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Sciences et Politiques institutionnelles au Burkina Faso: élaboration et réformes de la Constitution de la IVème République

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par G. Jean Luc ZONGO
Université Ouaga II Burkina Faso - DEA sciences politiques 2011
  

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DEUXIÈME PARTIE

L'IMPORTANCE ET LA NATURE DES ECHANGES ENTRE SCIENCE, SAVANTS ET POUVOIR POLITIQUE DANS LES POLITIQUES INSTITUTIONNELLES ETUDIEES.

L'exploration des modes de socialisation des sciences dans les politiques institutionnelles de la quatrième République, leur analyse minutieuse en rapport avec les contextes de leur intervention a permis d'illuminer les voies de contact ou passerelles par lesquelles s'établissent ou tentent de s'établir les relations qui lient le monde de la science et de la politique au Burkina Faso dans le domaine spécifique des politiques constitutionnelles et réformatrices. Cette exploration des formes de la socialisation des savoirs ne pouvait que déboucher logiquement non seulement sur une mise au point, c'est-à-dire une sorte de récapitulatif général de la somme des ressources de connaissances ainsi mobilisées mais aussi sur la mesure de la réceptivité des décideurs politiques auxquels elles sont destinées (Chap. I). Il s'agit donc de faire le bilan et de rapporter les propositions et avis aux réformes effectives opérées par leurs destinataires. De même, une telle comparaison fera apparaître, sans qu'on fasse un effort supplémentaire pour les retrouver, la nature des relations entre sciences et politique et le paradigme politico-scientifique burkinabé (Chap. II).

CHAPITRE I : La Mesure du degré de réceptivité des décideurs politiques.

Il s'agit ici de procéder à la mesure du degré de réceptivité des décideurs politiques dans les différentes politiques institutionnelles étudiées : aussi bien dans la politique constitutionnelle de 1990 (Section I) que dans les politiques de révision de la constitution (Section II).

Section I : La politique constitutionnelle de 1990 face aux savoirs mobilisés.

Privé initialement de façon décrétale de la liberté de s'informer et de s'abreuver à toute source de connaissances utiles à l'exécution de son mandat, les ressources cognitives de la commission constitutionnelle étaient limitées à celles que le Front Populaire lui avait permis ouvertement de faire recours. Mais le refus de la limitation et l'exigence d'une autonomie absolue exprimée à l'unanimité par les commissaires lui ont permis d'enrichir ses travaux de plusieurs autres sources d'informations.

C'est ainsi que, entre autres, la constitution du Brésil, de la Namibie, du Bénin, la constitution de la deuxième République voltaïque de 1970, ont pu servir de source d'inspiration supplémentaires aux commissaires. Mais le canevas de discussion sur l'avant-projet de constitution a d'abord reflété le projet du Front populaire de constitutionnaliser la révolution démocratique et populaire (§1) conformément à sa politique de rectification, et témoigne que le comité de rédaction mis en place s'est, dans un premier temps, cantonné dans un rôle d'expert de service. Ce canevas a cependant été absolument bouleversé grâce à l'apport cognitif des comités de réflexion des associations de la société civile et des partis politiques (§2). Grâce à leurs apports critiques scientifiquement argumentés, ils ont réussi à accomplir le miracle de l'ouverture démocratique formelle, face à un pouvoir qui n'en avait visiblement pas envie (§3).

§1: Le projet de constitution du Front populaire dans son essence : les stigmates de l'esprit totalitaire.

Le comité d'experts commis à la rédaction du canevas de discussion de l'avant-projet de constitution a élaboré un plan en 15 titres. Le préambule, dont on ne précise pas encore qu'il fait partie de la constitution, recèle en trois points quelques déclarations générales que l'on a appelées droits et devoirs individuels et collectifs, droits sociaux, puis droits politiques qui, selon B Arsène Yé, parlent « de tout sauf de droits politiques »218(*). La constitution elle-même, avec ses quinze titres, s'ouvre majestueusement par un titre I consacré à l'État et à la souveraineté du peuple. L'État est dit de nature révolutionnaire et démocratique. Le but stratégique de la constitution, selon le canevas, c'est la révolution démocratique et populaire qui est posée comme la référence suprême de la constitution, la Gründe norm dans le sens kelsenien de l'expression. Le canevas de discussion prend ainsi en compte de façon large, les positions pseudo-scientifiques du Front populaire défendues dans la presse d'État par ses intellectuels organiques et au sein de la commission par son aile gauche. Il reflète dans son ensemble, selon les termes que Bongnessan Arsène Yé, « l'état d'esprit des rédacteurs »219(*) qui ont voulu répondre aux injonctions venues d'en haut.

Dans ce canevas, les rédacteurs ont sculpté un président du Faso colossal en pouvoirs, élu pour cinq ans et rééligible à souhait, à la majorité simple au premier tour. Le peuple, en matière législative, comme en toute autre question pouvant intéresser la nation, devait garder le silence tant qu'on ne lui demandait pas son avis. Le droit d'initiative populaire ne lui était point reconnu. Il ne jouissait d'aucune initiative législative ni pour proposer des lois ni pour demander la révision de la constitution ; ce qui est curieux pour un pouvoir qui thèse sur sa volonté d'utiliser la démocratie comme une stratégie de mise en oeuvre de la révolution. Parmi les dizaines de députés dont on comptait doter l'Assemblée des députés du peuple, quinze (15) devaient être nommés par le président du Faso. Quand au mandat du député, il est d'un an inférieur à celui du président du Faso. Les structures populaires de la rectification sont constitutionnalisées par une reprise des textes les régissant. Les dispositions du canevas sur l'organisation du pouvoir populaire sont, selon Bongnessan Arsène YÉ, la « copie certifiée conforme »220(*) de ces textes. Le Front populaire devait y patronner idéologiquement les partis politiques, qu'ils en soient membres ou non puisqu'il était défini comme « le cadre d'orientation et d'approfondissement du processus révolutionnaire221(*) ». Comme s'ils partageaient les rôles entre eux et la commission constitutionnelle, et comme s'ils étaient certains que le canevas va passer sans contestation, les rédacteurs ont déclaré qu'ils réservaient aux commissaires la charge de déterminer les conditions de participation des autres partis politiques à l'animation de la vie politique (élections locales, législatives et présidentielles). Les représentants du Front populaire insisteront plus tard pour qu'on n'admette que les partis anti-impérialistes. Les tribunaux populaires sont constitutionnalisés et la création d'une cour sureté de l'État a été prévue. L'initiative de la révision constitutionnelle, qui a été réservée uniquement au chef de l'État, était seulement limitée par l'interdiction de toucher à l'intégrité territoriale. Le reste des dispositions, pour la plupart, ressortissaient aux techniques du parlementarisme rationalisé. Ce texte sera reconstruit de fond en comble grâce à l'opposition et à l'apport cognitif des associations non-membres du Front populaire.

* 218 Cf. B. Arsène YÉ, les fondements politiques de la IVe République, op. cit. p. 47.

* 219 Ibid. p. 45

* 220 Ibid. p. 48.

* 221 Ibid.

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"Là où il n'y a pas d'espoir, nous devons l'inventer"   Albert Camus