacrer la transformation de la coopération monétaire existante en une véritable union monétaire et, d'autre part, la mise en cohérence, des politiques macroéconomiques à travers la surveillance multilatérale des politiques budgétaires nationales. Dans la foulée et à l'occasion du sommet de Malabo (Guinée Equatoriale), le traité instituant la CEMAC fut signé par six Etats, le 25 juin 1994. Son entrée en vigueur intervint un mois seulement plus tard et c'est alors que fut insufflé un nouvel élan devant répondre à une logique d'intégration plus forte et plus cohérente. Par la suite, les spécificités de chaque Etat membre de la CEMAC et les enjeux géopolitiques sous-régionaux en relation avec la situation de certains des pays voisins sont tels qu'à l'épreuve des faits, la dynamique intégrationniste est lente aux yeux de nombreux observateurs. Pour certains en effet, l'institution qu'est la CEMAC semble prolonger les insuffisances de la défunte UDEAC dans la mesure où elle n'a pas encore réussi à fédérer les aspirations des Chefs d'Etat, et encore moins à les rapprocher du secrétariat exécutif qui est pourtant déterminé à renforcer les instruments communautaires et à institutionnaliser la concertation avec le secteur privé. Pour d'autres, les disparités régionales entre les zones riches et les zones pauvres ne sont pas réellement atténuées dans le cadre communautaire. D'où l'importance des mécanismes compensatoires encore absents et des investissements qui ne sont, hélas, pas encore nombreux. Le nombre limité des investissements entrepris dans le cadre de la nécessaire intégration régionale est d'autant plus petit que les besoins de développement économique sont énormes. Malheureusement, l'effort d'investissement est obéré par le faible niveau du taux d'épargne nationale (13,1% en 1998) et l'insuffisance des circuits de financement. A ce propos, le lancement espéré du fonds de développement de la Communauté, chargé essentiellement de financer les projets intégrateurs de la zone et d'apporter un soutien à la compensation des pertes des recettes dues à l'application de la réforme fiscalo-douanière est porteur d'espoirs.

Ainsi, un constat largement partagé est celui d'un bilan fortement mitigé au regard des potentialités de la sous-région Afrique Centrale. Des explications traditionnelles pour les pays africains peuvent être invoquées ici : extraversion de l'économie, insuffisance des voies et infrastructures de communication, problèmes politiques internes des Etats et conflits interétatiques, conflits entre intérêts nationaux et engagement sous-régionaux, appréciations divergentes des coûts et avantages de l'intégration. Mais, dans le cas de l'Afrique centrale, ces difficultés prennent un relief particulier.

Section 2: Présentation et état des lieux du processus d'intégration dans la zone CEMAC

La nécessité d'intensifier leur coopération a poussé certains Etats de l'Afrique Centrale à signer le 8 décembre 1964 à Brazzaville le traité instituant l'Union Douanière et Economique de l'Afrique Centrale (UDEAC). Cette organisation sous-régionale à laquelle adhérera la Guinée Equatoriale en 1983, fut certainement la plus ancienne de toutes les organisations africaines d'intégration et devait, malgré d'énormes difficultés de parcours quelques fois, survivre une trentaine d'années. Elle avait su surmonter des crises aiguës des années 1966 avec le retrait-réintégration de la RCA et du Tchad. Toutefois, avec les crises économiques successives des années 1980-1990, il avait paru indispensable de relancer le processus d'intégration économique et sociale sous une nouvelle forme plus dynamique, avec la signature le 16 mars 1994 à N'DJAMENA au TCHAD du Traité instituant la Communauté Economique et Monétaire de l'Afrique Centrale (CEMAC).

Paragraphe 1 : Présentation du processus d'intégration dans la zone CEMAC

La CEMAC est une communauté d'Etats appartenant tous à la sous-région Afrique Centrale et ayant en commun une même monnaie (le FCFA). Comme le montre la carte ci-dessous (Carte des Etats membres de la CEMAC), cette Communauté compte six Etats : le Cameroun, la Centrafrique, le Congo, le Gabon, la Guinée Equatoriale et le Tchad, bien qu'il arrive des fois que les Etats comme le Sao Tomé et Principe ou la RDC y participent en tant que membre observateurs.

Née de la volonté des Gouvernements de six Etats Membres de l'ancienne UDEAC (Cameroun, Centrafrique, Congo, Gabon, Guinée Equatoriale, Tchad), la CEMAC constitue une avancée considérable par rapport à l'Organisation qu'elle était appelée à remplacer. En effet, dans le cadre de cette Communauté, les Gouvernements des Etats membres ont réaffirmé leur attachement aux principes de liberté et de démocratie et se sont engagés à : développer ensemble toutes les ressources humaines et naturelles de leurs Etats pour le bien être de leurs peuples dans tous les domaines ; donner une impulsion nouvelle et décisive au processus d'intégration en Afrique Centrale par une harmonisation accrue des politiques et des législations de leurs Etats ; assurer la convergence des performances de leurs politiques économiques au moyen du dispositif de la surveillance multilatérale. Par ailleurs, ces mêmes Gouvernements ont accepté de faire bénéficier à cette nouvelle Communauté du transfert d'une parcelle de la souveraineté des Etats membres, transfert qui peut s'apprécier au travers de la création d'un Parlement et d'une Cour de Justice Communautaires ainsi que de nombreuses prérogatives dévolues au Secrétariat Exécutif devenu « Commission » de la CEMAC aujourd'hui. Laquelle Commission, créée aux termes de la 8ème session ordinaire du Sommet des Chefs d'Etat de la CEMAC, qui s'est tenue le 25 avril 2007, à N'Djamena (Tchad), est composée d'un Commissaire par Etat membre et dirigée par un Président, qui, de nos jours, est incarné par la personne de Monsieur Antoine TSIMI, de nationalité camerounaise. De même, autres réformes ont consisté d'élargir le Gouvernement de la Banque des Etats de l'Afrique Centrale, en y créant trois (03) postes de Directeurs Généraux, et de porter à douze (12) le nombre de Directions Centrales. Il sied cependant de se demander si le changement de termes des instances de gestion de la Communauté sont fonction de celui du mode de gestion même ou du rôle et de la place qu'occupe le Président de la Commission devant la Conférence des Chefs d'Etat. Le constat et le résultat sont les mêmes c'est-à-dire une Commission qui n'a pas de réel pouvoir de décision.

La mission essentielle de la CEMAC est de promouvoir un développement harmonieux des Etats membres dans le cadre de l'institution d'un véritable marché commun. Aussi, lui est-il assignée la réalisation des objectifs suivants : mettre en place un dispositif de surveillance multilatéral des politiques économiques des Etats membres ; assurer une gestion stable de la monnaie commune ; sécuriser l'environnement des activités économiques et des affaires en général ; harmoniser les réglementations des politiques sectorielles dans les domaines essentiels prescrits par les textes organiques (agriculture, élevage, pêche, industrie, commerce, transport et télécommunications, énergie et environnement, recherche, enseignement et formation professionnelle.) ; créer un marché commun basé sur la libre circulation des personnes, des biens, des capitaux et des services.

La CEMAC est composée de deux Unions : une Union Economique de l'Afrique Centrale (UEAC) et une Union Monétaire de l'Afrique Centrale (UMAC). Avec deux (02) institutions traditionnelles que sont la Conférence des Chefs d'Etat et le Conseil des Ministres de l'UEAC, elle comprend autres organes de décision de la Communauté tels que : le Comité Ministériel de l'UMAC, la Commission de la CEMAC installée à Bangui, la Cour communautaire de Justice (composée de 12 magistrats, elle comprend une Chambre Judiciaire et une Cour des Comptes) et dont le siège est à N'Djamena, la Commission Interparlementaire mise en place en juin 2000, la Commission bancaire d'Afrique Centrale (le COBAC) fixé à Libreville, la Bourse Régionale des valeurs Mobilières de l'Afrique Centrale (BVMAC) dont le siège fixé à Libreville (sur cette question, un réel quiproquo réside du fait de l'existence de deux (02) bourses dans la Communauté dont la seconde est la « Douala Stock Exchange » ou DSX et occasionnant ainsi un ralentissement dans le processus d'intégration car, la visibilité et la valorisation ou le rayonnement de l'une ou l'autre bourse sur la scène internationale constituent une véritable concurrence entre les deux (02) bourses et la question est celle de savoir si le Cameroun, propriétaire de la DSX, accorderait la même volonté et le même pouvoir que les autres membres de la CEMAC à la BVMAC ?)

De tous ces organes, il est à noter que l'organe suprême est la Conférence des Chefs d'Etat. Elle détermine la politique de la Communauté et oriente l'action du Conseil des Ministres de l'UEAC et du Comité Ministériel de l'UMAC. Elle se réunit au moins une fois par an. Cependant, au travers le pouvoir assigné à cette Conférence force est de constater que celle-ci la puissance absolue de la Communauté et au regard des divergences d'intérêts « nationaux » que revêt les Chefs d'Etat, il est probable de voir un frein au processus d'intégration car toutes les décisions proposées par la Commission ne seront pas toutes acceptées. De même, en vertu de l'incompatibilité du principe de la Souveraineté des Etats et le phénomène d'intégration sous-régionale, il n'est pas possible d'envisager une véritable réussite dans le processus d'intégration si une assez grande et importante place n'est pas accordée à la Commission, véritable moteur dans ce processus. Telle est la présentation actuelle du processus d'intégration en zone CEMAC. Aussi, nous nous proposons de porter un regard sur l'état des lieux de cette Communauté.

3

2

4

5

6

1

Carte des pays membres de la CEMAC

LEGENDE

1= Cameroun

2= Centrafrique

3=Congo

4=Gabon

5=Guinée Equatoriale

6=Tchad

Paragraphe 2 : Etat des lieux du processus d'intégration dans la zone CEMAC

La CEMAC est une organisation internationale créée pour prendre le relais de l'UDEAC. Le traité instituant la CEMAC a été signé le 16 mars 1994 à Ndjamena (Tchad) et est entré en vigueur en juin 1999.

Au nombre des préoccupations que regorgent la CEMAC, la libre circulation des personnes et des biens... des capitaux, demeure naturellement un dossier important, car pour créer un espace économique réellement viable et attractif, il faudrait que cette circulation soit effective. A cet effet, dans la perspective de rendre effective cette libre circulation, il est nécessaire pour les Etats membres de la CEMAC d'être à la hauteur de résoudre les problèmes d'ordre sécuritaire. Il existe, en effet, des problèmes de biométrie, des problèmes de sécurisation de la frontière extérieure de toute la zone CEMAC et c'est là une approche pragmatique qui a le mérite de résoudre les vrais problèmes qui se posent, de manière à rendre cette libre circulation effective.

Pour réussir l'entreprise de l'intégration, la CEMAC se doit aussi de décloisonner son espace, activer le dossier de la compagnie aérienne Air CEMAC car, il n'est plus à démontrer que se déplacer dans cette zone relève de gymnastiques incroyables. Il faut atteindre cependant, dans ce dossier un niveau d'appropriation des Etats, qui soit irréversible, puisque toute compagnie aérienne a pour fonds de commerce les droits de trafic, qui sont effectivement déjà donnés par les Etats de la CEMAC et leur souscription sur capital communautaire, donc, c'est dire que c'est un dossier qui a atteint un stade irréversible.

Au regard de toutes les réformes opérées au sein de ladite Communauté ainsi que les différents projets réalisés et en cours, il est aisé de se rendre compte que le processus d'intégration économique des Etats membres de la CEMAC peine à franchir le cap de la première étape de sa réalisation. En l'état de son fonctionnement actuel, la Communauté apparaît non pas comme une organisation d'intégration supranationale à même d'impulser « le passage d'une situation de coopération à une situation d'union » mais davantage comme une organisation intergouvernementale marquée par l'égoïsme et l'emprise des Etats membres sur ses institutions qui, dès lors, jouent difficilement leur rôle prééminent dans la mise en oeuvre d'une politique réaliste d'intégration. L'UEAC ne jouit pas d'une pleine autonomie d'action ; la Commission et le Parlement Communautaire n'ont pas le poids politique effectif et ne disposent pas non plus, tout comme la Cour de Justice, d'un mécanisme d'injonction et de sanction susceptible de contraindre les Etats, les autres Institutions et organes de la Communauté au respect des décisions communautaires ; l'exécution de ces décisions accuse dès lors une faiblesse notoire. Préoccupée certainement par l'insuffisance des stratégies et des méthodes appliquées jusqu'alors, la Conférence des Chefs d'Etat a commandé une étude sur la réforme du fonctionnement des institutions et organes de la CEMAC lors de sa réunion tenue en mars 2006 à Malabo en Guinée Equatoriale.

Un encadrement juridique pouvant assurer à ces Instituions et organes une indépendance, une structuration et une fonctionnalité nécessaires à la recherche et à la protection de « l'intérêt commun » s'avère indispensable autant qu'un redéploiement conséquent des ressources humaines. La nouvelle dynamique de l'intégration économique et monétaire des Etats membres reste tributaire de l'adéquation entre l'ambition intégrationniste du Traité et les pouvoirs conférés aux Institutions et organes chargés de la traduire dans les faits. Certes la construction d'une Communauté économique et monétaire est une oeuvre de longue haleine ; elle ne se fait pas « d'un coup », mais « progressivement par des réalisations concrètes et irréversibles, créant des solidarités de fait » comme le faisaient remarquer déjà Jean Monnet et Robert SCHUMAN, à propos de l'Union européenne.

Mais par delà le renforcement des institutions et organes communautaires et de leurs financements, on ne saurait plus longtemps faire l'économie d'une vigoureuse réflexion tant sur l'adhésion constante des populations à l'idéal communautaire, que sur la corrélation entre le processus graduel d'intégration et l'approfondissement de l'ancrage démocratique des Etats membres, appelés à s'adapter aux mutations politiques économiques et sociales de l'environnement international. C'est dire combien le projet d'intégration des Etats de la CEMAC interpelle toutes les intelligences dont regorgent si heureusement la sous région. Les intellectuels et les jeunes notamment devraient s'approprier ce projet et apporter, au mieux de leurs talents, un éclairage novateur aux bâtisseurs que sont les Hommes d' Etat, les créateurs des richesses etc. En tout état de cause, la réussite du projet d'intégration des Etats membres de la CEMAC reste tributaire d'une volonté politique éclairée, ferme et attentive. C'est dire que les Etats membres de la CEMAC doivent revoir leurs politiques internes respectives en vue de favoriser le processus d'intégration de cette sous-région. Tel sera le centre d'intérêt de l'étude de notre deuxième partie qui consiste à l'analyse comparative entre la CEMAC et les politiques internes de ses Etats membres.

DEUXIEME PARTIE :

LA CEMAC ET LES POLITIQUES INTERNES

DE SES ETATS MEMBRES

Fondée il y a quinze (15) ans, la Communauté économique et monétaire de l'Afrique Centrale (CEMAC) est à la peine. Intégration régionale balbutiante, rivalités au sommet, « affaire » de la BEAC etc., le chantier, ouvert en 1994, est loin d'être achevé. Si l'union monétaire est à ranger du côté des acquis, sous la haute protection d'un Franc CFA placé sous la tutelle du Trésor français, pour le reste, le bilan est mince. L'intégration est peu avancée et la compétitivité de la zone est faible, car dans cette zone, il est à constater par exemple que le transport de marchandises, entre Douala et N'Djamena coûte six fois plus cher qu'entre Shanghai, en Chine, et le port de Douala. Il dure également deux fois plus longtemps?: soixante jours, contre trente jours.

Dans cette zone, où la part du commerce intracommunautaire ne cesse de diminuer par rapport à celle des années 1990, la levée des barrières tarifaires intracommunautaires a eu un effet contre-productif puisque les recettes publiques étant pour l'essentiel douanières, les gouvernements privilégient les importations extracommunautaires qui, elles, remplissent les caisses de l'État. Donnons ainsi lieu à une inadéquation entre les politiques tant sectorielles que régionales programmées par la CEMAC et les politiques internes de ses Etats membres. D'abord, de l'épineux problème du passeport CEMAC, officiellement institué en 2000, traduisant également cette marche laborieuse vers une véritable communauté de destin, qui d'ailleurs des propos du Président de la Commission de la CEMAC, Antoine NTSIMI, pourrait être effectivement mis en circulation d'ici début 2010 ; ensuite de celui de ceux des fortes turbulences qui ont accompagné le lancement de la compagnie aérienne Air CEMAC ; et enfin, à la rivalité entre la Bourse de Libreville et celle de Douala. De ces trois faits, l'on pourrait remarquer autant de distanciations entre les Etats membres de cette Communauté dues aux intérêts nationaux de ces derniers mais en réalités à l'égoïsme des Chefs d'Etat. Ainsi, pourrions-nous examiner dans un premier chapitre, la question des égoïsmes des Etats membres de la CEMAC qui constitue un véritable obstacle pour l'aboutissement à intégration ? Et dans un second chapitre, nous dégagerons les maux et les grandes caractéristiques d'une véritable intégration dans cette zone.

CHAPITRE III :

L'EGOÏSME DES ETATS MEMBRES DE LA CEMAC : VERITABLES OBSTACLES AU PROCESSUS D'INTEGRATION ?

Consciente de ces travers, la CEMAC a décidé de revoir la relance de son processus d'intégration. En cela, les déclarations et revendications de la Guinée équatoriale, qui s'estime sous-représentée au sein des institutions sous-régionales, auront été utiles. Lors du tumultueux sommet de N'Djamena, le 25 avril 2007, le Secrétariat exécutif de l'organisation a été remplacé par une Commission avec un président, le Camerounais Antoine NTSIMI, devant rendre compte de ces changements. Et si cet Etat n'a toujours pas obtenu une rotation des postes, le consensus de Fort-Lamy adopté en 1973 tient toujours, la réforme des institutions se poursuit. À commencer par la Banque des États de l'Afrique centrale (BEAC), où le gouverneur gabonais Jean-Félix MAMALEPOT, longtemps à ce poste, a laissé la place à un compatriote, Philibert ANDZEMBE, cette fois-ci, assisté par trois directeurs généraux?: un Centrafricain, un Camerounais et, bien sûr, un Equato-guinéen. Plus la Guinée équatoriale devient riche, plus elle revendique une place à la hauteur de ses revenus.

Il faut cependant admettre que les projets d'intégration ont été insuffisants. A titre d'illustration, il est à percevoir par exemple que les réalisations concrètes font défaut, il est possible d'expliquer ces retards par les rivalités entre Chefs d'État. Les considérations claniques ou ethniques étant de mise et des véritables enjeux pour une véritable intégration, bien que celle-ci, à l'image de l'UE, ne saurait se réaliser aussi facilement car, il faudrait au moins un minimum de temps. Reste que le positionnement du doyen des Chefs d'Etat de cette zone, El Hadj Omar BONGO ONDIMBA20(*), placé au devant diplomatie de cette zone, et celui du Président Paul BIYA, souvent absent lors des sommets, sans oublier le fervent disciple de la françafrique, le Président Denis SASSOU NGUESSO, n'est pas franchement de nature à accélérer le processus. Les revendications du Président TEODORO OBIANG NGUEMA remettent en cause les équilibres et les contours du leadership régional. Quant aux contentieux territoriaux, dont celui opposant le Gabon et la Guinée équatoriale sur l'îlot de Mbanié potentiellement riche en or noir, ils sont autant de venins qui empoisonnent l'esprit communautaire.

Dans cette perspective, nous attellerons-nous à porter un regard dans une première section, à la pomme de discorde de l'intégration sous régionale en zone CEMAC et, dans une seconde section nous nous pencherons sur l'analyse d'une éventuelle corrélation entre la Souveraineté, les Chefs d'Etat et l'intégration dans cette communauté.

Section 1: La pomme de discorde de l'intégration sous régionale en zone CEMAC

L'intégration régionale dans les pays en développement est perçue depuis fort longtemps comme un facteur accélérateur du développement économique. Elle permet en effet de créer un marché plus vaste et apparaît donc comme une solution à l'étroitesse de la taille de marché intérieur qui constitue aux yeux de nombreux spécialistes, l'un des principaux obstacles à l'industrialisation dans les pays en développement en général et en Afrique subsaharienne en particulier. L'intégration régionale est aussi de nos jours considérée comme un des principaux moyens d'insertion des pays en développement dans une économie mondialisée. Cependant, dans la réalité on observe que, dans les pays en développement en général et en Afrique en particulier, les nombreuses tentatives de constitution formelle d'un processus d'intégration régionale se sont soldées par des échecs. L'exemple des pays de la CEMAC est une illustration parfaite d'un processus d'intégration régionale qui se heurte à de nombreuses difficultés pour son aboutissement. Une des principales raisons qui est souvent évoquée pour expliquer les difficultés et/ou les échecs des processus d'intégration régionale dans les pays en développement, c'est l'inégale répartition des gains de l'intégration entre les pays participants. Les pays leaders sur le plan économique sont souvent supposés être les principaux voir les seuls bénéficiaires d'un processus d'intégration régionale d'où la réticence des autres pays à s'engager à fond dans le processus.

Parmi les acteurs impliqués dans la logique de compétition des puissances régionales en Afrique Centrale, il ya des Etats, des rebellions armées, des petits groupes indépendants , les réseaux d'élite comprenant un noyau de dirigeants politiques, militaires et hommes d'affaires, des compagnies privées de sécurité, des trafiquants d'arme, des multinationales, etc. Autant d'acteurs mis en scène, mais pour ce qui est de notre étude nous nous limiterons aux seuls Etats. Les turbulences liées à la solidarité concurrentielles entre les puissances régionales ont pour enjeu la maîtrise et le contrôle stratégique par les potentialités internes. En effet, au nombre des discordes constatées en zone CEMAC, il est à noter essentiellement la problématique de leadership (paragraphe 1) ainsi que les querelles autour de ce leadership (paragraphe 2) dans cette sous-région.

Paragraphe 1 : La problématique du leadership en zone CEMAC

Le problème de leadership en zone CEMAC découle du constat de la faillite du couple Cameroun-Gabon à se positionner durablement comme le moteur de la zone21(*). L'alternative crédible serait un couple Cameroun-Tchad, qui semble disposer d'atouts plus pertinents. Le Gabon a toujours affiché ses prétentions au leadership. Mais, il n'est pas qualifié pour assumer une telle responsabilité. Certes, il dispose d'un avantage comparatif sur l'échiquier diplomatique et qui est inhérent à l'entregent du Président BONGO, à la rente pétrolière et surtout à son rôle de relais de l'influence de la France en Afrique. Cependant, le Gabon est disqualifié notamment par le fait qu'il n'adhère par au projet d'intégration régionale ; il préfère plutôt la coopération et toute son action diplomatique en la matière vise à s'assurer que les processus en cours au sein de la sous-région n'iront pas au-delà de la phase de coopération. D'où, par exemple, les entraves posées systématiquement à l'égard des initiatives communautaires, tels que la libre circulation, le droit d'établissement, et le financement de l'UDEAC/CEMAC22(*). La tactique du Gabon, ces dernières années, a consisté à s'associer au Congo en vue de s'imposer comme le moteur de la CEMAC. Il s'agit d'une entente séculaire renforcée par des liens personnels et une coopération bilatérale conviviale. Les relations interethniques et interterritoriales entre le Congo et le Gabon, durant la période précoloniale, laissent transparaître un principe d'interpénétration et une symbiose que l'on n'a pas observée dans le cas du couple Cameroun-Gabon. On note en effet des similarités ethniques très profondes dans les zones frontalières. Et les principaux groupes ethniques dont il est question ici sont : les Kota, Mbédé, Nzebi, Punu, Téké et Vili. De plus, le Gabon a été une périphérie ou une province historique du Congo. Les entités sociopolitiques du Gabon23(*) ont été soit vassales soit énormément influencées par celles du Congo dont les deux principales ont été celles des Téké et du Loango24(*). Le Cameroun cependant, se permet de s'imposer comme le « leader naturel et légitime » de la CEMAC. Il représente environ 50% de la population, du PIB et de la masse monétaire en circulation dans la sous région. Pôle universitaire, agricole et industriel de la CEMAC, il est le seul pays de la zone à avoir entamé une véritable multinationalisation de ses entreprises25(*). Seul pays limitrophe de tous les cinq autres de la CEMAC, le Cameroun se targue d'être le point central de plusieurs politiques communautaires et a démontré sa capacité à mener une initiative concurrente à un projet régional (Douala Stock Exchange). Néanmoins, dans le but de paraître hégémonique et en raison des charges induites par le rôle de leader, le Cameroun devrait se trouver un allié. Le Tchad semble le pays le plus disposé à un tel partenariat. Tout comme Yaoundé, N'Djamena adhère à l'intégration et a démontré sa volonté à s'engager dans la sous-région (envoi de troupes au Congo et en RCA pour soutenir respectivement Denis SASSOU NGUESSO et François BOZIZE). Le Cameroun et le Tchad forment une alliance objective vivifiée par une coopération bilatérale dynamique. Ce couple repose sur un engagement politique appuyé (« Ce qui est bon pour le Tchad l'est également pour le Cameroun et vice versa26(*) »), une concertation permanente au sommet et l'adoption de positions communes sur des dossiers sous-régionaux. Il est sous-tendu par des liens historiques, juridiques, sociologiques et un facteur géostratégique. Le Tchad est un pays enclavé. Sa porte-océane la plus viable est le Cameroun. Entre les deux pays, l'intégration avance. De plus, le Cameroun et le Tchad sont les deux pays les plus peuplés de la CEMAC (environ 25 millions sur les 29 de la CEMAC) et ont la plus forte densité (20 hab. /km²). Les chiffres ci-dessus nous montrent que la première force du Cameroun au sein de la zone CEMAC provient de sa population. La population du Cameroun représentait en effet en 2002 environ 48% de la population totale de la CEMAC alors que sa superficie ne représente que 16% environ de la superficie totale de la CEMAC. La deuxième puissance régionale sur ce plan étant le Tchad. Les autres pays qui sont, à l'exception de la RCA, des pays producteurs de pétrole possèdent un nombre d'habitants faible.

Données générales économiques des pays de la CEMAC en 2002

 

Cameroun

Congo

Gabon

Guinée E.

RCA

Tchad

Population (millions)

15,5

3,2

1,3

0,469

3,8

7,9

En % de la population de la CEMAC

48,18

9,94

4,04

1,45

11,81

24,55

Superficie (Km²)

475400

342000

267700

28050

623000

1,3 million

En % de la superficie totale de la CEMAC

15,65

11,20

8,81

0,92

20,51

42,81

PIB (milliards de FCFA)

7363,6

2225 ,2

3353,3

1523,9

709,3

1205,8

En % du PIB de la CEMAC

44,95

13,58

20,47

9,3

4,32

7,36

Source : Calcul de l'auteur à partir des données du Bureau Afrique centrale de la Commission Economique de l'Afrique compilées dans Les économies de l'Afrique centrale 2004.

La situation de la CEMAC, qui est décrite ci-dessus et qui se caractérise par l'existence d'un pays leader sur le plan économique, n'est pas une particularité de cette zone, elle apparaît même comme une des caractéristiques principales de la plupart des accords d'intégration régionale en Afrique subsaharienne. Ainsi à l'image du Cameroun en zone CEMAC, le Kenya domine la Communauté de l'Afrique de l'Est (EAC), la Côte d'Ivoire domine l'UEMOA et l'Afrique du sud domine la Communauté de Développement de l'Afrique Australe (SADC).

Fort de cette situation, il est à noter une forte revendication et voire même une contestation de la Guinée Equatoriale qui se veut le rôle de leader de la sous-région. Au lendemain de la découverte des gisements pétroliers sur son territoire et actuellement détenant près de 40% des réserves de la communauté au Trésor français, cet Etat crée un certain nombre de bouleversements au sein de la CEMAC en se mettant à la tête des réformes opérées au sein de cette communauté sollicitées en 2005. A ce sujet, il faut dire que nombre de projets intégrateurs dans la CEMAC n'aboutissent pas à cause de ce phénomène. Au lieu de repenser la manière dont la communauté devra décoller, la réflexion est portée plutôt sur la manière dont tel ou tel autre Etat envisage d'être leader de la sous-région. Dans cette perspective, il est à remarque une véritable querelle autour de la problématique du leadership au sein de la CEMAC que nous nous permettons d'examiner dans un second paragraphe.

Paragraphe 2 : L'intégration en zone CEMAC, querelle de leadership ?

Le leadership peut être fondé sur une dimension «historique ». Certains Etats ne rechigneraient pas à tirer de leur statut de membre fondateur d'une organisation la reconnaissance d'un rôle de «dépositaire de l'ambition originaire», qui leur confèrerait une autorité politique sur les autres. Mais le leadership historique peut aussi résulter d'un point de vue plus personnel, de la participation du dirigeant politique d'un Etat à la création de l'organisation d'intégration. Le leadership peut également s'affirmer d'un point de vue «militaire». L'Etat concerné se prévaudra alors soit de sa capacité à régler des conflits dans la zone, soit de son aptitude (non affirmée mais éprouvée) à «déstabiliser» potentiellement la zone ou une partie de celle-ci. L'implication du Tchad dans le conflit centrafricain et notamment sa contribution au renversement du régime d'Ange- Félix Patassé, l'érigent en interlocuteur politique de premier ordre de la RCA, avec néanmoins des implications certaines sur sa position au sein de la CEMAC. Le critère démographique a en outre son importance dans certaines organisations d'intégration. Il revêt une dimension économique notable, mais peut aussi, dans certains cas, être un facteur de leadership politique institutionnalisé. On peut aussi envisager une hypothèse de leadership « démocratique », car l'émergence dans l'un des Etats de la région d'un pouvoir démocratique peut être un facteur d'influence au sein des institutions régionales.

Au nombre des querelles qui existent au sein de la CEMAC, nous avons également les revendications de la Guinée Equatoriale qui créent des contradictions. En effet, ils question de savoir le lien entre la Guinée Equatoriale et les réformes de la CEMAC, est-ce un suivisme ou un leadership. Cet Etat faisant une montée dans l'affirmation de ses prétentions sous-régionales. Il a d'abord usé de l'arme de la « diplomatie financière ». C'est ainsi qu'en 2002, il a successivement octroyé un soutien financier à la RCA et au Gabon.27(*) Par la suite, les autorités équato-guinéennes se sont singularisées en retirant leurs troupes de la Forces Multinationale de la CEMAC en Centrafrique (FOMUC) en 2003. Puis, par le biais de différents médias, le Président Teodoro OBIANG NGUEMA MBASOGO et ses collaborateurs ont commencé à souligner « l'urgente nécessité » qu'il y aurait à « moderniser la CEMAC28(*) ». Finalement, lors du 6ème sommet des chefs d'Etat de la CEMAC, les 29 et 30 juin 2005, à Malabo, le Président OBIANG NGUEMA a plaidé devant ses pairs pour « plus d'équité dans l'attribution des responsabilités ». A cet égard, il a requis et obtenu la réalisation d'un audit juridique et financier des institutions communautaires29(*).

Section 2: La Souveraineté, les Chefs d'Etat et l'intégration en zone CEMAC

Pour Georges SCELLE, « les Organisations Internationales qui tendent à une intégration en se substituant aux Etats dans l'exercice de certaines fonctions connaissent un mode de fonctionnement et de distribution du pouvoir qui relève du fédéralisme.30(*)» Or, la CEMAC ne semblent pas correspondre à ce schéma idéal. Les organismes d'intégration régionale d'Afrique centrale ont été conçus et mis en place en tant qu'associations d'Etats constituées par traité, dotées d'une constitution et d'organes communs et possédant une personnalité juridique distincte de celle des Etats membres31(*). Ceux-ci entendent demeurer des sujets souverains librement associés dans les organismes interétatiques dont la qualification communautaires n'est ni synonyme d'union ni prémices d'une fusion. De fait, le « souverainisme » imprègne fortement les bases structurantes de ces associations et reflète dans le classicisme de leur statut juridique.

La zone CEMAC, si on la compare aux autres espaces politico-économiques de l'Afrique subsaharienne, est celle où le pouvoir conserve et se conserve le plus longtemps. Les six chefs d'État en exercice totalisent ensemble près d'un siècle et demi (140 ans très exactement) aux affaires, avec de fortes disparités bien sûr, mais une même tendance rétive à l'alternance. Ce que la région y gagne en stabilité, elle le perd en renouvellement de ses élites, et les progrès réalisés sur la voie de la bonne gouvernance ne s'accompagnent pas assez de leur corollaire?: l'avancée vers une démocratie libérale.

En effet, la souveraineté des Etats de cette zone est axiomatique dans les architectures communautaires d'Afrique centrale. Le consensualisme des sources juridiques et « l'internationalisme » des principes fondamentaux, traits caractéristiques de ces associations peuvent brider, dans une certaine mesure, l'ambition d'intégration.

Si un Etat membre de la CEMAC a la possibilité d'initier des propositions d'amendement ou des révisions des actes constitutifs de la CEMAC, ces propositions doivent être adoptés par consensus et soumises à la ratification de tous les Etats membres. L'unanimité de tous les Etats membres est requise32(*). Par ailleurs, chaque Etat membre de la CEMAC conserve l'entière liberté et la souveraine faculté de se retirer de l'une ou l'autre communauté. Le retrait s'effectue alors selon une procédure relativement simple.

Les fondateurs de la CEMAC ont eu à coeur de garantir la permanence, l'intangibilité et la sacralité de la figure de l'Etat. Les sujets étatiques concernés n'entendent perdre ni leur indépendance ni leur qualité étatique. Ils tiennent à conserver leur identité propre et leur autonomie d'action dans la sphère des rapports internationaux. La communauté ne signifie pas pour eux l'union ou la fusion dans un creuset fédéral. Au nom d'une conception fervente et ardente de leur souveraineté internationale, les Etats membres de la CEMAC se défient tant d'une vision réductrice de leur capacité internationale que de toute tentative d'altération ou de corrosion de leur immédiateté internationale. De la sorte, les Etats membres de la CEMAC réaffirment que leur association est déterminée et orientée par les principes classiques qui régissent les relations entre les Etats (principes de souveraineté, d'égalité juridique et d'indépendance de tous les Etats, de bon voisinage, de non-ingérence dans leurs affaires intérieures, de non-recours à la force pour le règlement des différents et le respect de la prééminence du droit). De ces faits, les rapports entre les Etats membres de la CEMAC  se situent dans un ordre plus relationnel qu'institutionnel, c'est-à-dire privilégiant les rapports horizontaux entre sujets souverains et se défiant des rapports verticaux entre structure de subordination et Etats33(*).

Les Etats membres se sont engagés à s'abstenir de toute mesure susceptible de faire obstacle à la communauté. Il est prévu d'accélérer le processus d'intégration en anticipant sur le chronogramme établi. En principe, au plus tard en 2006, la libre circulation des personnes et des biens devrait être effective. L'application de la convention régissant l'UEAC permettrait au Centrafricain de s'installer sans tracasserie au Gabon, s'il le souhaite. De même, le Congolais peut exporter son bois au Tchad sans payer des droits de douane. La libre circulation peut impliquer l'accès des établissements d'enseignement de la zone CEMAC à tous les étudiants ressortissants de l'union dans les mêmes conditions que les nationaux. Ainsi, l'étudiant équato-guinéen peut s'inscrire à l'Université de N'Djamena dans les mêmes conditions que les Tchadiens. Voilà pour ce qui est des principes. Qu'en est-il de toutes ces mesures dans la pratique ?

Dans la pratique, l'engagement des six Etats de l'union rencontre des obstacles liés à la lenteur administrative qui empêche de traduire dans les faits les dispositions de la convention. Il y a aussi des blocages dus aux réticences de certains Etats à aller vers l'intégration. Certains Etats estiment qu'ils ont plus à perdre qu'à gagner en intégrant entièrement l'union. Les Etats réfractaires à la libre circulation des personnes ont peur d'être envahis par la population des autres Etats (dits pauvres) à la recherche d'emploi.

Dans certains Etats, l'égoïsme national est justifié par le fait que les entreprises nationales ne peuvent pas supporter la concurrence. Elles sont protégées par les droits douaniers. L'ouverture des frontières constitue un manque à gagner. Sans droit douanier, le sucre tchadien supportera difficilement la concurrence du sucre venant du Cameroun. L'égoïsme national vise à protéger les marchés intérieurs, les emplois et les richesses.

Cette considération xénophobe est justifiée parfois autant que faire se peut par la culture de violence qui s'est développée dans certains pays de l'espace de l'union sous l'effet des années de guerres civiles et, dans une certaine mesure par l'incivisme affiché de leurs populations. A ces obstacles s'ajoutent les instabilités politiques dans certains Etats. Celles-ci sont très dissuasives pour l'intégration économique car elles peuvent se répercuter sur toute l'union.

L'insécurité dans le Nord-Ouest centrafricain et celle à l'Est du Tchad sont des facteurs d'inquiétude justifiés. Les habitants des régions énumérées sont victimes des violences et sont dépouillés de leurs biens lorsqu'ils ne sont pas tués. Il va de soi que dans ces conditions, aucun allogène ou étranger ne prendra le risque de s'aventurer dans ces zones, même si la circulation est déclarée libre. Ainsi, l'insécurité bloque la libre circulation des personnes et des biens.

Les barrières à l'intégration sont aussi culturelles. Ces inquiétudes sont les mêmes que celles exprimées par certains Etats européens opposés à l'entrée des Etats de l'Europe de l'Est dans l'Union européenne. La conséquence de la méfiance de certains Etats est un frein posé à l'intégration. Le Tchadien pour se rendre au Cameroun doit être muni d'un document de voyage appelé laissez-passer. Pour aller au Gabon, il doit avoir au préalable le visa pris dans une représentation diplomatique autre que celle d'un Etat membre de l'union accrédité au Tchad. Il y a des Etats de la communauté qui n'ont pas jugé opportun d'avoir des représentations diplomatiques dans tout l'espace de la CEMAC. Cette attitude traduit leur manque d'intérêt et d'engouement pour la politique d'intégration. Les discours officiels tenus par les dirigeants et les engagements pris par ceux-ci contrastent avec les réalités. Les discours sont destinés à la consommation extérieure et les textes pour l'instant sont faits pour les beaux yeux de ceux qui veulent bien les lire. Les Chefs d'Etat de l'Afrique centrale ont décidé lors du sommet tenu à N'Djamena en 2000 de l'entrée en vigueur du passeport commun appelé passeport CEMAC à partir du 1er juillet de la même année. Plus de neuf ans après cette date, le passeport CEMAC qui devrait rendre effectif la libre circulation des personnes bute sur des questions d'ordre pratique. Est-ce que ce passeport seul suffira pour circuler librement dans l'espace de ladite communauté ? Non à priori. Les populations de la zone CEMAC devraient être sensibilisées par des campagnes nationales d'information sur les biens fondés de l'intégration et s'accepter. Le cadre juridique ne suffira pas pour mettre à l'abri des tracasseries ceux qui désireraient circuler dans l'espace CEMAC. Ce ne sera que lorsque les populations se seront départies de tout préjugé, d'égoïsme et de méfiance source de xénophobie que l'intégration pourrait être une réalité. Alors que la libre circulation des personnes et des biens est le baromètre de la réalisation d'une communauté, seulement quatre des six Etats membres de la CEMAC s'efforcent de la pratiquer partiellement. Les Etats doivent doubler d'efforts pour parvenir à leurs objectifs.

Quoi qu'il en soit, il apparait bien que sur le terrain des objectifs essentiellement économiques autour desquels est centrée la CEMAC, la coopération et la coordination, mécanismes classiques de l'inter-étatisme, sont privilégiés. Il en va de même des autres secteurs où, comme par prétérition, les Etats membres prétendent vouloir élaborer et adopter des politiques communes.

Aussi, étant donné que la souveraineté de la plupart des Etats membres de la CEMAC est garantie sinon incarnée par la personne du chef de l'Etat, il est à croire que tout la problématique de l'intégration dans cette zone, souvent remis en cause par le principe de souveraineté, est en réalité le fait des chefs d'Etat, qui par leur égoïsmes et leurs intérêts particuliers se targuent d'adopter ou non les textes qui leur semblent bon gré. Dans cette logique, il faut alors pour la zone CEMAC, une sorte de reprise de conscience en vue de repenser la CEMAC c'est-à-dire revoir le processus d'intégration. Tel sera le point central de notre prochain et dernier thème (chapitre 4) de notre étude.

CHAPITRE IV :

LA CEMAC : VERS UNE INTEGRATION SOUS-REGIONALE ?

L'analyse de la situation de l'Afrique Centrale met bien en évidence la précarité, l'instabilité du contexte sous-régional dans une zone déchirée par de nombreux conflits et qui souffre d'une pauvreté d'autant plus inacceptable qu'elle regorge de nombreuses ressources. Ici donc plus qu'ailleurs, l'intégration sous-régionale prend à la fois des dimensions politiques, sociales et économiques qui rendent la démarche à la fois complexe et indispensable. La démarche d'intégration régionale est pour ce faire, un processus aux enjeux multiples, qui vise à rapprocher les cultures, éventuellement modifier les comportements, pour accroître l'efficacité économique et politique dans la sous-région. Dans la zone CEMAC, l'intégration demeure un slogan pour les autorités et un mythe sinon un rêve pour les ressortissants de cette communauté. En effet, autant de maux qui minent l'avancement et même l'aboutissement de ce projet qui date de longtemps.

Une communauté constitue un nouvel ordre juridique de droit international au profit duquel les Etats ont limité, bien que dans des domaines restreints, leurs droits souverains, et dont les sujets sont non seulement les Etats membres, mais également leurs ressortissants. Il faut donc dire qu'une véritable intégration impose aux Etats de se débarrasser d'un certain égoïsme qui recouvre leurs intérêts nationaux respectifs. Les Etats de la CEMAC, pour pouvoir cheminer vers une véritable intégration digne d'elle devront se débarrasser de certains aléas néfastes qui minent le processus d'intégration et bâtir ensemble le devenir de cette organisation sous-régionale. Aux côtés des réformes institutionnelles et fonctionnelles, à l'initiative de la Guinée Equatoriale, les Etats membres de la CEMAC devraient en principe se soutenir en vue de panser tous les maux qui freinent cette sous-région à décoller malgré les forts taux de croissance qu'elle enregistre, pour une véritable intégration sous-régionale.

Ainsi en vue de mieux cerner notre propos, nous nous chargerons dans une première section d'examiner la problématique de l'intégration dans la zone CEMAC afin d'en dégager des perspectives d'une véritable intégration sous-régionale.

Section 1: La problématique de l'intégration dans la zone CEMAC

Si la CEMAC est opérationnelle depuis dix ans, il n'en demeure pas moins que son acte constitutif date de 1994, et que l'UDEAC qu'elle a remplacée naquit en 1964. Autrement dit, cela fait bien 45 années que la sous-région est à la quête de son intégration et de la concrétisation de l'acte qui la symbolise le mieux, la libre circulation des personnes, des biens ou des capitaux. Force est de relever que des difficultés subsistent qui en font encore plus un objectif qu'une réalisation. Il est à espérer qu'en 2010 voit enfin jour le passeport CEMAC institué à N'Djamena en décembre 2000. Mais l'on ne peut ne pas s'interroger sur certaines réserves émises à l'occasion du sommet de Yaoundé, en 2001, et qui semblent subitement lier le sort et la portée de ce passeport à la maîtrise préalable de phénomènes perturbateurs (terrorisme....) qui n'ont pas eu par le passé la même résonance déstabilisatrice qu'aujourd'hui. Ceci dit et dans cette attente, l'obtention du visa reste paradoxalement une opération généralement rude au sein de la zone. On se serait pourtant attendu à une délivrance des visas plus aisée et plus fluide, dans l'esprit des dispositions d'ouverture sous-jacentes à la décision prise d'instituer ce passeport communautaire. En raison de ce décalage, le scepticisme des uns se trouve renforcé. De même que le lancinant problème des financements remet à des horizons non définis la réalisation de projets pourtant majeurs de la Communauté : l'incontournable réseau routier intégrateur au caractère prioritaire absolu, la compagnie de transport aérien sous-régionale, le futur parlement communautaire à Malabo, l'aménagement du siège de la COBAC à Libreville, les arriérés de libération du capital de la BDEAC. Nul doute que pour ce faire, la CEMAC aura à la fois besoin d'asseoir sa crédibilité politique et économique auprès de bailleurs de fonds internationaux et de compter sur des économies nationales de la sous-région plus performantes et plus aptes à soutenir financièrement leurs propres projets.

La CEMAC, dans le souci de diversifier et de multiplier les secteurs de coopération (car elle demeure un instrument de coopération), est appelée, dans le cadre de l'UEAC, à « instituer une coordination des politiques sectorielles nationales, mettre en oeuvre des actions communes et adopter des politiques communes dans les domaines suivants : l'agriculture, la pêche, l'industrie, le commerce, le tourisme, les transports, les télécommunications, l'énergie, l'environnement, l'enseignement et la formation professionnelle34(*) ». Force est cependant de remarquer que dans l'ensemble de ces domaines, les réalisations concrètes et tangibles font défaut. Aucune politique commune n'est vraiment élaborée et les éventuelles stratégies de coopération et de coordination manquent de cohérence et d'efficacité ; sur ce terrain, le déficit en matière de volontarisme intégrateur est patent, de même qu'est notable une hypertrophie excessive du champ opératoire du principe de la subsidiarité35(*). Le processus d'intégration sous-régionale suppose la mise en oeuvre d'institutions et des mécanismes visant la réduction et l'élimination des disparités entre les économies. Ainsi, analyserons-nous les fondements conceptuels (paragraphe 1) et les mécanismes (paragraphe 2) d'intégration sous-régionale en zone CEMAC.

Paragraphe 1 : Fondements conceptuels d'intégration sous-régionale

Le cadre de référence de l'intégration sous-régionale est celui de l'intégration par le marché qui aboutit à une délimitation des étapes que les regroupements économiques régionaux franchissent. Au nombre de ces étapes (zone d'échanges préférentiels, zone de libre-échange, union douanière, marché commun, union économique et/ou intégration économique complète), il est à noter que la CEMAC, certes ayant opté pour certain concepts semblable à ceux de certaines étapes, mais elle n'en demeure point comparable, tels sont les cas de l'UDEAC ou de l'UEAC qui ne sont respectivement des union douanière et union économique que de nom car dans le fond, il n'en est pas question d'une vraie union économique par exemple pour ce qui est de l'UEAC. Ou encore, la zone de libre échange deuxième étape d'une intégration n'est pas effective en zone CEMAC du fait de l'égoïsme des Etats membres.

L'intégration sous-régionale se doit d'être réalisée par diverses formes. Il existe en effet, l'intégration par les échanges qui implique l'abolition des barrières nationales dans les transactions économiques enter Etats membres afin que les facteurs de production puissent circuler librement au sein de la CEMAC. Ce qui n'est pas le cas. Il y a aussi, l'intégration par la production, de même que la thèse du « protectionnisme minimum » qui consiste à rechercher un niveau de libéralisation des échanges le plus poussé dans la sous-région tout en s'assurant d'un niveau de protection élevé à l'intérieur de la zone par rapport à l'extérieur. Mais, au regard des différents accords que les Etats membres entretiennent avec leurs différents partenaires, cela n'est pas possible. Egalement, avons-nous l'intégration par des règles d'harmonisation qui s'intéresse à un ensemble de normes que doivent suivre les pays désirant s'intégrer afin de faire bénéficier à leur groupement de tous les gains découlant de l'extension de leur marché. Cette forme n'existe dans la zone CEMAC qu'à titre figuratif car la plupart des textes de cette communauté ne sont pas respectés et à titre illustratif, nous pouvons constater l'incapacité des textes à inciter les São Tomé et Principe à adhérer à ladite zone.

Paragraphe 2 : Mécanismes d'intégration sous-régionale

Née des cendres de l'UDEAC, la CEMAC a continué avec les mécanismes de l'UDEAC modifiés à certains niveaux. Ainsi a-t-elle mis l'accent sur une stratégie d'intégration par le marché fondé sur le désarmement douanier entre pays membres et la mise en place d'un système tarifaire unique. Une stratégie qui peut être examinée à travers trois mécanismes : l'unification douanière et fiscale, l'union économique et les de solidarité.

Le premier mécanisme, l'unification douanière et fiscale, s'était fixé pour objectifs, entre autres, l'amélioration des recettes fiscales des Etats non seulement par la simplification et la spécialisation des instruments douaniers et fiscaux, mais également par l'élargissement de la base imposable ; de supprimer les discriminations entre entreprises locales et entreprises étrangères ; lutter contre la fraude douanière par l'abaissement des droits de douane ; d'accroitre la compétitivité des entreprises locales. Cependant, il est à constater qu'au regard des faits et de la réalité que ces objectifs semblent être des vains mots. Quant à l'union économique, au regard des domaines pour lesquels elle devrait être effective, des politiques communes et les programmes sous-régionaux ont été définis mais les réalisations n'ont pas toujours suivi les interventions proclamées. Le dernier mécanisme, les fonds de solidarité, consiste en des compensations des gains et pertes de l'intégration sous-régionale. Au regard des avantages retirés par les pays côtiers notamment des activités de transit, les fonds de solidarité de la CEMAC est institué et alimenté par ces derniers (Cameroun, Congo, Gabon et de nos jours Guinée Equatoriale) au bénéfice des pays de l'intérieur (Centrafrique et Tchad).

Section 2: Perspectives d'une véritable intégration dans la zone CEMAC

Il est à noter que l'entrave majeure de tous ces mécanismes est l'égoïsme des Etats membres de la CEMAC à vouloir les mettre en oeuvre mais cependant cela ne suffit pas en elle seule pour faire décoller la zone CEMAC. Ainsi, de nos jours, les nouvelles stratégies concurrentielles de croissance des Etats ou des entreprises intègrent obligatoirement le management des hommes comme une ressource stratégique majeure dans le déploiement de leur politique de développement. Dès lors, la mise en place de formations qualifiantes à l'échelle sous-régionale permettra aux acteurs économiques et administratifs d'acquérir une identité ou un sentiment d'appartenance à une communauté et développer une attitude positive face au marché commun. Par ailleurs, la création de prix CEMAC récompensant les entreprises performantes à l'exportation ou en termes de respect des normes Qualité permettrait le développement d'un cercle vertueux de compétitivité des hommes au sein des entreprises. Dans ce même ordre d'idée, la mise en oeuvre des décisions pragmatiques tels que le Passeport CEMAC ou la carte de circulation des agents économiques ressortissants de la zone et expatriés résidents, garantissant la liberté de résidence et de travail à l'intérieur de cette zone, serait un facteur déclenchant de mobilité et un gage certain de réussite pour l'intégration économique régional. Tout ceci passe par une prise de conscience régionaliste qui se traduit en termes économiques par « un poids suffisant du marché » pour faire progresser les économiques intérieures et amorcer de façon irréversible les transactions à l'exportation.

Par ailleurs, l'efficacité actuellement reconnue des grands Groupes mondiaux repose sur la diversité dans la composition de leur « Board »où l'on applique de plus en plus deux principes stratégiques majeurs qui accompagnent la fiabilité des organisations, à savoir, le principe de la multi-culturalité et celui de la subsidiarité. Au niveau sociétal, l'inspiration y serait de mise, car les principes stratégiques et les méthodes qui gagnent ailleurs, gagnent partout, à condition de savoir les adapter aux réalités de terrain pour en tirer toute la substantifique moelle.

« Il n'y a de richesses que d'hommes » dit un adage car, l'enjeu majeur de l'intégration sous-régionale est la création de la valeur et des richesses pour résoudre de façon durable les problèmes liés à la pauvreté et au chômage. Par ailleurs, la maîtrise de l'intelligence des situations innovantes, c'est-à-dire de la dynamique des hommes, est aujourd'hui la seule force motrice capable d'augmenter régulièrement et rapidement les énergies permettant ainsi de gagner le temps sur le temps car, le paramètre optimal de maîtrise des processus de globalisation et de mondialisation, donc de l'intégration sous-régionale est la maîtrise et la gestion du temps.

Pour une véritable intégration dans la zone CEMAC, nombre de dispositions doivent être prises par les Etats membres en laissant de travers leur égoïsme dissimulé sous le label d'intérêts nationaux, d'ailleurs qui ne devaient plus avoir lieu du fait de l'intégration sous-régionale et par conséquent, l'existence d'une communauté et qui dit communauté dit une mise en commun d'un certain nombre de politiques et de programmes en commun. Parmi ces dispositions, il ya :

1. Déclaration de politique régionale par chaque Gouvernement, pour promouvoir les idéaux d'intégration par les médias nationaux ;

2. Banque de données régionales sur l'économie, les finances, les projets, les réglementations, etc. ;

3. Elaboration d'un schéma directeur d'industrialisation régionale ;

4. Politique volontariste du fret, trop coûteux actuellement ;

5. Normes industrielles sous régionales (produits industriels, constructions, installations, etc.) ;

6. Université privée régionale dans les disciplines comme la gestion et la technologie ;

7. Institution statistique régionale recensant les agrégats économiques régionaux, et à terme observatoire économique régional susceptible d'inspirer les politiques des investissements ;

8. Circulation sans entraves de la monnaie scripturale dans la zone ;

9. Libre circulation des étrangers possédant une carte de séjour valide dans l'un de ces 6 pays ;

10. Libre circulation des capitaux, en particulier des fruits de la vente de produits nationaux aux partenaires de la zone ;

11. Elimination des tracasseries policières, administratives et douanières pour les accès et transit au travers du Cameroun, au Port de Douala, sur les routes d'accès au Tchad et en Centrafrique, aux postes frontières vers le Tchad, la RCA, la Guinée Equatoriale ;

12. Coopération sous-régionale forte dans les domaines scolaire, universitaire et de recherche, de lutte contre la contrebande, la fraude et l'insécurité.

Pour que l'intégration régionale rejoigne les attentes des populations dans le cadre de la lutte contre la pauvreté, il est vivement souhaitable que les efforts soient redoublés sur des aspects qui ont un réel impact sur la nécessaire compétitivité de l'économie sous-régionale. Le voeu d'une véritable intégration sous-régionale appelle également, de manière incontournable un engagement des Etats dans la concrétisation des projets communautaires que sont : le passeport CEMAC, l'interconnexion des réseaux des télécommunications et leur réhabilitation, afin de faciliter la communication au sein de la zone et l'accès de nos économies aux nouvelles technologies de l'information et de la communication, le réseau routier intégrateur prioritaire. Il est vrai que c'est la réalisation progressive des projets en cours et à un rythme soutenu et compatible avec les exigences de l'environnement économique mondial qu'il sera permis, non seulement d'améliorer la compétitivité de la sous-région, mais aussi de favoriser les utiles brassages entre nos populations.

En somme, il faudrait mettre pour cela, du réalisme mais aussi de l'espoir dans la volonté des Etats membres de la sous-région dans leurs efforts d'intégration en vue de voir se réaliser tous ces atermoiements.

CONCLUSION GENERALE

Au terme de ces développements, il est aisé de se rendre compte que le processus d'intégration économique des Etats membres de la CEMAC peine à franchir le cap de la première étape de sa réalisation. En l'état de son fonctionnement actuel la Communauté apparaît non pas comme une organisation d'intégration supranationale à même d'impulser « le passage d'une situation de coopération à une situation d'union » mais davantage comme une organisation intergouvernementale marquée par l'égoïsme et l'emprise des Etats membres sur ses institutions qui, dès lors, jouent difficilement leur rôle prééminent dans la mise en oeuvre d'une politique réaliste d'intégration. L'UEAC ne jouit pas d'une pleine autonomie d'action ; le Secrétaire Exécutif hier, Commission aujourd'hui et le Parlement Communautaire n'ont pas le poids politique effectif et ne disposent pas non plus, tout comme la Cour de Justice, d'un mécanisme d'injonction et de sanction susceptible de contraindre les Etats, les autres Institutions et organes de la Communauté au respect des décisions communautaires ; l'exécution de ces décisions accuse dès lors une faiblesse notoire. Préoccupée certainement par l'insuffisance des stratégies et des méthodes appliquées jusqu'alors, la Conférence des Chefs d'Etat a commandé une étude sur la réforme du fonctionnement des institutions et organes de la CEMAC lors de sa réunion tenue en mars 2006 à Malabo en Guinée Equatoriale.

Un encadrement juridique pouvant assurer à ces Instituions et organes une indépendance, une structuration et une fonctionnalité nécessaires à la recherche et à la protection de « l'intérêt commun » s'avère indispensable autant qu'un redéploiement conséquent des ressources humaines La nouvelle dynamique de l'intégration économique et monétaire des Etats membres reste tributaire de l'adéquation entre l'ambition intégrationniste du Traité et les pouvoirs conférés aux Institutions et organes chargés de la traduire dans les faits. Certes la construction d'une Communauté économique et monétaire est une oeuvre de longue haleine ; elle ne se fait pas « d'un coup », mais « progressivement par des réalisations concrètes et irréversibles, créant des solidarités de fait » comme le faisaient remarquer déjà Jean Monnet et Robert SCHUMAN, à propos de l'Union européenne36(*).

Mais par delà le renforcement des institutions et organes communautaires et de leurs financements, on ne saurait plus longtemps faire l'économie dune vigoureuse réflexion tant sur l'adhésion constante des populations à l'idéal communautaire, que sur la corrélation entre le processus graduel d'intégration et l'approfondissement de l'ancrage démocratique des Etats membres, appelés à s'adapter aux mutations politiques économiques et sociales de l'environnement international. C'est dire combien le projet d'intégration des Etats de la CEMAC interpelle toutes les intelligences dont regorgent si heureusement la sous région. Les intellectuels et les jeunes notamment devraient s'approprier ce projet et apporter, au mieux de leurs talents, un éclairage novateur aux bâtisseurs que sont les Hommes d' Etat, les créateurs des richesses etc. En tout état de cause la réussite du projet d'intégration des Etats membres de la CEMAC reste tributaire d'une volonté politique éclairée, ferme et attentive.

ANNEXES

 

 

COMMUNAUTE ECONOMIQUE ET MONETAIRE DE L'AFRIQUE CENTRALE

 

 

 

Présentation de la CEMAC

 

 

1. Aperçu historique :

Conservant les liens qui les unissaient sous l'Administration coloniale, les Etats de la Centrafrique, du Congo, du Gabon et du Tchad ont crée en juin 1959, l'Union Douanière Equatoriale (UDE) à laquelle adhérera en 1961 l'Etat du Cameroun.

La nécessité d'intensifier leur coopération a poussé ces Etats à signer le 8 décembre 1964 à Brazzaville le traité instituant l'Union Douanière et Economique de l'Afrique Centrale (UDEAC).

Cette organisation sous-régionale à laquelle adhérera la Guinée Equatoriale en 1983, fut certainement la plus ancienne de toutes les organisations africaines d'intégration et devait, malgré d'énormes difficultés de parcours quelques fois, survivre une trentaine d'années. Elle avait su surmonter des crises aiguës des années 1966 avec le retrait-réintégration de la RCA et du Tchad. Toutefois, avec les crises économiques successives des années 1980-1990, il avait paru indispensable de relancer le processus d'intégration économique et sociale sous une nouvelle forme plus dynamique, avec la signature le 16 mars 1994 à N'DJAMENA au TCHAD du Traité instituant la Communauté Economique et Monétaire de l'Afrique Centrale (CEMAC).

2. Objectifs et missions de la CEMAC :

La CEMAC est née de la volonté des Gouvernements de six Etats Membres de l'ancienne UDEAC (Cameroun, Centrafrique, Congo, Gabon, Guinée Equatoriale, Tchad). Elle constitue une avancée considérable par rapport à l'Organisation qu'elle était appelée à remplacer.

En effet, dans le cadre de cette Communauté, les Gouvernements des Etats membres ont réaffirmé leur attachement aux principes de liberté et de démocratie et se sont engagés à :

· Développer ensemble toutes les ressources humaines et naturelles de leurs Etats pour le bien  être de leurs peuples dans tous les domaines.

· donner une impulsion nouvelle et décisive au processus d'intégration en Afrique Centrale par une harmonisation accrue des politiques et des législations de leurs Etats.

· assurer la convergence des performances de leurs politiques économiques au moyen du dispositif de la surveillance multilatérale.

Par ailleurs, ces mêmes Gouvernements ont accepté de faire bénéficier à cette nouvelle Communauté du transfert d'une parcelle de la souveraineté des Etats membres, transfert qui peut s'apprécier au travers la création d'un Parlement et d'une Cour de Justice Communautaires ainsi que de nombreuses prérogatives dévolues au Secrétariat Exécutif.

La mission essentielle de la CEMAC est de promouvoir un développement harmonieux des Etats membres dans le cadre de l'institution d'un véritable marché commun.

Aussi, lui est-il assigné la réalisation des objectifs suivants :

· Mettre en place un dispositif de surveillance multilatéral des politiques économiques des Etats membres ;

· Assurer une gestion stable de la monnaie commune ;

· Sécuriser l'environnement des activités économiques et des affaires en général ;

· Harmoniser les réglementations des politiques sectorielles dans les domaines essentiels prescrits par les textes organiques (agriculture, élevage, pêche, industrie, commerce, transport et télécommunications, énergie et environnement, recherche, enseignement et formation professionnelle.)

· Créer un marché commun basé sur la libre circulation des personnes, des biens, des capitaux et des services.

 

 

COMMUNAUTE ECONOMIQUE ET MONETAIRE DE L'AFRIQUE CENTRALE

 

 

Les Institutions de la CEMAC

 

L'Union Economique de l'Afrique Centrale (UEAC) 

 

L'Union Economique de l'Afrique Centrale vise à renforcer la compétitivité des activités économiques et financières par l'harmonisation des règles qui régissent le fonctionnement de ces activités. Elle assure la convergence vers des performances soutenables par la coordination des politiques économiques et la mise en cohérence des politiques budgétaires nationales avec la politique monétaire commune; de même que la création du marché commun sous-régional et l'institution de la coordination des politiques sectorielles nationales ainsi que la mise en oeuvre des actions communes dans les domaines essentiels lui incombent.

La réalisation des objectifs assignés à l'Union Economique est soumise à une contrainte de calendrier établi par les textes organiques eux-mêmes.

En effet, aux termes des articles 3 et suivants de la Convention régissant l'Union Economique, la construction de celle-ci sera entreprise au cours d'un processus en trois étapes de cinq années chacune soit un délai de quinze années à compter de l'entrée en vigueur du traité instituant la CEMAC et des Conventions subséquentes. Cette période tient compte naturellement des acquis de l'UDEAC.

La première étape (25 juin 1999 au 24 juin 2004), est consacrée a :

· créer toutes les conditions nécessaires au fonctionnement du marché commun ;

· engager un processus de coordination des politiques nationales en matière d'agriculture, d'élevage, de pêche, d'industrie, de commerce, de tourisme, de transport et télécommunications ;

· initier le processus de mise en place des instruments de libre circulation des biens, des services, des capitaux et des personnes ;

· développer la coordination des politiques commerciales et des relations économiques avec les autres régions ;

· préparer des actions communes dans les domaines de l'enseignement, de la formation professionnelle et de la recherche.

Au cours de la seconde étape (25 juin 2004-24 juin 2009), l'Union Economique devra :

· établir la libre circulation des biens, des services des capitaux et des personnes ;

· mettre en oeuvre des actions communes dans les secteurs cités au paragraphe précédent ;

· engager un processus de coordination des politiques nationales en matière d'environnement et d'énergie ;

· renforcer et améliorer les infrastructures nationales de transports et de télécommunications en vue de leur interconnexion.

Les actions à entreprendre au cours de la troisième étape, dépendent de l'état d'avancement de celles initiées au cours des deux premières étapes. Toutefois, il est envisagé d'instaurer des politiques sectorielles communes dans toutes les matières faisant l'objet d'une coopération au sein de l'Union Economique.

L'Union Economique dispose d'un certain nombre d'institutions spécialisées dont la création est fonction des besoins de réalisation des objectifs assignés à l'Union. Certaines de ces institutions sont des acquis de l'UDEAC que la CEMAC s'efforce de consolider et de conformer le fonctionnement aux normes nouvelles en vue d'une réalisation harmonieuse des objectifs globaux de la Communauté dont on compte déjà de nombreuses réalisations. A titre indicatif, nous citerons :

L'harmonisation des législations sur la Taxe sur la Valeur Ajoutée (TVA) et du Droit d'Accise (DA) en vigueur dans la Zone CEMAC depuis décembre 1998;

L'institution du "Passeport CEMAC" en vue de faciliter la circulation des personnes dans la sous région ainsi que la réactivation de 1972  sur la libre circulation des personnes conclue sous l'égide de l'UDEAC;

L'adoption d'une Charte Communautaire des Investissements complétant les dispositifs existants de la Réforme fiscalo-douanière;

L'adoption d'une Réglementation Communautaire sur la concurrence des pratiques commerciales anticoncurrentielle et des aides d'Etat;

La création d'un site Internet commun CEMAC - UEMOA portant l'appellation Investir en Zone Franc à l'intention des Investisseurs;

L'institution et la mise en circulation de la Carte Internationale d'Assurance Automobile 'CIRCA-CEMAC) commune aux Etats de la CEMAC en vue de faciliter le règlement des sinistres dans la sous région;

L'adoption d'une batterie de textes relatifs à la réglementation des activités de Transports et Télécommunications;

L'harmonisation des politiques  en matière de l'Enseignement Supérieur dans les pays membres de la Communauté spécialement en ce qui concerne les conditions d'accès des étudiants dans leurs établissements publics ou d'utilité publique d'enseignement supérieur;

La mise en place de dispositifs Sécuritaires dans la sous région en vue de mieux lutter contre la délinquance transnationale. A cet effet, le Secrétariat Exécutif de la CEMAC eut à soutenir le Comité des Chefs de Police d'Afrique Centrale (CCPAC) dès sa création  en avril 1997 et à engager des actions de collaboration allant du parrainage de la conclusion de l'Accord de Coopération en matière de Police Criminelle entre les Etats de la sous région d'Afrique Centrale en avril 1999 à la conclusion d'un Accord de coopération  entre le Secrétariat Général de l'Interpol et le Secrétariat Exécutif de la CEMAC.

 L'Union Monétaire de l'Afrique Centrale (UMAC)  

L'UNION MONETAIRE DE L'AFRIQUE CENTRALE dont le siège est établi à Yaoundé au Cameroun est en charge de la politique monétaire, la Banque des Etats de l'Afrique Centrale ( BEAC) en constitue la pierre angulaire. Elle se caractérise par l'adoption d'une même unité monétaire dont l'émission est confiée à la BEAC qui est l'Institut d'Emission Commun. Elle participe avec l'Union Economique, à l'exercice de la surveillance multilatérale par la coordination des politiques économiques et la mise en cohérence des politiques budgétaires nationales avec la politique monétaire commune.

Les organes de l'Union Monétaire sont:

- La Conférence des Chefs d'Etat;

- Le Comité Ministériel;

- L'Institut d'Emission BEAC;

- La Commission Bancaire de l'Afrique Centrale(COBAC);

- Tout autre organe approprié créé par la Conférence des Chefs d'Etat dans le cadre de l'UMAC.

Les Institutions spécialisées de l'UMAC sont:

- La Commission de surveillance du Marché Financier de l'Afrique Centrale( COSUMAF);

- Le Groupe d'Action contre le Blanchiment d'Argent en Afrique Centrale (GABAC);

- Toute autre Institutions spécialisées créée par la Conférence des Chefs d'Etat dans le cadre de l'UMAC.

 Le Parlement Communautaire  

LE PARLEMENT COMMUNAUTAIRE est l'Instance Communautaire chargée du contrôle démocratique des Institutions et Organes participant au processus décisionnel de la Communauté.

Le Parlement qui, en réalité, ne sera créée qu'ultérieurement par convention séparée a son siège fixé à Malabo, en Guinée Equatoriale.

Entre temps, est instituée une Commission Interparlementaire composé de cinq membre par Etat désignés par l'organe législatif de chaque Etat membre ; le but de cette Commission est de contribuer par le dialogue et le débat, aux efforts d'intégration de la Communauté dans les domaines couverts par le Traité et les textes subséquents. La Commission exprime ses vues sous forme de résolutions ou de rapports.

Afin de lui permettre d'exercer son rôle de contrôle sur l'action des Institutions et Organes participant au processus décisionnel de la Communauté, il est offert à la Commission la possibilité d'examiner le rapport annuel que le Secrétaire Exécutif lui soumet et d'entendre sur son initiative le Président du Conseil des Ministres, le Président du Comité Ministériel, le Secrétaire Exécutif ou le Gouverneur de la Banque Centrale (BEAC).

 La Cour de Justice de la CEMAC  

LA COUR DE JUSTICE DE LA CEMAC est l'Institution Communautaire en charge du contrôle juridictionnel des activités et de l'exécution budgétaire des Institutions de la CEMAC. Elle a son siège fixé à N'DJAMENA au Tchad.

La Cour de Justice de la CEMAC est composée de treize juges élisant parmi eux un Premier Président assisté de deux juges élus Présidents de Chambres. Elle est subdivisée en Chambre Judiciaire et en Chambre des Comptes. Elle a pour rôle :

D'assurer le respect des dispositions du Traité de la CEMAC et des Conventions subséquentes par les Etats membres, les Institutions  et les Organes de la Communauté ;

D'assurer le contrôle des comptes de la CEMAC ;

De réaliser par ses Décisions l'harmonisation des jurisprudences dans les matières relevant du domaine des Traités, et de contribuer par ses avis à celle des législations nationales des Etats membres dans ces matières ;

De régler les contestations relatives à sa compétence.

La particularité de cette Instance par rapport au corps de contrôle en vigueur dans d'autres Organisations régionales ou sous régionales d'intégration, est l'unicité de la Cour. En effet, dans l'Union Economique et Monétaire Ouest Africaine (UEMOA), dans l'Union Européenne ou dans le COMESSA, cohabitent deux Cours distinctes : une Cour de Justice et une Cour des Comptes.

 

 

 

COMMUNAUTE ECONOMIQUE ET MONETAIRE DE L'AFRIQUE CENTRALE

 

 

Les Organes de la CEMAC

 

La Conférence des Chefs d'Etat  

LA CONFERENCE DES CHEFS D'ETAT, organe suprême de la Communauté, détermine la politique de celle-ci et oriente l'action des organes de décision de ses deux Unions au moyen d'Actes Additionnels qui sont annexés au Traité de la CEMAC, le complètent sans le modifier, s'imposent aux Institutions de la Communauté et aux autorités des Etats membres.

 Le Conseil des Ministres de l'UEAC  

LE CONSEIL DES MINISTRES assure la direction de l'Union Economique de l'Afrique Centrale (UEAC) par l'exercice des pouvoirs que la Convention régissant celle-ci lui accorde ; il est composé essentiellement des Ministres en charge des Finances et des affaires économiques des Etats membres sans que le nombre des Ministres composant cette délégation ne soit supérieur à trois. Chaque délégation nationale ne dispose que d'une voix. La délégation nationale est, dans la plupart des cas conduite par le Ministre en charge des Finances

Le Conseil des Ministres se réunit deux fois par an en sessions ordinaires sur convocation de son Président. Celui-ci doit ressortir de l'Etat membre qui exerce la Présidence de la Conférence des Chefs d'Etat.

Lorsque les questions à débattre ne portent pas principalement sur la politique économique et financière, le Conseil des Ministres peut réunir en formation ad hoc les Ministres techniquement compétents dont les délibérations ne seront définitives qu'après que le Conseil en ait constaté la comptabilité avec la politique économique et financière de l'Union Economique.

 Le Comité Ministériel de l'UMAC  

LE COMITE MINISTERIEL est l'organe dirigeant de l'Union Monétaire de l'Afrique Centrale (UMAC). Il a pour rôle d'examiner les grandes orientations des politiques économiques de chacun des Etats membres de la Communauté et d'en assurer la cohérence avec la politique monétaire commune ; il est composé de deux Ministres par Etat membre dont celui en charge des Finances, chef de délégation. Comme au Conseil, chaque délégation étatique dispose d'une voix toutefois exprimée ici, par le Ministre en charge des Finances.

Contrairement au Conseil des Ministres, la Présidence du Comité Ministériel n'est pas forcément liée à la Présidence de la Conférence des Chefs d'Etat. Elle est assurée obligatoirement par le Ministre en charge des Finances par ordre alphabétique des Etats membres pour une année civile.

 

LE CONSEIL DES MINISTRES ET LE COMITE MINISTERIEL agissent aux moyens de Règlements, de Directives, des Décisions, de recommandations ou d'avis.

La définition de ces actes juridiques est fixée par le Traité ainsi qu'il suit :

· Les règlements et les règlements cadres ont une portée générale ; mais à la différence des règlements qui sont obligatoires dans tous leurs éléments et directement applicables dans tout Etat membre, les règlements cadres ne sont directement applicables que pour certains de leurs éléments.

· Les directives lient tout Etat membre destinataire quant au résultat à atteindre, tout en laissant aux Instances nationales leur compétence en ce qui concerne la forme et les moyens.

· Les décisions sont obligatoires dans tous leurs éléments pour les destinataires qu'elles désignent.

· Les recommandations et les avis ne lient pas.

A l'exception des recommandations et des avis, les actes adoptés par le Conseil des Ministres et le Comité Ministériel doivent être motivés.

La publication au bulletin officiel de la Communauté n'est obligatoire que pour les actes additionnels, les règlements et les règlements cadres qui, de surcroît, entrent en vigueur le 20ème jour suivant leur publication s'ils omettent de fixer la date de leur entrée en vigueur.

Les directives et les décisions sont notifiées à leurs destinataires et prennent effet le lendemain de cette notification.

 La Commission de la CEMAC  

LA COMMISSION DE LA CEMAC ET LE GOUVERNORAT DE LA BEAC assurent le rôle de rapporteur respectivement au niveau du Conseil des Ministres et du Comité Ministériel ; ils arrêtent à leur niveau des règlements d'application des actes susmentionnés, prennent des décisions et formulent des recommandations ou des avis.

 

S'agissant de la COMMISSION DE LA CEMAC plus particulièrement, il conviendrait de relever l'importance du rôle central qu'il joue dans le fonctionnement de la Communauté. Il est placé sous l'autorité d'un Président qui, outre l'animation de l'Union Economique, représente la CEMAC à l'égard des tiers et en justice sauf dérogation expresse. Il coordonne les actions au niveau de la Communauté et assure le secrétariat de la Conférence des Chefs d'Etat.

 

Pour accomplir sa mission, la Commission de la CEMAC dispose des moyens humains comprenant actuellement trente-neuf (39) cadres et quelque soixante et un (61) agents d'exécution, pour un organigramme qui en prévoit davantage.

BIBLIOGRAPHIE

I. OUVRAGES

BADIE B. & HERMET G., Politique comparée, Paris, P.U.F., 1990, p. 66.

BAYART Jean François., L'État en Afrique, Paris, Fayard, 1989, 444 pages.

BIRNBAUM Pierre, La logique de l'État, Paris, Fayard, 1982.

BODIN Jean, Les six livres de la République. Reproduction de l'édition de Lyon : de l'imprimerie de Jean de Tournes, 1579, 759 p. (BNF, Gallica, mode image, format PDF)

BRAILLARD, Philippe & DJALILI, Mohammad-Reza, Les Relations Internationales, Paris, PUF, Collection que sais-je ? 1988, 128 pages

COMBACOU J. et SUR S., Droit International Public, 2ème éd. Mont chrétien, Paris, 1995, p. 23.

GAZANO Antoine, Les Relations internationales : les données, les acteurs et les règles, les enjeux et les défis, Paris, Gualino Editeur, Collection Mémentos, 2001, 228 pages.

HAMMOUDA Ben Hakim, Intégration Régionale en Afrique Centrale. Bilan et Perspectives, Paris, Karthala, 2003, p.312

HUGON Philippe, Géopolitique de l'Afrique, Paris, Edition Sedes, 2007, 240 pages

JACQHIER, Bernard, Relations internationales. Les acteurs du système international, tome 1, Grenoble, PUG, 1993, 176 pages.

KOLB R., Réflexions de philosophie du droit international, Bruylant, 2003, p 119.

MEDARD, J.F. (Sous la direction de), États d'Afrique noire, Paris, Ed. Karthala, 1991, p 175.

SCELLE George, Manuel de droit international public, Paris, Domat-Montchrestien, 1948, p.250

THEBAULT Vincent (Coord.), Géopolitique de l'Afrique et du Moyen-Orient, Paris, Nathan, 2006, 352 pages

WEBER Max, Le Savant et le politique, Paris, Plon, 1959, p 8.

II. ARTICLES ET CHAPITRES D'OUVRAGES

AWOUMOU Côme Damien Georges, « Le couple Cameroun- Gabon : moteur de l'Afrique centrale ? », Enjeux N°17, octobre-décembre 2003, PP.5-10.

AWOUMOU Côme Damien Georges, « La multinationalisation des entreprises nationales au sein de la CEMAC : initiative purement privée ou cheval de Troie pour l'hégémonie du Cameroun ? », Enjeux N°13, octobre-décembre 2002, PP.24-27.

GESTIN Jean Dominique, « Pétro-diplomatie », Jeune Afrique/L'intelligent, N°2175, du 16 septembre 2002, p.24

TACHI S., « La Souveraineté et le droit territorial de l'Etat », dans RGDIP 1931, p 413.

III. SITES CONSULTES

www.cemac.net

I

II

III

IV

V

p. 1

p.11

p.12

p.14

p.14

p.14

p.16

p.16

p.16

p.17

p.18

p.18

p.19

p.21

p.21

p.21

p.22

p.24

p.24

p.27

TABLE DES MATIERES

SOMMAIRE.............................................................................................

DEDICACE.............................................................................................

REMERCIEMENTS..................................................................................

ABREVIATIONS ET SIGLES.....................................................................

REPERES CHRONOLOGIQUES................................................................

INTRODUCTION GENERALE..................................................................

PREMIERE PARTIE : Les Etats et l'intégration en Afrique centrale.....................

CHAPITRE I : La spécificité de la Souveraineté des Etats d'Afrique centrale............

Section 1: Aperçu général de la Souveraineté des Etats de la CEMAC..................

Paragraphe 1 : Origine et portée de la Souveraineté des Etats de la CEMAC........

C. Origine de la Souveraineté des Etats de la CEMAC...........................

D. Portée de la Souveraineté des Etats de la CEMAC.............................

Paragraphe 2 : Typologie de la Souveraineté des Etats de la CEMAC..................

C. La Souveraineté dans l'Etat ou Souveraineté domestique.....................

D. La Souveraineté de l'Etat ou Souveraineté internationale légale............

Section 2: Les limites de la Souveraineté des Etats de la CEMAC.........................

Paragraphe 1 : Les Organisations internationales..........................................

Paragraphe 2 : L'intégration sous-Régionale................................................

CHAPITRE II : L'intégration sous-régionale en Afrique Centrale : la CEMAC............

Section 1: La réforme de l'UDEAC ou naissance de la CEMAC.........................

Paragraphe 1 : La longue et difficile marche vers l'intégration...........................

Paragraphe 2 : De l'UDEAC à la CEMAC.................................................

Section 2: Présentation et état des lieux du processus d'intégration dans la zone

CEMAC..................................................................................

Paragraphe 1 : Présentation du processus d'intégration dans la zone CEMAC.....

Paragraphe 2 : Etat des lieux du processus d'intégration dans la zone CEMAC...

p.30

p.31

p.32

p.33

p.35

p.36

p.41

p.42

p.43

p.44

p.44

p.48

VII

XIII

XVII

DEUXIEME PARTIE : La CEMAC et les politiques internes de ses Etats

membres..................................................................

CHAPITRE III : L'égoïsme des Etats membres de la CEMAC : véritables obstacles au

processus d'intégration ?..................................................................

Section 1: La pomme de discorde de l'intégration sous régionale en zone

CEMAC..................................................................................

Paragraphe 1 : La problématique du leadership en zone CEMAC...................

Paragraphe 2 : L'intégration en zone CEMAC, querelle de leadership ?..............

Section 2: La Souveraineté, les Chefs d'Etat et l'intégration en zone CEMAC.........

CHAPITRE IV : La CEMAC : vers une intégration sous-régionale ?...........................

Section 1: La problématique de l'intégration dans la zone CEMAC.......................

Paragraphe 1 : Fondements conceptuels d'intégration sous-régionale.................

Paragraphe 2 : Mécanisme d'intégration sous-régionale.................................

Section 2: Perspectives d'une véritable intégration dans la zone CEMAC................

CONCLUSION GENERALE......................................................................

ANNEXES................................................................................................

BIBLIOGRAPHIE....................................................................................

TABLE DES MATIERES..........................................................................................

* 1 J. Combacou et S.Sur, Droit International Public, 2ème éd. Paris, Mont chrétien, 1995, p. 23.

* 2 J. Bodin, Les Six Livres de la République, Reproduction de l'édition de Lyon: de l'imprimerie de Jean de Tournes, 1579, 759 p. (BNF, Gallica, mode image, format PDF)

* 3 B. Badié, L'Etat importé, Paris, Fayard, 1992, p.10

* 4 A. Gazano, Les Relations internationales : les données, les acteurs et les règles, les enjeux et les défis, Paris, Gualino Editeur, 2001, pp : 22-23 ; également P. Braillard, M.-R. Djalili, Les Relations Internationales, Paris, PUF, 1988, p. 51.

* 5 B. Jacqhier, Relations internationales. Les Acteurs du système international, T. 1, Grenoble, PUG, 1993, p. 139.

* 6 J.- P. Magnant, « Tchad crise de l'État ou crise de gouvernement? » dans États d'Afrique noire, Paris, Ed. Karthala, 1991, p.175.

* 7 M. Weber, Le Savant et le politique, Paris, Plon, 1959, p. 8.

* 8 J.F. Bayart, L'État en Afrique, Paris, Fayard, 1989.

* 9 B. Badie & G. Hermet, Politique comparée, Paris, P.U.F., 1990, p. 66.

* 10 P. Birnbaum, La Logique de l'État, Paris, Fayard, 1982.

* 11 S. Tachi, « La Souveraineté et le droit territorial de l'Etat », in Revue Générale de Droit international Public, 1931, p 413.

* 12 R. Kolb, Réflexions de philosophie du droit international, Bruylant, 2003, p 119.

* 13 Grands dictionnaires Encyclopédiques, Tg, Paris, Larousse, 1985, p. 9952.

* 14 P. Hugon, Géopolitique de l'Afrique, Paris, Edition Sedes, 2007, p.48

* 15 La notion d'Etat-Nation contenait en Afrique l'idée de bâtir une nation à l'intérieur des frontières du territoire de chacun de ces jeunes États. En pratique, cet objectif de créer une nation revenait à vouloir fondre en une seule communauté les personnes se réclamant des ethnies ou des origines ou encore des religions différentes.

* 16 V. Thebault (Coord.), Géopolitique de l'Afrique et du Moyen-Orient, Paris, Nathan, 2006, p.85

* 17 V. Thebault (Coord.), op. cit., p.86

* 18 B.H. Hammouda, Intégration Régionale en Afrique Centrale. Bilan et Perspectives, Paris, Karthala, 2003, p.30

* 19 B.H. Hammouda, op.cit., p.38

* 20 Cette analyse n'est valable que jusqu'au 8 Juin 2009, date à laquelle le Président OMAR BONGO ONDIMBA est décédé. Bien sur que ces tendances pourraient éventuellement changer

* 21 C. D. G. AWOUMOU, « Le couple Cameroun- Gabon : moteur de l'Afrique centrale ? », Enjeux N°17, octobre-décembre 2003, PP.5-10.

* 22 Depuis 1996, le Gabon traîne dans le versement de sa contribution égalitaire. A la date du 30 octobre 2003, par exemple et pour l'exercice courant, Libreville n'avait versé que 600.000.000 F CFA sur 1.507.656.810 F CFA attendu, soit un taux de recouvrement de 39,80%.

* 23 Mayumba, Royaumes Nkomi et Orungu.

* 24 Vili.

* 25 C. D. G. AWOUMOU, « La multinationalisation des entreprises nationales au sein de la CEMAC : initiative purement privée ou cheval de Troie pour l'hégémonie du Cameroun ? », Enjeux N°13, octobre-décembre 2002, PP.24-27.

* 26 Dixit Paul Biya lors de l'inauguration du terminal pétrolier de Kribi en juin 2004.

* 27 J. D. GESTIN, « Pétro-diplomatie », Jeune Afrique/L'intelligent, N°2175, du 16 septembre 2002, p.24

* 28 Par exemple, dans une interview accordée à jeune Afrique/L'intelligent (N°2319, du 19 au 25 juin 2005, p.38), le Président OBIANG NGUEMA déclare : « J'au déjà évoqué avec mes pairs chefs d'Etat la nécessité d'une réforme majeure de nos structures communes. En réalité, pour le moment, nous avons juste changé de nom, l'UDEAC est devenue CEMAC. Mais, nous continuons à fonctionner avec les anciens textes qui ne sont plus adaptés. Nous somme, c'est le cas de le dire, dans le statu quo ».

* 29 Pour T. OBIANG NGUEMA, « la Guinée Equatoriale ne tire aucun bénéfice des lourdes sommes qu'elle dépose dans les coffres de la BEAC et ne dispose d'aucun poste au niveau de sa direction ». Il est relayé par son ministre des Finances, Marcelino OWONO EDU, qui dénonce l'« iniquité » et l'« injustice » de la répartition des postes à la tête de la BEAC, exige une juste rémunération des avoirs équato-guinéens et demande une remise à plat de la gestion de la CEMAC. Cf. Jeune Afrique : L'intelligent, N°2322, du 10 au 16 juillet 2005, p.70

* 30 G. SCELLE, « Manuel de droit international public », Paris, Domat-Montchrestien, 1948, p.250

* 31 Pour reprendre la définition désormais classique de la notion d'organisation internationale. Cf. M. BETTATI, « Le Droit des organisations internationale », Paris, PUF, 1987, p.12 ; M. VIRALLY, « Définition et classification des organisations internationales : approche juridique », in G. ABI SAAB (dir.), « Le concept d'organisation internationale, Paris, Unesco, 1980, p.51

* 32 Article 6 du traité de la CEMAC

* 33 Se rapporter à R.J. DUPUY, « La Communauté internationale entre mythe et l'histoire », Paris, Economica/Unesco, 1986, pp.39 et ss.

* 34 Art. 2 §.d de la convention de l'UEAC

* 35 Le principe de subsidiarité, forgé par le droit communautaire européen, exprime un souci de répartition raisonnable entre les compétences nationales et les compétences communautaires.

* 36 Opinion citée dans l'ouvrage « droit et publiques de l'Union Européenne » de Jean FARET page 19.






Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy








"Là où il n'y a pas d'espoir, nous devons l'inventer"   Albert Camus