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Déterminants des disparités régionales en matière de scolarisation des enfants au Tchad

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par Hervé NOUBADIGNIM Ronelyambaye
Institut de Formation et de Recherche Démographiques (IFORD) /Université de Yaoundé II - Diplôme d'Etudes Supérieures Spécialisées en Démographie (DESSD) 2005
  

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CONCLUSION PARTIELLE......................................................................71

CHAPITRE V : ESSAI D'IDENTIFICATION DE QUELQUES DÉTERMINANTS DES DISPARITÉS RÉGIONALES EN MATIÈRE DE SCOLARISATION DES ENFANTS AU TCHAD..............................73

1) VUE GLOBALE DES DISPARITÉS RÉGIONALES EN MATIÈRE DE SCOLARISATION .................................................................................73

2) DIFFÉRENCES SELON LE MILIEU DE RÉSIDENCE...................................77

3) DIFFÉRENCES SELON LES CARACTERISTIQUES DU CHEF DE MÉNAGE....79

4) DIFFÉRENCES SELON LE NIVEAU DE VIE DU MÉNAGE...........................81

5) DIFFÉRENCES SELON LE SEXE DES ENFANTS.......................................83

6) DIFFÉRENCES SELON L'AGE DES ENFANTS..........................................84

CONCLUSION PARTIELLE.........................................................................85

SYNTHÈSE ET CONCLUSION GENERALE..................................87

BIBLIOGRAPHIE...................................................................91

ANNEXES.............................................................................97

AVANT-PROPOS

Le programme de formation à l'I.FO.R.D. est centré sur la collecte des données démographiques, l'analyse et l'interprétation des phénomènes démographiques, la mise en évidence des relations existant entre phénomènes démographiques et phénomènes économiques et sociaux ainsi que sur l'élaboration et la gestion des programmes de population.

Le mémoire est l'un des modules inscrits dans ce programme afin de tester la capacité des étudiants à mener des recherches sur un sujet portant sur la population et le développement, bien entendu en respectant les différentes étapes d'une recherche en Sciences Sociales.

Aussi avons-nous opté de travailler sur un sujet de haute importance pour les populations humaines à savoir l'éducation.

Faut-il le rappeler, l'éducation influence le bien-être des personnes, des communautés et des nations. Elle contribue à améliorer les conditions d'existence et la qualité de la vie et permet d'offrir à tous les membres de la société des opportunités irremplaçables (Banque mondiale, 2000). Une éducation pertinente et de bonne qualité est le moyen par excellence d'inculquer le sens de responsabilité en même temps que de permettre l'exercice des droits individuels. Or en Afrique, de nombreux enfants d'âge scolaire, et notamment les filles et enfants orphelins ou confiés, ne vont pas à l'école.

En avril 2000, les délégués du Forum Mondial sur l'Éducation tenu au Sénégal ont rédigé collectivement le cadre d'activités de Dakar dans lequel ils se sont engagés à :

- faire en sorte que d'ici 2015 tous les enfants, notamment les filles et les enfants en difficulté ou issus de minorités ethniques, aient la possibilité d'accéder à un enseignement primaire obligatoire et gratuit de qualité et de le suivre jusqu'à son terme ;

- éliminer les disparités entre les sexes dans l'enseignement primaire et secondaire d'ici 2005 et instaurer l'égalité dans ce domaine d'ici 2015 en veillant notamment à assurer aux filles l'accès équitable et sans restriction à une éducation de base de qualité avec les mêmes chances de réussite.

Nous avons choisi de travailler plus spécifiquement sur les disparités régionales en matière de scolarisation et l'aspect "inégalités de chances"des enfants car cela fait partie des huit Objectifs du Millénaire pour le Développement (O.M.D.).

Les O.M.D. étant le fruit d'un consensus mondial sur ce qu'il faut pour parvenir à réduire durablement la pauvreté, nous aimerions grâce à ce travail contribuer à mettre en évidence les pesanteurs régionales en matière de scolarisation qui orienteront les actions de lutte contre la pauvreté dans le monde.

LISTE DES SIGLES ET ABREVIATIONS

ATEP : Association Tchadienne pour l'Etude de la Population

BEPC : Brevet d'Etudes du Premier Cycle

BET : Borkou-Ennedi-Tibesti

BIT : Bureau International du Travail

CEPE : Certificat d'Etudes Primaires Elémentaires

CM : Chef de Ménage

DCAP : Direction de la Coordination des Activités en matière de Population

ECOSIT : Enquête sur la Consommation et le Secteur Informel au Tchad

EDS (DHS) : Enquête Démographique et de Santé (Demographic and Health Surveys)

EIMT : Enquête par grappes à Indicateurs Multiples du Tchad

EPT (EFA): Education Pour Tous (Education For All)

EPU : Enseignement Primaire Universel

FASAF : Famille et Scolarisation en Afrique

FNUAP : Fonds des Nations Unies pour les Activités en matière de Population

IDH : Indice de Développement Humain

IFORD : Institut de Formation et de Recherche Démographiques

IIPE : Institut International de la Planification de l'Education

IPT : Indice de Parité des Taux

ISSED : Institut Supérieur des Sciences de l'Education

ISU : Institut de Statistique de l'UNESCO

MEN : Ministère de l'Education Nationale

MPDC : Ministère du Plan, du Développement et de la Coopération

ONUSIDA : programme commun des Nations Unies sur le VIH/SIDA

PAS : Programme d'Ajustement Structurel

PNUD : Programme des Nations Unies pour le Développement

RGPH : Recensement Général de la Population et de l'Habitat

RT : République du Tchad

SIDA : Syndrome Immuno Déficience Acquise

SNRP : Stratégie Nationale de Réduction de la Pauvreté

UEPA : Union pour l'Etude de la Population Africaine

UNICEF : Fonds des Nations Unies pour l'Enfance

UNESCO : Organisation des Nations Unies pour l'Education, la Science et la Culture

ZD : Zone de Dénombrement.

LISTE DES TABLEAUX

Tableau 1.1 : taux de scolarisation des enfants de 6-15 ans par sexe, selon la préfecture au RGPH de 1993.............................................................................................14

Tableau 1. 2 : Taux Brut (TBS) et Taux Net (TNS) de scolarisation dans le primaire dans quelques pays africains de 1998 à 2003 (en %)......................................................15

Tableau 3.1 : informations et pondération utilisées pour la construction de l'indicateur du niveau de vie des ménages..............................................................................46

Tableau 3.2 : effectifs des ménages, des femmes et des hommes sélectionnés, identifiés et enquêtés et taux de réponse selon le milieu de résidence...........................................47

Tableau 3.3: taux de réponses selon les variables retenues.........................................48

Tableau 3.4: indices de Myers.........................................................................51

Tableau 3.5 : indices de Whipple......................................................................52

Tableau 4.1.1 : répartition des enfants de 6 à 14 ans selon la région de résidence...............56

Tableau 4.1.2.a : taux de scolarisation des enfants de 6 à 14 ans selon le degré d'urbanisation en 1996/1997..............................................................................................57

Tableau 4.1.2.b : taux de scolarisation des enfants de 6 à 14 ans selon la préfecture de résidence en 1996/1997..................................................................................57

Tableau 4.1.3 : répartition des enfants de 6 à 14 ans par région selon la fréquentation scolaire (avec N'djaména comme région de résidence)........................................................58

Tableau 4.1.4 : répartition des enfants de 6 à 14 ans dans les trois régions selon la fréquentation scolaire.....................................................................................59

Tableau 4.2 : Indice de Parité des Taux de non-scolarisation des enfants de 6-14 ans des différentes régions du Tchad............................................................................60

Tableau 4.3.1.a : taux de scolarisation des enfants de 6-14 ans des différentes régions du Tchad selon le milieu de résidence.....................................................................61

Tableau 4.3.1.b : Variations des IPT(r/i) et taux de scolarisation des enfants de 6-14 ans selon le milieu de résidence.....................................................................................................61

Tableau 4.3.2.a : taux de scolarisation des enfants de 6-14 ans des différentes régions selon les caractéristiques des ménages.....................................................................................63

Tableau 4.3.2.b : Variations des IPT(r/i) et taux de scolarisation des enfants de 6-14 ans selon le niveau de vie du ménage.......................................................................................63

Tableau 4.3.3.a: taux de scolarisation des enfants de 6-14 ans des différentes régions du Tchad selon les caractéristiques des chefs de ménage...............................................64

Tableau 4.3.3.b : variations des IPT (r/i) et taux de scolarisation des enfants de 6-14 ans selon le niveau d'études et sexe du chef de ménage ..........................................................................64

Tableau 4.3.4.a: taux de scolarisation des enfants des différentes régions du Tchad selon sexe et l'âge de l'enfant..............................................................................................65

Tableau 4.3.4.b Variations des Indices de Parité des taux IPT (r/i) et taux de scolarisation selon le sexe et l'âge de l'enfant..........................................................................................65

Tableau 4.4 : taux de scolarisation des filles et des garçons de 6-14 ans et IPT(g/f) par région selon le milieu de résidence.............................................................................66

Tableau 4.5.1 : variations des rapports de féminité des taux de scolarisation (Rf) et IPT (g/f) selon la région de résidence à l'EDS au Tchad en 1996/1997......................................67

Tableau 4.5.2 : variations des taux de scolarisation des filles et des garçons et IPT (g/f) selon la région de résidence à l'EDS au Tchad en 1996/1997 par tranche d'âges.......................67

Tableau 4.6 : taux de scolarisation des filles et des garçons de 6-14 ans et IPT (g/f) par région selon le niveau de vie des ménages............................................................68

Tableau 4.7 : variations des rapports de féminité des taux de scolarisation (Rf) et IPT (g/f) selon le sexe du chef de ménage à l'EDS au Tchad en 1996/1997.................................69

Tableau 4.8: taux de scolarisation des filles et des garçons de 6-14 ans et IPT (g/f) par région de résidence selon le sexe du chef de ménage à l'EDS au Tchad en 1996/1997....................70

Tableau 4.9 : variations des taux de scolarisation des filles et des garçons de 6-14 ans et IPT (g/f) selon le niveau d'études du chef de ménage à l'EDS au Tchad en 1996/1997...............................................................................................................................70

Tableau 4.10 : variations régionales des taux de scolarisation des filles et des garçons de 6-14 ans et IPT (g/f) selon le niveau d'études du chef de ménage à l'EDS au Tchad en1996/1997...... .........................................................................................71

Tableau 5.1: rapports de chances de scolarisation des enfants de 6 à 14 ans selon leur région de résidence au Tchad....................................................................................75

Tableau 5.2: rapports de chances de scolarisation des enfants de 6 à 14 ans selon leur région de résidence et le milieu de résidence au Tchad......................................................78

Tableau 5.3.1: rapports de chances de scolarisation des enfants de 6 à 14 ans selon leur région de résidence et le sexe du chef de ménage au Tchad................................................79

Tableau 5.3.2 : rapports de chances de scolarisation des enfants de 6 à 14 ans selon leur région de résidence et le niveau d'instruction du chef de ménage au Tchad.....................81

Tableau 5.4 :rapports de chances de scolarisation des enfants de 6 à 14 ans selon leur région de résidence et le niveau de vie du ménage au Tchad...............................................82

Tableau 5.5. : rapports de chances de fréquentation scolaire des enfants de 6 à 14 ans selon la région de résidence et le sexe de l'enfant au Tchad ...........................................................83

Tableau 5.6: rapports de chances de fréquentation scolaire des enfants de 6 à 14 ans selon la région de résidence et l'âge de l'enfant au Tchad...........................................82

Tableau A.1 : répartition des enfants de 6 à 14 ans par région de résidence selon le niveau d'instruction du chef de ménage au Tchad en 1996/1997...........................................97

Tableau A.2 : répartition des enfants de 6 à 14 ans par région de résidence selon le niveau de vie du ménage au Tchad en 1996/1997................................................................97

Tableau A.3 : répartition des écoles selon le milieu d'implantation en 2000/2001 au Tchad.......................................................................................................97

Tableau A.4 : répartition des écoles élémentaires selon l'année de création en 2000/2001 au Tchad.......................................................................................................98

Tableau A.5 : répartition des écoles selon la langue d'enseignement en 2000/2001 au Tchad...................................................................................................... 98

Tableau A.6 : taux de scolarisation des enfants de 6-15 ans par sexe, selon le milieu de résidence et la religion au RGPH du Tchad en 1993 (en %).......................................99

Tableau A.7 : taux de scolarisation des enfants de 6-15 ans par milieu de résidence et sexe, selon le grand groupe ethnique au RGPH du Tchad en 1993 (en %)............................100

Tableau A.8 : rapports de chances de fréquentation scolaire des enfants de 6 à 9 ans et ceux de 10 à 14 ans en fonction de leur sexe au Tchad en 1996/1997.................................100

Tableau A.9: rapports de chances de fréquentation scolaire des filles et des garçons de 6 à 9 ans et ceux de 10 à 14 ans par région de résidence au Tchad en 1996/1997....................101

LISTE DES FIGURES

Figure 1.1 : carte administrative du Tchad.....................................................................7

Figure 2.1 : schéma conceptuel des déterminants des disparités régionales en matière de scolarisation des enfants...........................................................................................39

Figure 3.1: schéma d'analyse des déterminants des disparités régionales en matière de scolarisation des enfants................................................................................ .45

Figure 3.2.1 : répartition des enfants scolarisables selon l'âge.....................................49

Figure 3.2.2 : répartition des effectifs des garçons par âge ........................................49

Figure 3.2.3 : répartition des effectifs des filles par âge ...........................................50

Figure 3.2.4 : taux de scolarisation par âge des enfants de 6 à 14 ans............................50

Figure 4.1 Proportions d'enfants non scolarisés par région (avec N'djaména comme région)......................................................................................................58

Figure 4.2 Proportions d'enfants non scolarisés dans les 3 régions................................59

RÉSUMÉ

Au Tchad, le droit à l'éducation, à la formation et à l'information est reconnu par la constitution. Garantir le droit à l'éducation signifie que l'Etat a le devoir d'assurer à tous les citoyens les moyens de satisfaire leurs besoins éducatifs fondamentaux. L'éducation de base doit donc être à la fois gratuite, obligatoire et de bonne qualité pour arriver à satisfaire les exigences de l'EPT (Education Pour Tous) d'ici 2015.

En jetant un regard interrogatif sur la situation scolaire des enfants tchadiens, on se rend compte que tous les enfants ne sont pas scolarisés et que cette situation diffère selon les régions. Il est évident que rechercher les facteurs explicatifs de cette situation est une contribution à la résolution dudit problème.

L'objectif général de la présente étude est de mettre à la disposition des décideurs et autres utilisateurs potentiels des informations susceptibles de les éclairer dans la prise des décisions relatives au développement social et économique du Tchad en tenant compte des spécificités régionales.

A l'aide des données de l'EDS (Enquête Démographique et de Santé) de 1996/1997, elle évalue la scolarisation des enfants selon leur région de résidence. Elle a ainsi montré qu'au Tchad :

1) les disparités régionales en matière de scolarisation des enfants sont plus prononcées en milieu rural qu'en milieu urbain ;

2) les disparités régionales en matière de scolarisation des enfants sont plus prononcées dans les ménages dont le chef a un niveau d'instruction bas que dans les ménages dont le chef a un niveau d'instruction élevé, dans les ménages pauvres que dans les ménages riches et presque identiques dans les ménages dirigés par les hommes et dans ceux dirigés par les femmes ;

3) les disparités régionales en matière de scolarisation augmentent avec l'âge des enfants ;

4) les disparités régionales en matière de scolarisation des enfants sont plus importantes chez

les garçons que chez les filles.

Les disparités régionales s'expriment crûment par une très forte variation des taux de scolarisation. On constate que la région du Sud se détache des autres régions en affichant le taux de scolarisation primaire le plus élevé (44,0%). Le centre et le Nord enregistrent comme taux de scolarisation primaire respectivement 33,5 % et 9,3%. Ce taux est de 32,6% sur le plan national.

Un certain nombre de recommandations ont été formulées en vue de remédier à la situation observée :

· inciter les autorités coutumières ou traditionnelles et religieuses de toutes les régions et surtout celles du Sud du pays à promouvoir le maintien des filles et enfants en situation nécessitant une protection spéciale à l'école au moins jusqu'à la fin du cycle primaire ;

· lutter contre la pauvreté des ménages par une meilleure prise en charge de la demande scolaire des milieux défavorisés et réduire les coûts d'acquisition des fournitures scolaires ;

· l'offre scolaire en milieu rural doit être améliorée par les pouvoirs publics : mise en place et amélioration des infrastructures scolaires dans toutes les régions et surtout la création des écoles bilingues dans les régions habitées majoritairement par des musulmans.

INTRODUCTION GÉNÉRALE

« Donnez aux gens une obole ou un outil, et ils vivront un peu mieux.

Donnez-leur l'éducation, et ils changeront le monde »

(Banque mondiale, 2000).

L'éducation est source de pouvoir et de liberté. L'éducation est l'avenue de choix pour échapper à la pauvreté, la marginalisation et la mauvaise santé (ACDI, 2001). L'éducation est le fondement de la démocratie et des droits de la personne. On sait que l'éducation, en particulier chez les filles, est le meilleur investissement qu'un pays puisse faire.

L'éducation des filles et des mères présente des avantages sociaux et économiques incommensurables. En effet, les mères éduquées sont plus susceptibles d'adopter de bonnes pratiques sanitaires et nutritionnelles que celles qui ne le sont pas. Les filles qui ont un minimum de huit années de scolarisation se marieront probablement plus tard, auront moins d'enfants et utiliseront plus volontiers des moyens de contraception. Les mères éduquées sont également plus enclines à envoyer leurs propres filles à l'école et à veiller à ce qu'elles tirent parti socialement et économiquement de l'éducation qu'elles reçoivent. Les données disponibles indiquent que chaque année supplémentaire de scolarisation des filles se traduit par une baisse de 5 à 10% de la mortalité infantile (Allen, 1995).

Pour Tchegho (1999), le développement humain durable, qui apparaît de nos jours comme le seul moyen d'améliorer le bien-être des générations actuelles sans compromettre celui des générations futures, est inconcevable sans la participation active des femmes. Elles constituent un important potentiel de ressources humaines dont la non valorisation causerait beaucoup de préjudices à l'environnement : déchets ménagers, feu de brousse, méthode culturale, etc.

Il convient de préciser que l'éducation, facteur de cohésion nationale, vecteur attendu de justice sociale, agit également dans les domaines du travail et de la lutte contre le VIH/SIDA. Lors du forum mondial sur l'éducation de Dakar, Peter Piot, directeur exécutif de l'ONUSIDA, déclarait que «l'éducation peut être une arme puissante-sans doute la plus puissante-pour combattre l'extension du VIH/SIDA ». Il avait de bonnes raisons de l'affirmer : cette maladie n'a pas de remède, les perspectives de vaccin sont encore lointaines et l'accès universel et durable aux thérapies antirétrovirales rencontre d'immenses difficultés. Dans ce contexte, la société ne dispose que de l'éducation pour endiguer l'épidémie (IIPE, 2004). Marx (1976 : Cité par Kouamé, 1987 : 33) reconnaît que l'éducation augmente les capacités de production des travailleurs lorsqu'il écrit : « ...pour transformer la nature humaine, pour lui faire acquérir aptitude, précision et célérité dans une branche de travail déterminée, c'est-à-dire pour en faire une force de travail développée pour une tâche spéciale, il faut une certaine éducation ou formation... ».

La scolarisation est une préoccupation mondiale tant elle a fait l'objet des déclarations et des conventions adoptées par la communauté internationale à des différentes occasions. Nous citerons entre autres : la déclaration universelle des droits de l'Homme (1948), la conférence des États africains pour le développement de l'éducation (1961), le sommet mondial pour les enfants (1990), la conférence sur l'environnement et le développement (1992), la conférence mondiale sur les droits de l'Homme (1993), la conférence internationale sur la population et le développement (1994), la conférence mondiale sur les besoins éducatifs spéciaux : accès et qualité (1994), la quatrième conférence mondiale sur les femmes (1995), la conférence internationale sur le travail des enfants (1997) et le forum mondial sur l'éducation (2000).

Au cours des rencontres qui ont abouti à l'adoption de ces conventions et déclarations, l'objectif principal était d'assurer à tous les enfants d'âge scolaire un Enseignement Primaire Universel (EPU). Mais cet objectif est loin d'être réalisé surtout en Afrique noire où presque tous les indicateurs sociaux sont au rouge. Le bilan mondial de l'EPT à l'an 2000 montre que des progrès importants ont été accomplis dans beaucoup de pays. Cependant, plus de 113 millions d'enfants n'ont pas accès à l'enseignement primaire, l'on dénombre encore 880 millions d'adultes analphabètes, la discrimination sexuelle continue de sévir dans les systèmes éducatifs et la qualité de l'apprentissage et l'acquisition des valeurs humaines et de compétences est loin de répondre aux aspirations et aux besoins des individus et des sociétés. Beaucoup d'enfants sont exclus du système éducatif formel.

En plus de ses problèmes traditionnels, l'école africaine est victime des ajustements structurels auxquels sont soumis les États. Il y a une inadéquation entre la demande et l'offre scolaires. Le système scolaire est secoué et l'État a du mal à soutenir l'édifice. La demande d'éducation n'est pas satisfaite et parfois ignorée. Du fait de la croissance démographique rapide, les infrastructures scolaires deviennent de plus en plus insuffisantes pour accueillir les enfants ayant l'âge officiel d'admission. Pour adapter les infrastructures et les ressources disponibles à cette demande, certaines solutions sont proposées à savoir l'instauration du système des classes à double flux ou vacations dans les centres urbains et la généralisation des classes multigrades à cours jumelés en zone rurale. L'initiative privée essaie comme elle peut de pallier les défaillances, souvent dans la plus grande anarchie. Il faut noter que la demande existante ne concerne pas tous les enfants scolarisables.

Et pourtant, dans notre société basée sur le savoir, ceux qui reçoivent une bonne éducation de base peuvent continuer à apprendre tout au long de leur vie et se maintenir économiquement à flot alors que ceux qui n'ont aucune formation scolaire solide sont voués à rester sur le bord de la route (UNESCO, 1998). En plus sans instruction, les enfants sont socialement, moralement et intellectuellement défavorisés. Ils sont alors vulnérables face à divers dangers et maux de la société (toxicomanie, vandalisme, prostitution, etc.).

Des études donnant des valeurs globales des indicateurs et indices en matière de scolarisation peuvent occulter de fortes disparités. Ainsi par exemple, au niveau des pays en voie de développement, la vie scolaire peut atteindre 8 à 10 ans dans certains pays asiatiques ou en Amérique latine mais reste faible sur le continent africain où elle n'atteint pas toujours deux ni même parfois une année dans la zone sahélienne (Guillon, 2004). Cela peut donc susciter des études permettant de cerner ces différences et les atténuer dans la mesure du possible.

D'après Wakam (2005), les problèmes liés à la demande scolaire en Afrique sont :

- le défi démographique (l'explosion de la population scolarisable) ;

- les inégalités en matière de scolarisation (entre villes et campagnes, entre régions, entre garçons et filles, entre riches et pauvres, etc.) ;

- l'absence de motivation dans certaines régions pour des raisons culturelles entre autres.

D'après le même auteur, au recensement du Cameroun, réalisé en 1987, il y avait une grande variation du taux de scolarisation selon le milieu et la province de résidence. Les provinces les moins scolarisées étaient le Nord et l'Extrême-Nord (provinces très proches de la République du Tchad en termes de distance et de contexte socioculturel).

Dans un rapport de 1989 intitulé "scolarisation primaire dans la province de l'Extrême-Nord", le Ministère du Plan et de l'Aménagement du Territoire (MINPAT) du Cameroun a fait ressortir un certain nombre de facteurs susceptibles d'expliquer le faible niveau de scolarisation observé dans cette province. Parmi les raisons évoquées, on note :

- l'incompréhension du bien-fondé de l'école de la part des parents ;

- la prédominance dans cette partie du territoire national des activités agricoles et pastorales auxquelles se livrent les familles (migrations liées à la pêche, déplacement pendant la période de transhumance à la recherche des pâturages pour les troupeaux, récolte saisonnière de riz et de coton...) ;

- la cohabitation conflictuelle des populations islamisées et des populations animistes (Pilon et Yaro, 2001 :124).

La région de résidence constitue l'une des variables pour lesquelles on relève d'importants différentiels. Dans beaucoup de pays d'Afrique noire, les régions sont des unités administratives qui présentent entre elles des différences en matière de climat, de modes de vie, d'activités économiques, de ressources alimentaires, d'infrastructures sociales, etc. Ces différences entraînent indubitablement aussi des différences de niveau de scolarisation.

Or, pour mieux connaître le tout, il faut nécessairement connaître particulièrement les parties. Élucider les disparités régionales en matière de scolarisation est donc une contribution permettant de cerner la situation globale avec plus de précision.

Le Tchad, pays d'Afrique subsaharienne ayant connu trois décennies de troubles sociopolitiques qui ont annihilé tous ses efforts dans les domaines socio-économiques est confronté à de sérieux problèmes d'éducation. Au Tchad, près de la moitié de la population (48%) a moins de 15 ans, les taux bruts de scolarisation primaire sont de 31,8% pour l'ensemble du pays, 53% pour le milieu urbain, 26% pour le milieu rural et par rapport au sexe 40,4 % de garçons fréquentent contre 22,8% de filles (RT, 1995).

Selon les résultats de l'Enquête Démographique et de Santé (EDS) réalisée en 1997 au Tchad, le taux d'analphabétisme chez les 6 ans et plus est de 67% parmi la population tchadienne. Il atteint 78% chez les femmes et 56% chez les hommes. Un homme sur trois (34%) et une femme sur cinq (19%) ont une instruction primaire tandis que 9% des hommes et seulement 2% des femmes ont atteint le niveau secondaire ou plus (Ouagadjio et al., 1998).

A l'EIMT (Enquête par grappes à Indicateurs Multiples du Tchad) ou MICS de 2000, 39,2% des enfants de 6 à 11 ans fréquentaient un établissement primaire. Les résultats de l'EIMT montrent une nette différence selon le milieu de résidence. Dans les zones urbaines, 55,3% des enfants sont scolarisés, tandis que dans les zones rurales, seulement 34,4% le sont. Particulièrement, à N'djaména, ce sont 59,2% des enfants de 5 à 11 ans qui sont inscrits au niveau primaire (RT, 2000).

Il faut noter qu'on a observé beaucoup d'écoles publiques des zones méridionales et des grandes villes du Tchad fonctionner avec des effectifs pléthoriques alors que des écoles construites dans certaines régions septentrionales (bastion des populations nomades) du pays dotées de cantines scolaires sont restées presque vides et des parents potentiellement en mesure de supporter tous les coûts de scolarisation ne pas se préoccuper de la scolarisation des filles. Pour beaucoup de spécialistes de l'éducation au Tchad, il y a plus de filles non-scolarisées que de garçons à tous les niveaux, même lorsque les chiffres relatifs aux effectifs montrent qu'il y a davantage de filles à l'école.

En somme on est tenté à l'observation de dire que les connaissances, attitudes et pratiques des familles tchadiennes en matière d'éducation des enfants sont sexistes car le droit à l'éducation se résume à une affaire des hommes ; situation qui a pour corollaires la féminisation de l'analphabétisme et de la pauvreté lorsqu'on sait que l'éducation formelle est un important facteur de mobilité sociale et d'accès au secteur formel de l'économie (Mimché, 2004).

La non-scolarisation des enfants constitue pour le Tchad un grand problème auquel des solutions urgentes doivent être apportées. Son ampleur et sa complexité exigent une intervention dans le domaine aussi bien des décideurs que des chercheurs (Mbaindoh, 1996).

Pour Dabsou (2001), les inégalités en matière de scolarisation au Tchad sont très fortes dans toutes les régions. Les filles sont pratiquement désavantagées dans toutes les régions, même si au Centre, elles semblent avoir un léger avantage que leurs consoeurs du Nord et du Sud en termes de rapport de chances de fréquentation scolaire. Et que sur le plan national, les enfants confiés sont mieux scolarisés que ceux des chefs de ménage.

D'après Akoto, «il est vain de chercher à améliorer la scolarisation d'une population uniquement à partir de l'offre d'éducation. La connaissance des mécanismes qui sous-tendent sa demande (notamment au niveau de la famille, de la collectivité et de l'État), couplée à celle des facteurs liés à l'offre, est, à n'en pas douter, l'une des meilleures voies pour atteindre cet objectif » (Pilon et Yaro, 2001).

Comme ces résultats ne mentionnent pas les facteurs qui sont à l'origine des déficits et des écarts de scolarisation entre les régions, il est indispensable de mener une étude approfondie pour mieux connaître les déterminants de la non- scolarisation des enfants selon les régions, et notamment des filles au Tchad. Des études sur la demande d'éducation sont ainsi indispensables pour comprendre les logiques, étant donné que le phénomène semble lié aux caractéristiques socio-économiques, démographiques, culturelles et idéologiques des parents ou du tuteur ainsi que de l'enfant (Wakam et Banza, 1998).

Ces dernières années, de nombreux travaux ont été réalisés sur la demande d'éducation en Afrique. Ceux-ci montrent que les femmes chefs de ménage scolarisent davantage et mieux

les enfants que leurs homologues hommes (Wakam, 2002a ; Pilon et Yaro, 2001).

L'objet de cette étude est d'expliquer les déséquilibres régionaux observés en matière de scolarisation au Tchad en mettant un accent particulier sur les inégalités de chances de fréquentation scolaire des enfants résidant au Sud et au Nord du pays.

Notre question de départ est la suivante :

Quels sont les déterminants des disparités régionales en matière de scolarisation des enfants au Tchad ?

De manière spécifique, nous cherchons à répondre aux questions suivantes :

- les disparités régionales en matière de scolarisation des enfants varient-elles en fonction de l'âge et du sexe des enfants ?

- les disparités régionales en matière de scolarisation des enfants sont-elles identiques en milieu rural et en milieu urbain ? dans les ménages pauvres et dans les ménages riches ? dans les ménages dirigés par des chefs instruits et dans ceux dirigés par des analphabètes ? dans les ménages dirigés par des hommes et dans les ménages dirigés par des femmes ?

L'objectif général de cette étude est de mettre à la disposition des décideurs et autres utilisateurs potentiels des informations susceptibles de les éclairer dans la prise des décisions relatives au développement social et économique du Tchad en tenant compte des spécificités régionales.

Il s'agira plus spécifiquement :

1) de rendre compte des disparités régionales en matière de scolarisation des enfants au Tchad ;

2) d'identifier la part des caractéristiques des enfants (plus particulièrement du sexe et de l'âge) dans l'explication des disparités régionales de chances de scolarisation des enfants au Tchad ;

3) de cerner les déterminants de la non-scolarisation des enfants selon les régions au Tchad.

La présente étude se compose de cinq chapitres. Le premier portera sur le contexte et la justification de l'étude. Le cadre théorique de l'étude sera présenté dans le deuxième chapitre. Le troisième chapitre abordera le cadre d'analyse et les aspects méthodologiques. Dans le quatrième chapitre, nous examinerons les inégalités régionales en matière de scolarisation au Tchad. Le cinquième chapitre sera consacré à l'essai d'identification de quelques déterminants des disparités régionales en matière de scolarisation des enfants au Tchad. Nous terminerons ce travail par les principales conclusions et recommandations découlant de cette recherche.

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"Là où il n'y a pas d'espoir, nous devons l'inventer"   Albert Camus