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Les zones a defendre: d'un mouvement de contestation sociale à un nouveau courant de pensée politique

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par Antoine Vieu
Université de Bordeaux - Master 2 2016
  

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Chapitre 5 : Les Zads et les luttes altermondialistes :

L'historien Jean-Marie Terral analyse dans son ouvrage Larzac : De la lutte paysanne à l'altermondialisme l'évolution de la lutte sur le plateau du Larzac après l'abandon du projet d'extension. Il observe un déclin du rayonnement du militantisme à l'échelon national à partir des années 1980. C'est à partir de la Guerre du Golfe en 1991 et la lutte anti-nucléaire des années 1995 que le Larzac retrouve un nouveau souffle militant selon l'historien. Il qualifie le plateau de « bastion altermondialiste »1. Le plateau noue des liens avec d'autres foyers de lutte altermondialiste dans le monde comme le Mouvement des Sans Terre au Brésil ou les indiens Néozapatistes du Chiapas. Les militants du Larzac participent aux premières manifestations contre les sommets mondiaux tout en conservant une pratique non-violente. Les contestations sociales ont connu une transformation radicale après les années 1980. Jean-Marie Terral parle d'une internationalisation2. Pourtant, l'altermondialisme, qui s'est construit sur un réseau international organisant de grand rassemblement lors des sommets mondiaux, a évolué pour s'ancrer territorialement. Il est ainsi intéressant d'étudier la place des zads dans le réseau altermondialiste notamment en prenant en compte cette dernière évolution.

Les zads par rapport à la définition de l'altermondialisme.

S'il est difficile de définir le terme « zad », il est tout aussi difficile de donner une définition de l'altermondialisme. Dans le Dictionnaire analytique de l'altermondialisme, Eddy Fougier revient sur la « perception biaisée »3 de ce terme. De la même manière que pour les zads, on retrouve un biais médiatique, idéologique et militant. Pour cet auteur, les zadistes s'ajoutent à « la galerie de portrait des courants contestataires contemporains4 ». Il distingue ainsi les zadistes des altermondialistes. Philippe Subra semble classer les zadistes dans la branche radicale de l'altermondialisme5.

1 TERRAL Pierre-Marie, Larzac : de la lutte paysanne..., Op.cit., p.249.

2 Ibid.

3 FOUGIER Eddy, Dictionnaire analytique de l'altermondialisme, Paris, Ellipses, 2006, p.3-5.

4 FOUGIER Eddy, Les zadistes..., Op.cit., p. 10.

5 SUBRA Philippe, Zones A Défendre..., Op.cit., p.31.

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Selon Eddy Fougier, le terme « altermondialiste » est utilisée pour la première fois par Arnaud Zacharie, alors porte-parole d'ATTAC (Association pour la Taxation des Transactions financières et l'Aide aux citoyens), pour sortir de l'appellation antimondialiste. Le premier élément de définition de l'altermondialisme repose sur sa structure en réseau. Eddy Fougier, comme Emmanuel Allait, parle de « réseau de réseaux »1. Structurellement, Il s'agit donc d'une « nébuleuse » de mouvements et non d'une organisation hiérarchisée avec une structure centrale. Dans Dictionnaire analytique, Eddy Fougier donne deux définitions de l'altermondialisme. La première très détaillée le définit comme une « nébuleuse de mouvements » qui s'oppose au caractère néolibéral de la mondialisation et à l'hégémonie des puissances occidentales et qui prône une alternative au caractère néolibéral « sous la forme d'une autre mondialisation en menant des luttes tant à l'échelle locale que nationale voire supranationale2. Selon cette première définition, les zads semblent a priori exclues de cette mouvance. La volonté de prôner une autre forme de mondialisation qui serait une alternative au système néolibéral n'apparait pas à la lecture des ouvrages zadistes. Un peu plus loin dans l'ouvrage, l'auteur donne une autre définition plus large. L'altermondialisme apparaît alors comme « une convergence des mouvements appartenant principalement à la société civile qui s'oppose tant à une échelle locale, nationale que globale aux politiques néolibérales »3 ce qui n'exclut pas nécessairement les zads.

Concernant les « débouchés politique » des mouvements altermondialiste, l'analyse de Eddy Fougier repose sur deux clivages superposés : révolutionnaire/réformiste et volonté d'accéder au pouvoir/ refus total du pouvoir. Il dégage alors trois catégories4 : les réformistes, les révolutionnaires aspirants au pouvoir et les révolutionnaires qui n'aspirent pas au pouvoir. Les mouvements réformistes tentent d'améliorer le système actuel en envisageant une mondialisation à « visage humain ». Les mouvements révolutionnaires qui entendent accéder au pouvoir sont dans le rejet total du système actuel et attendent la possibilité d'une révolution qui permettrait de fonder un nouveau système. Concernant les mouvements révolutionnaires qui rejettent l'exercice du pouvoir, Eddy Fougier distingue l'approche « anarchiste » de l'approche « gramscienne ». Dans la première, il s'agit de sortir du système en instaurant des « poches alternatives » plus ou moins durable dans lesquelles vivraient une communauté autonome avec comme principes : la disparition du pouvoir traditionnel et de

1 ALLAIT Emmanuel, L'altermondialisme : Mouvance ou mouvement ?, Paris, Ellipes, 2007, p.77.

2 FOUGIER Eddy, Dictionnaire..., Op.cit., p.8-10.

3 Ibid., p.10.

4 Ibid., p.37-39.

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toute domination, des relations reposant sur l'entraide et la solidarité. La seconde approche revient à produire une contre-hégémonie culturelle à la mondialisation afin de modifier les valeurs au fondement de ce système. Certains mouvements peuvent combiner ces deux approches. Mettre en pratique un mode de vie alternatif remettre obligatoirement en cause l'hégémonie culturelle, au moins localement. L'approche zadiste semble correspondre à un mélange des deux tant elle met en place et développe un espace de vie alternatif en dehors du système et dans le même temps, diffuse par l'intermédiaire de ses propres médias ou d'autres médias alternatifs une culture opposée à celle dominante.

Concernant les mouvements altermondialistes, Eddy Fougier distingue trois types de mouvements1 : les mouvements altermondialistes en tant que tel qui sont les organisations de la société civile créées en réaction à la mondialisation ; les mouvements participants à la mouvance altermondialiste qui ne se sont pas spécifiquement créés contre la mondialisation et enfin les mouvements participants à la « dynamique » altermondialiste tels que les organisations politiques, des médias ou encore des maisons d'éditions. Dans les mouvements participants à la mouvance altermondialiste, Il effectue encore une distinction : les mouvements sociaux, les Organisations Non Gouvernementales (ONG) et les mouvements radicaux. Il définit les mouvements sociaux comme « des mouvements appartenant à la société civile qui représentent, défendent et promeuvent les intérêts de leurs membres et de population spécifiques que ce soit sur une base professionnelle ou identitaire »2. Concernant les mouvements radicaux, la définition est moins précise. Il s'agit de groupes qui ne défendent pas les intérêts d'une population spécifique comme les mouvements sociaux et qui ne viennent pas en aide à d'autres populations comme les ONG. Ces groupes veulent « résister » au système en créant des espaces « libérés » et en développant une critique libertaire. Concernant la mondialisation, ils vont au-delà de la critique du néolibéralisme, ils critiquent le capitalisme en tant que tel. Ces groupes alternent entre l'action directe illégale violente et non-violente. Pour Eddy Fougier, ces mouvements varient entre groupes anarchistes, communistes, antifasciste, autonomes ou encore écologiques. Emmanuel Allait, qui reprend l'analyse d'Eddy Fougier ne donne pas plus de précision sur ces mouvements radicaux3. Ils constituent finalement une nébuleuse dans la « nébuleuse de mouvements » que constitue l'altermondialisme.

1 Ibid., p.119-133. Son analyse est reprise par Emmanuel Allait.

2 Ibid., p. 150.

3 3 ALLAIT Emmanuel, L'altermondialisme..., Op.cit., p.80.

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Mais si ces groupes contestent la notion même de la mondialisation, pourquoi ne pas les qualifier d'antimondialistes ?

En premier lieu, le terme « antimondialisation » est un terme controversé. Historiquement, il est utilisé en pour définir les mouvements qui manifestent contre les sommets mondiaux comme en 1999 à Seattle contre l'Organisation Mondiale du Commerce ou encore à Gênes en 2001 contre le G-8. La journaliste Laurence Caramel utilise ainsi ce terme pour parler de tous les manifestants présents à Gênes mais aussi des personnes présentes au Forum Social Mondial de Porto Alegre1. La violence lors de ces manifestations conduit certains participants à réfléchir sur la définition de ces mouvements présents. Pour Eddy Fougier, l'autre élément qui conduit les militants à utiliser un autre nom qu' « antimondialisation » est l'amalgame utilisé par les média entre les attaques du 11 septembre 2001 et les mouvements antimondialistes. Les terroristes seraient parvenus à mettre en pratique le discours des opposants aux grands sommets mondiaux2. Le terme « antimondialiste » va être abandonné au profit d' « altermondialiste ». Ce néologisme permet de sortir d'une logique unique de contestation et de violence en étant force de proposition. Ainsi, les altermondialistes critiquent la mondialisation néolibérale tout en proposant une alternative à ce modèle. Les mouvements radicaux s'ils rejettent la mondialisation ne défendent pas non plus l'isolationnisme. Ils luttent contre la mondialisation qui contrairement à sa définition ne profite qu'à un petit nombre qui lui permet de maintenir sa domination. De nombreux mouvements radicaux altermondialistes revendiquent par exemple la suppression des frontières qui permettrait de supprimer la notion d'immigrés clandestin. Ces démarches s'inscrivent dans une pensée globale. Dans l'ouvrage Trajectoire révolutionnaires du jeune 21ème siècle, le collectif Mauvaise Troupe regroupe la lutte altermondialiste de Millau et les manifestations de Genève dans un chapitre intitulé « Antimondialisation »3.

Ces qualifications différentes dépendent en réalité de la définition de l'altermondialisme choisie.

1 CARAMEL Laurence, « Les réseaux de l'antimondialisation », dans Critique internationale n°13, 2001 [en ligne] URL : http://www.cairn.info.docelec.u-

bordeaux.fr/article.php?ID ARTICLE=CRII 013 0153&DocId=13086&hits=4162+4123+3980+3866+3768+3559+ 3233+3207+3151+3124+2984+2288+1708+1103+987+844+174+93+5+#anchor citation [réf. 15 juillet 2016].

2 FOUGIER Eddy, Dictionnaire..., Op.cit., p.7.

3 COLLECTIF MAUVAISE TROUPE, Constellations : Trajectoires révolutionnaires du jeune 21ème siècle, Paris, L'éclat, 2016, p.43-188.

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