WOW !! MUCH LOVE ! SO WORLD PEACE !
Fond bitcoin pour l'amélioration du site: 1memzGeKS7CB3ECNkzSn2qHwxU6NZoJ8o
  Dogecoin (tips/pourboires): DCLoo9Dd4qECqpMLurdgGnaoqbftj16Nvp


Home | Publier un mémoire | Une page au hasard

 > 

La médiatisation de la "question anglophone" dans les journaux camerounais pendant le cinquantenaire de la réunification du Cameroun

( Télécharger le fichier original )
par Vireil Renaud EBOTO
Université de Douala - Master 2 en communication sociale et médiatique 2014
  

sommaire suivant

Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy

INTRODUCTION GÉNÉRALE

1

La médiatisation de la « question anglophone » dans les journaux camerounais pendant la célébration du cinquantenaire de la réunification du Cameroun.

2

La médiatisation de la « question anglophone » dans les journaux camerounais pendant la célébration du cinquantenaire de la réunification du Cameroun.

Notre mémoire s'intitule : « La médiatisation de la « question anglophone » dans les journaux camerounais à partir de la célébration du cinquantenaire de la réunification du Cameroun ». Il s'agit d'un travail présenté en vue de l'obtention du master 2 recherches en communication médiatique. Le contexte d'étude justifie le choix de ce thème de recherche.

1- CONTEXTE D'ÉTUDE

Lundi 2 mai 2015, le quotidien La Nouvelle Expression dans son numéro 3971 en page 3, titre : « Barreau du Cameroun : Les avocats anglophones exigent le fédéralisme. Ils arguent qu'ils doivent préserver leur culture et le Common Law que l'Etat veut phagocyter ». Cet incident survient un an et trois mois à peine après la célébration du cinquantenaire de la réunification du Cameroun. Lors de cet évènement historique, une série de festivités supposées marquer l'unité de tous les Camerounais a été organisée entre anglophones et francophones. Le but étant de célébrer le vivre ensemble dans la République Unie, une République bilingue où les libertés individuelles sont un principe cardinal. Le constat un an plus tard est aux antipodes des résultats attendus selon certains anglophones. Nous sommes partis des revendications sécessionnistes des années 90, menées par quelques groupes radicaux taxés d'indépendantistes et minimisés en leur temps par la presse et l'opinion publique' au vu de la nature dite grossière et exagérée de ces récriminations, à un plaidoyer argumenté mené par la corporation des avocats anglophones. De 1990 à 2015 nous avons quitté le terrain de la rue et des tracts, pour rejoindre celui des médias et des tribunaux. A l'entame de 2015, c'est au tour des avocats anglophones de devenir « les porte-voix » de cette contestation. Une contestation qui continue jusqu'en 2016 tel que l'atteste La Nouvelle Expression dans son numéro 4329 du Mardi 11 Octobre 2016 qui publie : Barreau du Cameroun : La grève des avocats anglophones commence ce jour. L'on pourrait être tenté de se demander à quoi auront servi les réjouissances du cinquantenaire de la réunification du Cameroun si ce n'était pour ouvrir le débat sur le « vivre ensemble » et évacuer les frustrations de toute nature ? D'où vient-il que nous en soyons encore à spéculer sur la « question anglophone » de nos jours ? Pourtant la presse écrite selon certains observateurs a fait son travail en relayant l'information. Toutefois, en nous intéressant à la construction des contenus médiatiques, l'on s'aperçoit que tous les médias et produits médiatiques sont conçus et diffusés par des organisations et des entreprises pour réaliser des objectifs de différentes natures. L'offre médiatique peut être catégorisée en trois types: premièrement, des produits

3

La médiatisation de la « question anglophone » dans les journaux camerounais pendant la célébration du cinquantenaire de la réunification du Cameroun.

qui visent à satisfaire les désirs de divertissement des publics que le diffuseur souhaite pour des raisons économiques. Deuxièmement, des produits qui visent à réaliser des objectifs sociopolitiques tels que : informer et éduquer. Troisièmement, des produits à visée persuasive explicite, attribués à des organisations (annonceurs) publiques ou privées qui tentent d'influencer des individus1. En nous fondant sur ce triptyque, l'étude de la perception de la « question anglophone » par les journaux locaux, nous en apprendrait davantage sur la construction médiatique et le traitement réservé à ce sujet pendant la célébration du cinquantenaire de la réunification du Cameroun.

2- PROBLÉMATISATION :

Il sera question à ce niveau de faire une revue de la littérature, poser le problème de recherche, déterminer les questions de recherche et émettre des hypothèses.

2.1 REVUE DE LA LITTÉRATURE:

Trois documents nous permettent d'entrée de jeu de nous faire une idée sur l'identité anglophone au Cameroun, notion importante pour la bonne compréhension de la « question anglophone » : Le « problème anglophone » au Cameroun dans les années 1990 ; Dynamique de positionnement anglophone et libéralisation politique au Cameroun : de l'identité à l'identification ; et l'article « Révision constitutionnelle » du 18 janvier 1996 : Comment constitutionnalise-t-on le « nous » au Cameroun dans l'Etat post- unitaire ?

Piet Konings2dans son ouvrage : Le « problème anglophone » au Cameroun dans les années 1990 estime que: « L'usage du terme Southern Cameroon présenterait l'avantage de jeter les bases historiques et géographiques de l'identité Anglophone...dans cette hypothèse, les immigrés d'origine ethnique francophone, seraient exclus de la citoyenneté du Southern Cameroon's alors qu'ils peuvent être plus anglophone au sens culturel et linguistique du terme... ».

Louis-Marie NKOUM-ME-NTSENY3 ajoute : « L'invention de l'identité anglophone découle de sa constitution en enjeu colonial par l'administration britannique, puis en enjeu

1Chabrol C, « La Réception : étude des processus d'évaluation des débats médiatiques », pp. 189-230, in : Charaudeau P., éd., La Télévision, les débats culturels « Apostrophes », Paris, (1991), Didier Érudition. 2Konings P, Le « problème anglophone » au Cameroun dans les années 1990, Ocisca/Orstom, Page 29. 3 NKOUM-ME-NTSENY L, Dynamique de positionnement anglophone et libéralisation politique au Cameroun : de l'identité à l'identification, Page 18

4

La médiatisation de la « question anglophone » dans les journaux camerounais pendant la célébration du cinquantenaire de la réunification du Cameroun.

diplomatique et politique par les investisseurs identitaires de tous bords » dans son mémoire intitulé : Dynamique de positionnement anglophone et libéralisation politique au Cameroun : De l'identité à l'identification.

Luc SINDJOUN4quant à lui en parle en ces termes : « la libéralisation politique est un moment de constitution de la communauté anglophone en groupe ethnique dont l'ancêtre fondateur est l'administration britannique, le territoire identitaire, l'ex-Southern Cameroon's et la langue de référence l'anglais ».

Pour poser les bases de la « question anglophone » au Cameroun, « in limine litis », il faudrait au préalable situer cette problématique par rapport à un questionnement similaire et antérieur.

Nathan Weinstock5 dans son ouvrage : Le Sionisme contre Israël nous permet d'avoir une idée de la question juive. L'auteur cite tout d'abord Jean-Paul Sartre qui s'exprime sur la haine des juifs : « L'antisémitisme est une tentative pour valoriser la médiocrité en tant que telle, pour créer l'élite des médiocres. Pour l'antisémite, l'intelligence est juive, il peut donc la mépriser en toute tranquillité comme toutes les autres vertus que possède le juif...l'antisémite est donc un homme qui a peur, non pas des juifs mais de sa conscience, de sa liberté, de ses instincts, de ses responsabilités, de la solitude, du changement, de la société et du monde ; de tout sauf les juifs. C'est un lâche ». Ensuite il cite Lénine qui parle de la nation juive comme étant « la nation la plus opprimée et la plus traquée ». Lénine qui reconnait que déjà en 1905, les « travailleurs juifs souffrent à la fois d'une oppression économique et politique [...] en tant que nationalité privée de tout droit 6». Pour Lénine, « la nation juive est la seule nation ex-territoriale [...] qui ne jouit pas d'une autonomie nationale culturelle ». Nathan Weinstock ainsi que d'autres auteurs tels que Maxime Rodinson7, Abraham Léon8 et Isaac Deutscher9présentent la question juive comme une question de minorité et de discrimination de classe sociale ayant abouti à un holocauste sous Hitler. De la question juive nous retenons les thématiques suivantes : haine, mépris, peur, lâcheté, autonomie culturelle, oppression, minorité et discrimination. Le contexte dans lequel émerge la question juive n'est pas le même que celui dans lequel émerge le problème anglophone. La

4Sindjoun L, « Identité nationale et « Révision constitutionnelle » du 18 janvier 1996: Comment constitutionnalise-t-on le « nous » au Cameroun dans l'Etat post- unitaire ? »

5 Weinstock N, Le Sionisme contre Israël, Quatrième Internationale, (1969), Page 19.

7Rodinson M, Peuple juif ou problème juif, Maspero

8Abraham L, La Conception matérialiste de la question juive, EDI 9Deutscher I, Essais sur le problème juif, Payot

5

La médiatisation de la « question anglophone » dans les journaux camerounais pendant la célébration du cinquantenaire de la réunification du Cameroun.

thématique qui pourrait nous permettre d'établir un lien entre les deux est la discrimination. Le problème anglophone se pose en termes de discrimination de la majorité francophone vis-à-vis de la minorité anglophone.

Yves Bénot dans idéologies des indépendances africaines10, donne trois principales connotations au terme idéologie : système de pensée politique, mobilisateur des énergies et représentation des réalités vécues. L'auteur de cet ouvrage a travaillé dans l'optique de comprendre la nature de ces idées susceptibles de devenir des forces matérielles lorsqu'elles pénètrent les masses. L'auteur évoque le fait que l'Afrique Anglophone soit plus empirique du fait du colonialisme anglais avec un cadre institutionnel qui a été moins rigide. L'indépendance apparait plus tôt en Afrique Anglophone et n'avait pas la même résonnance subversive qu'en AOF. Ensuite l'auteur évoque l'unité africaine qui doit comporter selon lui trois volets : culturel, politique et économique ; et il reconnait avec regret le recul de l'unification en Afrique du fait selon lui des divergences profondes sur l'orientation politique à donner aux indépendances. Cet ouvrage nous permet de prime à bord de comprendre dans quelles logiques les indépendances africaines ont été amorcées pour traiter de manière plus scientifique « la question anglophone ». Ensuite, il nous permet d'envisager les idéologies qui sont sous-jacentes à la médiatisation d'une question aussi délicate que « la question anglophone » par la presse écrite camerounaise.

Ngomba Endeley dans l'oeuvre issues of minority rights in the context of political liberalization : The case of Anglophone Cameroon, met en exergue les droits des minorités, notamment des anglophones, qui sont bafoués au Cameroun dans un contexte où nous parlons beaucoup de droits de l'homme et des libertés. L'objectif de sa recherche est de comprendre la corrélation entre le droit des minorités et la libéralisation politique au Cameroun. L'auteur estime que la minorité anglophone a été flouée dans le partage des avantages politiques. Il propose même de revisiter les traités fondateurs du Cameroun dans lequel les anglophones ont selon l'auteur des motifs de frustration. Cet ouvrage nous facilite la compréhension de la « question anglophone ». Mais nous comptons nous focaliser sur l'analyse des articles de journaux locaux rédigés sur la « question anglophone » pendant le cinquantenaire de la réunification.

10 Bénot Y, Idéologies des indépendances africaines. In: Tiers-Monde, tome 14, n°53, (1973).

6

La médiatisation de la « question anglophone » dans les journaux camerounais pendant la célébration du cinquantenaire de la réunification du Cameroun.

Dans son ouvrage, Virtual activism on Cameroon : The Camnet Files, Isaac Endeley fait une compilation de correspondances électroniques des camerounais se trouvant de part et d'autre du globe sur les questions de sociopolitique intérieure. Son objectif est de montrer l'influence de l'Internet dans les affaires sociales et politiques au Cameroun. Il répertorie des emails envoyés par les camerounais de tous bords sur le forum Camnet et revisite les grandes thématiques de la politique générale du Cameroun à partir des élections parlementaires de 1997. Ensuite l'auteur s'attarde sur le problème anglophone, en faisant un rappel historique, dans le but de permettre aux lecteurs de mieux comprendre comment ce problème a été fabriqué. Isaac Endeley s'intéresse dans cet ouvrage à des thématiques telles que : La liberté d'expression au Cameroun, la violence politique et le caractère des institutions Camerounaises. Notre problématique dans ce travail de recherche est différente. Nous voulons essayer de comprendre comment la presse locale a traité cette « question anglophone » pendant le cinquantenaire de la réunification.

Wakata Bolvine François nous intéresse avec sa thèse qui porte sur : Politique d'information et pratiques journalistiques : Les différences de traitement de l'information entre journalistes anglophones et francophones à Cameroon Tribune. Ici l'auteur met l'accent sur la dimension conflictuelle de l'analyse des pratiques, les différences et les divergences de conception et d'application des exigences normatives et pragmatiques du journalisme à l'intérieur d'un même organe de presse11. Il s'intéresse aux différences et particularités du journalisme tel qu'il est pratiqué au Cameroun. Une situation évocatrice des disparités de références sociales et politiques des journalistes. Il ouvre le débat sur le traitement de l'information opéré dans le journal « bilingue » gouvernemental et constate un bilinguisme discriminatoire au profit des francophones. Cette thèse nous permet d'entrevoir de manière claire la « question anglophone » dans la presse écrite. Toutefois l'auteur s'est appesanti uniquement sur le cas de Cameroon Tribune. L'analyse que nous comptons réaliser, concerne un corpus plus élargit comprenant en plus de Cameroon Tribune, The Post, Le Messager et permettant d'avoir une meilleure lisibilité sur le processus de médiatisation de la « question anglophone » dans les journaux camerounais.

11 Wongo Ahanda A, La Communication au Cameroun : Bibliographie annotée et commentée de 40 ans de recherche, L'Harmattan, (2005), Page 19

7

La médiatisation de la « question anglophone » dans les journaux camerounais pendant la célébration du cinquantenaire de la réunification du Cameroun.

Dans sa thèse de doctorat soutenue en 2011 à l'Université de Paris-Sorbonne intitulée : Aspects de la construction nationale après les indépendances Camerounaises : Le désir de sécession (1960-2009), Michel Olinga traite du problème de la construction nationale dans un contexte de multi appartenance. Il analyse les aspirations de sécession des anglophones, les revendications à la fois modérées et sécessionnistes qu'il qualifie de stratégie complexe. L'auteur s'intéresse également aux différentes manifestations autour du désir de sécession anglophone, les actions ou les attitudes des différents facteurs et acteurs de la question. Michel Olinga pense le problème anglophone existe au Cameroun et se pose en termes politico historique. Ce problème ne saurait être comme le défend le Gouvernement Camerounais et comme nous pourrions être tentés de le croire, un appel à la destruction de l'unité nationale et encore moins, un frein à la construction nationale en cours, mais plutôt un appel à la déconstruction du type d'unité et de construction nationale entretenue jusqu'ici, pour mettre en avant un type de construction nationale plus inclusif. Sa thèse nous a été utile, bien que nous ne voulions plus mettre en lumière les velléités sécessionnistes. Notre objectif est d'analyser le traitement réservé par la presse écrite à cette question.

La publication d'Aboya Manassé Endong intitulée : Menaces sécessionnistes sur l?Etat Camerounais, parut dans le numéro 285 de décembre 2002 du Monde Diplomatique nous intéresse. Dans cet article l'auteur met davantage en exergue le conflit qui oppose les sécessionnistes et l'Etat du Cameroun. Il s'intéresse aux affrontements qui ont eu lieu le 30 décembre 1999 et le 1er octobre 2000 et qui ont fait réagir le Secrétaire Général des Nations Unies Koffi Annan, en visite à Yaoundé. L'auteur traite de la « question anglophone » en faisant un rappel socio politico historique. Il présente la dangerosité de ce problème pour la stabilité du pays. Cet article sera utile dans notre travail dans la mesure où il nous permettra d'aborder le contexte politico historique de la « question anglophone ». Cependant l'auteur n'a traité de ce problème que sous l'angle socio-politique. Nous allons plutôt aborder cette question en examinant le processus de construction médiatique de la « question anglophone », en nous interrogeant sur les modalités d'apparition de la « question anglophone » dans l'agenda des médias.

Marc Joseph Omgba Etoundi dans sa thèse d'habilitation à diriger les recherches en sciences et techniques de l'information et de la communication intitulée : La presse camerounaise dans tous ses états : Esquisse de présentation de la presse écrite camerounaise des origines à nos jours avec un gros plan sur la presse écrite de langue française pour la

8

La médiatisation de la « question anglophone » dans les journaux camerounais pendant la célébration du cinquantenaire de la réunification du Cameroun.

période de 1982 à 199712 pose le problème du rôle joué par la presse en général dans l'évolution des sociétés. Cet auteur en se focalisant uniquement sur la presse écrite de langue française pose même déjà de manière implicite le problème anglophone, de par son omission de la presse écrite de langue anglaise dans sa recherche. C'est un travail qui nous intéresse dans la mesure où le chercheur distingue différents types de presse écrite : la presse écrite de service public, la presse d'entreprise, la presse privée d'information générale et politique, la presse spécialisée. Toutefois, nous n'allons plus nous interroger sur le rôle de la presse écrite mais plutôt sur le traitement fait par la presse écrite de la « question anglophone ».

Dans sa thèse intitulée : Journalismes, discours et publics : une approche comparative de trois types de presses, de la production à la réception de l?information soutenue le 5 novembre 2010 à l'Université de Toulouse 2, Emmanuel Marty estime que depuis la production du discours de presse, jusqu'à sa réception en passant par le discours lui-même, une société et sa presse ont des relations d'interdépendance. Ici l'auteur pose le problème du rôle démocratique de la presse. Il se pose la question de savoir si la presse permet au public d'accéder à une information libre, diversifiée et exhaustive, formulant et alimentant dans ses instances un débat social contradictoire à l'échelle de son audience ? Pour l'auteur, il existe des mécanismes qui empêchent à la presse d'être objective dans le traitement de l'information. Notre recherche ne sera pas axée sur le problème devenu vétuste du rôle de la presse écrite. Nous allons travailler sur la perception de la « question anglophone » qui est inhérente au traitement de cette thématique par les journaux locaux.

Thomas Atenga dans son article paru dans les cahiers du journalisme numéro 26 de 2014, intitulé : Communication et journalisme au Cameroun : « affaires » de lucidités croisées, du terme emprunté à Pierre Bourdieu, essaye de comprendre les mécanismes, le mode opératoire, la coordination de ces « lucidités croisées » pour voir comment elles contribuent à la productivité, aux performances ainsi qu'à la notoriété ou la délégitimation d'un média. Cet article nous apporte beaucoup dans la compréhension des logiques sociales qui peuvent sous-tendre la rédaction d'un article. Notre recherche sera plus précise en ce sens que nous n'allons pas travailler sur le grand ensemble, communication et journalisme, qui semble être un champ très vaste, nous allons affiner notre recherche en nous intéressant uniquement à la presse

12 Omgba Etoundi M.-J., « La presse camerounaise dans tous ses états: Esquisse de présentation de la presse écrite camerounaise des origines à nos jours avec un gros plan sur la presse écrite de langue française pour la période de 1982 à 1997 », Université de Droit, d'Économie et de Sciences sociales de Paris II-Panthéon, (2000)

9

La médiatisation de la « question anglophone » dans les journaux camerounais pendant la célébration du cinquantenaire de la réunification du Cameroun.

écrite. Nous allons recenser et analyser les articles de journaux parus pendant le cinquantenaire de la réunification sur la « question anglophone » pour essayer de comprendre quelle est la perception de ce problème par la presse écrite locale.

Antoine Wongo Ahanda, dans cette publication : La Communication au Cameroun : Bibliographie annotée et commentée de 40 ans de recherche préfacée par Jacques Fame Ndongo, se pose la question : quelle communication pour la société camerounaise ? Il peint le contexte Camerounais marqué par un mouvement permanent de libéralisation effective de la communication sur une surface médiatique où se construit une liberté de presse et d'expression dont certaines illustrations constituent une réelle exception camerounaise. Ici l'auteur pose le problème de l'objectivité de la communication au Cameroun, dans la mesure où la communication peut être utilisée selon le préfacier comme un mode d'avilissement des masses, par l'instrumentalisation des techniques modernes dans un but de désinformation voir de clochardisation et de viol des consciences. Le problème que soulève cette étude nous intéresse au plus haut point, dans la mesure où il nous permettra de peindre le contexte de la communication au Cameroun. Ce qui nous emmènera à montrer l'impact de ce contexte dans la cristallisation de la « question anglophone », bien que nous n'envisagions pas de travailler sur le concept de l'objectivité des médias. Nous allons nous intéresser à la perception de la « question anglophone » par la presse camerounaise. Une perception qui aboutit à une certaine construction médiatique de la « question anglophone » et à un traitement bien précis de la question pendant le cinquantenaire de la réunification.

Jacques Fame Ndongo dans Médias et enjeux des pouvoirs. Essai sur le vouloir-faire, le savoir-faire et le pouvoir-faire13 fait une analyse de l'impact des médias sur la réalisation des actions menées par les pouvoirs. Il met en relief la relation entre médias et pouvoirs en soulignant que les pouvoirs sont pluriels. Selon l'auteur il existe souvent une opposition entre savoir-faire, vouloir-faire et pouvoir-faire. Ce travail nous servira à comprendre les éventuelles interactions qui peuvent exister entre médias et monde politique. Nous nous en inspirerons pour vérifier l'agenda des médias dans le but de savoir comment apparait la « question anglophone » dans l'agenda des journaux camerounais.

13Fame Ndongo J, Médias et enjeux des pouvoirs. Essai sur le vouloir-faire, le savoir-faire et le pouvoir-faire, Yaoundé, Presses Universitaires de Yaoundé, (2006)

10

La médiatisation de la « question anglophone » dans les journaux camerounais pendant la célébration du cinquantenaire de la réunification du Cameroun.

Misse Misse dans son article intitulé la médiatisation de la catastrophe de N'SAM dans la presse hebdomadaire camerounaise essaye dans un premier temps de comprendre la dynamique du processus de construction politico médiatique de la catastrophe de N'SAM dans la presse hebdomadaire camerounaise. Ensuite il s'intéresse aux stratégies utilisées par ces journaux pour porter cet évènement à la connaissance du grand public. Les objectifs de cet article rejoignent les nôtres. Seulement dans notre démarche scientifique nous voulons éluder l'aspect politique pour nous concentrer sur le processus de construction médiatique et les stratégies éditoriales de la presse écrite locale. Cet auteur a travaillé avec des journaux hebdomadaires tels que Dikalo et Le Messager qui était à l'époque un hebdomadaire. Nous allons travailler avec des quotidiens et nous souhaitons avoir un spectre plus large en sélectionnant : un journal bilingue, un journal anglophone et un journal francophone. De plus notre problème porte sur la perception de la « question anglophone » et nous aurons une approche quantitative en plus de l'approche qualitative utilisée par l'auteur dans son article.

Eliseo Véron dans construire l'évènement14 nous permet d'entrer de plein pied dans notre problème de recherche. Ici l'auteur pose le postulat selon lequel les événements sociaux ne sont pas des objets qui se trouveraient tous faits quelque part dans la réalité et dont les médias nous feraient connaître après coup les propriétés : ils n'existent que dans l'exacte mesure où ces médias les façonnent. Pour Véron, les médias doivent s'en tenir à une idéologie de la représentation dont l'axe majeur demeure le principe d'objectivité. Il se pose la question de savoir comment les choses se passent-elles dans les faits ? Pour lui, l'évènement s'impose partout dans l'intersubjectivité des acteurs sociaux. Véron nous permet de comprendre les logiques qui sous-tendent la construction de l'évènement. Cet ouvrage est très enrichissant pour nos travaux bien qu'à la différence de Véron nous ne travaillons pas sur la notion d'objectivité. De plus la « question anglophone » n'est pas un évènement dans son sens premier. C'est un ensemble de revendications qui apparaissent et disparaissent des médias au gré de leurs agendas respectifs.

Maurice Mouillaud et Jean-François Têtu dans le journal quotidien15, posent le problème de la spécificité des quotidiens. L'objectif des auteurs étant de rendre compte des modalités de production du sens dans le journal, en partant de l'information, jusqu'aux pratiques citatives

14Véron E, Construire l'événement - les médias et l'accident de Three Miles Island, Paris, Éditions de Minuit, (1981)

15 Mouillaud M, Tetu J.F, Le journal quotidien, Lyon, Presses Universitaires de Lyon, (1989)

11

La médiatisation de la « question anglophone » dans les journaux camerounais pendant la célébration du cinquantenaire de la réunification du Cameroun.

et argumentatives. Ce travail nous permettra de repérer les logiques d'argumentations et les stratégies éditoriales de la presse écrite. Nous allons nous intéresser non pas aux modalités de production du sens dans les journaux comme Maurice Mouillaud et Jean-François Têtu, mais à la perception d'une question par les journaux qui construiront son sens par la suite. Nous voulons démontrer que : si la perception d'une question est viciée dès le départ par des stéréotypes ou par des préjugés, la construction médiatique qui s'en suivra sera faussée.

2.2- PROBLÈME DE RECHERCHE :

Au lendemain de la célébration du cinquantenaire de la réunification, le problème relatif à la perception de la « question anglophone » se pose avec acuité. Les idées arrêtées et préconçues de certaines rédactions sur ce sujet peuvent avoir eu une influence sur le traitement de cette question pendant la période citée ci-dessus. D'ailleurs, la « question anglophone » n'a toujours pas été évacuée des colonnes des journaux camerounais et des débats dans la sphère médiatique, même si l'on a constaté sur le terrain pendant nos repérages une certaine gêne, une certaine réticence à parler de ce sujet ouvertement et librement.

2.3- QUESTIONS DE RECHERCHE : - Question principale :

Quelle perception de la « question anglophone » se dégage des journaux camerounais au lendemain de la célébration du cinquantenaire de la réunification du Cameroun ?

- Question secondaire 1 :

Quelles sont les stratégies éditoriales utilisées par les journaux camerounais pour traiter de la « question anglophone » pendant le cinquantenaire de la réunification ?

- Question secondaire 2 :

Comment apparait « la question anglophone » dans l'agenda des journaux camerounais?

2.4- HYPOTHÈSES :

- Hypothèse principale :

Nous pouvons supposer que la « question anglophone » est perçue dans les journaux camerounais comme un problème de revendications de prébendes politiques.

12

La médiatisation de la « question anglophone » dans les journaux camerounais pendant la célébration du cinquantenaire de la réunification du Cameroun.

- Hypothèse secondaire 1 :

Le traitement de la « question anglophone » dans les journaux camerounais est dépendant des différentes lignes éditoriales.

- Hypothèse secondaire 2 :

La « question anglophone » apparait dans l'agenda des journaux camerounais en fonction des interactions.

3- LES OBJECTIFS DE LA RECHERCHE : - Objectif principal :

Analyser les articles de journaux parus sur la « question anglophone » pendant la période de la célébration du cinquantenaire de la réunification du Cameroun pour comprendre comment est perçue cette question par la presse écrite locale.

- Objectif secondaire 1 :

Comprendre le processus de construction médiatique qui a abouti à la médiatisation de la « question anglophone » dans la presse écrite locale.

- Objectif secondaire 2 :

Procéder à l'exploitation des personnes ressources pour desceller les modalités d'apparition de la « question anglophone » dans l'agenda des médias.

4- CORPUS DE L'ÉTUDE :

Notre corpus est soumis au respect de quatre règles16 : la règle de l'exhaustivité, la règle de la représentativité, la règle de l'homogénéité et la règle de la pertinence. Dans l'optique du respect scrupuleux de ces règles, nous avons sélectionné des quotidiens d'informations générales avec comme premier critère de choix l'ancienneté. Le second critère est la structuration et l'organisation. Nous avons choisi des tabloïdes 17 dont les archives sont disponibles et qui possèdent une organisation pyramidale avec une certaine lisibilité dans la

16Bardin L, L?analyse de contenu, Presse Universitaire de France, Paris, 1977, Page 127

17 Le format tabloïde est un format de journal qui correspond à la moitié des dimensions d'un journal traditionnel. Son format plié est 11 pouces X 17 pouces, soit 280 mm X 430 mm. Ce type de format est né en Grande-Bretagne, où il a longtemps été réservé à la presse populaire voire « de caniveau ». Le format tabloïde a en effet pour avantages non seulement d'être plus aisément manipulable, mais aussi d'attirer davantage les jeunes lecteurs, avec un contenu souvent allégé.

13

La médiatisation de la « question anglophone » dans les journaux camerounais pendant la célébration du cinquantenaire de la réunification du Cameroun.

répartition des rôles. Pour respecter les règles de l'exhaustivité et de l'homogénéité, nous avons opté pour trois (3) journaux parmi lesquels : un journal « bilingue » ou à vocation bilingue, un journal francophone et un d'obédience anglo-saxonne.

Cameroon Tribune : C'est le quotidien18 national gouvernemental basé à Yaoundé et qui se veut bilingue. Il est édité par la SOPECAM et son Directeur de Publication est Marie Claire Nnana. Il existe depuis 1974 : c'est-à-dire qu'il a 42 ans d'âge. Il est le quotidien qui bénéficie du plus grand nombre de tirages par jour. En effet, selon les chiffres obtenus à la Délégation Régionale de la Communication pour le Littoral, Cameroon Tribune tire 20 000 exemplaires par jour et est vendu en moyenne à 3500 exemplaires par jour dans la Région du Littoral, lorsqu'on comptabilise aussi ses abonnés. Ce quotidien a déjà dépassé le cap du onze millième numéro. Sa ligne éditoriale est pro-gouvernementale et ses archives sont consultables en version papier et numérique.

Le Messager est un quotidien d'informations générales privé francophone basé à Douala et qui appartient au Free Media Group. Il a été fondé le 17 novembre 1979 par Pius Njawe de regrettée mémoire. Il bénéficie de 37 années d'ancienneté dans le métier. Son actuel Directeur de Publication est Frédéric Boungou. Il vend en moyenne 2000 à 3000 exemplaires de journaux par jour dans la Région du Littoral. Nous sommes certes loin des 5000 exemplaires par jours vendus par Le quotidien de l'économie journal thématique ; mais son caractère généraliste, son ancienneté, sa notoriété, sa structuration, son organisation, la disponibilité de ses archives en format papier, sa posture de critique perpétuel et son traitement régulier de « la question anglophone » lui confèrent un certain poids. En novembre 2014, Le Messager était rendu à son numéro 4200. La Nouvelle expression de Sévérin Tchounkeu au numéro 3800, Le jour de Haman Mana n'était qu'au numéro 1800 et Mutations de Xavier Messe au numéro 3790 ; ce qui atteste encore de son ancienneté et de sa régularité. Ce quotidien se caractérise par sa liberté de ton et son caractère quelque peu « subversif » par moment. Il est l'un des quotidiens privés francophones qui traite le plus régulièrement de la « question anglophone ».

The Cameroon Post qui a existé début des années 1990, devenu The Post depuis le 11 juillet 1997, c'est-à-dire depuis 19 ans, est un journal anglo-saxon basé à Bondoma à Buéa. Son actuel Manager est Innocent Mbunwe. A la différence des autres journaux anglo-saxons

18Selon l'UNESCO un quotidien est un journal qui parait au moins quatre fois par semaine.

14

La médiatisation de la « question anglophone » dans les journaux camerounais pendant la célébration du cinquantenaire de la réunification du Cameroun.

comme : Chronicles (rendu au numéro 409), Life Time (rendu au numéro 109), Guardian Post (rendu au numéro 689), The star (rendu au numéro 389), The Median, Eden (rendu au numéro 88), Cameroon herald (rendu au numéro 88), Watchdog tribune, The post était déjà rendu à son numéro 1587 en Novembre 2014. Ce qui atteste largement de l'ancienneté de ce journal. Selon l'article 26 alinéa b1 de la recommandation révisée de l'organisation des nations unies pour l'éducation, la science et la culture, émanant de la conférence générale de l'UNESCO qui a eu lieu dans la ville de Sofia le 9 novembre 1985, concernant la normalisation internationale des statistiques relatives à la production et à la distribution de livres, de journaux et de périodiques : « un quotidien est un journal qui parait au moins 4 fois par semaine ». Partant de ce postulat, aucun journal anglo-saxon camerounais ne pourrait être considéré comme un quotidien vu que les journaux majeurs que sont The Post et The Guardian Post paraissent respectivement 2 et 3 fois par semaine. Certes les journaux qui paraissent 2 à 3 fois par semaine sont considérés comme des « non quotidiens » par l'UNESCO qui les a classifiés. Mais ils ne sont pas non plus considérés comme des hebdomadaires. The Post est basé à Buéa lieu de célébration du cinquantenaire de la réunification et évènement autour duquel gravite notre recherche ; tandis que The Guardian Post comme Cameroon Tribune est situé à Yaoundé ville réputée très politisée. Pour effectuer une étude scientifique, respecter les règles de la pertinence et de la représentativité il serait plus judicieux dans notre recherche, de travailler avec un journal anglophone situé dans la zone anglo-saxonne dans l'optique de réduire au maximum toute forme d'interaction.

Notre corpus est composé au final de : Cameroon Tribune (quotidien à capitaux publics, bilingue, basé à Yaoundé), Le Messager (quotidien privé, francophone, basé à Douala) et The Post (journal privé, en langue anglaise, basé à Buéa).

5- CADRE MÉTHODOLOGIQUE :

Ce travail s'inscrit dans le champ de la communication médiatique. Notre démarche consiste d'une part à analyser les articles de journaux parus sur la « question anglophone » et à comprendre le processus de construction médiatique qui a abouti à la médiatisation de la « question anglophone » dans la presse écrite locale ; D'autre part à procéder à l'exploitation des personnes ressources pour desceller les modalités d'apparition de la « question anglophone » dans l'agenda des médias.

15

La médiatisation de la « question anglophone » dans les journaux camerounais pendant la célébration du cinquantenaire de la réunification du Cameroun.

5.1- MÉTHODE DE RECHERCHE:

Nous allons utiliser l'analyse de contenu et la méthode inductive avec la technique d'inférence statistique. Elle permettra l'observation, l'analyse, l'interprétation et la généralisation. Une première approche qualitative rendra possible : l'analyse de la titraille, de la mise en pages, du choix des illustrations, des figures de style, des angles de traitement, des champs lexicaux, des genres journalistiques et l'analyse de l'argumentation. Une seconde approche quantitative nous permettra d'obtenir des données chiffrées sur notre recherche. Un logiciel nous facilitera le traitement de ces données. La technique comparative nous permettra de confronter les données recueillis à partir du journal anglophone, du journal francophone et du journal bilingue choisis dans notre corpus, de repérer les constantes et les divergences dans le discours de ces journaux sur la « question anglophone ».

Pour mener à bien nos travaux, nous allons collecter, traiter, analyser et interpréter les données recueillies sur le terrain.

5.2- COLLECTE :

Pour collecter les données sur le terrain, nous utiliserons les outils de collecte suivants :

La grille d'observation comportant : le nom du journal, la date de création du journal, le jour et la date de parution de l'article, le titre de l'article, la page de l'article dans le journal, la rubrique de l'article, le genre journalistique auquel il appartient et le nom de l'auteur de l'article.

Le guide d'entretien : Il comprendra une dizaine de questions. Il a été conçu sous forme de questions à choix multiples pour diminuer de manière considérable, le temps de l'entretien, les personnes ressources n'ayant pas beaucoup de temps à consacrer aux enquêtes. Ce guide d'entretien nous permettra d'interroger une dizaine de personnes ressources parmi lesquels des hommes politiques et des journalistes.

- ÉCHANTILLONNAGE :

En accord avec notre problématique, nos objectifs, nos hypothèses et la délimitation de notre sujet, notre échantillon sera constitué de journalistes dans une large mesure pour comprendre les stratégies de construction médiatique et d'hommes politiques dans une moindre mesure pour vérifier des éventuelles interactions entre l'agenda des médias et le

16

La médiatisation de la « question anglophone » dans les journaux camerounais pendant la célébration du cinquantenaire de la réunification du Cameroun.

calendrier politique. Nous allons utiliser la proportion 80/20 (80% de journalistes et 20% d'hommes politiques) pour coller à la réalité sociologique et au découpage administratif du Cameroun qui compte 10 Régions dont 08 sont francophones et 02 seulement sont anglophones. Nous avons choisi un échantillon représentatif constitué de 10 personnes ressources. En ce qui concerne la langue officielle parlée nous avons choisis d'interroger 08 francophones et 02 anglophones. Sur la question genre nous aurons 02 femmes et 08 hommes (les femmes étant supposées à tort ou à raison s'intéresser un peu moins aux questions politiques au Cameroun) ; En ce qui concerne la catégorie professionnelle 02 hommes politiques et 08 journalistes (notre travail étant une thématique aux relents politiques et que nous aborderons dans le champ de la communication médiatique).

- LES PERSONNES RESSOURCES :

Les personnes ressources sont celles avec qui nous avons eu des entretiens après notre descente sur le terrain et qui nous ont fournies des informations utiles pour rédiger notre mémoire. Nous avons choisi premièrement des cadres dans les différents journaux de notre corpus qui ont d'une manière ou d'une autre travaillé sur la « question anglophone »: Blaise Pascal Dassie (REC du Messager), Armand Essogo (Directeur Régional SOPECAM/Littoral), Innocent MBOUNWE (Manager de The Post). Ensuite nous avons complété notre liste avec des jeunes journalistes dans un souci de neutralité et de pertinence : Lucienne Wouassi (La Nouvelle Expression), Yaboa Ndula (Cameroon Tribune), Emmanuel Yimga (DP de l'Ouragan Indépendant), Henri Franck Log Gwet (MINCOM), Serge KWIN (MINCOM) et enfin nous avons sélectionné deux hommes politiques un jeune et un plus ancien connus pour leur pertinence et leur franc parler : Franck ESSI (CPP) et Anicet Ekane (MANIDEM).

5.3- TRAITEMENT :

La recherche documentaire nous aidera à traiter les données qualitatives. Nous allons effectuer des opérations statistiques simples, élaborer des indices et calculer les fréquences pour traiter les données quantitatives. L'analyse de contenus de Laurence Bardin nous servira d'outil de traitement du discours de la presse écrite. Le logiciel de traitement de données Sphinx plus 2 nous sera utile dans le traitement des données recueillies à partir de la grille d'entretien. Il nous permettra de construire des tableaux pour l'interprétation facile de nos résultats.

17

La médiatisation de la « question anglophone » dans les journaux camerounais pendant la célébration du cinquantenaire de la réunification du Cameroun.

5.4- ANALYSE ET INTERPRÉTATION :

Après avoir obtenu des données brutes, nous allons procéder à une synthèse et une sélection de nos résultats. Ces résultats seront soumis à des épreuves statistiques et à des tests de validité. Ils nous permettront d'étudier chaque observation pour en dégager des constats pertinents par rapport au problème de recherche. Nous allons de ce fait vérifier nos hypothèses de départ. Les résultats significatifs et fiables ainsi obtenus, nous pourrons alors proposer des inférences et avancer des interprétations par rapport aux objectifs prévus ou à d'autres découvertes imprévues.

6- CADRE THÉORIQUE:

Ce travail s'appuiera sur trois théories : les théories de la perception, la théorie de l'argumentation et celle de l'agenda setting.

- Les théories de la perception :

Les sciences de l'information et de la communication en tant que discipline transversale ont emprunté les théories de la perception à la psychologie sociale. Bernard Miège et Yves de la Haye ont mis en lumière la perspective de la pluralité de perceptions de l'espace public en travaillant sur le concept des relations publiques généralisées. Les théories de la perception ont pour précurseur la théorie de Reid et les théories nativistes et pour auteurs contemporains Konrad Lorenz et Nikolaas Timbergen. Ils posent pour postulat que toute communication entre individus a pour base la perception. Pour les nativistes, la perception peut être comprise comme une représentation et une compréhension de quelque chose par l'esprit. Ici les caractéristiques du style perceptif sont liées à la structure héréditaire du système nerveux. Pour les empiristes, la perception n'est pas un phénomène passif. Pour eux, dans toute perception, il y a action, acte perceptif, au cours duquel nous structurons le monde, nous attendons quelque chose, d'où la notion de « set » ou attente ou cadre interprétatif prédéfini. Notre perception est donc déterminée par un ensemble de facteurs innés et acquis liés à la structure du système nerveux qui sont héréditaires et en rapport avec des structures motrices. Cette théorie nous permettra de comprendre comment la presse locale elle-même perçoit la « question anglophone » dans un pays comme le Cameroun avec une variété de culture, de groupes humains, de catégories d'âges, de sexes, de classes sociales et de ce fait de cadres de

18

La médiatisation de la « question anglophone » dans les journaux camerounais pendant la célébration du cinquantenaire de la réunification du Cameroun.

référence. Cette perception est liée à des clichés ou à des stéréotypes sociaux. D'où le problème de la distanciation entre le sujet et l'objet.

- La théorie de l'argumentation :

Le modèle argumentatif est principalement basé sur la construction d'arguments et de contre-arguments, la définition d'une relation d'attaque entre arguments, la comparaison d'arguments et la sélection d'arguments jugés acceptables. Cependant, l'argumentation ne se résume pas seulement à l'exposition du cheminement argumentatif et à l'étude d'une stratégie argumentative. D'ailleurs parler et communiquer ne sont pas des actes si simples que cela. Un seul énoncé peut donner lieu à diverses interprétations et significations. L'argumentation suppose aussi un langage, un émetteur et un récepteur. A travers l'étude des stratégies éditoriales de la presse locale sur la « question anglophone », cette théorie nous permettra de repérer et d'analyser les différents arguments utilisés par les journaux camerounais. Elle nous permettra également de desceller les différentes manoeuvres de captation de l'audience utilisées par les quotidiens.

- La théorie de l'agenda-setting :

L'effet d'agenda désigne l'influence que les médias exercent sur la définition des problèmes considérés comme les plus importants dans la société et appelant une intervention des pouvoirs publics. Traditionnellement, pour mesurer l'effet d'agenda des médias sur les lecteurs, on étudie d'abord l'agenda des médias, c'est-à-dire les problèmes que les médias privilégient19. Puis on étudie l'agenda des lecteurs, c'est-à-dire les problèmes que ceux-ci considèrent comme les plus importants20. Enfin, on compare les deux agendas en s'efforçant de repérer une relation entre eux21. » Dans le cadre des études d'agenda setting, les médias nous disent non pas ce qu'il faut penser, mais à quoi il faut penser ; ils jouent le rôle d'un « maître de cérémonie » ou encore d'un tableau d'affichage sur lequel viendraient s'inscrire les problèmes qui doivent faire l'objet du débat dans une société. La théorie de l'agenda setting

19Par exemple en analysant les unes et titres principaux des quotidiens, ou les sujets présentés dans les JT. 20Par exemple à travers des enquêtes par sondage.

21Par exemple, l'inscription d'un problème sur l'agenda médiatique est suivie quelque temps plus tard par l'apparition de ce problème dans l'agenda des électeurs.

19

La médiatisation de la « question anglophone » dans les journaux camerounais pendant la célébration du cinquantenaire de la réunification du Cameroun.

pourrait nous servir dans le cadre de notre travail pour comprendre le processus qui aboutit à l'apparition de la « question anglophone » dans l'agenda des médias.

7- INTÉRÊT DU SUJET :

L'intérêt de ce sujet réside sur le plan scientifique. Ce travail qui s'inscrit dans le champ de la communication médiatique nous permettra de faire des recherches sur les récits médiatiques et sur l'analyse de contenus. Nous nous pencherons sur le processus de construction médiatique, les stratégies éditoriales de la presse écrite, les manoeuvres de captation de l'audience, les interactions dans les médias. Mais aussi sur le plan historique : Il nous ramènera à la genèse et à l'évolution de la « question anglophone » au Cameroun et sur le plan politique : ce travail nous conduira à nous intéresser au multipartisme des années 90 et à la célébration du cinquantenaire de la réunification.

8- DÉLIMITATION DU SUJET :

Notre étude porte sur la médiatisation de la « question anglophone » dans les journaux camerounais pendant la célébration du cinquantenaire de la réunification du Cameroun. La période de la célébration du cinquantenaire de la réunification du Cameroun est l'espace-temps autour duquel gravite notre recherche. Nous allons nous situer dans nos travaux : avant, pendant et après cet important évènement qui a eu lieu en février 2014 dans la ville de Buéa. Le but étant de savoir comment les journaux camerounais perçoivent et ont traité cette question depuis ce tournant historique.

9- PLAN DETAILLÉ :

Notre étude est structurée en quatre chapitres : Le chapitre premier qui a pour titre 'la « question anglophone » au Cameroun' a pour but de nous plonger dans les généralités sur « la question anglophone ». Nous y abordons l'origine de cette question et la perception de la notion d'anglophone au Cameroun. Ensuite nous intéressons aux termes en lesquels se pose la « question anglophone » au Cameroun en nous fondant sur les avis recueillis sur le terrain lors de notre descente sur le terrain, notamment en termes de revendication politique et de repli identitaire.

Le deuxième chapitre s'intitule 'le cinquantenaire de la réunification du Cameroun'. Ici nous faisons un flash-back historique en nous arrêtant sur les prémices de la réunification du Cameroun. Nous revisitons le consensus de Bamenda qui a eu lieu avant la conférence

20

La médiatisation de la « question anglophone » dans les journaux camerounais pendant la célébration du cinquantenaire de la réunification du Cameroun.

constitutionnelle de Foumban et a jeté les bases de la réunification du Cameroun. Ensuite nous nous intéressons au déroulement du cinquantenaire de la réunification du Cameroun qui s'est tenu à partir du 17 février 2014. Nous relatons les préparatifs et les festivités de cet évènement historique.

Le troisième chapitre intitulé stratégies de construction de la « question anglophone » dans les journaux camerounais' nous permet d'entrer de plein pied dans l'analyse de contenus des récits médiatiques. Grâce à l'approche qualitative nous avons repéré dans les journaux soumis à notre étude, les manoeuvres de captation de l'audience propres aux journaux camerounais, les stratégies de mise en page, les angles de traitement, la titraille, les illustrations. Nous nous intéressons aussi aux stratégies de mise en discours en identifiant les figures de styles, les arguments, les genres journalistiques et les champs lexicaux.

Enfin nous aborderons le quatrième chapitre dont le titre est Analyse quantitative de la « question anglophone ». C'est ici que nous procédons à l'exploitation de notre matériel de travail à l'aide des opérations de codage, nous enregistrons les données du logiciel Sphinx 2 Plus qui nous permet de réaliser des tableaux et de traiter nos données recueillies sur le terrain. Par la suite nous entamons l'analyse et l'interprétation des résultats obtenus sur le terrain.

CHAPITRE I:

LA « QUESTION ANGLOPHONE » AU CAMEROUN

21

La médiatisation de la « question anglophone » dans les journaux camerounais pendant la célébration du cinquantenaire de la réunification du Cameroun.

22

La médiatisation de la « question anglophone » dans les journaux camerounais pendant la célébration du cinquantenaire de la réunification du Cameroun.

Au rang des débats qui ont eu court au Cameroun et qui sont toujours d'actualité dans les espaces publics au sens d'Habermas22, l'on peut énumérer : l'harmonisation du système éducatif avec de nos jours, la montée du bilinguisme et la création des classes de 3e, seconde, première et terminale bilingues. En mars 1993, parlant du bilinguisme à la camerounaise le quotidien Le Messager titrait : «...les anglophones doivent étudier le français pendant que les francophones se détendent 23». L'on peut citer également parmi les grands débats actuels, l'harmonisation du système judiciaire au Cameroun qui connait une cohabitation incestueuse entre le droit civil, la Common Law et le droit coutumier. D'ailleurs l'absence de version anglaise du traité OHADA a récemment suscité une grève des avocats anglophones. De plus, le projet de loi n°989/PJL/AN portant code pénal au Cameroun est contesté par l'ordre des avocats qui demande le retrait de ce texte pour plusieurs motifs dont l'un des principaux se trouve être : « le défaut de concordance entre les versions française et anglaise du texte qui ne peuvent que produire des interprétations et applications divergentes d'une même loi, entrainant ainsi une aggravation de l'insécurité juridique et judiciaire »24. Pour Louis Marie Nkoum-Me-Ntseny, dans dynamique de positionnement anglophone et libéralisation politique au Cameroun : de l?identité à l?identification, au-delà des problèmes « Bamiléké », « Kirdi », et « Béti » qui ont été théorisés au Cameroun, il existe un problème « anglophone » qui est non négligeable. Il nous revient dans notre étude d'aborder les généralités sur la « question anglophone » et d'étudier les termes en lesquels se pose la question anglophone au Cameroun.

I- GÉNÉRALITÉS SUR « LA QUESTION ANGLOPHONE »

Pour appréhender « la question anglophone » nous devons dans un premier temps comprendre l'origine de ce problème en faisant un rappel historique. La compréhension de la perception de la notion d'anglophone au Cameroun serait également un atout indéniable dans cette optique.

22L'espace public au sens d'HABERMAS, la catégorie idéale, typique et historique est celle de l'espace public bourgeois.

23Le Messager, 8 mars 1993

24Propos de Ngnié Kamga, La Nouvelle Expression n°4250 du vendredi 17 juin 2016, article projet de code pénal : l'ordre des avocats demande le retrait du texte.

23

La médiatisation de la « question anglophone » dans les journaux camerounais pendant la célébration du cinquantenaire de la réunification du Cameroun.

sommaire suivant






Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy








"Il faudrait pour le bonheur des états que les philosophes fussent roi ou que les rois fussent philosophes"   Platon