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Acteurs et interactions autour des ressources halieutiques du Parc National de la Salonga. Cas de l'exploitation de la rivière Luilaka en RDC

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par Billy Kambala Luadia Tshikengela
Université catholique de Louvain - Master complémentaire en développement environnement et sociétés 2009
  

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0.2. Cadre de l'étude

Actuellement, plusieurs programmes se focalisent sur la gestion et la conservation des ressources naturelles en Afrique.

L?Agence américaine pour le Développement International (USAID) à travers son Programme de l?Afrique Centrale pour l?Environnement (CARPE) a pour objectif stratégique de réduire le taux de dégradation de la forêt et la perte de la biodiversité par le renforcement des capacités des acteurs en termes de gestion des ressources naturelles au niveau local, national et régional23.

L?Union Européenne dans son programme « renforcement des capacités de gestion de l?ICCN et appui à la réhabilitation d?aires protégées en RDC » (ZR 4/1 d?UE-9 ACP), soutient l?ICCN à travailler avec les communautés locales situées sur la périphérie du parc national de la Salonga, dans le cadre de l?utilisation durable de leurs ressources naturelles.

Le Partenariat des Forêts du Bassin du Congo (PFBC) a pour but de fournir aux populations des moyens de survie durables par des concessions forestières bien gérées, par une agriculture durable..., en identifiant les opportunités de partenariat entre les efforts de conservation et les besoins en gagne-pain de la communauté24.

Le World Fish Center (WFC), au travers de son portefeuille « Afrique de l?ouest et centrale », soutient les actions tendant à améliorer les conditions de vie, à réduire la pauvreté et à améliorer la sécurité alimentaire des populations rurales par le biais du développement des pêches artisanales.

Tous ces programmes soulignent toujours l?importance d?associer les communautés locales dans toute action visant une gestion durable des ressources naturelles.

Si ailleurs comme au Cameroun, Gabon, Congo-Brazza, etc. ces programmes ont un impact visible sur le terrain, en RDC en général et dans le paysage Salonga-Lukenie-Sankuru en particulier, leurs actions ne sont pas visibles aux yeux des populations locales qui sont misérables et enclavées. Ces dernières pensent que ces bonnes intentions sont loin d?être transformées en actions pour leur intérêt et que c?est plutôt le PNS qui est au centre de l?intérêt commun des tous ces programmes.

23 CARPE, (2003) phase II : http://carpe.umd.ed/how-carpe-works/historique, consulté le 12/12/2009.

24 http://www.cbfp.org/acceuil.html. Consulté le 12/12/2009

Mais quelques actions du CARPE25 telles que le financement des études socio-économiques et biologiques de base, ainsi que le programme de petites subventions, exécutées par le WWF dans le paysage Salonga-Lukenie-Sankuru, méritent d?être citées26.

En effet il est de plus en plus admis qu?une gestion durable des ressources naturelles puisse constituer la base d?un développement des communautés sous condition qu?elle soit fondée sur une approche participative et que le développement prenne en considération à la fois les aspects économiques, environnementaux, sociaux, politiques et institutionnels27.

La meilleure façon de gérer les ressources naturelles consiste à impliquer dans cette gestion les populations locales vivant autour de ces ressources, ce qui pourra garantir le respect des mesures de protection des paysages.

Bien que traditionnellement la création des parcs nationaux ait eu pour but la protection de l?une ou l?autre espèce faunique rare, la RDC doit aujourd?hui faire face à un double défi: d?une part satisfaire les besoins de l?homme par rapport à son milieu naturel et d?autre part maintenir la diversité et la richesse biologique du territoire28.

L?histoire de la gestion des parcs nationaux au Congo remonte à la création en 1925 du premier parc national, le Parc National Albert, aujourd?hui Parc National des Virunga. A ce premier parc sont venus s?ajouter les Parcs Nationaux de la Garamba et de l?Upemba, créés successivement par décret royal en 1938 et 1939.

Cependant, la notion même de conservation de la nature prendra de l?ampleur au Congo dès 1970 avec la création simultanée de quatre nouveaux parcs nationaux : la Salonga, la Maïko, le Kahuzi-Biega et les Kundelungu, et par la mise sur pied à la même époque des structures organiques et juridiques appelées à gérer ces réserves naturelles. Depuis les années 70, existent toujours des conflits d?intérêts qui opposent souvent l?organisation protectrice de la nature et les populations vivant aux alentours des parcs nationaux29.

25 Il s?agit de l?appui de l?agence américaine pour le Développement International (USAID) à travers CARPE selon les termes de l?accord n° 623-00-03_00064-00 du Partenariat pour les Forêts du Bassin du Congo (CBFP)

26 En 2006, neuf ONG locales du territoire de Monkoto furent sélectionnées et financées dans le cadre du programme des petites subventions, mais aucun programme de suivi ni d?évaluation n?a été fait après ce financement.

27 ELLOUMI M. et al. (2006) << Développement local, institutions et gestion des ressources naturelles : Le cas de la communauté d?Ouled H?lel dans la délégation de Aïn Draham »., Options Méditerranéennes, Sér. A/n° 71, p68

28 LANDU N. Populations et forêts: comment concilier les besoins locaux, régionaux et nationaux. Séminaire FORAFRI, Libreville, Gabon

29 CTB, RDC (2007) << Nos forêts, notre avenir ». Magazine de la Coopération Belge en RD Congo, numéro thématique sur les forêts du Congo, 1er juin 2007, p.9

0.2.1. Problématique

En RDC, les parcs nationaux ont été crées sans aucune forme de consultation des communautés indigènes vivant déjà de leurs ressources. Elles en ont été seulement expulsées et sont aujourd?hui les "populations riveraines"30.

Le Parc National de la Salonga (PNS) est perçu par les populations périphériques comme une entrave à la subsistance et aux activités économiques des villages déplacés lors de la création du parc et ceux ayant leurs forêts et leurs eaux (étangs) dans les limites de celui-ci.

Ce déplacement de populations pose de multiples problèmes d?identité culturelle, de recomposition familiale, d?abri, de ressources ainsi que d?autonomie économique et de perte de tout un patrimoine hérité de leurs ancêtres et qu?elles doivent transmettre aux générations à venir.

L?interdiction d?accès à leurs anciennes terres a été reliée à la baisse de la disponibilité du gibier et des poissons car les villages ont été forcés à concentrer leurs activités dans un secteur plus réduit, partagé entre plusieurs populations déplacées31.

Ces populations sont aujourd?hui face à une marginalisation socio-économique de plus en plus importante et une pauvreté chronique déjà très marquée. Elles ont un fort ressentiment de spoliation et de rancoeur à l?égard du parc et de ceux qui sont perçus comme ses protecteurs (agents de l?ICCN)32.

Les limites du parc n?ont jamais été matérialisées et sont sources permanentes de mésententes et de tensions avec les populations locales.

Ces tensions sont souvent exacerbées par un comportement inapproprié de la part des gardes du parc, qui sont accusés « d?arrestations arbitraires », d?extorsions, de vol, voire de viols33.

De plus, la non-résolution du problème de personnes résidant dans le parc a fait que la gestion du
PNS se caractérise depuis longtemps par une série d? « arrangements » qui sont en contradiction

30 VIKANZA K. P, (2004) Population, gestion des ressources naturelles et développement dans la région du Nord-Kivu. Cas du parc des Virunga en territoires de Beni et Lubero (RDC),mémoire de DEA, UCL, Louvain-la-Neuve, p2

31 COLOM, ALEJANDRA. (2006). Aspects socio-économiques de l?utilisation et de la gestion des ressources naturelles dans le paysage Salonga-Lukenie-Sankuru: un guide pour la conservation et l?amélioration des conditions de vie. Rapport non publié préparé par WWF-République Démocratique du Congo p.12.

32 BÉNÉ C., GORDON, A., KAMBALA LUADIA, B. et SAMAFU-SAMENE, A. (2006). Etude des activités de pêche sur les rivières bordant le Parc National de la Salonga, RDC et Recommandations sur la mise en place d'une gestion collaborative du Parc par les communautés riveraines et l'ICCN, Kinshasa-RDC

33 WCS, 2004. Proposition pour la mise en place d'un programme de conservation communautaire en faveur du Parc national de la Salonga. Etude socio-économique détaillée-document de synthèse, Wildelife Concervation Socity, Kinshasa DRC, 79p.

avec son statut de Parc National34, et crée de l?hostilité envers l?ICCN de la part des communautés riveraines qui ont accepté de quitter le parc lors de sa création.

Le conflit entre l?organisation protectrice du PNS et les communautés locales date de 1970, lors de la création même du parc. Les populations autochtones ont été déplacées massivement de leur milieu habituel (l?actuel site du parc), laissant derrière elles terres, maisons, forêts, champs, rivières et étangs, pour être concentrées dans les nouvelles terres qui forment aujourd?hui les limites au parc.

Ce déplacement forcé, sans consentement des populations ni mesures d?encadrement, n?a pas été digéré par les populations victimes; elles réclament toujours leur patrimoine. Cette expropriation de leurs espaces de survie est aussi en violation avec la loi foncière qui impose la procédure d?enquêtes préalables, et celle sur l?expropriation pour cause d?utilité publique qui prévoit l?indemnisation préalable et équitable.

Pour ce qui est des populations locales de Monkoto sous étude, exclues de la gestion du parc, elles continuent à revendiquer un droit d?autorité sur leurs anciennes terres et ressources et à collecter les fruits et autres produits dans leurs anciens champs35.

En plus de ces revendications, les politiques floues de l?ICCN ont créé de véritables confusions, dans la mesure où certaines coopératives et certains individus ont obtenu l?autorisation de pêcher dans le parc en payant des taxes36 .

Depuis novembre 2009, la taxe de pêche a été annulée de manière brusque et il y a eu libéralisation de la pêche sur les deux rives de la rivière Luilaka pour toute la population confondue (migrante et locale), par contre la pêche n?est plus autorisée sur les plans d?eaux (rivières, étangs) à l?intérieur du parc et cette prohibition concerne toutes les populations riveraines de Monkoto y compris les six groupements de l?ex-coopérative de Bongonda, signataires du protocole d?accord. Ce qui favorise en plus un climat de mésentente et de confusion à Monkoto.

34 Par exemple un des premiers conservateurs du bloc sud dans les années 70 aurait autorisé les Iyaelimas résidents dans le PNS à pratiquer leurs activités de chasse dans la partie du parc au sud de l?ancienne piste Anga-Moundja (le long de laquelle les villages des Iyealima sont installés. Cet accord officieux est aujourd?hui considéré comme un acquis.

35 BENE et al, Op cit 2006

36 Il s?agit ici du protocole d?accord signé entre la Direction Générale de l?ICCN et les membres de la Coopérative de Bonganda à Monkoto, en 1990, dans lequel ICCN accordait aux membres de la coopérative et leurs familles l?accès aux eaux du parc pour y pécher, et ces derniers offraient gratuitement leurs bâtiments en location à l?ICCN. En plus, tout individu qu?il soit migrant ou local, pouvait pécher dans le parc moyennant paiement d?une taxe.

Cette façon d?agir des autorités de l?ICCN, en faveur de la protection du parc et la gestion des ressources halieutiques au détriment des populations riveraines qui en dépendent, suscitent à nos yeux une attention particulière et un questionnement: par rapport à qui cette gestion des ressources halieutiques est-elle faite? La protection du patrimoine naturel qui ne prend pas en compte le vécu des communautés locales, peut-elle engendrer le développement durable? Pourquoi l?ICCN, vingt ans après, prohibe t-il la pêche dans les eaux du parc? Pourquoi l?autorise t-il sur les deux rives de la Luilaka?

Les réponses immédiates peuvent être que l?ICCN est désormais capable de prendre ses responsabilités en main, c'est-à-dire qu? il a tous les moyens (financiers, matériels et humains ) capables de lui permettre de surveiller l?entièreté du PNS et de ne plus faire de compromis avec les populations riveraines en matière de l?exploitation des ressources halieutiques.

Et si cela est vrai, quelles stratégies pourra t-il utiliser pour garder ce parc hors de toute activité humaine?, et que dit-il du protocole d?accord signé avec les travailleurs de l?ex-coopérative de Bongonda?

Face à toutes ces mesures, les populations locales se sentent lésées, et pour leur survie, elles doivent développer les stratégies pour faire face aux mesures de l?ICCN étant donné qu?elles ont tissé des liens durables avec ces ressources halieutiques bien avant la création du parc.

Les capacités institutionnelles actuelles de l?ICCN sont telles que l?on dénombre 180 gardes en charge de la gestion et de la protection du PNS, pour une surface de 36000 km2 (un territoire plus grand que la Belgique), ce qui signifie 1 garde en fonction pour 200 km2 de forêt tropicale. Ces chiffres montrent clairement que l?ICCN est loin de prendre ses responsabilités en main et de surveiller à suffisance toute l?étendue du parc.

Les acteurs qui interviennent dans la gestion de ce parc se trouvent face à un double défi de la gestion des ressources naturelles dont halieutiques et de leur exploitation par des populations riveraines pour leur subsistance et leur survie.

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"Enrichissons-nous de nos différences mutuelles "   Paul Valery