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Ressources fourragères et représentations des éleveurs, évolution des pratiques pastorales en contexte d'aire protégée. Cas du terroir de Kotchari à  la périphérie de la Réserve de biosphère du W au Burkina Faso

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par Issa Sawadogo
Museum national d'histoire naturelle de Paris (ED 227) - Docteur du museum national d'histoire naturelle spécialité physiologie et biologie des organismes  2011
  

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5 .2. Matériel et méthodes

5.2.1. Méthodes d'acquisition des données

Ce volet de la recherche a été conduit en combinant plusieurs activités : une exploitation continue de données bibliographiques, des recensements de cheptel et des enquêtes prenant la forme d'entretiens directifs ou semi directifs ou de questionnaire plus formels. Des résultats de travaux préliminaires (Sawadogo, 2004) ont servi de base au présent travail. Ce travail précédent portait sur les aspects relationnels ou de conflictualité (entre agropasteurs résidents, entre agropasteurs et transhumants, entre riverains et gestions des réserves, entre éleveurs et administration, etc.).

5.2.1 .1. La revue des données

Pour faire le point sur la situation démographique humaine et animale actuelle et en prendre la pleine mesure, diverses données (recensement général de la population, enquêtes agricoles, enquête nationale sur les effectifs du cheptel, rapports d'étude, etc.) ont été exploitées puis complétées par des enquêtes légères de terrain, surtout ciblées sur le cheptel transhumant. Toutes ces données ont permis d'avoir une idée relativement exacte de la densité de la population du terroir, de celle des animaux résidents et de ceux transhumants.

Pour la détermination des effectifs humains, nous nous sommes appuyé sur les statistiques nationales (MEF, 2008 ; DREP-Est, 2008) auxquelles nous avons appliqué les taux officiels de croît53. Par ailleurs, l'appréciation du niveau d'occupation des sols a été faite en s'appuyant sur les données de la base des données d'occupation des terres (BDOT) de l'IGB, réalisée en 2002.

53 Taux de croît annuel : Botou : 3,8% ; Diapaga : 4,1% ; Kantchari : 3,4% ; Logobou : 3,8% ; Namounou : 2,5% ; Partiaga : 4,4% ; Tambaga : 3,6% ; Tansarga : 4,6% ; Tapoa : 3,8% et Région-Est : 3,6%.

111

5 .2.2.2. Les enquêtes

Les enquêtes ont été conduites en trois temps : une phase d'enquête exploratoire semi-directive en 2007, une phase d'estimation des effectifs du cheptel en 2008 et 2009, et une phase d'enquête par questionnaire en 2009.

5.2.2.2.1. Les entretiens

Ils ont été conduits de manière semi-directive (avec guide d'entretien) et itérative tout au long de la recherche de terrain auprès de personnes ressources d'expérience, notamment les éleveurs possédant des troupeaux et les Garso (Encadré V-2).

Encadré V-2. Le Garso ou guide de transhumance

La société pastorale dans la région du parc W est organisée autour de personnages clés que sont les Rugga et les Garso (Riegel, 2002) considérés comme guides et porte-paroles (Benoit, 1999a)54. Le Rugga, fait office de chef de clan. Il est chargé de la sécurité des membres de sa communauté et de leurs animaux (Oumarou, 2004). Le Garso est un éleveur reconnu par la communauté pour son expérience et son savoir en matière de pâturages et de conduite du troupeau ainsi que pour sa sociabilité et ses qualités de médiateur (Riegel, 2002 ; Bodé, 2008). Il est à la tête d'un groupe de transhumants (dont le nombre peut varier de cinq à douze) qui l'élit et dont il est le porte-parole auprès du Rugga. La réussite de la campagne de transhumance est de sa responsabilité. C'est en général lui qui détermine l'axe de transhumance à suivre et qui assure la coordination et la gestion des relations avec les autres groupes (administration et autochtones des villages de transit et d'accueil).

5.2.2.2.2. L'estimation des effectifs animaux dans le terroir

Un inventaire du cheptel local a d'abord été fait en 2008 par recensement exhaustif. Il a été réactualisé en 2009 par application des taux de croît observés en suivant cinq troupeaux de chacune des trois espèces principales (bovins, ovins, caprins) pendant trois ans (2006- 2009). Les taux de croît résultant de ces suivis valaient 2,2%; 2,9% et 3,3% respectivement pour les bovins, les ovins et les caprins.

Chez les éleveurs transhumants ce type de méthode n'était pas possible, la démarche a donc été toute autre. Pour des troupeaux transhumants la détermination des effectifs est toujours un exercice délicat. Plusieurs méthodes ont été utilisées pour s'assurer de recenser, sinon la totalité, du moins le maximum de troupeaux transhumants. Quatre observateurs55 positionnés quotidiennement de 6 h à 18 h aux entrées principales du terroir, de début novembre 2007 à fin juillet 2008 puis de novembre 2008 à fin juillet 2009, se sont chargés de cette tâche. Les données collectées ont ensuite été agrégées pour les quatre périodes définies par Paris (2002) par rapport au flux de transhumance à Kotchari : début de la transhumance de décembre à mars, pleine transhumance d'avril à mai, retour des transhumants de juin à juillet,

54 Dans l'extrême- nord du Cameroun (sud du bassin du lac Tchad), on rencontre plutôt le Kaydal, chef des bergers de plusieurs villages allant en transhumance et l'Ardo, chef de bergers au sein des campements en déplacement. (Requier-Desjardins, 1999).

55 La surveillance étant continue, les personnes sont choisies parmi celles qui habitent sur place.

période sans transhumants d'août à novembre. En vue de compléter leurs informations, les mêmes observateurs effectuaient par ailleurs des visites dans les campements de nuit et de repos de ces éleveurs, ce qui est recommandé par Daget & Godron (1995). Les effectifs animaux des troupeaux d'éleveurs résidents qui partent en transhumance ont été notés et soustraits de l'effectif total de chaque saison. Il a ainsi été possible de se faire une idée assez précise des effectifs animaux et des niveaux de charge ainsi que de leur évolution au cours de l'année.

5.2.2.2.3. La typologie des systèmes d'élevage dans le terroir

Une esquisse de typologie déjà réalisée sur le même terrain (Sawadogo, 2004) a servi de base pour le présent travail. Comme nous avions postulé que des groupes différents d'éleveurs avaient des façons de faire différentes, une typologie assez précise des éleveurs s'imposait comme un préalable à l'étude des pratiques. Une enquête par questionnaire a été conduite tout au long de l'année 2009 auprès de 200 éleveurs, ce qui représente un peu plus de 10% de la population totale estimée.

L'échantillon enquêté a été construit de la manière suivante : dans un premier temps l'ethnie a servi de base pour identifier deux groupes : 50 éleveurs gourmantchés et 150 éleveurs peuls. Le nombre d'enquêtés par quartier (ou village-satellite) a ensuite été déterminé au prorata de leurs poids démographiques. Enfin, le choix des chefs de ménages enquêtés s'est fait au hasard des rencontres.

L'effort d'échantillonnage a été a priori orienté surtout vers les Peuls, en raison de la plus grande implication de ce groupe socioculturel dans les activités pastorales, alors qu'il est démographiquement peu représenté. L'échantillon ainsi constitué est un compromis entre une répartition a priori et un tirage aléatoire, une méthode qui a montré son caractère reproductible (Scherrer, 2007).

Pour construire le questionnaire, un certain nombre de variables jugées pertinentes (variables d'intérêt d'après Cibois, 2007) au vu des enquêtes exploratoires, ont été retenues, leurs modalités ont été définies et codées. Les thèmes abordés dans l'enquête sur les systèmes d'élevage et des pratiques pastorales portent sur l'ethnie et l'origine de l'éleveur, la taille la composition et le mode de constitution du troupeau, son type de conduite, sa mobilité, son alimentation et son agrégation (tableau V-1):

Tableau V-1. Variables et modalités constitutifs du questionnaire

Variables Codes Modalités Intervalles ou contenu des

classes correspondantes

Ethnie de l'éleveur Eth 1 Gourmantché

2 Peul

Lieu de résidence habituelle ou origine OrEl 1 Kotchari

de l'éleveur 2 Dans la Tapoa

3 Burkina Faso hors Tapoa

4 Non burkinabè

Effectif bovin du TaiTr 1 [0 45]

troupeau 2 [46 90]

113

 
 

Chapitre V. Les systèmes d'élevage à Kotchari3 [91 135]

4 [136 180]

5 Plus de 180 têtes de bovins

Nombre et types d'espèces animales dans

NEsp

1

Bovins + Ovins + Caprins

le troupeau

 

2

Bovins + Ovins

 
 

3

Bovins + Caprins

 
 

4

Bovins

 
 

5

Pas de bovins

Nombre et types de races bovines du

NRaB

1

Barbadji

troupeau

 

2

Gurmaji

 
 

3

Jaliji

 
 

4

Barbadji + Gurmaji

 
 

5

Gurmaji + Jaliji

 
 

6

Autres (plus de 2 races bovines)

 
 

7

Aucun (Pas de bovins dans le troupeau)

Mode de constitution ou origine du

OrTr

1

Achat + emprunt

troupeau

 

2

Héritage + don

 
 

3

Achat + Héritage

 
 

4

Autres (plus de 3 formes d'acquisition)

Lieu de pâturage en saison sèche

LPat

1

Terroir Kotchari

 
 

2

Kotchari + terroirs voisins

 
 

3

Pays voisins: Bénin / Togo

 
 

4

Réserves voisines

Raisons de la pratique de la

RTra

1

Eau

transhumance

 

2

Fourrages

 
 

3

Eau+fourrage

 
 

4

Habitude

 
 

5

Ne transhume pas

Type de berger utilisé

NatBe

1

propriétaire ou parent

 
 

2

Salarié

 
 

3

Mixte (parent + salarié)

Nombre de bergers

NBe

1

Un berger

 
 

2

Deux bergers

 
 

3

Plus de deux bergers

Allotement du troupeau

NLot

1

Un lot

 
 

2

Deux lots

 
 

3

Plus de deux lots

Raisons dans l'allotement du troupeau

RLot

1

Former lots homogènes (séparer bien portants des fatigués, malades, etc.)

 
 

2

Gérer les risques

 
 

3

Alléger les charges sur les parcours

 
 

4

Faciliter la tâche des bergers

 
 

5

Ne pratique pas

Pratiques d'alimentation du troupeau

PAlt

1

Pâturage naturel

 
 

2

Complément par fourrage naturel

 
 

3

Complément par fourrage cultivé

 
 

4

Complément par concentré acheté

 
 

5

Complément cultivé, collecté et acheté

114

(fourrage et concentré)

Pour harmoniser et faciliter le traitement des données, la variable «effectif de bovins dans le troupeau» a été transformée en variable discrète. Nous avons ainsi choisi de répartir les troupeaux dans cinq classes d'amplitude égale (Beguin & Pumain, 1994), leur étendue (h) ayant ensuite été définie en faisant le rapport entre l'amplitude de la variation (écart entre l'effectif de troupeau le plus élevé et le plus faible) et le nombre k des classes.

h max- min

=

k

L'étendue ainsi calculée était de 45 têtes. Dans notre série statistique, le plus petit effectif bovin était de 0 alors que l'effectif le plus important était de 227 têtes.

5.2.2.2.4. Les pratiques et leur évolution

L'étude des pratiques et de l'évolution permet d'identifier les ajustements même minimes qu'opèrent les éleveurs pour en déduire les stratégies qu'ils mettent en oeuvre pour s'adapter aux changements climatiques et environnementaux. On suivra en effet Landais & Deffontaines (1989) qui pensent que les stratégies des éleveurs - leur nature, leurs logiques et la manière dont elles sont mises en oeuvre peuvent être mises en évidence au travers des pratiques que ceux-ci adoptent dans la conduite de leurs activités pastorales.

Une période de référence (ou pas de temps) de 20 ans a été retenue pour suivre cette évolution dans les pratiques. Nous sommes conscient que pour juger des variations qui s'expriment dans les pratiques, cette période est courte. Deux arguments permettent cependant de justifier notre choix. Le premier est le souci de lier le phénomène étudié aux grands bouleversements fonciers qui ont accompagné la relance de la cotonculture dans la zone d'étude. De ce point de vue, la décennie 90 (il y a vingt ans environ) correspond à la période où la culture du coton était à son niveau le plus bas dans le terroir, tandis que la fin de cette décennie (il y a dix ans environ) coïncide avec le début du boom cotonnier et du grand engouement des populations pour cette culture qui a été suivi d'une importante occupation de l'espace. Rappelons que cette culture très consommatrice d'espace (Tamou, 2002 ; Doussa, 2004) a été encouragée par les sociétés cotonnières (la SOFITEX56 puis la SOCOMA57) qui ont facilité l'accès aux moyens de travail et aux intrants (semences, engrais, pesticides et insecticides). Le deuxième argument est que notre questionnaire d'enquête devait permettre de recueillir des informations chiffrées aussi exactes que possibles. De ce point de vue, il n'aurait pas été prudent de chercher à remonter beaucoup plus loin dans le passé.

Dans l'étude des pratiques pastorales nous nous sommes concentré surtout sur pratiques l'agrégation (constitution, allotement), la conduite (gardiennage, mobilité, alimentation) et la diversification du troupeau. Ces enquêtes structurées ont, par ailleurs, été complétées par des entretiens ciblés conduits auprès d'éleveurs choisis dans chacun des groupes de notre typologie. Ces éleveurs ont été visités régulièrement et la technique d'analyse du discours

56 Société des Fibres Textiles

57 Société Cotonnière du Gourma

(Mettrick, 1994) a été privilégiée. Celle-ci, basée sur des entretiens non directifs ou semi directifs, permet d'expliciter les ajustements que les éleveurs opèrent dans leurs pratiques et de comprendre les logiques qui les sous-tendent (Blanchet & Gotman, 2003). Elle permet, in fine, à travers les questions que les acteurs eux-mêmes se posent, de faire appel à leurs points de vue et de donner à leurs expériences vécues, à leurs logiques, à leur rationalité, une place de premier plan.

Dans ce chapitre, nous considérons les pratiques dans leur globalité et leur évolution. Dans le chapitre suivant nous reviendrons plus en détails sur les pratiques de conduite au pâturage.

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"Qui vit sans folie n'est pas si sage qu'il croit."   La Rochefoucault