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Perceptions, savoirs locaux et stratégies d'adaptations aux changements climatiques des producteurs des communes d'Adjohoun et de Dangbo au Sud- Est Bénin

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par Clément Olivier CODJIA
Université d'Abomey- Calavi (Bénin ) - Ingénieur agronome 2009
  

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2.1.3. Les savoirs locaux « indigenuos knowledge »

Longtemps négligé pendant la période coloniale et post coloniale, la prise de conscience des savoirs locaux a été suscitée par de nombreux facteurs. Parmi ces facteurs, les plus déterminants ont été d'une part, l'influence des travaux de recherche sur les savoirs locaux enclenchée par la création du Center for Indigenuos Knownledge for Agricultural and Rural

Developement (CIKARD) à Iowa au USA. Par ailleurs, le bilan désenchanté des efforts de développement depuis l'indépendance des pays subsahariens, dû en grande partie au non prise en compte des pratiques et savoirs paysans (Banque Mondial, 2000 ; Warren, 1993) y a également contribué .

Depuis ce regain d'intérêt, une littérature assez variée s'est développée autour du concept « savoirs locaux ». Mais il est important de reconnaître que même s'il est encore connu sous plusieurs autres dénominations telles que « savoir endogène », « savoir paysan » ou « Ethnoscience », etc., le savoir local reste jusqu'à nos jours difficile à déterminer de façon précise.

Pour l'UNESCO (2003), les savoirs locaux désignent les ensembles cumulatifs et complexes de savoir, savoir-faire, pratiques et représentations qui sont perpétués et développés par des personnes ayant une longue histoire d'interaction avec leur environnement naturel. Ces systèmes cognitifs font partie d'un ensemble qui inclut la langue, l'attachement au lieu et à la vision du monde.

Selon Warren (1993), les savoirs locaux représentent l'ensemble des connaissances acquises par une population locale à travers l'accumulation d'expériences et l'interprétation de l'environnement dans une culture donnée. Il comprend les idées, les expériences, les pratiques et les informations qui ont été soit générées localement ou soit produites en dehors de la communauté, mais qui ont été transformées par la population locale et incorporées à travers le temps aux conditions culturels agro-écologiques et socio-économiques locales.

D'après Hountondji (1994), qui souligne l'aspect culturel dans sa définition, le savoir local est une connaissance vécue par la société comme partie intégrante de son héritage. Le savoir local représente le reflet des facteurs agro-écologiques et socio-économiques emboités dans les préférences et traditions culturelles. Tout savoir local est donc relatif à une culture.

Selon la FAO (2005), qui propose une définition conceptuelle, les savoirs locaux sont un ensemble de faits liés au système de concepts, de croyances et de perceptions que les populations puisent dans le monde qui les entoure.

Briggs et Sharp (2003), précisent pour leur part que les savoirs locaux, comme tous les autres types de savoirs (scientifiques, techniques, etc.) sont dynamiques par nature. Il s'agit donc d'une accumulation des connaissances qui a essentiellement pour objectif de réagir à la

modification des conditions du milieu provoquées souvent par les changements des paramètres écologiques et humains (Hountondji, op.cit).

De ces différents points de vue nous pouvons retenir sur la base des éléments de cohérence, que fondamentalement les savoirs locaux sont :

-Fondés sur l'expérience ;

- Souvent testés au cours de siècles d'utilisation ;

- Adaptés à la culture et à l'environnement local ;

- Gravés dans les pratiques de la communauté, les institutions, les relations et les rituels ; - Détenus par les particuliers ou les communautés ;

- Dynamiques et en évolution permanente.

De toutes ces définitions, c'est celle de Warren (1993), qui sera retenue pour notre travail puisqu'elle prend explicitement en compte les savoirs étrangers qui peuvent s'incorporer au savoir local au cours du temps.

Bien que les savoirs locaux soient uniques pour chaque culture ou société ils ne sont pas uniformément répartis au sein de la communauté. A cet effet, une typologie des savoirs locaux nous est proposée par la FAO (op.cit). Elle identifie les trois (03) types de savoirs locaux suivants : le savoir commun, le savoir partagé et le savoir spécialisé.

Le savoir commun est détenu par la plupart des personnes au sein d'une communauté tandis que le savoir partagé est détenu par un bon nombre de membres de la communauté mais pas par tous, par exemple, les villageois qui élèvent des animaux domestiques en sauront plus sur l'élevage que ceux qui n'ont pas d'animaux. Le savoir spécialisé est détenu par quelques personnes qui ont reçu une formation spéciale ou un apprentissage.

Au sein d'une communauté locale, différents groupes de personnes détiennent donc, différents types de savoirs. Cependant, en fonction du type de savoir, la transmission s'effectue de façons différentes. Le savoir commun est intimement lié à la vie quotidienne de la population locale. Il n'a pas besoin de mécanismes spéciaux pour se transmettre. La transmission du savoir spécialisé et du savoir partagé représente un cas différent. Ici la transmission nécessite des mécanismes traditionnels et culturels spécifiques d'échanges d'informations. Ils peuvent être conservés et transmis oralement par les plus anciens ou les spécialistes.

Concernant l'importance des savoirs locaux pour la recherche et le processus de développement agricole, plusieurs aspects se révèlent pertinents pour la présente étude. Dans son rapport 2000 sur les connaissances endogènes, la Banque Mondiale mentionne que les savoirs locaux représentent le capital humain des populations rurales (et urbaines).

Warren et Cashman (1988), mentionne pour leur part que le système de savoirs locaux constitue une ressource stratégique pour la prise de décision dans les sociétés rurales. Il permet de préserver les éléments essentiels pour la stabilité sociale d'une communauté donnée dans un environnement global en perpétuel changement.

Les savoirs locaux présentent néanmoins certaines limites. Ces limites sont étroitement liées à leurs caractéristiques ci-dessus présentées. D'abord, compte tenu de son inégale répartition dans ou à travers les communautés, le savoir local ne doit pas être pris hors de son contexte social, politique et économique (FAO, op.cit). Il doit être exploré et partagé de manière participative et doit bénéficier à toutes les parties impliquées (Hansen et Van Fleet, 2003).

Ensuite, les savoirs locaux ne sont pas exclusifs ou nécessairement suffisants pour faire face à tous les défis que les populations rurales doivent affronter pour leur survie (Banque Mondial, op.cit). Dans ce même sens, Dupré, (1991) cité par Biaou et al. ; (2007) recommande de se garder d'un « fétichisme » qui doterait les savoirs locaux de toutes les vertus qui leur étaient refusées autrefois. Il est important qu'il soit associé à d'autres sources externes de savoir. Puisque, si les paysans savent mieux établir les corrélations entre différents phénomènes ; leurs explications des causes peuvent être toute fois, erronées (Floquet et Mongbo, 1994).

Enfin, par rapport aux savoirs scientifiques formels ou techniques qui sont standardisés, uniformisés et formalisés ; les savoirs locaux sont localisés, contextualisés et empiriques. Aussi, selon Mettrick, (1993), cité par Agossou (2008), la diffusion des savoirs locaux est-elle restreinte à ce dont on peut se rappeler et qui peut se transmettre oralement. De même, si il a des domaines de connaissances dans une large mesure maitrisées par les savoirs locaux et qui peuvent aider la recherche scientifique ; il existe tout de même des données et des concepts que les savoirs locaux ne peuvent détenir parce que nécessitant des travaux expérimentaux, hors de porté des paysans ruraux.

En dépit de ces limites ; Howes et Chambers (1979), cité par Okry (2000), suggèrent un certain nombre d'usages des savoirs locaux dans le domaine du développement :

- l'utilisation du système local de classification comme un moyen plus rapide pour compiler et inventorier les ressources du terroir.

- les savoirs locaux comme source d'inspiration aux scientifiques.

- les savoirs locaux comme source d'hypothèses préliminaires.

- les savoirs locaux comme moyen de correction des erreurs des acteurs externes à la société dans la perception réelle des réalités sociales.

- les savoirs locaux comme canal d'information sur les problèmes environnementaux.

Pour Biaou et al., (op.cit) l'essentiel est de valoriser ce patrimoine pour servir aux objectifs du développement économique et social. C'est dans cette perspective que les savoirs locaux seront pris en compte ici sous l'angle des quatre premiers usages suggérés ci-dessus pour l'analyse des perceptions et des stratégies ainsi que de leurs interrelations.

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