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Organisation du droit international humanitaire au sein du service de santé des armées

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par Eléonore Carrot
Ecole du Val de Grâce - Université Paris Diderot - Administration et management des établissement de santé 2014
  

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Ecole du Val de Grâce

Faculté de médecine - Université Paris-Diderot 7
Ecole des Hautes Etudes en Santé publique

Mémoire pour l'obtention du Master 2 :

« Administration et management des établissements hospitaliers »
Option B : Organisation et pilotage des poles et des unités de soins

Organisation du droit international

humanitaire au sein du Service de Santé des

Armées

Responsable du diplôme : Professeur Dominique BERTRAND
Directeur de mémoire : Médecin Général Eric DARRE
Tuteur de mémoire : Médecin en chef Valérie DENUX

Lieutenant Eléonore CARROT

Année universitaire 2013-2014

Ecole du Val de Grâce

Faculté de médecine - Université Paris-Diderot 7
Ecole des Hautes Etudes en Santé publique

Mémoire pour l'obtention du Master 2 :

« Administration et management des établissements hospitaliers »
Option B : Organisation et pilotage des poles et des unités de soins

Organisation du droit international

humanitaire au sein du Service de Santé des

Armées

Responsable du diplôme : Professeur Dominique BERTRAND
Directeur de mémoire : Médecin Général Eric DARRE
Tuteur de mémoire : Médecin en chef Valérie DENUX

Lieutenant Eléonore CARROT

Année universitaire 2013-2014

Je remercie le Médecin général Eric Darré et le Médecin en chef Valérie Denux de m'avoir permis de traiter ce sujet passionnant. Leur écoute et leurs précieux conseils ont été déterminants dans la réalisation de cette étude.

Je remercie également tous ceux qui ont répondu à mes questions avec patience et

intérêt :

Médecin en chef Angot, Etat-major opérationnel santé (EMO-S)

Médecin en chef Bel, Centre de planification et de conduite des opérations (CPCO

J4. Soutien sanitaire)

Médecin en chef Cziernak, EMO-S

Médecin en Chef Thiéry, Hôpital d'instruction des armées de Laveran, professeur

d'éthique médicale

Colonel Chanliau, Centre interarmées de concepts, de doctrines et

d'expérimentations (CICDE)

Colonel Pellistrandi, CICDE

Commissaire lieutenant-colonel Balcerski, Secrétariat général pour l'administration,

bureau droit des conflits armés

Lieutenant-colonel Clavier (er), Croix-Rouge Française, chargé de projet diffusion du

droit international humanitaire

Médecin principal Pohl, Direction centrale du service de santé des armées, bureau

cohérence capacitaire opérationnelle.

Commandant Ramanitra, Ecole du Val de Grâce, division de la formation initiale

spécialisée.

Capitaine Thonier, CPCO

Mlle Ducrot, Croix-Rouge Française, chargé de projet diffusion du droit international

humanitaire.

Dr Eagan Chamberlin, professeur d'éthique au sein du Service de Santé des Etats

Unis.

Enfin, je remercie les membres de la division performance synthèse de la direction centrale du service de santé des armées pour leur accueil, leur soutien et leur bonne humeur.

Table des matières

Préambule 1

Introduction 3

1. Le DIH au sein du SSA : un enjeu majeur 6

a) L'objet du DIH : la protection de la vie humaine 6

b) Un environnement contraignant : le contexte grave de la guerre 7

c) Le DIH fixe les droits et devoirs des personnels sanitaires dans la guerre 9

d) Une obligation légale : le SSA peut engager la responsabilité de l'Etat et celle de ses

personnels pour des crimes de guerre 12

Les forces armées engagent la responsabilité de l'Etat en matière de DIH 13

La responsabilité individuelle de tous les personnels du SSA 14

e) La délicate application du DIH : les conflits juridiques et éthiques 15

2. L'organisation du DIH au sein du SSA : une nécessité 17

a) Attachement aux valeurs DIH 17

b) Une nouvelle dynamique de DIH depuis la guerre d'Afghanistan : la volonté de renforcer la

préparation opérationnelle juridique 18

3. Problématique 18

4. La mise en place du DIH : de la guerre juste à la « guerre justifiée » 19

5. Nature et portée du DIH 20

a) La multiplicité des sources du DIH 20

Les sources conventionnelles 21

Le droit dérivé 21

Les sources coutumières 22

b) Le champ d'application du DIH 23

6. Le lien étroit entre le DIH et le SSA : 24

a) La mission opérationnelle actuelle du SSA 24

b) L'organisation du SSA 25

Méthodologie 27

Les atouts du SSA relatifs à la capacité d'intégration et d'application du DIH 30

· Valeurs historiques du SSA 30

· Ethique médicale intrinsèque au SSA 31

· Potentiel d'intégration au niveau stratégique du DIH 32

· Bureau juridique dédié au SSA 32

· Doctrine d'emploi ancrée dans le DIH 33

· Ecoles de formation initiale et continue propres au SSA 33

· Port de l'emblème 34

· Dimension internationale du SSA 35

Les vulnérabilités du SSA relatives à la capacité d'intégration et d'application du DIH __ 36

· Diversité des statuts du personnel du SSA 36

· Pas de formation continue en DIH au sein du SSA 37

· Absence de soutien juridique opérationnel dédié 37

· Pas de compagnonnage en DIH 38

· Peu de relations sur le sujet avec les armées 38

·

Fiche-Action 1: Promouvoir le statut de militaire non combattant au sein du SSA 79

Manque de RETEX sur le DIH 39

Les opportunités relatives à l'applicabilité du DIH par le SSA 40

· Portée universelle du DIH 40

· Valeurs françaises 40

· Importance accordée par les organisations internationales 41

· Partenariats ou collaborations du SSA 41

· Renforcement du lien avec le commissariat aux armées 42

Les menaces relatives à l'application du DIH par le SSA 43

· Evolution lente du DIH 43

· Complexité des situations opérationnelles 43

· Evolutions techniques et technologiques 44

· Etendue de la typologie des missions du SSA 45

· Projections d'urgence et ouvertures de théâtres 46

· Non-respect du DIH par certains adversaires et alliés 46

· Pression des armées 48

· Effets psychologiques de la guerre 49

· Judiciarisation des conflits 50

· RETEX des derniers conflits pour les armées (Irak, Afghanistan, Mali) 51

AVOT 52

L'analyse du AVOT 53

· Analyse du croisement des atouts et des opportunités 53

· Analyse du croisement des atouts et des menaces 56

· Analyse du croisement des vulnérabilités et des menaces 58

· Analyse du croisement des vulnérabilités et des opportunités 60

La Discussion 63

· Le DIH : une obligation légale 63

· Le risque pour le SSA de perdre sa crédibilité et sa légitimité 64

· Le DIH : expression des valeurs que porte le SSA 66

· L'intégration du DIH : un devoir envers les personnels du SSA 67

· Le DIH : vecteur d'interopérabilité 68

· Promouvoir une application stricte du DIH 69

· Participer au débat sur l'adaptation du DIH aux nouvelles situations opérationnelles 70

· Faire du DIH un référentiel commun à tous les personnels employés par le SSA 71

· Soutenir l'action des personnels de santé en opération en matière de DIH 72

Enjeux pour le SSA 73

· La diffusion du DIH auprès de tous les personnels du SSA quel que soit leur statut 73

· L'intégration du DIH par tous les personnels du SSA 74

· Le regroupement autour du statut de militaire non combattant 74

· Le renforcement du lien avec les armées sur les questions de DIH 75

· La mise en place d'un soutien juridique opérationnel 75

· L'exploitation du RETEX des situations difficiles face au DIH 75

· Le renforcement de la proximité avec les structures civiles concernant le DIH 76

· Le positionnement du DIH lors du soutien santé de coalitions 76

Recommandations 77

Fiche-Action 2: Diffuser le DIH à l'ensemble des personnels du SSA 82

Fiche-Action 3: Diffuser le DIH dans les armées 85

Fiche-Action 4: Etablir une formation renforcée en DIH 88

Fiche-Action 5: Valoriser les compétences du SSA en DIH 91

Fiche-Action 6: Mettre en place un soutien juridique opérationnel 94

Fiche-Action 7: Renforcer l'exploitation du RETEX en matière de DIH 97

Fiche-Action 8: Participer à une réflexion globale sur l'adaptation du DIH au contexte

opérationnel 100

Fiche-Action 9: Porter les valeurs du DIH au sein de la communauté médicale militaire 102

Annexe 1: La justice pénale internationale 104

Annexe 2: Historique du DIH, de la guerre juste à la guerre justifiée 106

Annexe 3: Historique du SSA et du DIH: deux destins liés 112

Annexe 4: Le SSA en opération 117

Annexe 5: Organisation du soutien médical en opération 118

Annexe 6: Analyse AVOT 119

Annexe 7: Procédure de sauvetage au combat 130

Bibliographie 132

1

Préambule

« La guerre est un mal absolu. Il n'y a pas de guerre joyeuse ou de guerre triste, de belle guerre ou de sale guerre. La guerre humilie déshonore, dégrade. C'est l'horreur du monde rassemblée dans un paroxysme de sang et de larmes. (...) La guerre exaltera toujours en l'homme ce qui, en lui, relève de l'ange - ses ressorts les plus nobles, le courage, le mépris de la mort - et ce qui relève de la bête - ses instincts bestiaux, la peur, la lacheté» 1. Hélie de Saint Marc souligne ainsi toute l'ambiguité de la guerre qui incarne le meilleur et le pire de la nature humaine. Dans ce cadre, le droit international humanitaire cherche à encourager les principes d'humanité et à restreindre les excès de violence. L'objectif du droit international humanitaire est ainsi de limiter la souffrance de l'Homme au sein des conflits armés.

Pour cela, le droit international humanitaire protège les valeurs considérées comme fondamentales par la société internationale. Par principe, l'étude du droit se distingue de l'éthique dans le sens où son objectif premier n'est pas de caractériser la valeur morale des actes mais de définir ce qui est permis ou défendu par la règle instituée dans une société donnée. En ce sens, tout ce qui n'est pas interdit étant autorisé, la règle de droit délimite l'autorisation d'agir sans crainte d'être poursuivi. Cependant, l'étude du droit international humanitaire est largement influencée par l'éthique et la philosophie en ce que celui-ci vise à protéger des valeurs éminemment morales. De plus, la pratique révèle que l'application du droit est étroitement liée à un jugement éthique. Etudier l'application du droit international humanitaire est donc une entreprise hautement éthique et philosophique. En ce sens, appliquer une logique organisationnelle et managériale à cette analyse est une entreprise délicate.

Néanmoins, le droit international humanitaire devient un enjeu stratégique au sein des nouveaux conflits, dans lesquels le Service de Santé des Armées (SSA) est impliqué, car il participe à la légitimation de l'action de la force. Le commandement et

1 Hélie de Saint Marc, Préface rédigée à Lyon le 28 septembre 2010. dans Général Benoit Royal, L'Ethique du soldat français: la conviction d'humanité, 2nde éd., Economica , 2011.

les personnels du SSA attendent donc des solutions pratiques pour faciliter l'application du DIH.

Ainsi, cette étude propose d'appliquer une analyse stratégique organisationnelle et managériale à un sujet juridique mais aussi éminemment éthique. Au vu de la nature du sujet, qui suppose une juxtaposition des règles juridiques et des valeurs éthiques, le choix du modèle d'analyse a été complexe. Néanmoins, l'utilisation d'une méthode d'analyse stratégique telle que la méthode AVOT2 (atouts, vulnérabilités, opportunités, menaces) a permis une analyse approfondie des contraintes juridiques et éthiques qui s'imposent aux personnels de santé au sein des conflits armés. Ainsi, un diagnostic stratégique interne et externe détaillé a conduit à proposer des recommandations structurelles et de management pour améliorer l'intégration et l'application du DIH au sein du service.

2

2 Plus connue par son anglicisme SWOT (strengths, weaknesses, opportunities, threats).

3

Introduction

Le Code d'Hammourabi, constitue la première trace de droit de la guerre. Hammourabi, souverain de Mésopotamie de 1790 à 1750 avant Jésus-Christ, établit un code de conduite de la guerre : « Je prescris ces lois afin que le fort n'opprime pas le faible ». Si l'histoire démontre la nature belligène de l'homme, elle souligne aussi la volonté des êtres humains de limiter cette violence en mettant en place des normes capables de réguler leurs relations et d'assurer leur protection. L'homme est au centre d'un combat où s'affrontent une agressivité belligène et une sociabilité issue de son humanité. Le droit international humanitaire (DIH) et la médecine militaire ont ceci en commun qu'ils cherchent tous deux à limiter les souffrances des Hommes dans la guerre et ont ainsi pu apparaitre utopistes ou contraignants selon les époques.

De la participation de médecins et d'infirmiers à des interrogatoires dans les prisons américaines :

Le 4 novembre 2013 un rapport indépendant dénonce la complicité des professionnels de santé américains concernant les abus commis dans les prisons américaines en Afghanistan, en Irak et à Guantanamo3. Cette étude souligne que les médecins et les infirmiers ont participé à « la conception, la participation et l'application de tortures et de traitements cruels, inhumains et dégradants ».

Des médecins et psychologues étaient initialement présents pendant les interrogatoires aux fins déclarées de protection pour les détenus. Privation de sommeil, manipulation du régime alimentaire et privation sensorielle étaient donc effectuées sous surveillance de médecins et de psychiatres. En Afghanistan, plus de 30% des personnels de santé basés hors hôpital ont assisté ou connaissaient d'autres médecins qui avaient assisté à ces interrogatoires. En Irak, ils représentaient 18%.

En 2002, la participation des personnels des services de santé américains aux interrogatoires devint plus formelle en Irak et à Guantanamo. Le Department of

3 « L'éthique abandonnée : professionnalisme médical et abus sur les détenus dans la guerre contre le terrorisme », 4 novembre 2013, Institute on médicine as a profession.

4

Defense (DOD) mit alors en place des équipes de consultations spécialisées en science du comportement (Behavioral science consultation team- BSCTs) qui développèrent de nouvelles techniques d'interrogatoires permettant d'optimiser la collecte de renseignements sans mettre en danger la vie du détenu. La violence utilisée lors des interrogatoires rendait de plus en plus obligatoire la présence de médecins pour la sécurité des détenus. Cependant, la présence de personnel de santé permettait d'augmenter les souffrances causées aux détenus. Presque la moitié des personnels de santé alors membres des BSCTs ont ensuite rapporté qu'ils subissaient des pressions et n'étaient pas à l'aise dans leur rôle. Afin d'optimiser la collecte de renseignements, les personnels de santé ont aussi participé à l'élaboration des « interrogatoires sur-mesure » en fonction du profil psychologique et du dossier médical du patient. Les spécificités des dossiers médicaux ont donc été partagées avec les militaires en charge d'interroger les prisonniers. La participation directe de personnels sanitaires à des traitements inhumains ou dégradants n'a pas été clairement établie, mais il est probable qu'ils aient participé à l'exploitation des phobies, à l'utilisation du chaud-froid, à l'isolation ou à la surcharge sensorielle.

La communauté médicale américaine a fortement condamné cette atteinte à la déontologie et à l'éthique médicale. Sur le plan juridique, la participation à des actes de tortures et le fait de ne pas les dénoncer est contraire à la Convention contre la Torture ratifiée par les Etats Unis en 1988. Même le Patriot Act de l'administration Bush de 2002, qui fait des ennemis des Etats Unis des « combattants illégaux » ne bénéficiant pas du statut protecteur de prisonnier de guerre, ne saurait rendre ces interrogatoires légaux4.

De l'utilisation de médicaments comme une arme non létale :

Voici un message inscrit au dos d'un médicament délivré par l'armée américaine à la population vietnamienne lors de la guerre du Vietnam dans le cadre d'une mission d'aide médicale à la population :

4 Article 3 CGI, Article 75(2) PI, Article1 Convention contre la Torture adoptée en 1984, ratifiée par les Etats UNis en 1988 avec 19 réserves .IMAP, Ethics abandoned: medical professionalism and detainee abuse on «war on terror», Task force report, novembre 2013 - Rubenstein l., Pross C., Davidoff F., Lacopino V., Coercive US interrogation policies: a challenge to medical ethics, JAMA. 2005;294(12):1544-1549. doi:10.1001/jama.294.12.1544.

5

« Une équipe médicale a été envoyée dans votre village pour vous aider. Venez avec votre famille et vos amis si vous êtes malade ou blessé. L'équipe médicale vous aidera à vous soigner. L'équipe médicale a été envoyée par le gouvernement du Vietnam du Sud parce que la république du Vietnam veut aider votre famille à se débarrasser de la maladie et de la souffrance. L'équipe médicale doit être protégée. Les Viet Cong veulent détruire l'équipe médicale parce que les Viet Cong ne veulent pas que le gouvernement du Sud Vietnam aide son peuple. Les soldats de la 9e Division sont là pour protéger l'équipe médicale pour que celle-ci puisse vous aider. S'il vous plait aidez nous à protéger l'équipe médicale. S'il vous plait dites aux soldats où les Viet Cong cachent leurs troupes, leurs armes et leur nourriture. »5

Pendant la guerre du Vietnam l'armée a menée une importante mission d'aide médicale à la population (MEDCAPS) pour « gagner les coeurs et les esprits» allant parfois jusqu'à distribuer des placebos. Cette mission a été particulièrement mal vécue par les personnels du service de santé qui se sont sentis trahis et utilisés par l'autorité militaire.6 Ces MEDCAPS ont posé des problèmes éthiques et juridiques car la collecte de renseignements par les unités sanitaires est contraire à l'esprit des conventions de Genève. Le premier protocole additionnel aux conventions de Genève de 1977 interdit ce genre d'opération. En effet, est interdit le fait de soumettre des personnes à un acte médical qui ne serait pas motivé par leur état de santé7. De plus, aucune personne exerçant une activité médicale ne peut être contrainte de donner à quiconque appartenant soit à la partie adverse, soit à sa propre partie, des renseignements concernant les blessés ou les malades qu'elle soigne, si elle estime que de tels renseignements pourraient porter préjudices à ceux-ci ou à leur famille8.

Ces deux exemples montrent bien la difficulté pour le personnel sanitaire de résister aux effets de la guerre, aux pressions politiques et militaires. Ces conflits éthiques n'excusent pas mais peuvent expliquer la transgression de valeurs fondamentales

5 Dr. Eagan Chamberlain, S. M., Moral dilemnas in military medicine: a historic-ethical analysis of the problem of dual loyalties and medical civilian assistance programs in the US army, University of Texas Medical Branch, april 2013.

6 Op cit (5)

7 Article 11PI.

8 Article 16(3) PI.

6

telles que le respect de la dignité humaine, le respect du secret médical ou le principe de protection de la population. Le DIH trouve alors toute sa place comme garde-fou, comme guide de comportement envers les victimes des conflits armés mais aussi envers le personnel sanitaire.

1. Le DIH au sein du SSA : un enjeu majeur

L'application du DIH au sein du service de santé des armées (SSA) est un enjeu particulièrement important de part son objet, les droits et les devoirs qu'il accorde aux personnels sanitaires, son application délicate dans la guerre et les obligations légales qui s'y attachent.

a) L'objet du DIH : la protection de la vie humaine

A travers la formule « sans ami, personne ne choisirait de vivre », Aristote démontre, dans son traité intitulé Ethique à Nicomaque, qu'il existe une valeur universelle que nul ne peut rejeter : l'amitié. Avec le terme philia - amitié - Aristote désigne le choix volontaire de vivre ensemble en vue du bonheur. Ce postulat est aujourd'hui estimé comme étant une donnée anthropologique, propre à toutes les sociétés humaines. L'amitié est donc virtuellement un principe universel de la valeur humaine9. L'idée de l'existence de valeurs morales pouvant être reconnues comme universelles est largement partagée par les philosophes contemporains. Monique Canto-Sperber écrivait dans son essai, Le bien, la guerre et la terreur : « Je suis convaincue qu'il existe des valeurs morales stables, très largement partagées, et dont la définition ne dépend pas de l'environnement social ou culturel, même si un tel environnement explique la diversité de leurs modes d'expression ».10 Le refus de la souffrance traverse ainsi les époques et les cultures11. Les découvertes accomplies par les sciences de la vie valident l'existence chez tout individu de prédispositions

9 Aristote, Ethique à Nicomaque, trad. Brodéus R., GF, Flammarion, 2004. La tradition républicaine française a donné à cette philia le nom de fraternité; Kant, lui aussi, estime que les lois de la morale sont universelles : en 1785 dans Fondation de la métaphysique des moeurs, il énonce le principe de l'impératif dans une formule célèbre : « agis toujours de telle façon que tu traites l'humanité dans ta propre personne et dans celle d'autrui, non pas seulement comme un moyen, mais toujours aussi comme une fin en soi».

10 Canto-Sperber M., Le bien, la guerre et la terreur, Revue de Défense, n°121 (mai- juin 2007).

11 Walzer M., Guerres justes et injustes, trad. S.Chambon et A. Wicke, collection Folio Essais, Gallimard, 2006, p77 à 122.

7

physiologiques innées d'ordre moral propres à la nature humaine. Le professeur Antonio R. Damasio, directeur de l'Institut pour l'étude neurologique de l'émotion et de la créativité de l'Université de la Californie du Sud et le professeur Jonathan Haig, psychologue à l'Université de Virginie, ont démontré qu'il existe dans notre cerveau des zones clairement impliquées dans l'élaboration de jugements moraux qui poussent l'homme à avoir une aversion pour la souffrance et à développer le sens de l'équité12.

La thèse défendant l'existence de valeurs morales universelles qui limitent les atteintes à l'intégrité humaine, peut donc légitimement s'appuyer sur les principes philosophiques tirés de l'observation empirique de l'évolution des hommes et sur la découverte d'un patrimoine génétique commun à toute l'espèce humaine. La morale universelle définit dans l'ordre du bien et du mal des impératifs et des normes13. Le droit transcrit les valeurs morales et les rend opposables juridiquement aux individus. Le DIH vise à protéger et à faire respecter les personnes les plus faibles au sein des combats : les civils, particulièrement les femmes et les enfants, et les personnes hors de combats c'est-à-dire les blessés, les malades et les prisonniers14. C'est en ce sens que ce droit accorde une protection particulière aux personnels sanitaires afin qu'ils puissent porter secours aux victimes de la guerre et protéger la vie humaine. La médecine de guerre et le DIH sont donc étroitement liés par un objectif commun : protéger le droit à la vie, une valeur fondamentale universelle consacrée par de nombreux textes juridiques15.

b) Un environnement contraignant : le contexte grave de la guerre

Etymologiquement, le terme de guerre vient probablement du germanique werra, qui était sans doute à l'origine un cri de bataille. Elle peut être définie comme un « conflit armé à grande échelle opposant au moins deux groupes humains »16.Que la nature humaine soit belligène ou que la guerre s'explique par l'établissement d'institutions

12 Général Benoit Royal, L'éthique du soldat français : la conviction d'humanité, Economica, Coll. Stratégie et Doctrines, 2011, p25 et 26.

13 Ricoeur P., Ethique, encyclopédie Universalis, www.universalis.fr/encyclopedie/ethique, 2014

14 Article 85 (3) PI.

15 Article 3 de la Déclaration universelle des droits de l'Homme de 1948 ; article 2 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, 1950 ;

16 Tertrais B., La guerre, que sais-je, puf, 2010, p10

8

artificielles, historiens, anthropologues et ethnographes démontrent scientifiquement que « la guerre est d'une vilaine monotonie »17. « Si la guerre a un superbe passé ; elle a aussi un bel avenir » souligne le Général Vincent Desportes18.

La guerre ne change pas de nature, car l'effet majeur recherché reste la soumission de l'adversaire, mais elle change de visage. L'unipolarisation du monde autour des Etats-Unis et l'accélération de la globalisation et de son corollaire, la glocalisation créent des frustrations au niveau local19. Des volontés locales sont en conflit avec des puissances globales qui ont développé une très haute technicité et possèdent l'arme nucléaire. La mondialisation et l'ère de l'information facilitent les échanges et transforment les modes d'organisation. Dans ce contexte, la guerre que l'on qualifiait de symétrique est vécue comme un conflit asymétrique par l'adversaire irrégulier. Ainsi, « selon la loi fondamentale de la guerre qui est celle du contournement, refusant intelligemment le combat à armes égales, le nouvel adversaire puise sa force dans l'évitement de la puissance ; il joue la disparité des moyens et des modes d'actions »20. Une guerre asymétrique est un conflit qui oppose des combattants dont les forces sont incomparables ; où le déséquilibre militaire, sociologique et politique entre les camps est total. Dès lors, il ne s'agit généralement plus pour la force militaire de détruire les éléments de la puissance de l'Etat, mais de convaincre : il s'agit de rallier et non de soumettre. Dans cette approche globale, la bataille initiale de haute technologie est courte mais la campagne qui la suit est longue. L'action militaire coercitive, hier centrale, devient une « ligne d'opération », parmi d'autres. Même si l'Etat sécuritaire du pays conditionne les entreprises diplomatiques, économiques et humanitaires21. Le SSA se trouve donc ré-immergé au centre des conflits et de la stratégie militaire. La guerre asymétrique et son corollaire l'approche globale présentent de nombreux défis pour l'application du DIH d'une part parce qu'elles soulignent des zones grises du droit et d'autre part parce que certaines parties au conflit, alliées ou adversaires, s'autorisent parfois à contourner le DIH.

17 Keeley L.H., Les guerres préhistoriques, collection tempus, ed. Perrin p350. ; Cf. Eckhardt W., War related deaths since 3000 BC, Security Dialogue, vol.22, numéro 4, 1991 ; Hobbes T., Le léviathan, 1650 ; Rousseau J.-J, Discours sur l'origine et les fondements de l'inégalité parmi les hommes, 1755.

18 Général Vincent Desportes, La guerre probable, penser autrement, Economica, 2nd ed. 2008, p1.

19 Findlay M., Governing through globalised crime : futures for international criminal justice, Willan publishing, 2008

20 Op cit. (18), p13.

21 Op cit. (18), chapitre 3, p130 à 168.

9

c) Le DIH fixe les droits et devoirs des personnels sanitaires dans la guerre

Les blessés et les malades « doivent en toutes circonstances être traités avec humanité et recevoir, dans toute la mesure du possible et dans les délais les plus brefs, les soins médicaux qu'exigent leur état »22. Le statut de non combattant spécifique du personnel sanitaire, c'est-à-dire du personnel exclusivement affecté au conflit à des fins sanitaires, permet de mettre en oeuvre cette disposition de manière optimale. Le statut de non combattant dont dispose les personnels du SSA est un statut protecteur. Ces droits sont inaliénables23.

Les articles 24 et 25 de la première convention de Genève (CGI) distinguent les non combattants permanents, exclusivement affectés à des opérations de soutien médical, et les non combattants temporaires, employés de manière temporaire sur des missions de soutien médical. Les personnels bénéficiant du statut de non combattant permanent sont respectés et protégés en toutes circonstances. Mais les personnels sous statut de non combattant temporaire ne sont protégés que s'ils remplissent exclusivement des fonctions de soutien médical au moment où ils viennent au contact de l'ennemi. Les missions duales de combattants et non combattants sont prohibées24. Les personnels bénéficiant du statut de non combattant temporaire, notamment les auxiliaires sanitaires, doivent en connaitre les limites. Les personnels combattants effectuant des gestes de secours, quant à eux, ne sont pas protégés, ils peuvent être pris pour cible par l'ennemi.

Pour toutes les unités sanitaires, la protection peut cesser après sommation s'il s'avérait qu'ils sont utilisés pour commettre des actes nuisibles à l'ennemi. Néanmoins, le fait que les unités sanitaires soient gardées ou escortées et que le personnel de l'unité soit doté d'armes légères individuelles pour sa défense et la défense des blessés et des malades dont il a la charge ne sont pas considérés comme des actes nuisibles à l'ennemi25. L'esprit de la loi révèle en l'espèce que la licéité de l'utilisation de l'arme repose plus sur l'intention accompagnant le feu que sur la catégorie de l'arme. Le personnel sanitaire doit exclusivement utiliser son

22 Article 10 PI.

23 Articles 7 CGI et CGII.

24 Articles 24 et 25 CGI, articles 36 et 37 CGII, article 12 PI.

25 Article 21 CGI, article 13 PI.

10

armement pour se défendre ou défendre les blessés ou malades dont il a la charge. Il serait en revanche difficile de reprocher à un médecin de protéger son groupement médical de campagne avec une arme collective. En pratique, les unités sanitaires sont souvent protégées par des unités de l'armée de terre. En situation normale chacun reste dans sa spécialité afin d'être le plus efficace possible. Cependant, des véhicules de l'avant blindés ont été attaqués en Afghanistan, le personnel sanitaire doit alors, dans des situations d'exception, être en mesure d'utiliser son arme de manière appropriée et d'agir sous le feu26.

Afin d'assurer la protection des unités médicales les articles 39 à 45 CGI, l'article 18 du premier protocole additionnel aux conventions de Genève (PI) et la coutume internationale prévoient que, par principe, l'autorité militaire doit faire en sorte d'adopter et de mettre en oeuvre des méthodes et procédures permettant d'identifier les unités sanitaires27. Il s'agit ici d'une obligation de moyens et non de résultat car l'unité médicale non identifiable reste sous la protection du statut de non combattant. Ces articles admettent donc par exception que les unités sanitaires ne soient pas identifiables. Cette situation d'exception a récemment été précisée par l'OTAN dans le STANAG 2931 qui dispose que le camouflage de l'emblème est autorisé quand le fait de ne pas camoufler l'emblème pourrait mettre en péril les opérations tactiques. L'ordre doit être communiqué par un officier de niveau brigade minimum. Il doit être temporaire, localisé et prendre fin aussitôt que la situation le permet. Même s'il reste à définir précisément les conditions dans lesquelles l'utilisation de l'emblème « met en péril une opération tactique », il est clair que le camouflage de l'emblème dans l'esprit des conventions de Genève doit rester une mesure d'exception qui ne repose pas seulement sur un sentiment de danger diffus. En Afghanistan, les véhicules de l'avant blindé sanitaires ont pu être ciblés mais ils ne semblent pas que ce ciblage ait lieu sur les autres théâtres d'opération contemporains même si la ré-immersion des unités sanitaires au centre des combats diffuse un sentiment de crainte justifié.

D'autre part, les personnels sanitaires ne peuvent être contraints de donner à quiconque appartenant à la partie adverse ou à l'autorité militaire hiérarchique des renseignements concernant les blessés ou les malades si elle estime que de tels

26 Entretiens CPCO, CICDE, DCSSA/CCO

27 Article 40 CGI : « le personnel portera fixé au bras gauche, un brassard résistant à l'humidité et muni du signe distinctif [...] ce personnel sera également muni d'une carte d'identité spéciale munie du signe distinctif ».

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renseignements peuvent porter préjudice à ceux-ci. Ce principe de non délation n'est pas absolu : le médecin ne peut être contraint de dénoncer mais il n'est pas tenu de ne pas dénoncer. En pratique, le médecin peut agir comme capteur de renseignement diffus notamment quant au moral des troupes ou à l'acceptation de la présence de la force. Il peut et doit aussi prévenir sa hiérarchie s'il est mis au courant d'une attaque imminente mais il ne peut utiliser la médecine dans le but d'acquérir du renseignement28. De même, les médecins ne peuvent être contraints d'accomplir des actes ou de s'abstenir d'accomplir des actes si de tels actes ou de telles omissions sont contraires à la déontologie ou aux règles médicales29. Afin de renforcer cette protection, nul ne peut être puni pour avoir exercé une activité de caractère médical conforme à la déontologie et aux règles du DIH30.

Concernant la prise en charge des blessés, l'article 12 CGI pose le principe de non discrimination. Seules des raisons d'urgence médicale autorise une priorité dans l'ordre des soins. En cas de pertes classiques, les médecins sont confrontés au triage. Cette classification des blessés basée sur l'urgence médicale et les moyens est bien codifiée mais parfois des questions se posent quant au principe de non discrimination : Quel patient prendra-t-on en charge en premier entre un militaire moins blessé et un ennemi plus gravement touché ? L'effet de groupe joue un rôle important. Certains médecins affirment que les militaires et l'opinion publique ne comprendraient pas que l'on ne soigne pas le militaire en premier31. D'autre part, lorsque la situation opérationnelle laisse présager qu'un afflux massif de blessés pourrait survenir et que les moyens sont limités, peut-on continuer à prendre en charge la population civile? En cas d'afflux massif de blessés les médecins adoptent un triage particulier fondé non plus sur l'urgence médicale mais sur le choix de traiter en priorité les cas les plus surement curables et de laisser mourir les cas les plus graves. De même, il peut être nécessaire lorsque les moyens disponibles rendent impossible l'administration de soins approchant un niveau adéquat de s'abstenir de fournir certains soins afin d'éviter des interventions qui, ne pouvant être réalisées correctement, en deviendraient dangereuses32. Le manque de moyens vient donc parfois limiter les soins de santé et rendre difficile l'application du DIH et notamment

28 Entretien CPCO CIMIC, COMEDS, EMOS, DCSSA/CCO

29 Article 16 PI.

30 Article 16 PI.

31 Entretiens

32 CICR, Les soins de santé en danger : les responsabilités des personnels de santé à l'oeuvre dans des conflits armés et d'autres situations d'urgence, CICR,

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du principe d'humanité. Le risque d'euthanasie peut devenir important33. L'article 17 CGI dispose que les morts doivent faire l'objet d'un examen attentif « si possible médical » en vu de constater le décès, établir l'identité et pouvoir en rendre compte. La prise en charge des morts est cependant traditionnellement réalisée en France par le Service du commissariat des armées.

Enfin, le principe de distinction entre combattants et non combattants prévoit que les forces militaires ne doivent « diriger leurs opérations que contre des objectifs militaires ». La population civile jouit d'une protection générale et par là « sont interdits les actes ou menaces de violence dont le but principal est de répandre la terreur parmi la population civile » 34. La protection large accordée à la population a pour but de la tenir écartée des opérations militaires. Dans ce contexte, les missions d'aide médicale à la population, accomplies dans le cadre de conflits armés, doivent être strictement encadrées afin de ne pas constituer une opération strictement militaire à l'encontre d'une population civile (qui peut penser être soigné alors qu'elle ne l'est pas vraiment) et du réseau sanitaire local. Aussi elle ne doit pas être utilisée pour diffuser la peur de la partie adverse dans la population (comme ce fut le cas pendant la guerre du Vietnam35).

L'application du DIH par les personnels sanitaires, placés face à des situations déstabilisantes, n'est pas toujours évidente. Les violations du DIH que cela peut engendrer engagent la responsabilité des Etats et celle des individus.

d) Une obligation légale : le SSA peut engager la responsabilité de l'Etat et celle de ses personnels pour des crimes de guerre

La société internationale a cherché à responsabiliser les Etats et les individus et à réprimer les violations du DIH. Les infractions graves aux conventions de Genève et la violation des lois et coutumes de la guerre constituent des crimes de guerre36. Le critère de gravité peut être sujet à interprétation, il suppose l'atteinte à une valeur

33 Messelken D., Ethical aspects of battlefield euthanasia, Proceedings of the 3rd ICMM workshop on military medical ethics, Military medical ethics series, 2014

34 Article 50 PI, article 13 PII.

35 Op cit. (5)

36 Article 8 du statut de la CPI et article 3 du statut du TPIY.

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fondamentale considérée comme universelle. Le crime de guerre peut être déféré devant toutes les juridictions pénales internationales et les juridictions pénales de tout Etat partie aux conventions de Genève en vertu du principe d'universalité (Annexe 1).

Les forces armées engagent la responsabilité de l'Etat en matière de DIH

L'Etat a tout d'abord une obligation de respecter le DIH. Pacta sunt servanta : ce principe de base du droit conventionnel signifie que le traité « lie les parties et doit être exécuté par elles de bonne foi »37. Ce principe est implicite dans tous les textes contractuels mais les 4 conventions de Genève et les 2 protocoles additionnels rappellent cette obligation et lui adjoignent la formule « en toutes circonstances » afin de soustraire clairement le contenu du DIH à la logique de réciprocité38. L'exception d'inexécution n'est recevable ni en DIH, ni pour les textes relatifs au droit de l'homme, en vertu de la nature même de ces règles39. La responsabilité internationale de l'Etat est engagée lorsqu'il ordonne, commande, organise des crimes de guerre. L'Etat est responsable des violations du DIH qui lui sont imputables. Celles-ci comprennent les violations commises par les forces armées.

L'Etat peut être reconnu responsable de ne pas avoir fait respecter le DIH au niveau national. En effet, celui-ci a l'obligation de légiférer et de « prendre les mesures d'exécution nécessaires » pour assurer l'application du texte des traités et sa diffusion40. Les Etats ont contracté l'obligation de diffuser le DIH dans leur pays respectif en temps de paix et en temps de guerre, et notamment à en incorporer l'étude dans les programmes d'instruction militaire et, si possible, civile de telle manière que ces instruments soient connus des forces armées et de l'ensemble de la population41. De plus, l'article 82 du PI précise que les Etats doivent veiller « à ce que des conseillers juridiques soient disponibles, lorsqu'il y a lieu, pour conseiller les

37 Article 2, Convention de Vienne sur le droit des traités de 1969.

38 Article 1 CGI, Article 1 PI 1977, Article 1 PII 1977; Martin, P.H., Les échecs du droit international, « Que sais-je ? », PUF, n°3151, 1996.

39 Cette exception du droit contractuel est valable en droit international public mais pas en DIH. Article 60 paragraphe 5, Convention de Vienne sur le droit des traités de 1969 .

40 En France, la loi n°98-564 du 8 juillet 1998 tendant à l'élimination des mines anti-personnel a par exemple été adoptée en application de la Convention d'Ottawa du 3 décembre 1997 sur l'interdiction de l'emploi, du stockage, de la production et du transfert de ces armes ; Article 80 du PI ; art. 48 CGI; art.49 CGII; art.128 CGIII; art. 145 CGIV; art. 84 PI.

41 Articles 47 CGI; 48 CGII ; 127 CGIII; 144 CGIV; 83 PI; 19 PII.

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commandements militaires, à l'échelon approprié, quant à l'application des Conventions et du présent Protocole et quant à l'enseignement approprié à dispenser aux forces armées à ce sujet » 42. Pour cela, l'article 6 du PI prévoit que les Etats s'efforceront de former des personnels qualifiés en vue de faciliter l'application du DIH. Les conseillers peuvent également être associés au processus d'examen de toute nouvelle arme, de tout nouveau moyen ou de toute nouvelle méthode de guerre43. Sur le plan juridictionnel, les Etats doivent rechercher les personnes accusées d'avoir commis ou donner l'ordre de commettre des « infractions graves » au DIH, indépendamment de la nationalité du coupable et du lieu de commission du crime, en application du principe de la compétence universelle. Ils doivent charger leurs commandements militaires d'empêcher que soient commises des « infractions graves », de les faire cesser et de prendre des mesures à l'encontre des personnes placées sous leur autorité qui se rendent coupables de tels crimes.

La responsabilité individuelle de tous les personnels du SSA

La responsabilité pénale individuelle comprend deux éléments. Selon le TPIY d'une part « tous actes d'assistance, sous forme verbale ou matérielle, qui prêtent encouragement ou soutien » dès lors que cette participation a eu « un effet important ou substantiel ». D'autre part, l'accusé doit avoir participé en connaissance de cause à l'acte. Sa participation peut intervenir avant, pendant ou après la commission de l'acte. Un refus d'intervenir pour faire cesser l'acte peut constituer un crime44. Les commandants et autres supérieurs hiérarchiques sont pénalement responsables des crimes de guerre commis par leurs subordonnés s'ils savaient, ou avaient des raisons de savoir, que ces subordonnés s'apprêtaient à commettre ces crimes et s'ils n'ont pas pris toutes les mesures nécessaires et responsables pour en empêcher l'exécution ou, si ces crimes avaient déjà été commis, pour punir les responsables. Tout combattant a le devoir de désobéir à un ordre manifestement illégal. Le fait d'obéir à un ordre d'un supérieur hiérarchique n'exonère pas le subordonné de sa

42 Article 82 PI, 1977.

43 Article 36 PI, 1977.

44 TPIY, Procureur c/ Dusko Tadic, 7 mai 1997- TPIY, Procureur c /Ejnil Delalic Zdravko Mucic, Hazim Delic et Esad Landzo, 16 novembre 1998- TPIY, Procureur c/ Anto Furundzija, 10 décembre 1998 - TPIY, Procureur c/ Jean-Paul Akayesu, 2 septembre 1998.

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responsabilité pénale45. Au sein de l'armée française, la violation des règles de DIH entraine une sanction disciplinaire, sous peine d'engager la responsabilité pénale du commandement. Le Statut Général des Militaires, le Règlement de Discipline Générale dans les Armées et le Code du Soldat prévoient que le militaire ne peut accomplir, ordonner ou se voir ordonner des actes contraires aux règles du droit international46. L'instruction d'application du règlement de discipline générale et le Code de Déontologie Médicale des Médecins Militaires précisent que les personnels sanitaires doivent adopter une conduite conforme aux principes généraux régissant l'exercice de la profession ainsi qu'aux règles de DIH47. Ainsi, lors de l'affaire Mahé la Cour d'Assise de Paris a condamné un colonel et deux sous officiers français de l'armée de terre pour un crime de guerre commis en 2005 à l'encontre d'un civil Ivoirien.

Un véritable arsenal juridique a donc été mis en place pour défendre le DIH au niveau national et international. Dans un contexte de judiciarisation de la société et de complexification de l'environnement opérationnel, le risque de contentieux devrait donc se renforcer. Assurer l'intégration et l'application du DIH est une obligation légale pour le SSA qui engage la responsabilité de l'Etat et celle de chacun de ses personnels. Cette obligation de résultat suppose aujourd'hui plus que la simple diffusion des règles de droit.

e) La délicate application du DIH : les conflits juridiques et éthiques

L'application du DIH par les personnels du service de santé des armées est loin d'être évidente. Les règles de droit peuvent parfois se trouver en conflit avec d'autres règles de droit ou avec des limites opérationnelles. Le devoir de non discrimination peut ainsi s'opposer au devoir de cohésion du militaire ou à la limitation des moyens. L'application du DIH implique nécessairement un questionnement éthique.

45 Article 7.3 du Statut du TPIY, Articles 28 et 86 alinéa 2 du Statut de la CPI.

46 Loi 72-662 du 13 juillet 1972 portant statut général des militaires - décret 75-675 du 28 juillet 1975 portant règlement de discipline générale dans les armées, article 7 à 9bis - code du soldat, articles 3 et 4.

47 Instruction 52000/DEF/C/5 du 10 décembre 1979 portant application du règlement de discipline générale dans les armées, Décret n° 2008-967 du 16 septembre 2008 fixant les règles de déontologie propres aux praticiens des armées.

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L'éthique a pour but de permettre à l'individu d'agir avec la conscience d'une action sociétale responsable et de manière conforme à la morale. L'éthique regroupe un ensemble de règles qui se différencient et complètent les règles juridiques car elles intègrent le mobile des activités humaines et trouvent leur fondement dans l'intériorité de l'être48. L'éthique inspire et précède souvent les règles juridiques : les règles morales sont souvent érigées en loi. Le temps de l'éthique permet la création du consensus social nécessaire à l'établissement de la règle de droit. Nous soulignerons aussi que la connaissance du droit sert l'éthique. Le droit constitue un référentiel important dans le questionnement éthique.

Le questionnement éthique du médecin militaire dépend de l'évaluation morale que fait celui-ci de la situation telle qu'il la perçoit sur le terrain. Selon Kant, il existe des exigences impératives, telles que les règles de droit, qui n'ont pas à être subordonnées à des considérations empiriques. Mais cette hiérarchisation est difficile à mettre en place car il existe de multiples valeurs et principes moraux qui ne peuvent être rassemblés sous un agencement unique. Selon Weber, l'Homme est contraint de choisir entre l'éthique de conviction, qui rend compte des certitudes morales, et l'éthique de responsabilité, qui rend compte de la situation différente et assume la responsabilité de ses décisions. Ces deux éthiques peuvent être rendues complémentaires et non pas opposables49. Chaque membre du SSA disposerait de valeurs communes qui formeraient l'éthique de conviction et serait en mesure de mettre en oeuvre une éthique de responsabilité en fonction des circonstances50. La connaissance du DIH n'est donc pas suffisante, il est nécessaire de s'assurer de l'intégration de ces normes afin d'appliquer strictement le DIH. L'intégration du DIH pourrait rendre le questionnement éthique des personnels du SSA plus aisé.

Le DIH, comme la médecine militaire, s'efforce donc de protéger la vie et de limiter les souffrances de l'Homme au sein des conflits armés. Si la règle de droit est aisément compréhensible, son application dans un contexte de violence extrême est délicate car elle engendre des conflits éthiques. L'intégration de la règle de droit est

48Simone Goyard-Fabre et Jean Ferrari, L'année 1797 : Kant, la métaphysique des moeurs, librairie philosophique J. Vrin, Paris, 2000.

49 MG Darré E., Médecin militaire et droit des conflits armés : entre éthique et juridique, Revue Internationale des Services de Santé des forces armées, vol.76/2, 2003.

50 Op. cit. (50)

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cependant essentielle car l'application de celle-ci constitue une obligation légale et parce qu'elle peut faciliter la prise de décision éthique lors des situations complexes.

2. L'organisation du DIH au sein du SSA : une nécessité

Les personnels du SSA seront de plus en plus souvent confrontés à des problématiques de DIH car l'environnement et les modalités des conflits armés sont de complexité croissante. Dans ce cadre le commandement doit tout mettre en oeuvre pour assurer l'intégration et donc la bonne application du DIH par ses personnels. Aborder le DIH sous un angle organisationnel constitue donc une véritable nécessité pour le SSA afin d'en assurer une bonne diffusion et une application rigoureuse.

a) Attachement aux valeurs DIH

Le SSA est historiquement et culturellement attaché aux valeurs transcrites dans le DIH. L'oeuvre d'Ambroise Paré souligne les valeurs qui animent les médecins voués au soutien des soldats. L'anecdote célèbre, véridique ou légendaire, du dialogue entre Charles IX et Paré est révélatrice. A la remarque du roi, « J'espère que tu vas mieux soigner les rois que les pauvres ». Il aurait répondu « non Sire c'est impossible, je soigne déjà les pauvres comme des Rois » 51. L'honneur, l'intérêt véritable porté aux blessés et aux malades, le désintéressement matériel, sans compromission, l'acceptation du sacrifice altruiste sont les véritables marques originelles de la médecine militaire. Ces valeurs humanitaires sont aujourd'hui traduites dans le Code Internationale d'Ethique médicale adopté par l'Assemblée Médicale Mondiale en 194952, le Code de déontologie médical français53, le Military Commitee 326/3 de l'OTAN et le Code de déontologie médicale militaire française54 . Ces textes prévoient que les personnels de santé doivent adopter une conduite conforme au DIH.

51 Ambroise Paré, Encyclopédie de l'Agora, 2012, http://agora.qc.ca/Dossiers/Ambroise_Pare

52 Code international d'éthique militaire adopté par la 3e Assemblée Médicale Mondiale en 1949 à Londres, http://lexdih.wordpress.com

53 Code de déontologie médicale, modifié le 8 aout 2004.

54 Décret n° 2008-967 du 16 septembre 2008 fixant les règles de déontologie propres aux praticiens des armées.

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b) Une nouvelle dynamique de DIH depuis la guerre d'Afghanistan : la volonté de renforcer la préparation opérationnelle juridique

Malgré une volonté forte de respecter et de faire appliquer ses valeurs, le soutien des personnels du SSA en DIH repose plutôt sur des initiatives ponctuelles. Il n'existe pas de processus cadré de DIH au sein du Service même si celui-ci dispose de compétences importantes en droit et en éthique médicale.

Le conflit en Afghanistan a cependant mis en relief la nécessité de soutenir les personnels du SSA quant à l'application du DIH dans des situations complexes. La ré-immersion au centre des conflits qui provoque des craintes justifiées, les attaques dont furent victimes les personnels sanitaires, la méconnaissance du DIH par nos alliés ont fait prendre conscience de la complexité du DIH et de la nécessité pour les personnels du SSA, outre la connaissance de la règle, d'être en mesure d'appliquer cette règles dans des situations opérationnelles violentes.

Grace à cette étude nous pouvons nous interroger sur la manière la plus efficiente d'organiser le soutien en DIH au sein du SSA.

3. Problématique

Alors que la guerre change de visage, le personnel du service de santé des armées sera de plus en plus confronté à des conflits éthiques et juridiques. Le Service de Santé des Armées pourrait former l'éthique de conviction et l'éthique de responsabilité de ses personnels à travers l'étude du DIH. L'éthique de conviction serait fondée sur la connaissance des règles de DIH et des valeurs médicales et militaires intangibles. Ce référentiel devrait faire l'objet d'un apprentissage continu qui permettrait au personnel sanitaire de résoudre plus facilement certains conflits. D'autre part, le personnel devrait être préparé à mettre en oeuvre son éthique de responsabilité dans un contexte parfois douloureux par des exercices pratiques. Cette double éthique permettrait aux personnels du SSA de s'adapter à chacune des situations qu'ils rencontrent, d'appliquer de manière optimum le DIH et limiterait le poids du stress dû au questionnement éthique.

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Comment alors optimiser l'organisation du DIH au sein du SSA afin de former l'éthique de conviction et de préparer l'éthique de responsabilité des personnels du SSA en vu d'assurer la bonne application DIH dans les situations complexes? Quels moyens doivent être placés au sein du SSA pour diffuser le DIH à l'ensemble du service ? Comment mener les personnels du SSA à connaitre, intégrer et appliquer le DIH en situation opérationnelle ?

Cette étude propose tout d'abord de s'intéresser à la diffusion, l'enseignement, la compréhension, et les conditions d'application du DIH au sein du SSA en identifiant les atouts et les vulnérabilités. Le travail consiste ensuite à comprendre quelles sont les menaces que l'environnement opérationnel fait peser sur l'application du DIH par les personnels du SSA, et comment le SSA peut utiliser ses atouts pour tirer partie des opportunités qui s'offrent à lui au niveau national et international. Le but étant bien de proposer des solutions pour améliorer la diffusion et l'application du DIH dans le SSA français afin d'éviter les débordements qui ont pu être constatés chez nos alliés et de garantir au personnel la certitude de pouvoir faire son travail dans le respect de l'éthique, de la déontologie et du droit.

Après une description de la méthodologie employée, cette étude propose donc une analyse des facteurs clés du DIH au sein du SSA sous forme AVOT de l'anglais de l'anglais Assets (atouts), Vulnerabilities (vulnérabilités), Opportunities (opportunités), Threats (menaces) 55, Puis à partir de cette analyse, une discussion nous permettra d'établir les enjeux relatifs à l'organisation du DIH au sein du SSA afin de proposer des recommandations déclinées sous forme de fiches-actions. Cette étude suppose néanmoins une bonne compréhension du DIH et de la mission opérationnelle du SSA au cours de laquelle celui-ci s'applique. Il convient donc de définir succinctement le DIH, la mission opérationnelle du SSA et le lien étroit qui les unie.

4. La mise en place du DIH : de la guerre juste à la « guerre justifiée »

Le droit des conflits armés est une partie du droit international public qui s'efforce de fixer les normes qui régissent le droit de faire la guerre, jus ad bellum, et la manière

55 Une nouvelle doctrine de l'analyse SWOT.

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de faire la guerre, jus in bello. Cette seconde démarche correspond au droit international humanitaire (DIH). Le droit à la guerre et le droit dans la guerre se sont développés de manière concomitante. Puis le droit relatif à la limitation des armements est apparu. Celui-ci relève aussi bien du jus ad bellum que du jus in bello. Les frontières sont donc devenues poreuses au sein du droit des conflits armés. Le DIH peut néanmoins être défini comme l'ensemble des règles juridiques, d'origine conventionnelle ou coutumière, spécifiquement destinées à régler les problèmes humains découlant directement des conflits armés internationaux et des conflits armés non internationaux, et qui restreignent le droit des parties au conflit d'utiliser les méthodes et les moyens de la guerre de leur choix, ou protègent les personnes et les biens affectés ou susceptibles de l'être par le conflit. A toutes les époques, même lorsque la guerre constituait « la continuation de la politique par d'autres moyens », des humanistes ont tenté d'imposer des limites aux excès qu'elle générait56 (Annexe 2). La mise hors la loi de la guerre a échoué. Faute de remède pour traiter la maladie à la source, la société internationale à développé le droit international humanitaire afin de lui appliquer un traitement symptomatique. De fait, on est passé de la guerre, comme un moyen de la politique des Etats, à la « guerre justifiée »57. Il est préférable aujourd'hui de ne plus parler de « guerre juste » qui est chargée de prétention morale et tend à effacer la nécessaire proportionnalité liée à l'usage de la force. La force exercée en vue du bien est plus difficile à modérer que la force exercée en vue du droit58. Les guerres justifiées sont des guerres limitées, menées conformément à un ensemble de règles. Le droit parait aujourd'hui être le seul moyen d'atténuer les conséquences de la guerre.

5. Nature et portée du DIH

a) La multiplicité des sources du DIH

Les sources du droit international sont consensuelles. Le DIH est constitué d'un ensemble de normes de droit international primaires, conventionnelles et coutumières, et de règles de droit international dérivées, actes des organisations

56 Carl von Clausewitz (1832) dans De la guerre, traduction de Jean-Baptiste Neuens, Paris, Astrée, 2014.

57 Op. cit. (12)

58 Cf., op. cit. (18 et 11)

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internationales. L'obligation juridique découle donc soit de la ratification de textes conventionnels, soit du pouvoir dont est investi l'organe qui adopte un acte ou interprète le DIH, soit de l'acceptation de pratiques constantes comme étant de droit.

Les sources conventionnelles

L'appareil conventionnel est complexe. Cette complexité tient d'une part à l'ampleur du volume des traités et à leur absence d'uniformité. D'autre part, afin de favoriser la ratification d'un maximum d'Etats aux traités, le droit international public admet que les parties émettent des réserves ou des déclarations interprétatives. Les réserves peuvent exonérer l'Etat de certaines obligations59. Les déclarations interprétatives permettent à un Etat d'adhérer à un traité tout en restreignant l'application d'une disposition particulière60. La maitrise de cet ensemble conventionnel mouvant et de son applicabilité sont donc difficiles.

Le droit dérivé

En vertu du droit international primaire, l'Organisation des Nations Unies (ONU) dispose de la compétence de créer du droit dérivé. L'Assemblée Générale des Nations Unies et le Conseil de Sécurité s'efforcent ainsi de compléter ou de préciser les dispositions du DIH par voie de résolutions ou de déclarations plus ou moins impératives. Plusieurs dizaines de résolutions générales ou particulières forment donc aujourd'hui un ensemble complémentaire du DIH61.

59 Réserve de la Suisse (1982) et de l'Autriche (1982) quant à l'application de l'article 58 a) et b) du PI qui « seront appliquées sous réserve des exigences de la défense du territoire national ».

60 La Nouvelle Zélande (1988) déclare que sa ratification des PI et PII ne devra pas s'étendre aux iles Cook Nioué et Tokélaou ; L'Argentine (1986) affirme que la ratification des PI et PII ne pourront être interprétés comme accordant l'impunité à ceux qui enfreignent les normes du DIH.

61 Depuis 1991, on constate une accumulation des résolutions concernant le droit d'accès aux victimes. Résolution 1001 du 30 juin 1995, résolution 908 du 31 mars 1994, résolution 1010 du 10 aout 1995.

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Les sources coutumières

Le DIH n'échappe pas à « l'invasion du système normatif par la coutume »62. La coutume doit se différencier de la pratique répétée. Sa définition repose sur un élément matériel et un élément intentionnel. La pratique doit d'abord être constante. L'uniformité et la généralisation de la pratique dans le temps conditionnent donc la formation de la coutume. L'adoption d'une solution exceptionnelle dans une situation singulière servira de référence dans les situations semblables mais ne crée pas une norme juridique, seules sa répétition et sa généralisation peuvent conduire à développer le DIH. L'élément matériel ne suffit pas à définir la coutume. La pratique doit être accomplie avec la conviction d'appliquer le droit. En 1999, le CICR a publié un rapport sur les règles coutumières du DIH en place.63 La Cour Internationale de Justice (CIJ) reconnait le caractère obligatoire des règles coutumières qui s'imposent à tous les Etats parties ou non aux conventions, en temps de guerre et en temps de paix64. La jurisprudence des cours internationales découvre ainsi les principes fondamentaux universels. La CIJ a identifié les principes fondamentaux ayant trait à la conduite des hostilités dans son avis consultatif sur la Licéité de la menace ou de l'emploi d'armes nucléaires. Il s'agit du principe de distinction qui doit être fait entre civils et combattants, de la prohibition de l'emploi d'armes qui causent des blessures superflues ou des souffrances inutiles, et du principe d'humanité contenu dans la clause de Martens65. La codification des règles coutumières n'a pas pour effet de supprimer ces dernières mais simplement de les ordonner et de les préciser. De même, certaines règles conventionnelles peuvent s'intégrer dans le droit coutumier, c'est le cas de l'article 3 commun aux conventions de Genève de 194966.

62 Veil P., Le droit international en quête de son identité, RCADI 1996, t.237, p.161.

63 Ces travaux ont fait l'objet d'une publication en 1999 pour la 27e conférence internationale de la Croix-Rouge et du Croissant Rouge. Rapport du Secrétaire Général présenté conformément à la résolution 1998/29 de la Commission des Droits de l'Homme des Nations Unies, E/CN.4/1999/92, le 18 décembre 1998, para. 21 à 24.

64 CIJ, Affaire du détroit de Corfou, 1949 : l'obligation de notifier l'existence d'un champ de mines pour des considérations élémentaires d'humanité est une obligation erga omnes ; CIJ, Avis relatif aux conséquences juridiques de l'édification d'un mur dans le territoire palestinien occupé, 9 juillet 2004.

65 CIJ, Arrêt sur la licéité de la menace ou de l'emploi de l'arme nucléaire, 1996.

66 CIJ, Affaire du Nicaragua, 1986.

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Les règles du DIH apparaissent donc à plusieurs échelons différents ; droit primaire et droit dérivé, droit conventionnel, droit jurisprudentiel et droit coutumier. Ces droits se soutiennent et s'étayent mutuellement mais peuvent être difficile à interpréter.

b) Le champ d'application du DIH

Seuls les conflits armés bénéficient de la protection du DIH67. La chambre d'appel du TPIY donne une définition non contestée d'un conflit armé dans l'arrêt Tadic relatif à la compétence : « un conflit armé existe chaque fois qu'il y a un recours à la force armée entre les Etats ou un conflit armé prolongé entre les autorités gouvernementales et des groupes armés organisés ou entre de tels groupes au sein d'un Etat ».68 L'article 1er paragraphe 2 du PI exclut de l'application du DIH les « troubles intérieurs » et les « tensions internes » 69.

On applique toutes les normes du DIH aux conflits armés internationaux (CAI) et des règles fondamentales minimales aux conflits armés non internationaux (CANI). Un CAI est par principe commencé ou poursuivi entre deux ou plusieurs Etats70. D'autre part, le PI prévoit que le DIH s'applique en totalité aux conflits armés dans lesquels les peuples luttent contre un régime en place dans l'exercice du droit des peuples à disposer d'eux même71. L'Assemblée générale de l'ONU admet l'extension de cette disposition aux conflits qui oppose des forces issues de la population à un gouvernement mis en place artificiellement72. De plus, pour le TPIY un conflit armé peut être considéré comme international si les troupes d'un autre Etat interviennent dans un conflit interne ou si certains participants au conflit armé interne agissent pour le compte de cet autre Etat73. Un CANI, en revanche, est caractérisé par l'existence d'une opposition armée à l'autorité du gouvernement. Il existe deux branches de CANI. Tout d'abord, les CANI soumis à l'article 3 commun aux 4

67 Assemblée Générale de l'ONU, résolution 43/131du 8 décembre 1988 relative au principe de libre accès aux victimes des catastrophes naturelles et autres situations d'urgence du même ordre.

68 Sassoli M., La première décision de la chambre d'appel du Tribunal Pénal International pour l'ex-Yougoslavie : Tadic (compétence), RGDIP 1996, n°1, p128.

69 Meron T., Projet de déclaration type sur les troubles et tensions internes RICR janv-fev.1988, n°769, p62-80 ; Déclaration de Turku, RICR, mai-juin 1991, n°789.

70Haugh H., Humanité pour tous, le mouvement international de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge, Institut Henry Dunant, 1993, p514-515.

71 Article1 PI 1977.

72 Reisman V., Which law to the Afghan conflict?, AJIL 1988, p 486-491; Assemblée Générale de l'ONU, résolutions 41/158 du 4 décembre 1986, 42/135 du 7 décembre 1987, 44/161 du 15 décembre 1989, 45/174 du 18 décembre 1990.

73 TPIY, Tadic II, para.84.

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conventions de Genève. La coutume définie deux critères exigibles pour l'application de l'article 3 : un degré suffisant d'organisation des parties et un niveau d'hostilité ouverte et collective distincts de simples attentats. Les CANI soumis à l'application du PII, quant à eux, sont plus restreints. Il s'agit des conflits opposant une force armée étatique à des groupes armées organisés, qui sous la conduite d'un commandement responsable, exercent sur une partie du territoire un contrôle tel qu'il leur permette de mener des opérations militaires continues et concertées et d'appliquer le droit74.

Les missions opérationnelles du SSA, qui vont du soutien de missions de coercition, en passant par la stabilisation, le maintien de la Paix, aux catastrophes humanitaires et naturelles, ne relèvent donc pas toutes du DIH.

6. Le lien étroit entre le DIH et le SSA :

Le SSA a un rapport au DIH d'évidence car ils partagent les valeurs d'humanité et de bienveillance mais aussi un rapport de soutien car le DIH protège le personnel, les véhicules et les infrastructures du SSA et enfin malgré tout un rapport de contrainte car le DIH soumet le SSA aux respects de règles sous peine de sanction. Les liens sont donc étroits, même si parfois complexes, d'autant plus que le service de santé et le droit universel que représente le DIH se sont construits souvent de concert. Leur objectif commun est : la limitation des souffrances dans la guerre (Annexe 3).

a) La mission opérationnelle actuelle du SSA

Le SSA assure le soutien santé des forces armées dans le cadre du contrat opérationnel fixé par l'Etat Major des Armées75. Il assure la mise et le maintien en condition opérationnelle des forces (aptitudes et vaccinations par exemple) et la prise en charge des blessés et malades en opérations. Concurremment à sa mission de soutien des forces il peut, au sein d'un conflit armé, effectuer des missions d'aide médicale à la population si la situation opérationnelle le permet et s'il existe un besoin humanitaire. Cette aide médicale peut viser à traiter médicalement

74 Article 1 paragraphe 1 du PII.

75 Le contrat opérationnel de l'Etat Major des Armées est établi en fonction de la loi de programmation militaire et des orientations du livre blanc de la défense déterminées par le gouvernement.

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directement la population locale et/ou à renforcer le tissu sanitaire local. Dans une approche globale des conflits, les actions civilo-militaires ont pris une part considérable. L'aide médicale à la population légitime dans ce cadre la présence de la force et diminue le soutien de l'ennemi, tout en répondant à l'exigence de soutien à la population décrite dans le DIH. 76 En effet, le DIH prévoit que la population civile jouit d'une protection générale et le principe de non discrimination dans la prise en charge médicale induit le soutien sanitaire des personnes civiles.77 A coté des missions de soutien des forces, le SSA peut effectuer des missions d'évacuation des ressortissants et d'aide médicale humanitaire lors de catastrophes purement humanitaires ou de catastrophes naturelles, qui se situent hors du champ des conflits armés contrairement aux missions d'aide médicale à la population.

b) L'organisation du SSA

La description de l'organisation du SSA permet ici d'appréhender à quel niveau et dans quelle proportion le besoin de diffusion du DIH est en permanence nécessaire pour répondre à la mission opérationnelle dans le respect des règles et des principes d'humanité.

En opération le SSA représente 3 à 5% des personnels militaires français déployés78. Mais il soutient les forces sur tous les fronts (annexe 4).

Le concept du soutien sanitaire des forces est fondé sur deux principes fondamentaux. D'une part, la médicalisation et la réanimation-chirurgicalisation de l'avant qui impliquent de porter au plus près des combattants le maximum de moyens mobiles, performants et adaptés aux conditions de l'engagement. D'autre part, la systématisation des évacuations sanitaires précoces vers les hôpitaux de traitement définitif. La voie aérienne est privilégiée, même si elle ne représente pas l'unique mode d'évacuation envisageable.

76 DIA 9.1 relative à l'aide médicale aux populations, N 97/DEF/CICDE/DR du 15 mai 2009. Entretien CPCO, CICDE, EMOS, DCSSA/CO.

77 Articles 10, 48, 49, 51 PI.

78 Entretien DCSSA/CO

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Ainsi, le soutien sanitaire est organisé en quatre niveaux de prise en charge (Annexe 5):

- le niveau 1 est celui de la médicalisation de l'avant qui correspond à la relève et au conditionnement médical primaire réalisés au sein des unités de combat, notamment par des combattants qui disposent d'un diplôme de sauvetage au combat de niveau 1 ou2;

- le niveau 2 est celui du triage médico-chirurgical et de la chirurgicalisation-réanimation de l'avant ;

- le niveau 3 est celui du traitement des blessés sur le théâtre et de l'essentiel des évacuations sanitaires tactiques ;

- le niveau 4 est celui des évacuations sanitaires stratégiques et du traitement définitif, en principe sur le territoire national.

Au sein de chaque structure d'état-major opérationnel, un conseiller médical est responsable de l'organisation du soutien médical et conseille le commandement sur les matières médicales. Il représente le directeur central du Service de Santé des Armées et est garant du respect des règles de droit des personnels sanitaires sous son commandement.

Cette organisation montre combien le SSA est aligné sur les unités combattantes afin de garantir un soutien santé au plus prés des soldats. Elle montre aussi combien la notion de commandement est essentielle à la bonne exécution de la mission, par le biais du conseiller santé placé au plus prés de l'état-major militaire. C'est ainsi que la perception personnel combattant-personnel non combattant peut-être troublée et que la pression du commandement peut potentiellement s'exercer au détriment possible du respect du DIH.

Ainsi, si le SSA et le DIH ont des trajectoires communes et des logiques identiques, le service de santé des armées, pour des raisons émanant de son organisation, de ses missions, de sa relation avec les armées ou de son personnel, peut parfois être amené à s'éloigner du droit. L'objectif est donc d'identifier ces raisons environnementales ou structurelles afin de trouver des voies d'amélioration ou de consolidation.

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Méthodologie

Cette étude analyse la connaissance et la diffusion du DIH au sein du SSA ainsi que les menaces et les opportunités présentes dans l'environnement afin d'émettre des propositions pour favoriser la bonne application de ce droit par les personnels du Service.

Cette recherche est principalement objective dans son approche en ce que le SSA évolue dans un environnement social constitué de faits sociaux, comme le développement de la guerre non conventionnelle, qui ont une existence indépendante des personnels du service et qui s'impose à eux79. Néanmoins, cette approche est aussi subjective car l'appréhension des faits sociaux par les individus et leurs réactions face aux contraintes sont aussi importantes80. Ainsi, les phénomènes empiriques observables et les interprétations individuelles des problématiques constituent des données complémentaires dans cette recherche.

De plus, la méthode est inductive. Les propositions avancées reflètent les résultats d'une recherche empirique ; la recherche est principalement exploratoire81.

Cette étude utilise une méthode qualitative, celle des entretiens, afin d'appréhender la problématique à travers les yeux des acteurs militaires et civils du DIH qui travaillent avec le SSA et des personnels du SSA qui doivent appliquer et faire appliquer le DIH en opération. Les entretiens permettent notamment de rendre compte des changements dans la manière d'appréhender le DIH au sein du nouveau contexte opérationnel et de prendre en compte certaines problématiques qui n'auraient pu être abordées par écrit en raison de leur caractère de confidentialité défense ou de leur caractère personnel. Cette méthode présente aussi l'avantage d'être économe et rapide82. Les entretiens ont duré entre 01h00 et 03h00 en fonction des emplois du temps des personnes interrogées. Chaque rendez vous était pris avec une personne mais certains collègues intéressés et concernés par la problématique ont parfois pu se joindre à l'entretien. Il y a eu au plus deux personnes

79 Feigl H., Positivism philosophy (Encyclopaedia Britannica 2009)

80 Bryman A., Social research methods (3rd ed., Oxford university press, Oxford, 2008) p15, 16-19,20.

81 Op. cit (81) p9, 13.

82 Op. cit (81) p385, 389.

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interrogées en même temps. La présence de ces tierces personnes a eu un avantage positif sur le résultat de certains entretiens car elle a alimenté le débat. Ces entretiens étaient semi-directifs. Les thèmes à aborder, les questions à soumettre et les relances étaient préparés à l'avance. Une problématique de départ était posée et les thèmes ou questions n'étaient proposés que si la ou les personnes ne les abordaient pas. Chaque entretien a fait l'objet d'une présentation du cadre de la recherche et du sujet ainsi que d'une synthèse à la fin de celui-ci. La méthode adoptée pour la retranscription de l'entretien fut celle de la prise de note afin de préserver au mieux le respect de la confidentialité. Ces entretiens concernent : le Centre Interarmées de Concepts de Doctrine et d'expérimentations (CICDE) ; le Centre de Planification et de Conduite des Opérations (CPCO) ; le Comité International de la Croix-Rouge (CICR) ; la Croix-Rouge Française (CRF) ; le bureau cohérence capacitaire opérationnelle de la direction centrale du service de santé des armées ; l'Ecole du Val de Grâce (EVDG) ; l'Etat-Major Opérationnel Santé (EMO-S) ; le bureau droit des conflits armés (DCA) du Secrétariat Général pour l'Administration (SGA) ; certains anciens directeurs santé opérationnels, une infirmière formatrice au sauvetage au combat de deuxième niveau (S).

Ces entretiens ont été complétés par une participation à la 13ème compétition internationale de droit international humanitaire organisée par l'Institut international de droit international humanitaire, une participation au 4ème congrès d'éthique médicale militaire organisé par le Comité international de médecine militaire et une participation à la commémoration du 150ème anniversaire de la première convention de Genève organisé par le Consulat général de Suisse à Strasbourg. Ces rencontres ont permis de souligner les problématiques actuelles et d'anticiper les défis à venir pour les personnels du SSA en matière de DIH et d'éthique. Les rencontres internationales et interarmées ont aussi permis d'entrevoir les différents regards portés sur la problématique de l'application du DIH par les services de santé des armées des pays alliés.

Cette phase d'analyse qualitative a permis de mettre en oeuvre de manière efficiente une analyse SWOT de l'anglais Strenghts (forces), Weaknesses (faiblesses), Opportunities (opportunités), Threats (menaces). Conformément à de récentes doctrines sur la modernisation des études stratégiques et afin de mieux répondre à la

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nature de cette recherche, cette analyse a été rebaptisée AVOT. L'analyse AVOT, de l'anglais Assets (atouts), Vulnerabilities (vulnérabilités), Opportunities (opportunités), Threats (menaces), est un outil de stratégie d'entreprise permettant de réaliser un diagnostic stratégique. Il s'agit ici de conduire une analyse AVOT qui consiste à effectuer deux premiers diagnostics : un diagnostic interne qui identifie les atouts et les vulnérabilités du domaine d'activité stratégique et un diagnostic externe qui identifie les opportunités et les menaces dans l'environnement. L'analyse AVOT repose sur une identification des facteurs clés déterminants pour l'application du DIH au sein du SSA. Cette identification a été réalisée à l'aide des textes juridiques, de la doctrine académique et militaire et des entretiens. Ces facteurs clés ont ensuite été analysés et classés en quatre catégories : les atouts du SSA relatifs à l'intégration et à l'application du DIH, les vulnérabilités du SSA quant à l'intégration et à l'application du DIH, les opportunités qui permettrait de favoriser l'intégration et l'application du DIH et les menaces qui pourrait nuire à la bonne application du DIH Les données des quatre catégories ont ensuite été confrontées entre elles de manière analytique. L'analyse interne a permis de mieux comprendre les atouts et les vulnérabilités du SSA en matière de diffusion et de connaissance du DIH. L'analyse externe a permis de mieux appréhender l'influence de l'environnement sur cette organisation en dégageant les risques issus du croisement des vulnérabilités et des menaces et en identifiant les moyens d'améliorer fortement l'appréhension du DIH par le croisement des atouts et des opportunités. Cette méthode permet d'aller dans la profondeur et d'analyser avec précision l'organisation du DIH dans le SSA pour l'optimiser et proposer des recommandations structurelles et de management.

De plus, ce point de situation permet d'ouvrir le débat sur les effets que peuvent engendrer soit l'amélioration de l'organisation et du management du DIH au sein du SSA, soit à contrario l'inertie d'une organisation imparfaite. Ainsi, des enjeux spécifiques quant à l'intégration et à l'application du DIH dans le SSA peuvent être mis en relief. A partir des enjeux et des possibilités qui s'offrent au SSA, des recommandations ont été faites pour améliorer l'organisation du DIH au sein du service. Un plan d'actions est ensuite envisagé sous forme de fiches pratiques.

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Les atouts du SSA relatifs à la

capacité d'intégration et d'application

du DIH

Le Service de Santé des Armées dispose d'atouts majeurs qui peuvent lui permettre de sécuriser l'intégration et l'application du DIH par ses personnels dans des situations complexes. En effet, le SSA est imprégné des valeurs et principes du DIH. De plus, il possède des structures et des compétences médicales, éthiques et juridiques qui peuvent lui permettre de développer sa compréhension du DIH.

? Valeurs historiques du SSA

Le SSA est historiquement et culturellement très attaché aux valeurs défendues dans le DIH. Par la création d'offices de médecins et de chirurgiens des armées du Roy, l'Edit de 1708 institue un véritable soutien médical permanent au profit des malades et des blessés de guerre. La protection des malades et des blessés en toutes circonstances, sans discrimination et l'acceptation du sacrifice altruiste sont les véritables marques originelles de la médecine militaire83. Elles trouvent leurs racines dans les conceptions religieuses et militaires des ordres hospitaliers de chevalerie mais se trouvaient déjà chez les médecins publics des cités grecques. La médecine possède ceci en commun avec le droit, qu'elle cherche à limiter les souffrances dans la guerre. Les médecins militaires ont participé au développement du jus in bello. Lors de la première réunion du comité international de secours aux militaires blessés en 1863, le médecin inspecteur Lucien Baudens fut le premier à proposer l'adoption d'un signe distinctif uniforme pour les services de santé des armées afin d'éviter que ceux-ci soient pris sous le feu des belligérants en tentant de venir en aide aux blessés84.

83 Articles 12 (1), 15 CGI ; Article 10 (2) PI ; droit coutumier règle 110; Article 12 (2) CGI ; Article 10 PI ; Articles 7 et 9 (2) PII ; droit coutumier règle 110

84 Médecin Général Eric Darré, Le service de santé sous la protection de l'emblème, Revue médecine et armées, 2003, 31,6, p574.

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? Ethique médicale intrinsèque au SSA

Dès IIIe Siècle avant Jésus-Christ, Hippocrate, qui initie de nombreux disciples à son art de la médecine, exige de ceux-ci qu'ils prêtent serment. Le serment d'Hippocrate définit les rapports entre le médecin, son patient et la collectivité, ainsi que les principes qui doivent régir l'exercice de la profession. C'est aujourd'hui le Serment que prêtent les étudiants en médecine lors de la soutenance de leur thèse. Il instaure la confraternité entre médecins, le respect des maitres, l'absence de discrimination dans la prise en charge des malades, la défense de la vie avant tout et le respect du secret médical. La déontologie médicale, ensemble des règles et devoirs d'une profession établis selon l'éthique, fut donc en avance sur tous les autres domaines85. Ces valeurs humanitaires sont aujourd'hui traduites dans le Code Internationale d'Ethique médicale adopté par l'Assemblée Médicale Mondiale en 1949, le Code de déontologie médical français, le Military Commitee 326/3 de l'OTAN et le Code de déontologie médicale militaire française86. Ces textes prévoient que les personnels de santé doivent adopter une conduite définie dans le DIH.

Le code de déontologie des médecins militaires français souligne que le médecin militaire doit adopter une conduite conforme aux principes généraux régissant l'exercice de la profession ainsi qu'aux dispositions du DIH87. La profession médicale est particulièrement sensible aux questions éthiques qui ont largement inspirées les dispositions du droit de Genève concernant le soutien sanitaire.88 La dualité du positionnement médical / militaire des personnels du SSA envers le corps médical et l'armée française force les individus à développer une éthique particulière : « le personnel sanitaire doit participer, dans son domaine, à l'action de ses camarades au combat. Il soutient celle-ci grâce aux moyens techniques dont il dispose et dans

85 Serment d'Hippocrate, trad. Jouanna J., Hippocrate, Paris, Librairie Arthème Fayard, 1992.

86 Code international d'éthique militaire adopté par la 3e Assemblée Médicale Mondiale en 1949 à Londres; Code de déontologie médicale, modifié le 8 aout 2004; Décret 81-60 du 16 Janvier 1981 fixant les règles de déontologie applicables aux médecins et aux pharmaciens chimistes des armées, http://lexdih.wordpress.com

87 Décret n°81-60 du 16 janvier 1981 fixant les règles de déontologie applicables aux médecins et aux pharmaciens chimistes des armées.

88 Op. cit. (86).

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un esprit de solidarité et d'abnégation » 89. Un conseil de déontologie médicale des armées est le garant de la permanence de l'éthique médicale au sein des armées90.

? Potentiel d'intégration au niveau stratégique du DIH

Les problématiques de DIH sont prises en compte dans le projet de service 202091. Des spécialistes du DIH disposent des compétences pour assurer un suivi de l'évolution de ces problématiques juridiques au sein de la Direction Centrale du Service de Santé des Armées. De plus, les retours d'expériences sont examinés par l'Etat-major opérationnel santé et le Centre de formation opérationnelle santé afin de souligner les difficultés et de les prendre en compte au niveau stratégique92. Le SSA, service régalien, a en effet l'obligation en toutes circonstances de respecter et de faire respecter le DIH93. Pour cela, la prise en compte du DIH au niveau stratégique permet d'intégrer ses enjeux à un haut niveau de décision.

? Bureau juridique dédié au SSA

Le SSA possède un bureau dédié aux questions juridiques. Le Service dispose donc de juristes, dont certains spécialisés en droit des conflits armés, qui ont la compétence pour devenir des conseillers juridiques disponibles, lorsqu'il y a lieu, pour conseiller les commandements militaires, à l'échelon approprié, quant à l'application du DIH et quant à l'enseignement approprié à dispenser aux forces armées à ce sujet.94 Ils sont en mesure de diffuser le DIH et d'en incorporer l'étude dans les programmes d'instruction de telle manière que celui-ci soit connu par les personnels du SSA.95 Ces juristes pourraient aider le commandement militaire à empêcher que soient commises des « infractions graves » par les personnels du SSA, voire à les faire cesser et à prendre des mesures à l'encontre des personnes

89 Article 9, Instruction 52000/DEF/C/5 du 10 décembre 1979 portant application du règlement de discipline générale des armées, BOC, p4749 ; BOEM 130, 144, 150 et 300.

90 Instruction n° 254/DEF/DCSSA/EPG/ECX du 26 mai 1987 relative à la composition et au fonctionnement du conseil de déontologie médicale des armées lorsqu'il examine les problèmes d'éthique médicale au sein des armées, BOC, p2502, BOEM, 620-1, p33-34.

91 Projet de Service SSA 2020, N°515696/DEF/DCSSA/PS du 25 novembre 2013, p67.

92 Entretiens EMOS, EVDG.

93 Article 1 Conventions de Genève de 1949, Article 1 PI 1977, Article 1 PII 1977. art. 48 CGI; art.49 CGII; art.128 CGIII; art. 145 CGIV; art. 84 PI.

94 Articles 82 et 36 PI, 1977.

95 art.47 CGI; art.48 CGII; art.127 CGIII; art.144 CGIV; art.19 et 83 PI; art.19 PII.

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placées sous leur autorité qui se rendent coupables de tels crimes96. Les juristes sont aussi à même de rendre compte des violations du DIH effectuées par d'autres personnels97.

? Doctrine d'emploi ancrée dans le DIH

La doctrine d'emploi opérationnelle du SSA est ancrée dans le DIH. En effet, à coté de ses missions purement humanitaires, hors cadre du DIH, le SSA effectue dans le cadre de conflits armés des missions de soutien aux malades et aux blessés de guerre et des missions d'aide médicale à la population. Ces missions constituent le « coeur de métier » du SSA. Le développement du droit opérationnel, le DIH, est particulièrement important dans la politique de recentrage sur le « coeur de métier » prévu dans le projet de service SSA 202098. La Direction Centrale du Service de Santé des Armées est dans ce sens très vigilante sur ces problématiques pour la conception des missions du SSA99. Cette prise en compte des difficultés liées au DIH dans la doctrine d'emploi participe à l'obligation pour ce service régalien d'appliquer le DIH et d'empêcher que soient commises des infractions graves au DIH par les personnels du SSA en opération100.

? Ecoles de formation initiale et continue propres au SSA

Le SSA possède ses propres écoles de formation initiale et continue. L'Ecole de Santé des Armées, qui forme les médecins et pharmaciens des armées, et l'Ecole du Personnel Paramédical des Armées sont responsables de la formation initiale. L'Ecole du Val de Grâce coordonne toutes les fonctions et en plus est responsable de la formation d'application et des formations continues de tous les personnels y compris les personnels administratifs du service. La centralisation de la formation peut donc permettre de mettre en oeuvre des modules de DIH à destination de tous

96 art.49 CGI; art.50 CGII; art.129 CGIII; art.146 CGIV; 83 (2) PI; art.19 PII.

97 La CIJ a donné en 2004 une interprétation large et progressiste de cette obligation : CIJ, Conséquences juridiques de l'édification du mur dans les territoires palestiniens, avis consultatif du 9 juillet 2004, Recueil 2004, p200 ; Le sommet mondial du 60e anniversaire de la charte de San Francisco l'a consacrée selon une terminologie nouvelle : « la responsabilité de protéger » : Résolution 60/1 du 16 septembre 2005.

98 Projet de Service SSA, 2020, N°515696/DEF/DCSSA/PS du 25 novembre 2013.

99 Entretiens CICDE, DCSSA/CO.

100 art.49 CGI; art.50 CGII; art.129 CGIII; art.146 CGIV; 83 (2) PI; art.19 PII.

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les personnels de santé conformément au droit de Genève101. D'autre part, le SSA est maitre des étapes de diffusion et de ses programmes de formation. Il existe d'ailleurs déjà des supports pédagogiques concernant l'application du DIH par les personnels du SSA.

? Port de l'emblème

Les personnels du SSA sont des personnels non combattants permanents respectés et protégés en toutes circonstances non pas pour eux-mêmes mais pour la mission de soutien des malades et des blessés qu'ils accomplissent102. Les personnels des armées affectés à une mission de soutien médical disposent du statut de personnel non combattant temporaire et sont protégés au même titre que les personnels du SSA pour la durée de cette mission103. Par principe, ces personnels non combattants permanents et temporaires portent un signe distinctif, l'emblème de la Croix-Rouge, qui assure leur protection104. L'autorité militaire doit faire en sorte d'adopter et de mettre en oeuvre des méthodes et procédures permettant d'identifier les personnels sanitaires, les unités et les moyens de transport sanitaires. Il s'agit d'une obligation de moyen105. Le personnel sanitaire permanent porte par principe « fixé au bras gauche un brassard résistant à l'humidité et muni du signe distinctif, délivré et timbré par l'autorité militaire » et il est porteur « d'une carte d'identité munie du signe distinctif » 106. Le personnel temporaire « portera seulement pendant qu'il remplit des fonctions sanitaires, un brassard blanc portant en son milieu un signe distinctif, mais de dimension réduite, délivré et timbré par l'autorité militaire. Les pièces d'identités militaires dont le personnel sera porteur spécifieront l'instruction sanitaire reçue, le caractère temporaire de ses fonctions et le droit qu'il a au port du brassard 107». Les autorités peuvent, sous réserve des dispositions pertinentes du DIH, « régler en tous temps l'utilisation, le déploiement et l'éclairage des signes et signaux distinctifs » 108.

101 art.47 CGI; art.48 CGII; art.127 CGIII; art.144 CGIV; 83 PI; art.19 PII.

102 art.24 CGI.

103 art 25 CGI.

104 art 35, 38 CGI.

105 art. 38, 39CGI, art.18, 80 PI.

106 art.40 CGI.

107 art.41 CGI.

108 Annexe 1, article 1 (3) PI.

Les personnels du SSA sont traditionnellement attachés à l'emblème de la Croix-Rouge symbole fort de leurs valeurs et spécificités militaires109.

? Dimension internationale du SSA

Le SSA est un pôle d'excellence reconnu en matière de soutien médical des forces armées. Il est aussi bien implanté au sein de l'OTAN et préside le comité des chefs des services de santé militaires au sein de l'OTAN (COMEDS) depuis 2012 et cela pour 3 ans. D'autre part, il possède un partenariat avec le SSA allemand et un projet de partenariat avec le SSA anglais. Les SSA occidentaux ont tous ratifiés les conventions de Genève et pour la plupart ils démontrent une volonté de les appliquer strictement car ils sont traditionnellement attachés aux valeurs portées par le DIH. Il y a donc une certaine solidarité dans la volonté d'appliquer le DIH. D'autre part, les relations du SSA français avec d'autres acteurs du DIH sur la scène internationale permettent un échange d'informations favorable au développement et à la diffusion du DIH dans le SSA110. Le SSA coopère notamment avec le Comité International de la Croix-Rouge, l'Institut International de Droit Humanitaire de San Remo et le Comité International de Médecine Militaire.

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109 Entretien EMOS.

110 art.47 CGI; art.48 CGII; art.127 CGIII; art.144 CGIV; 83 PI; art.19 PII.

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Les vulnérabilités du SSA relatives à la

capacité d'intégration et d'application du

DIH

Certaines insuffisances semblent en revanche ralentir l'intégration du DIH par les personnels du SSA et compliquer son application.

? Diversité des statuts du personnel du SSA

En 2013, le SSA comptait 10 994 militaires et 5049 civils dont 52% seulement étaient gérés directement par le SSA. Les militaires non gérés par le SSA étaient gérés par l'Armée de Terre (13%), l'Armée de l'Air, la Marine Nationale, la Gendarmerie ou le Service du Commissariat des Armées. Au sein du personnel militaire, il y avait 25% d'officiers, 49% de sous-officiers, 14% de militaires du rang et 2% de volontaires. Il y a 60% de médecins chez les officiers et 5% de pharmaciens, des chirurgiens dentistes, des vétérinaires, des infirmiers et des personnels administratifs111. Il est à noter que le personnel administratif devrait basculer en gestion au sein du commissariat des armées à l'horizon 2016.

Le personnel du SSA dispose du statut de non combattant permanent. Mais le personnel des armées employé par le SSA dispose d'un statut différent, celui de non combattant temporaire. Il ne bénéficie donc du statut protecteur que pendant la mission de soutien sanitaire. Les missions duales sont interdites112, le secouriste de combat de niveau 2 perd donc sa protection temporaire s'il effectue en plus de sa mission de soutien sanitaire celle de transmetteur par exemple. D'autre part, un combattant qui effectue des gestes de premier secours auprès d'un de ses camarades ne bénéficie d'aucune protection et peut être une cible113. Les personnels des armées ayant vocation à être employés dans le SSA doivent donc aussi bien connaitre les règles de DIH que les personnels du SSA malgré des cursus différents au sein de formations de combattants. D'autre part, les personnels sanitaires possèdent des métiers différents et peuvent rencontrer des problématiques de DIH diverses : médecins, pharmaciens, vétérinaires,

111 Présentation Générale du SSA, LCL Girardot, 2013.

112 article 11 PI.

113 articles 24 et 25 CGI.

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administrateurs, infirmiers, auxiliaires sanitaires. Au sein même de ces métiers, des spécialités différentes peuvent faire varier leur perception du DIH.

? Pas de formation continue en DIH au sein du SSA

L'intégration et l'application du DIH par les personnels du SSA souffre d'un manque de rappel régulier des règles, d'exercices pratiques, voire de supports à usage quotidien qui rendraient l'application du DIH automatique dans les situations normales et plus aisée et moins traumatisante dans les situations complexes. La mise en condition du personnel avant projection ne prévoit de rappels des règles de DIH que pour certains théâtres d'opération et pour certains personnels114. Or l'Etat a l'obligation d'après l'article 83 PI de diffuser le texte des traités et notamment d'en incorporer l'étude dans les programmes d'instruction militaire de telle manière que ces instruments soient connus des forces armées115. En effet, l'Etat et le gouvernement sont responsables de la ratification et de la conduite de l'application des traités.116 Le ministère de la défense, service régalien de l'Etat, doit donc s'assurer de la bonne application des traités dans son ministère. Par délégation, les armées et le SSA sont responsables à leur niveau de l'application des traités. Ainsi le SSA est responsable de la diffusion et de la formation au DIH en son sein. L'article 83 (2) stipule que « les autorités militaires ou civiles qui, en période de conflit armé, assumeraient des responsabilités dans l'application [du DIH] devront avoir une pleine connaissance du texte de ces instruments ». Les personnels du SSA assument de lourdes responsabilités en termes de DIH au vu de leur spécialité médicale qui est coeur de ces textes.

? Absence de soutien juridique opérationnel dédié

Les personnels du SSA font face à des problématiques très particulières et régulières en matière de DIH appliqué au domaine de la santé. Cependant, ils ne disposent pas de soutien juridique opérationnel dédié. Les soutiens juridiques opérationnels procurés par les armées ou par la direction centrale du SSA peuvent apparaitre peu adaptés à une réponse rapide lors de situations complexes. Or l'article 82 du premier protocole additionnel prévoit la présence de conseillers juridiques disponibles, lorsqu'il y a lieu, pour conseiller les commandements

114 Entretien CeFOS

115 art.47 CGI; art.48 CGII; art.127 CGIII; art.144 CGIV; 83 PI; art.19 PII.

116 Articles 52 et 53 de la Constitution de la Ve République 1958.

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militaires, à l'échelon approprié, quant à l'application du DIH. Pour cela, l'article 6 du même protocole dispose que les Etats s'efforceront de former des personnels qualifiés en vue de faciliter l'application du DIH. 117

? Pas de compagnonnage en DIH

La peur est appréhendée différemment chez les individus. Pour les « bleus » la principale angoisse est d'être à la hauteur des normes de courage de la collectivité à laquelle ils appartiennent. Le choc vient alors du décalage entre l'anticipation de l'évènement et la violence de la réalité, ce que Céline nomme le « dépucelage de l'horreur ». Il se produit ensuite une forme d'accoutumance et d'adaptation118. L'accoutumance introduit cependant un phénomène d'usure. Les nouveaux combats font ressurgir des souvenirs refoulés et accroitre la tension jusqu'à la rupture psychologique. Le compagnonnage peut donc aider à la bonne application du DIH. Le personnel qui possède plus d'expérience opérationnelle fait partager son savoir être au personnel plus jeune. D'autre part, le fait d'encadrer un jeune motivé et ayant une bonne connaissance de la doctrine peut permettre au cadre de mieux appréhender la violence environnante119. Néanmoins, la réduction des effectifs ne permet pas de mettre en place un tel compagnonnage sur toutes les opérations120.

? Peu de relations sur le sujet avec les armées

La communication du SSA auprès des armées quant à son statut particulier de non combattant est faible. Le Secrétariat Général à l'Administration délivre des cours de droit des conflits armés dans toutes les écoles d'officiers des armées mais la part de la formation concernant le statut de non combattant des personnels sanitaires est restreinte. En outre, le développement du sauvetage au combat de premier et deuxième niveau brouille la distinction entre combattants et non combattants dans les armées121.

117 Article 82 PI, 1977.

118 Paul Lintier artilleur en 1914 témoigne : « Chaque jour nous entraine au courage. A connaitre les memes dangers, la bete humaine se cabre moins. Les nerfs ne trépident plus. L'effort conscient et continu pouatteindre la maitrise de soi agit à la longue. C'est toute la bravoure militaire. On ne nait pas brave : on le devient. » Litier P., Ma pièce, Paris, Plon, 1916, p146.

119 Entretien DCSSA/CCO

120 Entretien DCSSA/CCO

121 Entretien SGA.

? Manque de RETEX sur le DIH

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Le retour d'expérience est important car chaque conflit est unique. Nous pouvons citer ici le général Hans Von Seeckt, qui a reconstruit l'armée allemande après le traité de Versailles : «l'erreur de tous ceux qui organisent des armées est de prendre l'état momentané pour un état permanent. Ils oublient que les Nations se transforment sans cesse et que pour rester vivante une armée doit se modeler sur la courbe des événements »122. Les menaces pour le DIH évoluent aussi selon les théâtres d'opération. Le retour d'expérience permet alors d'adapter la formation et l'entrainement au contexte opérationnel, comme ce fut le cas pour l'Afghanistan. Il semble que le retour d'expérience dans le SSA ne rende pas compte de la réalité opérationnelle quant à l'application du DIH. Les comptes rendus des armées semblent plus complets quant aux difficultés liées à l'application du droit en situation opérationnelle123.

122 Cité par le Général de corps d'armées Didier Castres lors de son introduction sur le cadre politico-militaire de l'engagement des forces terrestres, Engagements terrestres à l'horizon 2020. Quelles guerres, quelles capacités ?, Doctrine Tactique, numéro spéciale, juillet 2012.

123 Entretien SGA

40

Les opportunités relatives à l'applicabilité

du DIH par le SSA

Des opportunités se présentent pour favoriser l'applicabilité du DIH par le SSA. Celui-ci pourrait tirer des avantages de la mise en place d'une stratégie relative au DIH.

? Portée universelle du DIH

Le DIH est porteur de valeurs reconnues comme suffisamment universelles et fondamentales pour être applicables dans un contexte de conflit armé. En ce sens, l'appréhension du DIH est facilitée par son caractère universel et son caractère fondamental tend à susciter l'intérêt de tous les acteurs des conflits armés, notamment les personnels du SSA. De plus, les coalitions partagent une volonté d'appliquer le DIH : 186 Etats ont ratifié les Conventions de Genève. Ainsi, les coalitions peuvent aider à renforcer la diffusion du DIH et à faciliter son application.

? Valeurs françaises

La France est historiquement et culturellement très attachée à la défense des valeurs fondamentales universelles. L'opinion publique française est particulièrement sensible à l'application des droits fondamentaux lors des conflits armés, notamment par le SSA. En effet, les victimes des conflits armés civiles et militaires font l'objet d'une forte médiatisation. Dans le cadre d'une approche globale, l'application du DIH présente donc un intérêt politique et opérationnel, puisqu'il participe à légitimer l'action de l'armée aux yeux de la population. Ce phénomène facilite l'adhésion de tous les militaires quant à l'appropriation des règles de DIH. D'autre part, la reconnaissance et la mise en avant des valeurs humanitaires présente un intérêt particulier pour consolider le lien SSA/Nation. Le renforcement des processus de DIH dans le SSA peut servir à faire valoir ses valeurs auprès de la Nation.

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? Importance accordée par les organisations internationales

Le code d'éthique médicale internationale crée en 1949 et adopté par l'assemblée générale des Nations Unies en 1980 ainsi que le Military Commitee 326/3 de l'Organisation du Traité de l'Atlantique Nord stipule que les activités médicales doivent être conformes au DIH124. L'ONU trouve sa légitimité dans sa capacité à limiter l'usage de la force et à protéger les droits universels. Plusieurs résolutions de l'ONU ont récemment rappelé aux Etats membres l'importance du respect des règles de DIH relatives au soutien sanitaire125. D'autre part, lors des récents conflits l'OTAN a démontré un intérêt particulier quant à l'application du DIH par les unités sanitaires, notamment sur les questions relatives au port de l'emblème126. Enfin, au niveau régional, l'Union Européenne entend étendre la diffusion, la promotion et l'adaptation du DIH aux nouvelles formes de conflits. La responsabilité pénale internationale se voit aussi consolidée au sein de l'Union Européenne127. La Convention Européenne des droits de l'homme est applicable aux actes ou omissions imputés à toute partie contractante participant à un conflit armé, quel qu'il soit. Cette responsabilité porte sur les actions entreprises sur le territoire national et par les forces armées à l'extérieur du territoire national128.

? Partenariats ou collaborations du SSA

Le partenariat du SSA avec la Croix-Rouge française et ses collaborations avec l'Institut International de Droit Humanitaire et le Comité International de Médecine Militaire lui permettent d'échanger des informations avec d'autres armées et des organisations civiles. Grâce à ces échanges, le SSA peut confronter ses points de vue sur l'application du DIH avec

124 World medical association, International code of medical ethics, World medical association bulletin, 1949, 1(3) : 109-111

125 Parmi de nombreuses résolutions, voir par exemple pour le Conseil de sécurité : S/RES/2042 (2012) sur la Syrie. S/RES/1970 (2011) sur la Libye. S/RES/1872 (2009) sur la Somalie ; S/RES/1870 (2009) sur le Soudan. S/RES/1383 (2001) sur l'Afghanistan. ; Pour l'Assemblée générale : A/RES/65/132 (2010) sur la Sureté et sécurité du personnel humanitaire.

126 STANAG 2931 autorise le camouflage de l'emblème quand le fait de ne pas camoufler l'emblème pourrait mettre en péril les opérations tactiques.

127 Lignes directrices de l'Union européenne mise à jour concernant la promotion du droit humanitaire international, 2009/C, 303/06.

128 CEDH, Chypre c/ Turquie, requêtes n° 6780/74 et 6950/75, 2D et R125, p136-137.

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d'autres et mener des travaux portant sur l'étude et l'anticipation des problématiques de DIH129. De plus, la Croix-Rouge Française qui participe succinctement à la diffusion et la formation du DIH dans le SSA depuis 2013, est volontaire pour consolider et étendre son partenariat avec les écoles du SSA130. Les institutions internationales spécialisées quant à elles fournissent une formation continue de qualité pour les personnels131.

? Renforcement du lien avec le commissariat aux armées

L'intégration des officiers du corps technique et administratif du SSA dans le corps du commissariat aux armées à partir de septembre 2014 présente des perspectives intéressantes pour le SSA pour former des conseillers juridiques spécialisés en DIH. En effet, le commissariat des armées forme les conseillers juridiques des armées. Cette formation s'effectue en trois « cercles », le cercle 1 correspond à la formation initiale et le cercle 3 au niveau de spécialiste. Une spécialisation est possible au sein du droit des conflits armés au vu de l'armée ou du service d'affectation. Ainsi, l'Armée de l'Air et la Marine Nationale disposent de conseillers juridiques respectivement spécialisés en droit aérien et maritime. On pourrait développer des conseillers juridiques spécialisés en DIH au sein du SSA. Pour le moment il n'existe pas de stage de spécialisation complet en DIH mais le Comité International de la Croix-Rouge participe à la formation au cercle 2. Les conseillers juridiques des armées sont responsables du conseil juridique au commandement, de la définition des règles opérationnelles d'engagement, des réglementations administratives, du règlement des dommages, du contentieux et de la protection juridique. Ces conseillers sont répartis au sein des armées dans toutes les structures stratégiques et décisionnelles et chaque fois qu'il y a lieu dans les échelons opérationnels132. Ils sont aussi présents au sein de l'Union Européenne et de l'OTAN133.

129 Le 4ème congrès d'éthique médical militaire a notamment abordé en 2014 l'impact juridique et éthique de l'estimation de l'âge en opération.

130 Entretien CRF. art.47 CGI; art.48 CGII; art.127 CGIII; art.144 CGIV; 83 PI; art.19 PII.

131 Art. 6, 82 PI.

132 Au Mali il y avait ainsi quatre conseillers juridiques : un à l'échelon interarmées, un au groupement tactique interarmes, un au centre opérationnel interarmes de l'armée de l'air et un dédié au forces spéciales. Entretien SGA.

133 Entretien SGA

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Les menaces relatives à l'application du

DIH par le SSA

L'environnement opérationnel du SSA évolue et celui-ci doit faire face à de nouvelles menaces dans l'application du DIH.

? Evolution lente du DIH

Les textes de DIH relatifs au soutien sanitaire évoluent lentement. Ceci peut être expliqué par le caractère fondamental des normes qu'ils traduisent et la volonté de garder un maximum d'Etats parties aux traités. Cependant, la réalité opérationnelle évolue rapidement et certaines zones grises se développent dans l'application du DIH.

? Complexité des situations opérationnelles

La guerre asymétrique présente des défis pour le DIH. Cinq défis majeurs peuvent être soulignés : les nouveaux adversaires, le nouveau lieu de la guerre, les nouvelles technologies, les nouvelles opérations militaires, la résurgence de la violence.

Le DIH considère deux types d'acteurs dans les conflits armés qui bénéficient de deux statuts juridiques protecteurs distincts : les combattants et les non combattants. Les combattants comprennent les membres des forces armées autres que les personnels sanitaires et religieux et tous les groupes armés qui disposent d'un régime de discipline interne dont l'objet est le respect des lois et coutumes de la guerre134. Ils comprennent aussi la population d'un territoire non occupé qui porte ouvertement les armes pour combattre l'invasion et respecte les lois de la guerre135. Les combattants peuvent participer aux hostilités et bénéficient du statut de prisonnier de guerre s'ils sont capturés136. S'ils sont blessés ou s'ils se rendent, ils bénéficient du statut protecteur des personnels combattants hors de combat137. Les personnes ne participant pas aux hostilités sont particulièrement protégées à travers le statut de non combattants. Il s'agit de la population civile ainsi que des personnels sanitaires et religieux. En cas de doute une personne est toujours considérée comme civile. Par principe, ces personnels

134 Article 43 PI.

135 Article 13 CGI.

136 Articles 43 et 44 PI.

137 Article 12 CGI, articles 10 et 85 PI, article 8 du statut de la CPI.

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ne peuvent pas être faits prisonniers. Les personnels sanitaires ou religieux peuvent cependant être retenus avec les prisonniers de guerre si un besoin médical ou spirituel l'exige138. Cependant, les acteurs se multiplient dans les conflits armés actuels.

Des fonctions dévolues traditionnellement aux forces de sécurité ou aux armées sont de plus en plus souvent déléguées à des sociétés militaires ou de sécurité privées. Ces sociétés n'ont ni obligation ni statut en DIH.

La distinction entre combattants et non combattants devient très difficile en pratique. Certains adversaires ne participent que sporadiquement aux hostilités. Ce sont des acteurs fugaces, éphémères, peu organisés et difficilement identifiables que les armées affrontent.

La population est devenue un moyen et un enjeu de la guerre. Les combats au sein de la population civile se multiplient produisant de nombreuses victimes de guerre parmi la population civile. 90% des victimes de guerres sont des victimes civiles dans les années 1990139.

D'autre part, le lieu de la guerre a changé. La guerre se déroule aujourd'hui là où l'environnement joue un rôle égalisateur face à la surpuissance technologique occidentale : au milieu de la population, au sol, dans des espaces fermés. La population constitue un acteur et un enjeu majeur. Les combats urbains se multiplient car ils permettent de mieux frapper l'opinion publique et d'acquérir l'adhésion nécessaire à la victoire. Le contrôle du milieu suppose une approche globale et la synchronisation des actions de combat et des actions autres que de combat140. Dans ce contexte la protection des non combattants et le principe de distinction apparaissent compliqués dans leur mise en oeuvre141.

? Evolutions techniques et technologiques

De nouvelles techniques médicales projetables en opération et le développement de la télémédecine pourraient poser de nouvelles questions éthiques et juridiques à l'avenir142. En outre, des nouvelles technologies très diverses ont fait leur apparition sur le champ de bataille moderne. Le cyberespace a donné naissance à un nouveau domaine de la guerre. Les drones, sont de plus en plus utilisés dans les conflits armés. Les systèmes automatisés sont également

138 Article 28 PI.

139 Levy B., Sidel V., W., War and public health, American public health association, 2000.

140 Op cit. (18) p58 à 68.

141 Titre IV, section 1, PI - Cahier du RETEX, Les fantômes furieux de Falloujah, opération AL-FAJR/PHANTOM FURY (juillet-novembre 2004), Centre de doctrine et d'emploi des forces, division recherche et retour d'expérience, Armée de Terre, Ministère de la Défense.

142 Le 4ème congrès d'éthique médical militaire a notamment abordé en 2014 l'impacte juridique et éthique de l'estimation de l'âge en opération.

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de plus en plus répandus, et les robots de combat pourraient être utilisés dans un proche avenir sur le champ de bataille : les drônes en préfigurent l'emploi. Les conséquences humanitaires prévisibles de l'utilisation de ces armes doivent être prises en compte afin de veiller à ce que leur emploi soit conforme au DIH143.

? Etendue de la typologie des missions du SSA

Les missions du SSA se diversifient avec la montée en puissance des Forces spéciales, les missions de police effectuées par la gendarmerie nationale, et l'élargissement des missions des forces conventionnelles dans le cadre de l'approche globale.

L'approche globale est de nature à mobiliser un spectre large de missions militaires qui peuvent notamment être aux confins du militaire, du diplomatique et de l'humanitaire. La phase décisive des opérations n'est plus la phase initiale de coercition mais la longue phase de stabilisation qui s'en suit144. Des opérations civilo-militaires menées par les armées peuvent servir des objectifs humanitaires et militaires. Le SSA est en charge d'une action civilo-militaire majeure : la mission d'aide médicale à la population145. La prise en charge médicale de la population civile est une obligation pour la puissance occupante146. Mais le DIH prévoit qu'il est interdit de soumettre des blessés à des « actes qui ne seraient pas conformes aux normes médicales généralement reconnues que la partie responsable de l'acte appliquerait dans des circonstances analogues à ses propres ressortissants jouissant de leur liberté » 147. De plus, la population constitue aussi aujourd'hui un moyen de la guerre car elle est de nature à fournir du renseignement et une légitimité aux parties. En l'espèce, le rôle des personnels du SSA vis-à-vis de la population peut donc être partagé entre les intérêts médicaux et les intérêts militaires qui peuvent parfois différer. Or l'article 11PI prévoit qu'il est interdit de soumettre des personnes à « un acte médical qui ne serait pas motivé par leur état de santé ». L'article 16(3) PI prévoit quant à lui « qu' aucune personne exerçant une autorité médicale ne doit être contrainte de donner à quiconque appartenant soit à une partie adverse, soit à la même partie

143 CICR, Défis contemporains pour le DIH, 2013, www.icrc.org/fre/war-and-law/contemporary-challenges-for-ihl - Manuel de San Remo, Partie 3, section 1, paragraphe 42 « il est interdit d'employer des méthodes ou des moyens de guerre qui sont de nature à causer des maux superflus ou frappent indistinctement des objectifs militaires et des civils puisque ils ne sont pas , ou ne peuvent pas, être dirigés contre un objectif militaire déterminés ou leurs effets ne peuvent pas être limités conformément aux exigences du droit international ».

144 Entre 1990 et 2006 les pertes en vie humaines ont été 6 fois plus importantes pendant les opérations de stabilisation que pendant les opérations conventionnelles, et le rapport de couts à été de 5 à 1. Op. cit. (18),p 99. 145DIA 3.10.3(A), Actions Civilo-Militaires, n°174/DEF/ CICDE/ NP du 17 juillet 2012 - DIA 3.10.3.1, Aide Médicale aux Populations, n°097/DEF/CICDE/DR du 15 mai 2009.

146 Article 14 PI.

147 Article 11 PI.

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qu'elle, sauf les cas prévus par la loi de cette dernière, des renseignements concernant les blessés et les malades qu'elle soigne ou qu'elle a soigné si elle estime que de tels renseignement peuvent porter préjudice à ceux-ci ou à leur famille ». Le médecin peut donc choisir de divulguer certaines informations conformément à la déontologie et à la préservation du secret médical, mais il ne peut y être forcé sauf si la loi française le lui prescrit expressément, il s'agit ici principalement du droit à la légitime défense en cas d'attaque certaine et imminente148.

? Projections d'urgence et ouvertures de théâtres

Ce type de projection peut avoir une incidence sur l'application du DIH. Une projection rapide ou une ouverture de théâtre, peuvent conduire à la projection de personnels qui n'ont pas reçu de formation de rappel sur les règles de DIH et de formation sur les problématiques particulières du terrain.

? Non-respect du DIH par certains adversaires et alliés

Certains Etats alliés de la France violent parfois le DIH ce qui a des répercussions sur l'image de la coalition dans son ensemble. Les Etats-Unis notamment mènent une politique qui s'écarte souvent du droit international surtout depuis l'attaque sur leur territoire le 11 septembre 2001.

En effet, ceux-ci n'ont toujours pas ratifié le statut de la Cour Pénale Internationale (CPI) et ont conclu des accords bilatéraux avec de nombreux Etats prévoyants que ceux-ci ne saisiraient pas la CPI à l'encontre d'un citoyen américain149.

D'autre part, ils ont créé un statut juridique artificiel : le « statut de combattant illégal » qui prive les personnes capturées des droits relatifs au statut de combattant, prisonnier de guerre, et au statut de non combattant. Guantanamo est ainsi une prison de non droit où les détenus n'ont jamais été jugés150. De plus, les Etats Unis ont une définition particulière de l'usage de la torture puisqu'ils admettent l'utilisation de techniques de « torture douce » dans le cadre de la défense du territoire national151. Ces politiques équivoques ont conduit aux violations du DIH

148 Article 122-5 du Code Pénal. La réponse doit alors être nécessaire, immédiate et proportionnée.

149 CICC, Status of U.S. Bilateral Immunity Agreements by region, 14 décembre 2006, disponible sur www.iccnow.org.

150 United States of America Patriot Act du 26 octobre 2001.

151Ronald Reagan présente la convention contre la torture au Sénat en 1988. Simultanément, l'Administration propose dix-neuf réserves qui repousseront de six ans sa ratification par le Sénat. Depuis 2006, les Etats Unis n'ont pas ratifié le Protocole facultatif à la Convention contre la torture et autres traitements cruels, inhumains ou

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perpétrées par certains médecins et infirmiers militaires contre les « combattants illégaux » dans les prisons américaines. En effet, le Service de Santé des Armées américain participe aux interrogatoires des « combattants illégaux » afin de rendre ceux-ci plus effectifs dans la collecte d'informations contrevenant par là à l'article 3 commun aux trois conventions de Genève et à l'article 75(2) du premier protocole additionnel qui interdisent la torture, ainsi qu' à l'article 24 de la première convention de Genève relatif au personnel sanitaire152. Enfin, les missions d'aide médicale à la population des Etats-Unis se multiplient, alors qu'elles sont de plus en plus ciblées en France et que certains médecins militaires américains critiquent vivement le caractère purement militaire de certains de ces programmes qui ne présentent pas d'intérêt médical à long terme153.

En outre, certains adversaires peu organisés et hiérarchisés enfreignent aussi les règles du DIH. Au sein de la guerre non conventionnelle la légitimité des groupes armés auprès de la population locale repose fortement sur le respect des valeurs fondamentales. Les violations du DIH, notamment des règles relatives à la protection due au personnel de santé et aux blessés et malades154, peuvent cependant naitre de l'incompréhension de ces règles par certains groupes armés ou de leur volonté de frapper les esprits et d'instaurer la peur. Ainsi, il apparait parfois difficile de protéger les blessés et les malades et le personnel de santé conformément aux articles 10 et 15 du PI 155. En Centrafrique des membres de l'ex-Séléka ont attaqué un hôpital soutenu par Médecins sans frontières, en quête d'argent ils ont tué 22 personnes156. De même, les véhicules sanitaires identifiés par l'emblème ont pu constituer des cibles de haute valeur ajoutée en Afghanistan. Des véhicules sanitaires ont fait l'objet de tirs mais il est difficile d'affirmer avec certitude que le caractère sanitaire plus que le caractère militaire des véhicules a conduit ces tirs157. Deux véhicules de l'avant blindés ont sauté sur des engins explosifs improvisés en Afghanistan, un d'entre eux seulement portait l'emblème.158 Les unités du SSA

dégradants. Convention contre la torture du 10 décembre 1984 (153 Etats parties) - Protocole facultatif à la Convention contre la torture et autres traitements cruels, inhumains ou dégradants, 2006. La France a ratifié ce protocole.

152Rubenstein L., Pross C., Davidoff F., Iacopino V., Coercive US interrogation policies: a challenge to medical ethics, JAMA. 2005; 294(12):1544-1549. doi:10.1001/jama.294.12.1544.

153 Entretien au CPCO; Op. cit. (5).

154 Article 10 PI.

155 Article 10 et 15 PI.

156 Violation de l'article 62 PI « les organismes civiles de protection civile doivent être respectés et protégés », Lagneau L, Centrafrique : des membres de l'ex-Séléka on attaqué un hôpital de médecin sans frontière, zone militaire, 28 avril 2014, www.opex360.com

157 Violation des articles 21, 15 et 10 du PI, article 35CI Entretiens CPCO J4, EMOS, DCSSA, CICDE.

158 Entretien CCO/DCSSA

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ne semblent cependant pas être particulièrement ciblées dans les conflits postérieurs à celui d'Afghanistan159.

Face à toutes ces violations, le doute sur le bien fondé du DIH est exacerbé.

? Pression des armées

A coté de ses valeurs humanitaires, les personnels du SSA possèdent des valeurs militaires160. Le statut général des militaires prévoit que « les militaires doivent obéissance aux ordres de leurs supérieurs et sont responsables de l'exécution des missions qui leurs sont confiées. Toutefois, il ne peut leur être ordonné et ils ne peuvent accomplir des actes qui sont contraires aux lois, aux coutumes de la guerre et aux conventions internationales ou qui constituent des crimes ou des délits notamment contre la sureté et l'intégrité de l'Etat »161. Le règlement de discipline générale dans les armées confirme cette position et l'instruction portant application de ce règlement précise les devoirs et responsabilité du personnel sanitaire dans la guerre : « Le personnel sanitaire doit participer, dans son domaine, à l'action de ses camarades au combat. Il soutient celle-ci grâce aux moyens techniques dont il dispose et dans un esprit de solidarité et d'abnégation. Dans l'exécution des missions qui sont fixées, le personnel sanitaire doit recueillir et soigner les blessés et les malades sans aucune distinction fondée sur le sexe, la race, la nationalité, la religion ou tout autre critère analogue ; seules les raisons d'urgence médicale autorisent une priorité dans les soins. 162» De même, l'Allied Joint Planning Act 4 de l'OTAN dévoile la nature militaire de la mission des SSA. Il souligne la responsabilité nationale d'assurer un soutien sanitaire « multiplicateur de forces ». Il stipule qu'il est nécessaire d'assurer un retour des blessés ou malades à l'unité dans les plus brefs délais.

Le personnel du service de santé est donc confronté à une problématique de dualité d'éthiques qui peut parfois pousser à la « schizophrénie ». Une récente étude démontre que contrairement aux anciennes générations de praticiens qui s'engageaient dans le SSA surtout à des fins médicales et humanitaires, les nouvelles générations s'engagent plus à des fins militaires163.

159 Entretiens CPCO J4, EMOS, DCSSA, CICDE.

160 Médecin Général Eric Darré, Médecin militaire et droit des conflits armés : entre éthique et juridique, Revue internationale des services de santé des forces armées, vol76/2, 2003 ; Médecin Général Eric Darré, Evolution éthique du Service de Santé des Armées face aux problèmes posés par les nouvelles formes de guerre.

161 Loi 72-662 du 13 juillet 1972 portant statut général des militaires, BOC :SC, p784 ; BOEM 300, 332 et 651.

162 Instruction 52000/DEF/C/5 du 10 décembre 1979 portant application du reglement de discipline générale dans les armées, article 9, BOC, p4749, BOEM 130, 144, 150 et 300 ; Décret 75-675 du 28 juillet 1975, portant règlement de discipline générale dans les armées, article 7 à 9bis, BOC, p2861 ; BOEM 300.

163 Etude du MC Thiery, HIA Laveran.

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Cette étude semble validée par les directeurs santé en opération164. Soignant ou militaire avant tout ? Le personnel sanitaire est bien les deux en proportion égale mais il n'est pas combattant. Le personnel de santé est un militaire non combattant qui évolue dans un milieu de combattants. Cet environnement peut poser des difficultés. L'immersion au sein d'un groupe de combat et l'isolement peuvent conduire les unités médicales à vouloir participer aux hostilités par cohésion et esprit de corps. En outre, le personnel de santé est sous les ordres de l'autorité militaire en opération. Le commandement militaire pourrait chercher à utiliser le SSA pour obtenir des renseignements, pour participer à des interrogatoires ou pour gagner un quelconque avantage militaire. Les missions d'aide médicale à la population ont parfois pu poser des difficultés quand les soins médicaux prodigués sont inutiles pour la population. Ce genre de problématique est de nature à faire peser sur le personnel du SSA de lourds questionnements éthiques165.

? Effets psychologiques de la guerre

Les conflits modernes engendrent une résurgence de la violence. Pour toute une série de raison liées à la démographie les armées occidentales et plus encore l'opinion publique qui ne peut supporter des pertes que très modestes. A l'inverse, certains adversaires admettent de subir de lourdes pertes. Cette disparité ne leur échappe pas et leur stratégie vise souvent à causer des pertes et des blessés afin d'atteindre le moral, la force des troupes et la légitimité de l'opération aux yeux des politiques et de l'opinion publique166. Les interventions en milieu clos et en zones urbaines ont eu pour conséquence de ré-immerger certaines unités militaires de soutien au centre des combats167. Certains adversaires, notamment en Afghanistan, ne respecteraient pas les règles de DIH168. En raison des nouvelles méthodes et des nouveaux moyens de guerre il y a de nombreuses amputations et blessures sur les membres supérieurs. Le stress au combat est important et cause de nombreuses pertes pendant et après le conflit. Ce stress n'épargne pas les personnels de santé même s'ils sont moins nombreux en proportion en opération extérieure169. Comme l'écrit le lieutenant-colonel Goya « s'engager dans un combat, c'est pénétrer et se débattre dans une bulle de violence aux lois

164 Entretiens CPCO J4, EMOS, DCSSA/CO.

165 Entretiens

166 Le rapport des pertes humaines entre les deux camps est en moyenne de 1 à 8. Op. cit. (18) p53.

167 Entretiens à Etat Major Opérationnel Santé (EMOS), au Centre de Planification et de Conduite des Opérations (CPCO), au Centre Interarmées de Concepts et de Doctrine d'Emploi de la Force (CICDE) et avec un COMED.

168 Entretiens à Etat Major Opérationnel Santé (EMOS), au Centre de Planification et de Conduite des Opérations (CPCO), au Centre Interarmées de Concepts et de Doctrine d'Emploi de la Force (CICDE) et avec un COMED.

169 Entretiens CPCO J4 et J9, DCSSA/CCO

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psychologiques propres »170. Le stress est une réaction biologique, physiologique et psychologique de l'individu face aux agressions de l'environnement. La peur est normale et constitue une sauvegarde171. Elle induit deux réactions de survies : la stimulation et l'inhibition. Ainsi elle peut être un moteur ou un frein à l'action172. La violence conduit à une rupture psychologique liée à l'usure qui peut intervenir plus ou moins tôt en fonction de l'individu et de la durée d'exposition aux combats173. La fin des combats et le retour est aussi une phase délicate car elle conduit à l'évaluation, notamment éthique, de l'expérience174. L'environnement opérationnel ne transforme donc pas le personnel de santé en mécanique insensible. Celui-ci fait appel à sa compétence technique acquise à l'entrainement et à un savoir être qui repose sur des valeurs ancrées175. Mais dans cette mise à l'épreuve de soi la valorisation humaine peut s'atténuer face à la violence, la promotion de la vengeance, ou l'idéal patriotique ou humanitaire176. Dans ces situations complexes, qui font appel à l'éthique de responsabilité, le DIH doit constituer un référentiel tellement ancré dans l'individu que celui-ci l'applique par réflexe.

? Judiciarisation des conflits

La judiciarisation des conflits forces les armées et le SSA à être particulièrement vigilants dans l'application du DIH. Le développement de la compétence universelle en matière de DIH177 et la montée en puissance des juridictions régionales (Cour européenne des droits de l'homme178) et internationales (Cour pénale internationale179) devraient encore renforcer cette judiciarisation dans l'avenir.

170 Lieutenant-colonel Goya, Sous le feu : réflexions sur le comportement au combat, Cahier de la réflexion doctrinale, CDEF/DREX, p13.

171 « Sans peur nous n'aurions pas vécu vingt-quatre heures en première ligne ; nous aurions commis tant d'imprudences par inattention que nous aurions vite reçu une balle qui guette l'inconscient. » témoigne Jean Norton-Cru, Poilu pendant deux ans. Norton-Cru J., Témoins, Nancy, Presses Universitaires de Nancy, 1993, p8. 172Op. cit. (171).

173 Selon une étude américaine « Swank Marchand » seul 2% des hommes résistent indéfiniment à la pression psychologique des combats.

174Op. cit. (171).

175 Médecin Général Eric Darré, Droit International Humanitaire : problèmes éthiques posés au médecin, mémoire, faculté de médecine de Marseille, 2001-2002.

176 Labarthe, Vers une nouvelle éthique médicale, annales de droit international, 1961, 7, 64-66.

177 article 49 CGI, article 50 CGII, article 129 CGIII, article 146 CGIV, article 88 PI. En France, la loi de 1985 relative à la transposition de la convention contre la torture étend la compétence de nos tribunaux. Article 689-1 et 689-2 du Code de Procédure Pénale et Cour d'Assise Nimes, Ely Ould Dah, 1er juillet 1999

178 CEDH, Chypre c/ Turquie, requêtes n° 6780/74 et 6950/75, 2D et R125, p136-137.

179 Statut de Rome instituant la Cour Pénale Internationale, 1998. Le premier jugement de la CPI a été rendu le 14 mars 2012, le congolais Thomas Lubanga a été reconnu coupable de crimes de guerre.

? RETEX des derniers conflits pour les armées (Irak, Afghanistan, Mali)

Les retours d'expérience (RETEX) des armées concernant les conflits récents soulignent de nouvelles problématiques dans l'application du DIH et la nécessité de renforcer la formation. Certaines problématiques concernent directement le SSA, notamment le port de l'emblème. Le SSA peut analyser ces RETEX afin de prendre en compte ces problématiques au niveau stratégique et orienter la diffusion et la formation du DIH de manière efficiente180.

51

180 art.47 CGI; art.48 CGII; art.127 CGIII; art.144 CGIV; 83 PI; art.19 PII.

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AVOT

La situation du SSA quant à l'intégration et à l'application du DIH peut donc être résumée dans le tableau AVOT suivant :

Atouts

Vulnérabilités

Valeurs historiques du SSA
Ethique médicale intrinsèque au SSA
Potentiel d'intégration au niveau stratégique
du DIH
Bureau juridique dédié au SSA
Doctrine d'emploi ancrée dans le DIH
Ecoles de formation initiale et continue
propres au SSA
Port de l'emblème
Dimension internationale du SSA

Diversité des statuts du personnel du SSA
Pas de formation continue en DIH au sein du
SSA
Absence de soutien juridique opérationnel
dédié
Pas de compagnonnage en DIH
Peu de relations sur le sujet avec les armées
Manque de RETEX sur le DIH

Opportunités

Menaces

Portée universelle du DIH
Valeurs françaises
Importance accordée par les organisations
internationales
Partenariats ou collaborations du SSA
Renforcement du lien avec le commissariat
aux armées

Evolution lente du DIH
Complexité des situations opérationnelles
Evolutions techniques et technologiques
Etendue de la typologie des missions du SSA
Projections d'urgence et ouvertures de
théâtres
Non-respect du DIH par certains adversaires
et alliés
Pression des armées
Effets psychologiques de la guerre
Judiciarisation des conflits
RETEX des derniers conflits pour les armées

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L'analyse du AVOT

La confrontation des facteurs clés du tableau AVOT permet de mettre en relief les variables décrites dans l'annexe 6 et analysées ci-dessous.

? Analyse du croisement des atouts et des opportunités

Le SSA peut s'appuyer sur ses valeurs et sur ses compétences pour développer le DIH en son sein et porter les valeurs du DIH auprès de la communauté médicale militaire internationale et des armées françaises.

En s'appuyant sur ses compétences juridiques et éthiques ainsi que sur son réseau national, le SSA peut améliorer la dynamique du DIH en son sein. Une collaboration active renforcée avec le Secrétariat Général pour l'Administration, spécialiste du droit des conflits armés au sein du Ministère de la défense, et la Croix-Rouge française, qui souhaite réaffirmer sa position de porteur du DIH, permettrait de développer la connaissance du droit et de diffuser celui-ci auprès des personnels du SSA.

Les écoles de formation initiale et continue propres au SSA pourraient prendre une large part dans la diffusion des règles de droit auprès des personnels sanitaires. Les programmes de formation au DIH au sein des écoles du SSA pourraient être développés afin de former les personnels sanitaires à un savoir et à un savoir être éthico-juridique. Ces programmes peuvent s'appuyer sur les valeurs du SSA et les connaissances éthiques pour développer la compréhension du DIH. L'Ecole de Santé des Armées et l'Ecole des Personnels Paramédicaux des Armées, pourraient inculquer de manière uniforme à tous les personnels du SSA lors de la formation initiale les valeurs du DIH et souligner les spécificités du statut de non combattant des personnels sanitaires. L'Ecole du Val de Grâce pourrait renforcer cette connaissance dans le cadre de la formation continue des personnels de santé en prenant en compte les différentes problématiques qui peuvent apparaitre en fonction des métiers et spécialités. Aussi, les cours de DIH pourraient être systématiques lors des préparations avant projection. Il s'agirait de faire du DIH un référentiel commun à tous les personnels du SSA, et de son application dans les situations simples un réflexe. La norme ainsi intégrée consoliderait l'éthique de conviction des personnels sanitaires et favoriserait un recours approprié à l'éthique de responsabilité

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Le SSA a aussi la possibilité de rassembler le personnel qu'il emploie autour de valeurs communes dont le DIH peut en être l'expression . En effet, si le SSA emploie des personnels de diverses armées avec différents métiers et spécialités, l'intégration des spécificités du statut de militaire non combattant peut favoriser la cohésion de tous les personnels autour de valeurs communes qui sont chères au SSA. L'intégration de ces valeurs suppose avant tout le port de l'emblème, perçu comme le symbole de l'attachement du SSA au DIH et de l'affirmation du statut particulier des personnels sanitaires au combat. De plus, ces valeurs pourraient être soulignées dans les documents de doctrine et de stratégie du SSA. D'autre part, elles pourraient être diffusées auprès des armées, lors des formations initiales notamment, afin d'en faciliter l'intégration par les personnels des armées employés par le SSA. Ce « noyau dur » de valeurs communes pourrait aussi être professé et répété dans les écoles de formation initiale et continue du SSA. La reconnaissance de ces valeurs fondamentales du SSA permettrait de consolider encore l'éthique de conviction et « l'esprit de corps du SSA » pourrait faciliter l'application du DIH par tous les personnels sanitaires.

De plus, grâce à la reconnaissance internationale de sa compétence en matière de soutien sanitaire opérationnel et à son réseau de partenaires internationaux le SSA pourrait contribuer à porter les valeurs du DIH et de l'opinion juris (doctrine juridique) français au sein de la communauté médicale militaire internationale. Cette contribution s'appuierait sur les personnels du SSA en poste au sein de l'OTAN et une participation active aux groupes de travail traitant du sujet à l'OTAN, à l'Union Européenne, au Comité international de Médecine Militaire et à l'Institut International de Droit Humanitaire. De plus, les spécialistes du DIH au sein du SSA pourraient devenir formateurs dans les cours internationaux et participer ainsi à la diffusion de la philosophie française du droit. Alors que les opérations militaires se déroulent souvent dans un cadre multinational ces échanges internationaux renforceraient l'interopérabilité du SSA et éviteraient trop de disparités dans l'application du DIH, notamment dans la définition des situations de principe et d'exception. En effet, dans les situations complexes ces disparités sont de nature à perturber le personnel de santé dans le questionnement éthique qui précède l'application du DIH, voire à le faire douter du bien fondé du DIH.

De par sa légitimité en matière humanitaire et ses compétences juridiques, médicales et opérationnelles, le SSA est aussi en mesure de renforcer sa proximité avec les armées par des échanges étroits sur le DIH. Le SSA pourrait combler une certaine carence en droit humanitaire dans le développement du droit des conflits armés au sein des armées181, notamment par une

181 Entretien SGA.

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collaboration renforcée avec le Secrétariat Général pour l'Administration. Le développement du DIH, et particulièrement la diffusion des spécificités du statut de militaire non combattant, au sein des armées permettrait une meilleure coopération du SSA avec les armées en milieu opérationnel et éviterait des tensions dans l'application du DIH. En effet, dans un environnement opérationnel principalement combattant, la méconnaissance des spécificités du statut de non combattant par les armées peut engendrer des pressions pour le personnel de santé dans l'application du DIH. Cette proximité avec les armées faciliterait aussi l'adaptation des personnels des armées employés par le SSA au statut de non combattant.

Le SSA pourrait développer les compétences juridiques en DIH qui existent en son sein afin de soutenir la diffusion, la formation et l'application du DIH. En effet, le SSA dispose des connaissances de DIH qui doivent être diffusées au sein du SSA et communiquées auprès des armées, notamment concernant les spécificités du statut des personnels sanitaires en DIH. Des spécialistes du DIH pourraient être identifiés au sein du bureau juridique de la DCSSA. Ainsi, une coopération étroite avec le commissariat des armées pourrait permettre au SSA de former des conseillers juridiques spécialisés dans le domaine du soutien sanitaire et du DIH afin de répondre aux nouvelles exigences opérationnelles182. Ces conseillers juridiques seraient disponibles, lorsqu'il y aurait lieu, pour conseiller le commandement du service de santé, à l'échelon approprié, quant à l'application du DIH et quant à l'enseignement approprié à dispenser aux personnels du SSA à ce sujet183. En opération, ces conseillers pourraient être répartis dans les structures stratégiques et décisionnelles et chaque fois qu'il y a lieu dans les échelons opérationnels184. Ils faciliteraient la compréhension des problématiques de DIH et permettraient dans des situations juridiques complexes une réponse opérationnelle rapide.

Ainsi, une prise de position en faveur du DIH au sein du SSA, auprès de la communauté médicale militaire internationale et dans un contexte interarmées contribuerait à développer la connaissance du DIH, à favoriser son intégration par les personnels sanitaires et à limiter les contraintes qui peuvent surgir dans son application.

182 Article 6 PI.

183 Article 82 PI

184 Au Mali il y avait ainsi quatre conseillers juridiques : un à l'échelon interarmées, un au groupement tactique interarmes, un au centre opérationnel interarmes de l'armée de l'air et un dédié au forces spéciales. Entretien SGA.

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? Analyse du croisement des atouts et des menaces

L'analyse des atouts et des menaces permet de souligner que le SSA peut réduire l'impact des menaces en son sein en mettant à profit ses compétences juridiques, ses valeurs et son réseau.

Le SSA pourrait mettre en place une réflexion afin d'être en mesure d'analyser les zones grises du droit en opération. Les zones grises du droit procèdent de nouvelles situations ou de nouvelles pratiques qui se développent mais ne correspondent pas exactement aux situations et pratiques prévues par le droit. Des spécialistes pourraient identifier, évaluer et éclaircir ces zones grises afin de distinguer les situations juridiques de principe et les situations juridiques d'exception. Cette analyse serait particulièrement importante lors des ouvertures de théâtre opérationnel car chaque opération est singulière en matière de DIH. D'autre part, une analyse approfondie et régulière des zones grises du droit actuelles pourraient permettre d'anticiper certaines problématiques juridiques à venir. La mise en place d'un soutien juridique opérationnel spécialisé en DIH favoriserait une analyse efficace des zones grises liées à ce droit.

Afin de limiter le doute des personnels du SSA dans l'application du DIH, le SSA pourrait chercher à renforcer l'intégration des valeurs fondamentales du service par ses personnels. Les valeurs du SSA portent les valeurs du DIH. Ainsi, leur mise en oeuvre garantit a minima l'application des valeurs du DIH. Le renforcement de « l'esprit de corps du SSA » pourrait aussi faciliter l'application du DIH par les personnels sanitaires dans des environnements de combat au sein desquels ils peuvent être isolés. Le port de l'emblème constitue un symbole fort de l'attachement du personnel de santé au DIH, le camouflage de l'emblème devrait donc rester une exception. Le rassemblement autour des valeurs du militaire non combattant pourrait aussi aider les personnels du SSA à répondre à la dualité d'éthiques qui les caractérise. La réponse à la question « Militaire ou Soignant d'abord ? » deviendrait alors plus aisée.

En vu d'accroitre l'expertise des armées et services français en DIH et de renforcer l'intégration de ces règles de droit par tous les personnels employés par le SSA, des échanges réguliers peuvent être organisés avec les armées. Pour cela, le SSA pourrait renforcer ses coopérations avec le Secrétariat Général pour l'Administration, le Service du Commissariat des Armées, le Centre Interarmées de Concepts de Doctrine et d'Expérimentation ou le Centre de Recherche et de Formation des Ecoles de Saint-Cyr Coetquidan. Il s'agit en particulier de promouvoir le

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statut de militaire non-combattant, de diffuser le DIH et de souligner l'importance du retour d'expérience en la matière. Le SSA pourrait coopérer étroitement avec les armées afin d'identifier et d'évaluer certaines problématiques de DIH dans les retours d'expérience. Si les retours d'expérience du SSA ne livrent que peu d'informations quant à l'application du DIH en opération, les retours d'expérience des armées sont plus détaillés sur ce sujet. Ainsi, une analyse des retours d'expérience des armées peut permettre d'identifier certaines problématiques qui concernent le SSA185. Néanmoins, certaines problématiques liées à la pratique médicale pourraient ne pas apparaitre dans ces retours d'expérience. Ainsi, la coopération avec les armées en matière de retour d'expérience peut être un indicateur de l'application du DIH par les personnels du SSA mais une autre voie devrait être trouvée pour rendre compte des problématiques liées à la technique médicale. Le SSA pourrait dans ce cadre participer aux études juridiques concernant l'emploi de nouvelles techniques de guerre afin notamment de juger de leurs effets sur la santé186.

Les réseaux internationaux peuvent aussi être utilisés pour diffuser le DIH à travers la doctrine d'emploi et les normes. La doctrine d'emploi du SSA, ancrée dans le DIH, et les règles opérationnelles qui en découlent peuvent traduire de manière pragmatique les règles juridiques. Les doctrines d'emploi des services de santé de l'OTAN et de l'UE peuvent constituer un référentiel de conduite générique qui permet de distinguer les situations juridiques de principe et les situations juridiques d'exception. Le SSA français, qui préside actuellement le Comité des chefs de services sanitaires de l'OTAN, peut chercher à porter les valeurs du DIH dans la doctrine de l'OTAN. De même, l'UE cherche actuellement à adapter le DIH aux nouvelles contraintes opérationnelles, le SSA français pourrait soutenir une doctrine d'emploi des forces européennes ancrée dans les valeurs du DIH. Les institutions internationales spécialisées, telles que le Comité International de la Croix-Rouge, l'Institut International de Droit Humanitaire ou le Comité International de Médecine Militaire peuvent constituer des espaces d'échanges et de relais d'opinion dans ce cadre. En effet, l'OTAN commande notamment des études auprès du Comité International de Médecine Militaire. La mise en place de ces doctrines internationales ancrées dans le DIH permettrait d'éviter les disparités dans l'application du DIH qui peuvent troubler les personnels du SSA lorsqu'ils doivent mettre en oeuvre le DIH.

185 Entretien CPCO/J4 et J9, EMOS, CICDE, DCSSA/CO, SGA ; Les Fantômes Furieux de Falloujah : opération AL-FAJR/PHANTOM FURY (Juillet-Novembre 2004), CDEF/DREX, Cahier du RETEX, 2006.

186 Le DIH condamne en effet les armes qui causent des maux superflus, art. 35 (2) PI.

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Le SSA est en mesure de réduire les menaces quant à l'intégration et à l'application du DIH en son sein en développant ses compétences juridiques afin d'éclaircir les zones grises du droit, en renforçant la diffusion des valeurs fondamentales du SSA et en s'appuyant sur une étroite collaboration avec les armées et les réseaux internationaux.

? Analyse du croisement des vulnérabilités et des menaces

L'analyse des vulnérabilités et des menaces permet de souligner que les nouvelles formes de conflit provoquent des difficultés dans l'application du DIH pour tous les personnels du SSA qui disposent d'un soutien juridique en DIH fragile.

Le personnel du SSA doit faire face à des zones grises dans l'application du DIH. Alors que les situations opérationnelles sont différentes sur chaque théâtre, les textes de DIH évoluent lentement. Cette dichotomie peut induire le risque pour le personnel sanitaire de se trouver dans des situations non prévues par le DIH ou de devoir faire face à des violations du droit répétées qui s'apparentent parfois à de nouvelles coutumes. Ces zones grises du droit peuvent être entretenues par des disparités dans l'application du DIH en raison du manque de retour d'information, d'une mauvaise intégration du DIH ou de négligences. Elles sont de nature à troubler l'application du DIH par les personnels du SSA qui doivent alors souvent faire appel à leur éthique de responsabilité. D'autre part, à long terme elles peuvent conduire les personnels du SSA à douter du bien fondé du DIH. Il serait donc nécessaire de travailler sur ces zones grises du droit.

Malgré la diversité des statuts des personnels employés par le SSA, le DIH devrait être intégré par tous. Cette intégration du DIH devrait être de nature à former une éthique de conviction solide pour tous les personnels sanitaires. L'application du DIH devrait devenir un réflexe dans les situations normales. Dans les situations complexes le DIH devrait constituer un référentiel à partir duquel le personnel sanitaire va mettre en oeuvre son éthique de responsabilité. L'intégration du DIH peut alors soulager l'impact psychologique des décisions imparfaites. De plus, en situation de stress opérationnel, dans un cadre interarmées et multinational, et face à des zones grises du droit, une mauvaise intégration des règles de DIH peut conduire le personnel soignant à des erreurs dans l'application du DIH. Si les règles de DIH ne sont pas ancrées dans l'esprit du personnel sanitaire, une projection d'urgence, la pression des armées, des alliés ou l'effet psychologique de la guerre seront de nature à troubler son jugement. Par ailleurs, une mauvaise identification des problématiques de DIH peut nuire au retour

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d'expérience et affecter la prise en compte du DIH au niveau stratégique. En outre, certains personnels des armées employés par le SSA bénéficient du statut de non combattant temporaire en opération. La mise en oeuvre de ce statut peut être particulièrement délicate car le personnel doit pouvoir déterminer dans quelle mesure sa mission relève uniquement du soutien sanitaire. Le SSA devrait donc travailler à mettre en oeuvre des processus qui facilitent l'intégration du DIH par tous les personnels employés par le SSA.

Alors que le SSA est employé dans des situations opérationnelles qui se complexifient au regard du DIH, il pourrait être nécessaire d'apporter un soutien juridique de proximité à même de répondre aux problématiques du SSA. Le soutien juridique opérationnel repose entièrement sur le commandement santé et pour les cas particuliers sur une chaine hiérarchique longue et peu processuelle qui pourrait s'avérer peu réactive. Ce défaut de soutien juridique peut donner au personnel du SSA le sentiment d'être démuni face aux difficultés qui surgissent dans l'application de ce droit porteur de valeurs considérées comme fondamentales. En outre, ceci contribue au manque de retour d'information concernant l'application du DIH et à une évaluation parfois inadaptée des problématiques juridiques du terrain au vu des zones grises du droit. Le risque est particulièrement élevé pour le SSA dans les phases d'ouverture de théâtre, notamment en cas de projection d'urgence, et dans les phases de stabilisation pendant lesquelles se développent souvent les missions d'aide médicale à la population.

Le SSA évolue dans un cadre interarmées et une réflexion pourrait être utile, en lien avec les armées, sur les impacts des évolutions du monde de la défense sur l'application du DIH. En effet, les doctrines interarmées lient le SSA. Celui-ci pourrait donc porter les valeurs du DIH au niveau interarmées afin de s'assurer que ces doctrines prennent en considération les règles de DIH qui s'imposent particulièrement au SSA, notamment les spécificités du statut de non combattant. La mission du SSA évolue dans le cadre de l'approche globale, la coopération du SSA avec les actions civilo-militaires doit faire l'objet d'une étude approfondie avec les armées. La mission d'aide médicale aux populations pourrait être analysée au regard du DIH. D'autre part, le SSA pourrait participer à l'analyse des nouveaux moyens de la guerre afin d'évaluer leurs conséquences sur la personne humaine. Le SSA pourrait ainsi porter les valeurs du DIH au sein de la doctrine interarmées. Cette approche combinée dans la préparation des missions permettrait de limiter les réactions émotionnelles face aux situations complexes.

Les personnels employés par le SSA sont confrontés à des situations opérationnelles complexes au regard du droit et des zones grises du droit qui rendent l'intégration, le soutien juridique et la prise en compte stratégique du DIH particulièrement nécessaires.

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? Analyse du croisement des vulnérabilités et des opportunités

L'analyse des vulnérabilités et des opportunités permet de mettre en relief que le SSA peut s'appuyer sur son réseau national et international, et sur la réserve pour compenser ses manques afin de développer la dynamique de DIH en son sein.

Le SSA pourrait s'appuyer sur un réseau de partenaires nationaux et internationaux pour améliorer la diffusion et la compréhension du DIH en son sein. En effet, au vu de la diversité des statuts des personnels du SSA et de leur cadre d'emploi interarmées, multinational et civilo-militaire, une approche globale quant à l'intégration du DIH pourrait être un atout. Au niveau interarmées d'abord, le SSA pourrait s'appuyer sur le Secrétariat Général à l'Administration, le Service du Commissariat des Armées, le Centre Interarmées de Concepts, de Doctrine et d'Emploi de la Force et le Centre de Recherche et de Formation des Ecoles de Saint-Cyr Coetquidan. Ceux ci pourraient participer à la diffusion du DIH, au sein de la doctrine et de supports pédagogiques, et la formation des personnels employés par le SSA au DIH. Au niveau national ensuite, le SSA pourrait bénéficier du soutien de la Croix-Rouge française, de l'Institut Pasteur et de l'Institut National de la Santé et de la Recherche Médicale pour diffuser le DIH et parfaire la compréhension des personnels de santé du DIH au regard de problématiques rencontrées par les institutions de santé civiles en opération qui sont parfois différentes. En effet, lors de certaines missions l'interaction du SSA avec ces organisations civiles peut être importante. Au niveau international enfin, le SSA pourrait coopérer avec des organisations internationales, telles que l'OTAN et l'UE, et des institutions spécialisées, telles que le Comité International de Médecine Militaire et l'Institut International de Droit Humanitaire International, pour diffuser le DIH et effectuer des actions de formation initiale et des actions de formation spécialisée.

Le SSA intervient souvent dans les cadres multinationaux de l'OTAN ou de l'UE, il adopte donc les doctrines d'emploi de ces organisations. Le SSA pourrait ainsi s'appuyer sur ces organisations pour assurer l'intégration du DIH dans leurs doctrines d'emploi respectives. La diffusion des règles de DIH dans une doctrine multinationale permet de rendre celles-ci opposables à tous les militaires des Etats membres de l'organisation et de limiter les disparités dans l'application du DIH.

Parce que chaque opération militaire présente des problématiques différentes en termes de DIH, le retour d'expérience est primordial en la matière. Le SSA pourrait développer

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l'exploitation des retours d'expérience en matière de DIH. Pour cela, il devrait renforcer la diffusion et l'intégration du DIH afin de permettre aux personnels d'identifier les problématiques de DIH. D'autre part, il pourrait s'appuyer sur les procédures mises en place dans les armées et dans les SSA étrangers, qui semblent mieux rendre compte des problématiques de droit, pour développer des procédures adaptées au retour d'informations juridiques. Aussi, un soutien juridique en DIH renforcé pourrait permettre d'analyser les retours d'expérience des armées et SSA étrangers afin d'identifier des problématiques qui pourraient toucher le SSA français. Dans ce cadre, la proximité du SSA avec les armées, ses coopérations bilatérales et ses collaborations avec l'OTAN, le Comité International de Médecine Militaire et l'Institut International de Droit Humanitaire pourraient jouer un rôle majeur. Outre l'analyse des documents de retour d'expérience, la participation à des colloques et séminaires sur le sujet serait importante.

L'établissement de conseillers juridiques en DIH en coopération avec le Service du Commissariat des Armées pourrait permettre de faciliter l'application du DIH. En effet, ceux-ci seraient en mesure d'identifier et d'évaluer les problématiques de DIH des différents théâtres d'opération et d'en rendre compte afin d'adapter la stratégie et la formation à l'égard du DIH au sein du SSA. De plus, ces spécialistes du DIH pourraient apporter des conseils au commandement santé ou à tout autre échelon santé s'il y a lieu187. Ils permettraient donc une réponse juridique rapide et opérationnelle dans des situations complexes ce qui soulagerait la charge juridique et éthique qui peut peser sur les personnels du SSA, particulièrement les directeurs santé en opération. En effet, si la décision reste celle du praticien qui engage sa responsabilité, la mise en place d'un processus de décision collectif peut réduire l'impact psychologique de décisions imparfaites188. Ces juristes pourraient constituer des points de contact pour tous les personnels du SSA au regard des questions juridiques et éthiques afin de permettre l'identification et la verbalisation des problèmes éthiques rencontrés.

L'opinion publique française est historiquement et culturellement particulièrement sensible aux questions regardant le DIH. Ainsi le SSA peut faire appel à la réserve citoyenne, collaborateurs bénévoles du service public qui ont choisi de servir en faisant bénéficier la défense de leur expertise et de leur connaissance, et à la réserve opérationnelle, citoyens français volontaires et anciens militaires d'active ou du contingent qui ont souscrit à leur initiative un engagement à servir dans la réserve, pour développer la dynamique de DIH en son sein sous l'angle de l'expertise juridique et éthique et l'angle de l'expérience médicale et opérationnelle. Ces

187 Article 82 PI

188 Entretiens CPCO, DCSSA/CO

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réservistes pourraient effectuer des interventions sur le DIH au profit de tous les personnels employés par le SSA, notamment dans le cadre de la formation continue. La participation de réservistes issus de la société civile pourrait constituer un atout afin de développer une sensibilité quant aux problématiques rencontrées par les organisations civiles dans les conflits armés. Cette formation complémentaire renforcerait la capacité du SSA à interagir avec les organisations non-gouvernementales dans le domaine des actions civilo-militaires.

Ainsi, les réseaux nationaux et internationaux du SSA peuvent lui permettre de renforcer la diffusion et l'intégration du DIH par les personnels du SSA, et l'amélioration de la prise en compte du DIH au niveau stratégique. De plus, la réserve peut constituer un important soutien en matière de DIH.

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La Discussion

L'analyse qui précède a montré toute l'importance du droit international humanitaire pour le service de santé des armées. C'est pourquoi le Service doit en permanence être vigilant quant à la diffusion des règles prévues par le droit de Genève et son application en opérations. En effet, le DIH n'est pas ancré de façon immuable au sein de l'institution. Ceci, non seulement parce que le personnel n'est pas pérenne, avec des rotations à des rythmes variés selon les statuts de recrutement, mais aussi en raison de la typologie des conflits en permanente évolution.

La période actuelle est complexe, tout va très vite en termes d'évolutions technologiques, d'enjeux politiques, de modes de règlement des conflits et des acteurs impliqués dans la résolution de la crise. L'hybridité des situations est un facteur majeur de brouillage des messages et des réponses à apporter dans le respect des règles du droit de la guerre. La frontière entre militaires et civils n'est plus aussi évidente, les contours des conflits armés se confondent avec les instabilités internes aux Etats et avec le contre-terrorisme interétatique. Cependant, ce n'est pas parce que les modalités de la guerre changent éminemment que la guerre est devenue improbable. Ainsi, si la notion de conflit est probable, elle est en revanche devenue imprévisible dans sa survenue et dans sa forme. Ceci génère des problématiques juridiques complexes et polymorphes. Une véritable réflexion autour de l'application, et même de l'applicabilité du DIH, dans ces conditions est donc un enjeu majeur pour les armées et le SSA en particulier. Celui-ci étant porteur de valeurs humanitaires, il ne peut pas se détacher du DIH sans risque d'entacher sa raison d'être.

? Le DIH : une obligation légale

Cette nécessité d'intégration du DIH relève d'abord de l'obligation légale. Il s'agit dans ce cas d'une relation de contrainte entre le Service et le droit qu'il est indispensable de ne pas négliger. Ceci d'autant plus qu'au-delà de la responsabilité pénale du SSA, c'est celle de l'Etat qui est engagée. Lorsque le Service ou ses personnels ordonnent, commandent, organisent des crimes de guerre ou lorsqu'ils s'abstiennent de poursuivre leurs acteurs individuels, ils

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peuvent être coupables de ne pas prendre toutes les mesures nécessaires pour prévenir ou punir les violations du DIH189 .

Ainsi, les commandements militaires ont la charge d'empêcher que soient commises des infractions au DIH, de les faire cesser et de prendre des mesures à l'encontre des personnes placées sous leur autorité qui se rendent coupables de tels crimes. L'adoption de mesures disciplinaires pour prévenir ou faire cesser les comportements dissidents à l'égard du DIH est aussi prévue par le droit sous peine de sanctions pénales. Ces comportements peuvent résulter d'actions à l'encontre du DIH ou d'omissions190. A contrario, les individus ont le devoir de ne pas obéir à des ordres qui enfreignent le DIH. Le statut général des militaires, le règlement de discipline générale dans les armées et le code du soldat prévoient que le militaire ne peut accomplir, ordonner ou se voir ordonner des actes contraires aux règles du droit international191. Pour ce qui concerne le personnel du SSA, l'instruction d'application du règlement de discipline générale et le code de déontologie médicale des médecins militaires précisent que les personnels sanitaires doivent adopter une conduite conforme aux principes généraux régissant l'exercice de la profession ainsi qu'aux règles de DIH192.

? Le risque pour le SSA de perdre sa crédibilité et sa légitimité

Par ailleurs, une bonne diffusion du DIH afin de modeler les comportements est primordiale pour la crédibilité et la légitimité de l'action du Service. En effet, l'institution tout entière sera jugée sur les agissements des hommes et des femmes qui la composent. La responsabilité collective est souvent l'agrégation de responsabilités individuelles. Des affaires de violation du DIH peuvent potentiellement éclabousser le Service et au-delà les armées. Les médias s'en empareront rapidement et l'amalgame sera fait entre les auteurs des crimes et les militaires en général. A l'international la France pourrait se trouver sur le devant de la scène, d'autant plus qu'elle est parfois perçue comme arrogante dans le domaine des droits de l'homme. Le succès des opérations militaires pourrait être remis en cause. « L'histoire témoigne que la guerre et la médecine ont toujours coexisté dans des rapports ambigus et cycliques » 193. Le livre blanc de la défense et de la sécurité nationale de 2013 affirme aujourd'hui que le SSA « joue un rôle

189 CIJ, Bosnie-Herzégovine c. Serbie-et-Monténégro, 26 février 2007.

190 Articles 85, 86, 87 CGI; Loi 72-662 du 13 juillet 1972 portant statut général des militaires; décret 75-675 du 28 juillet 1975 portant règlement de discipline générale dans les armées, article 7 à 9bis; Instruction 52000/DEF/C/5 du 10 décembre 1979 portant application du règlement de discipline générale dans les armées, article 9; Décret n° 2008-967 du 16 septembre 2008 fixant les règles de déontologie propres aux praticiens des armées.

191Op. cit. (190).

192 Op. cit (190).

193 Op. cit. (193) p7.

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essentiel pour le soutien des soldats comme dans notre stratégie de défense»194. En effet, le facteur humain est devenu primordial au sein de l'approche globale puisqu'il constitue une fin en soi et un moyen au sein des conflits actuels195. Le spectre du domaine de santé s'est donc considérablement élargi. Il ne participe plus seulement au traitement des blessés de guerre mais aussi aux grandes fonctions stratégiques françaises : « la connaissance et l'anticipation » ; en participant à l'évaluation des menaces, notamment biologiques ; « la prévention » en développant des systèmes de veille épidémiologique196 ; la « protection » en développant des mesures de préservation et des contre-mesures médicales ; « l'intervention » par le soutien des forces et en participant aux actions civilo-militaires. Dans le contexte de la guerre justifiée, l'application du droit participe à la légitimité de l'opération militaire. En premier lieu, le droit légitime l'opération aux yeux des militaires eux-mêmes. Les militaires n'appliquent pas seulement le droit par peur de la rétorsion.

Cette problématique est d'autant plus marquée que les acteurs en présence ne sont plus uniquement les militaires des parties ennemies. Les opérations sont aujourd'hui menées selon une approche globale, c'est-à-dire avec la recherche de solutions non plus uniquement coercitives mais aussi diplomatiques, économiques, sociales où la société civile tient une place prépondérante. Que serait alors la vision de l'opinion publique occidentale face à des actes contraires au droit ? L'exemple récent du comportement américain en Irak et en Afghanistan a montré combien la pression publique et médiatique pouvait ramener le pouvoir politique à ses devoirs. Les puissances occidentales sont effectivement historiquement attachées à la défense des droits de l'homme197, se définissant souvent politiquement comme des « ambassadrices des droits de l'Homme » ce que traduit l'ancien terme de « nations civilisées ».

De plus, au-delà de la légitimité des opérations auxquelles le SSA contribue, le manquement aux devoirs du DIH pourrait fortement obérer sa crédibilité en tant que service de soutien santé. Cela mettrait évidemment en danger toute l'institution et au-delà les soldats qu'elle soigne et les populations qu'elle est amenée à soutenir. Des comportements déviants pourraient nuire fortement au personnel sanitaire et donc aux blessés et malades au combat. En effet, la prise en charge indiscriminée des blessés et des malades, réalisée avec humanité en toutes circonstances, justifie la protection accordée aux personnels de santé ; et cette protection permet au SSA de délivrer des soins de santé en opération de manière optimale. Dans un

194 Livre Blanc de la défense et de la sécurité nationale 2013, p97. 195Op. cit. (18).

196 Système ASTER.

197 Dès 1679, les anglais adoptent l'Habeas Corpus Act pour protéger les sujets de l'absolutisme monarchique. La France « patrie des droits de l'Homme » rédige la première déclaration portant sur les droits de l'homme et entend lui donner une vocation universelle : La déclaration des droits de l'hommes et du citoyen de 1789.

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environnement au sein duquel la population est un moyen et une fin, le SSA en s'écartant du DIH deviendrait un « ennemi juré » contre lequel, toute attaque serait permise198. Cette situation pourrait créer la confusion dans l'application du DIH par les personnels du SSA, voir à remettre en cause son bien fondé. Le personnel de santé pourrait ainsi perdre de vue les spécificités de son statut de non combattant qui font sa force et devenir un « combattant technicien » ou « un personnel civil employé par le ministère de la défense ». Ses possibilités et donc ses missions de soins de santé seraient par conséquent réduites. Par ailleurs, les relations, parfois complexes, avec les autres acteurs de santé civils, essentiels en tant que relais de l'action auprès des populations, pourraient se compliquer. Aujourd'hui, si les humanitaires ont saisi toute l'importance de collaborer, à des degrés divers, avec les forces armées pour des raisons sécuritaires et parfois même capacitaires, ils continuent de proclamer que l'ingérence militaire dans l'espace humanitaire trouble le débat. Pour eux, cela met en danger la perception de leur neutralité et de leur impartialité qu'ils souhaitent absolument ériger en dogmes. L'action des services de santé militaires est aujourd'hui pourtant tolérée car elle est édictée dans les conventions de Genève comme un devoir de protection et d'assistance envers les populations. C'est pourquoi, si le SSA venait à transgresser le DIH, cette acceptation ne serait plus possible et cela nuirait forcément à la coordination nécessaire à la bonne mise en oeuvre des soins de santé.

? Le DIH : expression des valeurs que porte le SSA

Au-delà de cette légitimité et de cette crédibilité qui peuvent être mises en danger, le respect du DIH est fondamental pour la philosophie d'action du SSA. Les valeurs que porte le SSA depuis trois cents ans sont incompatibles avec la transgression du droit de Genève. Le DIH, de part son origine et son contenu, est l'expression conjointe des valeurs militaires et des valeurs médicales, tout comme pour le SSA. Ce dernier porte haut les valeurs de la puissance étatique, de l'engagement pour les droits de l'homme, de l'abnégation, de la solidarité, du désintéressement, de la non discrimination et de la disponibilité. Dans ces conditions, trahir le DIH, relève véritablement de la perte de son âme. L'intégration et l'application du DIH, issues de la philosophie humaniste, renforce la capacité de l'Homme à limiter les souffrances de son prochain dans les situations complexes liées aux conflits armés. Il constitue une limite à l'inhumain et à l'escalade de la violence au sein des conflits armés afin de réconcilier « La chair

198 Op. cit (18), chapitre 3.

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et l'acier 199». Le SSA est historiquement et culturellement profondément attaché au facteur humain comme le souligne le code de déontologie de médecine militaire française : «le respect de la vie et de la personne humaine est un devoir primordial qui s'impose au médecin et au pharmacien chimiste des armées200 ». Le personnel du SSA est un militaire engagé au service de la France et lui est entièrement dévoué en tout temps et en tous lieux si nécessaire au péril de sa vie201. La réponse à l'éternelle question « militaire ou soignant d'abord ? » deviendrait plus aisée.

? L'intégration du DIH : un devoir envers les personnels du SSA

Ainsi, si l'intégration du DIH est un devoir pour le SSA envers l'Etat, envers ses partenaires santé et envers lui-même, c'est plus encore un devoir envers ses personnels. Il ne peut pas, en effet, les laisser démunis face à l'exposition à des choix éthiques lourds et complexes. Les personnels sont actuellement immergés au centre des conflits, isolés dans des milieux combattant, soumis au stress du combat, face à des adversaires ou des alliés qui peuvent ne pas respecter le DIH, au sein de conflit dans lesquels la population constitue un moyen et une fin. Dans ce contexte, les valeurs militaires et médicales du médecin militaire peuvent s'affronter. Voici quelques exemples soulignés pendant les entretiens:

- Que doit faire le médecin auquel le commandement militaire demande de traiter un blessé militaire avant un blessé civil plus lourd ? Le principe de non discrimination dans la prise en charge des blessés demande de prendre en charge le blessé le plus urgent mais que faire de l'esprit de corps et de la cohésion militaire ?

- Que faire lorsque la mission d'aide médicale à la population apparait plus motivée par des considérations militaires que médicales ? Ces missions doivent répondre à un véritable besoin médical et le suivi médical doit pouvoir être effectué par le système de santé local lors du départ de la force. L'application du DIH par les personnels de santé semble particulièrement difficile dans ces situations. Certains médecins ont eu à effectuer des choix éthiques particulièrement douloureux dans ce cadre, qui ont pu causer des troubles psychologiques. D'autres peuvent refuser de participer à ces missions.

- Que doit faire l'infirmier lorsqu'un des membres de son groupe de combat est blessé alors que celui-ci est pris à partie ? Riposter et ainsi se protéger et protéger son groupe ? Prendre en

199 Goya M., La chair et l'acier : l'armée française et l'intervention de la guerre moderne (1914-1918), Tallandier, 2004.

200 Décret n° 2008-967 du 16 septembre 2008 fixant les règles de déontologie propres aux praticiens des armées.

201 Code du soldat français.

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charge immédiatement le blessé au péril de sa vie ? Si l'article 10 CGI prévoit que tous les blessés doivent être protégés et recevoir dans les délais les plus brefs les soins médicaux qu'exige leur état, la méthode reconnue par l'armée française en matière de sauvetage au combat est basée sur la doctrine américaine du SELF MARCH RYAN (annexe 6). Cette procédure préconise d'assurer sa sécurité et celle du groupe avant de prendre en charge le blessé le plus grave.

Ces questionnements éthiques sont lourds et peuvent conduire à des décisions imparfaites qui provoquent des blessures psychologiques chez le décideur202.

Le Service a donc le devoir de mettre un référentiel à disposition de son personnel afin de leur permettre d'agir plus facilement dans l'urgence des combats pour que les règles de DIH soient alors ancrées dans l'éthique de conviction. Cette éthique favorisant la mise en oeuvre de l'éthique de responsabilité de manière optimale dans des situations de stress au combat. Ainsi, la prise de « décisions imparfaites » pourrait être soulagée par la conscience de s'être conformer aux valeurs fondamentales universelles transcrites dans le DIH.

? Le DIH : vecteur d'interopérabilité

Enfin, dans une époque où les opérations se font essentiellement en coalitions, au moins dans la durée, il est indispensable de développer des vecteurs d'interopérabilité entre les acteurs. Ce lien et ce langage commun est primordial pour la communauté santé car il s'agit bien de sauver des vies au-delà des clivages. Le domaine santé est donc le plus consensuel. Cependant, des raisons de se rassembler sont toujours bonnes à prendre. Le DIH, de part son universalité, est une excellente référence commune. Il peut servir de base à la construction de procédures et de doctrines interopérables. Il peut aussi susciter le débat, notamment autour des zones grises du droit, ouvrant le champ au dialogue indispensable dans les situations difficiles. Les tribunes pour ces discussions sont naturellement les organisations internationales. Le SSA, très présent à l'OTAN et à l'UE, a ainsi le devoir de porter ses questions pour réduire les disparités d'interprétations et d'approches. Il s'agirait ainsi de promouvoir le DIH et l'opinio juris français au sein de la doctrine de ces organisations afin de limiter les disparités dans la diffusion, la formation et l'application du DIH et donc de réduire le risque de confusion pour les personnels de santé.

202 Entretien CPCO, Les Fantômes Furieux de Falloujah : opération AL-FAJR/PHANTOM FURY (Juillet-Novembre 2004), CDEF/DREX, Cahier du RETEX, 2006.

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Par ailleurs, le sujet du DIH est tout aussi porteurs avec les acteurs santé de la société civile afin d'adopter un point de vu complémentaire quant à l'application de ce droit opérationnel pouvant favoriser la bonne coordination avec les organisations humanitaires et ainsi permettre l'établissement de réseaux en opération extérieure propices à des soins de santé efficients.

C'est ainsi que le lien entre le SSA et le DIH doit être renforcé et sans cesse réaffirmé. Les grandes lignes des actions fondamentales à conduire sont décrites ci-dessous.

? Promouvoir une application stricte du DIH

Le terme allemand de « unheimlich » est souvent employé pour désigner l'inquiétante étrangeté du droit international public. Le jeu des règles observables en droit international humanitaire est bien différent de celui observable en droit interne en raison du principe de l'égalité souveraine des Etats et de l'absence de processus pouvant contraindre les parties à un conflit à appliquer une règle qu'ils estiment contraire à leurs intérêts. Dans le domaine du DIH les textes morts, les prescriptions méconnues et les engagements violés sont peut être plus nombreux qu'ailleurs. Là où, dans les autres champs juridiques, les dysfonctionnements se manifestent à travers le contentieux, ici c'est très souvent la légitimité de la société internationale et du droit international dans son intégralité qui sont remises en causes. On peut donc parler des « échecs du droit international ». Il peut y avoir des échecs dans la création du droit et des échecs dans l'application du droit203.

Cependant, il ne faut pas confondre échec et inachèvement. Tout d'abord, le droit peut naitre du pire permettant d'aboutir à des avancées qu'en d'autres temps on avait pu estimer improbables comme la mise en place d'une protection spécifique pour les personnels sanitaires par exemple. Ensuite, il faut admettre le « droit à l'échec du droit », car si une règle subit une violation elle ne disparait pas pour autant, « la règle même bafouée est confortée dans son existence »204. Le code pénal français ne saurait être remis en cause malgré les multiples infractions pénales. Enfin, parce qu'il faut envisager le droit non pas comme un état donné mais comme un processus en devenir205. Il s'agit donc ici de mêler le pessimisme de l'intelligence à l'optimisme de la volonté.

203 Op. cit. (38).

204 Op. cit. (226).

205 Kojève A., Esquisse d'une phénoménologie du droit, Tel, gallimard, 1981, paragraphe 21.

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Dans cet esprit, le SSA pourrait se doter d'une position active en faveur d'une application stricte du DIH et condamner fermement les violations du DIH, en particulier celles de nos alliés. Pour cela, le SSA pourrait différencier les situations juridiques de principe et les situations d'exception, notamment concernant le port de l'emblème, afin de rationnaliser l'application du DIH. Les actions en faveur du DIH pourrait être valorisées et les comportements dissidents sévèrement sanctionnés au niveau disciplinaire. Le SSA a l'obligation de se positionner fermement et clairement vis-à-vis de ses personnels.

? Participer au débat sur l'adaptation du DIH aux nouvelles situations opérationnelles

De nombreux acteurs de la société internationale civile et militaire semblent récemment démontrer la volonté de réviser le DIH. L'Union Européenne affirme la nécessité d'adapter le DIH au nouveau contexte opérationnel206. Le Conseil de sécurité a adopté de nombreuses résolutions relatives au DIH pour compléter l'état du droit conventionnel207. L'Organisation du Traité de l'Atlantique Nord (OTAN) souhaite aussi adapter le DIH aux nouvelles contraintes opérationnelles. Cette volonté apparait clairement dans de récents STANAG portant notamment sur la question du camouflage de l'emblème208. L'Institut de droit humanitaire international (IDHL) organise par conséquent de nombreux débats sur ces questions qui sont au coeur de ses recherches. A l'occasion du 150ème anniversaire de la première convention de Genève le CICR a donc lancé un programme de modernisation du DIH. Les experts du CICR travaillent actuellement sur ce projet. Celui-ci sera ensuite partagé avec les divers professionnels impliqués dans les conflits armés afin de recueillir leurs observations et éventuelles modifications, avant de soumettre un projet final à la ratification des Etats.

Cette adaptation du DIH aux nouveaux modes de conflit devrait permettre de combler certains vides juridiques et surtout d'éclaircir des zones grises du droit. Elle limiterait la propension de certains Etats à imposer leur doctrine juridique par l'intermédiaire de pratiques répétées qu'ils souhaitent parfois voir qualifiées de coutume209. Cette réforme unique permettrait une vision globale des problématiques de DIH et limiterait le risque de voir les différents acteurs du DIH

206 Lignes directrices de l'Union européenne mise à jour concernant la promotion du droit humanitaire international, 2009/C, 303/06

207 Conseil de sécurité de l'ONU, résolutions 1738 (2006), 1265 (1999), 1296 (2000) et 1674 (2006). Conseil de sécurité de l'ONU, résolution 1502 (2003).

208 STANAG 2931

209Cf. Doctrines américaines de la légitime défense préventive ou du statut de « combattant illégal ».

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adopter de multiples textes plus ou moins normatifs au cas par cas. Une telle révision pourrait ainsi assurer une certaine cohérence dans l'application du DIH face à ces problématiques juridiques nouvelles.

Néanmoins, le DIH est responsable de la protection des valeurs fondamentales considérées comme universelles. Cette modernisation devrait ainsi particulièrement veiller à ne pas porter atteinte à ses valeurs et réduire des droits acquis. En voulant ajouter des valeurs ou des principes supplémentaires, le risque est de perdre l'adhésion de certains Etats. La force des conventions de Genève réside notamment dans les 186 Etats qui ont ratifié ces conventions. Il est donc souhaitable que la modernisation du DIH soit menée par une organisation neutre, telle que le CICR, capable d'adopter une approche globale et prudente. L'adaptation du DIH au nouveau contexte opérationnel est donc un processus souhaitable mais lent. Les SSA qui est une des principales entités concernées par ces textes pourraient néanmoins faire partager son expérience et participer à cette réflexion afin de compléter sa connaissance en DIH et d'éclaircir et anticiper certaines problématiques de santé militaires liées au DIH.

? Faire du DIH un référentiel commun à tous les personnels employés par le SSA

Les règles de DIH pourraient faire l'objet d'une diffusion et d'une formation renforcée au sein du SSA. Les règles de droit deviendraient un référentiel commun à tous les personnels du SSA et permettraient d'une part le regroupement autour de valeurs communes et d'autre part une meilleure intégration et application du DIH. Elles façonneraient l'éthique de conviction et permettrait de mettre plus facilement en oeuvre l'éthique de responsabilité dans les situations d'urgence. Ce référentiel permettrait de résoudre plus facilement les conflits éthiques et constituerait une barrière protection face aux influences extérieures en matière d'application du DIH. En effet, un esprit de corps renforcé et l'intégration des normes du DIH permettraient de faire face aux pressions extérieures qui peuvent apparaitre en situation de conflit armé.

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? Soutenir l'action des personnels de santé en opération en matière de DIH

Le nouveau contexte opérationnel est de nature à confronter les personnels de santé à des situations d'urgence amenant des conflits d'éthique. La complexité du DIH ne doit pas être sous évaluée. La règle de droit peut être intégrée mais sa mise en oeuvre beaucoup plus problématique. La formation de DIH pourrait prendre en compte cette difficulté et préparer les personnels aux situations incertaines. Au vu de la multiplication des zones grises du droit, des malheureuses disparités dans les doctrines juridiques internationales, du stress au combat et des pressions extérieures, le poids du questionnement éthique est lourd dans les situations complexes. Il pourrait être envisageable de mettre en place des structures de soutien en opération qui soient en mesure de conseiller le commandement sur les questions de DIH regardant la santé et de répondre aux questions juridiques et éthiques de tous les personnels de santé en opération. Ceci pourrait permettre une résolution des problématiques complexes plus rapide mais aussi un appui éthique et juridique qui protégerait le moral des personnels de santé.

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Enjeux pour le SSA

Les conflits actuels génèrent des situations juridiques complexes qui, mises en perspective des contraintes opérationnelles, rendent tout particulièrement la tâche du personnel santé extrêmement difficile. Le SSA a donc le devoir de fournir les outils et de construire des fondements pour que ses personnels agissent avec la plus grande sérénité possible et en règle notamment avec le DIH. Pour atteindre cet objectif, il doit s'appuyer sur les grands axes décrits précédemment et relever huit défis majeurs. Les enjeux du SSA son donc les suivants :

? La diffusion du DIH auprès de tous les personnels du SSA quel que soit leur statut

Une diffusion adaptée du DIH est un enjeu pour le SSA car il est l'expression de l'action menée par les hommes et les femmes qui le compose. Ainsi, la communication autour du DIH devrait toucher tous les praticiens, et leurs différentes spécialités mais aussi les officiers d'administrations, les personnels paramédicaux et les personnels des armées employés par le SSA.

La diffusion du DIH devrait donc rassembler ces différents corps autour de valeurs communes mais aussi être adaptée pour correspondre aux besoins des différentes spécialités et au niveau de connaissance juridique et éthique de chacune des catégories.

La diffusion auprès des personnels paramédicaux et des personnels des armées employés par le SSA devrait être adaptée à la formation, voire à l'expérience, de combattant préalable de ces militaires. En effet, les personnels paramédicaux suivent une formation militaire initiale avec les autres sous-officiers des forces avant de rejoindre l'Ecole du Personnel Paramédical des Armées (EPPA) qui assure la formation au métier d'infirmier en milieu militaire. Les personnels des armées employés par le SSA sont essentiellement des techniciens supérieurs hospitaliers, des sous-officiers secrétaires d'administration du service de santé des armées et des engagés volontaires de l'armée de terre. Ils effectuent tous une formation initiale au sein des forces. La formation initiale au sein des forces comprend du droit des conflits armés mais les personnels sont surtout sensibilisés au métier de militaire combattant, au code du soldat. D'autre part, certains de ces engagés disposent d'une précédente expérience de combattant au sein des forces ce qui facilite l'identification des problématiques juridiques mais peut compliquer l'approche du statut de non combattant. Nombre d'entre eux peuvent donc se sentir plus militaire que soignant.

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Au contraire, les praticiens disposent d'une connaissance de l'éthique médicale qui peut faciliter l'instruction du DIH, néanmoins leur maitrise du droit des conflits armés et du contexte opérationnel est plus restreinte210.

Enfin, les officiers d'administration disposent d'une connaissance juridique qui peut faciliter la diffusion du DIH mais ils sont très peu conscients des spécificités déontologiques et éthiques relatives aux métiers de la santé. Leur formation initiale inclue du droit des conflits armés mais peu de DIH. De plus, au sein du commissariat ils pourraient être affectés en opération indifféremment sur des postes administratifs des armées, sous statut de combattant, ou du SSA, sous statut de non combattant temporaire.

? L'intégration du DIH par tous les personnels du SSA

L'intégration du DIH est primordiale au sein du SSA car elle permet de soulager les conflits éthiques et juridiques qui pèseront de plus en plus souvent sur ses personnels. L'application stricte du DIH devrait devenir un réflexe pour les personnels du Service. Ce droit devrait constituer un référentiel qui fasse partie intégrante de l'éthique de conviction et vers lequel le personnel de santé puisse se retourner automatiquement lorsqu'il doit mettre en oeuvre son éthique de responsabilité au sein d'une situation complexe.

L'application stricte du DIH permettrait ainsi d'éviter des poursuites judiciaires d'une part, et une perte de légitimité aux yeux des forces et de l'opinion publique d'autre part. Le fait de se conformer à une norme juridique qui protège les valeurs fondamentales reconnues comme universelles pourrait par ailleurs soulager le sentiment de responsabilité en cas de décisions imparfaites.

? Le regroupement autour du statut de militaire non combattant

La cohésion des personnels du SSA autour du statut de militaire non combattant est un enjeu car elle est capable de réconcilier la dualité d'éthiques des personnels du SSA et de limiter les difficultés que celle-ci peut induire dans l'application du DIH. En effet, ce statut rassemble les valeurs militaires et médicales qui font historiquement et culturellement parties du SSA. Les personnels du SSA appliqueraient les règles de DIH relatives à ce statut par réflexe et par esprit de corps en toutes circonstances.

210 Entretiens CRF, EVDG.

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? Le renforcement du lien avec les armées sur les questions de DIH

La proximité avec les armées en matière de DIH est essentielle car elle peut limiter les confusions dans l'application de ce droit par les personnels du SSA. La diffusion des règles de DIH dans les armées pourrait réduire les risques liés à d'éventuelles pressions du commandement aux niveaux stratégique, opérationnel et tactique. Au niveau stratégique le lien avec les armées permettrait de mieux anticiper et analyser les problématiques de DIH. La prise en compte du DIH par les groupes de combat favoriserait l'intégration des personnels du SSA au sein des unités de combat et permettrait l'application stricte de ce droit par l'ensemble des personnels.

? La mise en place d'un soutien juridique opérationnel

La mise en place d'un soutien juridique opérationnel est un enjeu car celui-ci permet une application stricte du DIH dans les situations complexes. Le conseiller juridique spécialisé dans le domaine du soutien santé opérationnel pourrait résoudre les conflits juridiques et éthiques et éclaircir les zones grises du droit afin de permettre une décision opérationnelle rapide. Ainsi, le SSA serait assuré d'appliquer strictement le DIH et éviterait les poursuites judiciaires mais aussi une éventuelle perte de légitimité. La responsabilité éthique des personnels de santé pourrait aussi se voire diluée, ce qui pourrait en limiter l'effet parfois traumatisant.

? L'exploitation du RETEX des situations difficiles face au DIH

Le retour d'expérience en matière de DIH est primordial car il permet au SSA de s'adapter aux différents contextes juridiques opérationnels. Il s'agit de faire face à la multiplicité des situations juridiques qui varient dans le temps, dans l'espace et selon la mission des personnels sanitaires. L'exploitation du retour d'expérience des situations juridiques complexes regardant les soins de santé pourrait améliorer l'application du DIH par les personnels du SSA en leur permettant d'anticiper les problématiques juridiques et par conséquent de s'adapter aux évolutions du contexte juridique opérationnel sur les différents théâtres d'opération.

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? Le renforcement de la proximité avec les structures civiles concernant le DIH

La collaboration avec les institutions civiles en matière de DIH présente un intérêt majeur pour le SSA car elle permet d'améliorer la connaissance juridique du Service et de renforcer la diffusion du DIH.

La proximité avec les institutions civiles pourrait permettre d'enrichir la compréhension du DIH au sein du SSA. Elles pourraient apporter une vision complémentaire à la vision militaire en matière de DIH qui permettrait de saisir l'intérêt, l'étendue et la complexité du DIH. Cette compréhension mutuelle permettrait de renforcer la coordination des soins de santé en opération en matière de DIH.

Cette coopération permettrait par ailleurs d'élargir et de renforcer la diffusion du DIH et des particularités liées au statut de non combattant au sein du SSA et dans les armées. En effet, la diffusion du DIH pourrait alors reposer sur des effectifs plus nombreux et disposant de leurs propres réseaux.

? Le positionnement du DIH lors du soutien santé de coalitions

L'intégration du DIH au sein des coalitions est un enjeu pour le SSA français car celle-ci permet d'éviter des confusions dans l'application du DIH par ses personnels et des doutes quant au bien fondé de ce droit. Le recours abusifs aux situations juridiques d'exceptions et l'ensemble des violations du DIH créent une impression de disparités dans l'application du DIH. Au sein de la communauté médicale militaire internationale, la définition stricte des situations juridiques de principe et des situations juridiques d'exception juxtaposée à la condamnation ferme des violations du DIH pourraient permettre au SSA de se positionner activement en faveur d'une application rigoureuse de ces règles. Ce positionnement pourrait ainsi limiter les doutes dans l'application du DIH par personnels du SSA. De plus, il éviterait qu'une certaine perplexité s'installe quant au bien fondé du DIH.

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Recommandations

Pour répondre aux enjeux le SSA a tout intérêt à développer les points suivants :

? une promotion du statut de militaire non combattant au sein du SSA afin de renforcer l'esprit de corps du SSA autour du DIH et de réconcilier la dualité de loyautés des personnels du SSA.

? une amélioration de la diffusion du DIH vers tous les personnels employés par le SSA. Il s'agit de démontrer l'intérêt du DIH et de diffuser les règles de DIH, notamment les spécificités du statut de non combattant, auprès de tous les personnels employés par le SSA dans une approche pragmatique et casuistique afin de répondre à leurs différents besoins. La diffusion peut s'appuyer dans ce cadre sur des partenaires externes.

? une amélioration de la diffusion du DIH auprès des armées, notamment quant aux spécificités du statut de non combattant, afin de limiter le risque de pressions du commandement et des groupes de combat sur les personnels du SSA dans l'application du DIH. Cette diffusion peut s'appuyer sur les armées, notamment les services interarmées, et sur des partenaires externes.

? une formation théorique et pratique renforcée en DIH, dans les écoles de formation initiale et continue du SSA, afin de construire une éthique de conviction solide et de former une éthique de responsabilité efficace pour chaque personnel du SSA. Il s'agit d'adopter une approche pragmatique et casuistique afin de former un savoir et un savoir être. L'approche militaire pourrait être complétée par une approche humanitaire délivrée par la Croix-Rouge Française.

? une valorisation des compétences du SSA en DIH. Il s'agit de s'appuyer sur les compétences juridiques et éthiques du SSA pour identifier, évaluer, voir anticiper les zones grises du droit propres au SSA afin de les prendre en compte dans la stratégie du service mais aussi de conseiller le commandement quant à la diffusion et à la formation en DIH.

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? l'établissement d'un soutien juridique opérationnel de proximité. Il s'agit de valoriser les compétences juridiques du SSA au niveau opérationnel afin de conseiller le commandement au regard du DIH, de diffuser les règles d'engagement opérationnel et les risques liés à l'application du DIH sur le terrain, de régler le contentieux si nécessaire, mais aussi de constituer un point de contact accessible rapidement à tous les personnels du théâtre d'opération en cas de situation complexe.

? un renforcement de l'exploitation du RETEX en matière de DIH afin d'optimiser la diffusion, la formation et la prise en compte doctrinale du DIH. Cette étude pourrait s'appuyer sur les retours d'expérience des armées nationales et étrangères. Cependant, afin de prendre en compte les problématiques de DIH liées à la spécialité médicale, le SSA pourrait développer des processus qui favorisent les comptes rendus relatifs au DIH.

? une participation à une réflexion globale sur l'adaptation du DIH au contexte opérationnel. Une approche civile et militaire, multidisciplinaire et multinationale permettrait d'enrichir les compétences du SSA en matière de DIH, de prendre en compte les évolutions du DIH au niveau stratégique et d'améliorer la coordination avec les autres acteurs des soins de santé dans les conflits armés, notamment par le témoignage des problématiques rencontrées en matière de DIH par le Service. Le SSA pourrait aussi dans ce cadre participer aux décisions relatives à l'autorisation, à l'acquisition ou à l'adoption des méthodes ou des moyens de guerre nouveaux afin d'évaluer les conséquences de ces nouvelles techniques pour l'Homme.

? une participation à la promotion des valeurs du DIH au sein de la communauté médicale militaire internationale par un positionnement en faveur d'une application stricte du DIH et la condamnation ferme des violations du DIH, au sein des organisations internationales et des institutions spécialisées internationales, permettrait de favoriser la prise en compte du DIH dans la doctrine militaire de l'OTAN et de l'UE mais aussi de réduire les disparités dans l'application du DIH au sein de la coalition.

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Fiche-Action 1: Promouvoir le statut de

militaire non combattant au sein du SSA

Contexte :

Les personnels sanitaires sont ré immergés au centre des combats et souvent isolés au sein d'unités de combattants et sous les ordres d'un commandement militaire. Afin de poursuivre sa mission de manière efficiente et de respecter le DIH, les personnels de santé doivent donc être conscients des spécificités que leur impose leur statut juridique en DIH. Or, la diversité des missions et des personnels employés par le SSA complique la diffusion du DIH à tous les personnels employés par le SSA. De plus, la dualité d'éthiques des personnels du SSA envers les armées et les professions de la santé peut rendre l'intégration et l'application du DIH difficile. En effet, La question « militaire ou soignant d'abord ? » demeure et peut parfois pousser à la schizophrénie. Certains personnels du SSA, notamment dans les jeunes générations, sont peu conscients de leur qualité de non combattant qui apparait incompatible avec le statut de militaire211. D'autre part, le SSA entreprend aujourd'hui une réorganisation large qui vise entre autre à renforcer la cohérence du Service212.

Objectifs :

- créer un véritable « esprit de corps » autour du statut de militaire non combattant ;

- faire du DIH un référentiel commun à tous les personnels employés par le SSA ;

- constituer une protection supplémentaire face aux pressions extérieures ;

- éviter des disparités dans l'application du DIH au sein du SSA.

Priorité :

- Très prioritaire

- Prioritaire - Importante

211 Entretiens CPCO, DCSSA/CCO, Etude MC Thiery.

212 Projet de Service SSA 2020.

2014

2014-2015

Mesures opérationnelles :

Action

Etat de l'action

- déterminer les valeurs militaires et soignantes du SSA

étude réalisée en mai 2014 sur la base de 586 questionnaires213.

 

- sensibiliser les personnels sur la question du port de l'emblème et inciter au port de l'emblème sauf situation d'exception

- veiller à la bonne distribution des cartes d'identité sanitaire et

expliquer leur rôle à tous les personnels, notamment au personnel non soignant.

renforcement d'action action nouvelle

 

- créer un « code du militaire de la santé » basé sur les valeurs et les règles applicables au militaire non combattant, sous un format de poche et plastifié afin que le personnel sanitaire puisse le détenir en permanence.

- délivrer ce code à tous les personnels du SSA et expliciter celui-ci dans les écoles de formation initiale et continue et lors de conférences.

action nouvelle

action nouvelle mais qui peut s'appuyer sur les conférences réalisées pour informer le personnel de santé sur le nouveau projet de service SSA 2020.

- valoriser les actions de non combattant en opération au sein des ressources humaines (chancellerie).

renforcement d'action

 

Etapes et échéanciers :

Echéances

à toutes les étapes

Etapes

- sensibiliser le personnel du SSA quant à l'emblème

- valoriser les actions de non combattant en opération, notamment les actions en

faveur du DIH

- former les personnels du SSA au statut de non combattant.

- évaluer les actions

- recenser les valeurs liées au statut de militaire non combattant - lister les dix valeurs fondamentales du militaire non combattant. - analyse des couts prévisionnels

- créer un « code du militaire de santé »

- planifier la communication

- sensibiliser les personnels du SSA à cet enjeu

- préparer les « communicants »

- coordonner la diffusion du nouveau « code du militaire de la santé » à tous les

personnels de la santé

- mettre en oeuvre les séances d'information

80

- programmer des séances d'instructions relatives au statut de militaire non combattant dans les écoles de formation initiales.

 

A partir de septembre 2015

213 Bureau Etudes et Prospective, Division Performance Synthèse, Direction Centrale du Service de Santé des Armées.

Cout estimé

A déterminer

Conditions de mise en oeuvre :

Directions régionales SSA

Directeur des Hôpitaux

d'instruction des Armées

Directeur des centres médicaux des armées

Partenaires

Pilotage

Directeur Central ; Directeur Central Adjoint ; Division Performance Synthèse (Bureau études et prospective) ; Sous direction Ressources Humaines (Chancellerie, Directeur de l'Ecole du Val de Grace ; Directeur de l'Ecole de Santé des Armées ; Directeur de l'Ecole des Personnels Paramédicaux) ; Bureau Communication ; Service de reprographie du SSA.

Budget

A déterminer

81

Evaluation et amélioration de l'action :

Nombre de lettres de félicitation et de décorations reçues pour des actions de non combattant,

des actions en faveur du DIH.

Nombre de codes délivrés et demandés.

Nombre d'heures d'instruction relative au statut de non combattant réalisé dans les écoles du

SSA.

Exploitation du retour d'expérience.

Nombre de recours judiciaires.

82

Fiche-Action 2: Diffuser le DIH à

l'ensemble des personnels du SSA

Contexte :

Les destinataires de cette diffusion sont variés puisqu'il s'agit de tous les personnels du SSA et des personnels des armées employés par le SSA. Les métiers au sein du SSA sont particulièrement divers : médecins, pharmaciens, vétérinaires, infirmiers, personnels d'administration, auxiliaires sanitaires. Et au sein de ces métiers il existe des spécialités variées qui peuvent rencontrer des problématiques de DIH particulières. Le SSA emploi par ailleurs des personnels des armées. Il ne gère directement que 52 % de ses effectifs. Les formations initiales des personnels employés par le SSA sont diverses. La majeure partie des personnels du SSA effectuent leur formation initiale à l'Ecole de Santé des Armées, ils sont alors sensibilisés à l'éthique médicale mais peu au DIH. D'autres effectuent leur formation initiale au sein des armées dans un cadre plus tourné vers l'apprentissage du métier de militaire combattant, mais qui enseigne le droit des conflits armés214. Les personnels employés par le SSA développent donc des sensibilités différentes à l'égard du DIH. Cependant, tous les personnels effectuent une formation d'application dans une école du SSA.

Objectifs :

- démontrer l'intérêt du DIH ;

- développer une communication générale commune à tous les personnels employés par

le SSA ;

- développer une communication adaptée aux différentes spécialités et niveaux de

connaissances du DIH, basée sur une approche pragmatique et casuistique ;

- faire du DIH un référentiel commun à tous les personnels employés par le SSA ;

- susciter une cohésion et une adhésion aux valeurs du DIH qui constituent une protection

supplémentaire face aux pressions extérieures ;

- éviter des disparités dans l'application du DIH au sein du SSA.

214 Cf. Toutes les Ecoles d'officiers des Armées, l'Ecole nationale des sous officiers d'actives, et les formations générales de l'Armée de Terre prévoient des modules obligatoires de droit des conflits armés. Entretien SGA, CRF.

83

Priorité :

- Très prioritaire

- Prioritaire - Importante

Mesures opérationnelles :

Action

Etat de l'action

- identifier des partenaires internes et externes

- mettre en place des coopérations en matière de diffusion du DIH (Croix-Rouge Française (CRF), Secrétariat Général pour l'Administration (SGA), Service du Commissariat des Armées (SCA)215).

renforcement d'action renforcement d'action

 

- mettre en place des supports de communication généraux : code du militaire de la santé, guide de bonnes pratiques en DIH, renforcer les aspects relatifs au DIH dans le manuel de droit des conflits armés édité par le SGA.

- mettre en place des supports de communication adaptés : un logiciel d'instruction avec les différentes problématiques et différents niveaux sur la base de celui développé par le SGA en droit des conflits armés, comprenant des spécialités pour l'Armée de l'Air et la Marine Nationale216.

action nouvelle

action nouvelle

- mettre en place des supports de communication adaptés : participation au programme de simulation éthique et juridique développé par une organisation canadienne pour les services de santé des armées en anglais et en français217.

- participation des écoles d'officiers du SSA à la « journée de promotion du droit international humanitaire » organisées chaque année par la CRF, voir devenir partenaire de cet événement qui propose à toutes les grandes écoles françaises au cours d'une journée consacrée au DIH un quizz et un procès simulé.

action nouvelle

renforcement d'action (participation de 4 élèves du corps technique et administratifs du SSA en 2013 pour la première fois)

- diffuser les supports de communication du DIH dans les écoles de formation initiale et continue du SSA ; les CMA.

action nouvelle

215 Entretien SGA, CRF.

216 Cf. le modèle développé pour les armées par le SGA en droit des conflits armés. Entretien SGA.

217 Programme «Ethics in Military Medecine Research Group» (EMMRG). Dr Ali Okhowat, ICRC.

Cout estimé

A déterminer

Etapes et échéanciers :

Etapes

Echéances

- évaluation de l'action

- analyse des couts prévisionnels

- renforcer la proximité avec le SGA, le SCA et la CRF en matière de diffusion du DIH - participation des écoles du SSA à la journée de promotion du droit humanitaire

à toutes les étapes

2014-2015 218

 

- renforcer et mettre en place des supports de communication généraux

- mettre en place des supports de communication adaptés - diffuser les supports de communication

2015

2015-2016

Conditions de mise en oeuvre :

Pilotage

Directeur central ; Directeur central adjoint ; Sous direction ressources humaines (Directeur de l'Ecole du Val de Grâce ; Directeur de l'Ecole de Santé des Armées ; Directeur de l'Ecole des Personnels Paramédicaux) ; Sous direction appui à l'activité (bureau des affaires juridiques) ; Division performance synthèse (bureau études et prospective).

Partenaires

SGA SCA CRF

Budget

A déterminer

Evaluation et amélioration de l'action :

Nombre de logiciels distribués.

Participation et évolution des résultats obtenus à la « journée de promotion du DIH ».

Exploitation du retour d'expérience.

Nombre de recours judiciaires.

84

218 seconde participation de l'Ecole du Val de Grace prévue en 2014, entretiens CRF et Division de la formation initiale et spécialisée (DFIS)/Ecole du Val de Grâce.

85

Fiche-Action 3: Diffuser le DIH dans les

armées

Contexte :

Au sein des nouveaux conflits le SSA est de plus en plus replongé au centre des combats et immergés dans un monde de combattants. Sous commandement militaire, il peut ainsi subir des pressions du commandement ou du groupe de combat avec lesquels il noue une cohésion forte. Sous l'effet de la guerre, ces pressions peuvent nuire à la bonne application du DIH. Au vu des évolutions techniques et opérationnelles, la doctrine interarmées et les actions civilo-militaires doivent être vigilantes quant à la prise en compte du facteur humain et du DIH au sein des nouveaux conflits.

Objectifs :

- diffuser le DIH dans les armées aux niveaux stratégique, opérationnel et tactique ;

- mieux prendre en compte les spécificités du SSA dans la doctrine interarmées ;

- faciliter l'intégration des personnels du SSA dans les milieux de combattants ;

- limiter les pressions externes et la confusion dans l'application du DIH par les personnels du

SSA ;

- renforcer l'évaluation des impacts des nouveaux modes et moyens de la guerre sur l'Homme.

Priorité :

- Très prioritaire

- Prioritaire - Importante

86

Mesures opérationnelles :

Action

Etat de l'action

- identifier des partenaires internes et externes.

- mettre en place des coopérations en matière de diffusion du DIH dans les armées SGA, SCA, CRF219.

renforcement d'action renforcement d'action

- renforcer les aspects de DIH dans le manuel de droit des conflits armés du SGA.

- rajouter un volet DIH sur le logiciel d'instruction de droit des conflits armés du SGA sur la base des volets développés en droit international maritime et en droit international aérien220.

renforcement d'action action nouvelle

- mettre en place des séances d'informations dans les écoles des armées.

- coopérer avec les armées pour continuer d'intégrer le DIH dans la doctrine interarmées en prenant plus en compte les éventuelles zones grises du droit et les risques pour l'application du DIH par les personnels de santé (Centre interarmées de concepts, de doctrine et d'expérimentation- CICDE, les états-majors des armées).

action nouvelle renforcement d'action

 

- profiter des exercices militaires opérationnels pour évaluer la coopération des armées et du SSA en matière de DIH (exercices régimentaires, exercices brigades, préparation avant projection).

- développer une réflexion commune sur les problématiques de DIH (pôle éthique et environnement juridique du Centre de Recherche des Ecoles de Saint-Cyr Coetquidan, division juridique de la direction générale de l'enseignement et de la recherche des écoles de Saint-Cyr Coetquidan, CICDE, SGA, SCA)

action nouvelle

action nouvelle (fiche-action 8)

 

Etapes et échéanciers :

Etapes

Echéances

- évaluation de l'action

- développer une réflexion commune en matière de DIH

- renforcer la proximité avec le SGA, le SCA, les armées et la CRF en matière de

diffusion du DIH dans les armées

- renforcer la proximité avec le CICDE et les états-majors en matière de prise en

compte du DIH dans la doctrine

- analyse des couts prévisionnels

à toutes les étapes

2014-2015

 

- développer l'aspect DIH dans les supports de droit des conflits armés du SGA en partenariat avec celui-ci

- mettre en place des séances d'informations dans les écoles des armées (en partenariat avec la CRF)

- se positionner au sein des études stratégiques et juridiques précédant les autorisations d'utilisation de nouveaux moyens ou méthodes de guerre

- évaluer la coopération des armées et du SSA en matière de DIH au sein d'exercices

2015

2015-2016

219 Entretien SGA, CRF.

220 Cf. le modèle développé pour les armées par le SGA en droit des conflits armés. Entretien SGA.

Cout estimé

A déterminer

Conditions de mise en oeuvre :

SGA SCA CRF CICDE

Centre de Recherche des Ecoles de Saint-Cyr Coetquidan

Direction Générale de l'enseignement et de la recherche des écoles de Saint-Cyr Coetquidan.

Budgetjbj Partenaires

Pilotage

Directeur central ; Directeur central adjoint ; Sous direction ressources humaines (Directeur de l'Ecole du Val de Grace ; Directeur de l'Ecole de Santé des Armées ; Directeur de l'Ecole des Personnels Paramédicaux) ; Sous direction Appui à l'Activité (Bureau des Affaires Juridiques) ; Sous direction plan-capacité (bureau cohérence capacitaire organisationnelle, état-major opérationnel santé) ; Division Performance Synthèse (Bureau étude et prospectives).

Budget

A déterminer

87

Evaluation et amélioration de l'action :

Nombre de logiciels distribués.

Analyse de la doctrine interarmées, des modules de droit des conflits armés délivrés dans les

écoles des armées.

Exploitation du retour d'expérience.

Nombre de recours judiciaires.

88

Fiche-Action 4: Etablir une formation

renforcée en DIH

Contexte :

Au sein des nouveaux conflits le SSA sera plus souvent confronté à des problématiques de DIH. Le DIH devrait donc devenir un référentiel et l'application du DIH un réflexe. Au sein des situations complexes, les personnels du SSA devraient être en mesure de donner une considération particulière aux valeurs fondamentales défendues par le DIH au sein de leur questionnement éthique. Le personnel du SSA devrait être préparé à faire face à des difficultés dans l'application du DIH en opération et à coopérer avec des institutions militaires et civiles qui peuvent appliquer le DIH avec des doctrines différentes. Néanmoins, la diversité des profils des personnels et des missions du SSA devraient être prises en compte au sein d'une formation initiale et d'une formation continue casuistiques et pragmatiques. La formation continue devrait permettre aux personnels du SSA de s'adapter aux différents cadres juridiques et à leurs évolutions dans le temps et dans l'espace. La préparation opérationnelle avant projection pourrait comprendre une analyse du cadre juridique opérationnel pour tous les personnels projetés.

Objectifs :

- définir les situations juridiques de principe et les situations juridiques d'exception au sein d'un cadre stricte ;

- délivrer un savoir, et faire du DIH un référentiel commun à tous les personnels du SSA ;

- délivrer un savoir être qui permettent de prendre en compte le DIH dans les situations complexes ;

- répondre aux besoins des différentes spécialités et missions en matière de DIH ;

- permettre aux personnels du SSA projetés de mieux comprendre leur environnement juridique.

renforcement d'action (supports pédagogiques existants et

cours d'éthique médicale, de déontologie et d'introduction au DIH en place, ESA, EPPA, EVDG.)

renforcement d'action (EVDG : une conférence en 2014 ; ESA : une conférence en 2014)

renforcement d'action

action nouvelle

renforcement d'action (EVDG : 4 OCTA « Journée DIH » et 3 OCTA à la

« compétition internationale de DIH »).

action nouvelle

Priorité :

- Très prioritaire

- Prioritaire - Importante

Mesures opérationnelles :

Action

Etat de l'action

- identifier des partenaires internes et externes

- mettre en place des coopérations en matière de formation du DIH dans le SSA (SGA, CRF221).

renforcement d'action renforcement d'action

 

- mettre en place des modules de DIH renforcés au sein de la formation initiale.

- mettre en place des modules avec la CRF qui apporteraient une vision complémentaire du DIH

- mettre en place des modules renforcés de rappel des règles de DIH pendant les périodes de formation continue, notamment lors de la préparation avant projection pour tous les théâtres d'opération et tous les personnels.

- mettre en place des modules de DIH au sein des périodes d'aguerrissement (Exercices Cashirmex, préparation avant projection), ces modules pratiques seraient multidisciplinaires et pourraient inclure des partenaires extérieurs : CRF et programmes d'instruction multinationaux (question abordée lors du Comité International de Médecine Militaire, 2014).

- participation des écoles de formation initiale à des événements nationaux et internationaux relatifs au DIH afin de mieux faire comprendre aux élèves les enjeux du DIH. La « journée du DIH (CRF) ouverte à tous les officiers du SSA et la « compétition internationale de droit international humanitaire » (Institut international de droit humanitaire de San Remo- IIDH) ouverte aux officiers spécialisés en droit.

- s'appuyer sur la simulation (programme canadien EMMRG en cours de développement222)

89

221 Entretien SGA, CRF.

222 Programme «Ethics in Military Medecine Research Group» (EMMRG). Dr Ali Okhowat, ICRC.

90

Etapes et échéanciers :

Etapes

Echéances

- évaluation de l'action

- analyser en détails les programmes par spécialité pour permettre de placer des modules de DIH supplémentaires.

- analyse des couts prévisionnels

- développer un partenariat avec la CRF et le SGA en matière de formation théorique. - renforcer la participation des écoles aux événements nationaux et internationaux de DIH.

à toutes les étapes

2014-2015

- mettre en place des modules théoriques de DIH supplémentaires dans la formation initiale et la formation continue.

- réflexion sur la mise en place de modules pratiques de DIH. Participation possible de la CRF223. , voire des autres services de santé de la coalition lors d'exercices communs (Allemagne, Royaume-Uni).

- mise en place de modules pratiques en DIH, aguerrissement

- utilisation de la simulation

2015

2015-2016

Conditions de mise en oeuvre :

Pilotage

Partenaires

Budget

Cout estimé

Directeur central ; Directeur central adjoint ;

SGA

A déterminer

A déterminer

Sous direction appui à l'activité (bureau des

CRF

 

(intervention

affaires juridiques) ; Sous direction ressources

IIDH

 

gratuite de la

humaine (Directeur de l'Ecole du Val de Grace - DPMO ; Directeur de l'Ecole de Santé des

Programme multinationaux

 

CRF)

Armées ; Directeur de l'Ecole des Personnels

(Armée Canadienne)

 
 

Paramédicaux des Armées) ; Sous direction plan capacité (bureau coopération internationale) ; Division performance synthèse (bureau études et prospective).

 
 
 

Evaluation et amélioration de l'action :

Evaluation des élèves.

Analyse de la maitrise du DIH dans les situations complexes lors des préparations avant

projection.

Exploitation du retour d'expérience.

Nombre de recours judiciaires.

223 Entretien CRF.

91

Fiche-Action 5: Valoriser les compétences

du SSA en DIH

Contexte :

L'évolution de la guerre et la progression lente du DIH font apparaitre des zones grises du droit au sein des conflits armés. Le comportement de l'adversaire évolue vite et s'adapte sur chaque théâtre d'opération. Ainsi, les situations juridiques évoluent de manière continue selon une variable spatio-temporel. Le SSA dispose de deux spécialistes du DIH mais ceux-ci occupent des postes qui ne leur permettent pas de consacrer du temps à la matière. Le bureau des affaires juridiques de la direction centrale des armées comprend des spécialistes du droit et de la déontologie médicale mais ces personnels ne sont pas spécialisés en DIH. Les officiers du corps technique et administratif, dont sont issus la plupart des juristes du SSA, sont appelés à rejoindre le Corps du Commissariat des Armées (SCA) entre septembre 2014 et septembre 2016. Le SCA forme les conseillers juridiques opérationnels des armées. Au vu de la complexification juridique des théâtres, celui cherche actuellement à recruter plus de juristes opérationnels. Ces conseillers juridiques spécialisés sont formés pour conseiller le commandement en matière de diffusion, de formation et d'application droit des conflits armés, et pour régler les contentieux éventuels. Dans un contexte global de réduction des effectifs, ces conseillers juridiques ne sont pas exclusivement dédiés au droit des conflits armés et peuvent assumer d'autres fonctions.

Objectifs :

- Identifier des spécialistes du DIH en mesure de porter le DIH aux niveaux stratégiques,

organisationnel et tactique.

- Assurer un conseil au commandement en matière de DIH.

- Renforcer l'analyse de la situation juridique opérationnelle.

- Initier, mettre en oeuvre, coordonner et évaluer la dynamique de DIH au sein du SSA.

- Représenter le SSA au sein des institutions nationales et internationales, militaires et

civiles, spécialisées en DIH.

Priorité :

- Très prioritaire

- Prioritaire - Importante

Mesures opérationnelles :

Action

Etat de l'action

- identifier des spécialistes du DIH à différents niveaux de responsabilité (poste stratégique (division performance synthèse), organisationnel (bureau des affaires juridiques) et des relais au niveau tactique (disposant d'une formation plus succincte).

Tout comme dans le SCA, le spécialiste en DIH ne serait pas entièrement dédié au DIH. Il pourrait assumer d'autres fonctions.

action nouvelle

 

- mettre en place un partenariat avec le SCA en matière de formation en droit des conflits armés (formation en 3 cercles d'expertise)

- prévoir une spécialisation des conseillers juridiques opérationnels du SSA en DIH (partenariat avec la CRF, l'Institut international de droit humanitaire de San Remo - IIDH, le Comité international de médecine militaire - CIMM). La formation de conseiller juridique du SCA repose sur des stages par milieu d'emploi (plus le conseiller est expert plus il sera polyvalent).

renforcement d'action (première formation assurée pour les élèves commissaires SSA en formation initiale)

action nouvelle

92

- permettre l'identification de ces spécialistes au sein de tous le SSA

- identification de ces spécialistes par les armées, les institutions civiles spécialisées, les organisations internationales et les institutions internationales spécialisées (par une participation aux congrès, conférences et séminaires relatifs au DIH)

renforcement d'action renforcement d'action

 

- analyser la situation actuelle du DIH (analyse des retex)

- renforcer la prise en compte stratégique du DIH et coordination de la dynamique de DIH au sein du SSA

renforcement d'action renforcement d'action

 

- élaborer un programme de formation en DIH

action nouvelle (fiche-action 4)

 

- porter les valeurs du DIH et de l'opinio furis français au sein de la communauté médicale internationale

- soutenir le SSA en opération

action nouvelle (fiche action 6)

action nouvelle (fiche-action 9)

 

Etapes et échéanciers :

Echéances

à toutes les étapes

Etapes

- évaluation de l'action

- porter les valeurs du DIH dans le SSA et à l'extérieur - analyser les retours d'expérience en matière de DIH - conseiller le commandement en matière de DIH

93

- identifier les spécialistes au sein du SSA

- mettre en place un partenariat en la matière avec le SCA

- analyse de couts

- assurer des formations de spécialisation avec le SCA

- mettre en place une spécialisation renforcée en DIH

- développer une coopération avec les institutions et organismes spécialisés

- renforcer la diffusion du DIH au sein du SSA

- mettre en place un soutien juridique en opération

- mettre en oeuvre un nouveau programme de formation en DIH

2014-2015

2015

2015-2016

Conditions de mise en oeuvre :

Pilotage

Partenaires

Budget

Cout estimé

Directeur central ; Directeur central adjoint ;

SGA

A déterminer

A déterminer

Sous direction ressources humaines (bureau ressources humaines, bureau mise en formation, Directeur de l'Ecole du Val de

SCA CRF IIDH

 
 

Grace ; Directeur de l'Ecole de Santé des

CIMM

 
 

Armées ; Directeur de l'Ecole des Personnels

 
 
 

Paramédicaux) ; Sous direction appui à l'activité (bureau des affaires juridiques) ;

 
 
 

Division performance synthèse (bureau études et prospective).

 
 
 

Evaluation et amélioration de l'action : Formations de spécialisation réalisées. Exploitation du retour d'expérience. Nombre de recours judiciaires.

94

Fiche-Action 6: Mettre en place un soutien

juridique opérationnel

Contexte :

La situation juridique opérationnelle varie selon les théâtres, les phases de conflits et la volonté de l'adversaire. Le DIH est donc difficile à mettre en application et les personnels du SSA peuvent être confrontés à des zones grises du droit ou des vides juridiques. L'identification des problématiques juridiques par les personnels de santé peut être malaisée. Si tous observent des difficultés, ils peuvent les lier à l'éthique plus qu'au droit. Par conséquent, le retour d'expérience du SSA est pauvre concernant le DIH. Le droit peut cependant aider dans la résolution des conflits éthiques. Dans les situations complexes d'urgence le choix éthique fait intervenir une lourde responsabilité qui ne peut pas toujours être partagée, notamment par manque de compagnonnage. En cas de doute relatif à l'application du DIH, le personnel de santé peut se tourner vers le directeur santé du théâtre d'opération qui a reçu une instruction relative au DIH lors de sa préparation avant projection. Si la situation est complexe le directeur santé peut se tourner vers les conseillers juridiques des armées présents. Ces conseillers sont placés dans les états-majors sur des postes interarmées. Néanmoins, ces personnels sont très peu formés au DIH applicable au personnel sanitaire et ne maitrise pas l'éthique médicale. Ainsi les problématiques juridiques peuvent parfois être renvoyées à Paris, à l'état-major opérationnel santé ou la direction centrale du SSA. La procédure est peu cadrée et peut apparaitre longue et inefficace en situation opérationnelle.

La mise en place d'un soutien juridique opérationnel du SSA spécialisé en DIH pourrait donc être nécessaire. Certaines phases du conflit demandent une attention juridique particulière pour le SSA: l'ouverture de théâtre, la phase de stabilisation et la phase post-conflit. En effet celles-ci sont sensibles et demandent une analyse du cadre juridique des soins de santé particulière. On pourrait donc disposer de personnels spécialisés en DIH, formés par le SCA, projetables au sein des états-majors sur des postes interarmées, lors des phases de stabilisation et des phases post-conflit qui sont particulièrement tournées vers le SSA ainsi qu'aux différents échelons (rôles 1,2,3) selon les besoins des personnels.

95

Objectifs :

- Assurer un conseil au commandement opérationnel en matière de DIH.

- Analyser la situation juridique opérationnelle et procéder au retour d'information afin

d'améliorer la connaissance, la prise en compte, la diffusion et la formation du DIH.

- Constituer des relais de diffusion du DIH, et du droit en général, en opération.

- Mettre en place des points de contact extérieurs à l'équipe médicale concernant les

questions éthiques.

- Répondre aux situations complexes d'urgence.

- Coordonner les soins de santé avec les différents partenaires sur place au niveau

juridique.

- Régler les contentieux éventuels.

Priorité :

- Très prioritaire

- Prioritaire - Importante

Mesures opérationnelles :

Action

Etat de l'action

- identifier des spécialistes du DIH au sein du SSA

- mettre en place un partenariat avec le SCA en matière de formation en droit des conflits armés

action nouvelle (fiche-action 5) renforcement d'action (fiche-action 5)

(première formation assurée pour les élèves commissaires SSA en formation initiale)

 

- prévoir une spécialisation des conseillers juridiques opérationnels du SSA en DIH (partenariat avec la Croix-Rouge française, l'Institut international de droit humanitaire, le Comité international de médecine militaire).

renforcement d'action (fiche action 5)

 

- collaborer avec le SCA en matière de projection de conseillers juridiques spécialisés en DIH.

- identifier les besoins en conseillers juridiques en fonction des conflits et des missions

action nouvelle action nouvelle

- établir une procédure de soutien juridique encadrée depuis le rôle 1 jusqu'au rôle 4.

- mettre en place une veille en matière de DIH (spécialiste joignable en tout temps, responsable de l'analyse des Retex en matière de DIH)

renforcement d'action action nouvelle

 

- Projeter des conseillers juridiques du SSA en opération en fonction des besoins

action nouvelle

Etapes et échéanciers :

Etapes

Echéances

- évaluation de l'action

- analyser les retours d'expérience en matière de DIH

- identifier les spécialistes au sein du SSA

- analyse de couts

- mettre en place un partenariat en matière de formation spécialisée avec le SCA

- assurer des formations de spécialisation en droit des conflits armés avec le

SCA

- assurer des formations de spécialisation en DIH SSA avec le CIMM et l'IDHL

à toutes les étapes

2014-2015

 

- mettre en place une coopération avec le SCA quant à la projection des conseillers juridiques spécialisés en DIH (prendre exemple sur l'Armée de l'Air) - identifier une chaine de soutien juridique opérationnel

- mettre en place une veille en matière de DIH

- mettre en place un soutien juridique en opération

2015

 

Conditions de mise en oeuvre :

Pilotage

Directeur central ; Directeur central adjoint ; Sous direction ressources humaines (bureau ressources humaines, bureau mise en formation), Sous direction plan capacité (bureau cohérence capacitaire opérationnelle, EMO-S) ; Sous direction appui à

l'activité (bureau des affaires juridiques) ; Division performance synthèse (bureau études et prospective).

Partenaires

SGA SCA CRF IIDH CIMM

Budget

A déterminer avec le SCA

Cout estimé

A déterminer avec le SCA

96

Evaluation et amélioration de l'action : Formations de spécialisation réalisées. Exploitation du retour d'expérience. Nombre de recours judiciaires.

97

Fiche-Action 7: Renforcer l'exploitation du

RETEX en matière de DIH

Contexte :

La situation juridique est différente sur chaque théâtre d'opération et évolue dans le temps. Afin d'optimiser la diffusion, la formation et la prise en compte doctrinale du DIH, le SSA pourrait renforcer l'exploitation du retour d'expérience.

Les retours d'information du SSA rendent peu compte des problématiques de DIH car celles-ci ne sont pas identifiées en tant que telles par les personnels du SSA, elles présentent un caractère confidentiel et les procédures en place dans le SSA ne favorisent pas leur communication.

Le SSA pourrait s'appuyer sur les retours d'expérience des armées nationales et étrangères, plus important.

Cependant, afin de prendre en compte les problématiques de DIH liées à la spécialité médicale, le SSA pourrait développer des processus qui favorisent les comptes rendus relatifs au DIH en s'appuyant sur les modèles développés dans les armées. La formation de DIH pourrait aussi comporter une instruction relative au compte-rendu en matière de DIH, notamment lors de la préparation avant projection.

Objectifs :

- Assurer une application stricte du DIH en fonction du cadre juridique.

- Eclaircir les zones grises du droit.

- Améliorer la diffusion et la formation du DIH.

- Anticiper les problématiques juridiques à venir.

Priorité :

- Très prioritaire

- Prioritaire - Importante

Mesures opérationnelles :

Action

- réaliser une étude approfondie des problématiques concernant le retour d'expérience en DIH au sein du SSA

Etat de l'action

action nouvelle (fiche-action 5)

Cout estimé

98

- coopérer avec les armées en matière de retour d'informations relatives au DIH, notamment avec le SGA

- coopérer avec les armées étrangères, les organisations internationales et les institutions spécialisées en matière de retour d'informations relatives au DIH

renforcement d'action renforcement d'action

- réaliser des instructions concernant le RETEX en matière de DIH au sein du SSA

- favoriser le RETEX par l'intermédiaire des conseillers juridiques en opération

- renforcer la procédure de retour d'expérience en matière de DIH au sein du SSA

renforcement d'action action nouvelle action nouvelle

Etapes et échéanciers :

Etapes

Echéances

- évaluation de l'action

- coopérer avec les armées françaises et étrangères en matière de RETEX

- identification des besoins pour optimiser le RETEX

- analyse des couts

- identifier des responsables spécialisés en matière d'exploitation du RETEX en

DIH

- mettre en place un partenariat en matière de RETEX avec le SGA

- participer aux conférences et séminaires organisés par le CIMM et l'IDHL

à toutes les étapes

2014-2015

 

- mettre en place une instruction relative au compte rendu en matière de DIH lors de la préparation avant projection.

- mettre en place un soutien juridique en opération

- compléter la procédure de RETEX si besoin

2015

 

Conditions de mise en oeuvre :

SGA IIDH CIMM

Etat-major opérationnel

Centre de planification et conduite des opérations - CPCO

Centre Interarmées de Concepts, de Doctrines et d'Expérimentations - CICDE

Partenaires

Pilotage

Directeur central ; Directeur central adjoint ; Sous direction ressources humaines (Directeur de l'Ecole du Val de Grace - DPMO), Sous direction appui à l'activité (bureau des affaires juridiques); Sous direction plan capacité (EMO-S) ; Division performance synthèse (bureau études et prospective) ; ;

Budget

A déterminer A déterminer

99

Evaluation et amélioration de l'action :

Qualité du retour d'expérience en matière de DIH (comparatif avec celui des armées).

100

Fiche-Action 8: Participer à une réflexion

globale sur l'adaptation du DIH au contexte

opérationnel

Contexte :

Au sein de l'approche globale des conflits, l'application du DIH par le SSA dépend de nombreux acteurs : la force interarmées et multinationale, les institutions politiques, économiques, humanitaires et médicales. Les valeurs défendues par le DIH concernent de multiples disciplines qui s'étayent mutuellement en vu de protéger les souffrances de l'Homme dans la guerre : la philosophie, l'éthique, la diplomatie, la stratégie militaire, la médecine. Pour ces raisons, l'approche du DIH doit être systémique.

Le SSA pourrait participer à une réflexion globale sur l'adaptation du DIH au contexte opérationnel. Une approche civile et militaire, multidisciplinaire et multinationale présenterait de nombreux avantages pour le SSA.

Objectifs :

- Enrichir la connaissance de DIH du SSA en découvrant des points de vu

complémentaires.

- Anticiper les évolutions du DIH.

- Améliorer la coordination avec les autres acteurs des soins de santé en opération.

- Améliorer le RETEX.

- Porter les valeurs du DIH, l'opinio juris française et l'éthique médicale militaire auprès de

collaborateurs civils et militaires.

- Participer à des analyses stratégiques interarmées, notamment en matière d'armement.

Priorité :

- Très prioritaire - Prioritaire

- Importante

Mesures opérationnelles :

Action

Etat de l'action

- identifier les institutions spécialisées

- coopérer avec les organisations internationales en matière de DIH

renforcement d'action action nouvelle

- coopérer avec les organisations humanitaires en matière de DIH (CRF)

- coopérer avec les armées en matière de DIH (Centre de recherche et de formation des Ecoles de Saint Cyr Coetquidan, SGA, CICDE)

renforcement d'action action nouvelle

 

- coopérer avec les institutions spécialisées en matière de DIH (CIMM, IDHL)

- Porter le DIH au sein des coopérations bilatérales du SSA (Groupe franco allemand de coopération militaire, coopération franco britannique)

renforcement d'action action nouvelle

 

Etapes et échéanciers :

Echéances

à toutes les étapes

Etapes

- évaluation de l'action

- rendre compte des évolutions du DIH au commandement

- porter les valeurs du DIH, l'opinio furis française et l'éthique médicale militaire

Cout estimé

A déterminer

- Analyse de couts, déterminer un budget alloué

- Renforcer la coopération avec les institutions spécialisées et la CRF

- mettre en place des coopérations avec les armées

- renforcer les partenariats en matière de DIH avec les armées étrangères et les

organisations internationales

2014-2015

2015

 

Conditions de mise en oeuvre :

Pilotage

Directeur central ; Directeur central Adjoint ; Sous direction ressources humaines (bureau mise en formation), Sous direction appui à l'activité (bureau des affaires juridiques) ; Sous direction plan capacité (bureau coopération internationale) ; Division performance synthèse (bureau études et prospective).

Partenaires

SGA

SCA

CRF

Ecoles de Saint Cyr

Coetquidan

CICDE

IIDH

CIMM

Budget

A déterminer

101

Evaluation et amélioration de l'action :

Retour d'expérience.

Evolution des réflexions relatives au DIH (rapports, articles, études).

102

Fiche-Action 9: Porter les valeurs du DIH

au sein de la communauté médicale

militaire

Contexte :

Le SSA évolue souvent dans un cadre multinational. Les alliés de la France ont ratifié les conventions de Genève. Certains alliés semblent néanmoins adopter une position ambigüe à l'égard du droit. Les disparités dans l'application du DIH sont de nature à délégitimer l'action de la coalition mais aussi à troubler les personnels du SSA dans leur application du DIH et à les faire douter du bien fondé de celui-ci.

Objectifs :

- adopter une position active pour promouvoir une application stricte du DIH

- condamner fermement les infractions au DIH

- favoriser la prise en compte du DIH dans la doctrine militaire de l'OTAN et de l'UE

- réduire les disparités dans l'application du DIH au sein de la coalition

Priorité :

- Très prioritaire - Prioritaire

- Importante

Mesures opérationnelles :

Action

Etat de l'action

- participer aux séminaires, conférences et congrès organisés par

l'OTAN et l'Union Européenne (UE)

- participer aux séminaires, conférences et congrès organisés par les

institutions spécialisées (CIMM, IIDH)

renforcement d'action renforcement d'action

 

- développer des partenariats avec les armées étrangères en matière de DIH

- s'appuyer sur les représentants du SSA français à l'OTAN pour promouvoir la prise en compte du DIH au sein de la doctrine de l'OTAN (La France préside depuis novembre 2012 le comité des chefs de service de santé militaire de l'OTAN pour un mandat de 3 ans, et dispose de plusieurs postes au sein de l'organisation.)

action nouvelle action nouvelle

 

- s'appuyer sur les représentants du SSA français au sein de l'UE pour promouvoir la prise en compte du DIH au sein de la doctrine militaire de l'UE.

- implanter un conseiller juridique du SSA au sein des 58 postes

juridiques de l'OTAN (en partenariat avec le SCA) et au sein de la politique de sécurité et de défense commune de l'UE

action nouvelle action nouvelle

 

- mettre en place des conseillers juridiques opérationnels

action nouvelle

 

Etapes et échéanciers :

Echéances

à toutes les étapes

Etapes

- évaluation de l'action

- porter les valeurs du DIH au sein des organisations internationales par l'intermédiaire de nos représentants pour renforcer sa prise en compte dans la doctrine de l'OTAN et de l'UE

103

- analyse des couts

- participer aux conférences et séminaires organisés par l'OTAN, l'UE, le CIMM et l'IIDH

2014-2015

- mettre en place un soutien juridique en opération

- implanter des conseillers juridiques spécialisés en DIH au sein des organisations internationales (sur les postes réservés au SCA).

2015

2016

 

Conditions de mise en oeuvre :

Pilotage

Partenaires

Budget

Cout estimé

Directeur central ; Directeur central adjoint ; Sous direction ressources humaines (bureau mise en formation), Sous direction appui à l'activité (bureau des affaires juridiques) ; Sous division plan capacité (bureau coopération internationale) ; Division performance synthèse (bureau études et prospective)

SGA SCA OTAN UE IIDH CIMM

A déterminer

A déterminer

 
 
 

Evaluation et amélioration de l'action :

Evolution des réflexions relatives au DIH (rapports, articles, études). Retour d'expérience.

104

Annexe 1: La justice pénale internationale

Le refus d'impunité a conduit la société internationale à mettre en place un arsenal juridique pour protéger les victimes de la guerre capable de juger les Etats et les individus.

? La compétence des juridictions pénales internationales pour juger les crimes de

guerre

La Cour internationale de justice, instituée par l'article 92 de la charte des nations Unies, connait des atteintes au DIH des Etats224. Mais la mise en cause de la responsabilité personnelle des individus n'est apparue qu'en 1945 avec la mise en place du Tribunal international militaire de Nuremberg225. Il fallut ensuite attendre la fin de la guerre froide pour redonner une dynamique à la création de juridictions pénales internationales. On a alors mis en place des tribunaux pénaux ad `hoc qui exercent des compétences matérielle, temporelle et territoriale précises définies dans leurs statuts pour juger les responsables des infractions graves au DIH226. Puis les juridictions mixtes apparaissent227. Elles sont créées par un accord bilatéral entre l'ONU et l'Etat concerné. La chambre est composée de magistrats nationaux et internationaux et elle siège dans ledit Etat. Le 17 juillet 1998 le traité de Rome crée la Cour Pénale Internationale (CPI) entrée en vigueur en 2002. Au 1er mai 2014, sur 193 Etats 139 l'ont ratifié228. Cette cour peut être saisie par le Conseil de Sécurité, par un Etat membre ou par le procureur proprio mutu. Elle est compétente concernant les violations du DIH commise par un national d'un Etat membre ou sur le territoire d'un Etat membre. Elle ne peut exercer sa compétence que lorsque les juridictions internationales n'ont pas la volonté ou la compétence pour juger de tels crimes229.

224 Avant, la CIJ, le Traité de Versailles (1919) avait déjà institué la Cour Permanent de Justice avec la même compétence.

225 Le tribunal militaire international de Nuremberg siège du 20 novembre 1945 au 01 octobre 1946.

226 Conseil de Sécurité, résolution 827 du 25 mai 1993 : le TPIY est destiné à juger les personnes présumées coupables de violations graves du DIH commises sur le territoire de l'ex-Yougoslavie depuis 1991 (statut du TPIY articles 2 à 5). Conseil de sécurité, résolution 955 du 8 novembre 1994 : le TPIR est destiné à juger les personnes ; responsables d'actes de génocide et d'autres violations grave du DIH commis sur le territoire du Rwanda, ou par des citoyens rwandais sur le territoire d'Etats voisins entre le 1er janvier et le 31 décembre 1994.

227 Chambres extraordinaires chargées de la poursuite des crimes commis par les Khmers rouges au Cambodge entre 1975 et 1979 (2003), Tribunal spécial pour la Sierra Leone (2000), Chambres spéciales du Timor Leste (2000), Chambre pour les crimes de guerre en Bosnie-Herzégovine (2004), le Tribunal spécial irakien (2003). 228Coalition pour la CPI, 2014, www.iccnow.org

229 Bourdon W., Duverger E., La Cour Pénale Internationale. Le Statut de Rome, Seuil, 2000- Delmas-Marty M., La cour pénale internationale et les interactions entre droit interne et international, RSC 2003, n°1.

? La compétence des juridictions nationales pour juger les crimes de guerre

105

Afin de soutenir la souveraineté des Etats, la compétence des tribunaux nationaux demeure la règle. Selon le principe de complémentarité, la compétence d'un tribunal étranger ou d'un tribunal international ne peut être retenue que lorsque les tribunaux nationaux ne sont pas en mesure de répondre de manière satisfaisante au besoin de justice. La compétence universelle se développe donnant vocation aux tribunaux de tout Etat sur lequel se trouve l'auteur de l'infraction, à connaitre d'une telle infraction, quel que soit le lieu de sa perpétration et la nationalité de l'auteur ou de la victime230.

En France, les crimes de guerre font l'objet d'une qualification pénale231. En temps de paix, les infractions commises par des militaires relèvent des juridictions de droit commun. Le procureur de la République, le juge d'instruction et la cour d'assises de Paris sont compétents. Cette cour d'assise spécialisée dans les affaires militaires comprend des magistrats civils et appliquent les règles de procédure de droit commun232. La France ne reconnait pas en revanche l'imprescriptibilité des crimes de guerres, la justice peut donc être saisie dans les 30 années suivant la commission de l'infraction par toute personne233.

230 Loi n° 2011-1862 du 13 décembre 2011 relative à la répartition des contentieux et à l'allègement de certaines procédures juridictionnelles, chapitre VIII.

231 Code Pénal, Livre IV bis, Des crimes et des délits de guerre.

232 Loi n° 2011-1862 du 13 décembre 2011 relative à la répartition des contentieux et à l'allègement de certaines procédures juridictionnelles, chapitre VIII.

233 La France n'a pas ratifiée la Convention sur l'imprescriptibilité des crimes de guerre et des crimes contre l'Humanité dont le génocide de 1968. Mais les crimes contre l'humanité sont considérés comme imprescriptibles (Loi 64-1326).

106

Annexe 2: Historique du DIH, de la guerre

juste à la guerre justifiée

Les étapes de la construction du DIH permettent de mettre en relief la nature de ce droit, soumis à la volonté des Etats et donc au compromis, et son essence, en ce qu'il entend limiter les souffrances de l'Homme dans la guerre.

? une volonté très ancienne de limiter les souffrances dans la guerre

Le Code d'Hammourabi prévoit dès 1750 avant Jésus-Christ des règles de conduite pour limiter les souffrances de la guerre.

Les religions monothéistes abordent toutes la question de la conduite de la guerre. L'Islam prévoit dans le verset 190 de la sourate 2 du Coran un principe qui limite la lutte menée par les musulmans aux seuls combattants de la partie adverse.234

Le judaïsme opère une distinction fondamentale entre la guerre obligatoire235 et la guerre optionnelle236 qui doit être autorisée et dont les moyens sont limités. Le Deutéronome cinquième livre du Pentateuque - la Torah - constitue les lois civiles et religieuses applicables en 622 avant Jésus-Christ.

Les grands principes chrétiens de la guerre juste ont été surtout délivrés par les écrits de Saint Augustin (La cité de Dieu, XV, 5), fortement inspirés de Saint Ambroise et de Saint Thomas d'Aquin. Trois conditions majeures sont exigées par les théoriciens pour lancer une guerre juste. Tout d'abord, une guerre juste doit avoir une cause juste : elle doit être soit défensive, soit pénale, soit de charité, soit effectuée pour le bien commun. La guerre doit ensuite être déclenchée par une autorité supérieure compétente. Enfin, concernant le jus in bello, la guerre doit être conduite avec une « intention droite » et ne pas se laisser guider par la haine ou le

234 Ben Achour Y., La civilisation islamique et le droit international, RGDIP, n°1/2006, p19 à 39.

235 Elles sont de trois types : les guerres conduites contre les sept tribus Cananéennes, sorte de guerre totale, la guerre contre Analek, guerre de mémoire contre les ennemis du peuple juif, et la guerre préventive qui repose sur le verset qui traite de la menace « si quelqu'un vient te tuer, tue le en premier » (Exode 22 ; 1).

236 Guerres menées pour étendre le territoire et le prestige d'Israel.

107

profit. Elle doit se conformer au principe de proportionnalité et ne pas générer de dommages plus importants que celui auquel on voulait remédier. 237

? L'apport des philosophes et jurisconsultes

Hugo Grotius, jurisconsulte Hollandais contemporain de la guerre de trente ans, dans son Droit de la guerre et de la paix, rassemble et ordonne les préceptes de ses prédécesseurs théologiens.238 Le droit de tuer ne doit pas comprendre les enfants, les femmes, les vieillards et tous ceux « dont le métier est animé de la paix et non de la guerre ». Grotius affirme déjà que l'on ne doit tuer l'ennemi ou porter atteinte à ses biens que par nécessité. Emeric de Vattel, dans son livre Le droit des gens ou principe de la loi nouvelle appliqués à la conduite et aux affaires des nations et des souverains, déclare obligatoires dès 1758 les règles de Grotius et rajoute que l'ennemi qui rend les armes et cesse de résister ne peut être tué. Le siècle des lumières dénonce ensuite fortement le fléau de la guerre. Jean Jacques Rousseau entrevoit l'impératif de distinction entre les combattants et les non combattants et le principe de nécessité qui fonderont plus tard le droit international humanitaire (DIH). La dimension théorique de ces thèses ne leur permet pas de réglementer directement les opérations militaires. Cependant, elles constituent une base éthique dont la combinaison avec les sources religieuses et culturelles vont influencer des propositions juridiques individuelles et étatiques.

? Une impulsion décisive délivrée par deux initiatives individuelles primordiales

En 1861 aux Etats-Unis Franz Lieber, professeur de sciences politiques à l'Université de Columbia de New York, rédigea à la demande du Président Abraham Lincoln un recueil d'Instructions pour les armées en campagne, qui fut soumis à une commission d'officiers d'Etat-major et approuvé par le chef de l'Etat. Le code Lieber fut donc appliqué pendant la guerre civile de 1861 à 1865. Ce document constitue encore aujourd'hui le texte le plus complet applicable à un conflit non international. Ses 157 articles codifient les principes et coutumes de la guerre, tels que formulés par les philosophes. On y retrouve l'obligation de n'attaquer que les

237 Chesterman S., Just War or just peace? Humanitarian Intervention and international law, Oxford University press, 2001, 295p - Walzer M., Guerres justes et injustes, trad. S.Chambon et A. Wicke, collection Folio Essais, Gallimard, 2006, 601p.

238 Il pose une série de principes et consacre une large part de son ouvrage à « la modération dont on doit user dans une guerre même juste » (livre III, chapitre XI à XIV). Grotius H., Droit de la guerre et de la paix (1625), trad. Pradier Fodéré P., PUF, 2nde ed, 2012.

108

ennemis portant une arme (article 15) et de traiter humainement les prisonniers et les blessés (articles 22 à 34).

En 1859, de l'autre coté de l'Atlantique Henry Dunant, homme d'affaire genevois, assiste à la bataille de Solferino. Il s'émeut des souffrances des soldats autrichiens, français et italiens dans ce conflit international que constitue la guerre pour l'unité italienne. 6000 morts et 40 000 blessés, c'est la plus grande hécatombe depuis Waterloo. Face à l'absence de dispositif pour protéger les blessés sur le champ de bataille, Dunant organise avec des femmes charitables un service de secours de fortune auprès des blessés. De retour à Genève, il décrit l'horreur du champ de bataille dans un ouvrage publié en 1862, Souvenirs de Solferino239. Dunant dépeint la bataille puis les souffrances provoquées par celle-ci. Il conclut par deux propositions. La première concerne la création d'organisations bénévoles240. La seconde vise la reconnaissance et la protection de ces sociétés par des textes juridiques internationaux. 241 L'accueil de ce livre fut contrasté mais en 1863, Henry Dunant fonde néanmoins avec quatre de ses amis le Comité International de Secours aux Blessés qui sera rebaptisé Comité International de la Croix Rouge peu après.242 Il organise ensuite un congrès auquel assiste 16 Etats dont la France.

? La première conférence de Genève

Le Conseil Fédéral de Suisse convoque ensuite la première conférence de Genève relative au DIH. Le 22 aout 1864, la première convention de Genève est signée et ratifiée par la majorité des Etats. Ce texte a pour but principal la protection des victimes de la guerre. Dès lors, on dénommera couramment le droit ayant pour objet la protection des victimes, droit de Genève. Le signe distinctif adopté est une croix rouge sur fond blanc en hommage au rôle joué par la Suisse dans la construction du DIH. Ce symbole devra être apposé sur les ambulances et les hôpitaux et porté par les personnels de secours.

Plusieurs textes viennent ensuite renforcer le droit de Genève. L'Institut de Droit International, crée en 1873, adopte un Manuel des lois de la guerre sur terre en 1880 à Oxford243. L'institut offre ainsi aux gouvernements un manuel « propre à servir de base, dans chaque Etat, à une législation nationale conforme à la fois aux progrès de la science juridique et aux besoins des

239 Croix Rouge Suisse, 14e éd., 1986, 159p.

240 « n'y aurait-il pas moyen de fonder des sociétés volontaires de secours qui aurait pour but de donner ou de faire donner, en temps de guerre des soins aux blessés » Dunant, H., Souvenirs de Solférino, 1862 dans Croix Rouge Suisse, 14e éd., 1986, 159p.

241 Harouel V, Histoire de la Croix-Rouge, coll « Que sais-je ? » n°831, PUF, 1999, 127p.

242 Harouel V, Histoire de la Croix-Rouge, coll « Que sais-je ? » n°831, PUF, 1999, 127p.

243 Annuaire de l'Institut, 1881-1882, vol.5, p156-174 dans Bettati M., Droit Humanitaire, coll. Précis, Dalloz, Paris 2012, p 11.

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armées civilisées ». Il insiste sur l'importance de la diffusion de ce droit dans les armées. Les 86 articles de ce manuel s'inspirent largement du Code Lieber. En 1884, un Précis des lois de la guerre sur terre à l'usage des officiers français reprend les principes du manuel d'Oxford. Ce précis de Jules Guelle est illustré d'exemples destinés à faciliter sa mise en oeuvre par les élèves-officiers de l'Ecole Spéciale Militaire de Saint-Cyr.244

La codification du DIH sera ensuite liée aux secousses sismiques qui ont ébranlées la société internationale.

? Avant la première guerre mondiale

La convention de la Haye adoptée en 1899 a pour principal apport, à travers la clause Martens, de rendre le respect de toutes les valeurs fondamentales universelles obligatoires juridiquement car elles constituent du droit en devenir245. La conférence de la Haye de 1907, quant à elle, pose les jalons d'un nouveau principe en droit des conflits armés selon lequel le recours à la force ne peut plus être automatique. Ces textes n'empêcheront pourtant pas la Grande Guerre.

? Au lendemain de la première guerre mondiale

La prévention de la guerre devient alors le principal objectif de la Société des Nations (SDN), au détriment du développement du DIH246. En 1928, le Pacte négocié entre le français Aristide Briand et l'américain Franck Kellog proclament solennellement que les signataires condamnent et renoncent au recours à la guerre pour le règlement des différents internationaux. La guerre internationale devient illégale. En 1929, la deuxième conférence de Genève adopte une convention pour l'amélioration du sort des blessés et des malades dans les armées en campagne, et une autre relative au traitement des prisonniers de guerre. Elles consacrent

244 Guelle J., Précis des lois de la guerre sur terre, commentaire pratique à l'usage des officiers de l'armée active, de la réserve et de la territoriale, dans Bettati M., Droit Humanitaire, coll. Précis, Dalloz, Paris 2012, p12.

245 En effet la clause Martens, qui doit son nom au délégué russe à cette conférence Frédéric Formhod Martens, dispose que : « En attendant qu'un code plus complet des lois de la guerre puisse être édicté, les Hautes Parties contractantes jugent opportun de constater que, dans les cas non compris dans les dispositions réglementaires adoptées par elles, les populations et les belligérants restent sous la sauvegarde et sous l'empire des principes du droit des gens, tels qu'ils résultent des usages établis entre nations civilisées, des lois de l'humanité et des exigences de la conscience publique. » Première convention de la Haye, 1899.

246 La SDN est créée en 1919 lors du traité de Versailles. Le mouvement Amsterdam-Pleyel mené par Romain Rolland et Henri Barbusse a pour objet l'abolition de la compétence de la guerre.

110

l'admission de deux nouveaux emblèmes : le Croissant-Rouge et le Lion et le Soleil Rouge pour la Perse. Cependant, la mise hors la loi des conflits internationaux à échoué. La seconde guerre mondiale est un conflit d'un nouveau genre qui a provoqué le décès de 24 millions de civils.

? Au lendemain de la seconde guerre mondiale

En 1945, les représentants de 50 pays se sont rencontrés à San Francisco pour élaborer la Charte des Nations Unies. La Charte fut signée le 26 juin 1945. L'Organisation des Nations Unies (ONU) est créée pour « préserver les générations futures du fléau de la guerre qui deux fois en l'espace d'une vie humaine a infligé à l'humanité d'indicibles souffrances »247. Elle repose sur le principe d'égalité souveraine des Etats et prévoit que le recours à la force est interdit sauf en cas de légitime défense ou s'il est autorisé par le conseil de sécurité de l'ONU248. Sachant que la paix ne peut pas être assurée de façon certaine, les membres de l'ONU démontrent la volonté d'édicter des règles nouvelles de DIH et de réprimer les violations du DIH.

En 1949, le CICR et des experts gouvernementaux organisent la révision du DIH à la lumière des récents conflits. Ils incorporent le droit de Genève et le droit de la Haye dans quatre conventions :

1. Convention relative à l'amélioration du sort des blessés et des malades dans les forces armées en campagne.

2. Convention relative à l'amélioration du sort des blessés, des malades et des naufragés dans les forces armées sur mer.

3. Convention relative à la protection des prisonniers de guerre.

4. Convention relative à la protection des personnes civile.

247 Alinéa premier du Préambule de la Charte des Nations Unies adoptées à San Francisco le 26 juin 1945.

248 Article 2 paragraphe 4 de la Charte des Nations Unies adoptées à San Francisco le 26 juin 1945 : « les membres de l'organisation s'abstiennent, dans leurs relations internationales, de recourir à la menace ou à l'emploi de la force, soit contre l'intégrité territoriale ou l'indépendance politique de tout Etat, soit de toute autre manière incompatible avec les buts des Nations Unies » et Articles 51 et 42 de la Charte des Nations Unies adoptées à San Francisco le 26 juin 1945.

111

? Au lendemain de la décolonisation

A l'initiative du CICR, deux protocoles additionnels aux conventions de Genève de 1949 furent adoptés le 10 juin 1977, l'un relatif aux conflits armés internationaux, l'autre relatif aux conflits armés non internationaux.

? Après la guerre froide

De nombreuses organisations non gouvernementales (ONG) exercent alors une pression remarquée sur les gouvernements et poussent parfois ceux-ci à conclure de nouveaux engagements. Les médias sont friands d'humanitaires après le collapsus des idéologies et les ONG sont ainsi relayées par l'opinion publique. En grande partie adoptés par l'ONU ces textes forment le « droit de New York ». Ils visent à limiter la fabrication, le stockage et l'usage de certaines armes, mais aussi à réprimer les violations graves du DIH et à renforcer la protection des personnes et des biens particulièrement vulnérables pendant les conflits armés249.

249 Cf. Statuts du Tribunal Pénal International pour la Yougoslavie et du Tribunal Pénal pour le Rwanda adoptés par le Conseil de Sécurité, Statut de la Cour Pénale Internationale adopté à l'initiative de la Commission du droit international des Nations Unies. Et Convention Internationale relative aux droits de l'enfant, 1989.

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Annexe 3: Historique du SSA et du DIH:

deux destins liés

? Historique du SSA et du DIH

Le SSA français est l'un des plus anciens parmi les services de santé des armées du monde, consacré par l'édit royal de 1708 qui a « porté création de médecins et chirurgiens inspecteurs généraux, chirurgiens majors des camps et armées, médecins et chirurgiens majors des hôpitaux des villes et places de guerre, et des armées de terre » 250. Cet acte a été désigné comme l'acte fondateur du service mais le soutien sanitaire des forces armées prend en réalité racine dans l'Antiquité même si son développement a été chaotique jusqu'au XVIIIème siècle.

A l'origine, alors que la valeur des armées se mesurait à l'aune de la valeur individuelle de son chef, les médecins étaient rattachés aux personnalités clés des armées251. La naissance de la démocratie et l'apparition d'armées nombreuses et structurées dans les civilisations antiques permettront ensuite à l'ensemble des mercenaires grecques et des légionnaires romains de bénéficier des soins. En dépit de la présence de médecins et de l'établissement « d'hôpitaux militaires » antiques, il n'existe pas encore à cette époque de véritable service de santé structuré252.

C'est au Moyen Age que se développeront les premiers ordres hospitaliers militaires. En effet, malgré toute l'importance délivrée au jugement divin et donc la stagnation des soins médicaux, la nécessité de conserver des effectifs entrainés pendant les Croisades rend l'émergence d'une organisation médicale indispensable253.

Les siècles suivants vont s'ouvrir progressivement à la science. Une lente structuration du soutien santé conduira à l'Edit Royal en 1708. Mais en France le service de santé est alors

250 Edit du ROY, donné à Versailles au mois de janvier 1708, enregistré au parlement le 22 mars 1708.

251 L'assistance médicale des médecins égyptiens ou mésopotamiens était réservée au roi et à ses grands subordonnés.

252 Médecin en Chef Valérie Denux, La médicostratégie : la place du domaine santé dans la pensée militaire, Master de sciences historiques, philologiques et religieuses, Ecole Pratique des Hautes Etudes, 2008-2009, p10,11.

253 Médecin en Chef Valérie Denux, La médicostratégie : la place du domaine santé dans la pensée militaire, Master de sciences historiques, philologiques et religieuses, Ecole Pratique des Hautes Etudes, 2008-2009, p12.

113

subordonné à l'Intendance qui n'est pas bienveillante à son égard, d'autant plus qu'il n'est pas dirigé par les mêmes valeurs d'humanité. Le manque de considération de la part du commandement conduira à l'inaptitude du service de santé à répondre aux besoins grandissants des armées.

Dans ce cadre, la Bataille de Solférino (1859) qui a été déterminante dans la construction du DIH, a aussi été décisive pour le SSA car elle a rompu le huit clos entre le service de santé et le commandement en soumettant la problématique des soins aux militaires au jugement de l'opinion publique254. L'appel d'Henri Dunant, fort de son effroyable spectacle, a démontré au niveau international la nécessité de réorganiser le soutien sanitaire au sein des conflits armés. La création du Comité international de la Croix-Rouge en 1863 prouve que le peuple n'est plus prêt à accepter les souffrances inutiles des soldats et que les services de santé militaires ne sont pas efficaces puisqu'il est nécessaire de mettre en place des organisations de secours privées. C'est ainsi que les sociétés nationales de la Croix-Rouge sont créées, à partir de 1864, pour être des Sociétés de secours aux blessés sur le champ de bataille, appelées à renforcer les capacités des services de santé des Armées. Il faudra attendre 1889 pour que le service de santé français devienne autonome255.

Ce n'est réellement qu'à partir de 1917, devant les effroyables pertes des trois premières années de la grande guerre que le service de santé des armées associé à la Croix Rouge française va se restructurer améliorer son efficacité256. Mais à l'image des armées, le service de santé des armées ne saura pas s'adapter à la guerre de mouvement de 1940. La seconde guerre mondiale et les mouvements humanistes qui suivirent ce conflit constituèrent un tournant dans le domaine de la santé comme dans le domaine juridique. En effet, à partir de 1945 les armées commenceront à réellement investir dans leur soutien santé qu'elles ne verront plus uniquement comme un moyen de conserver les effectifs ou un devoir d'Etat mais comme un devoir envers l'humanité.

Les guerres coloniales et les guerres de décolonisation ouvriront ensuite l'extension des missions des services de santé avec la mise en oeuvre de programmes d'aide médicale aux

254 Médecin en Chef Valérie Denux, La médicostratégie : la place du domaine santé dans la pensée militaire, Master de sciences historiques, philologiques et religieuses, Ecole Pratique des Hautes Etudes, 2008-2009, p13.

255 Loi de 1882 modifiée en 1889.

256 Projet de Loi sur le SSA, 1922. Classement provisoire cote 9NN631, DAT, SHD.

114

populations257. Les aspects du domaine de la santé seront dès lors intégrés dans la réflexion militaire.

Par ailleurs, le service de santé des armées français commencera à réellement se structurer comme en témoigne en 1962, la création d'une direction centrale des services de santé. En 1968, les services de santé de la Marine Nationale, de l'Armée de l'Air et de l'Armée de Terre fusionnent en un seul service de santé des armées. C'est la voie qui s'ouvre à une approche interarmées et donc globale de la prise en charge médicale. Dans le même temps, le service de santé des armées a fait sien le défi technique d'intégrer les meilleures pratiques médicales. Aujourd'hui, son excellence est reconnue et la voie vers un système cohérent et interarmées se poursuit. Il forme dans ses écoles des personnels de santé de haut niveau et aguerri. En 2011, les écoles de formation initiale fusionnent pour créer l'École de Santé des Armées (ESA), désormais le centre unique de formation initiale des médecins et des pharmaciens des armées. L'Ecole du Personnel Paramédical des Armées centralise depuis 1990 la formation des infirmiers des armées. Le centre de formation santé opérationnel (CEFOS) est mis en place à la Valbonne. La formation dans tous ces centres de formation est coordonnée par l'Ecole du val de Grâce.

? Un objectif commun au DIH et au SSA : la prise en charge des souffrances des

blessés et malades au sein des conflits armés

Le service de santé des armées est aujourd'hui une véritable composante opérationnelle indispensable à la conduite des opérations. Le soutien santé est devenu dimensionnant pour les opérations militaires. Il a atteint sa maturité technique et une capacité organisationnelle qui lui permet de s'adapter aux évolutions de son environnement, tout en continuant à porter les valeurs d'humanité258.

Le Projet de Service SSA 2020 adopté en 2013 prévoit que « La mission première du service de santé des armées est le soutien santé opérationnel des forces armées. C'est sa raison d'être, son coeur de métier ». Le service de santé des armées est responsable de la préservation des effectifs tout en maintenant l'efficacité opérationnelle. L'impact du service de santé des armées sur l'économie des vies humaines est indiscutable. Pour cela il agit sur

257 Le commandement à l'image de Lyautey, estimait que cela concourait à la « pacification des pays dont la France avait la responsabilité ». Forissier R., Crise du soutien sanitaire du corps de bataille français au cours de la retraite de mai-juin 1940, Médecine et armées, 1999, 27, 8, p609.

258 Cf. Projet de Service SSA 2020.

115

quatre leviers principaux : le traitement des blessés et des malades, la prise en charge de la population et le maintien du moral des troupes.

Dans l'histoire, dès la structuration de l'armée, le soin aux blessés apparait légitime et noble259. Peu à peu l'évacuation des blessés et la médicalisation de l'avant permettent une prise en charge remarquable des blessés260.

Cependant, le traitement des malades est plus récent car la médecine était très peu efficace avant l'ère de la pasteurisation face aux épidémies et la maladie apparaissait comme un signe de faiblesse et de lâcheté. Pourtant Sun Zi avait déjà identifié l'importance de la lutte contre les maladies : « Lorsqu'une armée ne souffre pas de cent maladies, on dit qu'elle doit remporter la victoire 261». En effet, les épidémies constituent une catastrophe sanitaire et une paralysie pour les armées. Depuis l'intégration des mécanismes infectieux, la part de morts de maladie est beaucoup plus faible262. Mais les militaires sont toujours exposés à des maladies spécifiques en opération, certaines pathologies pourraient aussi renaitre ou apparaitre. L'épidémiologie et les traitements curatifs des malades sont donc au coeur du soutien sanitaire.

La prise en charge de la population s'est développée avec les guerres de colonisation. La phase de pacification des territoires donnait une place particulière à l'assistance médicale aux populations263. Pour Lyautey, le médecin « est le premier et le plus efficace de nos agents de pénétration et de pacification 264».

Quant à la préservation du moral des troupes, elle est apparue au XXème siècle comme un effet miroir pour déséquilibrer le moral de l'adversaire265. Le SSA participe donc a la supériorité

259 A partir du XVIIe siècle les progrès techniques de la chirurgie de guerre et de la médecine générale permettent véritablement de sauver un maximum de blessés. Médecin en Chef Valérie Denux, La médicostratégie : la place du domaine santé dans la pensée militaire, Master de sciences historiques, philologiques et religieuses, Ecole Pratique des Hautes Etudes, 2008-2009, p 25.

260 Lors de la guerre des Malouines, en 1982, aucun blessé ramassé vivant, du coté des anglais, n'est, par la suite, décédé. Op. cit. (193) p26.

261 Sun ZI, L'art de la guerre, Trad. Nicquet Cabestan V., p125

262 Pendant la grande guerre pour la première fois les pertes pour maladie furent loin derrière celle des blessures. Les services de santé ont largement limité la propagation des maladies dans les tranchées. Hyacinthe Vincent (1862-1950), impose la vaccination contre la typhoïde et éradique pratiquement cette fièvre parmi les troupes françaises. L'Armée d'Orient conduit aussi une lutte remarquable contre le paludisme.

263 Trinquier R., La guerre moderne, Economica, 2008.

264 Rey J.L., Service de Santé des Armées et actions civilo-militaires au Kosovo ; de la théorie à la pratique, Médecine et armées, 2001, 29,2.

265 Sun Zi expliquait que l'on pouvait attaquer le psychisme collectif et individuel de l'ennemi par des méthodes appropriées. Sun ZI, L'art de la guerre, Trad. Nicquet Cabestan V.

116

psychologique de la force même s'il n'a pas d'action directe sur l'ennemi. Le commandement et les services de santé cherchent donc à protéger le moral collectif. Le soutien sanitaire participe en ce sens au bien-être du groupe. De plus, dès la deuxième guerre mondiale, l'armée est analysée comme un milieu social dont le fonctionnement particulier engendre des pathologies psychiatriques aux aspects cliniques spécifiques266. On identifie aujourd'hui des réactions psychologiques pouvant être liées à un stress important vécu au combat267. Les causes de ces troubles ont variés dans le temps mais il semble que la société actuelle ait tendance à les accroitre268. Au sein des conflits récents, la dimension psychologique du soutien santé s'est donc largement développée sous l'impulsion des psychiatres et du commandement269. Cet aspect est traité dans le DIH par les articles 16(2) et 75(2) PI qui interdisent les expériences médicales ou scientifiques et les atteintes à l'intégrité physique ou mentale des personnes. L'article 1 de la convention contre la torture adopté en 1984 interdit aussi les souffrances mentales infligées à des tiers afin d'obtenir des renseignement270.

Le SSA participe donc à la limitation des souffrances physiques et mentales des soldats et de la population au sein des conflits armés. En raison des spécificités de sa mission et de son environnement, le SSA a donc mis en place un code éthique spécifique.

Ces textes mettent en relief la dualité d'éthiques du personnel militaire de santé. Les médecins militaires ont le souci de préserver les effectifs et de soutenir l'action militaire tout en respectant la déontologie médicale et le DIH.

266 Barbusse H., Le Feu dans Les grands romans de la guerre de 14-18, Paris, Ed. Armand Colin, 1983.

267 Au Rwanda, un médecin témoigne que 60% des militaires ayant participé aux travaux d'enfouissement de Goma ont présenté des difficultés psychologiques à leur retour. Raingeard, Regard d'un médecin d'unité sur sa fonction d'hygiéniste mentale, Médecine et armées, 25, 5, 1997.

268 Ainsi, l'habitude du confort, la mise à mal du patriotisme et la violence des combats peuvent nuire à la résistance psychique des soldats. Juillet P., Moutin P., Psychiatrie Militaire, Masson et Cie, 1969.

269Op. cit. (193) p31à36.

270 Article 1 Convention contre la Torture 1984. Voir aussi article 3 commun aux Conventions de Genève de 1949.

117

Annexe 4: Le SSA en opération

Situation au 1er Janvier 2014.

Source : site internet du ministère de la défense.

Annexe 5: Organisation du soutien médical

en opération

118

Source : Site internet du ministère de la défense.

119

Annexe 6: Analyse AVOT

Atouts

Opportunités

Comment utiliser les atouts du SSA et les opportunités qui se présentent pour assurer une bonne application du DIH par le

SSA

Valeurs historiques du SSA

Portée universelle du DIH

Promotion du DIH au niveau international

Valeurs françaises

Consolidation du lien SSA/Nation

Importance accordée par les organisations internationales

Promotion des valeurs du DIH au sein des organisations
internationales

Partenariats ou collaborations du SSA

Renforcement des partenariats et collaboration en matière de DIH

Renforcement du lien avec le commissariat aux armées

Renforcement de la proximité avec les armées

Ethique médicale intrinsèque au SSA

Portée universelle du DIH

-

Valeurs françaises

Consolidation du lien SSA/Nation

Importance accordée par les organisations internationales

Promotion de l'éthique médicale au sein des organisations
internationales

Partenariats ou collaborations du SSA

Renforcement des partenariats et collaboration en matière de DIH

Renforcement du lien avec le commissariat aux armées

Renforcement de la proximité avec les armées

Potentiel d'intégration au niveau stratégique du DIH

Portée universelle du DIH

Promotion du DIH au niveau international

Valeurs françaises

Consolidation du lien SSA/Nation

Importance accordée par les organisations internationales

Promotion du DIH au sein des organisations internationales

Partenariats ou collaborations du SSA

Renforcement des partenariats et collaboration en matière de DIH

Renforcement du lien avec le commissariat aux armées

Renforcement de la proximité avec les armées

Bureau juridique dédié au SSA

Portée universelle du DIH

Promotion du DIH au niveau international

Valeurs françaises

-

Importance accordée par les organisations internationales

Promotion du DIH au sein des organisations internationales

Partenariats ou collaborations du SSA

Renforcement des partenariats et collaboration en matière de DIH

Renforcement du lien avec le commissariat aux

Renforcement des partenariats et collaboration en matière de DIH

120

Atouts

 

Opportunités

Comment utiliser les atouts du SSA et les opportunités qui se présentent pour assurer une bonne application du DIH par le

SSA

 

armées

 

Doctrine d'emploi ancrée dans le DIH

Portée universelle du DIH

Promotion du DIH au niveau international

Valeurs françaises

-

Importance accordée par les organisations internationales

Promotion du DIH au sein des organisations internationales

Partenariats ou collaborations du SSA

Renforcement des partenariats et collaboration en matière de DIH

Renforcement du lien avec le commissariat aux armées

Renforcement de la proximité avec les armées

Ecoles de formation initiale et continue propres au SSA

Portée universelle du DIH

Intégration du DIH par tous les personnels du SSA

Valeurs françaises

Intégration du DIH par tous les personnels du SSA

Importance accordée par les organisations internationales

-

Partenariats ou collaborations du SSA

Renforcement des partenariats et collaboration en matière de DIH

Renforcement du lien avec le commissariat aux armées

Renforcement de la proximité avec les armées

Port de l'emblème

Portée universelle du DIH

Promotion du DIH au niveau international

Valeurs françaises

Consolidation du lien SSA/Nation

Importance accordée par les organisations internationales

Promotion du DIH au sein des organisations internationales

Partenariats ou collaborations du SSA

Collaboration renforcée avec la Croix-Rouge française

Renforcement du lien avec le commissariat aux armées

Renforcement de la proximité avec les armées

Dimension internationale du SSA

Portée universelle du DIH

Promotion du DIH au niveau international

Valeurs françaises

Consolidation du lien SSA/Nation

Importance accordée par les organisations internationales

Promotion du DIH au sein des organisations internationales

Partenariats ou collaborations du SSA

Renforcement des partenariats et collaboration en matière de DIH

Renforcement du lien avec le commissariat aux armées

Renforcement de la proximité avec les armées

121

Atouts

 

Menaces

Comment utiliser les atouts du SSA pour réduire les menaces pesant sur
l'application du DIH en son sein

Valeurs historiques du SSA

Evolution lente du DIH

Protection des victimes de guerre

Complexité des situations opérationnelles

Consolidation du respect des valeurs du DIH

Evolutions techniques et technologiques

Consolidation du respect des valeurs du DIH

Etendue de la typologie des missions du SSA

Garantie le respect des victimes

Projections d'urgence et ouverture de théâtres

Consolidation du respect des valeurs du DIH

Non-respect du DIH par certains adversaires et alliés

Consolidation du respect des valeurs du DIH

Pression des armées

Consolidation du respect des valeurs du DIH

Effets psychologiques de la guerre

Consolidation du respect des valeurs du DIH

Judiciarisation des conflits

Protection des personnels du SSA quant aux poursuites judiciaires

RETEX des derniers conflits pour les armées

Consolidation du respect des valeurs du DIH

Ethique médicale
intrinsèque au SSA

Evolution lente du DIH

Protection des victimes de guerre

Complexité des situations opérationnelles

Consolidation du respect des valeurs du DIH

Evolutions techniques et technologiques

Consolidation du respect des valeurs du DIH

Etendue de la typologie des missions du SSA

Consolidation du respect des valeurs du DIH

Projections d'urgence et ouverture de théâtres

Consolidation du respect des valeurs du DIH

Non-respect du DIH par certains adversaires et alliés

Consolidation du respect des valeurs du DIH

Pression des armées

Consolidation du respect des valeurs du DIH

Effets psychologiques de la guerre

Consolidation du respect des valeurs du DIH

Judiciarisation des conflits

Protection des personnels du SSA quant aux poursuites judiciaires

RETEX des derniers conflits pour les armées

Consolidation du respect des valeurs du DIH

Potentiel
d'intégration au
niveau stratégique
du DIH

Evolution lente du DIH

Anticipation et analyse des problématiques liées à l'application du DIH

Complexité des situations opérationnelles

Anticipation et analyse des problématiques liées à l'application du DIH

Evolutions techniques et technologiques

Anticipation et analyse des problématiques liées à l'application du DIH

Etendue de la typologie des missions du SSA

Anticipation et analyse des problématiques liées à l'application du DIH

122

Atouts

 

Menaces

Comment utiliser les atouts du SSA pour réduire les menaces pesant sur
l'application du DIH en son sein

 
 
 

Projections d'urgence et ouverture de théâtres

Définition stricte des situations de principe et d'exception dans l'application du DIH

Non-respect du DIH par certains adversaires et alliés

Définition stricte des situations de principe et d'exception dans l'application du DIH

Pression des armées

Définition stricte des situations de principe et d'exception dans l'application du DIH

Effets psychologiques de la guerre

Définition stricte des situations de principe et d'exception dans l'application du DIH

Judiciarisation des conflits

Protection des personnels du SSA quant aux poursuites judiciaires

RETEX des derniers conflits pour les armées

Anticipation et analyse des problématiques liées à l'application du DIH

Bureau juridique
dédié au SSA

Evolution lente du DIH

Capacité du SSA pour éclaircir les zones grises du droit

Complexité des situations opérationnelles

Capacité du SSA pour éclaircir les zones grises du droit

Evolutions techniques et technologiques

Capacité du SSA pour éclaircir les zones grises du droit

Etendue de la typologie des missions du SSA

Capacité du SSA pour éclaircir les zones grises du droit

Projections d'urgence et ouverture de théâtres

Définition stricte des situations de principe et d'exception dans l'application du DIH

Non-respect du DIH par certains adversaires et alliés

Définition stricte des situations de principe et d'exception dans l'application du DIH

Pression des armées

Définition stricte des situations de principe et d'exception dans l'application du DIH

Effets psychologiques de la guerre

Définition stricte des situations de principe et d'exception dans l'application du DIH

Judiciarisation des conflits

Protection des personnels du SSA quant aux poursuites judiciaires

RETEX des derniers conflits pour les armées

Capacité du SSA pour éclaircir les zones grises du droit

Doctrine d'emploi
ancrée dans le DIH

Evolution lente du DIH

Consolidation du référentiel DIH

Complexité des situations opérationnelles

Consolidation du référentiel DIH

Evolutions techniques et technologiques

Consolidation du référentiel DIH

123

Atouts

 

Menaces

Comment utiliser les atouts du SSA pour réduire les menaces pesant sur
l'application du DIH en son sein

 
 
 

Etendue de la typologie des missions du SSA

Consolidation du référentiel DIH

Projections d'urgence et ouverture de théâtres

Consolidation du référentiel DIH

Non-respect du DIH par certains adversaires et alliés

Consolidation du référentiel DIH

Pression des armées

Consolidation du référentiel DIH

Effets psychologiques de la guerre

Consolidation du référentiel DIH

Judiciarisation des conflits

Protection des personnels du SSA quant aux poursuites judiciaires

RETEX des derniers conflits pour les armées

 

Ecoles de
formation initiale et
continue propres
au SSA

Evolution lente du DIH

Apprentissage des règles de DIH facilité

Complexité des situations opérationnelles

Renforcement de la formation concernant l'application du DIH

Evolutions techniques et technologiques

Renforcement de la formation concernant l'application du DIH

Etendue de la typologie des missions du SSA

Renforcement de la formation concernant l'application du DIH

Projections d'urgence et ouverture de théâtres

Renforcement de la formation concernant l'application du DIH

Non-respect du DIH par certains adversaires et alliés

Renforcement de la formation concernant l'application du DIH

Pression des armées

Renforcement de la formation concernant l'application du DIH

Effets psychologiques de la guerre

Renforcement de la formation concernant l'application du DIH

Judiciarisation des conflits

Réponse à une obligation légale

RETEX des derniers conflits pour les armées

Renforcement de la formation concernant l'application du DIH

Port de l'emblème

Evolution lente du DIH

Symbole de l'attachement au DIH

Complexité des situations opérationnelles

Symbole de l'attachement au DIH et protection

Evolutions techniques et technologiques

Symbole de l'attachement au DIH et protection

Etendue de la typologie des missions du SSA

Symbole de l'attachement au DIH et protection

Projections d'urgence et ouverture de théâtres

Symbole de l'attachement au DIH et protection

124

Atouts

 

Menaces

Comment utiliser les atouts du SSA pour réduire les menaces pesant sur
l'application du DIH en son sein

 

Non-respect du DIH par certains adversaires et alliés

Symbole de l'attachement au DIH

Pression des armées

Symbole de l'attachement au DIH

Effets psychologiques de la guerre

Symbole de l'attachement au DIH

Judiciarisation des conflits

Symbole de l'attachement au DIH et protection juridique

RETEX des derniers conflits pour les armées

Complexification du rapport à l'emblème

Dimension
internationale du
SSA

Evolution lente du DIH

Promotion des valeurs du DIH

Complexité des situations opérationnelles

Analyse des problématiques de DIH en réseau

Evolutions techniques et technologiques

Analyse des problématiques de DIH en réseau

Etendue de la typologie des missions du SSA

Promotion des valeurs du DIH

Projections d'urgence et ouverture de théâtres

Anticipation des problématiques liées à l'application du DIH en réseau

Non-respect du DIH par certains adversaires et alliés

Promotion des valeurs du DIH

Pression des armées

Renforcement de la proximité avec les armées

Effets psychologiques de la guerre

Analyse des problématiques de DIH en réseau

Judiciarisation des conflits

_

RETEX des derniers conflits pour les armées

Promotion des valeurs du DIH

125

Vulnérabilités

 

Menaces

Les risques pesant sur l'application du DIH au sein du SSA

Diversité des statuts
du personnel du
SSA

Evolution lente du DIH

zones grises du droit

Complexité des situations opérationnelles

zones grises du droit

Evolutions techniques et technologiques

zones grises du droit

Etendue de la typologie des missions du SSA

Complexité dans l'application du DIH

Projections d'urgence et ouverture de théâtres

Complexité dans l'application du DIH

Non-respect du DIH par certains adversaires et alliés

Confusion dans l'application du DIH

Pression des armées

Confusion dans l'application du DIH

Effets psychologiques de la guerre

Complexité dans l'application du DIH

Judiciarisation des conflits

_

RETEX des derniers conflits pour les armées

zones grises du droit

Pas de formation
continue en DIH au
sein du SSA

Evolution lente du DIH

_

Complexité des situations opérationnelles

Complexité dans l'application du DIH

Evolutions techniques et technologiques

Complexité dans l'application du DIH

Etendue de la typologie des missions du SSA Projections d'urgence et ouverture de théâtres

Complexité dans l'application du DIH

Complexité dans l'application du DIH

Non-respect du DIH par certains adversaires et alliés

Confusion dans l'application du DIH

Pression des armées

Confusion dans l'application du DIH

Effets psychologiques de la guerre

Complexité dans l'application du DIH

Judiciarisation des conflits

Poursuites judiciaires

RETEX des derniers conflits pour les armées

Complexité dans l'application du DIH

Absence de soutien juridique

opérationnel dédié

Evolution lente du DIH

Sentiment d'être démuni

Complexité des situations opérationnelles

Complexité dans l'application du DIH/sentiment d'être démuni

Evolutions techniques et technologiques

Complexité dans l'application du DIH/sentiment d'être démuni

Etendue de la typologie des missions du SSA

Complexité dans l'application du DIH

126

Vulnérabilités

 

Menaces

Les risques pesant sur l'application du DIH au sein du SSA

 

Projections d'urgence et ouverture de théâtres

Complexité dans l'application du DIH/sentiment d'être démuni

Non-respect du DIH par certains adversaires et alliés

Confusion dans l'application du DIH/remise en cause du bien fondé du DIH

Pression des armées

Confusion dans l'application du DIH/sentiment d'être démuni

Effets psychologiques de la guerre

Complexité dans l'application du DIH/sentiment d'être démuni

Judiciarisation des conflits

Poursuites judiciaires

RETEX des derniers conflits pour les armées

Complexité dans l'application du DIH

Pas de

compagnonnage en

DIH

Evolution lente du DIH

_

Complexité des situations opérationnelles

Complexité dans l'application du DIH/sentiment d'être démuni

Evolutions techniques et technologiques

Complexité dans l'application du DIH/sentiment d'être démuni

Etendue de la typologie des missions du SSA

Complexité dans l'application du DIH

Projections d'urgence et ouverture de théâtres

Complexité dans l'application du DIH/sentiment d'être démuni

Non-respect du DIH par certains adversaires et alliés

Confusion dans l'application du DIH

Pression des armées

Confusion dans l'application du DIH

Effets psychologiques de la guerre

Complexité dans l'application du DIH/sentiment d'être démuni

Judiciarisation des conflits

_

RETEX des derniers conflits pour les armées

Complexité dans l'application du DIH

Peu de relation sur
le sujet avec les
armées

Evolution lente du DIH

_

Complexité des situations opérationnelles

Non prise en compte des spécificités du statut de non combattant par les armées

Evolutions techniques et technologiques

Faible prise en compte du DIH dans l'évaluation des nouveaux moyens de guerre

Etendue de la typologie des missions du SSA

_

Projections d'urgence et ouverture de théâtres

_

Non-respect du DIH par certains adversaires et alliés

Non prise en compte des spécificités du statut de non combattant par les armées

127

Vulnérabilités

 

Menaces

Les risques pesant sur l'application du DIH au sein du SSA

 

Pression des armées

Non prise en compte des spécificités du statut de non combattant par les armées

Effets psychologiques de la guerre

Non prise en compte des spécificités du statut de non combattant par les armées

Judiciarisation des conflits

Poursuites judiciaires

RETEX des derniers conflits pour les armées

Non prise en compte des spécificités du statut de non combattant par les armées

Manque de RETEX
sur le DIH

Evolution lente du DIH

Pas d'adaptation du DIH au nouveau contexte opérationnel

Complexité des situations opérationnelles

Evaluation inadaptée des problématiques de DIH

Evolutions techniques et technologiques

Evaluation inadaptée des problématiques de DIH

Etendue de la typologie des missions du SSA

Evaluation inadaptée des problématiques de DIH

Projections d'urgence et ouverture de théâtres

Evaluation inadaptée des problématiques de DIH

Non-respect du DIH par certains adversaires et alliés

Confusion dans l'application du DIH

Pression des armées

Confusion dans l'application du DIH

Effets psychologiques de la guerre

Manque d'anticipation des problématiques de DIH

Judiciarisation des conflits

_

RETEX des derniers conflits pour les armées

Manque de prise en compte des problématiques de DIH liées aux soins de santé

128

Vulnérabilités

 

Opportunités

Comment utiliser les opportunités pour réduire les vulnérabilités quant à
l'application du DIH par le SSA

Diversité des statuts du
personnel du SSA

Portée universelle du DIH

Intégration du DIH facilitée

Valeurs françaises

Intégration du DIH facilitée

Importance accordée par les organisations internationales

_

Partenariats ou collaborations du SSA

Aide dans la diffusion du DIH

Renforcement du lien avec le commissariat aux armées

Aide dans la diffusion du DIH

Pas de formation continue
en DIH au sein du SSA

Portée universelle du DIH

_

Valeurs françaises

_

Importance accordée par les organisations internationales

_

Partenariats ou collaborations du SSA

Aide dans la formation en DIH

Renforcement du lien avec le commissariat aux armées

Aide dans la formation spécialisée en DIH

Absence de soutien
juridique opérationnel
dédié

Portée universelle du DIH

Légitimité de la mise en place d'un soutien opérationnel dédié

Valeurs françaises

Légitimité de la mise en place d'un soutien opérationnel dédié

Importance accordée par les organisations internationales

Coopération multinational en matière de DIH

Partenariats ou collaborations du SSA

Coopération civil et militaire en matière de DIH/ Coordination avec les partenaires des

soins de santé

Renforcement du lien avec le commissariat aux armées

Renforcement de la proximité avec les armées

Pas de compagnonnage
en DIH

Portée universelle du DIH

Communication autour du DIH facilitée

Valeurs françaises

Communication autour du DIH facilitée

Importance accordée par les organisations internationales

Communication autour du DIH facilitée

Partenariats ou collaborations du SSA

Communication autour du DIH facilitée/préparation à l'application du DIH plus aisée

Renforcement du lien avec le commissariat aux armées

Communication autour du DIH facilitée/préparation à l'application du DIH plus aisée

129

Vulnérabilités

 

Opportunités

Comment utiliser les opportunités pour réduire les vulnérabilités quant à
l'application du DIH par le SSA

Peu de relation sur le sujet avec les armées

Portée universelle du DIH

Intégration du DIH facilitée

Valeurs françaises

Intégration du DIH facilitée

Importance accordée par les organisations internationales

Intérêt et intégration du DIH facilités

Partenariats ou collaborations du SSA

Aide dans la diffusion du DIH

Renforcement du lien avec le commissariat aux armées

Aide dans la diffusion du DIH

Manque de RETEX sur le

DIH

Portée universelle du DIH

Identification des problématiques de DIH plus aisée

Valeurs françaises

Identification des problématiques de DIH plus aisée

Importance accordée par les organisations internationales

RETEX en DIH favorisé dans la doctrine internationale

Partenariats ou collaborations du SSA

Diffusion de l'intérêt et des procédure de RETEX en matière de DIH

Renforcement du lien avec le commissariat aux armées

Diffusion de l'intérêt et des procédure de RETEX en matière de DIH

130

Annexe 7: Procédure de sauvetage au

combat

La méthode pédagogique retenue pour dérouler la procédure chronologique est l'utilisation de l'acronyme mnémotechnique SAFE-MARCHE-RYAN. Cette méthode aide à la réalisation systématique et hiérarchisée d'actions élémentaires de la prise en charge du blessé de guerre. Tout ce qui sauve le blessé dans les premières minutes y figure.

SAFE:

S= Stop the burning process : Savoir répliquez par les armes

A= Assess the scene: Appréhender la scène dans sa globalité y compris tactique F = Free of danger for you: Vous et le blessé êtes à l'abri

E= Evaluate for ABC: Airway (rechercher et traiter une obstruction des voies aériennes), Bleeding (garrot), Cognition(PLS)

MARCHE :

M= Massive bleeding control (garrot tactique, pansement compressif, ceinture pelvienne, suture)

A= Airway (subluxation, nettoyage cavité buccale, Guédel, coniotomie)

R= Respiration (1/2 assis, oxygène, exsufflation, pansement 3 côtés, intubation)

C = Choc, pas de pouls radial (perfusion, remplissage, adrénaline titrée)

H= Head, le blessé ne répond pas ou mal (PLS, SSH, intubation)

H = Hypothermie (mise au sec, isoler du sol, couverture, chaufferette)

E = Evacuation (avec le chef de groupe)

131

RYAN :

R= Réévaluation des blessés

Y= examen des yeux et de la sphère ORL (couvrir sans pression le globe oculaire, examiner les oreilles)

A= Analgésie pour une EVASAN supportable (immobilisation, morphine)

N = Nettoyer et parer les plaies (pansement simple, pansement abdominal)

132

Bibliographie

Livres :

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Aristote, Ethique à Nicomaque, trad. Brodéus R., GF, Flammarion, 2004.

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Armand Colin, 1983.

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2000

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Astrée, 2014.

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argent et guerre, éd. Pierre de Taillac, Paris, 2013.

Goya M., La chair et l'acier : l'armée française et l'invention de la guerre moderne

(1914-1918), Tallandier, 2004.

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librairie philosophique J. Vrin, Paris, 2000.

Grotius H., Droit de la guerre et de la paix (1625), trad. Pradier Fodéré P., PUF, 2nde

ed, 2012.

Harouel V., Histoire de la Croix-Rouge, coll « Que sais-je ? » n°831, PUF, 1999.

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Le droit international humanitaire (DIH) et le Service de Santé des Armées (SSA) français ont ceci en commun qu'ils cherchent tous deux à limiter les souffrances de l'Homme dans la guerre. Alors que la guerre change de visage, les personnels du SSA seront de plus en plus confrontés à des situations opérationnelles complexes qui conduisent à des questionnements juridiques et éthiques lourds. Dans ce contexte, l'intégration et l'application du DIH par le personnel du Service sont primordiales car elles protègent la vie humaine et répondent à des obligations juridiques, mais aussi parce qu'elles permettent de résoudre des conflits éthiques dans des situations d'urgence. Le retour d'expérience de l'opération Enduring Freedom en Afghanistan a permis de souligner l'importance d'organiser la diffusion, la formation et l'application du DIH. Grâce à cette étude nous pouvons nous interroger sur la manière la plus efficiente d'organiser le soutien en DIH afin d'assurer la bonne application des règles de droit dans les situations complexes par tous les personnels employés par le SSA.

Après une description de la méthodologie employée, cette étude propose donc une analyse de la diffusion, de l'enseignement, de la compréhension et des conditions d'application du DIH au sein du SSA sous forme AVOT de l'anglais de l'anglais Assets (atouts), Vulnerabilities (vulnérabilités), Opportunities (opportunités), Threats (menaces) 271. Cette analyse repose sur une analyse détaillée d'entretiens menés avec différents acteurs du soutien santé et du DIH, de la doctrine et des textes juridiques. Il s'agit d'identifier les atouts et les vulnérabilités quant à l'application du DIH au sein du SSA ainsi que les menaces que l'environnement opérationnel fait peser sur l'application du DIH par les personnels du SSA, et les atouts disponibles pour tirer partie des opportunités qui s'offrent à lui au niveau national et international. Puis à partir d'une analyse croisée de ces données, une discussion autour du cap qu'il serait souhaitable de fixer à l'organisation du DIH au sein du SSA nous permet d'établir les huit enjeux majeurs relatifs à une telle organisation afin de proposer neuf recommandations déclinées sous forme de fiche-action.

Mots clefs : service de santé des armées, droit international humanitaire, soutien santé des opérations militaires, soutien juridique opérationnel, analyse AVOT.

271 Une nouvelle doctrine de l'analyse SWOT.






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"Il ne faut pas de tout pour faire un monde. Il faut du bonheur et rien d'autre"   Paul Eluard