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Répercussions qualitatives et quantitatives des mutations agricoles récentes sur les systèmes d'irrigation traditionnels dans le bassin versant de la Vaigai- Periyar, Inde du sud

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par François Mialhe
Université Paris 7 Diderot - Master 2 environnement, milieux, techniques, sociétés 2006
  

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Conclusion

Il est apparu, tout au long du travail, que les tanks ne présentent pas une dynamique uniforme sur l'ensemble du bassin versant. Selon l'échelle et les territoires considérés, des éléments différents interviennent dans l'affaiblissement, ou au contraire, dans le renforcement ou la stabilisation des systèmes basés sur l'irrigation par tanks. Si, au niveau régional, les facteurs physiques (réseau hydrographique, topographie, sols) permettent d'interpréter de manière satisfaisante l'agencement des tanks dans l'espace, il faut, au niveau local, s'appuyer sur des variables plus diversifiées pour comprendre les évolutions récentes du paysage rural. Ainsi, sur certains espaces contigus ou géographiquement proches, et en réponse à des structures internes différentes, des dynamiques opposées ont émergé durant les dernières décennies. Cela démontre, en particulier, l'importance qu'il convient d'accorder aux paramètres, aussi bien endogènes qu'exogènes, susceptibles de modifier la structure sociale ou les comportements individuels des acteurs. Car si l'environnement naturel peut favoriser, voire accélérer certains processus physiques (érosion, comblement), les choix individuels et collectifs représentent le facteur déterminant dans le déclin ou la stabilisation des tanks.

Dans un tel cas de figure, il est apparu nécessaire de ne faire abstraction d'aucun élément du système et de n'omettre aucune hypothèse sur les interactions possibles entre ces éléments. L'articulation des observations à plusieurs échelles et l'intégration de données pluridisciplinaires ont donc participé à la mise en place d'une analyse systémique, adaptée à l'étude d'objets complexes réfractaires aux approches de compréhension classiques et sectorisées. La complexité des systèmes agricoles indiens n'a effectivement pas pu être abordée à partir des concepts d'un seul champ disciplinaire. Elle s'exprime aussi à travers les résultats disparates obtenus.

La période observée, c'est-à-dire des années 1970 aux années 2000, a été le siège de bouleversements mondiaux d'ordre géopolitique et économique. Les changements opérés au lendemain de la décennie des années 1980 ont profondément modifié les objectifs, accru la concurrence et restructuré de nombreux secteurs d'activité, dont l'agriculture. Tous ces éléments contribuent à accélérer le processus de modernisation aux dépens des systèmes traditionnels dont font partie intégrante les tanks. Même si il est difficile d'évaluer et de quantifier les répercussions de ces changements globaux à l'échelle de l'exploitation agricole ou de celle de l'ouvrier agricole, il semble que l'accroissement de la pression sur la ressource en eau, exacerbée par des prélèvements excessifs d'eaux souterraines, soit un signal fort de la restructuration des méthodes de production agricoles, insufflée par une frange de la population (hautes castes ou castes dominantes) en direction d'une financiarisation et d'une marchandisation accrue des produits de l'agriculture. Alors que les problèmes inhérents aux tanks au cours du 19ème siècle et dans la première moitié du 20ème siècle étaient principalement le résultat d'une difficulté à entreprendre des actions collectives, corsé par l'interventionnisme de l'administration britannique, les difficultés actuelles sont, en plus, liées à l'intégration de l'agriculture au marché, qui est un facteur immatériel déterminant mais difficile à cerner. L'augmentation des intrants utilisés est toutefois une des conséquences directes de la modernisation agricole qui accroît le risque pour les petits paysans en diminuant leur autonomie managériale. Dans ce cadre, les tanks répondent de moins en moins aux exigences sur le court terme des nouveaux systèmes de productions, plus grands consommateurs d'eau. La vallée de Cumbum est un exemple probant de cette intensification qui s'appuie sur une pluralité de sources d'irrigation. Dans un tel système, et à l'échelle de la vallée, les tanks ont un rôle accessoire. Néanmoins, la baisse des niveaux piézométriques enregistrée dès les années 1970 et la récurrence des années de sécheresse rend le système particulièrement vulnérable. C'est une des raisons pour lesquelles la revalorisation des produits dérivés du tank, qui permet de dégager des fonds pour la collectivité et qui réduit la vulnérabilité de tous

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les paysans, doit être considérée comme une nécessité. La gestion du tank doit donc se réorganiser pour répondre de manière adéquate aux prochains défis qui se poseront au monde agricole indien. A ce titre, la division des modes de gestion selon la taille des ayacuts et leur sectorisation entre system tanks et non-system tanks apparaissent comme des éléments néfastes à une gestion intégrée au niveau régional. Au niveau des villages, c'est davantage le manque de concertation et de coopération entre les ayacutdars qui a amorcé le déclin des tanks. Si certains espaces dans le sous-bassin de Sarugani, que l'ont pourrait d'ailleurs assimiler à des terroirs, dans la mesure où ils présentent une base de ressources homogène, voient leurs tanks intégrés socialement, écologiquement et économiquement, il faut rappeler que ce sont les conditions environnementales et culturelles particulières qui en sont les responsables, et que l'on ne les retrouve dans aucune autre portion du bassin versant. C'est toutefois l'exemple qui montre que des systèmes agricoles basés sur l'irrigation par tank sont, aujourd'hui, encore viables.

Le travail réalisé aura donc permis, à l'échelle d'un bassin versant, de déterminer les raisons et les facteurs contribuant au déclin des tanks, mais aussi les disparités, les originalités et les hétérogénéités spatiales, sociales et culturelles rattachées au systèmes agricoles. En cela, il constitue un outil qu'il serait intéressant de développer afin de confirmer ou d'infirmer certaines hypothèses émises, en particulier sur les états de surface du lit des tanks. L'approche systémique semble, quant à elle, adaptée à de telles problématiques qui font intervenir des logiques économiques, des changements d'ordre idéologique, des problèmes liés à la dégradation de l'environnement, des conflits d'usage lié à l'utilisation de l'eau et des questions d'éthique et d'équité entre les acteurs.

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