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Problématique de la citoyenneté politique des femmes au Togo

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par Alilou TCHAFARAM
Université de Lomé - Togo - maà®trise ès- lettres et sciences humaines 2012
  

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II.2. Revue thématique de littérature

Les faits sociaux n'étant pas des épiphénomènes, il est rare qu'un sujet de recherche portant sur un fait social soit unique en son genre. Les faits sociaux naissent, se métamorphosent et offrent des panoramas selon les cultures, les périodes... Ceci étant, on ne pourrait alors s'attendre à des connaissances sui generis se rapportant à ces faits, car la science n'est pas nouvelle, elle est assez vieille et l'intelligence ne se construit pas dans le vide. A ce propos Whitehead affirmait « Toutes les choses importantes qui ont été dites, ont été découvertes par quelqu'un qui ne les a pas inventées. »8

Pour ce qui concerne notre thème, de nombreux travaux de réflexion ont été élaborés la dessus avec quelques petites nuances. Cette abondance de la littérature nous a énormément inspiré dans le cheminement de notre recherche. Comme le disait Georges Gurvitch : « Je me perche sur l'épaule de mon prédécesseur pour mieux voir que lui ».

Cette synthèse de nos lectures nous a permis d'esquisser une revue de la littérature articulée autour de deux thématiques.

? Recension théorique sur la citoyenneté de la femme et l'égalité des sexes,

? Genre et participation politique

? Citoyenneté et démocratie

II.2.1. Recension théorique sur la citoyenneté de la femme et l'égalité des sexes

La discrimination est à l'origine de toutes les formes d'inégalité de genre. C'est pourquoi, dans son article 1er, la Convention sur

8 Repris par Robert King Merton dans The Normative structure of the Science, 1973

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l'Elimination de toutes les Formes de Discrimination à l'Egard des Femmes (CEDEF) a voulu lever l'équivoque sur ce terme en le définissant comme

« ...toute distinction, exclusion ou restriction fondée sur le sexe qui a pour effet ou pour but de compromettre ou de détruire la reconnaissance, la jouissance ou l'exercice par les femmes quel que soit leur état matrimonial, sur la base de l'égalité de l'homme et de la femme, des droits de l'homme et des libertés fondamentales dans les domaines politique, économique, social, culturel et civil ou tout autre domaine. »

L'émancipation des femmes semble après la lutte contre le Sida l'une des préoccupations importantes des acteurs sociaux aujourd'hui. Depuis le 18ème siècle, les voix se sont levées pour libérer les femmes du joug de l'oppression et de la discrimination dont elles ont toujours fait objet. Depuis longtemps les femmes ont été considérées comme des êtres inférieurs aux hommes sous prétexte d'une certaine incapacité naturelle en la maintenant dans cette situation de domination à travers les rôles sociaux qui leur sont assignés.

Pour J. J. Rousseau (1966), le principe explicite de construction de l'ordre social se trouve dans la séparation des sexes et la polarisation du masculin et du féminin à travers l'éducation. Ainsi, dans Emile ou de l'éducation, il appréhende les femmes dans une altérité radicale impliquant leur exclusion politique et leur relégation dans le privé. La société politique créée par le postulat philosophique Rousseauiste est une société exclusivement masculine puisque les femmes étant reléguées à la sphère privée. D'ailleurs dans son ouvrage, le Contrat social conçu comme un arrachement radical de l'homme de son penchant naturel, il ne dit aucun mot sur les femmes ; néanmoins cet ouvrage a le mérite de se dresser comme l'esquisse de l'Etat de droit et de la démocratie. Mais c'est surtout avec l'Emile ou de l'éducation que Rousseau démontre amplement sa vision réductrice à l'égard de l'image féminine. Ainsi à travers Sophie, un

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personnage clé de cet ouvrage, il pense que le rôle essentiel de la femme se résume à la tenue du foyer et à l'éducation des enfants. Selon lui, la construction d'un ordre social juste passe par la séparation stricte des sexes et de la polarisation du masculin et du féminin à travers l'éducation. Donc point de promiscuité de sexe dans les rôles sociaux, la séparation doit être de mise comme l'illustre les propos de Géneviève Fraisse9 : aux femmes, « la fabrique des moeurs » dans le « gouvernement domestique » et aux hommes, « la fabrique des lois » dans «le gouvernement de la cité ». Dans cette situation, la femme étant à la merci du jugement des hommes, le rôle de l'éducation est de lui inculquer les notions de pudeur et de modestie, vertus cardinales pour plaire aux hommes et mieux s'asservir à eux.

Abordant dans le même sens, dans l'ouvrage de Michèle Riot-Sarcey10, Amar, le rapporteur du comité général de sûreté, estimait que les fonctions privées auxquelles sont destinées les femmes par la nature ne tiennent qu'à l'ordre général de la société, cet ordre résulte de la différence qu'il y a entre l'homme et la femme. Chaque sexe est alors appelé à un type d'occupation qui lui est propre. Son action ne peut être circonscrite que dans ce cercle qu'il ne peut franchir puisqu'imposé par la nature. C'est donc derrière cet argument naturaliste d'une prétendue incapacité naturelle des femmes que se rangent la plupart des savants ayant cautionné cette différenciation sexuelle arbitraire et inique des rôles sociaux. Existe-t-il réellement une nature féminine particulière ? Comment s'opère ce façonnement de préjugés de sorte qu'ils apparaissent acceptables dans l'esprit des gens. A ce propos, parlant de la différenciation sociale des sexes, Simon de Beauvoir (1976) avait déjà souligné son fondement social

9 « Les deux gouvernements : la Famille et la Cité », in Sadoun M. (dir), La démocratie en France, tome 2, Paris, Gallimard, 2000

10 Histoire du féminisme, Paris, La Découverte, 2002

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et culturel. C'est qu'elle tente de mettre en évidence dans son aphorisme : « On ne nait pas femme, on le devient »11. Il n'y a pas une féminité préétablie susceptible de justifier la marginalisation des femmes.

Ce cloisonnement des rôles sociaux fondé sur l'appartenance biologique qui fait de la femme la tenante de la sphère domestique et de l'homme, le détenteur du rôle politique de la société serait lié au processus de socialisation différentielle, source d'inégalité profonde dans la société. Le fait de montrer dès leurs bas âges des attitudes motrices, l'affirmation physique et des dispositions viriles puis à la femme des attitudes coquettes, dociles et accueillantes semble délimiter ou retracer la trajectoire de chaque individu. Ce processus est renforcé par le mécanisme d'identification qui s'opère dans l'évolution de chaque personne.

Pour Pierre Bourdieu12, la lieutenance masculine dans la sphère politique serait liée à un processus d'intériorisation des pratiques socioculturelles qui à force d'être répétées tendent à se naturaliser et à devenir comme normales. Ainsi, les femmes pensent que c'est à elles qu'incombent l'accomplissement des travaux domestiques et aux hommes la responsabilité politique de la société. Dans cette perspective, la famille, l'église et l'Etat constituent les structures privilégiées de culture et de perpétuation de cette domination masculine. Il précise que cette domination n'est nullement un fait de nature mais le résultat d'un processus permanent de reproduction sociale.

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"Tu supportes des injustices; Consoles-toi, le vrai malheur est d'en faire"   Démocrite