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Les zones a defendre: d'un mouvement de contestation sociale à un nouveau courant de pensée politique

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par Antoine Vieu
Université de Bordeaux - Master 2 2016
  

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Cadre méthodologique et limites du sujet.

Travailler sur la possible existence d'une idéologie zadiste nécessite d'effectuer auparavant un travail de définition. La première étape est de considérer la zad en tant que mouvement pour ensuite aborder l'aspect idéologique.

En ce qui concerne la définition de « mouvement », là encore un travail sociologique de terrain serait nécessaire. Selon le sociologue Alain Touraine, une mobilisation sociale doit remplir trois conditions1 de principes pour être qualifiée de mouvement. Il faut un principe d'identité, un principe d'opposition et un principe de totalité. Le mouvement social, à la différence de l'action collective est à la recherche d'une « orientation générale de la société ». Il est difficile de vérifier l'existence des trois principes sur les zads. En revanche nous pouvons supposer que les revendications zadistes dépassent largement une simple contestation sociale. De plus, ils recherchent une alternative de vie au système actuel. Le rejet du capitalisme implique obligatoirement une remise en cause de l'orientation générale de la société. Enfin, tant la littérature zadiste que scientifique utilisent la notion de mouvement

1 TOURAINE Alain, La production de la société, Paris, Seuil, 1973, p. 322.

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social. Nous utiliserons donc le terme de mouvement de contestation sociale par souci de cohérence avec les sources primaires et secondaires bien qu'il serait plus rigoureux de parler de mouvance tant les zads ne constituent pas un mouvement structuré. Il s'agit plus d'un réseau dans un réseau.

La deuxième notion à définir et peut être la plus importante est celle d'idéologie. Ce mémoire entreprend d'analyser les zads sur le plan des idées politiques et non dans une approche sociologique d'où l'importance d'adopter une définition précise de l'idéologie. Le terme « idéologie » est une invention du philosophe et homme politique français Antoine Destutt de Tracy qui désigne une nouvelle science destinée à comprendre et expliquer les idées. Karl Marx voit dans l'idéologie une représentation fausse du réel qui permet de justifier la domination de la classe bourgeoise sur le prolétariat. Dans L'idéologie ou l'origine des idées reçues, le sociologue Raymond Boudon analyse l'historicité de ce terme et définit l'idéologie moderne comme « des doctrines plus ou moins cohérentes combinant à dose variables des propositions prescriptives et des propositions descriptives ».1 Enfin, Philippe Braud la définit comme un « ensemble structurée de représentation du monde social qui fonctionne à la croyance (politique) et à la violence (symbolique) »2. D'après l'ensemble de ces définitions, l'idéologie apparaît comme une conception englobante de la réalité qui a pour but de l'expliquer et de légitimer le pouvoir. Elle explicite une situation en lui donnant un sens à l'aide d'éléments non scientifiques mais vérifiables partiellement.

Un des objectifs de ce mémoire est d'étudier la possible existence d'une idéologie zadiste. Nous utiliserons pour ce travail le terme de « pensée zadiste » en tant qu'aspirations politiques multiples développées par le mouvement zadiste.

La démarche de ce travail n'est pas d'ordre sociologique. Il ne s'agit pas de vérifier sociologiquement par un travail de terrain une réalité mais plutôt d'analyser une pensée politique en partie à travers le discours et les écrits des acteurs tout en ayant recours à la méthode comparative.

Notre travail couvrira la période de 2008 au 10 juillet 2016. Débuter notre recherche sur les zads en 2008 se justifie car c'est au cours de cette année qu'apparait pour la première fois le terme de ZAD comme Zone à défendre détourné de son sens original, Zone d'aménagement différé. Le choix d'arrêter notre analyse au 10 juillet 2016 correspond au dernier

1 BOUDON Raymond, L'idéologie ou l'origine des idées reçues, Paris, Points, 2011, [1986], p.86.

2 BRAUD Philippe, Sociologie Politique, Issy-les-Moulineaux, Lextenso LGDJ, 2014, [1992].

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rassemblement organisé sur la Zad de Notre-Dame-des-Landes au cours duquel de nombreux textes ont été produits concernant l'analyse la consultation locale du 26 juin 2016. Les analyses de cette consultation sont intéressantes car elles permettent d'apporter de nouveaux éléments quant à la vision zadiste de la démocratie représentative. La consultation a de plus occupé une place important dans le champ politique national en suscitant de nombreuses controverses quant à sa légitimité. Nous avons décidé de ne pas prendre en compte dans notre analyse le cas de l'occupation de la forêt de Bure qui empêche par sa temporalité de prendre un recul nécessaire à sa compréhension.

La première limite de ce travail est d'ordre temporel. Comme le rappelle cette formule consacrée, « nous ne sommes jamais les contemporains de notre propre histoire » et analyser un événement si récent implique nécessairement une compréhension qui pourra se révéler en partie biaisée dans le futur. Avec le temps, des éléments qui apparaissent importants et justes aujourd'hui disparaitront peut être des mémoires ou seront contredits et notre analyse deviendra soit obsolète soit infondée. C'est le risque de travailler sur le temps présent.

La deuxième limite porte sur les sources utilisées et plus particulièrement les sources primaires. L'univers zadiste est le plus souvent anonyme. Nous avons utilisé les documents en grande majorité publiés sur des sites internet comme zad.nadir. org, chambarans.unblog.fr ou encore zadagen.tumblr.com. La plupart des textes ne sont pas signés et il est très rare de savoir s'ils sont écrits par un ou plusieurs auteurs. Nous avons également analysé les publications du Collectif Mauvaise Troupe qui explique qu'une partie de ses membres habitent dans une zad. Cet anonymat, et c'est volontaire, empêche de savoir si les auteurs s'expriment à titre individuel ou au nom du groupe. Certaines idées peuvent ainsi être mal interprétées. Il a donc fallu recouper les différentes analyses pour tenter d'extraire certains grands principes partagés par le mouvement zadiste. A titre d'exemple, les valeurs d'autogestion et d'autonomie semblent être partagées par tous les zadistes. Pour autant leurs définitions restent larges à la simple lecture des sources primaires. Nous avons également eu recours à des entretiens réalisés par le Collectif Mauvaise Troupe et largement publiés sur les sites internet proches du milieu zadiste. Leurs utilisations n'ont servi qu'à exprimer des idées et non à décrire des réalités.

Travaillant sur un phénomène très récent, la difficulté a été de rassembler des sources secondaires sur les zads à proprement parler. Très peu d'analyses scientifiques ont été réalisées à ce sujet quand elles ne sont pas d'ordre sociologique. Les deux travaux d'analyses

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d'Eddy Fougier, publiés pour le think tank « libéral, progressiste et européen » Fondapol et l'ouvrage de Philippe Subra sont assez courts et comportent une bibliographie extrêmement limitée.

Enfin, la dernière limite ou plutôt difficulté porte sur la neutralité axiologique. Il a fallu essayer de s'empêcher d'émettre des jugements de valeurs et de s'extirper de nos croyances idéologiques. Il est toujours plus compliqué de travailler sur un sujet qui nous passionne mais notre démarche, qui entend dresser les contours de la pensée politique des zadistes, a permis d'éviter d'aborder les sujets traitant de la réalité des faits, plus susceptible d'être entachée de subjectivité.

A partir de ce cadre méthodologique et de ces limites, nous formulons les questions suivante : la zad résulte-t-elle d'une évolution de mouvements de contestation déjà existants, ou au contraire par sa singularité, n'en constitue-t-elle pas un nouveau ? Peut-on alors la définir comme un nouveau courant de pensée politique voire une nouvelle idéologie ?

Nous avons construit notre problématique à partir des hypothèses suivantes : les zads qui peuvent apparaître comme un ensemble hétérogène tant sociologiquement qu'idéologiquement, semblent développer une conception et une critique particulière du politique et de la participation de l'individu à la politique. Il pourrait exister des convergences dans le mode de lutte contre les projets, la vision du politique et le fonctionnement interne entre les ZAD et les mouvements altermondialistes radicaux comme le Comité Invisible. Enfin, tant la critique du système que le mode de fonctionnement développés au sein des zads s'inscrivent dans une logique qui rappelle le municipalisme libertaire théorisé par Murray Bookchin.

Pour vérifier ces hypothèses, la première démarche est de formuler une définition de la zad à partir des sources primaires et de comprendre comment les zadistes se définissent. L'analyse de ces différentes sources permet de mettre en évidence des caractéristiques propres à la zad sur leurs critiques du système, leur mode de fonctionnement et leurs techniques de lutte (1). Dans un second temps, comparer la zad à d'autres phénomènes politiques passés et contemporains doit permettre de dresser son historicité et de constater qu'elle s'ancre dans la mouvance altermondialiste radicale (2). Enfin, la réponse à la dernière hypothèse apparait comme la synthèse des deux réponses précédentes. En effet, l'utilisation

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de la définition de la zad par les acteurs qui la constituent mêlée à sa comparaison à d'autres phénomènes politiques permet de situer la zad idéologiquement (3).

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