WOW !! MUCH LOVE ! SO WORLD PEACE !
Fond bitcoin pour l'amélioration du site: 1memzGeKS7CB3ECNkzSn2qHwxU6NZoJ8o
  Dogecoin (tips/pourboires): DCLoo9Dd4qECqpMLurdgGnaoqbftj16Nvp


Home | Publier un mémoire | Une page au hasard

 > 

De la liberté à  la soumission de la vérité. Une lecture de l'encyclique "veritatis splendor" de Jean Paul II

( Télécharger le fichier original )
par Daniel KIBAMBA KAHYA
Université catholique du Congo (RDC) - Graduat 2009
  

Disponible en mode multipage

Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy

EPIGRAPHE

« La vérité éclaire l'intelligence et donne sa forme à la liberté de l'homme... »

Jean Paul II, Veritatis Splendor

DEDICACE

A tous les miens, je dédie ce travail !

AVANT - PROPOS

Nous voici au terme de ce premier cycle universitaire à la Faculté de Théologie. Ce présent travail vient couronner tous les efforts consentis au cours de ces trois longues années de graduat passées aux Facultés Catholiques de Kinshasa. Pour y parvenir, nous avons eu l'assistance de plusieurs personnes qui nous ont aidé à réaliser ce travail scientifique. Ainsi, nous faisons notre, le devoir de nous acquitter de la dette de reconnaissance envers toutes ces personnes.

Nous tenons de ce fait à remercier sincèrement le Professeur Abbé Sébastien MUYENGO qui, malgré le temps qu'il devait consacrer pour ses propres recherches, a bien voulu diriger ce travail. Nous le remercions de tout coeur. A travers lui, nous pensons également à l'Assistant Abbé François NAKATALA pour ses sages conseils et surtout son sens d'orientation, ainsi qu'à Monsieur Louis MISYO. Nous ne pouvons pas oublier tout le corps professoral de la Faculté de Théologie qui nous a donné une solide formation scientifique. Aux amis et combattants de lutte de notre promotion, nous réitérons les mêmes sentiments.

Nos remerciements s'adressent aussi à la Société Saint Paul qui a eu confiance en nous, en nous envoyant étudier dans une bonne institution académique. Nous pensons ainsi à tous les confrères de notre circonscription et plus encore aux membres de notre communauté du Juniorat. Que le Père Jacques BOSEWA, recteur de la Communauté du Juniorat, trouve à travers ces lignes, l'expression de notre sentiment de reconnaissance.

A tous ceux qui nous ont aidé de près ou de loin, afin d'arriver à ce stade ou nous nous retrouvons actuellement, qu'ils retrouvent à travers ces pages notre sentiment de reconnaissance.

Daniel KAHYA, ssp

INTRODUCTION GENERALE

I. PROBLEMATIQUE

Parler de la liberté, surtout dans un contexte ecclésial, est une tâche assez malaisée. Et pour cause ? La loi ou les commandements de Dieu (Décalogue) semblent limiter le champ d'action de cette liberté, provocant ainsi une confusion des termes, entre liberté et libertinage, et créant un certain conflit entre la liberté et la vérité.

Ce malaise provient du fait que la liberté se range du côté de la Loi. Car, lorsque par exemple Dieu ordonne à l'homme de manger de tous les fruits des arbres du jardin (Gn 2,16-16), lui interdisant de manger les fruits de l'arbre de la connaissance du bien et du mal, la liberté de l'homme s'arrêtait donc à l'application de cette prescription. Car lorsque l'homme cherche à décider de lui-même de ce qui est bien et ce qui est mal ou d'appliquer le bien ou le mal, selon sa propre guise, il se fait aussi Dieu. Ces déviations que nous remarquons actuellement ne sont-elles pas les conséquences de cette première désobéissance ?

Conscient de cette mauvaise compréhension de la liberté, le Pape Jean Paul II d'heureuse mémoire, mit sur papiers ses réflexions que nous retrouvons dans l'encyclique Veritatis Splendor c'est-à-dire la Splendeur de la Vérité, afin que le monde, au contact avec ce document, redécouvre dans l'Eglise le véritable sens et signification de la liberté. C'est dans ce sens qu'il nous fait voir que la liberté consiste en ce que « le pouvoir de décider du bien et du mal n'appartient pas à l'homme, mais à Dieu seul ». Cette la liberté humaine ne consiste que dans la compréhension et la réception de la loi divine. De ce fait, la liberté implique la notion de la Loi et de la Vérité qui s'entrecroisent formant ainsi un seul bloc, nonobstant les quelques points de divergence.

Tout compte fait, tout homme qui veut s'engager dans la voie de la parfaite liberté est appelé à une acceptation de la vérité, une vérité qui va de paire avec la Loi car la Loi et la Vérité sont une réponse au bien déjà donné. La liberté cherchera à se réaliser à l'intérieur de cette Vérité-Loi pour tendre vers le bien éternel ou vers la félicité éternelle.

De notre côté, nous nous proposons, à travers cette rédaction, d'analyser cette pensée du Pape Jean Paul II afin de la rendre compréhensible à tous, et surtout au peuple de notre nation.

II. INTERET ET CHOIX DU SUJET

Le deuxième chapitre du livre de la Genèse rappelle le genre humain que le pouvoir de décider du bien et du mal appartient à Dieu, et non à l'homme. C'est en acceptant la Loi de Dieu, qui protège et promeut la liberté de l'homme, que celle-ci s'épanouit, cela pour dire que la notion de la liberté est vaste mais limitée par cette dépendance inaliénable à Dieu.

Et pourtant, le relativisme moral que connaît notre société actuelle, renvoi au second plan voire dans les oubliettes une si riche conception de la liberté. L'homme contemporain est parvenu à déloger Dieu dans sa manière de concevoir la question de la liberté jusqu'à en faire un libertinage à la place de cette première.

Une telle conception de la liberté est un danger permanant pour la société actuelle, d'autant plus que le monde ne pourra pas se développer si chacun de nous vit comme dans une jungle ou dans un état de nature. Il faudrait donc avoir une morale de référence commune afin d'aider l'univers dans son développement. Et pourtant, c'est ce que nous vivons aujourd'hui. De ce fait, mener une analyse sur la liberté en partant de l'encyclique du Pape Jean Paul II est une tâche noble. Ceci est donc la motivation qui justifie l'intérêt et le choix de ce sujet qui nous paraît d'ailleurs très actuel.

III. METHODOLOGIE DU TRAVAIL

Afin de mener à bon port notre investigation théologique, nous allons recourir à la méthode herméneutique grâce à laquelle nous interpréterons le texte de l'auteur pour finir ensuite à une contextualisation de l'encyclique, en tenant compte de notre environnement vital ici en République Démocratique du Congo.

IV. SUBDIVISION DU TRAVAIL

Sans compter l'introduction et la conclusion, notre travail se subdivisera en trois parties essentielles. La première présentera brièvement l'encyclique et élucidera quelques concepts, la deuxième développera la notion des thèmes même de ce travail, à savoir la Liberté, la Loi ainsi que la Vérité. Enfin le troisième chapitre parlera de l'actualisation de ces thèmes dans la vie du congolais, afin d'aider tant soit peu, au développement du pays.

CHAPITRE PREMIER

LA SPLENDEUR DE LA VERITE

I.0. INTRODUCTION

Ce premier chapitre présentera les idées maîtresses de l'Encyclique Veritatis Splendor. En effet, cette Encyclique expose les raisons d'un enseignement moral enraciné dans l'Ecriture Sainte et dans la Tradition apostolique de l'Eglise, tout en mettant en lumière les pensées présupposées ainsi que les conséquences des controverses dont cet enseignement a été l'objet.

Mais avant d'analyser systématiquement l'encyclique, nous donnerons un aperçu sommaire sur la vie de Jean Paul II.

I.1. L'AUTEUR ET SON OEUVRE

I.1.1. Jean Paul II, un Pape entre deux siècles, deux millénaires1(*)

De son vrai nom Karol Wojtyla, Jean Paul II est né le 18 mai 1920 à Wadowice, une petite ville située près de Cracovie, en Pologne. Il est le fils cadet de Karol et d'Emilia Kaczorowska. Le 20 juin 1920, il reçoit le sacrement de Baptême. Il commence l'école élémentaire en 1926. Et trois ans plus tard, il reçoit la Première communion.

Au cours de cette même année 1929, il perd sa mère Emilia. Une année après, il est admis à l'école dit `'Gymnase'' où il apprend l'Allemand. Il fait preuve d'un talent remarquable en poésie et dans l'apprentissage des langues étrangères. En 1933, il perd son frère aîné Edmund, qui fut médecin, et resta ainsi le fils unique de sa famille.

Durant cette même année, il achève la troisième année de Gymnase avec une grande distinction. Une année après, il apprend la langue grecque et devient président du mouvement des jeunes « Association mariale », mouvement dédié à la dévotion mariale.

Passionné par la littérature et le théâtre, il entre dans une troupe théâtrale « Studio 38 » pour se perfectionner. Et en 1938, il entre à la Faculté de Philosophie Et Lettres de l'Université de Jagellonica. En 1939, la deuxième guerre mondiale commence. Son père se décide de l'amener vivre à Cracovie. En 1940, pour éviter d'être déporté en Allemagne, il se fait engager comme travailleur dans une carrière de pierres.

Le 18 février 1941, il perd son père et reste seul au monde. Il se décide alors d'entrer au séminaire de Cracovie au mois d'octobre 1941. Il y étudie la théologie en clandestin. Cinq ans plus tard, il est ordonné prêtre, le 1er novembre 1946. Son évêque l'envoie poursuivre les études théologiques à l'Université Angelicum de Rome, où il sort docteur en théologie morale quelques années après. Il rentre au pays et devient professeur de théologie. Durant cette époque, il publie une pièce théâtrale portant sur la pertinence du sacrement de mariage.

En 1958, il est nommé Evêque auxiliaire de Cracovie. A la mort de l'Archevêque de Cracovie en 1962, il assure l'intérim, et deux après, il est nommé et sacré Archevêque de Cracovie. C'est à ce titre qu'il participe au Concile Vatican II, où son intervention sur la liberté religieuse et la dignité de la personne est capitale. Il apportera même plus tard une importante contribution dans l'élaboration du document conciliaire `'Gaudium et Spes''.

En 1967, le Souverain Pontife Paul VI le crée cardinal. Et à la mort de Jean Paul 1er, il est élu Pape, à l'issue du conclave en 1979. Il fut le 453ème pape de l'histoire de l'Eglise Catholique Romaine. Durant son pontificat, il fait plusieurs choses étonnantes. Nous retenons entre autres sa lutte contre le régime communiste, ses nombreux reproches à l'égard du capitalisme, sa recherche infatigable de la liberté, l'institution des Journées Mondiales des Jeunes (JMJ)2(*), les rencontres mondiales des familles, etc.

En homme passionné de la littérature, il rédigea plusieurs ouvrages que nous présenterons d'ailleurs dans sa bibliographie. Il entreprit aussi plusieurs voyages à travers le monde, non pas en touriste mais en vue de réconforter ses frères. Il visita 131 pays et parcouru 1.500.000 kilomètres. Terrassé par la maladie, il meurt le 6 avril 2005.

I.1.2. Petite bibliographie

Jean Paul II fut un homme de lettres. Dès son bas âge, il écrivit plusieurs poèmes. Durant sa carrière professorale, il publia aussi des nombreux ouvrages. Et même en tant que pape, il continua d'écrire. Nous citerons, à la fin de ce travail, quelques ouvrages dont il a pu rédiger.

I.2. ELOGE DE LA VERITE

I.2.1. Le titre, les destinataires, l'objet et le plan de l'encyclique

L'encyclique que nous analysons a comme intitulé Veritatis Splendor c'est-à-dire la Splendeur de la Vérité. C'est un véritable éloge de la vérité. Elle fait voir comment l'homme, un être créé à l'image et à la ressemblance de Dieu, et par là appelé à la félicité céleste, se détourne de cette visée divine pourtant salvifique pour lui, pour s'adonner à tout ce qui peut le corrompre. Et cela sous l'instigation de Satan.

Pour mieux échapper au contrôle de Dieu, il commence par développer sa propre conception de la liberté, malheureusement erronée, afin de tout faire à sa guise. Les deux premiers mots de l'encyclique viennent rappeler alors à l'homme que malgré cette conception qu'il a de la liberté, une liberté à sa manière, la vérité est en lui et qu'il ne peut pas l'étouffer. A ce sujet le pape écrit :

« La Splendeur de la Vérité se reflète dans toutes les oeuvres du créateur et, d'une manière particulière, dans l'homme créé à l'image et à la ressemblance de Dieu : la vérité éclaire l'intelligence et donne sa forme à la liberté de l'homme »3(*).

Contrairement à la plupart d'autres encycliques, ici le Souverain Pontife s'adresse à ses frères dans l'épiscopat, c'est-à-dire les évêques. Car, pour lui, un tel message d'une richesse hors du commun ne peut être vulgarisé avec pertinence qu'avec l'aide de ceux-ci, car ils partagent avec lui la responsabilité de garder la sainte doctrine (V.S. n°5). Et surtout, à cause du langage utilisé, qui est très technique et par là, difficile à être compris par les esprits non initiés au langage théologique.

Le rôle d'un pasteur dans l'Eglise Catholique Romaine est d'exhorter, de dénoncer et d'expliquer, afin de conforter, soutenir et consoler le peuple de Dieu, nous rappelle le Pape (V.S. n°4). Et c'est dans cette optique qu'il relit l'ensemble de l'enseignement moral de notre Eglise « dans le but précis de rappeler quelques vérités fondamentales de la doctrine catholique, qui risquent d'être déformées ou rejetées dans le contexte actuel » (V.S. 4). Et pour cause, l'homme actuel veut séparer la conception naturelle de la liberté de sa source, qui est au fait la vérité. Il se laisse aveugler par certaines évolutions scientifiques qui amènent des nouvelles conceptions anthropologiques et éthiques. Le pape veut alors, à travers les pages de cette encyclique, rappeler aux autres évêques de conserver l'enseignement de l'Eglise dans son authenticité. Tel est l'objet de cette encyclique.

Comme plan, le pape structure l'encyclique en trois chapitres. Le premier, intitulé « Maître, que dois-je faire de bon... ? » est essentiellement un commentaire du récit biblique du jeune homme riche (Mt 19, 16s). De ce récit, Jean Paul II tire quelques thèmes qu'il développe par rapport à la question morale que pose le jeune homme à Jésus. Le deuxième chapitre, intitulé « Ne vous modelez pas sur le monde présent » est une analyse sur certaines tendances de la théologie morale actuelle. C'est au fait ici où il développe les concepts que nous nous proposons d'analyser ; il s'agit spécialement de la liberté et de la loi, de la conscience et de la vérité, etc. Et le troisième chapitre enfin, portant comme thème « Pour que ne soit réduite à néant la croix du Christ » montre le but que vers lequel doit tendre la morale.

I. B. 2. « Maître, que dois-je faire de bon...  ? »

Le pape Jean Paul II commence son encyclique par une analyse du récit du jeune homme riche, texte tiré de Matthieu 19, 16-21. C'est dans ce sens que nous invite d'ailleurs le Concile Vatican II, à relier toute réflexion morale aux Ecritures et au mystère du Christ4(*).

De cette analyse, il ressort que la question morale du jeune homme, une personne non autrement identifiée et donc qui peut représenter toute personne humaine, est une question de plénitude de sens pour la vie et non une recherche sur les règles à observer (V.S. n°7). De là nous pouvons comprendre qu'il ne recherche que la perfection, une perfection qui le mènera à la liberté.

La préoccupation du jeune homme riche « Maître, que dois-je faire de bon ? » est une question essentielle car elle veut concilier la vie morale et la vie spirituelle. De ce fait, le jeune homme « pressent qu'il existe un lien entre le bien moral et le plein accomplissement de sa destinée personnelle » (V.S. n° 5). Connaissant intensément la Loi, il recherche la réponse à sa question non plus du côté de celle-ci mais plutôt de celui de la morale, une morale éclairée par Jésus, car c'est Lui qui révèle au monde la vérité sur l'agir humain. Ceci devient alors une invitation pour l'homme de ce siècle à tourner son regard vers le Christ afin de recevoir de lui la réponse sur ce qui est bien et sur ce qui est mal (V.S. n°7). De ce point de vue, « la vie morale se présente comme la réponse due aux initiatives gratuites que l'amour de Dieu multiplie dans ses relations avec l'homme. Elle est une réponse d'amour » (V.S. n° 10). Seul le Christ peut nous mener au coeur de cette morale évangélique afin de déboucher vers la vérité toute entière.

La réponse de Jésus à la question du jeune homme nous fait découvrir avant tout que l'homme, pour découvrir ce qui est bon à vivre, doit s'adresser à Celui qui est déjà par nature Bon, c'est-à-dire à Dieu. C'est pourquoi Jean Paul II dit : « Dieu seul peut répondre à la question sur le bien, parce qu'il est le Bien » (V.S. n° 12). La question du jeune homme riche devient alors une recherche à concilier l'action moralement bonne à ses racines religieuses car l'homme n'est bon que parce que son créateur, qui est aussi sa source, est bon.

Cette réponse de Jésus nous fait découvrir ensuite que l'homme doit se référer à la Loi, car à partir d'elle « Dieu se fait connaître et reconnaître comme Celui qui `'seul est le Bon'' ; comme Celui qui, malgré le péché de l'homme, continue à rester le `' modèle'' de l'agir moral... comme Celui qui, fidèle à son amour pour l'homme, lui donne sa Loi pour rétablir l'harmonie originelle avec le créateur et avec la création et plus encore pour l'introduire dans son amour » (V.S. n° 10). La vie morale se veut alors comme réponse de l'homme à l'amour gratuit de Dieu. Et le bien, pour l'homme, devient alors appartenir à Dieu, lui obéir, le suivre en pratiquant la justice et la miséricorde (V.S. n° 10). De ce fait, reconnaître le Seigneur comme l'Unique, devient le coeur même de la Loi. Et l'homme, pour y arriver, ne doit compter que sur l'aide du Seigneur qui se révèle à lui et le rend capable de le reconnaître comme tel. Car, dit le pape, « aucun effort humain, pas même l'observance la plus rigoureuse des commandements, ne réussit à `'accomplir'' la Loi... `'L'accomplissement'' ne peut venir que d'un don de Dieu » (V.S. n°11).

La réponse que Jésus donne au jeune homme comporte deux volets. Le premier fait allusion à la première table des commandements, volet qui veut qu'on reconnaisse Dieu comme l'Unique Seigneur et l'absolu. L'homme ne peut rendre culte à aucun autre être qu'à Lui seul, parce qu'il est l'Unique. Le deuxième volet de cette réponse comporte la deuxième table des commandements, qui en soit, est une synthèse de la loi naturelle et concerne l'homme. Jésus met ensemble la vie spirituelle et la vie morale pour amener l'homme à la félicité céleste. De cette compénétration, il fait ressortir l'essentiel du Décalogue, à savoir aimer Dieu, et aimer son prochain. Le pape Jean Paul II dit à ces propos : « Les différents commandements du Décalogue ne sont en effet que la répercussion de l'unique commandement du bien de la personne, au niveau des nombreux biens qui caractérisent son identité d'être spirituel et corporel en relation avec Dieu, avec le prochain et avec le monde matériel » (V.S. n° 13). Jésus ne rappelle à ce jeune homme que de sauvegarder le bien de la personne, qui est l'image de Dieu.

Aimer Dieu et aimer l'homme sont complètements unis entre eux. Et c'est Jésus lui-même qui en est l'expression de cette invisible unité. Par sa mort, il rend témoignage de cet amour qu'il a pour son Père et pour l'humanité. Il devient de ce fait le symbole et le lieu même de la jointure de ces deux commandements. Et l'homme, à la suite du Christ, doit devenir aussi ce symbole et ce lieu de jointure. Il ne peut pas prétendre aimer Dieu s'il n'aime pas son prochain (Cfr.1 Jn 4, 20). Le Pape dit en effet : « sans l'amour du prochain qui se concrétise dans l'observance des commandements, l'amour authentique pour Dieu n'est pas possible » (V.S. n° 14).

Et pour y arriver, le Seigneur propose lui-même une piste de solution « Si tu veux être parfait va, vends ce que tu possèdes et donne-le aux pauvres ... » (Mt 19, 21). Tout homme qui veut arriver à la perfection du coeur doit apprendre à devenir pauvre de coeur, comme il est dit dans le sermon sur la montagne. Et c'est à ce stade qu'intervient le rôle des Béatitudes dans la vie de tout un chacun car elles « n'ont pas comme objets propre des normes particulières de comportements, mais elles évoquent des attitudes et des dispositions fondamentales de l'existence » (V.S. n° 17), lesquelles attitudes prédisposent l'homme à tourner son regard vers les réalités d'en haut.

Cette perfection que recherche l'homme exige une maturité dans sa donation à Dieu et une acceptation volontaire à être à sa suite. Et c'est là le sens de la liberté humaine. Car, pour parler de la liberté, il y a en premier lieu les commandements comme condition imprescriptible, ensuite vient l'abandon total à ces commandements jusqu'à en faire corps avec soi. Cette liberté de l'homme et la Loi divine s'appellent mutuellement pour former un seul ensemble, pouvant mener l'homme à sa pleine perfection.

Tout celui qui pratique cet amour pour Dieu, en se laissant guider par l'Esprit, se réalise et s'épanouit dans la Loi divine, cependant celui qui vit selon la chair, trouve en cette Loi un poids lourd à porter. Il la considère même comme une négation à sa liberté. Il sied tout de même de comprendre que cette vocation à l'amour n'est pas l'apanage des quelques individus seulement, elle est donnée à tout le monde. Tout celui qui sent cet appel, est convié à le vivre et l'appliquer. De la sorte, tout le monde peut parvenir à la pleine perfection, dont Dieu est la mesure. Et Jésus en est le modèle si le monde veut véritablement apprendre à aimer. En Jésus-Christ, Dieu s'est fait homme pour nous apprendre à être des hommes selon le dessein du Père5(*).

Le partage entre Jésus et le jeune homme riche ne s'arrête pas avec ces deux protagonistes, il continue à travers toutes les générations, passées et futures. Aujourd'hui comme hier, la préoccupation du jeune homme est nôtre. Car, nous sommes tous à la recherche du bien à accomplir. Et comme dans le temps passé, c'est toujours Jésus qui donne la réponse intégrale et finale à cette question (V.S. n° 25). N'a-t-il pas dit lui-même qu'il est avec nous tous les jours, jusqu'à la fin de temps ? (Cfr Mt 28, 20). Et cette présence du Christ parmi les hommes de ce temps, « se réalise dans son corps qui est l'Eglise » (V.S. n° 25). L'Esprit Saint, donné à tous, fait sentir cette présence et rappelle ce que les chrétiens doivent faire.

Ce même Esprit aide la communauté ecclésiale universelle à promouvoir l'unité et à garder la foi et la vie morale, tout comme les apôtres l'ont fait au début de l'Eglise. Le Concile Vatican II dit à ce propos : « L'Eglise perpétue dans sa doctrine, sa vie et son culte, et elle transmet à chaque génération, tout ce qu'elle est elle-même, tout ce qu'elle croit. Cette tradition qui vient des Apôtres se poursuit dans l'Eglise, sous l'assistance du Saint Esprit » (V.S. n° 27). Grâce à cet Esprit, elle garde et transmet le contenu de la foi, la Tradition ainsi que les Ecritures saintes des générations en générations. Et par la Tradition, elle développe l'interprétation authentique de la Loi du Seigneur (V.S. n° 27), tâche que Vatican II exprime en ces termes : « la charge d'interpréter de façon authentique la parole de Dieu, écrite ou transmise, a été confiée au seul Magistère vivant dans l'Eglise dont l'autorité s'exerce au nom de Jésus Christ »6(*). C'est pourquoi, l'Eglise sent l'obligation de conserver le dépôt de la foi, avec amour et détermination, et à promouvoir les valeurs morales.

De ce récit du jeune homme riche ressort trois idées. La première invite l'homme à se soumettre à Dieu, lui qui est le seul Bon, de l'aimer et de faire sa volonté. La deuxième est la pertinence de pratiquer le bien moral ; ceci fait allusion à la relation avec l'homme. La troisième est l'idée de la destinée dernière ou la fin dernière où l'homme doit tendre, c'est-à-dire la vie éternelle, fin qui se prépare dans l'Eglise, corps mystique du Christ.

I.2.2. « Ne vous modelez pas sur le monde présent » (Rm 12, 2)

Après avoir développé dans le premier chapitre le récit du jeune homme riche, le pape Jean Paul II s'est mis à présenter certaines tendances de la théologie morale actuelle par rapport aux positions de l'Eglise. Il précise que l'Eglise, dans sa mission, doit veiller sur l'agir humain. Et c'est grâce à la théologie morale qu'elle accomplit cette lourde mission car, elle est une réflexion sur le caractère bon ou mauvais des actes humains et de la personne qui les pose (V.S. n° 29).

Dans cette deuxième partie de l'encyclique, le Pape Jean Paul II utilise les concepts techniques appropriés à la théologie morale, qu'il essaie d'expliquer, concepts qui causent actuellement problème à cause des déviations que l'on observe dans le monde actuel, quant à leurs explications, surtout dans le monde des théologiens. Ne le souligne-t-il pas lui-même lorsqu'il écrit : « dans le cadres des débats théologiques post-conciliaires, se sont toutefois répandues certaines interprétations de la morale chrétienne qui ne sont pas compatibles avec la `' saine doctrine '' » ? (V.S. n°29) C'est pourquoi il explique à ses frères dans l'épiscopat certains principes qui aideraient au discernement de ce qui contraire à la saine doctrine. Voici les thèmes développés :

I.2.2.a. La liberté et la loi

Dans le monde d'aujourd'hui, les problèmes les plus débattus se rattachent à celui de la liberté humaine. Car pour certains, l'homme doit agir en vertu de ses propres options et en toute libre responsabilité, non sous la pression d'une contrainte, mais uniquement par la conscience de son devoir7(*). C'est à partir d'une telle conception de la liberté que certaines tendances se sont écartées de ce qui est vérité sur l'homme, un être créé à l'image et à la ressemblance de Dieu, jusqu'à absolutiser cette nouvelle conception de la liberté. On retrouve parmi les adeptes de cette doctrine les athées ainsi que tous ceux qui ont déjà perdu le sens de la transcendance.

Le pape commence d'abord par énumérer quelques conceptions erronées de la liberté. La première tendance est l'attribution à la conscience individuelle des privilèges qui le rend comme une instance suprême du jugement moral. L'homme devient capable de juger de ce qui est bien et de ce qui est mal, à partir de sa propre conscience. Ce jugement est considéré vrai et irréfutable parce qu'il provient de la conscience. La vérité, dans cette tendance, a cédé sa place à une conception subjective du jugement moral. Il sied de comprendre que cette crise au sujet de la vérité peut amener à une mauvaise compréhension de la notion de la conscience humaine même, qui généralement se traduit comme un acte de l'intelligence humaine qui doit conduire à l'application universelle du bien, par celle de déterminer uniquement les critères du bien et du mal, de manière autonome (V.S. n° 32).

La deuxième tendance est celle relative à certaines doctrines qui font de la liberté une absolue souveraineté. Ici la liberté est considérée comme créatrice des valeurs et est autonome dans sa substance. La vérité est pour eux une création même de cette liberté. Cette tendance a marqué même certains théologiens catholiques qui pour eux, parlant dans le sens de la raison et de la foi, soutiennent la notion de la souveraineté totale de la raison dans le domaine des normes morales, et oublient la dépendance de la raison humaine à la sagesse divine. Ceci entraîne comme conséquence le fait de nier que Dieu est l'auteur de la loi morale naturelle et que l'homme par sa raison, participe à la Loi éternelle (V.S. n° 36). Et que l'Eglise n'est devenue qu'une parénèse générale. Elle n'a plus aucune compétence doctrinale spécifique.

Après avoir stigmatisé les conceptions erronées de la liberté et de la loi, Jean Paul II se livre par la suite, à expliquer la véritable conception de la liberté ainsi que celle de la loi. Il part du livre du Siracide où il montre que Dieu, en créant l'homme, l'a laissé à son propre conseil, afin qu'il découvre seul celui qui l'a créé. C'est le premier sens de la liberté. De ce point de vue, l'homme participe à la seigneurie divine et possède un pouvoir sur lui-même.

Nous développerons ce point sur la liberté et la loi assez largement dans le deuxième chapitre de notre travail. Mais à présent, passons sur ce que le pape entend sur la conscience et la liberté.

I.1.2.b. La conscience et la vérité

D'entrée de jeu, le pape souligne que « le lien qui existe entre la liberté de l'homme et la Loi de Dieu se noue dans le `'coeur'' de la personne, c'est-à-dire dans sa conscience » (V.S. n° 54). Et cette conscience rappelle à l'homme qu'il y a en lui une loi qui n'a pas été faite par lui, à laquelle il est soumis d'obéir. Aimer et chercher à accomplir le bien tout en évitant le mal proviennent de cette loi. De ceci découle le lien étroit entre la liberté et la loi d'un côté, et la conscience de l'autre côté. La liberté et la loi ne peuvent être comprises que s'il y a une bonne interprétation de la part de la conscience (V.S. n°54).

Pour certains penseurs, cette conscience humaine dans son autonomie, est créatrice des valeurs. Avec une telle pensée, ils remettent en question son rôle d'être le témoin de la fidélité à Dieu et à sa Loi. De fait, ils parviennent même à nommer les actes de celle-ci comme étant des décisions et non plus des jugements, avec comme risque de faire considérer la conscience comme étant la norme objective de l'agir humain.

Le danger d'une telle conception est que chaque individu pourrait juger de bon, par sa conscience autonome, un acte que la loi morale qualifie d'intrinsèquement mauvais (V.S. n° 56). Il s'en suivra également une opposition entre la loi naturelle et sa propre conscience. Alors l'identité même de la conscience morale face à la liberté perdra son sens.

Quant à vérité, elle intervient dans l'homme lorsque le jugement de la conscience pousse ce dernier à assumer ses responsabilités du bien accompli et du mal commis. Pour ainsi dire que, lorsque l'homme commet un acte mauvais par exemple, sa conscience le disposera à assumer que cet acte commis est mauvais. C'est au fait cela la vérité universelle du bien. Celle-ci ne se limitera pas uniquement au fait d'assumer son acte, mais le prépare également à demander pardon et de chercher à pratiquer la vertu.

Il sied aussi de comprendre que l'homme doit chercher la vérité et la promouvoir afin que sa conscience soit dite `'bonne conscience''. Et ceci est l'oeuvre de l'Esprit Saint qui fait d'elle une conscience qui ne falsifiée pas la Parole de Dieu ni la loi non plus, et qui demeure pure, évitant de se modeler sur le monde présent (V.S. n° 62). Cette recherche de la vérité doit pousser l'homme à développer une certaine vigilance car il est probable, c'est ce qui arrive d'ailleurs, qu'on retrouve dans les jugements de la conscience des erreurs. Car « la conscience n'est pas un juge infaillible : elle peut se tromper » (V.S. n° 62). Par conséquent, l'homme est appelé à former chaque jour sa conscience et à la rendre objet d'une conversion continuelle à la vérité et au bien (V.S. n° 64).

I.1.2.c. Le choix fondamental et les comportements concrets

Dans cette partie du chapitre, Jean Paul II parle de la conception qu'ont certains auteurs sur la manière de considérer la liberté. Pour ces derniers, la liberté qu'a l'homme est une `'liberté fondamentale'', plus pénétrante que la liberté de choix, qui est pour l'homme un rôle-clé pour atteindre l' `'option fondamentale'' grâce à laquelle il devient autonome dans ses décisions.

La conséquence qui découle d'une telle manière de considérer la liberté est que l'objet immédiat des actes de l'homme ne sera plus la recherche du bien absolu et transcendantal, mais plutôt celle des biens particuliers. L'homme ne cherchera plus à tendre vers l'Etre Suprême, fin ultime de tout, car lui-même sera cette fin.

L'Eglise catholique, par sa doctrine morale, reconnaît aussi l'importance que revêt le choix fondamental dans la vie humaine. Ce choix engage radicalement la liberté devant Dieu et confirme la vie morale. Et le pape fait allusion ici au choix de la foi ou de l'obéissance de la foi du fait que c'est grâce à ceci que l'homme s'en remet à Dieu dans toute sa liberté. Et dans la Nouvelle Alliance, ce choix fondamental se situe au niveau de la réponse que le jeune homme riche de Mt 19, 21 donne à la question de Jésus '' si tu veux être parfait... viens et suis-moi'', réponse que chaque personne humaine devra donner au Maître. Car par ce choix fondamental, l'homme pourra orienter sa vie vers la véritable fin ultime. Toutefois, cette faculté « s'exerce dans les choix particuliers d'actes déterminés, par lesquels l'homme se conforme délibérément à la volonté, à la sagesse et à la Loi de Dieu » (V.S. n° 67).

Il y a aussi des opinions qui remettent cette conception de l'Eglise en question. Ils séparent le choix fondamental du comportement concret. Cette séparation risque de provoquer une contradiction dans l'intégrité même l'agent moral, c'est-à-dire l'homme. Pour ainsi dire que la moralité des actes humains ne s'arrête pas uniquement à l'intention, à l'orientation ou au choix fondamental mais à l'ensemble de tout ce qui forme l'homme.

I.1.2.d. L'acte moral : téléologie et téléologisme

Les actes humains sont les lieux ou se rencontrent et se manifestent la liberté humaine et la Loi de Dieu. Et c'est à partir de ces actes que l'on peut situer l'évolution de l'homme : s'il se perfectionne ou pas. D'après Jean Paul II, ces actes sont des « actes moraux parce qu'ils expriment et déterminent la bonté ou la malice de l'homme qui les accomplit. Ils ne produisent pas seulement un changement d'état d'éléments extérieurs à l'homme, mais, en tant que délibérément choisis, ils qualifient moralement la personne qui les accomplit et ils en expriment la physionomie spirituelle profonde » (V.S. n° 71). Ils sont ainsi comme des facteurs qui aident à l'observer, à porter un jugement sur lui.

Et pour un chrétien, la moralité de ses actes, dit Jean Paul II, se définit grâce à la Révélation de Dieu et par la foi. C'est pourquoi ils doivent témoigner de leur conformité ou non, avec la dignité et la vocation données par Dieu au moyen de la grâce. Ainsi, le Christ, aîné d'une multitude de frères (Rm 8,29), devient l'image à laquelle tout chrétien doit se conformer.

De ce fait, leur moralité se définie lorsqu'il se crée une relation entre liberté humaine et bien authentique, bien qui en est le fruit de la Loi éternelle ou tout simplement de la Sagesse divine ordonnant tout les êtres. Ainsi, un acte devient moralement bon lorsqu'il est conforme au vrai bien de l'homme et tendant vers Dieu, sa véritable fin ultime. Par conséquent, l'agir de l'homme ne devient bon que lorsqu'il tend vers cette ultime fin, et non pas parce il peut aider à atteindre un but apparemment bon, ou tout simplement parce que l'intention de celui qui la pose est bonne (V.S. n° 72). C'est en ce sens que la vie morale a en elle un caractère téléologique fondamental, « car elle consiste dans l'orientation délibérée des actes humains vers Dieu, bien suprême et fin ultime de l'homme » (V.S. n° 73).

Pour le Souverain Pontife, l'agir libre de l'homme dépend des sources même de la morale, notamment l'intention, la circonstance et l'objet, pour reprendre la doctrine thomiste des sources de la morale. Cette conception permettra le développement des certaines théories se montrant attentives à la conformité des actes humains avec des fins poursuivies par l'agent et avec les valeurs qu'il admet. Toutefois, ces critères seraient obtenus par la pondération des biens moraux à atteindre. Ce téléologisme, définit comme méthode de découverte de la norme morale, peut alors définir les critères de justesse d'un agir déterminé à partir du seul calcul des conséquences prévisibles de l'exécution d'un choix, et peut même pondérer entre eux les valeurs de ces actes et les biens poursuivis, afin de s'intéresser à la proportion entre les effets bons et les effets mauvais (V.S. n° 75).

Pour le pape, il existe ici aussi certaines tendances qui voudraient libérer les contraintes d'une morale de l'obligation, volontariste et arbitraire, mais qui se révèle toutefois inhumaine. Ces tendances peuvent avoir une certaine force de conviction par leur affinité avec la mentalité scientifique, préoccupée d'ordonner les activités techniques et économiques en vue des ressources et des profits. Elles « croient pouvoir justifier, comme moralement bons, des choix délibérés de comportements contraires aux commandements de la Loi divine et de la loi naturelle » (V.S. n° 76). Elles veulent partir de la casuistique de l'ancien temps, tout en oubliant que ces cas ne concernaient que la loi qui paraissait douteuse et qu'elle ne remettait pas en cause la validité absolue des préceptes moraux négatifs. De ce point de vue, « la moralité de l'acte humain dépend avant tout et fondamentalement de l'objet raisonnablement choisi par la volonté délibérée »8(*), comme le dit saint Thomas.

I.B.4. « Pour que ne soit réduite à néant la croix du Christ » (1Co 1, 17) : Le bien moral pour la vie de l'Eglise et du monde

Le troisième chapitre de l'encyclique Veritatis Splendor est une piste d'atterrissage de toutes les théories que le Pape Jean Paul II a développé dans le chapitre précédent. Ici le Pape tire, en quelques sortes, certaines conclusions pour la vie du chrétien, de la société, de la nouvelle évangélisation ainsi que du théologien moraliste.

De ces conclusions, soulignons le problème fondamental qui est en ces jours menacé. Celui-ci consiste dans le rapport entre la liberté humaine et la Loi de Dieu, problème qui définie au fait le rapport entre la liberté et la vérité. Car la liberté, pour qu'elle soit effective, doit tenir compte de ce qu'exige la vérité. La foi chrétienne ainsi que la doctrine de l'Eglise ne disent-elle pas que « seule la liberté qui se soumet à la Vérité conduit la personne humaine à son vrai bien. Le bien de la personne est d'être dans la Vérité et de faire la Vérité »9(*) ?

En effet, cette conclusion ressort de la confrontation entre la position de l'Eglise Catholique avec la situation sociale et culturelle actuelle. Cette situation sociale et culturelle contemporaine a perdu en elle le lien essentiel entre le trinôme vérité-bien-liberté en le substituant par une morale erronée de la liberté humaine. Cette nouvelle conception amène malheureusement l'homme à une autodestruction progressive. Le mépris de la vie symbolisé par l'euthanasie par exemple, la violation de droits fondamentaux de la personne humaine, l'avortement, ne sont-ils pas des signes alarmants provenant de cette nouvelle conception ? « Et même, dit le Pape, il est arrivé une chose plus grave : l'homme n'est plus convaincu que c'est seulement dans la vérité qu'il peut trouver le salut. La force de salvifique du vrai est contestée et l'on se confie à la seule liberté ; déracinée de toute objectivité, la tâche de décider de manière autonome de ce qui est bien et de ce qui est mal » (V.S. n° 84).

Maîtrisant la réflexion rationnelle et ne jugeant tout que par elle, l'homme croit aujourd'hui être le maître de tout. Il n'accepte comme vrai que ce qui est prouvé par la raison et par son expérience. Et pourtant, démontre Jean Paul II, cette « réflexion rationnelle et l'expérience quotidienne montrent la faiblesse qui affecte la liberté de l'homme. C'est une liberté véritable, mais finie : elle n'a pas sa source absolue et inconditionnée en elle-même, mais dans l'existence dans laquelle elle se situe et qui, pour elle, constitue à la fois des limites et des possibilités » (V.S. n° 86).

Chercher coûte que coûte à séparer radicalement la liberté et la vérité entraîne des conséquences graves. Parmi ces conséquences, il y a une qui revêt d'une importance capitale : la foi même de la morale. Plusieurs personnes vivent en ce moment comme si Dieu n'existait pas, ils ont, en un certain sens, vendu leur foi. Et même parmi les chrétiens, la foi de quelques-uns est affaiblie et a perdu son originalité de critère nouveau d'interprétation et d'action pour l'existence personnelle, pour celle de la famille, ainsi que celle de toute une société. De ce fait, l'Eglise a l'obligation de retrouver et de présenter à nouveau le vrai visage de la foi chrétienne, une foi qui n'est pas uniquement un ensemble de propositions à accueillir et à ratifier par l'intelligence, mais au aussi une connaissance et une expérience du Christ, une mémoire vivante de ses commandements, une vérité à vivre (V.S. n° 88).

Parvenir à vivre une telle expérience, dans le monde actuel, peut devenir comme ramer à contre courant. Là où la majorité veut aller, le chrétien doit faire le contraire, si ce chemin là l'empêche à atteindre la Vérité, même s'il faut arriver jusqu'au martyre. L'Ancien Testament est riche exemple, lorsqu'il retrace la vie des certains personnages qui ont cherché la Vérité au dépend de leur vie. L'histoire de Suzanne (Cfr. Dn 13), en est un cas. Et même dans le Nouveau Testament, Jean Baptiste, contre toute attente, n'a pas préféré sacrifier la vérité au dépend du mensonge. Et le Pape encourage même les fidèles, s'il est nécessaire, d'arriver jusqu'au martyre s'il le faut pourvu que la vérité triomphe. Car le monde n'a pas besoin de mensonge. Les saints, nos frères, ne sont-ils pas un exemple pour nous ?

Cette morale que le Souverain Pontife propose, a aussi une dimension sociale et politique. De nos jours, plusieurs formes d'injustice sociale et économique ou de corruption politique sont venues à l'existence. Le bas peuple, victime de cette cupidité des puissants, en paye le pot cassé. Il devient même bafoué et humilié dans ses droits les plus fondamentaux. Les plus nantis ne recherchent que leurs propres biens. Et pourtant, Dieu étant le Bien suprême veut le bonheur de chacun. De ce point de vue, le Pape combat farouchement certains systèmes qui aident à avilir l'homme, notamment le totalitarisme, système qui nie, à sa racine, la dignité et l'aspect transcendantal de l'homme, et pourtant il est un être créé à l'image et à la ressemblance de Dieu.

Il est vrai, reconnaît le Pape, qu'il est difficile d'atteindre l'objectif que la morale chrétienne s'est assignée. C'est pourquoi il demande au monde de compter sur la grâce divine. Et pour symbole de reconnaissance par rapport à celui qui accorde cette grâce, il faudrait obéir à sa Loi. Une loi qui ne recherche que le bien de la personne. Pour lui, afin d'atteindre cet objectif, « les possibilités concrètes de l'homme ne se trouvent que dans le mystère de la Rédemption du Christ » (V.S. n° 103).

Outre ces sujets abordés, Jean Paul II a développé également l'idée que la morale chrétienne doit accompagner la nouvelle évangélisation. Elle doit être elle-même cette « évangélisation porteur de nouveauté, une évangélisation qui doit être nouvelle en son ardeur, dans ses méthodes, dans son expression » (V.S. n° 106). Et les théologiens moralistes, tout comme l'ensemble de l'Eglise, sont appelés à porter une main forte à cette évangélisation par le témoignage d'une vie de foi, en proposant une réflexion toujours plus approfondie sur le contenu de la foi, sous la conduite de l'Esprit Saint. Et les évêques, premiers gardiens du dépôt de la foi, ont cette obligation d'assumer la lourde responsabilité de la foi du peuple de Dieu ainsi que de toute la vie chrétienne.

Comme conclusion, le Souverain Pontife confie toutes les personnes, les épreuves et les joies que l'existence humaine peut connaître ainsi que la vie morale même des fidèles sous la protection de Marie, mère de miséricorde, elle qui accompagne toujours l'Eglise. Au fait, le Pape appelle ainsi Marie Mère de miséricorde parce qu'elle est la mère de Jésus, l'Homme-Dieu qui a été envoyé par le Père pour révéler au monde la miséricorde. Elle porte également ce titre parce que sur la croix, c'est à elle que Jésus confia l'Eglise naissante (Lc 23, 34). De ce fait, le choix fait par Jean Paul II de confier toutes les personnes ainsi que leur vie à Marie a sa raison d'être.

I.3. CONCLUSION DU CHAPITRE

Après avoir présenté brièvement le contenu de l'encyclique, nous nous sommes rendu compte que les problèmes moraux relevés par le Pape Jean Paul II sont d'une importance capitale dans la vie du monde en général et de l'Eglise en particulier.

Les déviations morales dont le Souverain Pontife fait allusion ont tendance à prévaloir sur ce qui doit être vécu normalement, sur ce qui est déjà bien en soi. De ce point de vue, il rappelle que les vérités de la doctrine catholique ne doivent pas être déformées ou rejetées. Elles doivent être plutôt acceptées, comprises et vécues dans un contexte actuel.

C'est pour quoi, dans le premier chapitre, il démontre, à partir des Ecritures, que l'homme doit chercher à pratiquer ce qui est bien ou ce qui est bon. Il part de la question du jeune homme riche en Mt 19 « Maître, que dois-je faire de bon ? ». Dans le deuxième chapitre, il commence par dénoncer toutes les tendances qui mènent l'homme actuel à des déviations et rappelle au monde la vraie doctrine morale. Et dans le troisième chapitre, il propose des moyens pour arriver à appliquer ces principes moraux dans la vie quotidienne. C'est à cette analyse que nous nous sommes adonnés tout au long de ce premier chapitre. Toutefois, quelques questions restent suspendues à nos lèvres : quel est le véritable sens de la liberté ? Quel est le rôle de la Loi par rapport à la liberté ? Quelle relation devons-nous lier entre cette liberté et la vérité ? Telles sont les questions que nous nous proposons de répondre, partant de l'encyclique Veritatis Splendor, dans les lignes qui suivent.

 CHAPITRE DEUXIEME

LIBERTE, LOI ET VERITE: UN TRINOME COMPLEMENTAIRE

II. 0. INTRODUCTION

Le progrès technoscientifique a introduit dans le monde actuel une nouvelle manière de penser, de vivre, de concevoir Dieu. Celle-ci a deux faces : la face positive qui rend la vie actuelle plus agréable, et la face négative qui s'est élaborée en véritable crise. Cette crise a même bougé certaines tendances de la morale universelle : la notion de la liberté n'est plus considérée de la même manière comme avant, celle de la conscience a été remise en question, l'enseignement de l'Eglise est rejeté ou critiqué, les grandes injustices sociales et économiques sont tolérées, etc.

Dans ce présent chapitre, nous allons nous adonner à présenter trois notions qui vont normalement ensemble et qui sont, de nos jours, considérées non plus à leurs justes valeurs mais plutôt à la guise de chacun, à cause de ce dit progrès technoscientifique. Il s'agit des nations de la liberté, de la loi et de la vérité. Aussi l'Encyclique Veritatis Splendor sera notre guide. Nous essayerons de réponde, autant que faire se peut, avec le Pape Jean Paul II, à la question : « qu'est-ce que la liberté et quelle est son rapport avec la vérité contenue dans la Loi de Dieu?» (V.S., n° 30).

II.1. DE LA NOTION DE LA LIBERTE

II.1.1. Quelques définitions

Il est de règle dans un travail scientifique, de procéder en premier lieu par une élucidation du concept que l'on veut développer. C'est dans ce cadre que nous voulons, dans cette section du deuxième chapitre nous adonner à cet exercice.

En effet, selon le Nouveau Petit Robert, la liberté ne peut se comprendre que sous quatre angles ou états : entendue comme un état d'une personne physique, elle est la situation d'une personne qui n'est pas sous la dépendance absolue de quelqu'un. Entendue comme un état d'une personne morale, elle est une possibilité, ou un pouvoir d'agir sans contrainte. Entendue dans le domaine politique et social, elle est un pouvoir d'agir, au sein d'une société organisée, selon sa propre détermination, dans la limite de règles définies. Et entendue au sens philosophique, elle est un caractère indéterminé de la volonté humaine10(*).

Pour André Lalande, la liberté est entendue comme « l'état de celui qui fait ce qu'il veut et non ce que veut un autre que lui ; elle est l'absence de contrainte étrangère »11(*).

J.-L. Bruguès entend par liberté la capacité de tout homme à devenir lui-même et à atteindre sa plénitude. Elle prend la forme de libre-arbitre, c'est-à-dire la capacité de choisir entre le bien et le mal. Elle est la cause de mérite ou de démérite. Ainsi, être libre c'est toujours choisir et suivre la loi de Dieu12(*).

Et pour A. FERNANDEZ la liberté est cette « capacité de décider de faire ou ne pas faire, de choisir une chose ou son contraire, de s'engager dans un sens ou de prendre le parti contraire, de créer de nouvelles situations... La liberté est aussi la capacité intérieure de la personne, qui permet à la volonté de vouloir ou ne pas vouloir, de se déterminer face à des possibilités différentes, ou de choisir leurs contraires »13(*).

Quant au C.E.C., « la liberté est le pouvoir, enraciné dans la raison et la volonté, d'agir ou de ne pas agir, de faire ceci ou cela, de poser ainsi par soi-même des actions délibérées... la liberté est en l'homme une force de croissance et de maturation dans la vérité et la bonté. La liberté atteint sa perfection quand elle est ordonnée à Dieu, notre béatitude »14(*).

Il ressort de toutes ces définitions que la liberté demeure l'apanage de la raison qui, grâce à cette dernière, a le pouvoir de poser des actes délibérés, de laisser agir la volonté afin de choisir ce qu'il faut faire ou qu'il ne faut pas faire.

II.1.2. La liberté dans la morale naturelle

La liberté est cette faculté d'agir selon sa volonté, sans être embarrassé par un quiconque pouvoir. Elle est désignée, négativement comme une absence de soumission, de servitude, de contrainte. Or, l'être humain reste indépendant. Positivement, elle est comprise comme une autonomie et une spontanéité du sujet rationnel ; les comportements humains volontaires se fondent sur la liberté et sont qualifiés de libres.

A en croire le professeur S.MUYENGO, la liberté humaine « se définit comme cette capacité d'autodétermination. Elle est le fait de la raison. Il n'y a que des êtres raisonnables qui soient libres et par conséquent dignes de respect. C'est pourquoi les êtres raisonnables sont appelés personnes »15(*).

Cette liberté peut constituer un attribut de l'être humain, de sa volonté, et être la condition de droits naturels ou positifs, mais aussi de devoirs ; la réalisation effective de l'acte volontaire peut ainsi comporter une dimension vécue que l'on ne saurait simplifier à ce qui précède.

La liberté se conçoit ici selon trois figures, selon trois formes de pouvoir s'exerçant sur trois sortes d'objets. Comme figures, elle comporte la maîtrise de soi, c'est-à-dire de ce qui m'est propre, la maîtrise de la nature et la maîtrise de développement économique et social. Comme formes de pouvoir, elle comporte tout ce qui a trait au moral, aux sciences, aux différentes techniques ainsi qu'à tout travail qui transforme le milieu vital. Et comme objet, elle comporte le corps, le caractère, les besoins, les désirs, les instincts ainsi que le moi de la personne même. Ainsi donc, la liberté est une donnée immédiate de la conscience qui accompagne tout un chacun.

II. 1.3. Sens de la liberté chrétienne

La notion de liberté exprime la condition fondamentale de l'anthropologie chrétienne. En effet, l'homme étant créé par Dieu, a été voulu libre, dès les premiers instants de son existence. Dieu, en voulant que sa créature adhère à sa volonté lui a laissé tout de même la faculté de prendre seule la décision de le suivre ou pas. Toutefois, se mettre à sa suite n'est pas une pure spontanéité : « il est une réponse à l'initiative de Dieu qui se révèle à nous en même temps qu'il nous fait prendre conscience des forces qui nous asservissent (péché) »16(*).

De ce point de vue, la remarque de saint Paul : « C'est pour que nous soyons vraiment libre que le Christ nous a libérés » (Ga 5,1) devient capital. Ainsi donc, la liberté chrétienne ne peut se comprendre que dans l'optique du Christ, venu libérer l'homme. Toutefois, aujourd'hui, ce concept s'est radicalisé. Depuis la renaissance humaniste et l'avènement des philosophies modernes de la subjectivité, la liberté, appelée actuellement autonomie, est devenue le principe même de toute leur philosophie. Et dans ce processus de radicalisation, elle a perdu de plus en plus ses références théologiques au point de désigner une spontanéité originaire qui porte en elle-même sa propre évidence, mais non celle de son fondement17(*).

Pour que cette liberté soit effective ou véritable, il faudrait qu'elle remplisse certaines conditions. Il y en a bien sûre plusieurs mais nous nous limiterons à quelques unes seulement que nous jugeons incontournables :

a. La liberté en vue du bien

Tout comme la morale est cette science de la connaissance du bien et du mal, la liberté implique en elle la possibilité de choisir entre le bien et le mal. Il reste que la véritable liberté est portée au bien. Tout celui qui veut être libre doit nécessairement choisir de faire le bien, et plus on fait le bien, plus dirons-nous on devient libre. Le choix du mal ou de la désobéissance rend l'homme esclave de son propre mal.

b. La liberté en vue de la vérité

« La vraie liberté est une force de croissance et de maturation, non pas uniquement dans le bien mais aussi dans la vérité »18(*). Ainsi, tout celui qui se prétend être libre doit accepter la vérité des choses et des faits c'est-à-dire la loi naturelle. Car une vérité splendide n'emprisonne pas, mais pourtant ouvre l'homme et le rend plus respectueux.

c. La liberté en vue de l'amour

Saint Augustin dit en effet : « aime et fais ce que tu veux », car pour lui l'agir humain doit être conditionné par l'amour. Et cette responsabilité qu'a l'homme comme signe de vraie liberté, ne se comprend que quand la liberté s'exerce dans les rapports entre les êtres humains.

En effet, il n'y a pas de liberté sans dignité de la personne humaine, car les deux s'appellent mutuellement. De ce point de vue, écrit le professeur MUYENGO, « on n'est pas libre de porter atteinte à la liberté d'autrui, à son droit, à sa dignité »19(*), Ainsi donc la liberté a une limite. Se référant à Gn 2, 17 Jean Paul II qualifie celle-ci d'être illimité. Il dit en effet que « cette liberté n'est pas illimitée : elle doit s'arrêter devant l'arbre de la connaissance du bien et du mal, car elle est appelée à accepter la loi morale que Dieu donne à l'homme » (V.S., n°35), et le pape d'ajouter : « En réalité, c'est dans cette acceptation que la liberté humaine trouve sa réalisation plénière et véritable »20(*). Tout compte fait, nous comprenons que la liberté de chacun se limite là où commence celle des autres, mieux encore là où commence la loi morale.

II.1. 4. La liberté selon l'Encyclique Veritatis Splendor

Après avoir fait une esquisse sur la conception de la liberté dans la morale naturelle et chrétienne, nous voulons développer dans ce point la conception de la liberté selon l'encyclique que nous analysons.

En effet, la liberté humaine est l'expression d'un dépassement que tout homme peut faire de manière transcendantale. Ainsi, « elle n'est pas seulement la possibilité de choisir entre deux objets ou deux biens. Elle est l'expression de l'ouverture de l'être-esprit à l'Infini, et donc de l'accomplissement de l'être-esprit-humain en quête de l'Absolu »21(*) Devient libre alors toute personne qui se laisse diriger par Dieu. Mais, avant d'en arriver là, il doit d'abord se prendre en charge, c'est-à-dire comprendre ce qu'il est lui-même : ses habitudes, son être car dans la notion de la liberté, il est question de la liberté du sujet lui-même. Ainsi donc, le sujet doit se viser lui-même d'abord. Karl Rahner écrit à ces propos que la liberté « est d'abord la prise en charge du sujet par lui-même, de sorte que la liberté, en son essence fondamentale, a pour objet le sujet connu comme tel en sa totalité. Dans la liberté réelle, le sujet se vise toujours lui-même, se comprend et se pose lui-même, en fin de compte ne fait pas quelque chose, mais se fait lui-même »22(*).

Le Pape Jean-Paul II, dans Veritatis Splendor, part du passage de l'Ecriture selon laquelle « Dieu a voulu laisser l'homme à son conseil » (Si 15, 14) pour expliquer cette riche notion de la liberté. En effet, l'écrivain sacré rappelle que Dieu a crée l'homme libre afin que par cette liberté il cherche et découvre son créature. Cette action du Seigneur est au fait un appel qu'il lance à l'homme pour participer à sa seigneurie divine. Et l'homme doit user de cette liberté pour répondre effectivement à cet appel.

Dans la réponse que l'homme doit donner figure quelques éléments qui attesteront la positivité de sa réponse. Ainsi, la maîtrise du monde où il habite est le premier élément qui marque cette réponse. En effet, lorsque Dieu a créé l'homme, il a voulu que celui-ci soumettre le monde en le transformant. Il lui a donné une certaine autonomie par rapport à cette mission. Cette autonomie concerne les réalités terrestres c'est-à-dire les choses, les autres êtres, les sociétés qui sont dans le monde et surtout l'homme lui-même. L'homme qui a été créé par Dieu doit apprendre à connaître toutes ces réalités, à les utiliser et surtout à les organiser.

Il est plus facile de connaître, d'utiliser et d'organiser les autres réalités terrestres mais lorsqu'il s'agit de l'homme cela cause un grand problème car ici le sujet devient lui-même l'objet. Le pape dit à ce sujet : « Dieu l'a (l'homme) laissé à son conseil (Si 15, 14), afin qu'il cherche son Créateur et qu'il parvienne librement à la perfection. Y parvenir signifie construire personnellement en soi cette perfection. En effet, de même que l'homme façonne le monde par son intelligence et par sa volonté en le maîtrisant, de même l'homme confirme, développe et consolide en lui-même sa ressemblance avec Dieu en accomplissant des actes moralement bons » (V.S., n° 39)

Il est clair maintenant qu'il n'y a pas de morale sans notion de liberté. Mais de quelle liberté s'agit-il ? André-Mutien Léonard répond à cette question. Pour lui, il ne s'agit pas d'une liberté absolue, car chacun de nous n'est devenu libre qu'en étant éduqué par d'autres à la liberté. Et l'auteur de poursuivre : « Notre liberté est réelle, mais c'est une liberté engendrée et, finalement, une liberté créée par Dieu, le Pédagogue de toute l'humanité »23(*).

Il s'avère toutefois que de nos jours, le monde croit que cette manière de considérer la liberté la met en conflit avec la loi, d'où la revendication d'obtenir une liberté absolue qui ne s'inclinerait plus, ni devant le bien ni devant le mal, mais qui peut elle-même créée ses propres valeurs morales. Ceci nous fait penser au concept autonomie que nous avons déjà développé plus haut.

II. 2. LA NOTION DE LA LOI

II. 2.1. Quelques définitions

La notion de la Loi est complexe. Ainsi, pour bien comprendre celle-ci, il faudrait d'abord élucider ce concept, par les différentes définitions que d'aucun lui donnent. De ce fait, pour le Nouveau Petit Robert la Loi est une « règle impérative imposée à l'homme. Elle est une règle ou un ensemble de règles obligatoires établies par l'autorité souveraine d'une société et sanctionnées par la force publique... Elle est aussi un ensemble des règles juridiques établies par le législateur ou encore elle est une règle dictée à l'homme par sa conscience, sa raison »24(*).

Pour André Lalande, la loi est une « règle générale et impérative (quelques fois système de règles impératives, législation) régissant du dehors l'activité humaine. Elle est imposée, sans déclaration expresse, par l'usage, la coutume, la tradition... et formulée et promulguée, en termes authentiques, par l'autorité souveraine d'une société. Ainsi donc, elle est une règle obligatoire, exprimant une nature idéale d'un être ou d'une fonction, la norme à laquelle il doit se conformer pour se réaliser, notamment la loi d'esprit (c'est-à-dire les axiomes fondamentaux auxquels la pensée doit être conforme pour avoir une valeur logique), la loi naturelle (c'est-à-dire le principe du bien tel qu'il se révèle à la conscience) et la loi d'un genre (utilisée en esthétique) »25(*).

II. 2. 2. De la Loi naturelle

La notion de la Loi naturelle soulève un problème aussi passionnant que déconcertant parce que cette notion emmène l'homme d'un coté à éprouver ses limites, et de l'autre coté à voir naître à partir de ces limites une espérance.

Le philosophe Thomas Hobbes distingue dans son ouvrage le Léviathan, les lois naturelles, qui sont généralement découvertes par la raison et sur lesquelles se mettent d'accord les individus à l'état de nature, du droit naturel, qui s'étend sur toutes choses et ne fait qu'un avec la puissance de chaque individu. Aussi, pour Hobbes, seule la loi naturelle est prescriptive, tandis que le droit naturel n'est lui qu'improprement un droit, puisqu'il ne prescrit rien, mais ne fait que décrire un état de fait26(*).

Hobbes appelle alors loi naturelle un ensemble de contraintes qui sont commandées par la raison pour assurer à l'homme sa bonne conservation. S'il énonce une liste de lois naturelles dans l'ouvrage que nous venons de cité plus haut, Hobbes résume ces lois à plusieurs reprises dans l'adage « Ne fais pas à autrui ce que tu penses déraisonnable qu'autrui te fasse »27(*). Pour lui alors, les premières de ces lois naturelles commandées par la raison sont la recherche de la paix et le respect de la justice.

Ainsi donc, étant découvert par la raison, la loi naturelle reste écrite au fond du coeur de l'homme, et est comprise comme l'ensemble des règles de conduite fondées sur la nature même de l'homme et de la société. Cette loi, étant qualifiée de naturelle, implique la nature et plus particulièrement ici la notion de la nature humaine. Si l'homme est un animal faisant partie de la nature, il n'est pas un animal comme les autres. Sa raison lui fournit des principes. Situé dans le monde de la nature, il est soumis, comme elle, à la nécessité, au déterminisme. Mais par sa raison, il accède à un monde moral où il ne s'agit plus simplement de savoir ce qui est, mais ce qui doit être et où règne la liberté.

Parlant de la raison même, une question hante nos pensées. En effet, pourquoi, au lieu que l'homme suive ses penchants naturels, s'impose une discipline de vie ? N'est-ce pas être esclave que d'accepter de se soumettre, de se conformer rigoureusement à ces principes fournis par la raison ? La réponse à ce questionnement se trouve dans la fin de l'acte humain. Tant que l'acte de l'homme aura une fin bonne, malgré la présence de l'obligation morale, la lourdeur de la loi ne sera pas sentie.

En effet, « on ne fait pas la morale d'un peuple car elle existe déjà »28(*), nous dit Lévy-Bruhl car la morale est déjà une réalité vécue. Nous constatons cette réalité en nous. Ainsi donc, nous avons conscience que certaines choses nous sont dues, que d'autres nous sont permises ou pas, que nous devrions agir de telle ou telle autre manière. En tout cela la morale reste une réflexion sur la vie, car elle est elle-même issue de la vie.

Un autre aspect de la loi naturelle est que tous les hommes sont égaux devant la loi morale et chacun doit être traité selon sa dignité de personne, c'est-à-dire en être raisonnable qui agit d'après des lois ou des principes. Car seul cet être a une volonté qui est tout simplement la raison pratique. Toutefois, il faut garder présent à l'esprit que l'être humain reste libre, c'est-à-dire qu'il n'est pas soumis à la loi naturelle, parce qu'il n'est pas un instrument. Il choisit, il décide de la respecter ou non. Sa volonté sera alors bonne lorsqu'elle constatera dans la liberté la fin aussi bien que le principe de son action. C'est en ce moment qu'il verra la loi morale, avec son universalité, émaner de la volonté de l'être humain.

Les lois naturelles dont parle Hobbes ne sont pas seulement des commandements de la raison, elles sont également des prescriptions divines. En montrant la coïncidence entre ceux-ci, Hobbes découvre le fondement rationnel de règles telles que la gratitude, le pardon, le rejet de l'insulte, de l'orgueil, de l'envie. []L'observation de ces règles dispose les êtres humains à la paix et l'obéissance, et permet la vie en société29(*).

Dans le point suivant, nous allons développer cette notion de la loi, comme le dit Hobbes, comme prescriptions divines car, quoi qu'il en soit, c'est Dieu qui est l'auteur et de l'homme et de la raison d'où provient la loi. Nous scruterons les Saintes Ecritures pour en dégager la conception chrétienne actuelle de la loi30(*).

II. 2. 3. La Loi dans les Saintes Ecritures

II.2. 3. 1. Dans l'Ancien Testament

Parlant de la Loi, le Pape fait d'abord allusion au Décalogue. En effet, au mont Sinaï, Dieu a donné à Moïse deux tablettes contenant la Loi. La première tablette contenait la Loi qui règle l'agir humain par rapport à Dieu, et la seconde tablette contenait celle qui règle l'agir humain en société (cfr. Ex. 20, 2-11). L'encyclique veut, à travers ce passage biblique inviter les lecteurs à reconnaître que le monde vit déjà dans l'alliance avec Dieu et que son agir salvifique premier appelle notre réponse d'amour.

Et par rapport à cette réponse de l'homme, Waltraud Linnig écrit : « Notre réponse est celle que Dieu demandait en premier à Israël : `' la reconnaissance de Dieu comme unique et suprême Seigneur '' et un culte rendu à lui seul »31(*). Dieu veut que l'homme le cherche et le trouve.

Ainsi donc, la loi révélée dans l'Ancienne Alliance fait référence à la loi naturelle et exprime le lien entre Dieu et l'homme. Dieu a révélé cette loi pour aider humanité pécheresse à « atteindre une connaissance complète et certaine des exigences de la loi naturelle »32(*). Les commandements comme la loi naturelle indiquent en actes concrets le chemin de réalisation du don reçu de Dieu.

Pour le pape Jean Paul II, c'est la même lumière et la même loi de la nature humaine que Dieu redonne à son peuple par révélation. La loi révélée dans l'Ancien Testament exprime de manière privilégiée la loi naturelle, car Dieu l'a révélée à l'homme pour aider ce dernier à atteindre la connaissance complète de cette loi. De ce fait, « la loi révélée devient une donation nouvelle de la lumière de l'intelligence ; elle est accordée pour pallier l'incapacité de l'homme à se comprendre soi-même et pour lui donner de connaître et de faire le bien »33(*).

De ce fait, poursuit Jean Paul II, « la loi naturelle vient de Dieu et trouve en lui sa source : à cause de la raison naturelle qui découle de la sagesse divine, elle est en même temps la loi propre de l'homme. En effet, la loi naturelle n'est rien d'autre que la lumière de l'intelligence mise en nous par Dieu. Grâce à elle, nous savons ce que nous devons faire et ce que nous devons éviter. Cette lumière et cette loi, Dieu les a donnée par la création » (V.S. n° 40).

Ainsi donc, la liberté de l'homme, formée sur le modèle de celle de Dieu, n'est pas supprimée par l'obéissance à la loi divine, mais demeure dans la vérité et reste conforme à la dignité de l'homme.

II.2. 3. 2. La Loi dans le Nouveau Testament

Dans le Nouveau Testament, les évangiles n'insistent pas longuement sur la loi. Toutefois, quelques passages montrent comment Jésus se déclare tantôt comme celui qui est venu accomplir la loi (Mt 5,17) tantôt comme celui qui est venu l'abolir. Le Professeur S. Muyengo dit à ce propos : « On trouve dans l'Ecriture, particulièrement dans l'Evangile beaucoup d'exemples où Jésus-Christ peut être présenté comme modèle d'une démarche éthique dépassant le simple cadre de la loi ou le formalisme moral. Aussi sera-t-il accusé d'être venu troubler l'ordre en abolissant la loi »34(*).

Mais si nous regardons de près, la démarche de Jésus n'est pas celle d'abolir la loi. Son véritable souci est le dépassement de celle-ci. Partant de cette considération, le Professeur Muyengo distingue, par exemple, deux moments dans le récit biblique de la femme adultère (Cfr. Jn 8, 1-11). Le premier moment est caractérisé par la démarche des scribes et des pharisiens qui présentent la femme devant Jésus. Ceux-ci veulent appliquer scrupuleusement la loi de Moïse (Jn 8, 4-5). Le deuxième moment quant à lui est marqué par l'attitude de Jésus qui incite ses interlocuteurs à réfléchir sur cette loi qu'il ne conteste pas, mais qu'il cherche à transcender. C'est pourquoi il dira : « Que celui d'entre vous qui est sans péché, lui jette le premier la pierre (Jn 8, 7)»35(*). Ces paroles de Jésus amenèrent les accusateurs de la femme adultère à réfléchir, à faire une introspection. Ainsi donc, « c'est le moment d'intériorisation qui se veut le dépassement de la loi ancienne, de l'universel en faveur d'une situation concrète, particulière. L'évangéliste nous informe qu'en entendant la réponse de Jésus, les scribes et les pharisiens s'en allèrent un à un, à commencer par le plus vieux »36(*).

L'évangéliste Matthieu parle également de la loi ou des commandements. Ainsi nous trouvons en Mt 22, 36-40 la question relative au double commandement de l'amour. En effet, ces deux préceptes de l'amour, de Dieu et du prochain, énoncés par Jésus viennent résumer le Décalogue. Parlant de ce résumé fait par Jésus sur la loi de Moïse, S. Muyengo écrit : « C'est là que le Fils a voulu nous amener (c'est-à-dire à l'amour) en enseignant, en résumant les dix commandements en deux, sinon en un seul, sans enlever un iota à l'ensemble `'Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout coeur, de toute ton âme, de toute ta force...Tu aimeras ton prochain comme toi-même''. A vrai dire, tous les dix commandements donnés au peuple par l'intermédiaire de Moïse se retrouvent dans ces quelques paroles de Jésus »37(*). Il y a encore d'autres textes des évangiles qui parlent également de la loi. Nous nous limitons ici à ces deux textes précités car ils résument mieux l'enseignement de Jésus sur la question de la loi.

C'est dans la théologie paulinienne où nous remarquons que la notion de la loi occupe une place importante. Elle est en effet intimement liée à la doctrine de la rédemption et à tout le système dogmatique de l'apôtre ; elle est en quelque sorte à la base de toute son activité missionnaire parmi les païens. Au sens le plus général pour lui, la loi désigne toute puissance, toute force qui détermine l'homme, le domine (Rom. 7, 1) et imprime à sa volonté une direction particulière, réclame de lui obéissance (Rom. 7, 2) et la soumission absolue (Rom. 7, 25). Cette puissance normative, cette loi peut être ou intérieure (Rom. 7, 28) ou extérieure (Rom. 7, 2). Elle peut exercer une influence salutaire (Gai. 6, 2) ou malfaisante (Rom. 7, 23) ; l'homme peut s'y soumettre volontairement, joyeusement (Rom. 7, 22), ou bien en subir fatalement les effets pénible, tout en déployant les efforts les plus énergiques pour essayer d'y échapper (Rom. 7, 15. 23)38(*).

Dans l'Epître aux Galates par exemple, le mot `'loi'' n'a qu'une seule fois cette signification générale, celle qui désigne toute puissance, toute force qui détermine l'homme et le pousse à la compassion (Gal. 6, 2). Dans l'Epître aux Romains par contre (Rom. 7, 21. 23. 25; 8, 2; 9, 31), ce mot est pris fréquemment dans le sens de l'épître aux Galates et est suivi des additions les plus diverses. Dans tous ces passages et dans d'autres analogues, la loi peut être traduit par norme ou par puissance. Ces deux sens sont associés, parfois même ils se confondent. En effet, pour former ces expressions originales, ces liaisons de mots qui lui sont particulières, l'apôtre a évidemment songé à la loi mosaïque, qui non seulement prétendait être la seule norme valable pour les hommes, mais exerçait une puissance réelle sur ses adhérents. Cela explique pourquoi l'idée de puissance est souvent prédominante, surtout dans le septième chapitre de l'épître aux Romains.

En effet pour Saint Paul, les païens ont reçu une révélation de la volonté divine (Rom. 2, 14. 15) ; la voix intérieure de la conscience, qui est la voix de Dieu, leur dicte la conduite qu'ils doivent suivre, leur permet de distinguer le bien et le mal. Et, s'ils sont fidèles à cette loi naturelle, s'ils réalisent dans leur vie cet idéal qu'ils portent en eux, ils accomplissent spontanément le contenu essentiel de la loi mosaïque.

Mais à côté de cette loi naturelle commune à tous les hommes, il existe une norme écrite, expression parfaite de la volonté divine. Au peuple qu'il a élu, Dieu a indiqué de la manière la plus complète et la plus minutieuse comment il veut être vénéré. La loi donnée aux Israélites par Moïse, contient au fait la loi de Dieu, revêtue d'une autorité suprême, prétendant avoir une valeur unique, établissant les rapports de l'homme vis-à-vis de Dieu, et réglant tout l'ensemble de la vie humaine. Le Pape dit en effet : « l'homme reconnaît le rôle pédagogique de la Loi qui, en permettant à l'homme pécheur de prendre la mesure de son impuissance et en lui ôtant la prétention de l'autosuffisance, l'ouvre à la supplication et à l'accueil de la vie dans l'Esprit » (V.S. n° 23).

La loi écrite dans les coeurs n'est pas supérieure à la loi mosaïque écrite sur des tablettes de pierre, et c'est à tort qu'on l'a identifiée avec la loi chrétienne de l'esprit. La révélation faite aux païens est imparfaite, fragmentaire, tandis que Dieu a donné à Israël l'expression entière de sa volonté. Le caractère intérieur de la loi des païens, loin d'offrir une supériorité sur la loi mosaïque, est au contraire un désavantage ; la conscience morale peut en effet être altérée, la norme intérieure obscurcie par le péché, tandis que la norme extérieure est, par sa fixité même, à l'abri de toute variation et de toute altération. C'est un privilège pour le peuple juif d'avoir une loi écrite (Rom. 9, 4), de posséder les oracles de Dieu (Rom. 3, 2), et il est d'autant plus coupable si, malgré la lettre de la loi (Rom. 2, 27), il transgresse la volonté divine39(*).

Paul comprend que la Thora est légitime par le fait que la révélation de l'Ancien Testament est essentiellement légale, et annonce dans toutes ses parties la volonté de Dieu.

II. 3. LA NOTION DE LA VERITE

II. 3. 1. Définitions

Pour le Nouveau Petit Robert, la vérité est « ce à quoi l'esprit peut et doit donner son assentiment, par suite d'un rapport de conformité avec l'objet de pensée, d'une cohérence interne de la pensée, connaissance à laquelle on attribue la plus grande valeur »40(*).

Pour A. Lalande la vérité comporte plusieurs définitions. Ainsi donc, pour lui, elle est d'abord le « caractère de ce qui est vrai »41(*). Elle peut être aussi définie comme « ce qui a été effectivement éprouvé, fait ou constaté par un témoin qui le rapporte »42(*).

Et pour J. COTE, la vérité veut dire « enlever le voile qui cache quelque chose... et renvoie donc à un état de fait ou de choses qui, dans la mesure où il peut être vu, désigné ou exprimé, s'offre pleinement au regard, à la démonstration ou à l'explication »43(*).

Quant au C.E.C., « la vérité ou véracité est la vertu qui consiste à se montrer vrai en ses actes et à dire vrai en ses paroles, en se gardant de la duplicité, de la simulation et de l'hypocrisie »44(*).

II. 3. 2. Une vérité éthique et évangélique

La vérité parvient à l'homme comme une lumière que celui-ci doit accueillir par amour et obéissance, parce qu'elle vient de Dieu. Mais, cette obéissance n'est pas toujours accueillie chaleureusement à cause du péché qui rode aux alentours du coeur humain. Et ce péché, lorsqu'il persiste, il introduit petit à petit l'homme dans le mensonge, diminue sa quête et sa soumission à la vérité, et surtout l'entraîne dans une liberté illusoire en dehors de la vérité. Et pourtant, comme le dit J. Desclos, « la soif de la vérité demeure toujours en lui et se traduit dans les questions éthiques. La réponse vraie vient de la splendeur du Christ Vérité »45(*).

C'est ainsi que l'Eglise, se sentant investie de la mission de guider les hommes vers la Vérité toute entière, c'est-à-dire le Christ, propose à ces derniers la réponse qui vient du Christ même et de son Evangile. Et fidèle à sa mission, l'Eglise s'adresse à l'humanité entière sur toutes les questions morales qui touchent toute personne humaine. Car, en effet, aujourd'hui plus qu'hier, les hommes s'accordent en général pour reconnaître que notre époque, que nous avons coutume d'appeler l'époque postmoderne, se distingue des époques précédentes par le fait que nombre de nos certitudes se sont écroulées.

En effet, les grandes révolutions technologiques des avions, le développement de l'industrie, l'Internet, la découverte de nouveaux continents, d'autres façons de vivre, de croire, de penser, l'émergence de l'imprimerie et de nouveaux modes de communication, tous ces changements sont venus bouleverser notre conception traditionnelle du monde. Du coup, les anciens schémas de pensée, l'ancienne façon d'organiser les rapports sociaux, de croire en Dieu, tout cela ne fonctionne plus de manière évidente46(*). Nous sommes dès lors conduits à modifier notre ancienne vision du monde et à repenser les rapports entre la religion, l'économie, la politique, l'éthique, etc. Alors que par le passé ces différents domaines formaient entre eux un ensemble relativement cohérent. Et l'Eglise, face à tous ces bouleversements, se sent dans l'obligation de présenter l'ensemble de l'enseignement moral de l'Eglise pour rappeler certaines vérités fondamentales.

Au fait, le monde tel que nous le connaissons aujourd'hui nous apparaît comme fragmenté. Il se compose d'une multitude de systèmes différents (le système économique, le système religieux, le système juridique, le système politique, etc.) qui fonctionnent chacun selon sa logique propre. Chaque domaine de la vie a ses propres règles, sa propre cohérence, ses propres critères d'organisation, bref sa propre vérité. La Vérité (Dieu - le Christ), autour de laquelle s'organisait les différents domaines de la vie et qui donnait une certaine cohérence à la vision du monde, n'est plus considérée que comme une invention de l'intelligence humaine. Et nous avons désormais à faire à une pluralité de vérités partielles (la vérité économique, la vérité éthique, la vérité religieuse, etc.).

Ce phénomène de fragmentation de la Vérité se poursuit et s'accentue de nos jours au point que chaque système tend à se subdiviser à son tour. Ainsi, le domaine de l'éthique se morcelle en une multitude de vérités éthiques. Chaque culture, chaque groupe social, chaque personne même possède sa vérité éthique. Il n'y a plus un seul comportement juste face à la question de l'avortement, de l'euthanasie par exemple.

Mais, comme tout le monde ou toutes les disciplines sont à la recherche de la vérité, l'Eglise propose à l'humanité une vérité éthique et évangélique, qui est au fait une éthique de la vie, de la croissance, du bien. L'Eglise, étant convaincue que Dieu est la fin ultime de l'homme, veut que ce dernier agisse pour que chacune de ses propres actions soit le reflet de la splendeur de Dieu. Ainsi, « l'homme qui reconnaît l'absolu de la transcendance parvient, par la foi ainsi rendue possible, à s'identifier au transcendant en recevant son amour »47(*).

II. 3. 3. La Vérité de Dieu construit la liberté de l'homme : Le rapport entre vérité et liberté

Le point précédant vient de montrer comment l'homme s'enfonce petit à petit comme dans un trou infernal, suite à sa quête d'une vérité propre à lui, excluant toute lumière venant de Dieu ou de l'Evangile. Ceci entraîne comme conséquence la mauvaise conception de la liberté, qu'il appelle ailleurs lui-même autonomie. Il confond ainsi liberté et libertinage, l'avons-nous déjà dit. Partant de cela, L'Eglise toujours dans sa délicate mission, propose à l'homme de se référer à la vérité qui vient de Dieu, par la grâce, car lui-même est la Vérité.

En effet, la liberté est au centre de la morale, qui d'ailleurs ne peut pas subsister sans elle. C'est en elle qu'elle rencontre la vérité, pour enfin évoluer à ses cotés. J. Desclos dit en effet, « la vraie liberté, proposée par le Concile, est un signe privilégié de l'image divine. L'obligation de chercher la vérité et d'y adhérer précède le droit à être respecté dans son itinéraire de recherche de la vérité. La liberté est précédée par la vérité. Il faut donc examiner les tendances nouvelles à la lumière de la dépendance fondamentale de la liberté par rapport à la vérité. Le pouvoir de décider du bien ou du mal n'appartient pas à l'homme, mais à Dieu seul. La liberté de l'homme n'est pas illimitée, et elle doit accepter la loi donnée par Dieu »48(*).

Tout compte fait, la liberté de l'homme demeure le reflet de Dieu. Par elle, il participe à la seigneurie divine. Ainsi, l'homme doit chercher à construire sa perfection en se référant à Dieu, car sans Dieu, il n'a pas de résistance. La raison qu'il a, doit puiser dans la vérité et sous l'autorité de Dieu. Il doit donc éviter l'autonomie de la raison qui se veut créatrice des valeurs et de ses propres normes morales et surtout qui mettent la liberté même en péril49(*). C'est au fait en cela que réside le rapport entre vérité et liberté.

II. 3. 4. Une Vérité qui libère

D'entrée de jeu, nous pouvons nous poser une simple question : la vérité peut-elle être libératrice ? Si la vérité est libératrice, elle l'est forcément de quelque chose. Si elle ne l'est pas, alors nous n'avons à nous libérer de rien. Il nous faut chercher de quoi pourrait bien nous libérer la vérité, et à quoi pourrait elle nous nuire également, ce qui serait le contraire, il faut le reconnaître, de la libération. De quoi pourrions nous nous libérer? De nos illusions ? De nos croyances ? De nos manières de penser ? Etc.

Déjà dans la morale naturelle cette question se pose. Pour elle, la liberté s'acquiert dans la pensée, qui le conduit à la vérité en passant par le doute. La "libre- pensée" ne se soucie donc que de l'évidence du vrai. La vérité pour elle libère du doute, de la mauvaise conscience. Elle peut être aussi libératrice pour l'humanité. L'homme dans son intégralité psychologique ne peut en effet construire sa liberté tout en construisant continuellement et impunément ses mensonges défiant la morale commune à l'humanité. La vérité est nécessaire dans les rapports que l'homme entretient avec autrui, comme avec lui-même.

Et dans la morale chrétienne, particulièrement dans l'Encyclique Veritatis Splendor du Pape Jean Paul II, la vérité est libératrice de l'homme. En effet, la vérité inspire la liberté, elle est sa source. Jean DESCLOS affirme à ces propos : « La vérité conditionne la liberté. En fait, l'homme ne peut conserver son action comme bon et désirable que dans la mesure où il est capable de les appréhender à la lumière de la vérité, en prenant ainsi une attitude indépendante à leur égard »50(*). L'être humain, étant un être de raison, a un besoin naturel de connaître la vérité et de l'appliquer, car elle est le noyau de la morale même. « Or, continu DESCLOS, le sentiment détourne notre regard de la vérité... il le détourne des éléments objectifs de l'activité, de l'objet d'action et de l'acte même, et il le dirige vers les éléments subjectifs, vers ce qui est vécu par nous »51(*).

La redécouvert de cette vérité devient alors un impératif pour l'homme d'aujourd'hui, d'autant plus qu'elle est la Vérité. Et l'Eglise aide l'homme à la retrouver en elle car, le Christ, qui est la vraie Vérité demeure en elle et par elle. De ce fait, « le lien entre Eglise et Vérité devient constitutif : la présence en elle de la Vérité constitue la solidité de l'Eglise et celle-ci devient signe visible de cette Vérité »52(*).

Ainsi donc, l'homme, pour avancer dans son épanouissement, a besoin de connaître la vérité qui vient de Dieu pour avancer dans sa quête de la liberté authentique. Reconnaître cette vérité, c'est accepter d'intérioriser la loi, afin de vivre une véritable liberté.

II. 4. CONCLUSION DU CHAPITRE

Le présent chapitre a comporté trois sections essentielles : la première analyse la notion de la liberté. En effet, la vraie liberté, qui élève en l'homme, est un signe privilégié de l'image divine (V.S., n° 38). Mais, en ces temps qui sont les nôtres, l'homme ne veut plus mettre Dieu au centre la liberté, mieux de sa liberté. Il l'exclut. Le pape dit à ce propos : « Au point de départ de ces conceptions (d'exclusion de Dieu), on note l'influence plus ou moins masquée de courants de pensée qui en viennent à séparer liberté humaine de sa relation nécessaire et constitutive à la vérité » (V.S. n° 4).C'est dans ce cadre que nous nous sommes proposés, à travers ces lignes, de montrer à l'homme d'aujourd'hui là ou se trouve la véritable liberté. Et l'encyclique Veritatis Splendor nous a été d'un grand apport.

La deuxième section du chapitre a analysé, quant à elle, la notion de la Loi. Comme nous le disions dans le paragraphe précédant, l'homme actuel a délogé Dieu dans sa vie. Il ne veut plus entendre parler ni de lui-même (Dieu) ni de sa Loi. Il veut vivre libre. Et pourtant, comme on le sait, n'est libre que celui qui accepte la Loi de Dieu ainsi que d'autres obligations morales.

Quant à la dernière section parle de la notion de la vérité. En effet, la vérité est cette lumière qui vient aider l'homme à accepter la Loi divine. En fait, c'est cette acceptation de la Loi dans le coeur qui rend véritablement l'homme libre. Ainsi donc, cette notion vient mettre un lien entre les deux présentes et les rend complémentaires. Ce chapitre constitue donc le point central de notre travail.

CHAPITRE TROISIEME

LA MORALE CHRETIENNE A LA LUMIERE DE L'ENCYCLIQUE VERITATIS SPLENDOR POUR UN AVENIR MEILLEUR DE LA RDC

III.0. INTRODUCTION

Le troisième chapitre de notre travail se veut une approche de la morale en générale, éclairée par l'Encyclique Veritatis Splendor. Cette tâche a pour but de relever les éléments qui pourront être nécessaire pour un avenir meilleur en Afrique en général, et en République démocratique du Congo en particulier.

Ainsi, cette démarche aura deux grandes sections. La première traitera de la nécessité de la morale dans la vie humaine car, au fait, sans elle, le monde serait une jungle. La deuxième s'efforcera de dégager ce qui peut aider les congolais à retrouver un avenir meilleur. Et enfin, une brève conclusion mettra fin à l'ensemble du chapitre.

III. 1. LA MORALE AUJOURD'HUI : UNE NECESSITE

III.1.1. Quelle morale pour aujourd'hui ?

Comme nous l'avons déjà signalé dans le chapitre précédant, la manière de vivre de l'homme actuel diffère dans bien de manière de celle d'il y a cent ans. Nos ancêtres par exemple vivaient autrement que nous. Cela est certain quand on regarde les mutations rapides survenues depuis environ un siècle dans tous les domaines de la vie. Cette réalité se vérifie dans toutes sortes de domaines, y compris par la présence de l'ordinateur dans la vie quotidienne de l'homme moderne, l'avion qui facilite ses déplacements, le téléphone, surtout le portable, appelé couramment le cellulaire, qui facilite aussi sa communication avec le monde extérieur, etc. La vie devient ainsi remplie de toutes sortes d'inventions, de changements et de bonnes surprises.

Il s'avère tout de même que tous ces changements ont aussi bouleversé le fonctionnement normal et intérieur de l'homme d'aujourd'hui. Il ne raisonne plus comme autrefois où la solidarité et l'entraide étaient de règle. Il croit que tout devient possible pour lui. Il a une confiance totale en son propre pouvoir et utilise ce pouvoir pour écraser ceux qui ne suivent pas le mouvement très rapide du changement. C'est le cas ici des pays riches qui oppressent les habitants des pays en voie de développement. Et même dans ces pays dits en voie de développement, ceux qui ont le pouvoir écrasent le reste du peuple, ceux qui ont encore un peu de moyen dominent sur les autres. Les plus favorisés tirent la couverture de leur côté, et discréditent les plus pauvres qui ne peuvent suivre le mouvement de l'évolution technoscientifique. Ainsi donc des questions se posent : quelle morale peut-on proposer à l'homme d'aujourd'hui ? Que peut apporter un moraliste à celui qui exploite son semblable ? Que peut-il dire également à celui qui est assujetti ? Voilà la lourde tâche à laquelle la morale actuelle doit faire face.

En effet, la morale concerne les rapports entre les humains, elle vise à rendre leurs relations porteuses de libération, d'autonomie, de sécurité, de respect mutuel. « La morale est de ce fait au coeur des existences humaines qui s'entrecroisent »53(*) et devient par là une sorte de mise en question permanente de ce que l'homme d'aujourd'hui considère comme sécurité intérieure. Il doit se demander : ai-je aujourd'hui fait tout le bien que je pouvais faire? Ai-je donné le meilleur de moi-même? Ai-je accepté de sacrifier ma vie, mon temps, mon argent, mes loisirs, pour aider les autres à être plus heureux? Voila les questions que le moraliste doit proposer à l'exploitant. Et même celui qui se considère pauvre, il doit se poser les mêmes questions, et d'ailleurs il doit se poser davantage, qui pourraient l'aider à sortir de son état déplorable.

Le Pape Jean Paul II, ayant compris les enjeux du problème qu'apporte cette nouvelle technologie c'est-à-dire la fabrication des avions, des ordinateurs, la présence de l'internet, etc., fait retentir la sonnette d'alarme, à travers l'Encyclique Veritatis Splendor, afin que l'humanité ne se laisse pas corrompre par la facilité, les nouvelles idéologies ainsi que les nouvelles conceptions de la vie. Jean Desclos dit à juste titre que « Jean Paul II redit souvent que le progrès éthique ne va pas toujours de pair avec le progrès technoscientifique. Ce leitmotiv de son enseignement suggère que l'éthique a un rôle de premier plan à jouer dans notre civilisation. Plus que jamais, notre monde a besoin d'éthique »54(*). Et le Pape lui-même, dénonçant ces contre-valeurs, s'adresse aux cardinaux et à la curie romaine en ces termes : « N'est-ce pas là, malheureusement, le triste spectacle offert par la diffusion dans le monde des déviations morales en tout genre... ? »55(*).

A cause de ces déviations Jean Paul II dénonce le fait que notre monde soit devenu de nos jours insensible à l'éthique car elle a en son sein les devoirs essentiels, les principes les plus évidents à respecter en société: l'honnêteté, le travail bien fait, la compétence, la responsabilité, la justice, etc. Ce monde veut que chacun ait sa propre règle de conduite, et pourtant « la morale est une référence pour que les personnes puissent vivre dans la société à travers des attitudes de jugements critiques, en se rendant plus humaine devant la vie quotidienne »56(*).

Tout compte fait, la morale permet la coexistence sociale. Inévitablement sans elle, les tendances conflictuelles de l'homme vivant en société, c'est-à-dire son agressivité, son égoïsme, sa convoitise sexuelle ou de bien d'autrui, etc., se manifesteraient en permanence. La vie en commun serait impossible. La morale peut donc être perçue comme l'un des moyens de pression mis en oeuvre par la société pour tenter de retenir, de contrôler les tendances égocentriques de l'homme. L'éducation, les lois, la peur de la police par exemple, la justice humaine, les sanctions en cas d'infraction sont là pour rendre la vie équilibrée. C'est au fait ce type de morale que le moraliste doit proposer à la société aujourd'hui.

Mais pour l'Eglise, se limiter à une morale naturelle uniquement présente aussi certaines limites. En effet, « l'Eglise sait que la question morale rejoint en profondeur tout homme, implique tous les hommes, même ceux qui ne connaissent ni le Christ et son Evangile, ni même Dieu. Elle sait que précisément sur le chemin de la vie morale la voie au salut est ouverte à tous » (V.S. n° 3), mais il faudrait que la dite morale soit imprégnée de la lumière du Christ. D'où l'importance d'une morale chrétienne.

III.1.2. La morale chrétienne comme réponse à la préoccupation humaine

La morale chrétienne, en ce qu'elle a de spécifique, consiste à suivre Jésus, afin de l'imiter en toutes choses, car lui seul est « le Chemin, la Vérité et la Vie » (Jn 14, 6) tout en se basant des principes moraux naturels. La morale chrétienne, au sens traditionnel du terme, reconnaît l'infini du désir humain et le convertit en désir d'infini. Ce désir d'infini se mesure à un être infini : Dieu. L'horizon de la vie chrétienne est de réaliser sa vie de manière à être à l'image de Dieu.

Il nous faut toutefois comprendre, dès le début que cette morale n'est pas tombée du ciel, ou de Dieu. Elle est une normalisation, fruit de l'imagination de l'homme. Th. Rey-Mermet dit à ces propos :

« C'est donc une idée fausse que d'imager la morale tombant d'en haut, des dieux ou de Dieu. La régulation morale éclate de l'homme ; elle est affinée et unifiée par lui, avec l'aide et la provocation du milieu culturel dans lequel il naît et grandit. C'est l'homme qui produit ses normes à partir de deux stimulateurs et régulateurs : d'une part, son expérience du monde et la vie ; d'autre part, un idéal qui, en lui, l'appelle et le tire vers le haut, vers le bonheur pour soi et pour tous »57(*).

C'est lorsque cet homme est tiré vers le haut qu'il rencontre les valeurs que le christianisme prône. Etant aussi à la quête du bonheur ou du mieux vivre, il insère ces valeurs chrétiennes dans cette régulation ou dans cette morale. Et pour un homme de foi, il accepte si facilement ces valeurs parce qu'il sait dans son coeur que l'humanité a été créée à l'image et à la ressemblance de Dieu, dont le Christ a été son expression la plus parfaite ici sur terre. Ainsi, la morale chrétienne, s'il faut reprendre les termes de Rey-Mermet, « est donc une morale pour tout le monde. Et inversement, toute morale digne de ce nom est, plus ou moins, la morale chrétienne, quoi qu'il en soit de sa foi au Christ »58(*).

Il faudrait toutefois signaler qu'on a souvent tendance à assimiler ou à réduire tout le christianisme à une morale. Au fait, le christianisme n'est pas une morale, mais il existe une morale chrétienne, morale qui se base sur les principes chrétiens, l'avons-nous déjà dit. Jean - François Collange partage aussi la même idée que nous. Il écrit à ces propos :

« On a longtemps assimilé ou réduit le christianisme à une morale. Etre chrétien, dans cette perspective, consistait à faire ou à ne pas faire tel acte considéré en soi comme `'bien'' ou `'mal''. La morale chrétienne avait alors pour fonction non seulement d'établir les critères du bien et du mal, mais encore de dresser des listes d'actes réputés bons ou mauvais et de juger. D'où le reproche, souvent adressé au christianisme, d'être moralisateur, desséchant, voire aliénant »59(*). Et pourtant, cela n'est pas la tâche du christianisme.

Etant une morale pour tout le monde et devant refléter certaines valeurs, la morale chrétienne propose à l'homme d'aujourd'hui certaines vertus ainsi que certains principes, pour que l'humanité vive dans l'harmonie. Il s'agit par exemple de la Foi, de l'espérance et de l'amour, ou encore des principes comme la liberté chrétienne, la notion de la vérité, la conscience morale, le pardon, etc. Nous parlerons brièvement ici de ces trois vertus théologales, tandis que les notions de la liberté, de la vérité, etc., nous nous contenterons de ce que nous avons déjà développé dans le chapitre précédant.

En effet, la Foi, l'Espérance et la charité (amour) sont dites vertus théologales. Elles demeurent en l'homme par le biais de la grâce sanctifiante. Elles sont infuses, c'est-à-dire non acquises. A en croire le Professeur Muyengo, « les vertus théologales adaptent les facultés de l'homme à la participation de la nature divine. Elles disposent les chrétiens à vivre en relation avec la Trinité. Elles ont ainsi Dieu Un et Trine pour origine, motif et objet »60(*). Ainsi donc, on ne peut pas parler des vertus théologales sans faire référence à Dieu.

a. La vertu de la Foi

Par la Foi, l'Eglise comprend une vertu par laquelle l'homme croit en Dieu et se soumet librement à sa parole61(*). Par elle, l'homme s'ouvre totalement à Dieu. J. F. Collange dit à ces propos : « La Foi naît toujours d'une rencontre et y conduit. Croire en quelqu'un, c'est le rencontrer, s'en remettre à lui et lui faire confiance. La foi se distingue ainsi de la croyance ou de la superstition en ce qu'elle ne s'attache pas d'abord à un objet, un dogme ou une doctrine, mais à une personne avec laquelle elle met en relation »62(*). Celle-ci, c'est-à-dire la Foi, devient une catégorie morale lorsque l'homme de foi, après s'être ouvert à Dieu, fait un effort pour connaître et accomplir la volonté de Dieu.

b. La vertu de l'Espérance

Par l'Espérance, nous sous-entendons cette vertu théologale par laquelle l'homme considère le royaume des cieux et la vie éternelle comme bonheur, tout en mettant sa confiance dans les promesses du Christ. C'est elle, au fait, qui doit porter la Foi63(*). En effet, l'Espérance répond à l'aspiration de l'homme sur le bonheur placé par l'Etre Suprême dans son propre coeur (celui de l'homme). Elle a pour rôle d'assumer les espoirs qui inspirent les activités de l'homme ; de les purifier pour les ordonner au royaume des cieux ; de les soutenir en tout délaissement ; de dilater le coeur dans l'attente de la béatitude éternelle. Tout compte fait, l'Espérance préserve l'homme de l'égoïsme et le conduit au bonheur de la charité64(*).

c. La vertu de la Charité

La Charité est cette vertu par laquelle Dieu aime avant tout l'homme. Ensuite, cet homme aime aussi Dieu par-dessus tout, et son prochain comme lui-même. L'évangéliste Jean montre que le fait d'aimer Dieu pour lui-même est le sommet même de la foi et de l'espérance chrétienne (Jn 3, 39). Cet amour pour Dieu est créateur, c'est-à-dire ici il réunit ce qui est séparé. Matthieu exprime cette idée lorsqu'il développe la théorie du commandement de l'amour de l'ennemi. Cette théorie s'appuie sur la réalité de l'unicité du Dieu créateur, balayant tout sectarisme et tout particularisme humain (Mt 5, 44-45). Ce passage biblique introduit ici la deuxième partie de cette loi de l'amour : l'amour pour l'homme. Au fait, Jn 3, 39 ne se limite pas uniquement à l'amour envers Dieu, mais il continu sur le plan de la relation entre les humains. L'homme doit aimer son prochain comme lui-même. Ce commandement est une nouveauté de la morale chrétienne car, aimer l'autre comme soi-même, n'est possible que lorsqu'on est en Dieu. C'est argument fragilise d'ailleurs la philanthropie, c'est-à-dire un amour de l'homme pour l'homme sans faire intervenir là-dedans Dieu, parce qu'il est difficile pour tout humain d'aimer son prochain comme lui-même si l'on n'est pas encré en Dieu65(*).

Tout compte fait, cette esquisse sur les vertus théologales montre à suffisance la spécificité et la profondeur de la morale chrétienne par rapport à la morale naturelle car la morale chrétienne transpose les catégories de la vie morale et les élève sur l'échelle de la vie spirituelle. D'autres vertus et principes chrétiens contribuent aussi à affirmer cette primauté de la morale chrétienne, mais dans ce présent travail nous nous sommes limités uniquement aux vertus théologales.

III.1. 3. La recherche de la perfection dans la morale chrétienne

Le Pape Jean Paul II, dans son Encyclique Veritatis Splendor, commente le thème de la perfection chrétienne. Il part de l'affirmation « Si tu veux être parfait... », de l'évangile selon saint Matthieu (Mt 19, 21), réponse que Jésus donne au jeune homme riche.

En effet, le jeune homme riche a observé toute la loi de Moïse, et pourtant il sent que quelque chose lui manque. Raison pour laquelle il demande à Jésus, toujours au même verset, « que me manque-t-il encore ? ». A ces propos Jean Paul II dit en effet :

« Il n'est pas facile de dire avec bonne conscience `'tout cela, je l'ai observé', si l'on comprend à peine la portée effective des exigences contenues dans la Loi de Dieu. Cependant, s'il lui est possible de donner une réponse semblable, s'il a aussi suivi l'idéal moral avec sérieux et avec générosité depuis son enfance, le jeune homme riche sait qu'il est encore loin du but ; face à la personne de Jésus, il saisit que quelque chose lui manque encore » (V.S., n° 16).

Au fait, c'est dans ce contexte que Jésus propose au jeune homme riche d'entrer dans la voie de la perfection. Cette perfection se traduit à travers certaines réalités comme la promotion de la pauvreté évangélique et la recherche de la béatitude, etc. Nous allons donner, de manière succincte, le résumé de ces notions dans les lignes qui suivent.

a. La pauvreté évangélique

Au fait, la pauvreté évangélique est une pauvreté prophétique qui emmène l'homme à vivre dans les perspectives du (vers le) royaume de Dieu. Celle-ci se fonde sur la pauvreté même de Jésus. Comme conseil évangélique, elle a deux caractéristiques : d'abord elle fait allusion à Jésus qui assume l'attitude vétérotestamentaire de Dieu vis-à-vis des pauvres ; ensuite l'attitude où Jésus dépasse et complète cette première exigence en devenant lui-même pauvre. Ces deux caractéristiques de la pauvreté montrent que Dieu prend soin des pauvres, c'est pourquoi il s'est lui-même identifié aux pauvres.

Et l'Eglise de sa part, vit cette pauvreté comme un vrai témoignage du royaume des cieux où elle doit accorder une priorité à l'évangélisation des pauvres. Celle-ci emmène l'homme vers la perfection en ce sens que ce dernier, à partir d'elle, peut se dépasser et parvenir au stade où il ne s'occupe plus uniquement que de lui mais surtout de l'autre. L'instrumentum laboris de l'Assemblée générale ordinaire du Synode des Evêques de 1994 dit en effet, sur cette question : « Vivre dans la pauvreté signifie positivement : se sentir saisi et possédé par le désir de Dieu et se dépenser totalement pour que son Règne arrive, surtout parmi ceux qui l'attendent le plus et en sont les premiers destinataires »66(*). Voilà en quoi la pauvreté évangélique est un chemin vers la perfection.

b. Les béatitudes

Pour comprendre la portée essentielle des béatitudes dans la morale, nous devons recourir une fois de plus Veritatis Splendor. Mais toutefois, analysons d'abord ce que dit le Catéchisme. En effet, les béatitudes « sont au coeur de la prédication de Jésus. Leur annonce reprend les promesses faites au peuple élu depuis Abraham. Elle les accomplit en les ordonnant non plus à la seule jouissance d'une terre, mais au Royaume des cieux »67(*). Il est donc inconcevable, d'après le Catéchisme de l'Eglise, de parler des béatitudes sans faire référence à Jésus ni à la question du Royaume des cieux.

Référons-nous actuellement à Veritatis Splendor. Le Pape montre que les béatitudes font partie de l'espace offert par la réponse que Jésus donne à la question du jeune riche en Mt 19. En effet, l'encyclique se réfère aux béatitudes du Discours de Jésus sur la montagne. Jésus en invitant le jeune homme à tout vendre rappelle la première béatitude, celle des pauvres (Mt 5, 3), béatitude que le Pape Jean Paul II qualifie de celle des humbles. Au fait, Matthieu s'appuie sur une expression hébraïque qui signifie les humbles d'esprit. C'est pourquoi on découvrira que Dieu est toujours avec ces pauvres d'esprit. Il leur donne d'ailleurs des occasions de se réjouir, Il les conduit, les sauve, etc.

Les béatitudes en général évoquent des attitudes et des dispositions fondamentales de l'existence humaine. « Dans leur profondeur originelle, écrit Jean Paul II, elles sont une sorte d'autoportrait du Christ et, précisément pour cela, elles sont des invitations à le suivre et à vivre en communion avec lui » (V.S., n° 16). Voilà en quoi elles sont une voie de la perfection, car elles invitent l'homme à refléter l'image du Christ, mieux à devenir un alter Christus.

Tout compte fait, la morale est et demeure la lampe qui éclaire l'homme dans ses relations avec autrui, voire de sa relation avec la nature. En effet, sans la morale, le monde serait pire que ce qu'il est aujourd'hui. Chaque personne ferait ce qui lui plait. Chacun agirait de la manière dont il l'entend. Grâce à elle, chaque être humain a une certaine conscience du bien et du mal, de la médiocrité et de la perfection. Nous avons préféré, dans cette première section de ce chapitre, parler d'elle en général, bien qu'après avoir déjà parlé de certains de ses aspects dans le chapitre qui précède. Dans la deuxième section, nous verrons dans quelle mesure du possible cette morale peut aider l'homme congolais dans sa recherche d'un avenir meilleur.

III. 2. UNE MORALE CHRETIENNE POUR LE RAYONNEMENT DE

LA R.D CONGO

III. 2. 1. Situation actuelle de la RDC

Depuis son accession à l'indépendance, le 30 juin 1960, la République Démocratique du Congo, comme bon nombre des pays africains, traverse un temps de crises interminables. Déjà au lendemain de cette accession à l'indépendance, des guerres se sont succédées, des révoltes étaient monnaie courante, les sécessions et autres troubles du genre étaient au rendez-vous. Ainsi, par exemple « dès juillet 1960, la province du Katanga... entra en sécession. Dans le Sud Kasaï également, on assista à des tentatives séparatistes..., le 14 septembre, le lieutenant général J-D. Mobutu réussit un coup d'Etat »68(*).

Cette situation si précaire continua jusqu'au moment de la démocratisation du pays. Le chaos dans lequel avait sombré le pays emmena la population à des soulèvements et des contestations par-ci par-là. C'est le cas des pillages que connut le pays après le discours sur la démocratisation, le 24 octobre 1991.

Toutefois, peu avant les pillages, suite à la réorientation de politique d'aide au développement, des pays occidentaux, désormais soucieuses de promouvoir la bonne gouvernance et le respect des droits humains, le rôle de Mobutu, alors président du Zaïre, comme bastion des puissances occidentales contre le communisme n'avait plus de sens et sa politique faisait de lui un allié gênant face à l'opinion publique. Conscient de cela, Mobutu lança le 14 janvier 1990 le projet d'un grand débat national auquel le peuple devait pendre part pour exprimer son opinion sur le progrès du pays. C'est fut le début de la Conférence National Souveraine (CNS). Le but de la CNS était que les citoyens du Zaïre se mettent ensemble afin de discuter ou analyser la situation du pays, et qu'ensemble ils trouvent les solutions aux maux qui rongeaient le pays. Les conclusions de cette conférence n'apportèrent rien aux conditions de vie de la population. C'est pourquoi les soulèvements continuèrent.

En 1996, débuta une autre rébellion à l'Est du pays. Celle-ci renversa le long régime dictatorial du Maréchal Mobutu. Les successeurs de ce dernier, bien qu'ayant la volonté de changer les choses, n'ont pas encore mené à bon port le pays vers cette finalité. Et pour cause ? Le long moment de crise qu'a traversé le peuple congolais est resté marquer dans la tête de cette population. Ainsi, on remarquera par exemple le manque de conscience, l'individualisme, la corruption, le détournement des fonds, etc., conséquences de cette période là, qui continuent à battre son record aujourd'hui.

Aujourd'hui, ceux qui dirigent les affaires publiques s'occupent moins de la population. Cette situation a provoqué même la grogne sociale. Celle-ci est caractérisée par des revendications sociales de plus en plus nombreuses : des arrêts de travail débouchant sur des grèves qui paralysent plusieurs secteurs de la vie nationale, en particulier l'enseignement et la santé. Même si jusqu'à présent, la grogne ne concerne que le secteur public, il n'est pas exclu que la situation affecte le secteur privé, déjà touché par des perturbations émaillées du non respect des dispositions légales en matière de législation sociale. La question que tout le monde se pose de nos jours est : comment les familles congolaises se débrouillent-elles pour se nourrir ? L'informel est devenu depuis plus de 15 ans l'unique moyen de survie des Congolais. Chaque famille, en majorité les femmes, les mères de familles, se « débrouillent ». La vente de pains, des légumes, des fruits, bref le petit commerce fait vivre des millions de familles en R.D.C.

Le mutisme du gouvernement traduit sans doute la difficulté qu'il rencontre à élaborer une politique salariale réaliste susceptible de permettre au travailleur de satisfaire ses besoins élémentaires. C'est dans cette situation précaire que les congolais vivent. Partant de ces faits, quelle morale peut-on proposer à une telle population ? Que peut faire le moraliste dans une telle situation ?

Voilà les questions que nous essayerons de répondre dans la suite de cette deuxième section. Ainsi, nous traiterons des questions relatives à la conscience droite et à l'amour de la patrie.

III. 2. 2. Une conscience morale droite

La conscience morale est une voix qui parle en nous et qui nous permet, en notre for intérieur, de distinguer le bien du mal, d'en fournir des normes, de mesurer la valeur des actions, de juger de notre conduite et de celle des autres. Elle peut être considérée comme un juge qui ne peut être trompé par les préjugés et qui demeure le même, inflexible, quelles que soient les vicissitudes de la vie69(*). C'est un juge auquel on peut donc toujours se remettre avec assurance. André Lalande la qualifie d'une « propriété qu'a l'esprit humain de porter des jugements normatifs spontanés et immédiats sur la valeur morale de certains actes individuels déterminés. Quand cette conscience s'applique à des actes futurs de l'agent, elle revêt la forme d'une voix qui commande ou défend »70(*).

Elle est au fait cette voix qui ne cesse de presser l'homme d'aimer et d'accomplir le bien et d'éviter le mal. Veritatis Splendor la considère comme étant quelque chose qui « donne le témoignage de la droiture et de la malice de l'homme à l'homme lui-même, mais en même temps avant tout, qu'elle est le témoignage de Dieu lui-même, dont la voix et le jugement pénètrent l'intime de l'homme jusqu'aux racines de son âme... »71(*).

En effet, le rôle de la conscience morale dans l'homme est qu'elle apprend peu à peu ce dernier à réfréner ses pulsions, s'humanisant ainsi de mieux en mieux. L'ensemble de cette humanisation progressive dirige l'humanité dans le sens de sa perfection. Pour la majorité des hommes, chacune de nos actions importantes s'accompagne d'un sentiment de bonne ou de mauvaise conscience. Grâce à elle, tout être humain correctement éduqué et qui a une sensibilité normalement épanouie, ressent de la plénitude et une forme de bonheur après avoir accompli une action généreuse envers autrui.

Généralement, lorsque la conscience morale offre du plaisir pour récompenser nos actes généreux, nos actes d'amour, et de la souffrance pour nos actes violants, nous pouvons alors en déduire son objectif : celui de diriger l'humanité vers l'amour. Elle ne se détermine pas en fonction de ce qui est, mais en fonction de ce qui doit être et dès lors elle implique dans l'existence de tout homme un certain nombre de devoirs.

Mais il se fait qu'en République Démocratique du Congo, suite aux périples crises, la population de ce pays s'en moque de la notion de la conscience morale. C'est ainsi qu'on peut facilement trouver des cas d'escroquerie, voire entre les membres d'une même famille, le vol, le détournement des deniers publiques, la mégestion, l'impolitesse, ainsi que d'autres vices qui prouvent que les congolais s'en passent de la dite notion de la conscience.

Analysant la situation socio-économique de la R.D.C., S. Muyengo remarque que ce n'est pas uniquement les riches qui exploitent les pauvres, même les pauvres entre eux s'exploitent mutuellement. Il parvient donc à cette conclusion : « La crise socio-économique que nous vivons plonge de plus en plus la société dans un système d'exploitation des pauvres par les pauvres. Il ne peut être autrement là où la paupérisation bat le plein et l'administration est minée par la corruption. Tout le monde vend à tout le monde. Tout le monde profite de tout le monde »72(*). Il continue en disant : « Dans la situation de crise, l'erreur est toujours de chercher à s'en sortir seul en laissant les autres sur les carreaux »73(*), et propose à l'Eglise locale, quant à la question de la prise en charge, d'aider les pauvres à se prendre en charge. Il affirme : « Pour être plus efficace, réaliste et par surcroît évangélique, il faut que l'Eglise se construise d'en bas, en aidant les pauvres à se prendre en charge pour qu'ils soient en mesure de prendre en charge leur Eglise »74(*). Ce conseil vaut pour l'Eglise et pour l'Etat.

De ce fait, la première solution que nous pouvons offrir aux congolais d'aujourd'hui en quête des bases solides pour la relance du pays est de se laisser former à l'école de la conscience. Que tous ceux qui ont la possibilité d'instruire les autres insistent sur cette notion. Sinon, il n'y aura jamais de développement lorsqu'un peuple n'a pas de conscience.

III. 2. 3. Un amour de la patrie sans faille

Après avoir cité la quête de la notion de la conscience comme premier facteur déterminant pour le développent de la R.D.C, nous proposons à cette population comme deuxième facteur déterminant la notion de l'amour de la patrie.

En effet, par le vocable amour de la patrie on entend ce type d'amour qui anime tout membre d'un pays quelconque à aimer son pays, en recherchant son développement et son progrès afin qu'il devienne une référence dans le monde75(*). Cet amour se manifeste des plusieurs manières : pour la classe dirigeante par exemple, ceux qui la composent auront l'amour de la patrie lorsqu'ils feront tout ce qui est en leur pouvoir pour rechercher la prospérité de tous. Pour les médecins, ils manifesteront cet amour lorsqu'ils soigneront leurs malades dans la conscience, oubliant d'abord ce que peut rapporter leur métier. Pour les avocats et magistrats, c'est lorsqu'ils appliqueront la loi sans parti pris, sans favoriser celui qui a plus d'argent bien qu'il soit dans la faute. Nous ne pouvons pas citer ici toutes les catégories sociales, sinon chaque personne à son niveau, qu'il soit riche ou pauvre, qu'il soit sans emploi, etc., tout le monde, lorsqu'il met l'intérêt de son pays au premier plan, il a l'amour de sa patrie.

Cet amour de la patrie se manifeste également par un sens aigu du sentiment d'appartenance. S. Muyengo nous le rappelle en ces termes : « Le sentiment d'appartenance va de paire avec le sens du bien commun qu'il convient de comprendre, non pas comme la somme de biens particuliers, mais comme la fin, le but de la vie en société »76(*). Et ce sentiment doit être inculqué dès le bas âge.

Mais il se fait qu'ici en R.D.C. l'amour de la patrie manque à beaucoup de nos dirigeants, qui viennent soit de l'extérieur du pays et qui, par conséquent, n'ont qu'une seule idée en tête : amasser de l'argent, par n'importe quel moyen, et rentrer vivre où ils ont laissé leur famille. Soit encore s'ils viennent de l'intérieur du pays, alors dans ce cas, ils ont encore présent à l'esprit les habitudes de la deuxième république c'est-à-dire habitudes qui leur font dire qu'il n'y a pas de lendemain lorsque on occupe une fonction politique, d'où, il faut profiter pendant que l'on exerce encore sa fonction dans le gouvernement. Ils font ainsi pour amasser de l'argent afin de s'assurer un meilleur lendemain. Et si, ceux qui ont les commandes du pays agissent de la sorte, que peut faire le reste de la population ? D'où les dérapages au niveau des gestions des biens publiques que nous rencontrons par-ci par-là, amenant ainsi toute la population à commettre le péché structurel ou de la structure du péché pour utiliser l'expression chère au Pape Jean-Paul II.

Nous estimons qu'il faut une nouvelle génération, avec une nouvelle mentalité si l'on veut sortir effectivement de cette crise. Il faut, en d'autres termes, une nouvelle classe de l'élite, consciente des enjeux géopolitiques et intégrant les atouts de la R.D.C., c'est-à-dire les énormes potentialités économiques, nouvelles forces géopolitiques. La R.D.C. a les moyens d'être une grande nation au coeur de l'Afrique si sa propre population lui accorde cette chance.

Tout compte fait, le développement de la R.D.C. ne peut être concret que si l'on considère d'abord l'homme congolais en tant qu'être humain, digne de respect. L'économie ou la technoscience ne peuvent pas apporter un développement si l'acteur même de ce développement n'est pas prit en considération. Jules Kipupu dit à ces propos : « l'on a compris que le développement n'était pas uniquement économique, qu'il ne pouvait pas se faire sans prendre en charge l'homme et tout homme dans son insertion sociale déterminée »77(*). Que les gouvernants valorisent leurs compatriotes.

III. 3. CONCLUSION DU CHAPITRE

Le dernier chapitre est un essai de concrétisation de toutes les notions que nous avons pu développer tout au cours notre travail. Il poursuit le noble objectif de faire ressortir les éléments nécessaires pour le développement de la République Démocratique du Congo. Pour ce faire, nous avons divisé ce dit chapitre en deux sections essentielles. La première aborde les questions morales qui pourront être nécessaire pour le développement du Congo. La deuxième est un essai d'application de ces questions morales.

Ainsi, nous pouvons retenir de la première section l'importance d'une morale dans le monde et dans la vie de toute personne humaine. Car, en effet, sans la loi morale, le monde serait comparable à un horizon bouché. Et lorsque cette morale devient chrétienne, elle élève l'homme à communier avec son Créateur, à l'aimer et à aimer son semblable.

La deuxième section quant à elle, aborde certains points nécessaires pour le développement du Congo. Ainsi nous avons décelé le cas de la conscience morale qui peut caractériser tout celui qui veut que son pays s'élève. Nous avons décelé également le problème de l'amour de la patrie qui est un élément essentiel si l'on veut atteindre le progrès d'une nation. Enfin, une brève conclusion a mis un terme à cette investigation.

CONCLUSION GENERALE

Au terme de notre travail, nous nous sentons dans l'obligation de présenter l'essentiel de son contenu. De ce fait, nous rappelons de prime abord que celui-ci comportait trois chapitres. Le premier était une analyse de la source même de la présente investigation : il s'agit de l'Encyclique Veritatis Splendor du Pape Jean Paul II.

Cette Encyclique comporte trois parties. La première est un commentaire du récit biblique du jeune homme riche (Mt 19, 16s). La deuxième est une étude faite par Jean Paul II sur certaines tendances de la théologie morale actuelle. Et la troisième est une présentation du but vers lequel la morale doit tendre.

Le deuxième chapitre portait sur le développement des concepts clés de notre travail. Ainsi, avons-nous compris que la notion de la liberté chrétienne se réalise dans une logique où l'on ne doit pas exclure de Dieu. Cette notion se veut aussi comme une prise en charge des actes de l'homme par lui-même. Dieu en créant l'homme, l'a laissé à son propre conseil pour que seul, il découvre son créateur et observe les lois que ce dernier lui propose.

Pour ce qui est de la notion de la loi, celle-ci est comprise comme étant un don de l'intelligence, accordé à l'homme afin qu'il se comprenne lui-même en vue d'accomplir le bien. Quant à la vérité, elle est une vertu qui aide l'homme à conformer sa vie ou ses actes par rapport à un idéal qu'il s'est donné. Elle veut que l'homme se montre vrai dans ses actes et dans ses paroles.

Le troisième chapitre quant à lui est un essai de concrétisation de la morale dans la vie du peuple congolais. Nous avons ici commencé par rappeler ce qu'est la morale pour parvenir à dégager quelques idées qui pourraient être utile pour le développement de la République Démocratique du Congo. Ainsi, avons-nous analysé les notions de la conscience morale qui se veut droite et celle de l'amour de la patrie.

Tout compte fait, l'Encyclique Veritatis Splendor nous a été d'un précieux apport. Grâce à elle, nous avons compris que la splendeur de Dieu ou la splendeur de la vérité, source de vie et d'amour, se déploie chaque jour dans le monde. Elle est à la racine de la naissance des humains, elle accompagne leur croissance et leur vieillissement. Elle veut que ceux-ci, après leur passage sur cette terre, se retrouvent unis auprès de leur créateur. C'est pourquoi elle leur révèle, grâce à l'intelligence que Dieu a accordé aux hommes, des normes morales, afin qu'au moment où ils les respecteront puissent vivre en harmonie entre eux, et avec Dieu.

La splendeur de la vérité se colore ainsi de la splendeur de la communion et de la solidarité d'hommes et des femmes qui veulent remplir la terre de la fécondité étonnante de l'amour de Dieu.

BIBLIOGRAPHIE

1. SOURCE SCRIPTURAIRE

- LA BIBLE DE JERUSALEM. Traduit en français sous la direction de l'Ecole Biblique de Jérusalem, Cerf, Paris, 1973.

2. DOCUMENTS DU MAGISTERE

- CATECHISME DE L'EGLISE CATHOLIQUE, Paris, Racine/Fidélité, 1998.

- CONGREGATION POUR LES RELIGIEUX ET LES INSTITUTS SECULIERS, La vie consacrée et sa mission dans l'Eglise et dans le monde, Médiaspaul, Kinshasa, 1994.

- JEAN PAUL II, Lettre Encyclique Veritatis Splendor. Sur quelques questions fondamentales de l'enseignement moral de l'Eglise, dans Documentation Catholique n° 85,1993.

3. DICTIONNAIRES

- BRUGUES, J.-L., Dictionnaire de Morale Catholique, Paris, C.L.D., 1991.

- COTE, J., Cent mots-clés de la théologie de Paul, Novalis/Cerf, Ottawa, 2000.

- LALANDE, A., Vocabulaire technique et critique de la philosophie, Paris, Quadrige/PUF, 1991.

- NOUVEAU PETIT ROBERT DE LA LANGUE FRANCAISE, Ed. Le Robert, Paris, 2007.

4. OUVRAGES

- DESCLOS, J., Resplendir de vraie liberté. Lectures de Veritatis Splendor, coll. Brèches théologiques, Médiaspaul, Montréal, 1994.

- FERNANDEZ, A., Morale fondamentale (Initiation théologique), Paris, Le Laurier, 2003, pp. 63-64.

- HOBBES, Th., Léviathan : Matière, forme et puissance de l'Etat chrétien et civile, Traduit par Gérard Mairet, Gallimard, Paris, 2000.

- LAURET, B., -REFOULE, F. (dir.), Initiation à la pratique de la théologie, t.IV : l'Ethique. 2ème édition, Paris, Cerf, 1984.

- LEONARD, A-M. (Mgr), La morale en question. Dialogue à propos de l'Encyclique Veritatis Splendor, Coll. Bonne Nouvelle n°3, Ed. Omer Marchal/ Ed. de l'Emmanuel, Paris, 1994.

- LEVY-BRÜHL, L,. La morale et la Science, Paris, PUF, 1971.

- LINNIG, W., Fais cela et tu vivras. Bible et morale selon l'encyclique Veritatis Splendor, Ed. du Carmel/Ed. Parole et Silence, Paris, 2003.

- MUYENGO, S., Le Pape de ma jeunesse. Chroniques de J.M.J. (1985-2000), Publications Jean XXIII, Ed. Le Sénevé, Kinshasa, 2000.

- MUYENGO, S., Cours de Théologie morale fondamentale destiné aux étudiants de G1 aux FCK, Kinshasa, 2008-2009, inédit.

- MUYENGO, S., Dix Paroles pour mieux être. Perspectives pour une nouvelle évangélisation, Paulines, Kinshasa, 2009.

- MUYENGO, S., Duc in Altum. Prêtres séculiers et l'Evangélisation du nouveau siècle, Coll. Théologie et Pastorale, Ed. Le Sénevé, Kinshasa, 2001.

- MUYENGO, S., L'humanité de l'homme, Publications Jean XXIII, Ed. Le Sénevé, Kinshasa, 1997.

- POLIN, R., Vérités et liberté, Coll. Questions, P.U.F., Paris, 2000.

- RAHNER, K., Traité fondamental de la foi, Ed. Centurion, Paris, 1983.

- REY-MERMET, TH. , Croire. T. IV. Pour une redécouverte de la morale, Droguet - Ardant, Québec, 1985.

- WAWA, R. (dir.) , La République Démocratique du Congo, Mon beau pays, 2ème édition revue, Médiaspaul, Kinshasa.

- WAWA, R., On l'appelait Jean Paul II, Kinshasa, Médiaspaul, 2005.

5. ARTICLES

- J.-F., COLLANGE, Foi, espérance, amour et éthique dans B. LAURET - F. REFOULE (dir.), Initiation à la pratique de la théologie, T. IV : l'Ethique. 2ème édition, Paris, Cerf, 1984.

- J. ELLUL, Liberté, dans Conscience et liberté, n°19, Amsterdam, 1980.

- J. KIPUPU, Culture et développement durable, dans Culture africaine, démocratie et développement durable. Actes des VIII ème Journées Philosophiques de la Faculté Saint Pierre Canisius du 16 au 19 mars 2005, Ed. Loyola, Kinshasa, 2005.

TABLE DES MATIERES

EPIGRAPHE I

DEDICACE II

AVANT - PROPOS III

INTRODUCTION GENERALE 4

CHAPITRE PREMIER 7

LA SPLENDEUR DE LA VERITE 7

I.0. INTRODUCTION 7

I.1. L'AUTEUR ET SON OEUVRE 7

I.2. ELOGE DE LA VERITE 9

I.3. CONCLUSION DU CHAPITRE 21

CHAPITRE DEUXIEME 23

LIBERTE, LOI ET VERITE: UN TRINOME COMPLEMENTAIRE 23

II. 0. INTRODUCTION 23

II.1. DE LA NOTION DE LA LIBERTE 23

II.1.1. Quelques définitions 23

II.1.2. La liberté dans la morale naturelle 24

II. 1.3. Sens de la liberté chrétienne 25

II.1. 4. La liberté selon l'Encyclique Veritatis Splendor 27

II. 2. LA NOTION DE LA LOI 28

II. 2.1. Quelques définitions 28

II. 2. 2. De la Loi naturelle 29

II. 2. 3. La Loi dans les Saintes Ecritures 31

II.2. 3. 1. Dans l'Ancien Testament 31

II.2. 3. 2. La Loi dans le Nouveau Testament 32

II. 3. LA NOTION DE LA VERITE 35

II. 3. 1. Définitions 35

II. 3. 2. Une vérité éthique et évangélique 35

II. 3. 3. La Vérité de Dieu construit la liberté de l'homme : Le rapport entre vérité et liberté 37

II. 3. 4. Une Vérité qui libère 38

II. 4. CONCLUSION DU CHAPITRE 39

CHAPITRE TROISIEME 41

LA MORALE CHRETIENNE A LA LUMIERE DE L'ENCYCLIQUE VERITATIS SPLENDOR POUR UN AVENIR MEILLEUR DE LA RDC 41

III.0. INTRODUCTION 41

III. 1. LA MORALE AUJOURD'HUI : UNE NECESSITE 41

III.1.1. Quelle morale pour aujourd'hui ? 41

III.1.2. La morale chrétienne comme réponse à la préoccupation humaine 44

III.1. 3. La recherche de la perfection dans la morale chrétienne 47

III. 2. UNE MORALE CHRETIENNE POUR LE RAYONNEMENT DE 49

LA R.D CONGO 49

III. 2. 1. Situation actuelle de la RDC 49

III. 2. 2. Une conscience morale droite 51

III. 2. 3. Un amour de la patrie sans faille 53

III. 3. CONCLUSION DU CHAPITRE 55

CONCLUSION GENERALE 56

BIBLIOGRAPHIE 58

TABLE DES MATIERES 61

* 1 Nous devons cette petite bibliographie à R. WAWA, On l'appelait Jean Paul II, Kinshasa, Médiaspaul, 2005, pp.5-8.

* 2 Cfr. S. MUYENGO, Le Pape de ma jeunesse. Chroniques de J.M.J. (1985-2000), Publications Jean XXIII, Ed. Le Sénevé, Kinshasa, 2000.

* 3 JEAN PAUL II, Lettre Encyclique Veritatis Splendor. Sur l'enseignement moral de l'Eglise, dans La Documentation Catholique n° 85 (1993), pp. 1133-1228. Désormais V.S. n° 1.

* 4 VATICAN II, Décret Optatam totius, n°16, cité par V.S. n°7.

* 5 S. MUYENGO, Duc in Altum. Prêtres séculiers et l'Evangélisation du nouveau siècle, Coll. Théologie et Pastorale, Ed. Le Sénevé, Kinshasa, 2001, p. 137.

* 6 VATICAN II, Constitution pastorale Gaudium et spes, n°22, cité par V.S. n° 27.

* 7 JEAN PAUL II, Encyclique Redemptor hominis, n°4, cité par V.S. n°31

* 8 SAINT THOMAS D'AQUIN, Somme théologique, I-II, q. 18, a. 6, cité par V.S. n° 78

* 9 Discours aux participants du Congrès international de la théologie morale (10 avril 1986), n.1 : Insegnamenti IX, 1 (1986), p.970, cité par V.S. n°84

* 10 NOUVEAU PETIT ROBERT DE LA LANGUE FRANCAISE, Ed. Le Robert, Paris, 2007.

* 11 A., LALANDE, Vocabulaire technique et critique de la philosophie, vol. I : A-M, Paris, Quadrige/PUF, 1991, p.559.

* 12 J.-L., BRUGUES, Dictionnaire de Morale Catholique, Paris, C.L.D., 1991, p. 234.

* 13 A. FERNANDEZ, Morale fondamentale (Initiation théologique), Paris, Le Laurier, 2003, pp. 63-64.

* 14 CATECHISME DE L'EGLISE CATHOLIQUE, Paris, Racine/Fidélité, 1998, n°1731, désormais C.E.C.

* 15 S., MUYENGO, Cours de Théologie morale fondamentale destiné aux étudiants de G1 aux FCK, Kinshasa, 2008-2009, inédit.

* 16 B., LAURET, - F., REFOULE, (dir.), Initiation à la pratique de la théologie, t.IV : l'Ethique. 2ème édition, Paris, Cerf, 1984, p.161.

* 17 Ibid., p.163.

* 18 Op. cit., p. 163.

* 19 Idem.

* 20 Idem

* 21 J., DESCLOS, Resplendir de vraie liberté. Lectures de Veritatis Splendor, coll. Brèches théologiques, Médiaspaul, Montréal, 1994, p. 237.

* 22 K. RAHNER, Traité fondamental de la foi, Ed. Centurion, Paris, 1983, p. 113, cité par Idem.

* 23 A-M., LEONARD (Mgr), La morale en question. Dialogue à propos de l'Encyclique Veritatis Splendor, Coll. Bonne Nouvelle n°3, Ed. Omer Marchal/ Ed. de l'Emmanuel, Paris, 1994, p.42.

* 24 NOUVEAU PETIT ROBERT DE LA LANGUE FRANCAISE, Ed. Le Robert, Paris, 2007.

* 25 A., LALANDE, Vocabulaire technique, op. cit., p. 589.

* 26 Th. HOBBES, Léviathan : Matière, forme et puissance de l'Etat chrétien et civile, Traduit par Gérard Mairet, Gallimard, Paris, 2000, p. 408.

* 27 Idem

* 28 L. LEVY-BRÜHL, La morale et la Science, Paris, PUF, 1971, p. 3.

* 29 Th. HOBBES, Op. Cit., p. 356.

* 30 Idem

* 31 W., LINNIG, Fais cela et tu vivras. Bible et morale selon l'encyclique Veritatis Splendor, Ed. du Carmel/Ed. Parole et Silence, Paris, 2003, p. 48.

* 32 C.E.C., n° 2071.

* 33 W., LINNIG, Op. Cit., p. 59.

* 34 S. MUYENGO, L'humanité de l'homme, Publications Jean XXIII, Ed. Le Sénevé, Kinshasa, 1997, p.45.

* 35 Ibid. p.46.

* 36 Idem

* 37 S. MUYENGO, Dix Paroles pour mieux être. Perspectives pour une nouvelle évangélisation, Paulines, Kinshasa, 2009, p. 12.

* 38 J. COTE, Cent mots-clés de la théologie de Paul, Novalis/Cerf, Ottawa, 2000, pp. 289-290.

* 39 J. COTE, Cents mots-clés de la théologie..., p. 293.

* 40 NOUVEAU PETIT ROBERT DE LA LANGUE FRANCAISE 2007

* 41 A., LALANDE, Vocabulaire technique...  pp. 1197-1198.

* 42 Idem

* 43 J., COTE, Op. Cit., p. 453.

* 44 C.E.C., n° 2468

* 45 J. DESCLOS, Resplendir de vraie liberté, coll. Brèches théologiques, Médiaspaul, Montréal, 1994, p. 31.

* 46 Voir par exemple les idéologies nouvelles présentées sous les titres de la Nouvelle éthique mondiale, ou encore de l'Ethique minimale. Sur la première, lire M.A. PEETERS, La mondialisation de la révolution culturelle occidentale. Concepts clefs, mécanismes opérationnels, Institute For Intercultural Dialogue Dynamics (Asbl), s.l, 2007, 200p. ; La Nouvelle éthique mondiale. Défi pour l'Eglise, Kinshasa, Médiaspaul, 2007, 77p ; Préface à S. MUYENGO, Les Dix paroles pour mieux être. Perspectives pour une nouvelle évangélisation, Coll. « Nouvelle Evangélisation », Kinshasa, Ed. Paulines, 2008, 143 p.. sur la seconde : R. OGIEN, L'éthique aujourd'hui, Maximalistes et Minimalistes, Paris, Gallimard, 2007 ; lire aussi L'éthique minimale en discussion, dans l'Ethique minimale, Revue de Théologie et de Philosophie, Vol 140/2008, II-II, 99.

* 47 R., POLIN, Vérités et liberté, Coll. Questions, PUF, Paris, 2000, p. 43.

* 48 J., DESCLOS, Op. Cit., p. 61.

* 49 Ibid., p. 62.

* 50 Ibid., p. 182.

* 51 Idem

* 52 W. LINNIG, Fais cela et tu vivras..., p. 181.

* 53 J. DESCLOS, Resplendir de vraie liberté..., p. 6.

* 54 Ibid. p. 20.

* 55 JEAN PAUL II, Discours aux Cardinaux, à la Famille pontificale, à la Curie et à la Prélature romaine, 21 novembre 1993, dans L'Osservatore Romano, n° 52, 28 décembre 1993, p.7, cité par Ibid. p. 21.

* 56 J. DESCLOS, Op. Cit. p. 74.

* 57 TH. REY-MERMET, Croire. T. IV. Pour une redécouverte de la morale, Droguet - Ardant, Québec, 1985, p. 33.

* 58 Ibid. p. 37.

* 59 J.-F., COLLANGE, Foi, espérance, amour et éthique dans B. LAURET - F. REFOULE (dir.), Initiation à la pratique de la théologie, T. IV : l'Ethique. 2ème édition, Paris, Cerf, 1984, p. 13.

* 60 S., MUYENGO, Cours de Théologie morale fondamentale destiné aux étudiants de G1 aux FCK, Kinshasa, 2008-2009, inédit.

* 61 C.E.C., n°144.

* 62 J.-F., COLLANGE, Op. Cit., p. 14.

* 63 C.E.C., n° 162.

* 64 S. MUYENGO, Op. Cit., inédit.

* 65 Idem.

* 66 CONGREGATION POUR LES RELIGIEUX ET LES INSTITUTS SECULIERS, La vie consacrée et sa mission dans l'Eglise et dans le monde, Médiaspaul, Kinshasa, 1994, p. 66.

* 67 C.E.C. n° 1716.

* 68 R. WAWA (dir.) , La République Démocratique du Congo, Mon beau pays, 2ème édition revue, Médiaspaul, Kinshasa, 2008, p. 10.

* 69 J. KIPUPU, Culture et développement durable, dans Culture africaine, démocratie et développement durable. Actes des VIII ème Journées Philosophiques de la Faculté Saint Pierre Canisius du 16 au 19 mars 2005, Ed. Loyola, Kinshasa, p. 63.

* 70 A. LALANDE, Vocabulaire technique...pp. 175-176.

* 71 V.S., n° 58.

* 72 S. MUYENGO, Dix paroles..., p. 85.

* 73 Ibid. p. 86.

* 74 S. MUYENGO, Seigneur apprends-nous à prier. Réflexions, Médiations et Prières avec le Notre Père, Médiaspaul, Kinshasa, 2007, p. 33.

* 75 J. ELLUL, Liberté, dans Conscience et liberté, n°19 (1980), Amsterdam, p. 48.

* 76 S. MUYENGO, Op. Cit., p. 55.

* 77 J. KIPUPU, Op. Cit., p. 61.






Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy








"Et il n'est rien de plus beau que l'instant qui précède le voyage, l'instant ou l'horizon de demain vient nous rendre visite et nous dire ses promesses"   Milan Kundera