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Finitude et destinée humaines chez Maurice Blondel

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par Christophe MABOUNGOU
Université Pierre Mendès-France - Master II 2011
  

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3.4. L'unité des preuves comme action et dialectique de la volonté

En suivant le déploiement et l'expansion de la volonté, à partir de la dialectique de l'action, ce qui est découvert, selon le mot de C. Dhotel, « c'est un être personnel dont l'action, en retour, va se manifester nécessairement. Blondel attribue ce résultat à deux faits : la dialectique des preuves prises dans leur ensemble, et le caractère total de l'action comme fondement de la certitude acquise au terme »262(*). En effet les trois preuves, qui ne doivent pas être prises isolément ont abouti à démontrer la présence au terme de notre action d'un être personnel dont l'action se manifeste nécessairement comme achevée et définitive; alors que les actions humaines souffrent de leur insuffisance et de leur pénurie intrinsèquement naturelles.

Néanmoins, prise isolément, chaque preuve n'aboutirait qu'à élever une idole, à étaler un fruit sans raison qui pourrait se manifester comme cause première dans la preuve cosmologique, comme idéal moral dans la preuve téléologique et comme idée de perfection dans la preuve ontologique. Ce qui n'est évidemment pas de l'avis de notre auteur. Car aucune notion, aucun résultat ne s'est dégagé de la preuve cosmologique, sinon le fait que toutes choses sont à considérer comme à la fois nécessaires et insuffisantes aux aspirations de la volonté. Rien non plus du coté de la preuve téléologique, sinon que l'expérience exige l'identité de la pensée et de l'action soit donnée, puisqu'elle ne peut pas être de nous. De même pour la preuve ontologique laissée au pouvoir de la raison, elle n'eut abouti qu'à une idée vide de contenu. Ces preuves, ajoute-t-il il a fallu les offrir ensemble. Ensemble, mais en ordre, « dans une unité synthétique »263(*). Ces preuves, pouvons-nous ajouter, ne montrent pas la constitution progressive d'une idée, mais la progression de l'esprit vers la rencontre de la réalité. C'est tout le mouvement de la vie et de l action qui est en jeu ici. Aussi, Blondel les considère-t-il comme découlant de l'action, entretenant la vie et retournant à l'action. Voilà bien le sens de leur adéquation dans un mouvement d'action et un mouvement dialectique. Car si l'action se heurtait aux bornes du fini, elle cesserait d'agir. Du coup, l'au-delà du fini, que ces preuves manifestent l'ouverture de l'action à un champ infini d'implications : « en ce qui touche à la complexité de la vie, seule l'action est nécessairement complète et totale. Elle porte tout et d'elle seule l'action ressort l'indiscutable présence et la preuve contraignante de l'Être»264(*).

En conséquence, surgie du déterminisme de l'action humaine, l'idée de transcendance n'entend donc pas mettre en relief la prétention de l'inaccessibilité au transcendant, mais plutôt son ouverture inconditionnelle aux êtres finis. En même temps qu'il renvoie l'homme à lui-même, ce Transcendant, cet Unique nécessaire suscite en l'homme l'exigence irréductible de se donner à Lui, comme à l'auteur de son accomplissement total. Le lien ainsi établi de nous à lui inclut l'homme dans une sorte de coopération infinie avec Dieu. Néanmoins,que la volonté humaine participe à l'Absolu, cela lui vient d'un enjeu infini. Et donc, c'est en tant que liberté qu'il entre dans cette coopération comme un lien qui le fonde et qu'il a à promouvoir : « s'il doit y avoir, pour que la volonté trouve son équation, synthèse de l'homme et de Dieu, il ne faut pas oublier que l'acte commun qui consacre toute alliance, est en un sens, tout entier l'oeuvre de chaque coopérateur».265(*)

Or cette façon de procéder et la manière dont il a abouti à l'option de et pour Dieu suscita maints débats. Mais, même si ces interprétations suscitèrent beaucoup de méprises et de contradictions, il n'en reste pas moins que Blondel a voulu maintenir le caractère philosophique et l'interprétation philosophique de l'expansion de la volonté et l'urgence d'une option en face de l'idée de Dieu ou de l'Unique nécessaire. Pour Blondel, c'est la philosophie seule qui permet d'opérer une telle option et doit en présenter exactement les termes. D'où cette mise ne garde « que personne ne se méprenne sur le dessein proprement philosophique de cette recherche »266(*). Ce qui se dit de façon plus tranchée et claire comme une mise au point final en ces termes :

«Ainsi se révèle peu à peu l'ambition intégrale de la volonté qui se cherchait elle-même sans se connaître d'abord tout entière. C'est en prétendant s'égaler effectivement à sa propre puissance qu'elle cesse de trouver sa suffisance en elle seule. Nous voulions, semble-t-il, tout faire de nous-mêmes et voici que, par ce dessein, nous sommes amenés à reconnaître que nous ne faisons rien et que Dieu seul, agissant en nous, nous donne d'être et de faire ce que nous voulons. Quand donc nous voulons pleinement, c'est lui, c'est sa volonté que nous voulons. Nous demandons qu'il soit, qu'il soutienne, achève, reprenne en sous oeuvre toutes nos opérations ; nous ne sommes à nous que pour réclamer de lui et nous rendre à lui ; notre vraie volonté, c'est de n'en avoir point d'autre que la sienne ; et le triomphe de notre indépendance est dans notre soumission267(*)

Plus concrètement et résumant les implications entre action et dialectique depuis le début, on peut dire ceci : toute volonté humaine est embarquée dans un conflit interne entre le voulant et le voulu. Or, notre "moi" en réclamant son autonomie nous accule à entreprendre la recherche pratique d'une solution à ce conflit : c'est l'expansion de la volonté. Cependant, cette expansion exige et suscite une action. L'action s'impose et en s'imposant, se met elle-même en question (origine de la disproportion entre la volonté voulante et la volonté voulue). Nous voilà donc conduit à constater en nous une tension. Nous sommes pris entre ce qui s'impose à nous et la tendance de notre volonté à tout vouloir . Or ce vouloir butte à un certain nombre d'écueils car l'espace de son déploiement est sujet à beaucoup d'implications. On ne peut donc les surmonter ou les dépasser qu'en posant ou en adoptant, mieux en désirant quelque chose c'est-à-dire un univers toujours hors et en dehors de nous, mais qui est aussi en nous. Et cet univers, nous essaierons de l'épuiser. C'est ici que va se révéler le gros des implications et des obstacles. En essayant de restreindre cet univers à notre vouloir, nous retrouvons le monde des intuitions sensibles, des phénomènes, des idéologies, des sciences positives, des libertés individuelles etc. Ainsi, c'est de la manière infinie dont nous voudrions nous approprier cet univers que surgit inévitablement et inexorablement l'aveu de l'Unique Nécessaire. Le vouloir de cet univers nous impose de postuler l'Unique nécessaire qui doit être accepté par une option libre. Car, pour atteindre quoi que ce soit, en effet, il faut passer par lui et tout lui donner. De sorte qu'en toutes choses voulues, c'est au bout du compte, lui que nous rencontrons, que nous ne pouvons ne pas vouloir.

Dès lors, il devient indéniable que toutes ces implications de notre action déploient ainsi l'univers que nous voulons et deviennent, par voie de conséquence, des vérités pour l'action et des haltes pour la pensée, c'est-à-dire des exigences de l'expansion de notre propre volonté. Ces implications sont comme posées par le mouvement de la volonté en quête de son équation, de ce qui la satisfera pleinement. Or, au moment où notre volonté nécessaire découvre sa situation au sein de ce monde concret, elle ne peut ne pas s'arrêter, arrêter son élan pour affirmer et reconnaître l'Être Transcendant ou Dieu.

Concrètement donc, nous n'arrivons à notre ultime vérité, celle de notre être, que par l'anéantissement de toute volonté propre et l'accueil ou l'ouverture de l'universelle médiation sans laquelle nous ne sommes rien et nous ne pouvons rien.

* 262 C DHOTEL, art. cit., p. 22.

* 263 Maurice Blondel, L'Action, p. 350.

* 264 Ibid., p. 350.

* 265 Ibid., p. 402.

* 266 Ibid., p. 406.

* 267 Ibid. , p. 422-423.

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