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La multipropriété des joueurs de football professionnel

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par Marco RENNELLA
Amos Sport Business School - Master Business in Sport 2015
  

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2. État des lieux et hypothèses de travail

Comme cela fut souligné dans l'introduction de ce travail, de multiples transferts de footballeurs de nos jours ne sont plus réalisés simplement avec le club vendeur, le club acquéreur, le joueur et son agent mais se glisse une autre partie, aussi appelé tierce partie. La problématique à ce sujet est de savoir si cela est plutôt bénéfique aux clubs, aux joueurs, aux agents ou à la tierce partie. De cette problématique est née la première hypothèse de travail, à savoir si cela est bénéfique pour les clubs de football, en achetant des joueurs sans dépenser tout leur argent. Dans un deuxième temps, nous nous demanderons si cela ne représente pas une menace pour l'intégrité des compétitions. Dans la troisième et dernière hypothèse nous verrons si cela est la seule façon aujourd'hui pour les plus petits clubs de rivaliser avec les cadors européens. Enfin nous ferons un point méthodologique sur le détail de l'étude menée dans le cadre de ce travail.

2.1. Hypothèse 1 : Les clubs achètent de jeunes joueurs talentueux sans pour autant risquer leur argent

L'étude présentée ici fut initiée par une observation d'un phénomène de plus en plus récurrent ces dernières années, l'achat de football par des fonds d'investissement. C'est ainsi que sur les huit dernières années de nombreux joueurs de football ont été touchés par cette pratique, ci-dessous une liste non exhaustive de ces joueurs ayant appartenu à des sociétés tiers.

> Javier Mascherano et Carlos Tevez détenus par MSI (Media Sport Investment) au moment de leur transfert vers West Ham puis les droits de Carlos Tevez sont vendus à Harlem Springs fonds détenu par Joorabchian

> Geoffrey Kondogbia, détenus par Doyen Sports

> Lazar Markoviæ et Ezequiel Garay détenus par le propre fonds d'investissement du Benfica : Benfica Stars Fund

> Eliaquim Mangala détenus par Doyen Sports et Robi Plus lors de son transfert au FC Porto

> Joao Moutinho détenus par les fonds d'investissement Mamers B.V (37,5%) et Soccer Invest Fund (37,5%) lorsque celui-ci évoluait au Portugal

> James Rodriguez détenus à 35% par le fonds d'investissement Gol Football Luxembourg et à 30% par le fonds Convergence Capital Partners lorsqu'il était joueur du FC Porto

> Yacine Brahimi, acheté par le FC Porto au FC Grenade 6,5M d'euros et revendu au fonds d'investissement Doyen Sports deux jours plus tard 5M d'euros soit 80% de la valeur économique du joueur.

> Steven Dufour détenus à 33% par le fonds d'investissement Doyen Sports

> Gianelli Imbula, dont le fonds d'investissement Doyen Sports à financer son transfert de l'OM vers le FC Porto de la moitié soit 12,5 M d'euros

> Diego Costa lors de son transfert de l'Atletico vers Chelsea (voir schéma ci-dessous)

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Pas moins de 5 acteurs différents ont touché des commissions sur le transfert de Diego Costa. Vendu à Chelsea 38M d'euros, l'Atletico n'a reçu que 17,1 M d'euros soit 45%. En effet, Sporting Braga, son ancien club avait négocié lors de son transfert vers l'Atletico Madrid 20% de commission sur le prochain transfert soit 7,6 M d'euros. Également le fonds d'investissement détenu en partie par Jorge Mendes « Quality Sports Investments » détenait 20% également soit 7,6M d'euros. De plus son agent qui n'est autre que Jorge Mendes bénéficie de 10% de la transaction soit 3,8M d'euros, et enfin 1,9M d'euros répartis entre les anciens clubs formateurs de Diego Costa.

Il convient de noter que ce travail ne s'intéressera qu'aux fonds d'investissement qui parient sur les joueurs de football en espérant réaliser une plus-value la plus conséquente possible. Étonnement ce phénomène est peu étudié par les différents spécialistes et économistes du football. De plus, la complexité et l'opacité que génère cette pratique sont peu connues notamment chez les fans et spécialistes de football d'où l'originalité de ce travail.

Comme le montre le cadrage théorique, cette pratique n'est pas arrivée au hasard dans le milieu du football professionnel. Cela est dû notamment à la forte croissance des transferts de ces dernières années. Le problème dans le football et dans le sport en général est que dès qu'une personne ou une société qui à priori n'a rien à voir avec le milieu du sport essaie de faire du business dans ce secteur, personne n'en veut car tout le monde voit le mal. Comme le cite Jean-Marc Benammar, « Moi je pense que les TPO c'est une bonne chose pour le football, la plupart des gens sont extrêmement conformistes à ce sujet, et on leur dit tous les jours que c'est mauvais, et donc au bout d'un moment ils finissent par le croire».

Certains clubs aujourd'hui sont endettés car leur seul et unique but est de briller sur la scène européenne et pour cela il faut pouvoir se payer des joueurs performants qui coûtent parfois très cher. De là, les investisseurs interviennent car beaucoup de clubs ont besoin d'argent pour pouvoir financer leur transfert mais à l'heure actuelle les banques sont de plus en plus réticentes à leur prêter de l'argent car aucun club n'est à l'abri de la faillite. C'est pour cela que les clubs font de plus en plus appel aux fonds d'investissements pour avoir de bons joueurs et pouvoir briller dans leur championnat et même en coupe d'Europe.

Un parfait exemple est celui de l'Atletico Madrid, avec un budget beaucoup moins élevé que les deux cadors espagnols qui sont le Real Madrid et le FC Barcelone a réussi à remporter le championnat en 2014 et était à deux minutes de remporter la Ligues des Champions contre

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ce même Real Madrid. On peut imaginer que si l'Atletico Madrid n'avait pas eu recours aux TPO, elle n'aurait pas pu s'offrir des joueurs comme Diego Costa, ainsi n'aurait sûrement pas remporté la Liga et n'aurait pas atteint la finale de la Ligues des Champions.

Pour préserver sa compétitivité sportive, l'Atletico Madrid est obligé d'avoir recours aux fonds d'investissement afin de supporter une politique de transferts et salariale onéreuse.

En percevant 17,1 M€ pour son attaquant vedette de la saison 2013-14, l'Atletico Madrid enregistre tout de même une jolie plus-value. Néanmoins, à ce prix-là, il est intéressant de s'interroger sur la nécessité de vendre un attaquant de ce niveau, impossible à remplacer au même tarif. Il est alors fort probable que certains acteurs intéressés par la vente, notamment le fonds d'investissement Quality Sports Investments, aient poussé le club Colchonero à réaliser la transaction avec Chelsea.

Travaillant régulièrement avec les fonds d'investissement afin de maintenir sa compétitivité sportive, la direction de l'Atletico Madrid est dans l'obligation d'établir de bonnes relations avec de tels acteurs. La vente de Diego Costa à 38 M€, tarif permettant à tous les acteurs d'enregistrer une belle plus-value, a alors été un moyen de satisfaire toutes les parties du dossier.

Outre cela, la question qui se pose à tout club quand il utilise les fonds d'investissement lorsqu'il achète des joueurs est de savoir si c'est bien d'utiliser tout le temps cette pratique ou s'il doit alterner entre financer seul le transfert et avec TPO.

L'hypothèse ainsi formulée d'achat de jeune joueur financé pas les fonds d'investissement qui permettrait aux clubs d'avoir de bons joueurs sans pour autant dépenser beaucoup d'argent, s'accompagne également d'une recherche visant à établir la viabilité de ce financement alternatif. En effet, pour pouvoir utiliser les fonds d'investissements pour l'achat de nouveaux joueurs, les clubs ont tout intérêt de faire attention à ce que ces derniers ne nuisent pas à leur santé économique.

Dans le cadre de cette première hypothèse, il s'agit ainsi de confirmer ou d'infirmer que la meilleure stratégie à adopter pour un club avec un budget moyen et qui veut rivaliser avec les plus gros clubs européens est d'acheter des joueurs avec une aide extérieure qui sont les fonds d'investissement.

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2.2. Hypothèse 2 : Les TPO représentent une menace pour les clubs et pour le football en général

La deuxième hypothèse formulée dans le cadre de ce travail est relative à la dangerosité de cette pratique. En effet certaines personnes dont Michel Platini, actuellement président de l'UEFA se montre réellement contre les TPO, il va même jusqu'à dire : « Cela menace l'intégrité de nos compétitions, dégrade l'image du foot, représente une menace à long terme pour les finances des clubs et pose question concernant la dignité humaine ».

Néanmoins, cette stratégie qui consiste à céder des parts de joueurs à des fonds d'investissement, empêche les clubs de réduire drastiquement leur endettement. L'Atletico Madrid reste le club de Liga BBVA possédant le plus lourd niveau d'endettement avec une dette globale de 339,337 M€. D'après les derniers rapports financiers publiés par le club, l'Atletico Madrid possédait au 30 juin 2014 plus de 158 M€ de dettes envers l'administration publique espagnole et 48 M€ de dettes bancaires. Même en vendant des joueurs très chers tous les ans, ces clubs comme l'Atletico ou le FC Porto ont du mal à réduire leur dette car ils ne perçoivent pas la totalité des plus-values, parfois ils peuvent percevoir seulement 20% de la vente.

Il est donc logique de pouvoir penser que ces fonds d'investissement peuvent entraîner la faillite d'un club. En effet, imaginez qu'un club ait besoin de vendre les trois meilleurs joueurs de son équipe car elle a quelques difficultés financières après avoir réalisé une saison plutôt médiocre. Imaginez, comme c'est le cas avec ces fonds d'investissements, que ces trois joueurs que le club veut vendre appartiennent à 80% à cette société d'investissement, cela signifie que sur les trois transferts de ces meilleurs joueurs, le club alors percevra seulement 20% sur chaque transfert.

Et c'est là, où cela peut être dangereux pour les clubs car à trop vouloir utiliser cette pratique finalement, les clubs n'ont pas véritablement le contrôle de leurs joueurs et donc dépendent de ces sociétés.

De plus, cela représente également une menace pour l'intégrité des compétitions. Premièrement cette pratique est interdite en France, donc les clubs français ne bénéficient pas de toutes les mêmes cartouches économiques que ses voisins européens.

En effet, le Portugal où cette pratique est ultra répandue arrive à avoir grâce à cette source de financement des joueurs qu'ils n'auraient certainement pas eu sans celle-ci. Source que les clubs français n'ont pas accès dû à l'interdiction de la LFP3.

Et ce la se répercute sur le classement UEFA, on peut voir le Portugal passer devant la France, et l'Espagne passer devant l'Angleterre, pays dont lequel les TPO sont également interdits.

3 Voir « le décrochage » de l'UCPF http://www.fifas.com/sites/default/files/files/UCPF_-_Le_decrochage_-_Nov_2014.pdf

Source : UEFA

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On peut voir grâce à ce tableau l'évolution de l'indice UEFA de ces dernières années.

Ainsi on voit le Portugal passer de la 10ème place en 2009 à la 5ème place en 2012 et donc passer devant la France. Cela correspond exactement à la période où les fonds d'investissement ont commencé à investir sur les joueurs de football évoluant dans les clubs portugais.

En plus du fait que cela n'est pas équitable au travers des différentes législations des pays, cette pratique peut entraîner des conflits d'intérêts avec notamment des arrangements de matchs. En effet, certains pensent que si plusieurs joueurs du même fonds d'investissement se retrouvent à jouer l'un contre l'autre et qu'en face il y a un club qui doit se sauver et de l'autre un club qui ne joue plus rien, on pourrait penser que les fonds d'investissement influencerait les joueurs qu'ils possèdent dans l'équipe qui ne joue plus rien de lever le pied contre l `équipe qui doit se maintenir.

Il est vrai que le fonds d'investissement a pour but de revendre ses joueurs plus cher qu'il les a achetés, pour cela il est préférable que l'équipe dans laquelle ces joueurs jouent ne connaisse pas une relégation.

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2.3. Hypothèse 3 : La seule façon pour les plus petits clubs de rivaliser avec les gros clubs européens

La troisième hypothèse formulée dans le cadre de ce travail est relative à l'interdiction mise en place par la FIFA le 1er mai 2015. Tout d'abord, il convient de mettre en évidence si cette pratique des TPO est une façon pour les clubs de « deuxième zone » de pouvoir rivaliser avec les grands clubs européens. Ensuite, il est important également d'étudier si cela est la seule façon ou existe -t il d'autre manières de pouvoir investir sur des joueurs ?

En effet, avec cette interdiction de la FIFA, le principal fonds d'investissement qui n'est autre que Doyen Sports a décidé de porter plainte contre la FIFA, mais en attendant la décision de Bruxelles, il faut pouvoir trouver un moyen de continuer à investir tout en contournant cette interdiction.

Lors de l'achat d'Imbula du FC Porto à l'OM, Doyen Sport est intervenu dans cette transaction, mais la question est de savoir comment s'est réalisé ce transfert qui s'est fait début juillet alors que l'interdiction d'investissement par des tiers était bannie depuis 2 mois. Nous verrons donc les différents moyens qui permettent de contourner cette interdiction, comme c'est le cas en Angleterre où depuis l'interdiction après l'affaire Tevez et Mascherano, certaines personnes ont réussi à continuer d'investir sur des joueurs tout en étant dans la légalité.

Ainsi, les dirigeants de la FIFA doivent bien connaître cette pratique et les dérives qu'elle entraîne afin de prendre la décision d'interdire cette pratique. Il est vrai que si malgré l'interdiction, les fonds d'investissement trouvent toujours un moyen de continuer à pratiquer leur activité, cela ne sert à rien d'interdire cette pratique car à part apporter encore plus d'opacité lors de certains transferts la FIFA n'en sortirait pas gagnante.

La troisième hypothèse apporte donc un aspect plus caché du « foot business » avec différents moyens peu connus du grand public qui se passent pourtant à chaque mercato. Cette dernière hypothèse répond également à la problématique et à ses enjeux. Les clubs qui utilisent cette pratique semblent bénéficier d'un financement que d'autres clubs n'ont pas accès. De plus, avec cette loi qui interdit cette pratique, nous allons voir s'il est possible de trouver d'autres moyens pour contourner cette interdiction.

En effet, cette hypothèse, semble pouvoir presque répondre à l'ensemble de cette problématique.

Cette troisième et dernière hypothèse sera donc confirmée ou infirmée, et l'exemple de cas concrets viendra illustrer les différentes techniques qui font parties dorénavant des contournements où les TPO sont interdits.

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2.4. Méthodologie de travail

Après de premières recherches documentaires qui ont permis de faire un élargissement théorique autour des problématiques étudiées, il a fallu ensuite définir quel public cible rencontrer afin d'évaluer la pertinence des hypothèses précédemment élaborées. Les différents acteurs rencontrés se catégorisent en deux groupes : d'une part des experts en économie du football et d'autre part des acteurs de clubs sportifs professionnels.

En ce qui concerne les experts rencontrés, il était important de réunir des experts en économie du sport et plus précisément du football et qui connaissent très bien cette pratique peu connue en France. Au total, trois experts furent interrogés, tout d'abord Mr Bastien Drut, économiste du football et auteur notamment du livre « L'économie du football professionnel », entretien en face à face durant 1 heure en décembre 2014. De plus, Jean-François Brocard, chercheur au CDES de Limoges, un expert en la matière car il a du réaliser une étude pour la FIFA à ce sujet avec Didier Primault. Interview de 40 minutes, réalisée en janvier 2015 par téléphone. Enfin, Raffaele Poli, directeur du Football Obsvertory de Neuchâtel interrogé le 5 Mars 2015 sur Skype pendant 35 minutes.

Ensuite, d'autres entretiens ont été réalisés avec des personnes qui connaissent très bien le sujet mais qui ne sont pas experts. Martin Boudot, journaliste ayant réalisé un magnifique reportage sur les fonds d'investissement dans le football sur France 2 en Novembre 2013 dans l `émission Cash Investigation a été interviewé en janvier 2015 par téléphone pendant 30 minutes. En outre, je me suis entretenu avec la responsable juridique de l'UCPF, Marie-Hélène Patry dans le mois de février 2015 au téléphone durant 40 minutes. Aussi, il me semblait inévitable de réaliser une interview avec Jean-Marc Benammar, celle-ci aura duré 45 minutes toujours par téléphone. Jean-Marc Benammar qui est professeur à l'Université Paris 8 s'est exprimé plusieurs fois au sujet des TPO. Enfin, une dernière interview ô combien pertinente réalisée avec Shervine Nafissi-Azar, doctorant en droit, qui réalise en cette année une thèse sur ce sujet, l'interview s'est faite en mail, il a pris donc le temps de répondre au mieux à toutes mes questions.

Les guides d'entretiens et les retranscriptions intégrales sont disponibles en annexes.

Par ailleurs, en plus de tous ces entretiens, il me semblait judicieux de faire une comparaison des différentes stratégies financières entre deux clubs de football afin de voir quel impact ces fonds d'investissement avaient sur les résultats financiers des clubs. Pour cela, on a pris un club français qui est l'Olympique Lyonnais, un club qui mise sur la formation et donc possède ses joueurs à 100% et un autre club, le club portugais du FC Porto car c'est le champion incontesté de la tierce propriété en Europe.

Grâce à ces nombreux entretiens, des informations pertinentes ont pu être réunies en lien avec la problématique de cette étude, qui ont notamment permis d'évaluer la pertinence des deux hypothèses formulées. Les résultats principaux de cette étude sont présentés dans la deuxième partie ci-dessous.

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"En amour, en art, en politique, il faut nous arranger pour que notre légèreté pèse lourd dans la balance."   Sacha Guitry