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L'apport de « Héritiers de la Justice » à  l'émergence d'une culture juridique et de paix au Sud- Kivu en RDC

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par Isaac Kitoka Moke Mutondo
Université protestante d'Afrique Centrale (Cameroun ) - Diplôme d'études approfondies en théologie option éthique politique 2006
  

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II.4.3.8. La société civile

L'histoire de la société civile remonte, selon le Dictionnaire de philosophie173, aux grands penseurs du droit naturel tels que HOBBES, LOCKE et ROUSSEAU chez qui elle désignait l'association politique d'Aristote. A partir de HEGEL, le terme société civile aura le sens de l'ensemble des individus dans leur activité économique et leur sphère privée, par opposition à la puissance publique de l'Etat, alors que chez les marxistes, la société civile est l'ensemble des forces qui se déterminent par opposition au pouvoir de l'Etat et du marché. C'est A. GRAMSCI qui, le premier, a parlé de deux types de société civile dont celle qui comprend les organes de gouvernement exerçant de façon coercitive une domination directe sur la société civile et celle qui a pour vocation, à travers les institutions par lesquelles elle s'exprime, d'être productrice d'orientation commune du sentiment publique.

En RD Congo, Jean - François PLOQUIN rappelle que la société civile, comme organisation, tire ses premiers repères dans les préparatifs de la conférence nationale souveraine qui eut lieu d'août 1991 à décembre 1992. La société civile rassemblait toutes les composantes organisées de la société autres que les institutions publiques et les partis politiques : églises, syndicats, organisations professionnelles, ONG, associations féminines, associations sportives et culturelles, mouvements de jeunesse, mutuelles, sociétés savantes, chefs coutumiers et entrepreneurs174. C'est donc en vue de la conférence nationale que se sont constituées des coordinations régionales de la société civile qui restent encore actives aujourd'hui.

L'importance de la société civile en RD Congo ressort, non seulement dans sa reconnaissance comme partie prenante de la conférence nationale souveraine, mais aussi par le fait que le préambule de l'accord global et inclusif sur la transition en RD Congo la considère comme composante et entité du dialogue intercongolais au

173 CH. GODIN (s/dir.), Dictionnaire de philosophie, Fayard, Paris, 2004, p. 1224

174 J. - F. PLOQUIN, « Dialogue inter congolais : la société civile au pied du mur » in Politique africaine n° 84 - décembre 2001, p. 139

même titre que les partis politiques, l'opposition politique, les mouvements rebelles et les Maï Maï en disant :

Le gouvernement de la RD Congo, le Rassemblement congolais pour la démocratie, (RCD), le Mouvement pour la Libération du Congo (MLC), l'opposition politique, les forces vives, le Rassemblement Congolais pour la Démocratie/Mouvement de Libération (RDC/ML, le Rassemblement Congolais pour la Démocratie/National (RCD/N), les Maï - Maï175 ; ...

Cette considération de la société civile comme structure incontournable dans le processus de la construction de la paix en RD Congo est aussi justifiée par PLOQUIN par la place que cette dernière a su prendre sur la scène publique congolaise depuis une dizaine d'années en disant que la vitalité de cette société civile s'explique également par le dynamisme de populations qui ont appris depuis des années à pallier les défaillances, voir l'absence de l'Etat dans de nombreux domaines (enseignement, santé, équipement, etc.), dynamisme canalisé par les initiatives des jeunes diplômés ne trouvant à s'employer ni dans une administration publique déliquescente, atrophiée, ni dans un secteur de l'économie formelle176.

C'est à partir de l'engagement de ses leaders et de l'encadrement de la population que la société civile est devenue une structure influente en RD Congo jusqu'à se tailler une place de choix dans le monde politique. Cependant, elle n'a pas échappé à d'énormes défis qu'elle devait relever : parler haut et juste alors que ses moyens d'expression sont limités et réprimés ; dénoncer les pratiques arbitraires au risque d'être accusée de collusion avec l'ennemi ; s'assurer de l'appui des bailleurs de fonds étrangers sans paraître « à la solde de l'Occident » ; en zone gouvernementale, elle doit trouver le juste milieu entre un radicalisme et un alignement également suicidaires. Outre ces défis, PLOQUIN177 souligne deux défis majeurs que doit vaincre la société civile congolaise étant donné qu'ils fragilisent son action. Il s'agit du défi du maintien de sa cohésion et celui de son indépendance. Parlant de la fragilité de la cohésion de la société civile constituée en fonction de la CNS, l'auteur rappelle que la société civile représentée au sein du parlement de transition, n'a pas tarder à subir la bipolarisation qui divisait la classe politique

175 Accord global et inclusif sur la transition en République Démocratique du Congo signé le 17 décembre

2002

176 J. - F. PLOQUIN, Op. Cit., p. 136

177 Ibid, p. 140

entre « mouvance présidentielle » et « force du changement », servant ainsi parfois d'adjuvant ou de supplétif à l'un ou l'autre des camps en lutte pour le contrôle - ou le partage du pouvoir.

Ce clientélisme de la société civile tant à la période de la CNS que lors du dialogue inter congolais est affirmé avec force par André KABANDA Kana K. qui affirme:

« Clochardisés» par une crise économique qui ne cesse de s'aggraver au jour le jour, les ténors de la société civile se sont laissés embarquer dans le même bateau que l'opposition politique, s'assimilant ainsi à des « marchandises » qui se vendent au plus offrant des manipulateurs. Ce phénomène dégradant s'est illustré dans toute sa splendeur, non seulement pendant la CNS, mais aussi lors de l'accord intervenu, en avril 2002, à Sun City, en République Sud Africaine, entre le gouvernement de Kinshasa et le MLC (Mouvement pour la Libération du Congo) de J. P. Bemba, auquel avait adhéré une bonne partie des délégués de l'opposition non armée et de la société civile178.

En ce qui concerne le Sud - Kivu, la société civile y a joué un rôle déterminant du fait de la relative ancienneté de son tissu associatif et de la maturité politique de ses leaders. Bien que confrontée au dilemme entre dénoncer l'occupant sans donner prise aux accusations d'alliance avec la résistance armée (les Maï Maï) ; des deux côtés, elle doit porter les attentes populaires sans abonder dans de possibles dérives « ethnoracistes », la société civile du Sud- Kivu a joué un rôle non négligeable, non seulement dans l'encadrement de la population, mais aussi à travers :

- Le mémorandum à la délégation du Conseil de sécurité des l'ONU en mai 2001 ; - La participation aux propositions de la société civile de la RD Congo au

Président de la République relatives à la gestion du pays et au dialogue national

(16 février 2001) ;

- La dénonciation de l'occupation de l'Est par le Rwanda et l'Ouganda ; - L'organisation des marches pacifiques, rédaction des pétitions ; etc.

Pourtant, la société civile du Sud - Kivu n'a pas échappé à la prise de position politique pendant la période de transition, prise de position qui l'a rendue subjective et partisane. Le fait que le RDC et le MLC soient parrainés par les pays agresseurs, a fait que, pendant la transition et les élections, la société civile se comporte en

178 A. K. KABAN DA Kana, L'interminable crise du Congo - Kinshasa. Origines et conséquences, L'Harmattan, Paris, 2005, p. 167

représentant du PPRD dans la Province. C'est ce qui l'a conduite à l'intolérance politique, à la culture de casse, de marches non pacifiques, etc.

L'organisation de la société civile au Sud - Kivu comme instance constituée des « forces vives » telles que les ONG, les Eglises, les syndicats, les organisations professionnelles, les associations féminines, les associations sportives et culturelles, les mouvements de jeunesse, les mutuelles, les sociétés savantes, les chefs coutumiers, les entrepreneurs, etc. fait qu'elle nécessite une socialisation juridique étant donné l'importance de la population qu'elle encadre et sa capacité à influencer l'opinion publique dans la Province. Les décrétions des journées villes mortes réussies, des grèves, des soulèvements de la population, sont autant d'éléments qui militent pour l'information et la formation des animateurs de la société civile au droit.

Dans le processus de socialisation juridique à travers la société civile, HJ devra éviter de tomber dans l'erreur de la deuxième République qui, selon Fernand TALA -NGAI179, a consisté à ne pas impliquer la société civile dans la gestion du pays. De ce fait, elle doit collaborer avec les autres structures locales qui travaillent pour la promotion des DH comme le CEDAC, la CDJP, GJ, etc. Ainsi, non seulement la Constitution, les pactes, les conventions ratifiés par le pays tant au niveau régional qu'international devront faire l'objet de cette socialisation, mais aussi toutes les lois de la Républiques étant donné la multiplicité des structures composant la société civile au niveau de la Province.

De ce chapitre, il ressort que la socialisation juridique de la population par HJ n'a pas seulement pour fondement la Bible mais aussi la Constitution de la RD Congo qui présente l'accès aux lois comme un droit pour chaque Congolais et un devoir pour le Pouvoir public. C'est pourquoi, non seulement elle détermine les moyens de cette socialisation juridique, mais aussi elle en fixe les milieux à travers lesquels le pouvoir public pourra l'assurer.

La « défaillance de l'Etat » congolais dans le domaine de la socialisation juridique depuis la Deuxième République a rendu nécessaire le rôle joué par l'Eglise, à travers ses ONGDH, dans le cadre de la promotion et la défense des DH

dans la Province du Sud- Kivu dont HJ. Cependant, pour que la socialisation juridique faite par cette association atteigne toute la population et développe ainsi une culture juridique au Sud - Kivu, elle devra collaborer avec tous les milieux de socialisation encadrant la population dans la Province comme la famille, les confessions religieuses, l'école, l'armée, la police et les services de sécurités, les mutualités tribalo-ethniques, les partis politique, les médias, les syndicats ainsi que la société civile.

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"Tu supportes des injustices; Consoles-toi, le vrai malheur est d'en faire"   Démocrite