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De la saisine des juridictions militaires au regard de l'absence de la procédure de citation directe en procédure pénale militaire de la RDC

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par Etienne MBUNSU BINDU Etienne
Université libre des pays des grands lacs RDC - Licence 2010
  

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Paragraphe 2. Désavantages de la citation directe en droit commun

Ainsi que nous l'avons dit, la citation directe est une voie par laquelle la partie lésée par une infraction saute l'étape de l'instruction préjuridictionnelle du parquet pour saisir directement le juge en vue d'obtenir de lui la décision de son pouvoir. La citation directe dans notre sens apparaît comme une sorte de limite au principe de l'opportunité des poursuites où le magistrat se trouvant être maître de l'action publique en recevant les plaintes, les énonciations, vérifie la pertinence de l'affaire avant de décider de telle affaire à parvenir au juge et de telle autre affaire à classer. Dans le cas de la citation directe, l'action publique est indirectement lancée par la partie lésée en réclamation de son action civile sans se référer au parquet ou insatisfaite à celui-ci.

Ainsi que disent Jean Vincent et Raymond Guillien, la citation directe est un acte de procédure par lequel le ministère public ou la victime peuvent saisir directement la juridiction de jugement en informant le prévenu des coordonnées de l'audience.73(*)

Il faut sans doute retenir qu'en droit français, même le ministère public peut saisir le juge par citation directe. Il s'agit par exemple des cas de flagrance, cas qui n'ont pas besoin d'instruction préjuridictionnelle pour établir la culpabilité d'une personne par rapport à une infraction qu'elle commet. En droit français donc, le ministère public, pour une question de célérité, peut saisir directement le juge contre un inculpé. Il devra donc à cette occasion constater simplement la commission de l'infraction, s'informer de l'identité de son auteur avec précision et si besoin est, l'arrêter, puis le présenter directement au juge.

De même que le ministère public, la victime d'une infraction peut directement saisir le juge par une procédure de citation directe. Avant de plonger dans ses inconvénients étant donné que son contenu a déjà été présenté ci-haut, disons que lorsque la partie victime saisit directement le juge, elle saute le ministère public et l'oblige par conséquent de se joindre à son action quoique ce dernier reste maître de l'action publique. En RDC cependant, seule la partie victime de l'infraction peut saisir le juge par citation directe et jamais le ministère public.

En effet, à la fin de l'information judiciaire, le magistrat instructeur est appelé à prendre parti sur la suite à donner au dossier de l'affaire ; lorsqu'il a fait tous les actes d'instruction qu'il a cru utile de faire, et ne voit pas ce qu'il pourrait faire de plus pour éclairer les faits ni la personnalité du délinquant, il procède à la clôture de son instruction.

L'officier du ministère public instructeur, est donc le seul habilité à apprécier quand une cause est suffisamment instruite et à prendre l'une de trois solutions ci-après : la poursuite devant les cours et tribunaux, le classement sans suite ou le règlement extrajuridictionnel dit classement par paiement d'amende transactionnelle là où cela est permis.

Lorsqu'il aura pris l'une de ces trois solutions, il fait un rapport à son chef hiérarchique dans lequel il fait un petit résumé des faits suivi d'une conclusion en forme de proposition. Etant donnée que la plénitude de l'action publique appartient au magistrat, chef du parquet dans sa juridiction, il devra à son tour apprécier la décision de son subalterne qui a instruit et pourra alors soit l'approuver, soit la désapprouver. Au cas où il approuve la décision des poursuites, il pourra alors lui ordonner de poursuivre le détenu devant les cours et tribunaux.

Ainsi que l'on peut le constater, le ministère public a le droit d'appréciation de l'opportunité des poursuites pénales. Cela résulte clairement des articles 44 et 53 du Code de procédure pénale. Il ressort de ces deux dispositions légales que la décision de poursuivre ou de ne pas poursuivre appartient exclusivement au Ministère Public, magistrat instructeur.

En effet, le Ministère Public est, dans notre droit, le maître de l'action publique. C'est donc lui qui décide de l'opportunité des poursuites ou non des infracteurs découverts devant les cours et tribunaux. Cette règle connaît à ce jour plusieurs exceptions dont les plus importantes sont la citation directe, l'injonction du Ministre de la justice. C'est également le cas pour les justiciables devant la Cour Suprême de Justice en premier et dernier ressort pour qui il faut soit la mise en accusation dont l'initiative appartient exclusivement au Président de la République,74(*) soit alors la mise en accusation dont l'initiative appartient au parlement selon que le prévoit la Constitution de la RDC du 18 Février 2006.

Cependant, le MP étant le représentant de l'Etat, il agit au nom et pour le compte de ce dernier. Cela revient à dire que l'action publique qu'exerce le MP appartient à l'Etat seul et non à ses représentants que sont les OMP et autres. La société seule ayant le droit de punir, c'est à elle seule qu'appartient l'action qui a pour objet la punition du coupable.

La société en délègue seulement l'exercice à des fonctionnaires, des préposés ou à certaines administrations publiques, qui la représentent à ce point de vue, et notamment, en règle générale, à un corps judiciaire, institué dans ce but et désigné collectivement sous le nom de Ministère Public. De ce principe découlent diverses conséquences. Elles se ramènent toutes à l'idée que les préposés du MP n'ont pas le droit de disposer de l'action publique, soit avant de l'avoir intentée, soit après l'avoir mise en mouvement. Seule la société, titulaire du droit de punir, peut décider de ne pas le faire.75(*)

Son pouvoir d'appréciation n'est limité que par soit le pouvoir d'injonction du Ministre de la justice et garde des sceaux soit le pouvoir de citation directe de la partie civile, soit l'absence ou le retrait de la plainte pour certaines infractions, comme par exemple le cas d'adultère ou de grivèlerie. Il faut indiquer ici que ces deux cas sont des infractions qui nécessitent une plainte préalable de la victime pour qu'elles soient recevables.

C'est la raison pour laquelle la société confie à ces fonctionnaires des moyens colossaux pour qu'ils puissent mener des enquêtes sérieuses enfin de découvrir la réalité des faits qui permettra à la société qu'eux représentent de prendre la bonne décision. Telle est la motivation de la puissance publique que l'on confie au Ministère Public dans ses instructions préjuridictionnelles. C'est toujours la raison pour laquelle la société tolère de moins en moins que le MP puisse s'avouer vaincu. On ne tolère pas que le Ministère Public puisse mener des enquêtes et ne pas aboutir aux éléments probants. C'est essentiellement pour cette raison que l'action publique est de l'apanage du MP qui dispose de tous les moyens pour mener à bien l'instruction.

La citation directe constitue donc un moyen de forcer la main au ministère public. Alors que c'est lui qui dispose de la plénitude de l'action publique dans son ressort, alors que c'est lui qui détermine l'opportunité de poursuivre, ce qui signifie qu'il peut même décider de ne pas poursuivre parce qu'il estime qu'il n'y a pas opportunité, la victime de l'infraction ou ses ayants droit peuvent décider de forcer la main au ministère public en s'arrogeant le droit de juger de l'opportunité de poursuites répressives. Le ministère public qui généralement introduit l'affaire devant le tribunal sera simplement invité à se joindre au procès pour venir soutenir l'accusation. Comme toujours, il pourra instruire soit à charge, soit à décharge.

Certes que cela présente d'énormes avantages pour la partie victime de l'infraction, mais il faudra se voiler le visage pour affirmer qu'il n'y a que des avantages à faire usage de la citation directe pour saisir le juge.

Ainsi que nous venons de le soutenir ci-haut, le Ministère Public, exerçant l'action publique au nom et pour le compte de la République, dispose des moyens conséquents pour mener l'instruction et trouver tous les éléments susceptibles de l'aider à soutenir son accusation. Ce qui paradoxalement est loin d'être le cas de la partie victime qui prend l'initiative de déclencher l'action publique.

En effet, lorsque la partie victime prend l'initiative de l'action publique, il lui revient alors de fournir tous les efforts nécessaires pour établir la culpabilité de la partie prévenue. C'est désormais à elle qu'incombe la charge de produire toutes les preuves de la culpabilité du prévenu et non au ministère public.

Or, ainsi que nous l'avons dit, c'est le ministère public qui seul dispose des moyens de l'Etat pour mener à bien l'instruction préparatoire. Il dispose même des prérogatives exorbitantes de droit commun tel le droit à la privation de la liberté, le droit de violer le secret de correspondance, le droit de violer le domicile et par delà la vie privée d'une personne. Le tout se fait dans l'objectif de lui permettre d'avoir toutes les pièces nécessaires dont il a besoin pour prendre une bonne décision sur les poursuites ou l'abandon des charges.

Cependant, toutes ces prérogatives n'étant pas reconnues à une personne privée, il lui est difficile de trouver les éléments nécessaires et suffisants pour soutenir ses prétentions. Ce qui nous laisse dire qu'assez facilement la partie civile peut assister impuissamment à un procès qu'elle va perdre pour défaut de preuves.

Cette situation arrive lorsque la partie civile saisit le juge par citation directe. Dans ce cas, le Ministère public qui généralement est partie principale dans un procès pénal, change de rôle avec cette partie civile dans le chef de laquelle pèse désormais la charge de la preuve. Si tous les éléments soutenant l'accusation sont présentés par la partie victime, partie civile saisissante, le MP pourra alors se joindre à cette accusation et la soutenir. Dans le cas contraire, le MP devra se joindre à l'accusation mais simplement pour plaider à décharge du prévenu.

En somme, non seulement que la partie civile court un grand risque de perdre le procès et par conséquent de perdre ses droits, mais aussi et surtout, elle court le risque de voir la partie prévenue se retourner contre elle en introduisant une demande pour action téméraire et vexatoire, laquelle pourra aboutir au paiement des dommages et intérêts et parfois même à la condamnation pour dénonciation calomnieuse.

En effet, lorsqu'une citation directe est mal fondée, elle peut avoir le caractère d'une dénonciation calomnieuse. Dans ce cas, les poursuites pénales pourront être exercées par le Ministère Public, d'office ou sur une plainte ; elles pourront également être introduites par voie de citation directe par le prévenu calomnieusement traîné en justice par l'action originaire de la partie prétendument lésée.

Il sied alors de rappeler que lorsque la partie civile saisit le juge par citation directe, et que l'instruction de la cause démontre que cette partie, dans le chef de laquelle pèse la charge de la preuve, ne parvient pas à convaincre le juge, et que son action s'apparente alors à une simple dénonciation calomnieuse, la partie prévenue peut, par voie de conclusion, introduire la demande en reconvention pour témérité. Elle pourra alors prendre la mesure civile et solliciter par conséquent la réparation du préjudice subi.

Elle peut tout autant introduire une demande civile, dans ses conclusions, tout comme elle peut, par voie de citation directe, introduire une plainte pour dénonciation calomnieuse. En même temps, le Ministère Public peut également décider, conformément à son rôle traditionnel, qui est celui de rechercher les infractions et de poursuivre en justice leurs auteurs,76(*) saisir le juge soit sur plainte de la partie lésée par l'action de la partie civile, soit d'office. Les deux actions, civile et pénale, ne sont cependant pas exclusives l'une de l'autre.

Par ailleurs, Gabriel Kilala77(*) souligne qu'une condamnation pénale ne peut pas avoir lieu par simple voie de conclusions, sauf par comparution volontaire du calomniateur ; autrement dit, lorsqu'en plaidant, le prévenu conclut à l'action téméraire et vexatoire de la citation directe, même si les faits sont infractionnels, le Ministère Public ne peut pas requérir des sanctions pénales contre l'auteur de cette citation, principalement la partie civile, et le tribunal ne peut pas non plus, de son côté, prononcer des peines contre cette partie.

Dans cette hypothèse, la condamnation pénale ne peut avoir lieu que lorsqu'interpellée sur ces faits infractionnels que constitue la citation téméraire et vexatoire, la partie civile, le calomniateur, renonce aux formalités de citation et accepte de comparaître volontairement. Dans ce cas, le MP peut alors requérir des sanctions pénales tout en requérant le renvoi des fins de poursuites pour le prévenu originaire, compte tenu du non établissement de l'infraction dans son chef, et le tribunal peut maintenant prononcer des peines contre la partie civile, devenue prévenue de l'infraction de dénonciation calomnieuse.

Notons en outre que la citation directe n'est jamais recevable devant la Cour Suprême de Justice et même contre les bénéficiaires de privilège de juridiction de degré inférieur. Ces personnes bénéficient d'un régime spécial, privilégié pour la mise en mouvement de l'action publique à leur charge. Toutes ces personnes ne peuvent, pour les premières, être traduites devant les cours et tribunaux, tout particulièrement être arrêtées qu'avec l'autorisation de l'assemblée nationale ou du sénat, et pour certains faits qu'à la suite de la mise en accusation par le parlement réuni en congrès : pour les secondes, qu'après l'autorisation du Procureur Général.

Il faut observer en fin de compte que la citation directe est une action qui permet à la victime de l'infraction d'être rapidement rétablie dans ses droits et cela sans passer par les péripéties du Ministère Public qui lui peut même décider de ne pas lancer les poursuites. Certes que cette procédure porte des avantages considérables en droit commun, mais elle a aussi des inconvénients. Considérant cette action en droit commun, analysons alors ce qu'il en est de la citation directe devant les juridictions militaires.

* 73 GUILLIEN, Raymond et VINCENT, Jean, Lexique des termes juridiques, 17e édition, Paris, Dalloz, 2010, V°128.

* 74 Art 101 et suivants de la Procédure devant la Cour Suprême de Justice.

* 75 GARRAUD, R, Traité théorique d'instruction criminelle et de procédure pénale, Tome I, Paris, Ed. Sirey et Journal du Palais, 1907, p.87 et ss.

* 76 RASSAT, Michèle-Laure, Le Ministère Public entre son passé et son avenir, Paris, LGDJ, 1967, p.235.

* 77 KILALA Pene-AMUNA, Gabriel, Op.cit, Tome II, p.570.

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