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Déterminants de l'exclusion bancaire au Cameroun

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par Martin AMBASSA
Université Catholique de Bertoua - Master Recherche 2014
  

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2. Les facteurs socio-économiques de l'exclusion bancaire : Revue de la littérature

La théorie de la frontière a pu déterminer les facteurs socioéconomiques de l'exclusion bancaire à partir de son analyse théorique. Cette théorie développée par Beck et de la Torre (2006), a servi de tremplin pour élucider l'exclusion bancaire. Cependant, des travaux ont précédés cette théorique et d'autres sont venus après cette théorie soit pour confirmer soit pour compléter l'analyse. Ainsi, ces travaux sont allés dans le même sens d'idée que la précédente théorie et leur pertinence justifie la présentation de leur analyse théorique dans cette rubrique. A cet effet, nous mettons en exergue une revue de la littérature sur les facteurs socioéconomiques ou facteurs liés à la demande de l'exclusion bancaire.

(a) Les facteurs sociaux de l'exclusion bancaire

Une série de facteurs sociétaux a été identifiée comme exerçant un impact sur l'accès et l'utilisation des services bancaires.

L'exclusion bancaire est affectée par des facteurs tels que, l'évolution démographique et technologique. En effet, la population âgée éprouve des difficultés pour rester dans le système bancaire du fait des nouvelles technologies mises en place pour l'utilisation ou la gestion des moyens de paiement. La hausse du nombre de divorces et la tendance des jeunes à quitter la maison à un âge plus avancé contraignent les banques à rationner certains services (Anderloni et Carluccio, 2006; Kempson et al, 2000). Kempson (2006) souligne qu'il existe un lien entre les niveaux d'exclusion bancaire et les niveaux d'inégalité de revenus mesurés par les coefficients de Gini. En effet, le coefficient de Gini est une fonction inverse de la demande des services bancaires. Par ailleurs, une série de raisons psychologiques, culturelles et les zones rurales, découragent l'accès et l'utilisation des services bancaires de transaction. Cela concerne le plus lespersonnes âgées. Elles font partie d'une catégorie de personnes de bas revenus en général et considèrent souvent le système bancaire comme n'étant adapté qu'aux plus riches qu'eux et qui craignent de perdre le contrôle sur leur argent s'ils ne payent pas en monnaie sonnante et trébuchante et les coûts liés à l'accès en termes de distance (Anderloni, 2003). En outre, la complexité et l'incompréhension liées à l'usage des services bancaires (vocabulaire technique, dématérialisation), peuvent entraîner des difficultés et mettre en péril un équilibre budgétaire déjà fragile. Pour Demirguc-Kunt et Klapper (2012), la probabilité de posséder un compte formel est plus élevée chez les hommes que chez les femmes bien que l'écart entre hommes et femmes soit relativement faible. Pour la base de données global findex issue de l'enquête sur l'accès aux services financiers en Afrique Subsaharienne, les adultes possédant une éducation du niveau tertiaire et ceux de la tranche d'âge allant de 25 à 64 ans ont plus de chances d'être bancarisés. En fin, les raisons morales ou religieuses peuvent accentuer l'exclusion bancaire. Il s'agit principalement de personnes qui refusent les services de crédit ou les produits d'épargne rémunérés. Ce motif d'exclusion reste très minoritaire (Gloukoviezoff, 2004).

(b) Les facteurs économiques de l'exclusion bancaire

La première analyse de l'exclusion bancaire arrive à la conclusion qu'elle est constituée de « processus servant à empêcher certains groupes sociaux et individus d'accéder au système financier » (Leyshon et Thrift, 1995). Les auteurs y soutiennent que les bas revenus et certains groupes sociaux défavorisés représentent un trop grand risque pour devenir clients des institutions financières « classiques » qui, de ce fait, évitent certaines zones géographiques où ces franges de la population sont établies. Kempson et Whyley (1999) pensent que l'exclusion bancaire est volontaire et qualifie ce volontarisme par l'auto exclusion. Ils stipulent que, les personnes réduisent leur consommation des services bancaires au fur et à mesure que leur situation socioéconomique se dégrade jusqu'à ne plus posséder de compte bancaire. Après des études en Afrique Centrale sur les difficultés d'accès aux services financiers, Demirgüc-Kunt et Klapper (2012) indiquent que l'argument le plus fréquemment avancé dans la région pour justifier le fait de ne pas posséder de compte formel est que l'on ne dispose pas d'assez de revenu pour en utiliser un. Telle est la réponse donnée par 81 % des adultes ne possédant pas de compte formel, 30 % citant cet argument comme seule et unique raison. Gloukoviezoff (2004) aussi, met en exergue un lien évident entre la faiblesse des ressources et la privation d'accès à différents services bancaires.

Cependant, il affirme que l'exclusion bancaire ne se résume pas à cela. Les difficultés d'usage ne sont pas liées uniquement au niveau du revenu mais également, à l'inadéquation entre les besoins et capacités des personnes et les réponses apportées par les établissements bancaires. Le niveau de revenu de certains individus ne leur permettedonc pas de s'acquitter des frais liés à la tenue d'un compte (Moran K., 2006 Djankov et Al. 2008 ; Lyons et al. 2004 ; De Sousa, 2010 ; Anderson, 2006 ; Caskey, 1997, 2002). Il en ressort que, le chômage, l'instabilité d'emploi, de bas revenus ou d'autres caractéristiques personnelles constituent des freins à l'inclusion bancaire et par conséquent accentuent l'exclusion bancaire (Corr, 2006 ; Ellison, Collard et Forster, 2006 ; Kempson et Whyley, 1999 ; Kempson et al, 2000 ; Nieri, 2006). Toutefois, ils continuent en affirmant que les prix sont une fonction décroissantede la demande des services bancaires.

Figure 2: Récapitulatif des facteurs socio-économiques de l'exclusion bancaire

Exclusion Bancaire

Facteurs sociaux

o Evolution démographique et -technologique

o Illettrisme, sexe, âge, zone rurale

o Raisons religieuses, culturelles, psychologiques

o Inégalités des revenus, chômage

Facteurs économiques

o Revenu insuffisant

o Richesse insuffisante

o Prix

Source : fait par l'auteur à partir de la littérature y afférente.

(c) Repères théoriques pour une Analyse Monétaire de l'Exclusion Bancaire

Percevoir un salaire ou des prestations sociales, louer un logement, payer ses factures, tous ces éléments du quotidien des ménages ne peuvent quasiment plus se faire aujourd'hui, dans les sociétés modernes, sans avoir recours aux services bancaires (Gloukoviezoff, 2004). Les sociétés modernes connaissent un phénomène d'intensification de la financiarisation13(*) des rapports sociaux. Alors que l'on pouvait vivre sans compte bancaire dans les années antérieures, cela est illusoire aujourd'hui. Cette intensification explique l'apparition de l'exclusion bancaire. L'analyse monétaire de l'exclusion bancaire met en exergue le rôle que joue la monnaie dans les rapports sociaux d'une part et d'autre part, le lien entre l'exclusion bancaire et l'exclusion sociale.

· Financiarisation des rapports sociaux : La monnaie qui fait lien

Depuis les travaux de George Simmel puis ceux de Karl Polanyi il ressort que la monnaie est bien plus qu'une marchandise permettant uniquement de faciliter la réalisation de l'échange marchand. Bien que le travail reste une valeur centrale et la première source d'intégration et de valorisation de soi, l'argent joue à ses côtés un rôle croissant.

Ainsi, en suivant l'analyse que fait Bernard Perret (1999) des travaux de Georg Simmel, il apparaît que la monétarisation14(*) de la vie sociale traduit l'exigence de chacun d'avoir « le choix » et d'être « autonome ». Il poursuit son analyse sur la médiation monétaire, ce phénomène qualifié de monétarisation « a des effets structurels : elle agit comme principe actif, une force qui configure la société, une norme qui s'impose au jugement, voire une règle de conduite dont le champ et la légitimité ne cessent de s'étendre ». Le rôle social de la monnaie souvent considéré comme une survivance des sociétés traditionnelles est en réalité un élément fort des sociétés modernes. En effet, parallèlement au développement de la concurrence marchande, il s'étend aux différentes sphères de la vie sociale.

Pour Commons, qui amplifie l'analyse de Simmel, « la monnaie est une institution parmi les plus fondamentales des sociétés humaines et non pas un simple instrument facilitant les échanges, ni une marchandise ». La monnaie ainsi est ce qui faitle lien dans une société (Servet, 2004). Certes, elle est largement pensée aujourd'hui comme une coupure. Elle apparaît comme ce qui permet par l'acte de paiement de solder les comptes, de mettre fin aux obligations nées des contrats de vente-achat ou de prêt ; grâce à la monnaie, la relation économique paraît ainsi pouvoir se dissoudre. Ce faisant, la monnaie est représentée comme instrument de relations essentiellement bilatérales ; un instrument commun certes grâce à sa fongibilité et aux capacités de divisibilité des divers moyens de paiement, mais un instrument qui ne semble faire unité que par sommation.

Ainsi, de manière croissante, les trois types de liens identifiés comme constitutifs du lien social s'expriment à travers elle : que ce soit l'estime de soi entretenue par la possibilité de « claquer » de l'argent (Petonnet, 1979), le lien relationnel entretenu par des consommations de services, d'activités de loisir, etc., payants, ou enfin le lien à la société qui dépend de « l'utilité » supposée de chacun, mesurée par le revenu.

C'est le fait que les ressources monétaires nécessaires, pour entretenir ces liens, doivent être mobilisées par l'intermédiaire du secteur bancaire et des services qu'il propose qui est au centre de l'analyse de l'exclusion bancaire. Le processus d'inclusion bancaire de la population, à l'oeuvre depuis plusieurs années dans les sociétés contemporaines, a donc conduit les services bancaires, à devenir l'un des éléments clefs de l'intégration aux sociétés contemporaines.

· Exclusion bancaire et Exclusion sociale

L'exclusion sociale est un défaut de participation à la société soulignant la nature multidimensionnelle, multicouche et dynamique du problème. Elle est à cet effet, caractérisée par : un défaut de participation (l'exclusion s'exprime sous forme de degré puisque les individus peuvent participer dans une mesure plus ou moins large et que celle-ci est en relation avec la société en question), un cadre multidimensionnelle (L'exclusion sociale englobe le faible niveau de revenu, mais plus encore, d'autres types de désavantages liés ou non aux bas revenus, comme le chômage ou le manque d'estime de soi), et une sphère Multicouche (Même si ce sont des individus qui souffrent d'exclusion, les causes sont reconnues comme opérant à différents niveaux : celui de l'individu, du ménage, de la communauté et des institutions).

Lorsqu'on se réfère à la définition de l'exclusion bancaire15(*) évoquée en introduction générale, et à celle de l'exclusion sociale sus évoquée, à l'examen de ces deux définitions, nous arrivons à la conclusion selon laquelle, l'exclusion bancaire est profondément liée à l'exclusion sociale (Anderloni et al, 2008). À l'instar du chômage de longue durée, les difficultés bancaires peuvent conduire les personnes à la dépression et/ou à d'autres problèmes de santé. Dès lors, avec l'impossibilité de maintenir l'équilibre budgétaire et de faire face aux dépenses du quotidien afin de se procurer les services bancaires par exemple, l'estime de soi et la santé physique et psychique sont mises à mal (Ébermeyer et al, 2003 ; Brunet et al, 2004). Ne pas avoir accès ou ne pas maîtriser les services bancaires, empêche de mener une vie sociale « dans la norme », par conséquent, l'exclusion bancaire devient vectrice d'exclusion sociale (Gloukoviezoff, 2004).

* 13un ensemble de contraintes à l'emploi des moyens de paiement et de règlement et au recours au crédit et à la protection contre les risques, contraintes qui agissent de façon différente, directe ou indirecte, tant au

Nord qu'au Sud, individuellement sur les personnes et les entreprises, et collectivement sur les groupes sociaux » (Servet, 2004b, p. 8)

* 14·Transformation de façon à ce que ce soit basé sur l' argent ou transformation en valeur monétaire.

* 15Processus par lequel une personne rencontre des difficultés pour accéder à et/ou utiliser des services et produits bancaires sur le marché classique, adaptés à ses besoins et lui permettant de mener une vie sociale normale dans la société à laquelle elle appartient.

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"Nous devons apprendre à vivre ensemble comme des frères sinon nous allons mourir tous ensemble comme des idiots"   Martin Luther King