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Impact de l'introduction de l'ETP sur les transformations des systèmes d'activités et les transformations identitaires des infirmières devenant aussi "éducatrices"

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par Malika Salhi-Bouyagoub
Université Paul-Valéry Montpellier II - Master 2 2015
  

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III- Présentation de l'identité professionnelle de l'infirmière

L'identité professionnelle de l'infirmière est étroitement liée à son histoire. Il s'agit de la reconnaissance d'une profession. L'identité professionnelle pour la majorité des infirmières est déjà construite dès son entrée à l'Institut de Formation des Soins Infirmiers (IFSI). Selon Dubar (2002, p.142), « on quitte la formation initiale avec une identité professionnelle reconnue ». La population des étudiantes infirmières est très hétérogène durant la période de formation. Celle-ci regroupe différentes tranches d'âges (entre 17 et 50 ans), de diverses origines et majoritairement féminines. Ces personnes justifient soit du baccalauréat, ou d'autres niveaux d'études équivalent. Ces futures infirmières peuvent être aussi des professionnels de la santé en promotion ( comme le cas des aides-soignantes et des auxiliaires de puériculture) et autres professionnels en reconversion ayant exercés dans d'autres secteurs. Si on se réfère à la socialisation de Dubar (1998, p.135), ces infirmières en formation possèdent déjà une identité personnelle et une conception de la profession en lien avec leur identité, leur culture, leurs expériences, et leur histoire de vie. Ce qui signifie que toute personne qui arrive en formation paramédicale dispose de représentations, de conceptions et de connaissances préalables qui auront forcement, une influence sur les acquisitions ultérieures. Ces étudiantes infirmières vont donc évoluer individuellement de façon différente au cours de la même formation. Elles possèdent déjà une identité personnelle reconnue par les autres et elles construisent une nouvelle identité dont elles revendiquent la reconnaissance (Dubar, 1998, p.139).

De par la législation qui réglemente la profession des infirmières, celles-ci travaillent en équipe et partagent un ensemble commun de pratiques et de valeurs dans leurs diverses activités quotidiennes, constituant ainsi une part importante de leur identité professionnelle. Une sorte d'identité transmise et partagée dès l'apprentissage par alternance pendant les stages pratiques exigés par la formation initiale (théorie/pratique), et tout au long du parcours professionnel (Dubar, 2002, p.142). Donc, l'infirmière s'identifie et se construit face à cet ensemble commun, qui définit toutefois le rôle attendu de ces professionnelles, c'est-à-dire en quelque sorte leur professionnalité. Cette professionnalité, organisée par les connaissances, les capacités, les compétences et les savoirs, est propre à une profession (Wittorski, 2005, p. 9). En effet, l'identité professionnelle pour l'infirmière ne peut être que le résultat d'un processus collectif comme nous l'a précisé Dubar (2002, p.141). Celle-ci en s'identifiant à un groupe de professionnel dans son service de soins, vit une sorte d'« identification » toute particulière, à

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savoir : sa personne avec son vécu, ses valeurs, ses expériences qui ont forgé son caractère et son identité personnelle. Si cette infirmière se retrouve face à des interactions nouvelles avec un mode méconnu comme la pratique d'une nouvelle activité ETP, alors qu'elle a déjà une activité bien définie, elle-même marquée d'une identité d'infirmière reconnue par des patients et des professionnels (multidisciplinaire). Elle doit donc s'identifier face à ces mutations dans son activité d'infirmière. Elle doit aussi se sentir reconnu par ses pairs et par les patients dans son nouveau rôle d'éducatrice, pour acquérir une identité d'infirmière éducatrice. Nous supposons que tout changement dans les habitudes de travail de cette infirmière, entraînera des transformations identitaires profondes et une réorganisation de la hiérarchie des activités et des priorités. Selon P. Tap (1998, p. 66), « cette identité constitue un effort constant pour gérer la continuité dans le changement, ce qui n'est pas toujours facile ». L'identité ne devient alors « une préoccupation et un objet d'analyse que lorsque les acteurs n'arrivent plus à s'accorder sur la signification de la situation et les rôles qu'ils sont censés tenir » (Pollak, 1990, p. 10).

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Synthèse de la première partie

Nous venons de constater au travers de la première partie de notre travail, que le nombre alarmant des personnes vivant avec une maladie chronique déclaré par le Ministère de la santé et de la solidarité en 2007, représente un problème de santé pour la population et un véritable souci pour notre société, plaçant l'ETP au coeur des débats des politiques et des professionnels de la santé, une des priorités en matière de santé publique. Suite à ce constat, l'activité ETP devient une nécessité, reconnue par l'OMS-Europe en 1998, la décrivant comme une continuité indispensable à l'éducation à l'auto soin. Plusieurs études engagent des enjeux sociaux, théoriques et épistémologiques comme principaux facteurs pouvant être considérés à l'origine de son émergence. La pratique de cette activité éducative a été reconnue officiellement par la France en 2009. Elle s'inscrit dans le parcours des soins du patient atteint d'une pathologie chronique. Les modalités de sa mise en oeuvre sont décrites dans des articles de loi. Dans ce sens, des programmes éducatifs sont conçus pour les patients. Leurs actions s'appuient sur un cadre législatif et, leur mise en oeuvre a été confiée aux professionnels de la santé.

Cette pratique éducative nécessite une combinaison des modèles de la santé avec ceux de différentes disciplines comme la psychologie, la sociologie, la psychologie sociale, l'anthropologie et les sciences de l'éducation. Elle apparaît comme une activité à part entière qu'on peut assimiler aux autres soins curatifs. Son action d'accompagnement ne peut se réduire à l'information sur des notions de savoirs ou de savoir-faire (information sur une pathologie, ou technique d'auto soin), elle nécessite un accompagnement pédagogique, le fait qu'elle vise l'appropriation des savoirs et savoirs- faire par les patients.

Nous venons de voir aussi au travers de cette partie, la très grande diversité que revêt l'activité infirmière avec toute sa complexité et sa richesse. En effet, l'activité de l'infirmière, et l'organisation de son système d'activités ne dépendent pas forcément que de l'application des prescriptions médicales, c'est aussi un rôle propre, ou l'infirmière a la capacité de prendre des décisions et des responsabilités pour les différentes tâches qu'elle décide d'entreprendre. L'infirmière donne des soins dans le cadre de ses deux rôles (prescrit et propre), assure la prévention, la sensibilisation, l'information et l'accompagnement, pour une prise en charge du patient. Avec l'intégration de l'ETP à ses activités de soins, il ne s'agit plus, pour elle, de s'en tenir au seul traitement de la maladie, mais aussi de prendre en compte la répercussion de cette maladie sur l'ensemble des besoins de l'individu, afin de maintenir, restaurer et promouvoir la santé du malade. Il s'agit donc de demander à cette infirmière d'effectuer des changements par rapport à : ses pratiques quotidiennes, ses représentations et sa posture

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d'infirmière. L'ETP considère aussi le patient comme un usager qui sollicite les soignants pour l'aider à opérer ses propres choix. Dans ce cas de figure, cette activité éducative engagera éventuellement un transfert de compétences de l'infirmière vers ce patient. Ce transfert de compétence va sûrement engendrer un changement de statut que ce soit pour l'infirmière ou pour le patient. Ce changement de statut va modifier les rôles de chacun. L'infirmière deviendra une « infirmière éducatrice », et le patient deviendra un « apprenant particulier ». Face à cette situation et à ce nouveau modèle de patient, l'infirmière éducatrice doit avoir recours à de nouvelles compétences dites « pédagogiques » pour intégrer l'activité ETP dans ses pratiques.

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DEUXIEME PARTIE

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Cadre théorique

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Dans cette partie nous proposons la théorie des soins infirmiers de H. Peplau (1952), que nous jugeons qu'elle aborde la pratique éducative. Ensuite, nous présenterons les modes d'accompagnement professionnel proposés par M. Paul (2004) et, en dernier nous aborderons les concepts de l'identité en lien avec la construction et la transformation de l'identité professionnelle.

I- Présentation des théories de soins infirmiers

L'activité de l'infirmière nécessite savoir et réflexion, son impact sur la vie des personnes peut être extrêmement grand. Différentes théories de soins ont été proposés par plusieurs théoriciennes de soins. Nous nous basons sur le travail de Kérouac et ses consoeurs (1996), pour présenter les théories de soins, que nous estimons en lien avec la pratique éducative. Ces auteurs ont répertorié dans un livre intitulé « La pensée infirmière conceptions et stratégies », vingt-trois théories relatives aux soins. Ces théories ont été regroupé en six grandes écoles : école des besoins18, école de l'interaction19, école des effets souhaités20, école de la promotion de la santé21, école de l'être humain unitaire22 et en dernier école du caring23. Pour Kérouac, ces théories de soins consistent à expliquer, décrire, prédire, diriger, contrôler et faire

18 Centre le soin sur l'indépendance de la personne de satisfaire ses besoins fondamentaux et sa capacité d'effectuer ses auto-soins. Le rôle de l'infirmière est d'aider cette personne à retrouver son autonomie. Les principales théoriciennes de cette école sont : Virginia Henderson, Dorothea Orem et Faye Abdellah.

19 Voit le soin comme un processus interactif entre une personne ayant besoin d'aide et une autre capable de lui offrir cette aide. Les théoriciennes de cette école sont : Hildegarde Peplau, Joséphine Paterson, Loretta Zderad, Ida Orlando, Joyce Travelbee, Ernestine Widenbach et Imogene King ; elles ont réintroduit l'intuition et la subjectivité dans le soin infirmier.

20 Les théoriciennes de cette école sont Dorothy Johnson, Lydia Hall, Myra Levine, Callista Roy et Betty Neuman), elles considèrent que le but des soins infirmiers consiste à rétablir un équilibre, une stabilité, une homéostasie (préserver l'énergie).

21 Est représenté par la théoricienne Moyra Allen, qui s'est inspirée de la philosophie des soins de santé primaires et la théorie de l'apprentissage social de Bandura pour fonder son modèle intitulé « modèle de McGill ». Ce modèle est orienté vers la promotion de la santé de la famille.

22 Sa vision se situe dans le contexte de l'orientation de l'ouverture sur le monde et du paradigme de la transformation. Les théoriciennes de cette école sont Martha Rogers, Margaret Newman et Rosemarie Rizzo Parse. Leurs théories découlent de travaux philosophiques et de théories de la physique.

23 Elle s'intéresse à l'orientation de l'ouverture sur le monde et le paradigme de la transformation. Les théoricienns de cette école sont : Benner, Wrubel, Watson et Leininger. Pour eux, le caring est formé par l'ensemble des actions qui permettent à l'infirmière, de déceler de façon subtile les signes d'amélioration ou de détérioration chez la personne, en respectant les valeurs, les croyances, le mode de vie et la culture des personnes.

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comprendre le soin (c'est la fonction de l'infirmière). Elles reposent sur quatre concepts fondamentaux qui sont : la personne, la santé, l'environnement et les soins infirmiers. Parmi ces théories, celle de Florence Nightingale (1859) représentant la première théorie qui a défini les soins infirmiers. Cette théorie consiste à placer la personne malade ou en santé dans les meilleures conditions possibles pour que la nature puisse préserver ou restaurer sa santé. D'après Kérouac, elle définit les soins comme un service à l'humanité basé sur « l'observation et l'expérience ». La théorie des soins représente pour Nightingale, l'observation intellectuelle apportée aux activités en lien avec les soins. Si on se réfère à la signification étymologique du terme « théorie » qui vient du latin « theoria » emprunté au grec « theôrein », qui désigne littéralement « observer ». Les théories en soins infirmiers seraient donc des modèles de soins basés sur l'observation intellectuelle et l'expérience comme le précise la définition de Nightingale.

Nous tenons à préciser que le modèle de soins infirmiers enseigné dans les IFSI et pratiqué par les infirmières françaises, n'aborde pas la pratique éducative. Son approche du soin se base sur les modèles conceptuels de « l'école des besoins » plus influencée par la théorie de Virginia Henderson (1994). Cette théorie définit les soins infirmiers comme une aide apportée au patient, une assistance dans les activités qu'il ne peut faire lui-même : soit par manque de force, de volonté ou de connaissances, afin de conserver ou de rétablir son indépendance dans la satisfaction de ses 14 besoins fondamentaux24. Donc la théorie enseignée dans nos IFSI, centre le soin sur l'indépendance de la personne malade dans la satisfaction de ses besoins fondamentaux. C'est suite à ce constat, que nous avons décidé de présenter la théorie de Peplau (1952), issue de l'école de l'interaction, pour nous, en plus de prendre soin, elle illustre l'importance de la dimension relationnelle par rapport à l'activité de l'infirmière.

1- Présentation de la théorie de Peplau (1952)

Pour présenter cette théorie et le rôle qu'elle donne à l'infirmière, nous avons effectué une synthèse des cours enseigné aux IFSI, il s'agit de l'unité d'enseignement (UE 3.1), intitulée « Raisonnement et démarche clinique ».

24 Respirer, boire et manger, éliminer, se mouvoir, dormir et se reposer, se vêtir et se dévêtir, maintenir la température du corps dans la limite de la normal, être propre et protéger ses téguments, éviter les dangers, communiquer, pratiquer sa religion et agir selon ses croyances, s'occuper et se réaliser, se récréer et en dernier le besoin d'apprendre.

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Les soins infirmiers représentent pour Peplau « un instrument éducatif, une force aidant à la maturité, qui a pour but de promouvoir le développement de la personnalité vers une vie créative, constructive, productive pour l'individu et pour la communauté ». Peplau considère qu'il apparaît essentiel de se poser un certain nombre de questions25 avant d'accueillir un patient dans son unité de soins. Le soin représente pour lui, une action « humaine » et « non mécanique ». L'infirmière doit posséder des connaissances systémiques, afin d'évaluer les besoins d'aide de la personne, de poser un diagnostic, et de planifier une intervention. Le patient doit être capable de reconnaître ses besoins. Selon cette théorie, le soin est un « processus interactif » entre une personne ayant besoin d'aide et une autre personne capable de lui offrir cette aide. Donc, l'intérêt du soin est centré sur le processus d'interaction entre l'infirmière et le patient. Où, l'infirmière doit clarifier ses propres valeurs, utiliser sa propre personne de façon thérapeutique et s'engager dans la globalité du soin, qu'il soit curatif ou éducatif. Cette théorie incite l'infirmière et le patient à se connaître et à travailler en coopération pour résoudre les difficultés. Dans cette perspective, la théorie de Peplau questionne et s'intéresse au vrai rôle de l'infirmière, à comment « une infirmière peut aider le patient à prendre conscience de ce qui lui arrive pour mieux développer un comportement coopératif... » A propos de ce rôle, la théorie de Peplau propose différents rôles indispensables à la pratique infirmière.

2- Le rôle de l'infirmière selon la théorie de Peplau

Peplau (1952) dans sa théorie propose pour l'infirmière six rôles fondamentaux :

? Le rôle de personne étrangère (« stranger role ») : l'infirmière accueille le patient comme une personne à part entière avec son expérience et son histoire de vie, elle tient compte des différents aspects pour établir un climat de communication et de confiance mutuelle ;

? Le rôle de personne ressource (« ressource role ») : l'infirmière donne les informations utiles et pertinentes (répond aux questions, donne des explications, des interprétations des données médicales) ;

? Le rôle éducatif (« teaching role ») : l'infirmière donne des instructions et participe à l'éducation du patient, elle analyse le degré de compréhension de la personne et adapte le processus éducatif ;

25Ccomment réagissent les individus lorsqu'ils commencent à se sentir malades ? A quel moment recherchent-ils une aide professionnelle, et quelles attitudes adoptent-ils ? Savent-ils utiliser cette aide professionnelle ? ...etc.

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? Le rôle de leader en soins infirmiers (« active leadership role ») : l'infirmière aide le patient à s'impliquer activement dans les soins qui lui sont prodigués, elle veille aussi à ce que la personne soit satisfaite du soin donné ;

? Le rôle de substitut maternel (« surrogate role ») : l'infirmière agit pour pallier les besoins du patient, elle l'aide à clarifier la nature de cette relation en lui donnant des repères ;

? Le rôle de conseillère, d'assistante psychosociale (« counseling role ») : l'infirmière guide le patient à comprendre et à accepter les changements de son état de santé, elle l'accompagne et l'encourage à faire face aux changements pour améliorer son mode de vie.

Ces rôles illustrent un schéma au caractère dynamique et typique à la pratique de l'infirmière. Pour nous, cette théorie questionne la posture éducative de l'infirmière et son comportement avec le nouveau modèle de patients (partenaire de soin), le fait qu'il s'agit de les accompagner à l'apprentissage.

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