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Problématique de la mise en oeuvre de la décentralisation financière en République Démocratique du Congo

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par Jacques Nkongolo Musungula
Université Marien Ngouabi de Brazzaville - Maà®trise en Sciences Economiques (Economie et Finances Publiques) 2007
  

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CONCLUSION

La question principale de notre étude était de savoir comment dégager la mise en oeuvre de la décentralisation financière en RDC des entraves à son efficacité.

Pour ce faire, il nous fallait trouver des éléments de réponse aux questions secondaires suivantes :

1°-En quoi ces entraves consisteraient-elles ?

2°-Quelles stratégies faudra-t-il adopter pour les contourner et rendre la décentralisation financière plus à même d'atteindre ses objectifs ?

En guise de réponse provisoire à ces préoccupations, nous avions considéré, comme principaux goulots d'étranglement à la mise en oeuvre réussie de la décentralisation financière en RDC, d'une part le non-respect chronique des textes de base et des procédures en la matière et, d'autre part, les faibles capacités de mobilisation et de gestion des ressources budgétaires tant au niveau national, en provinces que dans les ETD.

Nous avions également envisagé de proposer, comme remèdes à ces différents maux, le changement de comportement du pouvoir central, des provinces et des ETD dans le sens du respect des règles et principes en vigueur, d'un côté et, de l'autre, le renforcement de leurs capacités de mobilisation et de gestion des ressources budgétaires.

Pour vérifier ces différentes hypothèses, nous avons, dans le développement de l'objet de notre travail, montré comment la décentralisation en général et la décentralisation financière, en particulier, sont instituées et organisées en RDC au cours de la période d'analyse, soit de 1982 à 2009. Nous avons, à cet égard, identifié les compétences, les ressources et les missions reconnues par les textes légaux et réglementaires aux différents niveaux du pouvoir d'Etat (Pouvoir Central, provinces et ETD).

Par la suite, nous avons, à la lumière de ce cadre de référence, analysé la manière dont le secteur financier du pouvoir central et des provinces et ETD était conduit. Nous avons cherché à savoir d'où venaient l'enlisement et l'inefficacité de la mise en oeuvre de la décentralisation financière en RDC. Les goulots d'étranglement alors identifiés en exploitant les données vérifiables en notre possession, nous avons pu proposer, en connaissance de cause, quelques voies à emprunter pour y remédier.

Cet exercice nous a permis d'aboutir aux résultats que nous nous empressons de présenter cidessous.

En général, il ressort clairement de notre travail que toutes nos hypothèses ont été vérifiées. Dans bien de cas, elles ont été significativement enrichies.

L'hypothèse du non-respect chronique des textes de base et des procédures en vigueur a été vérifiée en référence à quelques faits et phénomènes majeurs ayant marqué le processus décentralisateur au cours de la période d'analyse.

Il s'agit, notamment, de la mise en place incomplète de l'ossature juridique et institutionnelle de la décentralisation ainsi que du déficit de solidarité financière entre l'Etat central et les provinces et, entre les provinces et les entités territoriales décentralisées.

En effet, nonobstant la volonté politique clairement exprimée à travers les principaux textes fondateurs de la décentralisation, à savoir les lois « Vunduawe » de 1982, la Constitution de 2006 ainsi que les lois de décentralisation de 2008, le caractère incomplet de l'exécution juridique et institutionnelle de la décentralisation en RDC se manifeste par la non-exécution du découpage territorial, lequel fixerait les limites des nouvelles provinces et ETD; la nonexécution de la décentralisation sectorielle, laquelle assurerait le transfert officiel des compétences et responsabilités à ces dernières; et, la non-organisation des élections locales municipales et urbaines, lesquelles garantiraient l'exercice démocratique du pouvoir d'Etat à la base.

Le déficit de solidarité financière, quant à lui, s'explique par la non-actualisation de la législation financière ; l'indiscipline budgétaire ; un très faible niveau de rétrocession des recettes à caractère national reconnues aux provinces par rapport au niveau prévu dans la Constitution, soit en moyenne 10,5% en 2008 au lieu de 40% ; ainsi que par l'absence de péréquation alors que le déséquilibre économique interprovincial est tel que la tension extrême entre les recettes des provinces est de l'ordre 1 à 8,5.

Ce premier résultat entraîne naturellement, comme implication de politique économique, le rétablissement de l'équilibre financier des provinces et entités territoriales décentralisées par la consolidation du cadre juridique et institutionnel de la décentralisation et de la vie financière nationale et provinciale, ainsi que par l'application effective des principaux mécanismes de financement de la décentralisation, à savoir la rétrocession et la péréquation.

Néanmoins, la présente étude a eu à révéler que le contexte économique de la RDC étant caractérisé par un déséquilibre prononcé entre le potentiel des différentes provinces, toute exécution automatique de la rétrocession par la retenue à la source de 40% des recettes à caractère national pourrait s'avérer néfaste dans la mesure où elle peut davantage creuser les écarts entre ces dernières. Cette nouvelle donne souligne le rôle déterminant que doivent jouer la péréquation ainsi que le consensus dégagé lors du Forum National sur la Décentralisation pour corriger progressivement les disparités.

L'implication de politique économique que suscite ce résultat inattendu consisterait à coupler la rétrocession et avec la péréquation de 10% des recettes à caractère national et avec l'application de la formule consensuelle dudit Forum.

L'hypothèse des faiblesses fréquentes et persistantes de capacité du pouvoir d'Etat dans la mobilisation et la gestion des ressources budgétaires, a été principalement vérifiée par l'insuffisance des ressources budgétaires des provinces et ETD par rapport à la hauteur des tâches et responsabilités de ces dernières.

Cette insuffisance a été appréhendée à travers l'inadéquation insoutenable entre le potentiel fiscal des richesses du sol et du sous-sol et les maigres ressources budgétaires extraites pour le compte des pouvoirs publics ; la chute de la production minière telle que symbolisée par le déclin de la Gécamines, la plus grande entreprise minière du pays, qui a vu sa production de cuivre passer de 465000 tonnes en 1990 à 19000 tonnes en 2002 ; et, par la conclusion inconsidérée des contrats dits « léonins » dans le secteur minier entre 1997 et 2006.

La pauvreté fiscale globale traduite par un PIB/habitant de 200$us en 2009, soit plus de vingt fois moins que celui du congolais du Congo-Brazzaville (4250$us), un taux de décentralisation fiscale de 6,84% seulement projeté pour 2010, un stock de la dette extérieure représentant 700% des recettes budgétaires et 90% du PIB, une administration fiscale non performante ainsi que la non-viabilité financière de la majorité des provinces (80,95%), constituent autant d'éléments concluants qui ont également permis d'établir ladite insuffisance de ressources budgétaires.

La même hypothèse de faiblesses en termes de capacité de mobilisation et de gestion des ressources budgétaires, a été davantage vérifiée en référence à l'extraversion prononcée du financement budgétaire de l'Etat, avec un de taux de financement extérieur du budget de 42,14% en moyenne pour la période de 2005 à 2010 ; à la décapitalisation des entreprises du portefeuille de l'Etat ; à des dépassements budgétaires extravagants au sommet de l'Etat, soit 115% de moyenne en 2006 dans une fourchette de 36 à 242% des dépenses autorisées; à quelques cas notables de détournement intempestif des deniers publics ; et, à l'absence relative de contrôle des agents d'exécution du budget.

En mettant en relief l'interdépendance entre la double question de mobilisation et d'allocation des ressources budgétaires au niveau national et celle de la viabilité financière des provinces et ETD, ce modeste résultat suggère que la recherche de l'efficacité économique de l'Etat à partir des provinces et ETD serve de dénominateur commun à la politique financière de ces dernières et celle de l'Etat.

Dans cette perspective, les préoccupations sans cesse exprimées par la population au sujet de la visibilité fiscale des secteurs productifs prépondérants, comme celui de l'industrie extractive (minerais, pétrole, bois), cesseront d'être un tabou pour s'inscrire de façon légitime au centre des thématiques financières prioritaires et transversales ouvertes à toutes les parties prenantes (pouvoir central, provinces, ETD, Société Civile et partenaires extérieurs).

Les hypothèses relatives aux voies et moyens de redressement ont été, quant à elles, validées et intégrées dans le cadre d'une approche transversale s'appuyant sur deux leviers du redressement de la décentralisation financière, à savoir : l'action sur les acteurs en vue du changement des mentalités, d'une part, et l'action pour la soutenabilité budgétaire de la décentralisation, d'autre part.

Ainsi donc, l'hypothèse du changement de comportement du pouvoir central, des provinces et des ETD dans le sens du respect des règles et principes en vigueur s'en trouve validée et jugée fondamentale à travers ladite approche.

En effet, notre travail de recherche nous a permis de comprendre, en référence à l'expérience socio-politique propre à la RDC et aux enjeux de l'heure que sont la démocratie et le développement équilibré et harmonieux de toute la nation, que l'un des problèmes majeurs de la mise en oeuvre de la décentralisation financière demeure celui de l'état d'esprit des différents acteurs et décideurs face à la réforme décentralisatrice.

La justesse de ce résultat est particulièrement illustrée par la stratégie de communication sociale proposée en octobre 2007 par le Forum National sur la Décentralisation et mise en oeuvre depuis le début de l'année 2009 par le Ministère de la Décentralisation.

Aussi, nos recherches ont-elles enrichi cette stratégie en proposant d'y intégrer, comme thèmes transversaux à la décentralisation, la sécurité, la bonne gouvernance et la culture de restitution normée de l'information financière.

Dans le même registre, nous avons proposé que le partenariat public-privé et la coopération internationale soient également insérés dans la thématique de la campagne de sensibilisation des acteurs de la décentralisation.

Par ailleurs, en traitant les rapports électeur-gouvernant et politicien-fonctionnaire comme des relations de type « principal - agent » en théorie de l'agence, notre travail a permis de justifier la même hypothèse en proposant que des mesures de surveillance et d'incitation des décideurs publics et des fonctionnaires soient rendues opérationnelles pour garantir que ces derniers évolueront dans le sens de l'intérêt général là où ils sont, par nature, maximisateurs de leur propre profit.

Ce résultat implique que la stratégie de communication sociale pour le changement de comportement, bien qu'étant transversale, soit accompagnée à la fois par des mesures de limitation du comportement opportuniste des acteurs de la décentralisation ainsi que par celles d'orientation de ces derniers dans le sens de la maximisation du bien-être collectif.

L'hypothèse du renforcement des capacités financières du pouvoir central et des provinces a été, quant à elle, largement validée par les multiples faiblesses identifiées en matière de mobilisation et d'utilisation des ressources budgétaires tant au niveau national qu'à celui des provinces et ETD.

Pour y remédier, notre recherche a proposé les stratégies suivantes, à savoir : la poursuite de la mise en place de l'ossature juridique et institutionnelle de la décentralisation ; l'actualisation de la législation financière et la formalisation conséquente du consensus dégagé lors du Forum National sur la Décentralisation en ce qui concerne les modalités de répartition équitable des recettes à caractère national ; l'effectivité du jeu de péréquation ; la mobilisation des ressources budgétaires à la hauteur des tâches et responsabilités des autorités élues et des attentes de la population ; la réduction progressive de la dépendance vis-à-vis de l'extérieur dans le cadre du financement budgétaire de l'Etat ; la réforme de la dépense à tous les niveaux pour assurer au coût le plus bas possible les transferts destinés aux provinces et ETD, le fonctionnement de ces dernières ainsi que les investissements publics à même de tirer durablement la croissance économique ; et, le renforcement conséquent des capacités des ressources humaines. Ce résultat a pour implication, la nécessité pour la politique budgétaire de la décentralisation de s'appuyer sur des indicateurs de performance construits à partir des solutions stratégiques adaptées aux réalités de terrain.

Cela étant, les limites de notre modeste réflexion sont vite apparues, comme d'aucuns pourraient s'en apercevoir, lorsqu'il fallait traiter de la vie financière des provinces et ETD.

La raison, nous semble-t-il, en est simple : il s'agit de l'absence d'informations fiables et normées sur la gestion budgétaire des provinces pour la période sous-revue. Il s'agit aussi du manque de données crédibles sur la contribution de chaque province au PIB, sur la structure du budget de l'Etat, ainsi que sur la répartition sectorielle et territoriale tant du financement extérieur que des investissements publics et leur impact respectif sur les économies provinciales et locales.

De ce qui précède, les pistes de recherche qui s'ouvrent à nous pour cette étude sont, au plan pratique, celles d'une meilleure évaluation d'impact de la politique financière de l'Etat en matière de décentralisation en RDC, grâce à l'élargissement de la collecte et de l'analyse des données aux transactions financières publiques, provinciales et locales et ce, en tenant compte des évolutions cruciales qui s'annoncent à l'horizon, notamment : l'atteinte du point d'achèvement de l'Initiative PPTE en juin 2010, le découpage territorial, l'organisation des élections locales, l'exécution du contrat de doublement des recettes qui lie depuis belle lurette le Ministère des Finances aux régies financières, la poursuite de la fameuse revisitation des contrats léonins dans le secteur minier, et pourquoi pas l'instauration, on en parle déjà au Parlement, de la TVA en RDC.

Cet approfondissement de notre recherche pourrait nous permettre, au plan théorique, de débattre de la méthodologie d'intégration de l'Etat dont devrait s'inspirer la RDC, comme fondement de son intervention économique, pour assurer le financement efficace de la décentralisation, sachant d'une part, que ce pays post-conflit, fragile et pauvre a besoin d'un pouvoir d'Etat actif et des moyens colossaux pour sa reconstruction et, d'autre part, que les principes et dogmes néo-classiques de neutralisation économique de l'Etat qui ont contribué à la remise en cause du keynésianisme et de l'Etat-providence en faveur de l'orientation vers la logique du marché, sont encore dominants aujourd'hui et servent de sous-bassement aux politiques d'appui extérieur conduites par les partenaires traditionnels.

Dans un tel cadre d'analyse, nous pourrons, entre autres thématiques, être en mesure d'émettre un avis critique et motivé aussi bien sur la pertinence de la formule des «contrats chinois» (minerais contre infrastructures) actuellement mise en vedette dans le cadre du programme dit des « Cinq chantiers de la République » que sur l'intérêt qu'il y a ou non à améliorer et renforcer le cadre de coopération en vigueur avec les partenaires traditionnels (prêts conditionnés par la capacité d'absorption déterminée selon les critères du bailleur ; initiative PPTE ; etc.), pour assurer le financement public extérieur des provinces et ETD à un coût qui soit le plus bas possible pour les générations futures.

En attendant d'engager notre recherche dans une trajectoire, nous nous permettons de noter, au stade actuel de nos investigations, que la mise en oeuvre fructueuse de la décentralisation financière en RDC demeure largement tributaire du changement des mentalités dans le chef des acteurs, lequel changement devrait se traduire dans la pratique, ainsi que nous l'avons recommandé, par la complétude et l'application sans faille du cadre juridique et institutionnel ainsi que par la soutenabilité budgétaire de la réforme décentralisatrice dans son ensemble.

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"Enrichissons-nous de nos différences mutuelles "   Paul Valery