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Problématique de la citoyenneté politique des femmes au Togo

( Télécharger le fichier original )
par Alilou TCHAFARAM
Université de Lomé - Togo - maà®trise ès- lettres et sciences humaines 2012
  

Disponible en mode multipage

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UNIVERSITE DE LOME (TOGO)

FACULTE DES LETTRES ET SCIENCES HUMAINES
(FLESH)
********
DEPARTEMENT DE SOCIOLOGIE

PROBLEMATIQUE DE LA CITOYENNETE
POLITIQUE
DES FEMMES AU TOGO

Mémoire

Pour l'obtention du diplôme de maîtrise ès- Lettres et Sciences Humaines

Option : Politique et Communication

Présenté et soutenu par : Sous la direction de:

M. Alilou TCHAFARAM M. S. A. AKAKPO AHIANYO,

Maitre Assistant au Département de Sociologie à l'Université de Lomé

Novembre 2012

 

I

DEDICACE

A la mémoire de ma mère Adam Djowériatou

A notre oncle El Hadj KOURA Souradji pour ses efforts et sacrifices

et

A mes frères et soeurs

II

REMERCIEMENTS

Nous remercions

+ M. Samuel Anani AKAKPO-AHIANYO, maître assistant au Département de Sociologie qui, malgré ses diverses occupations a accepter de nous diriger dans ce travail de recherche ;

+ Les membres du jury qui ont bien voulu consacrer leur précieux temps à l'évaluation de ce mémoire ;

+ Le corps professoral du Département de Sociologie de l'Université de Lomé pour la qualité de leur encadrement ;

+ Les collègues et amis qui nous ont motivé positivement dans la réalisation de ce mémoire ;

+ Tout le personnel de la Direction de l'Entretien Routier (Ministère des Travaux Publics), en particulier, le Directeur M. SEBABE Sayibou, pour le soutien inestimable qu'il nous a apporté ;

+ Tous ceux qui de près ou de loin nous ont aidé spirituellement, moralement ou financièrement pour la finalisation de ce document de recherche.

III

SIGLES ET ACRONYMES

CRIFF : Centre de Recherche, d'Information et de Formation de la

Femme

GF2D : Groupe de réflexion et d'action, Femme, Démocratie et
Développement

WILDAF : Women In Law And Development of Africa

QUIBB :

Questionnaire Unifié sur les Indicateurs de Base de Bien-être

MICS

: Multiple Indicators Cluster Survey (Enquête par grappes à

multiples indicateurs)

CEDEF : Convention sur l'Elimination de toutes formes de

Discrimination à l'Egard des Femmes

Comité d'Unité Togolaise

CUT :

DSRP : Document Stratégique de Réduction de la Pauvreté

PNUD : Programme des Nations Unies pour le Développement

PTP : Parti Togolais du Progrès

OMD : Objectifs du Millénaire pour le Développement

RPT : Rassemblement du Peuple Togolais

SAS : Statistical Analysis System

SPSS : Statistical Package for the Social Sciences

UCPN : Union des Chefs et Population du Nord

UNFT : Union Nationale des Femmes du Togo

IV

SOMMAIRE

DEDICACE I

REMERCIEMENTS II

SIGLES ET ACRONYMES III

INTRODUCTION 5

1ère PARTIE : CADRES THEORIQUE, CONCEPTUEL,PHYSIQUE, HISTORIQUE ET METHODOLOGIQUE

CHAPITRE PREMIER : CADRES THEORIQUE ET CONCEPTUEL 9

I. CADRE THEORIQUE 9

II. CADRE CONCEPTUEL 17

CHAPITRE DEUXIEME : CADRES PHYSIQUE, HISTORIQUE ET APPROCHE METHODOLOGIQUE . 36

I. CADRE PHYSIQUE 36

II. CADRE HISTORIQUE 39

III. APPROCHE METHODOLOGIQUE 45

2ème PARTIE : PRESENTATION, ANALYSE ET INTERPRETATION DES RESULTATS

CHAPITRE TROISIEME : PRESENTATION ET ANALYSE DES DONNEES 51

CHAPITRE QUATRIEME : INTERPRETATION DES RESULTATS 62

CONCLUSION 71

BIBLIOGRAPHIE 73

ANNEXE 75

TABLE DES MATIERES 79

5

INTRODUCTION

La politique est-elle l'affaire des femmes ? Question lancinante à laquelle on ne saurait répondre sans susciter beaucoup de controverses. En effet, la quête d'égalité demeure la préoccupation des femmes africaines. Cette égalité n'est seulement pas affirmée dans les documents sanctionnant les rencontres planétaires mais elle figure également dans les textes fondamentaux de la plupart des nations démocratiques du monde. La Constitution togolaise adoptée en 1992, a mis en place les bases de légitimation d'une politique d'égalité et d'équité de genre en prenant en compte d'une manière explicite la question de genre dans son article 11 « Tous les êtres humains sont égaux en dignité et en droit, l'homme et la femme sont égaux devant la loi ». Aussi le Togo a-t-il ratifié l'ensemble des conventions internationales relatives aux droits de la femme et à l'égalité des sexes, notamment la Convention sur l'Elimination de toutes les formes de Discrimination à l'Egard des Femmes ainsi que le programme d'action de Beijing.

Cependant malgré ces dispositions, les femmes sont toujours à la traine dans les prises de décisions publiques. Dominées dans la sphère privée, elles sont marginalisées dans l'espace politique qui reste largement la chasse gardée des hommes. Les différentes conventions signées et les différentes conférences tenues à ce propos peinent à traduire dans les faits leurs engagements qui semblent des rhétoriques séduisantes masquant une réalité amère.

L'histoire politique de la femme a été marquée par de profonds schèmes de domination et d'asservissement que n'ont jamais cessé de dénoncer les intellectuels. Déjà à son époque, Condorcet fustigeait ce manque d'égard aux femmes dans son article sur l'admission des femmes

au droit de cité, publié le 08 juillet 1790 dans le Journal de la Société de 1789 :

« Ou aucun individu de l'espèce humaine n'a de véritables droits, ou tous ont les mêmes, et celui qui vote contre les droits d'un autre, quels que soient sa religion, sa couleur ou son sexe a dès lors abjuré les siens1 ».

En Afrique généralement, et au Togo en particulier, on assiste depuis l'entrée dans l'ère démocratique à une légère amélioration des conditions des femmes. Ce, grâce à la mobilisation des acteurs sociaux de développement et de tous ceux qui sont sensibles à l'injustice et à l'oppression faites aux femmes. Mais au vu des résultats des diverses initiatives et de la réalité sur le terrain, on s'accorde à admettre que le chemin reste à parcourir pour une véritable promotion de leadership féminin en matière politique. Partout les disparités sont criardes. Au Togo plus précisément, les femmes qui représentent 51% de la population demeurent dans une situation peu enviable. Dominées, défavorisées et clochardisées à outrance dans le domaine social, elles sont marginalisées sinon reléguées au second plan dans le champ politique. Pourtant, elles étaient au devant des luttes pour l'accession du Togo à son indépendance et des scènes ayant présidé l'entrée de la démocratie dans notre pays. Cette situation, loin d'être fatale, nécessite alors une ingéniosité dans la recherche des facteurs et implications afin d'éviter certaines extrapolations et mieux retracer l'histoire politique de la femme togolaise. C'est donc à partir de ce point de vue doctrinal, que va se dérouler notre étude qui s'avère importante afin de reconstituer le cheminement alambiqué de la citoyenneté politique féminine au Togo. Notre étude est articulée autour de deux (2) parties :

6

1 Cité par M.-P. Berenger dans Citoyenneté politique des femmes, 2003

7

V' La 1ère consacrée aux cadres théorique, conceptuel, physique ? historique et méthodologique

V' La 2ème à la présentation, à l'analyse des données et à l'interprétation des résultats.

1ère PARTIE

CADRES THEORIQUE, CONCEPTUEL, PHYSIQUE,
HISTORIQUE ET METHODOLOGIQUE

9

Chapitre premier : Cadre théorique et conceptuel

I. Cadre théorique

I.1 Justification de l'étude

L'inclusion des femmes dans la politique demeure un débat universel. Les femmes, depuis longtemps ont revendiqué d'une manière ou autre leur droit à participer à la gestion de la cité. Déjà en 1790, en Angleterre, Mary Wollstonecraft lorsqu'elle publie A vindication of the Rights of Woman. Pour elle, les femmes partageant une commune humanité avec les hommes, ne sauraient être privées des droits dont ceux-ci jouissent librement. Dans cette même perspective, Olympe de Gouge avant d'être guillotinée au nom du combat féministe, affirmait dans l'article x de sa Déclaration des droits de la femme et de la citoyenne2 : « la femme a le droit de monter à l'échafaud, elle doit avoir également le droit de monter à la tribune ».

Cependant, malgré toutes ces initiatives, cette forte mobilisation autour de la question de participation politique des femmes, on constate que l'espace politique formel demeure largement une exclusivité masculine, les femmes étant toujours sous représentées. Ainsi, en Afrique, les statistiques des Nations Unies indiquent que les femmes ne sont pas représentées à plus de 8% dans les instances de prise de décision.

Au Togo, malgré les rhétoriques séduisantes des textes et de velléités gouvernementales en faveur de l'autonomisation des femmes et de

2 Insatisfaite de la Déclaration universelle de droits de l'homme et de citoyen du 1789 qui à son avis, envisageait l'humanité au masculin, Olympe de Gouge rédige une autre Déclaration où elle décline les droits de l'homme au féminin. L'humanité n'est pas uniquement composée d'hommes mais aussi de femmes.

10

leur représentativité dans l'espace politique, le fossé est encore considérable dans la réalité. Les femmes, en dépit de leur poids démographique (51%) ne représentent que 30% des postes de décision (PNUD). Du coup, cette sous représentativité de la femme dans les instances politiques est perçue par bon nombre comme une illustration d'une amorphie politique, congénitale à la femme togolaise.

Cependant, l'histoire togolaise nous révèle des scénarios riches d'intense engagement et activisme politique de la part de la femme avant les indépendances. En outre, leur participation à la vie publique dépasse celle des hommes car, selon l'enquête QUIBB de 2006 reprise dans le cadre de l'élaboration du Document complet de Stratégie de Réduction de la Pauvreté (DSRP) en 2011, les femmes travaillent plus que les hommes dans la mesure où le taux d'activité chez les femmes est de 79,1% contre 78,5% chez les hommes.

C'est alors, ce dualisme de la figure de la femme togolaise en politique, c'est-à-dire, une femme active et engagée avant les indépendances et une femme presque apathique politiquement juste après qui nous a motivé à opter pour ce thème, et ainsi réhabiliter cette histoire riche de la femme togolaise mais qui à notre sens, demeure peu connue des togolais.

Ensuite, l'intérêt suscité par ce thème, est le constat d'un énorme contraste entre une démographie féminine croissante et leur faible implication dans la vie publique et politique. De ce fait, nous avons voulu par notre étude contribué un temps soit peu aux efforts qui se déploient dans ce domaine, car, la marginalisation des femmes dans le domaine politique constitue un énorme frein au développement économique et à l'épanouissement social. Les femmes du fait de la discrimination, ne peuvent contribuer au progrès de l'humanité en apportant leur science, leur

11

talent, leur ingéniosité. Ainsi des femmes qualifiées, talentueuses se voient écartées de certaines fonctions de direction ou de responsabilité du seul fait qu'elles sont des femmes, alors qu'en exerçant ces fonctions elles auraient pu faciliter la réalisation de progrès considérables et significatifs dans tous les domaines.

12

I.2 Problématique

Pendant longtemps, le pouvoir fut exercé sous forme monarchique et transmis par voie héréditaire. Il y a eu ensuite les oligarchies. C'est tardivement avec la Grèce antique que va débuter l'expérience de la démocratie (Agboyibor, 2010)3. Depuis lors, ce concept va évoluer surtout au tournant du XIXème siècle grâce à l'extension du suffrage universel et progressivement par l'élargissement d'une série de prérogatives reconnues à l'être humain. Aujourd'hui, la démocratie avec l'effondrement de l'idéologie communiste ne se prête plus à aucune confusion sémantique. Elle est une et universelle comme la raison humaine4. Elle est une valeur, celle des valeurs existentielles qui ne sont pas l'apanage d'une partie du corps social fondée sur les différences raciales, religieuses et de sexe mais de l'ensemble du corps social. C'est

alors en cela qu'on parle de citoyen et non de sujet.

Reconnue comme le système dans lequel le pouvoir découle de l'autorité du peuple, la démocratie est fondée sur la reconnaissance en l'être humain d'une intelligence et d'une capacité lui conférant le droit de participer, d'opiner sur les décisions influençant son destin. On ne saurait, alors, parler réellement de la démocratie sans une participation accrue et libre du peuple sur ce qui les concerne en tant que citoyen. Pour Dimitri Georges LAVROFF (1991),

« Le fondement philosophique de la démocratie réside dans la croyance à l'individu et en son droit naturel à participer dans la formation et dans la gestion de la chose publique. L'idée selon laquelle il y a plus de sagesse dans la délibération de plusieurs que dans l'avis d'un

3 Gouvernance politique et sociale en Afrique subsaharienne, Lomé, Fondation FAR, 2010

4 M. Danioué, Cours de Sociologie politique 3ème année, 2008

13

seul, fût-il le plus intelligent. C'est le postulat de base de la

démocratie. »5

Ainsi, la politique ne saurait être l'exclusivité d'une catégorie d'individus dans un pays à régime démocratique. Car la citoyenneté est une et entière, les individus passé du statut de sujet à celui du citoyen, ont acquis leur plein droit de ne plus subir uniquement les lois, mais de les former ou de poser son regard dans leur formation.

Cependant, c'est le constat que l'on semble faire quand on jette un regard synoptique sur l'activité politique africaine en général et togolaise en particulier. Aujourd'hui, la quête d'égalité est plus que jamais une préoccupation des femmes africaines et des Gouvernements. Malgré leur poids démographique écrasant, les femmes sont faiblement représentées dans les instances de décisions publiques. Au Togo, le Gouvernement, conscient de ces rapports inégalitaires entre l'homme et la femme et du statut inférieur réservé à la femme, a établi avec l'appui du PNUD au cours de l'année 2005, un diagnostic des inégalités de genre. Dans le domaine de la gouvernance, le diagnostic a révélé la faible représentativité des femmes dans les postes de décisions que ce soit au sein du Gouvernement où elles ne représentent que 22% de l'effectif des Ministres, à l'Assemblée Nationale et au niveau des autres institutions de la République. Il en est de même dans la gestion politique tant sur le plan national qu'international et dans les centrales syndicales.

Selon les statistiques des Nations-Unies établies en 1995, en Afrique contemporaine, les femmes ne sont pas représentées à plus de 8% dans les instances de prises de décisions politiques. La situation est d'autant plus criarde dans les partis politiques où elles ne servent que du

5 Le système politique français, Paris, Dalloz, 1991

14

faire valoir. Au Togo, depuis 1960, année d'obtention de l'indépendance, il a fallu attendre 40 ans pour voir une femme poindre dans l'arène des élections présidentielles en 2010. En outre, depuis 40 ans d'indépendance, les femmes n'ont eu que deux (2) chances dans les nominations des maires. Il s'agissait de Mme Marie Sivomey à la Mairie de Lomé de 1967 à 1974 et de Mme Sankaredja Tempo à la mairie de Dapaong. Dans le domaine de la communication, le constat est que la plupart des médias audio visuels et les organes de presse sont créés et dirigés par les hommes.

Cette situation pas assez confortable pour les femmes dans le domaine politique a alimenté un certain nombre de préjugés et de mauvaises appréciations sur sa nature réelle. Pour certains, cette amorphie politique féminine leur est innée, congénitale, alors inutile de chercher les causes ailleurs. De telles visions, nous semble - t-il émanerait des esprits ayant une courte vue sur la participation politique de la femme togolaise.

Car, en effet, une rétrospective de l'histoire du Togo regorge d'extraordinaires scènes d'actions politiques de femmes ayant influencé la décision de l'autorité politique de l'époque. Souvent déclenchées par des autorités coloniales qui contrevenaient à leurs intérêts économiques, les révoltes des femmes ont conduit à des remises en cause des décisions de l'autorité politique coloniale (Adjalogo, 2000). Les Togolaises auraient joué un rôle sans précédent dans les luttes indépendantistes et sans doute à en croire Ekué Silivi D'Alméida (1992), l'actuel monument de l'indépendance serait un hommage et une reconnaissance à leur endroit.

Alors, la question fondamentale sur laquelle il faut apporter un éclairage est de savoir à quoi est due réellement cette apathie politique des femmes togolaises ?

Telle est la principale interrogation qui va guider notre

recherche.

15

I.3 Hypothèses

Nous avons retenu dans le cadre de la présente étude, deux types d'hypothèses : une hypothèse principale et des hypothèses secondaires.

I.3.1. Hypothèse principale

L'hypothèse principale retenue est que l'inertie politique des femmes togolaises loin d'être un caractère absolue et inné est un fait ayant origines essentiellement exogènes.

I.3.2. Hypothèses secondaires

Afin d'expliquer cette hypothèse principale, nous retenons les hypothèses secondaires suivantes :

? L'instauration des régimes politiques dictatoriaux après l'indépendance a inhibé le potentiel d'engagement politique de la femme togolaise ;

? Des stéréotypes et des préjugés élaborés par quelques pesanteurs socio culturelles continuent d'acculer la femme togolaise dans la sphère privée en l'empêchant d'exercer pleinement ses droits politiques.

16

I.4 Objectifs

Pour cette étude, nous nous sommes assignés deux types d'objectifs : un objectif général et des objectifs spécifiques.

I.4.1. Objectif général

Généralement, la présente étude vise à relever les implications socio culturelles de l'évolution de la citoyenneté politique de la femme togolaise.

I.4.2. Objectifs spécifiques

Afin de parvenir à cet objectif général, nous avons élaboré les objectifs spécifiques ci-après :

? Montrer que les femmes togolaises ont manifesté leur intérêt à la chose politiques durant la période ayant précédé l'indépendance du Togo ;

? Identifier les facteurs de blocage qui participent à la l'exclusion politique des femmes ;

? Déterminer et mettre en évidence la marginalisation des femmes dans les instances de prises de décision et ainsi que les incidences socio économiques et politique que cela pourrait induire.

17

I.5. Variables et indicateurs

I.5.1. Choix et justification des variables

En science sociale, une variable est un facteur ou une caractéristique pouvant prendre plusieurs valeurs. Dans le cadre de notre recherche, nous distinguons les variables indépendantes ou explicatives et la variable dépendante ou expliquée.

I.5.1.1. Variable dépendante (expliquée)

Elle est en général le phénomène à expliquer. Ici, il s'agit de la citoyenneté politique de la femme togolaise au Togo.

En effet, quand on parle de l'histoire du Togo avant l'indépendance, on oublie souvent cette part non négligeable de l'engagement des femmes. Ce qui fait qu'aux yeux de l'opinion commune, l'apathie politique des femmes est une attitude innée et absolue. Nous voudrions, à travers notre recherche, restaurer l'évolution de la citoyenneté des femmes en revisitant l'histoire politique togolaise.

I.5.1.2. Variables indépendantes (explicatives)

Ce sont celles dont nous cherchons à mesurer et à comprendre

l'influence sur la variable dépendante. Nous avons retenu les variables

suivantes :

- Le paysage littéraire togolais

- Les violences politiques

- Les stéréotypes socioculturels

I.5.1.2.1. Le paysage littéraire togolais

L'histoire d'une société étant reconstituée à travers la documentation et la source orale, nous avons estimé que si l'histoire de la participation politique des femmes est peu connue, c'est parce qu'il

18

n'existe pas une littérature abondante sur le phénomène ou c'est parce que ce phénomène pour des raisons ou autres n'est pas suffisamment porté à la connaissance de la population togolaise. Alors, l'étude de la variable paysage littéraire togolais, nous permettra de mieux appréhender les raisons de la non visibilité ou de la méconnaissance de l'action politique des femmes à cette période.

I.5.1.2.2. Les violences politiques

Depuis les années de l'indépendance, le Togo a connu un cheminement politique plus ou moins mouvementé, ponctué par des actes de violence. Ces actes qui constituent des évènements historiques traumatiques ont fini par installer dans l'esprit de certains togolais et togolaises une aversion systématique du politique. Nous avons voulu à partir de cette variable, de démontrer les causes socio psychologiques de l'inertie politique des femmes.

I.5.1.2.3. Les stéréotypes socioculturels

La société togolaise est une société traditionnelle dont le système matrimonial est profondément ancré sur le patriarcat. Les schèmes de cette culture persiste et continue de façonner les relations humaines. Etant donné que le système patriarcat accule les femmes dans la sphère privée ou domestique et délègue aux hommes le monopole du rôle politique du commandement, alors nous avons cru nécessaire de retenir cette variable pour mettre en évidence les obstacles rencontrées par les femmes dans l'exercice de leur citoyenneté.

19

I.5.2. Indicateurs

Ce sont des manifestations observables et mesurables d'un

concept ou d'une variable. Nous avons retenu les indicateurs suivants :

- Le nombre de femmes dans les instances de décision politique

- Le taux d'alphabétisation

- Le nombre d'ouvrages sur l'histoire politique des femmes togolaises

I.5.2.1. Le nombre de femmes dans les instances de décision politique

L'exclusion politique des femmes est mise en évidence par le fait que les postes de responsabilité dans les instances de décisions politiques. Ainsi, au sein du Gouvernement actuel, sur 31 ministres, on n'a que 7 femmes, soit une valeur relative de 23%. La plupart des Directeurs généraux sont des hommes et au sein de l'Assemblée, sur 81 députés, on ne retrouve que 9 femmes.

I.5.2.2. Le taux d'alphabétisation

L'engagement politique requiert une dose de compétence politique. Au Togo, l'écart entre le taux d'analphabétisme des femmes et des hommes semble se refléter sur leur représentativité et leur participation à la vie politique. En guise d'illustration, pour une même population de garçon et de filles de 17 ans, 78% de garçons sont scolarisés contre 51% côté filles. D'une façon générale, en milieu scolaire, l'indice de parité entre filles/garçons est de 90% dans le primaire et 80% dans le secondaire. Cette disparité d'ordre quantitatif est couplée d'une disparité qualitative avec une orientation factice du système éducatif qui conduit les filles vers les filières courtes et littéraires alors que les garçons sont nettement plus portés vers les filières scientifiques (DSRP 2011).

20

I.5.2.3. Les ouvrages sur la participation politique des femmes

Il n'existe qu'un seul ouvrage, celui de D'Almeida Silivi Ekué, s'étant totalement consacré à mettre en évidence le combat politique des femmes togolaises avant l'indépendance. La plupart des ouvrages existants sur l'histoire politique du Togo, ne l'abordent pas dans une perspective androcentrique. On remarque une quasi récupération par les hommes de l'échiquier politique de l'histoire. Par conséquent, bon nombre de togolais et togolaises ignorent les efforts fournis par les femmes dans ce combat historique. En plus, dans les manuels et programmes scolaires, on constate une réelle troncature sur cet épisode du processus de l'accession à l'indépendance.

21

II. Cadre conceptuel

II.1. Définition des concepts

Selon Emile Durkheim (1895), la définition des concepts s'avère importante dans le processus de recherche pour éviter de tomber dans des confusions sémantiques qui risquent de compliquer la compréhension et l'étude du sujet. Pour notre étude, nous avons retenue les concepts suivants : la citoyenneté, la Démocratie, le pouvoir politique, la Société civile, les groupes de pression, les partis politiques.

II.1.1. citoyenneté

La citoyenneté est la qualité d'un citoyen jouissant de l'ensemble de ces droits civiques dans un Etat ou dans une communauté politique. Elle désigne l'aptitude d'un individu à être titulaire des droits et devoirs et à les assumer pleinement dans un espace politique. Jean-Jacques Rousseau (1966) fut le premier à définir clairement le concept de citoyenneté qu'il analyse comme le passage de l'état de nature à la société civile. Cette notion tient son importance du fait que c'est elle qui confère à l'individu le droit de jouir d'un certain nombre de droits dans la société. Dans l'antiquité Greco romaine, la citoyenneté était définie par la naissance, l'appartenance à une phratrie et la séparation entre le public et le privé. De ce fait, les femmes et les esclaves et les étrangers étaient exclus de la citoyenneté. Aujourd'hui, chaque pays adopte ses propres critères d'octroie de la citoyenneté généralement basé sur le droit du sang, du sol et la naturalisation.

Ainsi, la citoyenneté ne fut pas accordée systématiquement au peuple, à plus forte raison celle liée au domaine politique. D'abord, ce sont les aristocrates supposés mieux appréhender la chose politique qui sont les

22

premiers à en jouir le droit, ensuite les bourgeois, puis une catégorie d'homme nantis (suffrage censitaire), ceux qui sont instruits (suffrage capacitaire). Jusqu'ici, il n'est point question d'étendre le droit à participer au débat politique à la femme. C'est grâce à l'influence des mouvements féministes que tel fut le cas en France 1944. Il convient quand même de préciser que ce sont les auteurs comme Condorcet, Mary Wollstonecraft, Olympe De Gouge, John Locke, John Stuart Mill qui, au 18ème siècle, ont contribué à baliser le chemin de la lutte féminine pour l'accès à la citoyenneté politique.

Cependant, la notion de citoyenneté s'étend bien au-delà de la participation à la vie politique et l'obéissance à la loi. Un citoyen se doit à tout moment de se sentir pleinement responsable du bon fonctionnement de la société dans laquelle il vit. C'est pourquoi la notion de citoyenneté est indissociable de celle de civisme.

II.1.2. Démocratie

La démocratie (du grec demokratia, demos « peuple », kratein, « Gouverner ») est un système politique dans lequel la souveraineté procède de l'ensemble des citoyens. Son principe est le gouvernement du peuple, par le peuple et pour le peuple. Son origine remonte à l'antiquité dans les Etats-cités de la Grèce Classique. Mais son assertion moderne date du 17ème, 18ème siècle à la suite des révolutions qui vont secouer certains pays de l'Europe occidentale longtemps caractérisés par une longue histoire du régime monarchique. Sa pratique revêt plusieurs modalités. On dit qu'elle est directe lorsque le peuple exerce directement son droit de regard à la gestion de la chose publique à travers par exemple le référendum. Elle est indirecte ou représentative lorsque le peuple se manifeste à travers les représentants élus au suffrage. C'est le régime qui

consacre la liberté et l'autonomie de l'individu en lui accordant le privilège d'opiner sur la chose publique.

Néanmoins, la démocratie demeure le moins mauvais des régimes politiques ayant aussi ses limites. En effet, la démocratie n'est qu'un concept vide si tous les citoyens n'ont pas accès à l'information ou à un niveau d'instruction qui leur permette de participer au débat politique. D'ailleurs, le célèbre théoricien de cette démocratie, J-J Rousseau déclarait que la démocratie à l'entendre dans son sens strict, n'est qu'une vue d'esprit, une illusion ; il est contre l'ordre naturel qu'une majorité gouverne une minorité. Se fondant sur la distinction entre gouvernés et gouvernants, il déclarait

« A prendre le terme dans la rigueur de l'acceptation, il n'a jamais existé de véritable démocratie et il n'en existera jamais. Il est contre l'ordre naturel que le plus grand nombre gouverne et que le petit soit gouverné »6.

Pour le politologue italien Giovanni Sartori, la démocratie est le nom pompeux d'une réalité qui n'existe pas.

II.1.3. Groupes de pression/d'intérêt

Outre les partis politiques, l'espace politique est structuré par d'autres organisations. Ce sont des groupes plus ou moins constitués qui de jour ou de nuit, luttent pour la promotion et la défense des intérêts de leur membres auprès des pouvoirs publics. Pour Almond et Powell, un groupe d'intérêt ou de pression est une organisation constituée qui cherche à influencer le pouvoir politique dans un sens favorable aux préoccupations sociales qu'elle prend en charge. Ils se distinguent des foules de manifestants ou de grévistes par leur caractère organisé et des partis politiques par leur volonté uniquement d'exercer la pression sur le pouvoir politique et non de l'exercer ou de le conquérir.

23

6 JJ Rousseau, Contrat social, Paris, Seuil, 1977

24

II.1.5. Partis politiques

Au centre de plusieurs polémiques et controverses, les partis politiques demeurent néanmoins les véritables artisans de la démocratie moderne. Ils symbolisent l'expression du pluralisme démocratique. Parlant de leur origine, les politistes s'accordent pour admettre que si le mot parti s'employait depuis longtemps, la réalité qu'il recouvre aujourd'hui est récente. Jean CHARLOT soulignait que « le mot longtemps était synonyme de tendance, il n'évoquait nullement une organisation institutionnalisée ».

Il existe une pléthore de définitions du terme de parti politique mais la plus synthétique retenue est celle qui se fonde sur la réunion de quatre (4) critères proposés par Joseph La Palombara et Myron Weiner dans Political Partis and Political Development, 1966. Un parti politique se définit donc comme une organisation durable à structure ramifiée qui recherche le soutien populaire pour conquérir et exercer le pouvoir politique.

II.1.4. Pouvoir politique

C'est l'un des concepts le plus important et le plus difficile à définir en Sociologie politique. Etymologiquement, le terme dérive du latin « Potentia » qui signifie aptitude.

En sociologie politique, la notion de pouvoir renvoie à plusieurs approches. Pour Max Weber, auteur de l'approche comportementaliste ou déterministe, le pouvoir est « toute chance de faire triompher au sein d'une relation sociale sa propre volonté, même conte les résistances peu importe ce sur quoi repose cette chance », (Economie et Société). Si pour l'approche comportementaliste, le pouvoir est exercé d'une façon unilatérale, l'approche bidimensionnelle de Peter Bachrach met en évidence une autre face du pouvoir exercé d'une façon subtile, cachée. Dans tous les cas, le pouvoir met en jeu au moins un agent qui affecte les

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attitudes et ou les actions d'autrui. Il demeure l'élément essentiel qui structure les relations humaines. Dans le fameux ouvrage de Daniel Défoé, Robinson de Crusoé, Robinson seul sur son île n'exerçait aucun pouvoir, la relation de pouvoir ne surviendra qu'à la suite de l'apparition de Vendredi.

En ce qui concerne le pouvoir politique, pour Michel Hastings7 sa nature n'est pas accordée de manière objective. Néanmoins, nous pouvons retenir que le pouvoir politique est ce pouvoir institutionnalisé, exercé au sein d'une société à structures bien organisées dont la forme d'achèvement la plus parfaite est l'Etat.

II.1.6. Société civile

D'après l'encyclopédie de l'Agora, la Société civile se définit comme «l'ensemble des rapports inter individuels des structures familiales, sociales, économiques, culturelles, religieuse qui se déploient dans une société donnée en dehors du cadre d'intervention de l'Etat». Le terme est employé pour désigner globalement des personnes et groupes de personne organisées collectivement indépendamment de l'Etat. Sous cette appellation, on retrouve les mouvements, organisations, associations qui agissent pour faire prendre en compte leur valeur et revendication par les décideurs politiques. Les ONG, les syndicats, les associations d'usagers, les groupements paysans, les entreprises font en théorie partie de la société civile. On appellera donc Organisation de la société civile tout corps constitué en groupe de pression ou d'intérêt qui luttent pour la promotion et la défense des droits de l'homme et la démocratie et qui mènent chacun en ce qui le concerne des actions de développement en direction des populations.

7 Aborder la science politique, Paris, Seuil,1996

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II.2. Revue thématique de littérature

Les faits sociaux n'étant pas des épiphénomènes, il est rare qu'un sujet de recherche portant sur un fait social soit unique en son genre. Les faits sociaux naissent, se métamorphosent et offrent des panoramas selon les cultures, les périodes... Ceci étant, on ne pourrait alors s'attendre à des connaissances sui generis se rapportant à ces faits, car la science n'est pas nouvelle, elle est assez vieille et l'intelligence ne se construit pas dans le vide. A ce propos Whitehead affirmait « Toutes les choses importantes qui ont été dites, ont été découvertes par quelqu'un qui ne les a pas inventées. »8

Pour ce qui concerne notre thème, de nombreux travaux de réflexion ont été élaborés la dessus avec quelques petites nuances. Cette abondance de la littérature nous a énormément inspiré dans le cheminement de notre recherche. Comme le disait Georges Gurvitch : « Je me perche sur l'épaule de mon prédécesseur pour mieux voir que lui ».

Cette synthèse de nos lectures nous a permis d'esquisser une revue de la littérature articulée autour de deux thématiques.

? Recension théorique sur la citoyenneté de la femme et l'égalité des sexes,

? Genre et participation politique

? Citoyenneté et démocratie

II.2.1. Recension théorique sur la citoyenneté de la femme et l'égalité des sexes

La discrimination est à l'origine de toutes les formes d'inégalité de genre. C'est pourquoi, dans son article 1er, la Convention sur

8 Repris par Robert King Merton dans The Normative structure of the Science, 1973

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l'Elimination de toutes les Formes de Discrimination à l'Egard des Femmes (CEDEF) a voulu lever l'équivoque sur ce terme en le définissant comme

« ...toute distinction, exclusion ou restriction fondée sur le sexe qui a pour effet ou pour but de compromettre ou de détruire la reconnaissance, la jouissance ou l'exercice par les femmes quel que soit leur état matrimonial, sur la base de l'égalité de l'homme et de la femme, des droits de l'homme et des libertés fondamentales dans les domaines politique, économique, social, culturel et civil ou tout autre domaine. »

L'émancipation des femmes semble après la lutte contre le Sida l'une des préoccupations importantes des acteurs sociaux aujourd'hui. Depuis le 18ème siècle, les voix se sont levées pour libérer les femmes du joug de l'oppression et de la discrimination dont elles ont toujours fait objet. Depuis longtemps les femmes ont été considérées comme des êtres inférieurs aux hommes sous prétexte d'une certaine incapacité naturelle en la maintenant dans cette situation de domination à travers les rôles sociaux qui leur sont assignés.

Pour J. J. Rousseau (1966), le principe explicite de construction de l'ordre social se trouve dans la séparation des sexes et la polarisation du masculin et du féminin à travers l'éducation. Ainsi, dans Emile ou de l'éducation, il appréhende les femmes dans une altérité radicale impliquant leur exclusion politique et leur relégation dans le privé. La société politique créée par le postulat philosophique Rousseauiste est une société exclusivement masculine puisque les femmes étant reléguées à la sphère privée. D'ailleurs dans son ouvrage, le Contrat social conçu comme un arrachement radical de l'homme de son penchant naturel, il ne dit aucun mot sur les femmes ; néanmoins cet ouvrage a le mérite de se dresser comme l'esquisse de l'Etat de droit et de la démocratie. Mais c'est surtout avec l'Emile ou de l'éducation que Rousseau démontre amplement sa vision réductrice à l'égard de l'image féminine. Ainsi à travers Sophie, un

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personnage clé de cet ouvrage, il pense que le rôle essentiel de la femme se résume à la tenue du foyer et à l'éducation des enfants. Selon lui, la construction d'un ordre social juste passe par la séparation stricte des sexes et de la polarisation du masculin et du féminin à travers l'éducation. Donc point de promiscuité de sexe dans les rôles sociaux, la séparation doit être de mise comme l'illustre les propos de Géneviève Fraisse9 : aux femmes, « la fabrique des moeurs » dans le « gouvernement domestique » et aux hommes, « la fabrique des lois » dans «le gouvernement de la cité ». Dans cette situation, la femme étant à la merci du jugement des hommes, le rôle de l'éducation est de lui inculquer les notions de pudeur et de modestie, vertus cardinales pour plaire aux hommes et mieux s'asservir à eux.

Abordant dans le même sens, dans l'ouvrage de Michèle Riot-Sarcey10, Amar, le rapporteur du comité général de sûreté, estimait que les fonctions privées auxquelles sont destinées les femmes par la nature ne tiennent qu'à l'ordre général de la société, cet ordre résulte de la différence qu'il y a entre l'homme et la femme. Chaque sexe est alors appelé à un type d'occupation qui lui est propre. Son action ne peut être circonscrite que dans ce cercle qu'il ne peut franchir puisqu'imposé par la nature. C'est donc derrière cet argument naturaliste d'une prétendue incapacité naturelle des femmes que se rangent la plupart des savants ayant cautionné cette différenciation sexuelle arbitraire et inique des rôles sociaux. Existe-t-il réellement une nature féminine particulière ? Comment s'opère ce façonnement de préjugés de sorte qu'ils apparaissent acceptables dans l'esprit des gens. A ce propos, parlant de la différenciation sociale des sexes, Simon de Beauvoir (1976) avait déjà souligné son fondement social

9 « Les deux gouvernements : la Famille et la Cité », in Sadoun M. (dir), La démocratie en France, tome 2, Paris, Gallimard, 2000

10 Histoire du féminisme, Paris, La Découverte, 2002

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et culturel. C'est qu'elle tente de mettre en évidence dans son aphorisme : « On ne nait pas femme, on le devient »11. Il n'y a pas une féminité préétablie susceptible de justifier la marginalisation des femmes.

Ce cloisonnement des rôles sociaux fondé sur l'appartenance biologique qui fait de la femme la tenante de la sphère domestique et de l'homme, le détenteur du rôle politique de la société serait lié au processus de socialisation différentielle, source d'inégalité profonde dans la société. Le fait de montrer dès leurs bas âges des attitudes motrices, l'affirmation physique et des dispositions viriles puis à la femme des attitudes coquettes, dociles et accueillantes semble délimiter ou retracer la trajectoire de chaque individu. Ce processus est renforcé par le mécanisme d'identification qui s'opère dans l'évolution de chaque personne.

Pour Pierre Bourdieu12, la lieutenance masculine dans la sphère politique serait liée à un processus d'intériorisation des pratiques socioculturelles qui à force d'être répétées tendent à se naturaliser et à devenir comme normales. Ainsi, les femmes pensent que c'est à elles qu'incombent l'accomplissement des travaux domestiques et aux hommes la responsabilité politique de la société. Dans cette perspective, la famille, l'église et l'Etat constituent les structures privilégiées de culture et de perpétuation de cette domination masculine. Il précise que cette domination n'est nullement un fait de nature mais le résultat d'un processus permanent de reproduction sociale.

II.2.2. Genre et participation politique

Le mot genre est la traduction du mot anglais gender. Ce terme est apparu pour la première fois en 1972 (dans un ouvrage d 'Ann Oaklay)

11 Le deuxième sexe1, Paris, Gallimard, 1976

12 La domination masculine, Paris, Seuil, 1998

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et s'est progressivement répandu à partir des années 80. Il propose de faire la distinction entre la dimension biologique (sexe) et la dimension culturelle (genre). Selon Ayesha M. Iman et al (2004), le mot sexe comporte une connotation physio biologique (chromosome, hormone) par contre le terme genre fait référence aux constructions sociales et historiques des rôles, des comportements, des attributs entre les hommes et les femmes et qui se caractérisent par des inégalités.

Le tableau suivant nous édifiera plus sur la distinction entre les deux terminologies.

SEXE

GENRE

 

Fait référence aux différences biologiques qui sont universelles « sexe biologique »

Fait référence aux différences culturelles construites par la société, et qui varient selon le milieu social, le contexte culturel... /

« sexe social »

 
 

Caractère inné : défini à la naissance

Caractère acquis : appris, non défini à la naissance

 
 

Ne change généralement pas au cours

du temps

Peut changer au cours du temps

 
 
 

Exemples :

Exemples :

Le père et la mère peuvent donner le biberon a un enfant (il n'est pas

Seules les femmes peuvent mettre au
monde un enfant

Seuls les hommes ont de la barbe

déterminé « biologiquement que seules les femmes peuvent nourrir un enfant »)

Les hommes et les femmes peuvent exercer des responsabilités politiques (il n'y a pas d'obstacle « physique », biologique à la participation des femmes en politique »

Source : recherche sur le net

Pour sa part, Joan Scott (1988), souligne que le genre renvoie à l'organisation sociale de la différence sexuelle. Mais ceci ne veut pas dire que le genre reflète ou met en oeuvre les différences établies et naturelles entre les hommes et les femmes plutôt, il renvoie à la connaissance qui confère des sens aux différences corporelles. Ces sens varient selon les cultures, les groupes sociaux et dans le temps, car rien de ce qui concerne le corps y compris les organes reproductifs des femmes et des hommes ne

détermine de façon univoque comment les divisions sociales seront établies.

La réalisation de l'idéal démocratique passe par l'observation d'un certain nombre de principes dont la participation politique. Celle-ci est définie selon Denni comme « l'ensemble distinct et homogène des activités par lesquelles la masse des citoyens est habilitée à entrer en contact avec le monde séparé du pouvoir en respectant certaines contraintes »13. Cette reconnaissance en la femme de la capacité d'opiner sur la chose publique ne fut pas systématique, mais le résultat d'âpres luttes et de sacrifices.

Ainsi dans Les Américaines, Histoires des femmes aux Etats-Unis (1989), Sara Evans retrace les péripéties du combat des femmes américaines pour leur émancipation civique et politique. Alors que les premières histoires des femmes écrites dans les années 70 s'intéressaient exclusivement à la vie privée et familiale et perpétuant involontairement l'éloignement de la femme de l'espace plus large du pouvoir et de la politique, Sara Evans restitue aux américaines leur rôle essentiel dans l'évolution de leur pays. En décrivant la vie des femmes - indiennes, noires, femmes de la Frontière- elle montre comment les américaines ont constamment redéfini leur place dans la société et transformé les rapports sociaux. Un accent plus particulier sera accordé aux associations féministes dont les programmes novateurs vont ouvrir la voie aux reformes sociales mises en oeuvre par l'Etat américain.

Pour Cynthia Harrison (1995), dans son article « Du foyer au parlement, l'évolution du rôle de la femme dans la société américaine » ; la participation paritaire des genres tant à la politique qu'à la prise de

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13 Cité par Michel Hastings : Aborder la Science Politique, Paris, Seuil, 1996 p. 57

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décision est un immense chantier moderne qui caractérise le combat de tous ceux qui luttent pour la cause des femmes et de l'égalité entre les sexes.

Yvette Roudy (1982)14 de sa part estime que le droit politique fut sans doute de tous les droits, le plus difficile à arracher puisque ce là on s'approche du pouvoir jalousement gardé. La démocratie n'a jamais existé à l'état naturel. Ainsi, de tous les combats politiques, celui des femmes a été et demeure encore plus long parce que ouvert sur un double front : le combat pour la cause générale et celle spécifique. Les femmes sont exclues de la jouissance des droits pour lesquels elles ont combattu comme ce fut le cas en France après la Révolution. De ce fait, elles sont devenues majoritaires par le nombre, minoritaires quant au pouvoir compliquant ainsi leur lutte. Dès lors, l'auteur fustige le système capitaliste fondement de ces inégalités et de cette marginalisation des femmes par l'érection d'un pseudo principe libéral et d'égalité.

En outre, partant d'un parallélisme entre féminisme et Socialisme, Yvette Roudy préconise que toute lutte pour la cause féminine doit s'inspirer des principes socialistes pour ne pas faire frais du système capitaliste car si les femmes luttent seules elles risquent de se marginaliser davantage et si elles se déversent dans des partis politiques elles retombent sous la coupe des hommes rendant ainsi vains les efforts pour son épanouissement et sa participation.

II.2.3. Citoyenneté politique et démocratie

Le terme citoyenneté est une émanation gréco romaine. Selon Microsoft Encarta 2009, La notion de citoyenneté remonte à l'Antiquité : elle a été inventée par les Grecs et surtout pratiquée par les Romains. Il

14 La femme en marge, Paris, Flammarion, 1982

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désignait à cette époque, toute personne qui, par sa fortune et sa renommée, est appelé à exercer une autorité politique.

En effet, dans la cité grecque, le citoyen se distinguait à l'aune de trois (3) critères majeurs : le sexe, la filiation, la renommée ou la fortune. Est alors citoyen tout homme né d'un père athénien, disposant d'un cens et ayant accompli son service militaire. C'est dans cette optique que les femmes, les esclaves et les étrangers furent mis à l'écart de la gestion politique. Dans ces conditions, la citoyenneté se réduisait à la dimension politique, autrement dit, citoyenneté et citoyenneté politique étaient deux termes interchangeables. De ce fait, on s'aperçoit que la pratique de la démocratie est intimement liée à la définition de la citoyenneté, soit inclusive soit exclusive. C'est au 18ème siècle, qu'on assiste à l'éclatement du concept avec les différentes révolutions. Ainsi, pour Terence Humphrey Marshal, dans son Essai Social Class and Citizenship, publié en 1950, il est inconcevable de séparer les droits de la citoyenneté les uns des autres ou de les subordonner les uns aux autres, mais il est possible de les périodiser dans le temps. Ainsi, sur son échelle temporelle de l'évolution de la citoyenneté, se trouvent en premier lieu les droits civils, ensuite ceux politiques et enfin les droits sociaux.

Dans La citoyenneté politique des femmes15, Berengère Marques Pereira exprime la citoyenneté politique des femmes en deux modèles d'inclusion à la démocratie : l'un «par le bas » à travers une citoyenneté sise dans la société civile et une démocratie participative, et l'autre «par le haut » à travers une citoyenneté politique et une démocratie représentative. Cela suppose une possibilité pour les femmes d'accéder à des ressources

15 Bérengère, M.-P, Paris, Armand Colin, 2003

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permanentes et rechercher des solutions à leurs problèmes à travers une participation sociale et politique, qu'elle soit d'ordre contestataire ou institutionnelle.

Ce point de vue est corroboré par l'ouvrage collectif, Le politique par le bas en Afrique noire16. Cet ouvrage expose quelques traits de ce type de participation animé par les femmes de Lomé dans les années de dictature politique au Togo. On s'aperçoit alors que les formes protestataires et associatives étaient les canaux de prédilection par lesquels elles passent pour influencer le pouvoir politique. Ce faisant, elles étaient uniquement porteuses des intérêts et revendications populaires, relatives à l'amélioration de leur bien être. Du coup, elles n'ont pas su négocier leur accès aux véritables leviers du pouvoir afin de jouer un rôle politique de 1er plan. Ce qui a fait qu'elles n'ont pas vite capitalisé leur énorme investissement.

Envisager alors la citoyenneté des femmes sous un double angle de représentation et de participation c'est éviter de réduire la citoyenneté à une activité élitiste et mettre en lumière une autre forme de citoyenneté sise dans la société civile et dans d'autres mouvements sociaux.

Dans la même foulée, Cathérina Coquery Vidrovitch17, décrit dans son ouvrage le rôle politique des femmes dans les luttes de la libération coloniale dans divers pays de l'Afrique subsaharienne exposant ainsi une autre image de la femme africaine soumise à de profondes mutations. Cet ouvrage se veut comme une vitrine idéale de la réalité féminine africaine tant qu'il fait miroiter un certain espoir sur son

16 C.Toulabor et al., Paris, Karthala, 2008

17 Les Africaines : Histoire des femmes d'Afrique noires du XIXe au XXe siècle, Paris, Dessjonquères, 1994

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émancipation et tronque les images et les conceptions bourrées de préjugés dont on se faisait de la femme dans ces sociétés.

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Chapitre deuxième : Cadre physique, historique et

approche méthodologique

I. Cadre physique

I.1. Géographie

Ville du sud du Togo, Lomé la capitale du Togo est située entre la latitude 6°10 Nord et la longitude 1°15 Est. C'est une ville côtière de basse altitude longeant le Golfe de Guinée et étendue sur une superficie de 90 km2. Elle est située à l'extrême sud-ouest du Togo et limitée au Nord par la préfecture de Zio, à l'Est par la préfecture des Lacs, à l'Ouest par Aflao (Ghana) et Kévé et au Sud par le Golfe de Guinée. L'extension urbaine a changé la configuration de la ville. On parle aujourd'hui de la grande agglomération de Lomé pour désigner Lomé commune (les cinq arrondissements) et Lomé golfe (les centres urbains périphériques à savoir les cantons d'Agoé, d'Adidogomé et de Baguida).(wikipédia)

I.2. Historique du peuplement

La ville fut fondée par les Ewé au XVIIIème siècle et devient la capitale de la colonie allemande appelée alors Togoland en 1897. Lomé vient de «Alotimé» qui en Ewé signifie « au milieu des plantes d'Alo » (Alo est un arbre dont le tronc est encore aujourd'hui la principale source de cure-dent au Sud Togo). Le chasseur Dzitri qui fut le fondateur de la ville s'était en effet installé à l'intérieur de ces arbres qui dominaient alors le site historique de Lomé.

Si Lomé est devenu un centre d'affaires incontournable dans la sous région, cela tient en grande partie de son historique. En effet, les facteurs économiques auraient un choix prépondérant dans la création de cette ville. A la fin du XIXème siècle, les taxes douanières britanniques

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pèsent très lourdement sur les produits importés comme l'alcool et le tabac. Ainsi, les commerçants situés entre Aflao et Kéta à l'ouest de la frontière avaient donc besoin d'un lieu où débarquer les marchandises hors d'atteintes douanières. C'est dans ce souci d'échapper aux impôts britanniques que Lomé naquit vers1886. Le littoral jusqu'alors peu habité commença rapidement à se peupler.

Lomé n'est ni une ville coloniale (construite et établie par les puissances coloniales), ni une ville traditionnelle mais c'est une ville cosmopolite qui évolue à un rythme fulgurant et où la tradition et la modernité se mêlent à merveille selon l'adage « c'est au bout de l'ancienne corde qu'on tisse la nouvelle ». G. Lambony et K. Nyassogbo (dir) (2007)

I.3. Aspects socio économique

Lomé est une importante plaque tournante de l'économie togolaise. Véritable centre d'affaires de la sous région, la ville est économiquement reconnue par son gigantesque marché et son port en eau profonde qui dessert les pays de l'hinterland. L'histoire économique de Lomé demeure indissociable avec les célèbres Nana Benz qui furent parmi les premiers acteurs économiques de cette ville. Plusieurs unités de production concourent dans la dynamique économique de Lomé notamment CIMTOGO, la Brasserie de Lomé, la Société de Grand Moulin du Togo et d'autres encore regroupées au sein de la zone franche.

Sous un angle socioéconomique, les données fournies par le DSRP 2011 sur la base des enquêtes QUIBB réalisées en 2006 estiment que la pauvreté touche 27,6% de la population loméenne. Cette pauvreté est plus accentuée dans les périphéries de Lomé où l'incidence de la pauvreté est de 39,3% alors qu'elle est de 22,5% dans la commune de Lomé. Le taux brut de scolarisation est de 127% pour les garçons et 104%

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pour les filles avec un indice de parité de 0,82 ; ce qui prouve que les garçons sont légèrement plus scolarisés que les filles. (DRSP 2011)

I.4. Caractéristiques sociodémographiques

La population de la commune de Lomé est estimée à 837437 habitants selon les données provenant du Recensement Général de la Population et de l'Habitat (RGPH) de 2010. Elle est composée de 401 172 hommes et de 436 265 femmes. A l'image du pays, c'est une ville caractérisée par une extrême jeunesse. 60 % de la population est âgée de moins de 25 ans et 42% âgée de moins de 15 ans. De part sa population, Lomé est la plus grande cité du pays et concentre avec les centres urbains périphériques (Lomé Golfe) 23,9% de la population nationale.

Sur le plan linguistique, Lomé est une capitale cosmopolite où de très nombreuses langues et dialectes sont parlés. Toutefois, le Mina reste la langue véhiculaire, dominante dans les conversations courantes.

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II. Cadre historique

II.1. Esquisse de l'historique de la participation politique des femmes au Togo

L'histoire de la vie politique togolaise fut menée d'abord dans le cadre associatif avant que les partis politiques n'entrent dans la danse18. En effet, les Togolais dans la lutte pour accéder à leur destin naturel, durent s'organiser d'abord en associations et en de divers mouvements sociaux entre autres le Bund, les Duawo et la All Ewé Conference (Yagla, 1992). Il a fallu attendre l'année 1946 pour voir poindre les premiers mouvements politiques luttant plus ou moins pour la même cause. Alors, que ce soit au sein des partis politiques ou dans les associations, les femmes ont pris une part très active contrairement à ce que certains intellectuels semblent faire croire.

A analyser les littératures existantes sur l'histoire du Togo, on s'aperçoit que l'accession du Togo à l'indépendance n'a pas été le fruit d'une lutte uniquement masculine. Mais le constat est que beaucoup tendent à tronquer le rôle non négligeable que les femmes togolaises ont joué dans cette âpre lutte. Et pourtant, il y a eu des vaillantes femmes d'Ablodé qui se sont fait remarquer à travers leurs luttes surtout dans le dernier corps à corps décisif qui précédait la saisissante victoire du 27 avril 1958.

18 En effet à partir de 1945, avec l'adoption de la charte des Nations Unies en 1945 consacrant le remplacement du régime de mandat par celui de la tutelle avec l'extension d'un certain nombre de droits politiques aux indigènes histoire de les amener progressivement vers la capacité à s'administrer eux-mêmes, la France fut obligée d'entreprendre certaines réformes à savoir la représentation des indigènes à l'Assemblée Nationale Française et la création d'une Assemblée Représentative Territoriale). C'est ce qui va ouvrir la voie à la démocratie représentative (compétitive) qui nécessite la création des partis pour rafler les voix électorales.

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Bien avant 1946, année de la naissance de la démocratie représentative coloniale qui va donner la voie à la création des premiers partis politiques, les femmes avaient déjà commencé à attaquer l'édifice colonial. En effet, la révolte des 24-25 janvier 1933 fut essentiellement menée par les femmes (d'Almeida Ekué, op. cit). Elles ont manifesté leur mécontentement face à la politique fiscale introduite par le Gouverneur Robert De Guise qui cru bon de résoudre les problèmes financiers nés de la crise économique de 29 en augmentant les taux des taxes existantes et en créant de nouvelles. Cette mesure sadique dont la principale cible fut les femmes (les revendeuses du grand marché de Lomé) n'a pas eu une longue durée de vie. Sous l'instigation du mouvement DUAWO (ensemble du peuple), les femmes, courroucées par l'arrestation de ceux qu'on peut appeler leurs meneurs, organisèrent une manifestation qui déboucha sur une tuerie camouflée de la part de l'administration coloniale.

En outre, les historiens sont unanimes à dire aujourd'hui que la guerre libératrice du Togo pour s'affranchir du joug colonial aura été très largement la guerre des togolaises. Car, avec la naissance des partis politiques à partir de 1946, les femmes togolaises notamment les revendeuses de Lomé vont livrer au monde un extraordinaire exemple du patriotisme. Elles vont apparaitre comme des véritables pivots du combat politique pour la libération du Togo. Téméraires, malgré l'interdiction formelle des tracts, elles arrivaient à les dissimuler dans leurs pagnes ou encore dans leur chargement des produits de vente. Infatigables argentières pour la noble cause, elles étaient les principales pourvoyeuses des fonds pour les partis politiques qui luttaient pour l'émancipation du Togo du carcan colonial. Dans son ouvrage, La palpitante quête de l'Ablodé, l'historien togolais Godwin Tété Adjalogo voyait à travers la

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participation de la femme togolaise à la lutte pour l'indépendance, un phénomène social digne d'une attention particulière.

S'il faut remonter le cours de l'histoire et se focaliser ne serait-ce que sur l'envoi des pétitions à la tribune des Nations Unies, la part des femmes dans la lutte est non négligeable, même si elle était revêtue d'un caractère beaucoup plus financier. Sur ce plan, les femmes détaillantes, semi grossistes et grossistes ont pesé de tout leur poids dans la balance. Le climat d'émulation qui présidait à toutes leurs activités à l'intérieur des partis a favorisé la rentrée des fonds à tel point que certains hommes ne reconnaissaient aux femmes que le rôle de soutien financier dans la lutte pour l'indépendance.

Cependant, malgré tout ces sacrifices consentis pour la noble cause de l'indépendance, les femmes ont été réduites juste après en silence, écartées de la vie politique sinon transformées en de célèbres incantatrices et danseuses des chansons d'animation à allure dithyrambique à l'endroit du pouvoir politique post colonial. En effet, après les années euphoriques de l'indépendance, les diverses crises socio politiques qui ont secoué le pouvoir politique togolais n'était pas de nature à favoriser un activisme politique de la femme. En 1969, comme c'était le cas dans la plus part des pays subsahariens indépendants à cette époque, le RPT fut créé dans le souci de forger une véritable nation en faisant disparaitre des divergences de tout ordre. Désormais, tout devrait se fondre dans ce parti unique considéré comme un creuset national. Ce nouvel épisode politique va sérieusement entamer les velléités de l'exercice de la citoyenneté de la femme togolaise, car en dehors du cadre de l'UNFT qui était l'une des ailes marchantes du RPT, la femme togolaise n'avait pas d'autres passerelles lui permettant d'opiner librement et d'amorcer un véritable processus d'individuation politique.

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L'on avait pensé que l'image de la femme politique togolaise serait revalorisée au gré des évènements de 1990, avec l'amorce du processus de démocratisation. Mais les circonstances fondamentalement violentes et les troubles socio politiques qui en ont suivi, ont tacitement conduit à une exclusion politique des femmes, puisque celle-ci se sont repliées davantage sur leur sphère privée et ont relégué la politique au second plan. Mais le monde évolue, imprimant un nouveau souffle dans l'esprit des hommes, une nouvelle manière de penser et d'appréhender les relations sociales. Depuis ce, l'on commence à voir une lente ascension de la femme dans la sphère politique et publique. Les femmes commencent par être consultées dans divers sujets touchant à la vie de la République. Elles étaient à Ouagadougou lors de la Signature de l'accord Politique Global. Leur opinion est souhaitée dans toutes les versions des Cadres Permanents de Dialogue et de Concertation (CPDC) pour discuter des réformes institutionnelles et constitutionnelles.

Cependant, vu les progrès timorés, la participation politique de la femme togolaise demeure un vaste et délicat chantier à construire eu égards aux innombrables obstacles qui parsèment ce domaine.

II.2. Parallélisme de l'évolution de la citoyenneté politique des femmes en France et au Togo

La citoyenneté politique des femmes françaises s'apparente à bien des égards à celles des togolaises. En effet, tout comme les luttes féminines pour l'indépendance au Togo, les femmes françaises ont activement participé à la prise de la Bastille et à mettre fin à l'Ancien régime caractérisé par l'autoritarisme monarchique et la brimade des droits fondamentaux. Elles étaient là dans les Clubs révolutionnaires et dans les rues portant les armes. Pourtant, une fois la liberté acquise, ces femmes

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sont exclues de la citoyenneté active d'autant plus que la Constitution rédigée à l'issue de la Révolution, ne reconnaissait pas le droit à la femme, le droit à participer à la chose publique. Sieyès, l'un des artisans de la Constitution françaises de 1789, dans son Préliminaire à la Constitution française, situait les femmes du côté des citoyens passifs, tout en laissant la porte ouverte à une évolution ultérieure en ce qui concerne l'exercice de leur droit politique :

«Tous les habitants d'un pays doivent y jouir des droits des citoyens passifs, tous ont droit à la protection de leur personne, de leur propriété, de leur liberté, etc., mais tous n'ont pas droit à prendre une part active dans la formation des pouvoirs publics... ».

C'est pourquoi certains penseurs n'ont pas hésité à dire que la révolution française a inauguré une démocratie exclusive et non inclusive.

A partir de 1790, malgré le rehaussement des voix minoritaires en faveur de l'inclusion politique des femmes, initiatives d'un certain Condorcet, d'Olympe de Gouges, la voie à l'espace public et politique leur était toujours verrouillée. Pourtant elles purent bénéficier des réformes civiles notamment celles concernant l'héritage, le mariage et le divorce.

L'instauration du suffrage universel en 1848, avait suscité un grand espoir quant au sort politique de la femme française. Mais, l'ostracisme par rapport aux femmes était maintenu. C'est avec le processus de sécularisation amorcé en 1905, favorisant la chute de l'influence de l'Eglise sur l'Etat et surtout le premier conflit mondial, que la femme française se voit octroyer le droit de vote en 1944 avec l'extension du suffrage universel. En résumé, que ce soit en France ou au Togo, à cette époque, tout se passe comme si quand les femmes luttent pour la démocratie, c'est pour finalement se faire gouverner par les hommes. On n'entend par méthodologie, l'approche ou la démarche adoptée pour

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pouvoir mener la recherche. C'est une étape importante du processus de recherche, car c'est elle qui conditionne la validité des résultats de notre étude et donne à la recherche un caractère scientifique.

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III. Approche méthodologique

Pour notre étude, nous avons retenu les méthodes qualitatives et quantitatives, le tout soutenu par une recherche documentaire.

III.1. Méthode qualitative

C'est une méthode empruntée à la psychanalyse qui permet à l'enquêteur (chercheur) dans un véritable face-à-face, de recueillir les motivations et mobiles du comportement ou attitude d'un individu sur un comportement donné à l'aide d'un guide d'entretien. C'est une méthode très féconde en science sociale qui souvent vient compléter ou devancer les méthodes quantitatives. Elle permet d'approfondir, de creuser les réponses par les questions portant sur le choix, les préférences et les motivations du comportement de l'enquêté. Il en existe plusieurs types. Pour notre recherche, nous avons retenu l'entretien individuel qui est une technique qualitative de collecte de données qui met dans un véritable face-à-face un enquêteur muni d'un guide d'entretien (Annexe) puis un enquêté qui répond aux questions contenu dans le guide.

Cependant, pour des raisons diverses, nous n'avons pas pu interroger plusieurs personnes dans le cadre de cette technique.

III.2. Méthode quantitative

L'enquête quantitative est une technique de recueil d'éléments standardisés en nombre importants qui permet la mesure, la quantification, la comparaison et l'extrapolation. Son principal intérêt est qu'il permet d'appréhender une réalité mal connue et de la filtrer en construisant un plan d'observation en fonction des questions qu'on se pose. Cette enquête s'appuie essentiellement sur un instrument de collecte de données qui est

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un ensemble de questions rédigées méthodiquement en vue d'atteindre un objectif.

Elle comprend plusieurs étapes.

III.2. 1. L'univers d'enquête

Il désigne les individus qui peuvent entrer dans le champ de

l'enquête d'où nous allons tirer notre échantillon. Pour cette étude, il est composé d'hommes et de femmes plus ou moins âgés, aptes à comprendre la thématique de la citoyenneté politique de la femme et à nous livrer les informations y relatives.

III.2.2. Le questionnaire

Il est l'outil de toute opération de collecte de données

quantitatives. Il est élaboré sur la base des objectifs généraux et spécifiques qui sont transformés en une succession de questions pouvant permettre d'apporter une réponse aux hypothèses de recherche.

Pour cette étude, un questionnaire semi structuré est élaboré comportant des questions ouvertes et fermées, des questions de fait ou d'opinion. Il est subdivisé en quatre (4) sections :

- Section I : Identification

- Section II : Attitude et perception

- Section III : Connaissance sur l'historique de l'engagement politique des femmes togolaises

- Section IV : Causes du déclin de la citoyenneté politique des femmes togolaises

III.2.3. Le groupe cible

Prioritairement l'étude portera sur les étudiants, les cadres

administratifs et le corps enseignant.

III.2. 4. L'échantillonnage

En raison de certaines contraintes, il nous est pratiquement difficile, voire impossible d'interroger toutes les personnes appartenant à notre groupe cible. Pour cela, nous avons prélevé de ce groupe cible, un petit groupe d'individus plus ou moins représentatif appelé échantillon et qui sera effectivement interrogé. L'échantillonnage est alors l'opération qui consiste en l'observation d'une partie de la population d'un groupe cible en terme de question de recherche en vue d'extrapoler les résultats à toute la population cible. C'est une étape très importante dans le processus de recherche.

Pour le cas de cette étude, compte tenu de la complexité du thème qui revêt une double dimension socio historique, et de l'hétérogénéité du groupe cible, on s'est aperçu que les méthodes probabilistes ne se prêtent pas facilement à cette étude. En outre, l'accès aux données statistiques exactes sur certains groupes cible étant impossible, il est difficile de procéder à un échantillonnage aléatoire. Pour cela, nous avons opté pour un échantillonnage empirique ou à choix raisonné notamment l'échantillonnage par quota non proportionnel alterné par l'échantillonnage accidentel et boule de neige.

III.2. 5. La Taille de l'échantillon

Le tableau ci-après donne les détails sur l'effectif de personnes que nous avons interviewées conformément à notre groupe cible.

GROUPES

EFFECTIFS

47

Etudiants

 

45

Cadres administratifs

16

Enseignants

9

Total

70

Source : Données du terrain

48

III.2.6. L'administration du questionnaire

Nous avons opté pour une méthode d'administration dualiste du

questionnaire, associant les deux modes d'administration à savoir l'administration directe et celle indirecte. Ce choix s'explique d'abord par le fait que la majeure partie de nos enquêtés est instruite, donc capable de lire, de comprendre et de répondre aux questions. Ensuite, ce choix tient du fait de notre mode d'échantillonnage. Par exemple l'échantillonnage par boule de neige n'exige pas la présence de l'enquêteur. Ce qui n'est pas le cas pour l'échantillonnage accidentel et dans une moindre mesure celui par quota. Enfin, les contraintes liées au temps, nous ont conduit à administrer directement les questionnaires à certains de nos enquêtés qui, compte tenu de leurs responsabilités, n'auront pas le temps pour répondre à nos questions séance tenante.

III.2. 7. La pré enquête

Afin de pallier aux éventuelles difficultés et erreurs liées à la

présentation, à l'ordre, à la syntaxe et au temps de l'interview, nous avons testé le questionnaire sur une dizaine de personnes.

III.2. 8. Le mode de traitement

C'est la manière d'extraire les informations recueillies sur le

terrain à l'aide des outils de collectes. Cette phase va du dépouillement à l'analyse des données en passant par la codification. Les tâches que comporte cette étape peuvent être catégorisées en la codification, à la saisie et les tabulations ou graphiques. Généralement, cette phase est gérée d'une façon informatisée à l'aide des logiciels SPSS et SAS.

Pour notre part, le dépouillement a été manuel. Ensuite, nous avons dégagé les grandes tendances par rapports aux hypothèses et objectifs de notre recherche. Ce qui nous a permis d'élaborer des tableaux

49

et graphique avec le logiciel Excel. Notons que ces tableaux avaient en ligne des modalités ou les indicateurs aux questions (variables) contenues dans notre outil de collecte, et en colonne, leur effectif puis leur valeur relative représentée par les fréquences.

L'analyse de ces tableaux et graphiques est une analyse essentiellement uni variée ou descriptive. Cette analyse est suivie d'une interprétation qui est l'opération qui consiste à confronter les résultats issus de la recherche à la question centrale initialement posée ainsi que des hypothèses et objectifs de l'étude.

III.3. La recherche documentaire

Outre les techniques de recherches sus citées, notre travail est basé sur une importante recherche bibliographique. A cet effet, les bibliothèques de l'Université de Lomé (bibliothèque centrale et celle de la Faculté des Lettres Et Sciences Humaines), du bas fond de St Joseph, de GF2D-CRIFF nous ont servi de cadre de recherche. Des ouvrages de nature politique, méthodologique, ceux liés à la démocratie et au genre ont été consultés. Ceci nous a permis de bien saisir la problématique de notre étude, d'élaborer nos hypothèses et de mieux définir le cadre conceptuel et physique de notre étude. Il faudrait aussi noter que les moteurs de recherche à l'instar de Google, de l'encyclopédie Encarta 2009, nous ont été aussi utiles durant ce processus.

2ème PARTIE

PRESENTATION, ANALYSES DES DONNES ET
INTERPRETATION DES RESULTATS

51

Chapitre troisième : Présentation et analyse des données

Cette partie est consacrée à la présentation et à l'analyse des données issues des enquêtes sur le terrain. Elles sont présentées selon les sections élaborées sur le questionnaire.

I. Identification

Tableau 1: Répartition des enquêtés selon le sexe

Sexe

Effectif

Fréquence

Homme

38

54%

Femme

32

46%

Total

70

100%

Source : Données de l'enquête, août, 2012

Au vu des données présentées dans ce tableau, on remarque que sur les 70 personnes enquêtées, plus de la moitié est du sexe masculin soit un pourcentage de 54%. Les femmes sont au nombre de 32 soit 46%. Cette légère supériorité numérique masculine pose le problème de la présence des femmes dans les instances de décisions publiques.

Tableau 2 : Répartition des enquêtés selon l'âge

Tranches d'âge

Effectif

Fréquence

(18-28J

43

61%

(28-38J

17

24%

(38-48J

7

10%

(48-58J

3

4%

Total

70

100%

Source : Données de l'enquête, août, 2012

La répartition des enquêtés selon l'âge révèle que 17 personnes ont un âge compris entre 28 et 38 ans, 7 entre 38 et 48. Cependant, la

52

majeure partie des enquêtés ont un âge compris entre 18 et 28 ans, soit 61% de la population des enquêtés. La prépondérance observée dans cette tranche tient du fait de la présence des étudiants qui, en grande partie, appartiennent à cette tranche considérée comme propice pour les études supérieures.

II. Attitude et perception

Graphique 1 : Répartition des enquêtés selon qu'ils pensent que la politique est un domaine réservé uniquement aux hommes

Source : Données de l'enquête, août, 2012

Ce graphique présente la proportion des enquêtés en fonction de leur perception sur la politique comme domaine typiquement réservé aux hommes. Il ressort sur cette question que 62 personnes sur 70 soit 89% des enquêtés, estiment que la politique n'est pas uniquement réservée aux hommes. Seulement 11% pensent qu'elle est une chasse gardée exclusive des hommes. A la lumière de cette analyse, on s'aperçoit que le niveau d'instruction a fortement participé dans la formation des opinions des enquêtés, car étant donné que presque tous les enquêtés ont atteint le niveau supérieur d'étude, donc, ils sont plus ou moins départis d'une conception

atavique et ancestrale des rapports sociaux au profit d'une vision un peu plus égalitaire.

Tableau 3 : Répartition des enquêtés selon leur intérêt à la politique

Source

:

Modalité

 

Effectif

Fréquence

Forte

11

16%

Moyen

31

44%

Faible

18

26%

Pas du tout

10

14%

Total

70

100%

Données de l'enquête, août, 2012

53

A la question « Intéressez-vous à la politique ? », 44% des enquêtés, soit moins de la moitié de l'effectif total, estiment ne s'y être intéressés que moyennement tandis que 26 % présentent un faible intérêt politique. En revanche, 11 personnes sur 70 sont fortement intéressées à la politique. Ce qui représente une proportion de 16%. Enfin, des 70 personnes enquêtées, une dizaine affirme n'être pas du tout intéressée à la politique.

D'une façon générale et à en croire aux données issus du terrain, nous constatons une certaine insensibilité politique de la plus part de nos enquêtés et que cette tendance est un peu plus accentuée chez le genre féminin. Ce qui pose le problème de la citoyenneté politique dans le pays.

54

Graphique 2 : Répartition des enquêtés selon que la politique leur inspire la peur ou non

Source : Données de l'enquête, août, 2012

Les données recueillies sur le terrain révèlent que pour 57% des enquêtés, la politique demeure une hantise. A contrario, 43% de l'effectif des enquêtés estiment ne pas être inquiétés par la politique. Cette situation valable pour les hommes et les femmes, prête à réfléchir sur les considérations dont on se fait de la politique dans son essence et dans sa pratique.

Tableau 4: Répartition des enquêtés selon le type d'activité politique de préférence

Activités politiques

Effectif

Fréquence

Militer dans un parti politique

23

16%

Participer aux campagnes électorales

16

11%

Voter

52

37%

Prendre part au meeting politique

16

11%

Protester contre une mesure politique

7

5%

Postuler à un poste politique

21

15%

Autres

5

4%

Total

140

100%

Source : Données de l'enquête, août, 2012

55

Le tableau ci-dessus, présente les opinions de préférence des enquêtés vis-à-vis d'un certains nombre d'activités de la participation politique. Eu égard aux résultats issus du terrain, il ressort que la principale activité de la participation politique est le vote, qui seul représente 37 % des opinions favorables des enquêtés. Le militantisme et les candidatures aux postes politiques suivent avec respectivement 16 % et 15 %. La participation aux campagnes électorales et aux meetings politiques enregistrent chacun 11 %. Cependant, la participation protestataire demeure la moins exercée.

En définitive, le constat qui semble se dégager de cette analyse est la prééminence du vote au détriment des activités protestataires. Alors, on se pose la question de savoir pourquoi cette prépondérance ?

III. Connaissance sur l'histoire de l'engagement politique des femmes togolaises

Tableau 5 : Répartition des enquêtés selon leur connaissance sur l'histoire politique togolaise

Connaissance

Effectif

Fréquence

Avancée

16

23%

Superficielle

49

70%

Aucune idée

5

7%

Total

70

100%

Source : Données de l'enquête, août, 2012

56

D'après ce tableau, il s'en suit que sur 70 individus enquêtés, seulement 23% ont une connaissance avérée sur l'histoire politique du Togo ; près de 2/3, soit 70 % des enquêtés n'ont qu'une connaissance superficielle. En revanche, 7 % déclarent avoir aucune idée sur cette thématique.

Par rapport à ces résultats, nous constatons que l'histoire politique du Togo avant l'indépendance est mal ou peu connue de la population. Ce qui pose le problème d'une vision peu condescendante sur le potentiel de la citoyenneté féminine togolaise.

Tableau 6: Répartition des enquêtés selon qu'ils pensent que le combat politique ayant abouti à l'indépendance soit un combat purement masculin

Avis

Effectif

Fréquence

Oui

4

6%

Non

59

84%

Ne sait pas

7

10%

Total

70

100%

Source : Données de l'enquête, août, 2012

Ce tableau rend compte de l'opinion des enquêtés sur le combat politique ayant abouti à l'indépendance. Ainsi, d'après les données recueillies sur le terrain, seulement 6 % pense que ce combat fut purement masculin tandis que 10 % estime ne rien savoir. Par contre, 84 % des enquêtés soit un effectif de 59 personnes, appréhende cette lutte dans une perspective androgynique où les femmes et les hommes auraient ensemble contribué à l'accession du Togo à son destin naturel qu'est l'indépendance.

57

Tableau 7 : Répartition des enquêtés selon leur idée sur la nature politique de la femme togolaise d'avant l'indépendance

Modalités

Effectif

Fréquence

Actives

44

63%

Passives

22

31%

Ne sait pas

4

6%

Total

70

100%

Source : Données de l'enquête, août, 2012

Au regard des résultats présentés dans ce tableau, plus de la moitié des enquêtés soit 63 %, considèrent que la femme togolaise a été active durant ces luttes pour l'indépendance. 31 % estime que la femme n'a joué qu'un rôle passif dans cet épisode. Cette tendance justifie donc, de la part d'une partie de la population, la méconnaissance de l'histoire politique du Togo et à plus forte raison celle des femmes.

Graphique 3 : illustrant les enquêtés par rapport à leur connaissance des ouvrages ayant parlé de l'engagement politique des femmes togolaises pour l'indépendance

Source : Données de l'enquête, août, 2012

58

Le graphique ci-dessus, illustre la répartition des enquêtés selon qu'ils connaissent ou non un ouvrage traitant de la citoyenneté féminine togolaise avant l'indépendance. Il indique que, sur 70 personnes interviewées, seulement 23, soit un pourcentage de 33 % ont une fois rencontré et lu un ouvrage y relatif. Ce qui n'est pas le cas pour le reste des enquêtés soit 67 % qui estiment n'avoir jamais rencontré de tels ouvrages.

Au vu de ces résultats, il ressort que bon nombre de citoyens est sous informé sur l'histoire politique togolaise et encore moins celle des femmes. L'interrogation que cela suscite est de savoir si c'est par manque d'une littérature abondante sur cette thématique ou d'une carence dans les programmes scolaires ou que par manque du goût de lecture ?

IV. Causes du déclin de la citoyenneté politique des femmes togolaises

Tableau 8 : Répartition des enquêtés en fonction de leur opinion sur la cause de la chute de la citoyenneté politique des femmes après l'indépendance

Opinions

Effectif

Fréquence

L'instabilité politique de l'époque

33

47%

La dictature civile militaire post indépendance

30

43%

Autres

7

10%

Total

70

100%

Source : Données de l'enquête, août, 2012

Ce tableau rend compte de l'opinion des enquêtés sur certaines causes de l'effacement de la femme de l'échiquier politique après l'accession du Togo à sa souveraineté nationale. Ainsi, moins de la moitié des enquêtés soit 47 %, attribue cet état de fait à l'instabilité politique de l'époque. Cette proportion représente un effectif de 33 personnes sur 70.

59

En revanche, 43 % ont vu en la dictature civile militaire une raison évidente du déclin de la citoyenneté politique de la femme à cette époque. De ce qui précède, on constate alors que l'inertie politique des femmes revêt toujours un caractère artificiel.

Tableau 9 : L'incidence de la peur sur l'intérêt politique des enquêtés

Peur

Intérêt

Oui

Non

Total

Eff

Fréq

Eff

Fréq

Eff

Fréq

Forte

6

9%

5

7%

11

16%

Moyen

18

26%

13

19%

31

44%

Faible

13

19%

5

7%

18

26%

Pas du tout

5

7%

5

7%

10

14%

Total

42

60%

28

40%

70

100%

Source : Données de l'enquête, août, 2012

Ce tableau croisé rend compte de la répartition des enquêtés selon l'incidence exercée par la peur sur leur degré d'intérêt à la politique. Il indique que sur les 18 personnes faiblement intéressées à la politique, 13 estiment que cela est lié à la peur. En plus, la plupart de ceux qui s'engagent moyennement, soit 26 %, manifestent une hantise par rapport à la politique.

Par ailleurs, 6 personnes sur 11 fortement intéressées à la politique, attestent que la politique leur provoque la peur. Dès lors, on peut admettre que l'engagement politique est dans une certaine mesure, une question de témérité. La compétence politique et la compétence socio culturelle ne se recoupent pas forcément.

60

Sous tableau 9 : L'incidence de la peur sur l'intérêt politique des femmes enquêtées

Peur

Intérêt

Oui

Non

Total

Eff

Fréq

Eff

Fréq

Eff

Fréq

Forte

2

7%

2

7%

4

14%

Moyen

6

21%

4

14%

10

36%

Faible

6

21%

3

11%

9

32%

Pas du tout

1

4%

4

14%

5

18%

Total

15

54%

13

46%

28

100%

Source : Données de l'enquête, août, 2012

Par rapport à la femme (sous tableau 9), on relève que sur le nombre de femmes interrogées, soit 31 femmes, seulement 4 ont exprimé un fort attachement à la politique, la grande partie ne l'est que moyennement ou faiblement soit respectivement un pourcentage de 36 % et de 32 %. Enfin 18 % des femmes interrogées, ne s'intéressent du tout pas à la politique. Cette apathie politique serait-elle liée à la peur ? À cette question 6 femmes sur 9 faiblement passionnées à la politique ont acquiescé l'influence de la peur sur leur engagement dans la sphère politique. Par contre, 4 femmes sur 5 qui ne s'intéressent pas du tout à la politique estiment ne s'être pas inquiétées par la peur. C'est dire que, la peur, quoiqu'elle ait une influence sur la participation politique de la femme, n'est pas déterminante dans la volonté politique de la femme.

61

Tableau 10 : Incidence des facteurs exogènes sur l'exclusion politique des femmes

Facteurs exogènes

Oui

Non

Total

Eff

Fréq

Eff

Fréq

Eff

Fréq

Pauvreté

6

4%

16

11%

22

15%

Analphabétisme

12

8%

38

27%

50

35%

Religion

4

3%

13

9%

17

12%

Us et coutumes

5

4%

14

10%

19

13%

Violence politique

6

4%

25

18%

31

22%

Autres

2

1%

1

1%

3

2%

Total

35

25%

107

75%

142

100%

Source : Données de l'enquête, août, 2012

Ce tableau croisé à doublé entrée, présente les résultats des données issues du terrain. Ainsi, à la question de savoir si la femme togolaise constitue la cause de sa propre exclusion politique, 3/4 des opinions soit 75% ont répondu à la négative et voient dans les facteurs exogènes, les principales causes de cette situation. En plus, de tous les facteurs exogènes proposés, l'analphabétisme demeure le plus évoqué avec une proportion de 35%, ensuite suivent la violence politique 22% et la pauvreté 15%. Au vu des résultats de ce tableau et en combinaison avec ceux du tableau 8, il ressort, qu'il faille revoir les postulats explicatifs de ce phénomène basés sur la théorie de modernisation et qui tablent sur les facteurs endogènes à la femme, notamment le principe d'incapacité naturelle à faire de la politique.

62

Chapitre quatrième: Interprétation des résultats

L'interprétation des résultats consiste à commenter les tableaux et graphiques élaborés à partir des données de l'enquête, en confrontant les résultats aux hypothèses, objectifs et les connaissances qui existent sur la question de recherche. A cet effet, pour plus de précision et sans pour autant s'écarter des données du terrain, nos résultats sont structurés autour de certaines intitulées que nous nous sommes déployés à interpréter.

I. Genre et espace public

Par rapport au sexe, en considérant les données du tableau 1, on s'aperçoit que les femmes togolaises sont sous représentées dans l'espace public ainsi que dans le domaine de l'éducation. Cette sous représentativité des femmes souligne l'existence d'une disparité et d'une inégalité entre les femmes et les hommes dans l'accès à certains statuts sociaux. On s'aperçoit alors que le sexe est le deuxième facteur qui influe significativement sur la participation politique et publique.

En effet, jusqu'aujourd'hui, la société hésite toujours à accorder certaines responsabilités aux femmes ou à les intégrer sous prétexte de leur incapacité et de leur indisposition passagère liée à la nature de leur physiologie. Ceux qui prennent le courage de le faire, mettent souvent un homme à leur côté pour les seconder, signe toujours de ce manque de confiance en la capacité de la femme.

En outre, les études de la jeune fille sont perçues comme une perte de temps, donc qui ne vont aboutir à rien. Ce cloisonnement traditionnel et légendaire de la femme dans les rôles sociaux de second rang, a longtemps contribué à définir un espace public caractérisé par une présence transparente de la femme. A cet effet, Ursula Beer, une féministe

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socialiste, l'une des initiatrices de l'approche genre et développement, déclarait en ces termes :

«Pour chaque homme, indépendamment de sa volonté, la société prévoit une place qui lui permet dans la hiérarchie professionnelle d'accéder au poste décisionnel comparativement aux femmes et qui lui accorde aussi dans la hiérarchie familiale, une position privilégiée par rapport à la femme... ».

Aujourd'hui, cette question de genre constitue un problème épineux et un obstacle au développement. Raison pour laquelle, il demeure une préoccupation fondamentale des gouvernements qui ne cessent de prendre de mesures tout azimut pour estomper ces disparités. Déjà, dans son essai, The subjection of women, publié en 1869, John Stuart Mill relevait d'une façon prémonitoire les dangers que court l'humanité en entretenant cette exclusion publique et politique des femmes :

«Y a-t-il un si grand excès d'hommes propres aux hautes fonctions que la société soit en droit de rejeter les services d'une personne compétente ? Sommes-nous assurés d'avoir toujours un homme sous la main pour toutes les fonctions sociales importantes qui pourront vaquer, que nous n'ayons rien à perdre à frapper d'incapacité la moitié de l'espèce humaine, en refusant d'avance de tenir compte de ses facultés quelques distinguées qu'elles puissent être ? »

II. L'intérêt politique et la citoyenneté

La participation à la vie politique constitue la 1ère manifestation de la démocratie et du rôle de citoyen. Sa nature et son intérêt dépendent de la représentation de l'image que se font les citoyens de la politique. En effet, au regard des résultats du tableau 3, nous relevons une forme de désintérêt manifesté par une bonne partie des enquêtés par rapport à la politique. Une situation qui parait un peu paradoxale vu le niveau d'instruction des enquêtés. Car, le facteur le plus déterminant de la participation politique demeure le niveau d'instruction. Alors, partant de cette position doctrinale, on aurait pu s'attendre à un fort intérêt à la

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politique de la part de nos enquêtés. Tel n'est pas le cas. Ce désintérêt à la politique serait lié au manque de confiance que les gens manifestent à l'endroit du pouvoir politique, à la précarité qui les obligent à reléguer la politique au second plan et surtout au statu quo politique qui règne dans le pays.

Nous disons que cette situation pose le problème de citoyenneté en ce sens qu'être citoyen, c'est d'abord faire sien des droits et devoirs de la communauté politique à laquelle on appartient. Ce sentiment d'appartenance fait alors naitre une fierté qui est alimentée par une volonté de vivre ensemble et qui se concrétise dans les élections et dans l'acquittement d'autres obligations. Ainsi, un désintérêt à la politique, se traduit par une chute de la citoyenneté et un libre cours à l'incivisme.

Le danger de cette attitude a été soulignée par Alexis de Tocqueville dans De la démocratie en Amérique, Paris, Gallimard, 1961. En effet, lorsque les conditions ne sont pas réunies pour permettre aux individus d'exprimer pleinement leur citoyenneté politique, ceux-ci alors, se replient chacun sur sa sphère privée conduisant à une atomisation de la société et un ultra individualisme. Le risque majeur de cette situation, est la soumission plus ou moins volontaire de l'individu à la volonté du plus grand nombre entrainant ipso facto une tyrannie de la majorité.

III. La peur et la participation politique

Par rapport à la peur, l'analyse des données de l'enquête (graphique 2) a échoppé sur la conclusion selon laquelle la politique suscite beaucoup de peur pour plus de la moitié des enquêtés. Sans doute, c'est la raison qui amène souvent certains à éclipser leur activisme politique. C'est le cas de certains fonctionnaires des services publics, qui par peur d'exposer leur coloration politique au risque de rater plusieurs avantages liés à son poste, décident de se rétracter vis-à-vis de la politique. En outre,

65

les troubles socio politiques qui ont accompagné l'entrée de la démocratie dans notre pays et les signes de violences à caractères politiques laissent des séquelles traumatiques qui amènent les individus à se distancer de la gestion du pays.

A la lumière de ce qui précède, on s'aperçoit alors que la peur suscitée par la politique n'est pas une peur en soi. Elle est alimentée par un certain nombre d'évènements et de structures qui ont conféré à l'espace politique cette onction dédaigneuse à l'endroit des femmes togolaises.

S'agissant de son incidence sur l'intérêt politique des femmes togolaises (sous tableau 9), les tendances ambivalentes enregistrées conduisent aussi à moins systématiser l'influence de la peur sur l'exclusion politique de la femme togolaise. Car, la plus part de celles qui ne s'intéressent pas à la politique, avancent des raisons autres que la peur.

IV. Le vote, la forme de participation politique la plus répandue

Le vote représente la forme minimale la plus répandue de la participation politique, comme on peut le constater dans le tableau 4. Il constitue la mesure la moins contestable d'un intérêt exprimé pour la politique. Cette prééminence est due au fait qu'il est moins élitiste et moins discriminatoire avec la disparition du suffrage capacitaire et censitaire. Aussi, requiert-il un engagement personnel et peu d'initiatives. C'est d'ailleurs l'acte solennel par lequel l'individu affiche sa citoyenneté. Le vote demeure ainsi, le levier le plus basique par lequel le citoyen maintient son pouvoir de contrôle sur la sélection du personnel gouvernemental.

Au contraire, la faible proportion enregistrée pour la participation protestataire s'explique par le caractère fondamentalement agité de cette forme de participation et surtout le bras de fer qui s'instaure dans la régulation de ces mouvements par le pouvoir politique.

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Néanmoins, sous un angle politique, cette analyse mérite quelques nuances. Car, le vote et les autres formes généreuses de participations (lecture des journaux, discussions politiques...) ne sont des signes d'attention à la politique puisqu'ils n'impliquent aucune lutte pour la conquête des postes de l'appareil de l'Etat. Alors pour peser réellement sur l'échiquier politique, les femmes doivent fournir un effort supplémentaire pour revendiquer les véritables leviers du pouvoir afin de jouer un rôle politique de 1er plan.

V. L'exclusion politique des femmes, un phénomène aux origines exogènes

Pendant longtemps, les femmes ont été laissées en marge de la gestion de la chose publique et la raison en était que la femme de part sa nature n'avait pas de prédispositions assez adéquates pouvant lui permettre de se poindre dans cet univers particulièrement complexe. La plupart des ébauches d'explication de cette exclusion rimaient avec la théorie de la modernisation qui explique le sous développement de certain peuple par une absence de mentalité dans ce sens, des raisons inhérentes à leur état d'être.

Cependant, d'après les résultats du tableau 10, l'on se rend compte que les facteurs exogènes demeurent les principales causes de l'exclusion politique des femmes togolaises. On quitte alors du naturel à l'artificiel. En plus, de tous ces facteurs exogènes indiqués, on note une fréquence considérable de l'analphabétisme. Ceci loin d'être anodin s'explique par le fait que l'espace politique où le destin de toute une communauté se discute, nécessite de ce fait, une compétence politique fondée sur de solides connaissances qui puisent permettre d'opérer des choix rationnels. Ainsi, à la question de savoir pourquoi il n'avait pas

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beaucoup de femmes dans son gouvernement, M. Edem Kodjo, alors Premier Ministre, rétorquait qu'il voulait bien former un Gouvernement paritaire en matière de nombre de femmes et d'hommes, mais les femmes compétentes qui puissent correspondre au profil du Ministre, il fallait aller les chercher.

La violence politique demeure aussi l'un des facteurs les plus évoqués dans l'explication de l'exclusion politique féminine. En effet, l'apathie politique observée chez les femmes togolaises après l'indépendance est liée en grande partie, comme en témoigne le tableau 8, à l'instabilité politique de l'époque. L'assassinat du père de l'indépendance avait plongé la population dans une vive émotion, puisque c'était une 1ère en Afrique qui s'est révélée comme un véritable coup d'assommoir. Les manifestations, les coups d'Etats répétitifs ont entretenu un climat politique très agité qui n'est pas trop favorable à la nature de la femme. Les évènements qui ont accompagnée l'entrée de la démocratie dans notre pays et sa cohorte d'hostilité et de violences, s'inscrivent aussi dans le même registre.

Par contre, toujours en ce qui concerne le tableau 10, on s'aperçoit que les pesanteurs socio culturelles comme la religion et les us et coutumes, sont graduellement en train de perdre leur influence sur le potentiel de l'engagement politique des femmes. Car, nous estimons que si cette étude était faite à une époque un peu plus reculée, ces facteurs se placeraient devant. L'effort des autorités politiques dans l'éducation de la jeune fille, l'urbanisation croissante, la vulgarisation des nouvelles manières de vivre et de se comporter par le biais des médias détachent de plus en plus les filles du carcan culturel et religieux. Aussi, cela contribue-t-il à leur offrir des matières à comparaison et des références débouchant sur une aspiration à plus d'autonomie et de liberté.

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VI. Une histoire politique féminine très peu connue

On ne saurait appréhender une étude sur la citoyenneté politique des femmes togolaises sans un bref retour au passé. Pour bon nombre de personnes, elle est une notion amorphe avant la conférence nationale, pour d'autres encore, elle ne vient que commencer. Ces considérations traduisent une méconnaissance ou une forme d'amnésie sur les apports incontestables des femmes togolaises dans le processus d'émancipation du Togo comme l'illustrent les résultats de notre enquête (tableau 5).

En effet, en se référant à ces résultats, on constate qu'une frange importante de l'intelligentzia togolaise ne maitrise pas réellement leur histoire politique et dans la moindre mesure celle des femmes. Cela pose donc un sérieux problème, car si ceux qui sont considérés comme les phares de la société trainent toujours une vision déformée de la citoyenneté de la femme, comment pourrait-on transformer les considérations peu condescendantes et bourrées de préjugés que l'opinion commune se fait sur le potentiel politique des femmes ? Car à en croire Annie Petit, «La régénération des savants signifie la régénération des sociétés».

Certes, il est vrai que la participation de la femme était plus ancrée dans les formes protestataires et dans les associations qu'à travers les formes représentatives. C'était un travail de fond comme le relève l'une de nos interviewées : « la façon dont elles exprimaient leur opinion n'était pas médiatisée ». Néanmoins, on admet que c'est aussi une forme de participation politique qui mérite d'être reconnue.

Cette situation est liée au fait qu'il n'existe pas d'ouvrages abondants, accessibles au public togolais et relatif à la citoyenneté politique de la femme togolaise. Les ouvrages existants sont d'un caractère élitiste et relativement cher, donc difficile à s'en procurer. Il faut aussi compter avec le dégoût de la lecture qu'affiche maintenant le public togolais.

69

Dans les programmes scolaires, à part quelques cours

synthétiques d'Education Civique et Morale proposés dans le primaire qui traitent d'une manière ramassée l'histoire politique du Togo, au niveau du secondaire (collège et lycée), il n'existe pas un curriculum spécifique sur ces évènements, à par quelques bribes offertes dans le cours sur la décolonisation. Or, c'est à ce niveau que l'élève commence à donner sens à ce qu'il apprend, c'est également là que commence par se forger la personnalité l'individu. Ces cours sont souvent déclinés au masculin. On ne retient que les noms comme Martin Aku, Anani Santos, Sylvanus Olympio... tronquant fondamentalement le travail de fond abattu par les femmes dans ces mouvements politiques.

VII. Le cheminement trilogique et dialectique de la citoyenneté politique féminine togolaise

La citoyenneté politique des femmes togolaises ressemble à une véritable trilogie marquée par une inclusion, une exclusion puis une re-inclusion. D'abord, comme en témoigne les résultats de notre recherche (tableau 7), la majeure partie des enquêtés considèrent que les femmes ne sont pas restées en marge des luttes indépendantistes. Déjà en 1933, elles avaient commencé par le biais d'un embryon de parti politique (Duawo), à attaquer l'édifice colonial pour réclamer l'allègement du régime fiscal. En outre, elles se seront associées aux mouvements nationalistes durant les processus de la décolonisation.

Après les indépendances, commence un nouvel acte de la citoyenneté féminine togolaise marquée par son silence dans les débats politiques. Déjà, elles ni figuraient pas dans le 1er Gouvernement de Sylvanus Olympio. L'épilogue sera atteint avec les crises et les violences politiques né de l'assassinat du 1er Chef d'Etat togolais et l'instabilité

70

politique de l'époque. En 1969, le RPT, vit le jour. Désormais, tous les autres canaux d'expression politique parallèles, sont verrouillés puisque tout devrait se faire au sein de ce parti unique. Pour les femmes, l'UNFT considérée comme la version féminine du RPT, demeure la seule voie d'expression politique de la femme togolaise. Et quelle forme d'expression politique ? Il s'agissait essentiellement des animations, les danses et chants à allure dithyrambique à l'endroit du pouvoir politique. Donc, disons que de 1960 à 1990, on a assisté à une forme de citoyenneté politique passive des femmes togolaises où les femmes se servaient que du faire valoir sur l'échiquier politique.

A partir de 1990, avec l'émergence des mouvements de droit de l'homme, l'avènement de la démocratie et surtout les séries de conférences mondiales19 organisées autour de la thématique du genre et du droit de la femme, le problème de genre et de l'inclusion politique de la femme deviennent une préoccupation fondamentale des gouvernants. En outre, la ratification ou l'adoption d'un certain nombre d'instruments juridiques internationaux, notamment les Objectifs du Millénaire pour le Développement, ont amené les partenaires pour le développement à être intransigeants et beaucoup plus pressants sur la question de genre en général. A partir de ce moment, on inaugure une nouvelle ère caractérisée par une re-inclusion politique de la femme togolaise. Même si le processus semble un peu timoré, et qu'à l'état actuel, nous ne sommes pas encore parvenus aux résultats escomptés, l'inclusion politique des femmes est malgré tout, d'une façon transversale, en train de marquer les esprits.

19 4ème Conférence mondiale sur les femmes à Pekin (1995) et Pékin + 10 et sommet de L'ONU en 2005 Sommet mondial pour le développement social à Copenhague (1995)

Conférence mondiale sur la population et le développement au Caire (1994)

Conférence mondiale sur les droits de l'homme à Vienne (1993)...

71

Conclusion

Ce travail part d'un constat d'une sorte de dévoiement de l'histoire politique des femmes togolaises et partant de là, une perception condescendante de l'image de la nature de cette femme face à la politique. Il se propose de lire la citoyenneté politique des femmes togolaises au travers des acquis historiques et sociologiques. Pour ce faire, sur la base des hypothèses que nous nous sommes fixés, nous avons mené une étude en s'appuyant sur la recherche documentaire et des enquêtes empiriques d'ordre qualitatif et surtout quantitatif. Au terme de cette étude, il ressort que l'exclusion politique des femmes togolaises n'est pas un fait naturel.

Ainsi, contrairement à ce qui fait vent de vérité, on découvre que la participation de la femme togolaise n'est pas un fait récent. Sa sous représentation dans les instances de décision politique et publique n'est pas la conséquence d'une prétendue entrée tardive dans le monde politique. Elle ne reste pas les bras croisés pour se faire conduire et diriger selon les humeurs et les caprices des hommes. Infatigables combattantes des premières heures, elles ont été le fer de lance des mouvements indépendantistes et démocratiques.

Cependant, la particularité de leur combat mettait en évidence un type de citoyenneté plus impliquées dans les associations et dans les formes protestataires de la participation politique, car plus préoccupées de l'amélioration des désidératas sociaux et de leur vécu quotidien. Ce faisant, ce comportement politique aussi noble et légitime que soit-il aura aussi, sous un autre angle, empêcher la gente féminine togolaise de s'inviter sérieusement dans les débats en négociant les véritables tentacules du pouvoir politique afin de posséder les clefs de son destin.

72

Eu égard à ce qui précède, il serait alors incongru de vouloir attribuer à la nature intrinsèque de la femme togolaise, les raisons de son exclusion politique. C'est une femme intéressée politiquement et potentiellement engagée une fois que les conditions de sa liberté et de ses compétences sont reconnues et respectées.

Au total, cette recherche revêt une double importance : d'abord, elle nous a permis d'abord de mettre en évidence l'ignorance qui plane sur bon nombre de togolais en ce qui concerne l'engagement citoyen des femmes dans l'histoire, ensuite de mieux retracer le cheminement atypique du combat politique des femmes togolaises et enfin de fournir une grille d'explication assez plausible de leur exclusion politique.

73

BIBLIOGRAPHIE

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· Durkheim, E., Les règles de la méthode sociologique, Paris, PUF, 1895.

· Evans, S., Les américaines, Histoires des femmes aux USA, New York, The free Press, 1989.

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· Hastings M., Aborder la Science Politique, Paris, Seuil, 1996.

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· Livre blanc, femme togolaise aujourd'hui et demain, 2ème édition, GF2D-CRIFF.

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·

74

Quivy, R. et Van Campenhoudt, L., Manuel de recherche en Sciences sociales, Paris, Dunod, 1995.

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· Rosanvallon, P., Le sacre du citoyen. Histoire du suffrage universel en France, Paris, Gallimard, 1922.

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· Rousseau, J. J., Contrat social, Paris, Seuil, 1977.

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· Weber, M., Le Savant et le Politique, Paris, Plon, 1959.

· Yagla, O., Les indigènes du Togo à l'assaut du pouvoir colonial, Tunis, NEA, 1992.

ANNEXES

76

SECTION I : IDENTIFICATION


d'ordre

Questions et filtres

Réponses et Codes

Passez
à

Q101

Quel est votre sexe ?

- Masculin 1

- Féminin 2

 
 
 

- [18-28[ 1

 
 
 

- [28-38[ 2

 
 
 

- [38-48[ 3

 

Q102

Quel âge avez-vous ?

- [48-58[ 4

 
 
 

- [58-68[ 5

 
 
 

- [68-plus[ 6

 

Q103

Etes-vous scolarisé ?

- Oui 1

 
 
 

- Non 2

 
 
 

- Primaire 1

 

Q104

Quel est votre niveau d'instruction ?

- Secondaire 2

 
 
 

- Supérieur 3

 
 
 

- Etudiant(e) 1

 
 
 

- Cadre administratif (ve) 2

 

Q105

Quelle est votre profession ?

- Responsable d'ONG 3

 
 
 

- Ménagère 4

 
 
 

- Enseignants 5

 
 
 

- Autres (à préciser) 6

 

SECTION II: ATTITUDE ET PERCEPTION

d'ordre

Questions et filtres

Réponses et codes

Passezà

Q201

Certains pensent que la politique est un

domaine réservé aux hommes. Etes-vous de cet avis ?

- Oui 1

- Non 2

 

Q202

Intéressez- vous à la politique ?

- Forte 1

- Moyen 2

- Faible 3

- Pas du tout 4

 

Q203

D'aucuns disent que faire la politique leur inspire la peur. Direz-vous que c'est

- Vrai 1

- Faux 2

 

Q204

Parmi les activités de la participation

suivantes, la(les)quelle(s) sentez-vous
capables d'exercer ?

- Militer dans un parti politique 1

- Participer aux campagnes électorales 2

- voter 3

- Prendre part au meeting politique 4

- Protester dans la rue contre une mesuregouvernementale 5

- Postuler à un poste politique 6

- Autres (à préciser) 7

 

77

Q205

Etes-vous d'accord avec ceux qui affirment que la femme dans ses prédispositions n'est pas apte à exercer une activité politique ?

- Oui 1

- Non 2

 

SECTION III : CONNAISSANCE SUR L'HISTOIRE DE L'ENGAGEMENT POLITIQUE DES FEMMES TOGOLAISES


d'ordre

Questions et filtres

Réponses et codes

 
 
 

Passez

Q301

Avez-vous une idée sur les luttes politiques ayant abouti à l'indépendance du Togo ?

à-

Avancée

- Superficielle

- Aucune idée20

 

1

2

3

 

Q402

Q302

Pour certains, le combat politique ayant abouti à l'indépendance est un combat purement masculin. Etes-vous de cet avis ?

- Oui

- Non

1

2

 
 
 

Q303

Savez-vous que les femmes ont joué un rôle dans ces luttes ?

- Oui - Non

 
 

1

2

 

Q304

Quelle idée retenez-vous des femmes

togolaises sur la citoyenneté politique des
femmes d'avant l'indépendance ?

- Actives

- Passives

- Autres (à préciser)

 
 

1

2

3

 

Q305

Connaissez-vous un ouvrage ayant parlé de l'engagement politique des femmes togolaises pour l'indépendance ?

- Oui

- Non

 
 

1

2

 

SECTION IV : CAUSES DU DECLIN DE LA CITOYENNETE POLITIQUE DES FEMMES TOGOLAISES


d'ordre

Questions et filtres

Réponses et codes

Passez

Q401

politique des femmes a connu un répit juste après l'indépendance. Selon vous, à quoi peut-on attribuer ce fait ?

àL'activisme

- L'instabilité politique de l'époque 1

- La dictature civile militaire 2

- Autres (à préciser) 3

 

Q402

Etes-vous d'avis avec ceux qui disent que la femme togolaise constitue une cause de sa propre exclusion politique ?

- Oui 1

- Non 2

 

Q403

Selon vous, quels sont les facteurs qui

participent à l'exclusion politique de la femme togolaise ?

- La pauvreté 1

- L'analphabétisme 2

- Religion 3

- Les us et coutume 4

- La violence politique 5

- Autres (à préciser) 6

 

20 Si vous choisissez cette réponse, pour la suite des questions, reportez vous directement à la question Q402 de la section suivante

78

Grille d'entrevue

1. Que pensez-vous de la citoyenneté politique des femmes ?

2. Quel regard portez-vous sur la femme togolaise en matière de la participation politique ?

3. L'histoire politique coloniale togolaise recèle certains épisodes marqués par une forte éruption féminine sur la scène politique. Comment expliquez-vous ce phénomène ?

4. Selon vous, pourquoi les gens ignorent-ils cette partie de l'histoire politique coloniale de la femme marquée par un activisme politique sans précédent ?

5. Les femmes togolaises constituent-t-elles les germes de leur propre exclusion politique ? Pourquoi ?

6. A quoi peut-on attribuer ce déclin de la citoyenneté politique chez la femme togolaise

79

TABLE DES MATIERES

DEDICACE I

REMERCIEMENTS II

SIGLES ET ACRONYME III

SOMMAIRE ..IV

INTRODUCTION 5

1ère PARTIE: CADRES THEORIQUE, CONCEPTUEL, PHYSIQUE, HISTORIQUE ET METHODOLOGIQUE

CHAPITRE PREMIER: CADRES THEORIQUE ET CONCEPTUEL

9

 

I. CADRE THEORIQUE

 

9

I.1. JUSTIFICATION DE L'ETUDE

 

.9

I.2. PROBLEMATIQUE

 

12

I.3. HYPOTHESES

 

15

I.3.1. Hypothèse principale

 

15

I.3.2. Hypothèses spécifiques

 

15

I.4. OBJECTIFS

 

16

I.4.1. Objectif général

 

16

I.4.2. Objectifs spécifiques

 

16

I.5. VARIABLES ET INDICATEURS

 

17

I.5.1. CHOIX ET JUSTIFICATION DES VARIABLES

 

17

I.5.1.1 Variable dépendante (expliquée)

 

17

I.5.1.2. Variables indépendantes (explicatives)

 

17

I.5.1.2.1. Le paysage littéraire togolais

 

17

I.5.1.2.2. Les violences politiques

 

18

I.5.1.2..3. Les stéréotypes socioculturels

 

18

I.5.2. INDICATEURS

 

19

I.5.2.1. Le nombre de femmes dans les instances de décision politique

 

19

I.5.2.2. Le taux d'alphabétisation

 

19

I.5.2.3. Les ouvrages sur la participation politique des femmes

 

20

II. CADRE CONCEPTUEL

 

21

II.1 DEFINITION DES CONCEPTS

21

 

II.1.1. Citoyenneté

II.1.2. Démocratie

II.1.3. Groupes de pression/d'intérêt

 

21

22

23

II.1.4. Partis politiques

 

24

II.1.5. Pouvoir (politique)

 

24

II.1.6. Société civile

 

25

II.2 REVUE THEMATIQUE DE LITTERATURE

26

 

II.2.1. Discrimination, émancipation de la femme et égalité des sexes

 

26

II.2.2. Genre et participation politique

 

29

II.2.3. Citoyenneté politique et démocratie

 

32

CHAPITRE DEUXIEME: CADRES PHYSIQUE, HISTORIQUE ET APPROCHE METHODOLOGIQUE

 

.36

I. CADRE PHYSIQUE

 

36

I.1. Géographie

 

36

I.2.

80

Historique du peuplement 36

I.3. Aspects socio économique 37

I.4. Caractéristiques sociodémographiques 38

II. CADRE HISTORIQUE 39

I.1. Esquisse de l'historique de la participation politique des femmes togolaises 39

I.2. Parallelisme de l'évolution de la citoyennete feminine en france et au togo 42

III. APPROCHE METHODOLOGIE 45

III.1. LA METHODE QUALITATIVE 45

III.2. LA METHODE QUANTITATIVE 45

III.2.1. L'univers d'enquête 46

III.22. Le questionnaire 46

III.2.3. Le groupe cible 46

III.2.4. L'échantillonnage 47

III.25. La Taille de l'échantillon 47

III.2.6. Administration du questionnaire 48

III.2.7. Pré enquête 48

III.2.8.Mode de traitement des données 48

III.3. LA RECHERCHE DOCUMENTAIRE 49

2ème PARTIE : PRESENTATION, ANALYSE DES DONNEES ET INTERPRETATION DES RESULTATS

CHAPITRE TROISIEME : PRESENTATION ET ANALYSE DES DONNEES 51

I. IDENTIFICATION 51

II. ATTITUDE ET PERCEPTION 52

III. CONNAISSANCE SUR L'HISTOIRE DE L'ENGAGEMENT POLITIQUE DES FEMMES TOGOLAISES 55

IV. CAUSES DU DECLIN DE LA CITOYENNETE POLITIQUE DES FEMMES TOGOLAISES 58

CHAPITRE QUATRIEME : INTERPRETATION DES RESULTATS ..62

I. GENRE ET ESPACE PUBLIC 62

II. L'INTERET POLITIQUE ET LA CITOYENNETE 63

III. LA PEUR ET LA PARTICIPATION POLITIQUE 64

IV. LE VOTE, LA FORME DE PARTICIPATION POLITIQUE LA PLUS REPANDUE 65

V. L'EXCLUSION POLITIQUE DES FEMMES, UN PHENOMENE AUX ORIGINES EXOGENES 66

VI. UNE HISTOIRE POLITIQUE FEMININE TRES PEU CONNUE 68

VII. LE CHEMINEMENT TRILOGIQUE ET DIALECTIQUE DE LA CITOYENNETE POLITIQUE FEMININE TOGOLAISE 69

CONCLUSIONS 71

BIBLIOGRAPHIE 73

ANNEXE 75

TABLE DES MATIERES 79






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"Les esprits médiocres condamnent d'ordinaire tout ce qui passe leur portée"   François de la Rochefoucauld